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Un frisson désagréable parcourut Finard. Qu'est-ce qui lui prenait, à ce Coquet toujours si impeccable,<br />
si réservé ? Il s'approcha et sa bouche s'assécha instantanément. L'autre s'était débraillé, il tenait à <strong>de</strong>ux<br />
mains son sexe dressé et, à la seule lumière vacillante <strong>de</strong>s guirlan<strong>de</strong>s, Finard vit qu'il souriait sous son<br />
bonnet <strong>de</strong> Père Noël.<br />
— Alors ? dit-il encore. Tu es content ? Tiens ! Il<br />
leva le menton, plissa les paupières, cligna comme<br />
pour une plaisanterie complice. Tu vois, tout y est :<br />
yeux malicieux, et puis... celle-là ! Il plongea du<br />
regard vers l'objet qui montait à sa rencontre.<br />
Celle-là qui brille, comme tu voulais, bien tendue,<br />
elle t'attend. Tu veux la sucer ?<br />
Les prunelles <strong>de</strong> Finard évaluèrent à toute vitesse les possibilités d'évasion. Tout avait été verrouillé,<br />
ils étaient seuls, dans l'ombre, insoupçonnables. Le fou poursuivit :<br />
— N'est-ce pas ? Fraîcheur, fantaisie et disponi<br />
bilité ! Tout ce que tu aimes !<br />
Finard crut à une vengeance, l'expression démesurée d'une rancune accumulée et qu'on allait lui faire<br />
payer cher. Il restait là, sidéré, les bras ballants, avec un tambour dans la poitrine.<br />
— Timi<strong>de</strong>, le chef <strong>de</strong> centre ? ironisa le dingo.<br />
Faut pas, mon gars ! Viens-là, viens voir le Père<br />
Noël.<br />
Finard fit <strong>de</strong>ux pas en avant, absur<strong>de</strong>ment, incapable d'imaginer une para<strong>de</strong>, ou même une simple<br />
réponse. La scène prenait <strong>de</strong>s allures oniriques, il ne s'agissait même pas d'un cauchemar, plutôt un <strong>de</strong> ces<br />
rêves loufoques, presque drôles, où les événe-<br />
ments semblent si loin <strong>de</strong>s lois ordinaires, et les gens si différents <strong>de</strong> ce qu'ils sont dans la réalité. Gilbert<br />
Coquet avec son bonnet <strong>de</strong> Père Noël et sa bite à l'air, c'était ça, c'était un rêve fou, un moment hors du<br />
temps, totalement déconnecté du cadre usuel <strong>de</strong>s préoccupations pr<strong>of</strong>essionnelles. D'ailleurs, les murs<br />
avaient disparu, les meubles, les tableaux récapitulatifs, le casier du triage, plus rien n'existait qu'un<br />
grand sapin illuminé, un bonnet rouge et une grosse queue farouche qu'on lui présentait comme un sucre<br />
d'orge à lécher. Du plus saugrenu du songe, le Père Noël insista :<br />
— Approche encore, n'aie pas peur !<br />
Finard sentit ses pieds échapper à son contrôle, exécuter <strong>de</strong>ux nouveaux pas, puis il s'immobilisa <strong>de</strong><br />
nouveau, <strong>de</strong>bout, figé, presque à toucher les genoux <strong>de</strong> l'exhibitionniste, qui le gronda gentiment.<br />
— Eh bien ? Elle ne te plaît pas ?<br />
— Si ! répondit Guy-Charles. Et il ne mentait pas.<br />
Il a fermé les yeux avant <strong>de</strong> la toucher. Puisqu'il rêvait, autant prolonger le sommeil, serrer les<br />
paupières et voir comment le rêve se terminerait. Une sorte <strong>de</strong> curiosité insensée.