25.06.2013 Views

John Paul Lepers - Dokhandeme - Alain Platel - Michel Raskine - 491

John Paul Lepers - Dokhandeme - Alain Platel - Michel Raskine - 491

John Paul Lepers - Dokhandeme - Alain Platel - Michel Raskine - 491

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Jean-Marc<br />

Avocat<br />

[théâtre(s)]<br />

“Un vers, ça va. 4 800…”<br />

On revient d’une représentation de Bérénice, d’Andromaque ou de Phèdre pantelant, essoufflé. Ou plutôt<br />

on n’en revient pas. Comment ne pas être admiratif pour cet homme qui, seul, tient la scène pendant<br />

près de 2 heures, 3 fois, avec des textes parmi les plus exigeants de la littérature classique ?<br />

C’est, explique Jean-Marc Avocat, “un rendez-vous unique dans une carrière”. Il lance, en effet, le pari de<br />

jouer seul tous les rôles de 3 pièces de Racine. Et le culot sera pour lui de pousser jusqu’à jouer les trois,<br />

en alternance, durant la même semaine. Les premières minutes, il faut tout de suite le dire, surprennent.<br />

Voire elles dérangent. Car enfin, comment croire en cette Phèdre ma foi très virile, ou bien est-ce l’irrésistible<br />

Hyppolite ? Est-ce Andromaque, veuve d’Hector, qui parle, ou sa rivale Hermione ? Le comédien a créé<br />

un code de scène fort simple, le spectateur attentif ne tarde pas à le comprendre. D’un mouvement de<br />

tête, d’un geste ou d’un pas, il nous signifie le changement de personnage. C’est moins subtil qu’on ne<br />

pourrait le craindre, cela devient vite évident. Alors, toute l’ampleur d’une tragédie de Racine, l’alexandrin<br />

à son plus haut degré de maîtrise et touchant, à vrai dire, au sublime, prend possession de Jean-Marc<br />

Avocat et du spectateur. Il joue chaque partition avec tant de foi, les rôles de femmes, par exemple, dont<br />

il a voulu “épouser les ressentis” au plus juste. Il faut le voir, en larmes, les yeux injectés de sang pendant<br />

les 2 derniers actes d’Andromaque !<br />

La mise en scène est à l’image du jeu, nue, ou presque. Un fauteuil au centre, un autre au fond, comme<br />

au coin d’un ring. Portion congrue aussi pour les accessoires : une serviette éponge, une gourde… Entre<br />

les actes, le comédien va souffler 5 minutes, mais il le fait sur scène : “Il était impossible d’imaginer en<br />

sortir, de toute façon.” C’est donc un homme qui se risque devant nous, “à poil”, comme il dit. Un artiste<br />

qui retrouve chaque jour la jubilation du verbe génial de Racine et, cherchant à ce que la restitution du texte,<br />

le jour de la représentation, ne lui demande aucun effort de mémoire, répète et répète encore, d’italienne<br />

en italienne.<br />

À la question d’un jeune lycéen, il répondait qu’il n’a aucun truc, pour se souvenir de tant de vers, si ce<br />

n’est “un travail patient et acharné”. Mais, ajoute-t-il, “je mesure la montagne qui se dresse devant moi,<br />

chaque jour”. Cette montagne est son trac, qu’il qualifie de “névrotique”. L’exploit est à vrai dire palpable<br />

physiquement. Sans grands effets de manches, il n’arpente pas non plus la scène pendant 2 heures, pourtant,<br />

jamais il ne s’économise et il atteint, par exemple dans Andromaque, des summums d’intensité. Les bravos,<br />

monsieur Jean-Marc Avocat, sont chaque fois frénétiques, et mérités.<br />

Du 24 février au 1er mars au Théâtre de la Croix-Rousse, 04 72 07 49 49<br />

Étienne Faye<br />

©Bruno Amsellem<br />

...<strong>491</strong> / N° 143 FÉVRIER 2009<br />

[13]

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!