Les manœuvres de recrutement alvéolaire au cours ... - reannecy.org
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34 J.M. Constantin et al. / Réanimation 13 (2004) 29–36<br />
L’efficacité <strong>de</strong>s MRA s’explique par la levée du collapsus<br />
<strong>alvéolaire</strong> initié soit par les forces <strong>de</strong> compression<br />
externes, soit par les atélectasies <strong>de</strong> résorption. Or, il<br />
coexiste <strong>au</strong> sein du poumon <strong>de</strong>s patients atteints <strong>de</strong> SDRA,<br />
<strong>de</strong>s zones caractérisées par la perte <strong>de</strong> gaz et d’<strong>au</strong>tres où<br />
siège un œdème <strong>alvéolaire</strong> majeur [37]. La formation <strong>de</strong> cet<br />
œdème <strong>alvéolaire</strong> résulte pour partie d’une altération <strong>de</strong> la<br />
clairance <strong>alvéolaire</strong>. <strong>Les</strong> mécanismes actifs <strong>de</strong> résorption<br />
<strong>de</strong> l’œdème sont influencés par le mo<strong>de</strong> ventilatoire [14].<br />
Dans ce travail, l’équipe <strong>de</strong> Matthay a montré que la réduction<br />
du Vt entraînait une élévation <strong>de</strong> la clairance <strong>alvéolaire</strong>.<br />
D’après les <strong>au</strong>teurs, la protection <strong>de</strong> l’épithélium <strong>alvéolaire</strong><br />
par cette stratégie ventilatoire est à l’origine <strong>de</strong> la résorption<br />
<strong>de</strong> l’œdème. Dans un travail mené chez 11 patients en<br />
SDRA [10], nous avons montré que l’application d’une<br />
MRA entraîne, chez les répon<strong>de</strong>urs, une diminution <strong>de</strong><br />
l’œdème. Il est probable qu’en diminuant les cycles ouverture–fermeture<br />
<strong>au</strong> nive<strong>au</strong> <strong>alvéolaire</strong>, les MRA permettent<br />
une résorption active <strong>de</strong> l’œdème pulmonaire. Chez les non<br />
répon<strong>de</strong>urs, l’application d’une MRA entraîne une diminution<br />
<strong>de</strong> la clairance <strong>alvéolaire</strong>. L’explication pourrait être,<br />
comme le montrent les trav<strong>au</strong>x <strong>de</strong> Malbuisson et al. [26],<br />
que chez les patients présentant une atteinte pulmonaire <strong>de</strong><br />
type lobaire, l’<strong>au</strong>gmentation <strong>de</strong> la PEP entraîne une distension<br />
<strong>de</strong>s territoires normalement ventilés avec un dé<strong>recrutement</strong><br />
dans les zones p<strong>au</strong>vrement aérées.<br />
6.3. Tolérance <strong>de</strong>s MRA<br />
Même si elles sont efficaces chez certains patients et<br />
semblent assez bien tolérées, les MRA ne sont pas dénuées<br />
<strong>de</strong> risques. <strong>Les</strong> effets secondaires les plus courants sont une<br />
altération <strong>de</strong>s conditions hémodynamiques globales ainsi<br />
qu’une désaturation. Certains <strong>au</strong>teurs ont rapporté récemment<br />
une moins bonne tolérance <strong>de</strong>s MRA chez les patients<br />
non répon<strong>de</strong>urs à ces <strong>manœuvres</strong> [17]. Claesson et al. [11]<br />
ont récemment évalué l’effet <strong>de</strong> trois MRA (35, 40 et<br />
44 cmH 2O) sur le débit cardiaque et la perfusion <strong>de</strong> la<br />
muqueuse gastrique chez 14 patients en SDRA. <strong>Les</strong> <strong>au</strong>teurs<br />
ont pu montrer une diminution significative du débit cardiaque<br />
à chaque MRA, alors que la pression artérielle<br />
moyenne ne diminuait que pour la pression la plus élevée.<br />
La perfusion gastrique n’était pas significativement diminuée<br />
même en comparant les données avant la première et<br />
après la troisième MRA. La tolérance <strong>de</strong>s MRA chez les<br />
patients neurochirurgic<strong>au</strong>x est encore très discutée. Bein et<br />
al. [4] ont montré que la réalisation d’une MRA entraînait<br />
une <strong>au</strong>gmentation <strong>de</strong> la pression intracrânienne et une<br />
baisse <strong>de</strong> la pression artérielle responsables d’une diminution<br />
<strong>de</strong> la pression <strong>de</strong> perfusion cérébrale <strong>de</strong> 72 ± 8 mmHg<br />
à 60 ± 10 mmHg. Dans le même temps, la saturation<br />
veineuse en O 2 passait <strong>de</strong> 69 ±6%à59±7%.Wolfetal.<br />
[44] ont étudié l’effet d’une stratégie « d’open lung »<br />
associant ventilation protectrice et MRA chez <strong>de</strong>s patients<br />
avec hypertension intracrânienne. Ils ne relevaient pas d’effet<br />
indésirable grave et seuls <strong>de</strong>ux patients avaient nécessité<br />
un traitement supplémentaire <strong>de</strong> l’hypertension intracrânienne<br />
après MRA, et <strong>au</strong>cun n’avait dû être exclu <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong><br />
pour intolérance. Il semble néanmoins que l’usage <strong>de</strong>s<br />
MRA en neurotr<strong>au</strong>matologie nécessite une surveillance <strong>de</strong><br />
plusieurs variables (pression intracrânienne, saturation veineuse<br />
jugulaire, pression <strong>de</strong> perfusion cérébrale...) et une<br />
pru<strong>de</strong>nce particulière.<br />
Le risque barotr<strong>au</strong>matique est réel. L’étu<strong>de</strong> canadienne<br />
[27] en <strong>cours</strong> <strong>de</strong> réalisation vise à optimiser le <strong>recrutement</strong><br />
en comparant l’algorithme <strong>de</strong> l’ARDS network vs <strong>de</strong> h<strong>au</strong>ts<br />
nive<strong>au</strong>x <strong>de</strong> PEP associés à <strong>de</strong>s <strong>manœuvres</strong> <strong>de</strong> <strong>recrutement</strong>.<br />
Ces <strong>manœuvres</strong> sont réalisées à l’ai<strong>de</strong> d’une CPAP <strong>de</strong><br />
35 cmH 2O pendant 20 secon<strong>de</strong>s et répétées <strong>de</strong>ux fois par<br />
jour. En l’absence d’efficacité évaluée sur l’<strong>au</strong>gmentation<br />
<strong>de</strong> la SaO 2 <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 3 % dans les cinq minutes qui suivent<br />
la manœuvre <strong>de</strong> <strong>recrutement</strong>, une nouvelle manœuvre est<br />
réalisée, toujours à l’ai<strong>de</strong> d’une CPAP, mais cette fois à<br />
45 cmH 2O pendant 40 secon<strong>de</strong>s. Dans le travail préliminaire<br />
qui incluait 28 patients, les <strong>manœuvres</strong> <strong>de</strong> <strong>recrutement</strong><br />
n’amélioraient pas significativement l’oxygénation.<br />
En revanche, <strong>de</strong>s effets secondaires ont été observés sous la<br />
forme <strong>de</strong> désynchronisation du ventilateur, d’épiso<strong>de</strong>s<br />
d’hypotension et <strong>de</strong> pneumothorax (4/28).<br />
Aucune étu<strong>de</strong> ne précise la nécessité ou l’intérêt d’une<br />
curarisation lors <strong>de</strong> ces <strong>manœuvres</strong>.<br />
7. Conclusion<br />
Dans les dix <strong>de</strong>rnières années, les étu<strong>de</strong>s tomo<strong>de</strong>nsitométriques<br />
ont permis <strong>de</strong> progresser significativement dans<br />
la compréhension <strong>de</strong> la physiopathologie du SDRA. <strong>Les</strong><br />
notions <strong>de</strong> dé<strong>recrutement</strong> et <strong>de</strong> <strong>recrutement</strong> <strong>alvéolaire</strong> sont<br />
plus claires permettant une approche thérapeutique peutêtre<br />
plus rationnelle <strong>de</strong>s patients atteints <strong>de</strong> SDRA. Il existe<br />
un grand nombre d’étu<strong>de</strong>s animales et humaines soutenant<br />
l’efficacité en termes d’oxygénation et <strong>de</strong> volume recruté<br />
<strong>de</strong>s MRA. Au <strong>de</strong>meurant, les quelques données dont nous<br />
disposons sur <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s randomisées et contrôlées sont<br />
décevantes. Trop d’incertitu<strong>de</strong>s persistent à ce jour. Quelle<br />
est la meilleure façon <strong>de</strong> recruter un patient ? Il existe <strong>de</strong>s<br />
pistes vers <strong>de</strong>s MRA adaptées <strong>au</strong>x caractéristiques physiopathologiques<br />
<strong>de</strong> chaque patient qui exploitent <strong>au</strong>tant le<br />
<strong>recrutement</strong> <strong>alvéolaire</strong> induit par la PEP que celui produit<br />
par l’insufflation du volume courant. L’étu<strong>de</strong> tomo<strong>de</strong>nsitométrique<br />
pourrait apporter <strong>de</strong>s réponses à ces questions en<br />
évaluant la part <strong>de</strong> <strong>recrutement</strong> <strong>alvéolaire</strong> et <strong>de</strong> distension<br />
pendant la MRA.<br />
À quelle fréquence réaliser les MRA ? Quels patients<br />
doivent bénéficier <strong>de</strong> quelles <strong>manœuvres</strong>, et à quel moment<br />
dans l’évolution du SDRA ? Il semble qu’une politique <strong>de</strong><br />
lutte active contre le dé<strong>recrutement</strong> soit nécessaire. <strong>Les</strong> c<strong>au</strong>ses<br />
<strong>de</strong> dé<strong>recrutement</strong> sont en effet nombreuses (aspirations<br />
trachéales, déconnexions intempestives du respirateur...) expliquant<br />
probablement l’inefficacité d’une à <strong>de</strong>ux MRA par<br />
jour.