Volume XVII/1 - Congrès ESKA
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18 MUSURGIA<br />
une même unité conceptuelle des phénomènes acoustiques différents, en fonction<br />
d’une « marge de tolérance » culturellement définie, et d’autre part l’hypothèse<br />
d’une activité cognitive permettant de développer des schémas de base par divers<br />
procédés et inversement de réduire les séquences réalisées à ces schémas de base.<br />
Cette activité serait nécessitée par la capacité limitée de la mémoire de travail qui,<br />
sans cette réduction, serait rapidement surchargée d’informations et incapable<br />
d’élaborer des représentations efficaces. Cette proposition, largement testée<br />
expérimentalement (et dans divers domaines), justifie l’analyse réductionnelle.<br />
De nombreuses théories ont été élaborées pour rendre compte de ces structures<br />
et de ces processus. Des études expérimentales ont été menées pour valider<br />
certaines hypothèses. Pourtant, les perspectives développées ont été marquées par le<br />
poids des techniques et des théories compositionnelles de la musique savante<br />
occidentale moderne, qui ont initialement servi de base à l’élaboration du cadre de<br />
pensée qui sous-tend le champ d’étude. Cette origine a notablement infléchi les<br />
notions qui balisent ce cadre dans le sens des questionnements et des<br />
positionnements esthétiques qui ont accompagné cette production savante,<br />
particulièrement au XX e siècle. La confrontation avec les systèmes européens<br />
anciens ou populaires et avec les systèmes non européens a parfois conduit, pour<br />
diverses raisons, à une rupture entre l’étude du système savant normalisé de<br />
l’Occident moderne (que j’appellerai système « harmonico-tonal ») et celle des<br />
« autres » systèmes, définis comme en négatif du premier. L’absence d’un<br />
consensus terminologique sur les principales notions qui permettent de décrire et<br />
d’analyser les processus musicaux est résultée de cet état de fait. Cette situation<br />
rend très problématique tout effort de théorisation générale du phénomène musical,<br />
pourtant nécessaire à une meilleure compréhension de ces différents champs.<br />
Ainsi, l’objectif de cette contribution est, pour ce qui est des dimensions<br />
musicales fondées sur les hauteurs discrètes, d’esquisser un champ notionnel qui<br />
participe au dégagement de mécanismes très généraux permettant d’intégrer l’étude<br />
du système de la musique savante occidentale à une vision plus large des systèmes<br />
musicaux, ou, pour le moins, de réduire les barrières conceptuelles entre les champs<br />
susdits. Le processus mélodique y jouera le rôle principal, par la fonction première<br />
qu’il paraît prendre dans le processus de « musicalisation » du monde sonore. Cet<br />
objectif s’inscrit dans le projet général d’élaboration d’une perspective bioanthropo-musicologique<br />
4 .<br />
La méthode est à la fois théorique et analytique. Une première partie propose<br />
une définition élargie et non conventionnelle des principales notions permettant de<br />
rendre compte de l’organisation du domaine des hauteurs discrètes par le processus<br />
mélodique. Trois principes d’organisation sont suggérés : tonalité, harmonie,<br />
4 Pour un aperçu de cette perspective, voir notamment : Steven BROWN, Björn MERKER et Nils L.<br />
WALLIN, « An Introduction to Evolutionary Musicology », The Origins of Music, N. L. Wallin, B.<br />
Merker et S. Brown éd., Cambridge (Mass.), London, The MIT Press, 2000, p. 271-300 ; Simha AROM,<br />
« Prolegomena to a Biomusicology », Ibid., p. 27-29 ; Jean-Luc LEROY, « Musical universals :<br />
epistemological and methodological considerations », Musical Universals : Data, Challenge, Horizons,<br />
J.-L. Leroy (éd.), à paraître.