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etude de cas sur la prostitution des jeunes femmes a ... - afesip

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

DIPLOME DE FORMATION CONTINUE<br />

EN ETUDES DU DEVELOPMENT<br />

DFD ANNEE ACADEMIQUE 2004-2005<br />

ETUDE DE CAS SUR LA PROSTITUTION DES<br />

JEUNES FEMMES<br />

A VIENTIANE ET A PAKSE (RDP LAO)<br />

Nom <strong>de</strong> l’étudiante : Mlle Phouvanh KHAMDAVONG<br />

Superviseur : Dr Pierre LE ROUX, AFESIP International<br />

Date : Juillet 2005<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

1. INTRODUCTION<br />

1.1. LA PROSTITUTION EN ASIE ET AU LAOS & LE TRAVAIL D’AFESIP<br />

1.1.1. La <strong>prostitution</strong> et ses conséquences dans les pays pauvres<br />

La <strong>prostitution</strong> a <strong>de</strong>s causes économiques…<br />

Selon le sociologue canadien Richard Pou<strong>la</strong>in (2003) dont nous nous inspirons<br />

très <strong>la</strong>rgement dans ce chapitre, certains auteurs considèrent que les causes <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> proviennent <strong>de</strong> conditions économiques déplorables (sousemploi,<br />

chômage, pauvreté). En conséquence, <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> et <strong>de</strong>s hommes<br />

déci<strong>de</strong>raient en connaissance <strong>de</strong> cause (choix personnel lié à une rationalité<br />

économique) d'entrer dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> du fait que cette activité rapporte plus<br />

d’argent que beaucoup d'autres emplois.<br />

Pour Jeffrey (2003), les <strong>femmes</strong> prostituées en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> sont le produit du<br />

système capitaliste qui les positionne comme ouvrières du sexe à bas prix. Les<br />

<strong>femmes</strong> <strong>de</strong>s campagnes qui se prostituent pour les popu<strong>la</strong>tions urbaines en<br />

Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> sont <strong>de</strong>s acteurs économiques qui saisissent délibérément une<br />

opportunité offerte par le marché : « Prostitute women were engaging in an<br />

entrepreneurial move <strong>de</strong>signed to sustain the family units of a rural economy<br />

which was coming un<strong>de</strong>r increasing pres<strong>sur</strong>e » (page 86).<br />

Mais, selon Pou<strong>la</strong>in, les contraintes économiques et particulièrement <strong>la</strong><br />

précarité sociale et l'absence <strong>de</strong> moyens alternatifs d'existence, impliquent que<br />

l'engagement dans <strong>la</strong> sexualité commerciale n'est jamais un acte volontaire et<br />

délibéré. La <strong>prostitution</strong> représente une <strong>de</strong>s rares voies d'accès à un niveau <strong>de</strong><br />

vie auquel une origine sociale mo<strong>de</strong>ste et un faible niveau <strong>de</strong> compétence ne<br />

permettent pas d'arriver.<br />

…mais aussi sociales et psychologiques<br />

Mais Pou<strong>la</strong>in, sans nier que <strong>la</strong> misère économique et l'accroissement <strong>de</strong>s<br />

inégalités sociales sont le terreau <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>, étant bien conscient que <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong> représente « une solution provisoire ou prolongée aux difficultés<br />

financières », il pose <strong>la</strong> question <strong>de</strong> savoir pourquoi certain(e)s passent à l'acte<br />

et pas d’autres. Il affirme que même s'il y a <strong>de</strong>s causes alimentaires et <strong>de</strong> <strong>sur</strong>vie,<br />

il existe aussi un déterminisme social et psychologique qui prédispose certains à<br />

se prostituer. L'engagement dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> est <strong>la</strong> conséquence <strong>de</strong> facteurs<br />

multiples mê<strong>la</strong>nt raisons économiques, personnelles, sociales et psychologiques<br />

(violence et abus sexuels antérieurs notamment). C'est le poids <strong>de</strong> l’histoire<br />

personnelle qui permet à une personne d'envisager <strong>de</strong> vendre son sexe. Les<br />

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personnes qui sont l'objet <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> proviennent davantage <strong>de</strong> couches<br />

sociales défavorisées, aux revenus précaires et limités, <strong>de</strong> minorités ethniques,<br />

<strong>de</strong> groupes indigènes, <strong>de</strong> réfugiés, d'immigrants c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stins, du tiers-mon<strong>de</strong>,<br />

<strong>de</strong>s pays déstructurés par leur transition catastrophique vers l'économie<br />

capitaliste ; elles sont également davantage <strong>de</strong>s personnes à bas niveau<br />

d'éducation, <strong>de</strong>s fugueuses, <strong>de</strong>s individus abusés physiquement,<br />

psychologiquement et sexuellement dans leur enfance.<br />

La <strong>prostitution</strong> dans les pays en développement<br />

Toujours selon Pou<strong>la</strong>in, <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> fait désormais partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> stratégie <strong>de</strong><br />

développement <strong>de</strong> certains États. Sous l'obligation <strong>de</strong> rembourser <strong>la</strong> <strong>de</strong>tte, <strong>de</strong><br />

nombreux États du tiers-mon<strong>de</strong> sont encouragés par les organisations<br />

internationales (FMI et Banque mondiale) à développer leurs industries du<br />

tourisme et <strong>de</strong> divertissement. Dans chacun <strong>de</strong>s <strong>cas</strong>, l'essor <strong>de</strong> ces secteurs a<br />

permis l'envolée <strong>de</strong> l'industrie du commerce sexuel. En 1998, l'Organisation<br />

internationale du travail (agence <strong>de</strong> l'ONU), appe<strong>la</strong>it à <strong>la</strong> reconnaissance<br />

économique <strong>de</strong> l'industrie du sexe, englobant une extension <strong>de</strong>s "droits du<br />

travail et <strong>de</strong>s bénéfices pour les travailleurs du sexe" et l'amélioration <strong>de</strong>s<br />

"conditions <strong>de</strong> travail" dans cette industrie.<br />

Ces aspects <strong>de</strong> <strong>la</strong> mondialisation concernent : l’exploitation économique,<br />

l’oppression sexuelle, l’accumu<strong>la</strong>tion du capital, les migrations internationales,<br />

le racisme, <strong>la</strong> santé, <strong>la</strong> hiérarchisation <strong>de</strong> l'économie-mon<strong>de</strong>, le développement<br />

inégal, l’accentuation <strong>de</strong>s inégalités sociales, <strong>la</strong> pauvreté, etc. Ce qui pouvait être<br />

perçu comme étant à <strong>la</strong> marge est désormais au centre du développement du<br />

capitalisme mondial. C'est pourquoi cette industrie tend <strong>de</strong> plus en plus à être<br />

reconnue comme un secteur économique banal et, comme toute industrie, est<br />

régie par <strong>la</strong> dictature du profit.<br />

1.1.2. Situation <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> en Asie du Sud-est<br />

Selon Richard Pou<strong>la</strong>in, les gouvernements bénéficient <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> : en<br />

1995, on a évalué que les revenus <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> constituaient<br />

60% du budget du gouvernement. Ce n'est pas sans raison que ce gouvernement<br />

faisait, en 1987, <strong>la</strong> promotion du tourisme sexuel en ces termes : « The one fruit<br />

of Thai<strong>la</strong>nd more <strong>de</strong>licious than durian [un fruit local] its young women. »<br />

En 1998, l'Organisation internationale du travail (OIT) a estimé que <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong> représentait entre 2 et 14% <strong>de</strong> l'ensemble <strong>de</strong>s activités économiques<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, <strong>de</strong> l'Indonésie, <strong>de</strong> <strong>la</strong> Ma<strong>la</strong>isie et <strong>de</strong>s Philippines. Selon une<br />

étu<strong>de</strong>, l'industrie touristique rapporte 4 milliards <strong>de</strong> dol<strong>la</strong>rs par année à <strong>la</strong><br />

Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>.<br />

On estime que 2 millions <strong>de</strong> <strong>femmes</strong> se prostituent en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, 300 000 aux<br />

Philippines, 500 000 en Indonésie, 142 000 en Ma<strong>la</strong>isie, 200 000 au Viêt-nam.<br />

Tous les ans, près d'un quart <strong>de</strong> million <strong>de</strong> <strong>femmes</strong> et d'enfants <strong>de</strong> l'Asie du Sud-<br />

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est (Birmanie, province du Yunnan en Chine popu<strong>la</strong>ire, Laos et Cambodge) sont<br />

achetés en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, pays <strong>de</strong> transit, pour un prix variant entre 6 000 et<br />

10 000 dol<strong>la</strong>rs américains.<br />

1.1.3. La <strong>prostitution</strong> au Laos, historique et situation actuelle<br />

Une longue tradition <strong>de</strong> polygamie<br />

Marini (1998 : 15) atteste en 1663 l’existence <strong>de</strong> <strong>la</strong> polygamie au Laos : « [They]<br />

have a group of women, some have more than others, each according to his<br />

means. […] Nevertheless, there is only one which they call the principal wife,<br />

who is the first with whom one has contracted for marriage; all the others are<br />

ranked as second only. » Mayoury abor<strong>de</strong> ce point dans « Lao Women ». Il<br />

semble qu’aux temps anciens <strong>la</strong> liberté sexuelle étant re<strong>la</strong>tivement importante,<br />

les divorces n’étaient pas rares et on ne note pas <strong>de</strong> trace <strong>de</strong> commerce sexuel.<br />

L’introduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos<br />

Selon Amphay Doré (1974), les colons occi<strong>de</strong>ntaux, peu intégrés dans <strong>la</strong> société<br />

<strong>la</strong>o, recherchaient leurs p<strong>la</strong>isirs auprès <strong>de</strong> <strong>femmes</strong> amenées du Viêt-Nam qui<br />

formèrent le premier contingent <strong>de</strong> prostituées connues <strong>de</strong> l'époque. Il signale<br />

que sous le Protectorat, une <strong>prostitution</strong> c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stine, était exercée à Vientiane,<br />

par <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> filles venant <strong>de</strong> <strong>la</strong> rive siamoise. Pour Doré les premières <strong>femmes</strong><br />

<strong>la</strong>o à se prostituer apparurent en 1945 à proximité <strong>de</strong>s garnisons. Les <strong>femmes</strong><br />

venaient <strong>de</strong> <strong>la</strong> campagne et se cachaient sous l’anonymat. Il écrit : « Mais ce fut<br />

à partir <strong>de</strong> 1954, concouramment à l'introduction <strong>de</strong> l'ai<strong>de</strong> américaine au<br />

Laos, qu'une nouvelle vague <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> apparut, sans précé<strong>de</strong>nt dans son<br />

ampleur, et connut une croissance continue ».<br />

Condominas signale qu’en 1959 à Vientiane les prostituées sont <strong>de</strong>s étrangères<br />

(Siamoises, Vietnamiennes et Chinoises) formées dans leur ville d'origine<br />

(Bangkok, Cholon). « Il y a bien quelques paysannes <strong>la</strong>o <strong>de</strong>s environs qui<br />

viennent faire un peu d'argent <strong>de</strong> poche, mais ce ne sont souvent que <strong>de</strong>s<br />

extras, elles continuent à travailler aux champs. […] Leur principale clientèle<br />

est constituée <strong>de</strong>s citadins riches, qui viennent les chercher en voiture ».<br />

La <strong>prostitution</strong> dans les années 1960-1970<br />

L’entrée <strong>de</strong>s USA dans <strong>la</strong> guerre du Vietnam et <strong>la</strong> présence <strong>de</strong> troupe<br />

américaines au Laos a favorisé l’essor <strong>de</strong> cette activité. Selon Grant Evans<br />

(2003 : 153) dans les années 60, « another highly visible group that also<br />

threatened traditional values was the bar girls and prostitutes. One of the si<strong>de</strong><br />

effects of wars is that they collect together <strong>la</strong>rge groups of unattached men<br />

with money in their pockets. In conditions where poorer women have few job<br />

outlets, either because their family cannot sustain them or they are refugees,<br />

many may be drawn into <strong>prostitution</strong>. This happened in Laos, with many poor<br />

girls from the Thai northeast also being drawn across the Mekong into the<br />

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bars ». Evans explique que si certaines <strong>femmes</strong> se prostituaient librement dans<br />

<strong>de</strong>s cabarets (White Rose, Lulu's) pour étrangers, <strong>la</strong> plupart travail<strong>la</strong>ient dans<br />

<strong>de</strong>s bor<strong>de</strong>ls d’arrières cours pour <strong>de</strong>s clients <strong>la</strong>o pauvres. Une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

2 anthropologues signale que 1 000 <strong>femmes</strong> se prostituent à Vientiane en 1970.<br />

D’autres auteurs donnent <strong>de</strong>s chiffres <strong>de</strong> cette époque : « Vientiane comptait, en<br />

1974, 1 200 prostituées pour 176 000 habitants : une prostituée pour<br />

15 personnes. En 1967, j'avais dénombré sept maisons closes à Paksé, ville<br />

d'environ 20 000 habitants. Certaines étaient fréquentées par les notables,<br />

d'autres par les soldats. […] Généraux, députés, élèves riches et français s'y<br />

rendaient. On pouvait boire et danser, ou, moyennant 3 000 kips, passer<br />

quelques instants avec une fille dans une <strong>de</strong> ces petites chambres qui<br />

entouraient le bar (je gagnais 200 000 kips par mois) » (Cahour 1989 : 12).<br />

Didier Sicard (1981 : 26) explique que l'hôtel Anou proposait bains et massages<br />

et autres services plus occultes : « De gentilles Laotiennes, baragouinant le plus<br />

souvent quelques mots d'américain, venues tout droit <strong>de</strong> leur campagne, vous<br />

explorent en douceur. Des quartiers entiers (Dong Pa<strong>la</strong>ne, par exemple) sont<br />

très connus pour <strong>la</strong> qualité <strong>de</strong> leurs filles ».<br />

La disparition <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> avec <strong>la</strong> révolution <strong>de</strong> 1975<br />

Marc Dufumier nous a expliqué (cf. interview en annexe 8) qu’il y a eu une rafle<br />

entre août et décembre 1975 et que <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> prostitués ont<br />

été déportés <strong>sur</strong> les îles du <strong>la</strong>c <strong>de</strong> Nam Ngum. Michel Cahour (1989 : 23) nous<br />

dit qu’en septembre 1975 les night-clubs ont disparu dans <strong>la</strong> tourmente <strong>de</strong>s<br />

événements <strong>de</strong> mai et qu’il n’y a plus une seule maison close à Dong Pa<strong>la</strong>ne.<br />

Marc Dufumier a visité en 1979 l’île <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> prostituées (cf. photos en<br />

annexe 8). Louise Williams (1992) écrit : « How quickly a woman was released<br />

<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>d on herself. If they advance quickly in their studies, then they can go.<br />

First, they have to work hard, they have to <strong>de</strong>eply un<strong>de</strong>rstand the policies of<br />

the Party and to know well what is right and what is wrong ». Stuart-Fox<br />

(1996 : 184) parle <strong>de</strong> 1 200 personnes déportées en mai 1976 chiffre qui est<br />

monté à plus <strong>de</strong> 2 000 en décembre <strong>de</strong> <strong>la</strong> même année.<br />

Retour <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s années 1980<br />

Les NME ont permis le retour d’anciennes pratiques. Mme Khamphone nous a<br />

dit dans un entretien que dès 1986 elle vendait <strong>de</strong> <strong>la</strong> bière et que <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong> venaient chercher <strong>de</strong>s clients dans son bar. Grant Evans (2003 : 208)<br />

dit : « [Since the 90’s] Prostitution has once again become visible. Here the<br />

revolution can c<strong>la</strong>im only one achievement, and that is to have 'nationalised'<br />

<strong>prostitution</strong>, for the women who work in these p<strong>la</strong>ces are exclusively Lao. To<br />

make money young Lao girls try to get jobs in bars in Thai<strong>la</strong>nd, and the crossbor<strong>de</strong>r<br />

flesh tra<strong>de</strong> is thriving ». Un autre auteur, Louise Williams (1992)<br />

rappelle que : « [In 1991] There were no obvious brothels, that was true, but<br />

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<strong>de</strong>als were now being discreetly and individually brokered for about US$ 10 'a<br />

turn', for a Laotian man, and twice that for a foreigner ».<br />

Au cours <strong>de</strong>s années 90 et au début <strong>de</strong>s années 2000, le phénomène n’a fait que<br />

s’amplifier, s’étendre à toutes les régions du pays et à <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> moins en<br />

moins discret.<br />

1.1.4. L’intérêt <strong>de</strong> l’Afesip pour une étu<strong>de</strong> <strong>sur</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos<br />

L’Afesip International est une ONG cambodgienne crée en 1996 à Phnom Penh.<br />

Elle a pour vocation <strong>de</strong> lutter contre le trafic <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui sont<br />

exploitées pour le commerce sexuel. L’Afesip a pris une dimension régionale<br />

<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ans et a ouvert une antenne à Vientiane à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> l’année 2004 (et<br />

en ouvrira une à Paksé en 2005). Le Département Recherche d’Afesip<br />

International, dirigé par le Dr Pierre Leroux – Superviseur <strong>de</strong> l’étudiante DFD –<br />

a encore peu d’information <strong>sur</strong> <strong>la</strong> situation <strong>prostitution</strong>nelle au Laos. Cette<br />

recherche <strong>de</strong> terrain participera à <strong>la</strong> collecte d’informations pour le travail <strong>de</strong><br />

l’Afesip (informations et observations <strong>de</strong> terrain récentes – même si elles sont<br />

partielles). L’antenne <strong>de</strong> l’Afesip au Laos est intéressée par les contacts<br />

développés par <strong>la</strong> chercheuse pour établir ses premiers contacts avec les <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong> qui se prostituent au Laos.<br />

1.2. LA PROBLEMATIQUE ET LES QUESTIONS DE RECHERCHE<br />

Nous allons voir quels sont les problèmes qui se posent aujourd’hui au Laos<br />

concernant <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>. Les questions <strong>de</strong> recherche ne seront pas toutes<br />

abordées lors <strong>de</strong> <strong>la</strong> formu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s objectifs étant donné <strong>la</strong> complexité du sujet.<br />

1.2.1. Les modalités <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos<br />

Officiellement <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> n’existe pas au Laos. La <strong>prostitution</strong> et le<br />

proxénétisme sont punis par <strong>la</strong> loi (articles 122 et 123 du Co<strong>de</strong> Pénal). Dans <strong>la</strong><br />

culture et <strong>la</strong> société Lao, <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> est encore un sujet tabou souvent<br />

dénoncé comme provenant d’une influence extérieure.<br />

Si <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> est un sujet rarement abordé, il n’en reste pas moins que<br />

beaucoup d’hommes et <strong>de</strong> <strong>femmes</strong> au Laos y participent d’une manière ou d’une<br />

autre, incluant les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> (et hommes) qui se prostituent, leurs clients,<br />

les propriétaires <strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> rencontres (guesthouses, bars à bière, boîtes <strong>de</strong><br />

nuit, karaokés, salons <strong>de</strong> massage, etc.), les intermédiaires ainsi que les<br />

fonctionnaires qui <strong>la</strong>issent se dérouler ces activités parce qu’ils y ont <strong>de</strong>s intérêts<br />

(parce que clients, ou touchant <strong>de</strong> l’argent pour leur silence ou bien encore par<br />

crainte <strong>de</strong> leur hiérarchie). Un article du Vientiane Times du 17 février 2003 le<br />

dit très c<strong>la</strong>irement : « Prostitution is one of the nation’s social problems and<br />

authorities have been trying to wipe it out. […] Some p<strong>la</strong>ces known as beer<br />

shops are opened in front of officials’ houses or offices. Some p<strong>la</strong>ces are just<br />

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p<strong>la</strong>ces for working women to gather and wait for men to come. […] [A civil<br />

servant says he] does not want to do his duty because he once had a lesson<br />

about this. Dirty old men come to take the services of working women. They<br />

are not ordinary people. Some people are high-ranking officials. Some are<br />

soldiers. Some are police. Some are wealthy people with high-ranking<br />

positions. If the officials come to <strong>de</strong>al with this problem, instead of just<br />

receiving congratu<strong>la</strong>tions and fame, they will get themselves into trouble. »<br />

Il n’en reste pas moins que <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> plus en plus visible dans<br />

les villes du Laos. C’est <strong>de</strong>venu une activité qui, pour <strong>de</strong> nombreuses <strong>femmes</strong> (et<br />

certains hommes), génère <strong>de</strong>s revenus permettant à une frange importante <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

popu<strong>la</strong>tion (incluant les familles <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent) d’entrer,<br />

ou <strong>de</strong> <strong>sur</strong>vivre, dans <strong>la</strong> société <strong>de</strong> consommation qui transforme <strong>la</strong> société<br />

<strong>la</strong>otienne d’aujourd’hui. Cependant, très peu d’étu<strong>de</strong>s récentes ne permettent <strong>de</strong><br />

savoir qui sont précisément les personnes qui se prostituent, quelle est <strong>la</strong> part<br />

re<strong>la</strong>tive <strong>de</strong>s différentes modalités d’exercice <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>, quels sont les<br />

lieux <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong>, quels en sont les tenanciers et proxénètes.<br />

1.2.2. Les déterminants <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos<br />

La <strong>prostitution</strong> est-elle une conséquence du développement économique qui<br />

entraîne <strong>de</strong>s dép<strong>la</strong>cements considérables <strong>de</strong> popu<strong>la</strong>tion à <strong>la</strong> recherche<br />

d’opportunités économiques ?<br />

Il y a d’importantes migrations internes (à ne pas confondre avec les<br />

dép<strong>la</strong>cements forcés <strong>de</strong> popu<strong>la</strong>tion) <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> gens quittant les provinces<br />

rurales défavorisées vers d’autres provinces considérées comme plus avancées et<br />

offrant <strong>de</strong>s perspectives réelles ou rêvés.<br />

(La présente étu<strong>de</strong> n’abor<strong>de</strong> que superficiellement les migrations <strong>de</strong>s Lao au<strong>de</strong>là<br />

<strong>de</strong>s frontières, mais il est difficile <strong>de</strong> ne pas en parler étant donné que les<br />

migrations ne connaissent pas vraiment les frontières géopolitiques.)<br />

Faut-il blâmer le développement, <strong>la</strong> "mo<strong>de</strong>rnisation" <strong>de</strong> <strong>la</strong> société <strong>la</strong>o et son<br />

ouverture <strong>sur</strong> l’économie mondialisée pour les effets négatifs qu’ils engendrent ?<br />

Ces effets négatifs sont-ils contreba<strong>la</strong>ncés par d’autres effets positifs, ceux-là ?<br />

L’un <strong>de</strong>s motifs avancés par les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent est le besoin <strong>de</strong><br />

revenus pour supporter leur famille qui est restée en milieu rural (on retrouve<br />

une situation simi<strong>la</strong>ire en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>). Cette « nécessité économique » est l’un<br />

<strong>de</strong>s facteurs les plus couramment utilisés pour expliquer <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>.<br />

Mais qui sont ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ? De quel milieu social viennent-elles ? Est-on<br />

vraiment certains qu’elles se prostituent uniquement par nécessité économique<br />

ou parce qu’elles n’ont pas d’autre opportunité <strong>de</strong> travail possible ?<br />

Le développement économique ne produit-il pourtant pas <strong>de</strong>s emplois sa<strong>la</strong>riés<br />

en ville, tels que les usines <strong>de</strong> confection textile (garment factories) qui ne<br />

nécessitent pas <strong>de</strong> hautes compétences ?<br />

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Préfèrent-elles s’engager dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> pour accé<strong>de</strong>r plus rapi<strong>de</strong>ment à<br />

<strong>de</strong>s revenus plus importants que ceux <strong>de</strong> l'exploitation agricole familiale ou ceux<br />

du sa<strong>la</strong>riat ouvrier urbain ?<br />

Se prostituent-elles pour elles-mêmes ou pour permettre à leurs familles d’avoir<br />

<strong>de</strong>s ressources monétaires leur permettant d’as<strong>sur</strong>er le paiement <strong>de</strong> <strong>de</strong>ttes, <strong>la</strong><br />

sco<strong>la</strong>rité <strong>de</strong>s frères, l’achat d’une moto ou <strong>la</strong> construction d’une maison ?<br />

Existe-t-il différents types <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos : Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

pratiquent-elles <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> <strong>de</strong> manière oc<strong>cas</strong>ionnelle ou bien<br />

régulièrement ? Sont-elles forcées ou bien conservent-elles une maîtrise <strong>de</strong> leur<br />

corps et <strong>de</strong> leurs revenus ? Se protègent-elles contre les risques divers ?<br />

On entend souvent <strong>de</strong>s comp<strong>la</strong>intes envers les <strong>femmes</strong> qui se prostituent<br />

(« Street girls bring shame to city’s reputation », Vientiane Maï, 7 mars 2003)<br />

mais on parle re<strong>la</strong>tivement peu <strong>de</strong> <strong>la</strong> responsabilité <strong>de</strong>s hommes, clients <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong>.<br />

Il est pourtant connu qu’en Asie du Sud-est, les hommes ont <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions<br />

sexuelles avec <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> contre <strong>de</strong> l’argent du fait d’une habitu<strong>de</strong><br />

sociale que l’on retrouve aussi au Laos.<br />

Les hommes <strong>la</strong>o qui ont <strong>de</strong> l’argent aiment bien se réunir entre amis et sortir en<br />

groupe pour aller boire <strong>de</strong> <strong>la</strong> bière dans un lieu <strong>de</strong> divertissement (Lyttleton<br />

1999). D’autres, prennent une maîtresse (mia noy) qu’ils entretiennent et<br />

visitent à leur convenance.<br />

Qui sont-ils ? Quelles sont leurs pratiques ? Pourquoi fréquentent-ils les<br />

<strong>femmes</strong> qui se prostituent ? Comme on dit dans l’économie <strong>de</strong> marche : « il n’y a<br />

pas d’offre s’il n’y a pas <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ». Et quelle est, dans ce contexte, <strong>la</strong> part du<br />

tourisme international ?<br />

1.2.3. Les évolutions prévisibles <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos<br />

Les habitants <strong>de</strong> l’Asie du Sud-est circulent <strong>de</strong> plus en plus d’un pays à l’autre,<br />

quels vont êtres les conséquences <strong>de</strong> toutes ces migrations, ou celles <strong>de</strong>s<br />

corridors économiques qui sont actuellement en construction et qui vont faire se<br />

rencontrer <strong>de</strong>s vil<strong>la</strong>geois habituellement isolés et <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> passage (routiers,<br />

voyageurs, commerçants, etc.) ?<br />

Les déséquilibres entre zones rurales et urbaines ou entre popu<strong>la</strong>tions riches et<br />

pauvres vont probablement continuer <strong>de</strong> croître dans l’avenir. Comment vont<br />

s’adapter celles qui seront <strong>la</strong>issées en marge <strong>de</strong> cette croissance économique ?<br />

Est-ce que <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> va continuer à progresser et <strong>de</strong> quelle manière ? Les<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> resteront-elles plus ou moins maîtresses <strong>de</strong> leur <strong>de</strong>stin comme<br />

c’est le <strong>cas</strong> actuellement ou bien l’industrie du sexe va-t-elle les intégrer dans<br />

<strong>de</strong>s réseaux, <strong>de</strong>s structures <strong>de</strong> type bor<strong>de</strong>ls où les <strong>femmes</strong> sont forcées,<br />

enfermées (comme en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> ou en Ma<strong>la</strong>ysia) ?<br />

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Les hommes <strong>la</strong>o en général ont une attitu<strong>de</strong> ambivalente <strong>sur</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>.<br />

Certains ne considèrent pas que c’est un problème puisqu’ils en profitent et qu’il<br />

y a une tolérance vis à vis <strong>de</strong> cette sexualité en <strong>de</strong>hors du couple, y compris <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

part <strong>de</strong> leurs propres épouses.<br />

Quelles vont être les diverses réponses du Laos vis-à-vis <strong>de</strong> cette question ? Vat-il<br />

y avoir, comme ce vient d’être le <strong>cas</strong> en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, une légalisation ou bien <strong>la</strong><br />

loi restera-t-elle <strong>la</strong> même ?<br />

Par ailleurs, l’épidémie <strong>de</strong> VIH/SIDA progresse dans <strong>la</strong> région Asie Pacifique<br />

(7 000 000 <strong>de</strong> personnes séropositives en 2002, source ONUSIDA/OMS). Le<br />

Laos est actuellement plutôt épargné (taux <strong>de</strong> prévalence <strong>de</strong> 0,05% parmi les 15-<br />

49 ans et 1 300 <strong>cas</strong> <strong>de</strong> personnes séropositives en 2002, source<br />

ONUSIDA/OMS) mais rien ne garantit que l’épidémie ne touchera pas <strong>la</strong><br />

popu<strong>la</strong>tion à plus long terme notamment avec l’ouverture d’axes <strong>de</strong><br />

communication qui traverseront le pays <strong>de</strong> part en part.<br />

1.2.4. Quelles sont les réponses possibles ?<br />

Existe-t-il <strong>de</strong>s possibilités pour les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> d’avoir une activité autre ?<br />

Sachant qu’elles se prostituent pendant un temps donné, pour accumuler<br />

suffisamment d’argent, faut-il simplement les ai<strong>de</strong>r à être mieux protégées<br />

(contre les ma<strong>la</strong>dies, contre les violences, contre les dangers <strong>de</strong> l’illégalité ou <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> crainte <strong>de</strong> <strong>la</strong> honte sociale) ?<br />

Est-il encore possible au Laos <strong>de</strong> favoriser le développement rural pour<br />

permettre aux <strong>jeunes</strong> ruraux <strong>de</strong> rester dans leur vil<strong>la</strong>ge tout en bénéficiant <strong>de</strong>s<br />

avantages <strong>de</strong> <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>rnisation ?<br />

Faut-il accompagner les personnes prostituées pour limiter les conséquences et<br />

les risques sanitaires et sociaux qu’elles encourent, et/ou avoir une attitu<strong>de</strong><br />

répressive à l’égard <strong>de</strong> celles qui pratiquent ou qui organisent <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>, ou<br />

bien vis à vis <strong>de</strong>s clients ?<br />

1.3. LES OBJECTIFS DE L’ETUDE<br />

Nous tenons à préciser que, compte tenu du caractère exploratoire <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> et<br />

du peu <strong>de</strong> temps et <strong>de</strong> moyens disponibles, les objectifs ont été limités à<br />

l’approfondissement et l’argumentation <strong>de</strong> quelques-unes seulement <strong>de</strong>s<br />

questions <strong>de</strong> recherche, portant <strong>sur</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion féminine concernée.<br />

L’objectif général <strong>de</strong> cette recherche est <strong>de</strong> chercher à comprendre <strong>la</strong> situation<br />

actuelle <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent à Vientiane et à Paksé, par<br />

l’analyse <strong>de</strong> leur parcours <strong>de</strong> vie dans une société en pleine transition<br />

économique et sociale (en partie du fait <strong>de</strong> l’ouverture du pays au mon<strong>de</strong><br />

extérieur). Cette recherche a trois objectifs spécifiques :<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

1.3.1. Décrire <strong>la</strong> situation <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent<br />

- Quels sont les différents types <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> ? Essai <strong>de</strong> définition <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong> étudiée dans cette étu<strong>de</strong>.<br />

- Quelle est <strong>la</strong> situation <strong>de</strong> ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> à Paksé et à Vientiane ?<br />

- Quels sont <strong>de</strong>s différents types <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent ? Quels<br />

sont les différents types <strong>de</strong> clients ?<br />

1.3.2. Comprendre le parcours <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

- Qui sont ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ? A quel âge ont-elles commencé ? De quelle<br />

province viennent-elles ? Quelle est leur origine sociale ?<br />

- Pourquoi se prostituent-elles ? Raisons <strong>de</strong> leur <strong>prostitution</strong> (par exemple :<br />

divorce <strong>de</strong>s parents, violence domestique, <strong>de</strong>tte familiale, pauvreté, etc.) ?<br />

- Description <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> : Y a-t-il <strong>de</strong>s intermédiaires (Papa-san ou<br />

Mama-san, patrons <strong>de</strong>s bars à bière, <strong>de</strong> guesthouses) ? Lieux <strong>de</strong> rencontre ;<br />

Lieu <strong>de</strong> l’acte sexuel ; Revenu et nombres <strong>de</strong> clients.<br />

- Quelle est leur situation économique, sociale, sentimentale, mentale,<br />

médicale ? Quelle sont leurs conditions <strong>de</strong> vie ? Quels sont leurs problèmes ?<br />

Sont-elles victimes <strong>de</strong> mauvais traitements (violence <strong>de</strong>s clients, <strong>de</strong>s<br />

proxénètes, <strong>de</strong> <strong>la</strong> police, etc.) ? Sont-elles libres d’arrêter <strong>de</strong> se prostituer ?<br />

1.3.3. Analyser les différentes perceptions <strong>sur</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong><br />

- Que pensent les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent <strong>de</strong> leur propre situation ?<br />

Comment envisagent-elles leur avenir ?<br />

- Qui sont leurs clients et que pensent-ils d’elles ?<br />

- Que pensent les familles <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent ?<br />

- Quelle est <strong>la</strong> position – officielle et factuelle – du gouvernement <strong>la</strong>otien<br />

(situation légale, justice, santé, police, UFL) et <strong>de</strong>s organisations (UN, ONG<br />

et autres) travail<strong>la</strong>nt <strong>sur</strong> ce sujet ?<br />

1.3.4. Deux précisions complémentaires<br />

Un quatrième objectif spécifique initial n’a pas été retenu après réflexion. En<br />

effet, il s’agissait <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s solutions pour ai<strong>de</strong>r les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se<br />

prostituent. Mais, du fait <strong>de</strong> <strong>la</strong> complexité du sujet et du manque d’expérience<br />

<strong>de</strong> l’enquêtrice, nous avons jugé qu’il serait préférable <strong>de</strong> ne donner que<br />

quelques éléments <strong>de</strong> réflexion personnels <strong>sur</strong> les problèmes <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

qui se prostituent dans le chapitre 5 « Conclusion et recommandations ».<br />

En revanche, un autre objectif, originellement discuté avec le Superviseur <strong>de</strong><br />

l’enquêtrice, a été réalisé au cours <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> : définir les contraintes<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

méthodologiques à prendre en compte lors d’étu<strong>de</strong>s plus vastes ultérieures. En<br />

annexe 4 <strong>de</strong> cette recherche, l’enquêtrice décrit rapi<strong>de</strong>ment ce qu’elle a retenu<br />

<strong>de</strong> son expérience pour tenter d’apporter quelques éléments <strong>de</strong> métho<strong>de</strong> pour<br />

éventuellement ai<strong>de</strong>r d’autres chercheurs <strong>la</strong>o à réaliser <strong>de</strong>s enquêtes <strong>de</strong> terrain<br />

simi<strong>la</strong>ires (personnel d’ONG ou autres).<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

1.4. LE CONTEXTE<br />

1.4.1. Le Laos, brefs rappels historiques<br />

Le Laos est situé au cœur <strong>de</strong> l’Asie du Sud-est continentale. C’est un pays<br />

enc<strong>la</strong>vé, montagneux, encore re<strong>la</strong>tivement boisé (plus <strong>de</strong> 45% <strong>de</strong> <strong>la</strong> superficie du<br />

territoire). Les difficultés d’accès sont importantes dans certaines région<br />

(contreforts <strong>de</strong> l’Hima<strong>la</strong>ya au nord et cordillère annamitique au sud). La<br />

popu<strong>la</strong>tion est composée <strong>de</strong> nombreux groupes ethnolinguistiques. Le groupe<br />

majoritaire est représenté par les Tai-Kadai, incluant les <strong>la</strong>o (66% <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

popu<strong>la</strong>tion). Comme on peut le voir dans le tableau ci-<strong>de</strong>ssous, le pays est peu<br />

<strong>de</strong>nsément peuplé et <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion vit encore <strong>la</strong>rgement en milieu rural.<br />

Selon Tail<strong>la</strong>rd (1989), le Laos a joué <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s siècles un rôle « d’état tampon »<br />

entre les puissances voisines : Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, Vietnam, Birmanie et Chine. Mis sous<br />

<strong>la</strong> tutelle française (protectorat) à <strong>la</strong> fin du 19ème siècle, le Laos a continué <strong>de</strong><br />

servir <strong>de</strong> zone intermédiaire entre l’Empire britannique (In<strong>de</strong>s) et l’Indochine<br />

française. Divisé entre pro-communistes et pro-américains pendant <strong>la</strong> secon<strong>de</strong><br />

guerre d’Indochine (1960-1973), le Laos est désormais contrôlé <strong>de</strong>puis <strong>la</strong><br />

révolution <strong>de</strong> 1975 sous l’autorité du Parti unique du Peuple Lao.<br />

Le gouvernement du Laos a initié une ouverture économique en 1986 après<br />

10 ans <strong>de</strong> tentative <strong>de</strong> p<strong>la</strong>nification <strong>de</strong> l’économie qui ont abouti à l’échec <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

collectivisation agricole et à une pénurie générale frappant <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion. Le<br />

Laos a rejoint l’ASEAN en 1997 et est désormais dans un processus d’intégration<br />

à l’échelle régionale mais aussi internationale avec une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’accès à<br />

l’Organisation Mondiale du Commerce, <strong>la</strong> normalisation récente <strong>de</strong> ses re<strong>la</strong>tions<br />

commerciales avec les USA et <strong>la</strong> ratification <strong>de</strong> nombreux traités internationaux.<br />

Table 1 : Quelques indicateurs <strong>sur</strong> le Laos<br />

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Superficie 237 000 Km 2<br />

Popu<strong>la</strong>tion 6 000 000 (2004)<br />

Densité <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion 25 hab/Km 2 (2004)<br />

Popu<strong>la</strong>t° urbaine / rurale 21% / 79% (2003)<br />

Parité <strong>de</strong> Pouvoir d'Achat 1 730 $US/hab. (2003)<br />

Revenu National Brut 320 $US/hab. (2003)<br />

Structure du PIB (2003)<br />

Agriculture 51%<br />

Industrie 23%<br />

Services 26%<br />

Rang dans l’IDH (2002) 135 e <strong>sur</strong> 177 pays<br />

Sources : IRASEC, Bangkok (carte) ; ACDI, Canada (statistiques)


DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

1.4.2. Le Laos, un pays en transition vers <strong>la</strong> mondialisation<br />

Aujourd’hui, le Laos retrouve un autre rôle qui est propre à sa disposition<br />

géographique : celui d’état carrefour comme c’était le <strong>cas</strong> au temps <strong>de</strong>s Routes<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Soie qui al<strong>la</strong>ient <strong>de</strong> Chine à l’Océan indien. La Banque Asiatique <strong>de</strong><br />

Développement finance un grand projet <strong>de</strong> développement <strong>de</strong>s infrastructures<br />

régionales intitulé « Greater Mekong Subregion ». De grands axes <strong>de</strong><br />

communication routière nord-sud et est-ouest relieront bientôt le Yunnan à<br />

Singapour et <strong>la</strong> Birmanie au Vietnam. Le Laos sera traversé en son centre, au<br />

niveau <strong>de</strong> Savannakhet, et au nord au niveau <strong>de</strong> Bokéo/Luang Namtha. Ces axes<br />

routiers auront une gran<strong>de</strong> influence <strong>sur</strong> les popu<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> ces zones.<br />

Cette entrée du Laos dans un mon<strong>de</strong> globalisé risque <strong>de</strong> ne pas se faire sans<br />

effets sociaux et environnementaux. Nous ne traiterons ici que <strong>de</strong>s mutations<br />

sociales qui affectent notamment certaines <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong>. La société <strong>la</strong>o passe<br />

d’une situation d’isolement (il y a quelques années) à une ouverture <strong>de</strong> plus en<br />

plus importante <strong>sur</strong> l’extérieur et en particulier <strong>sur</strong> son voisin, <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>.<br />

Le Mékong n’a jamais constitué une frontière pour les popu<strong>la</strong>tions <strong>la</strong>o – c’était<br />

un axe <strong>de</strong> communication – mais les français en ont fait une frontière entre le<br />

Siam et le Laos au début du XX ème siècle, séparant ainsi <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions<br />

cousines (<strong>la</strong>o et thaï Isan). De nombreux échanges ont été maintenus <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

côtés du fleuve et il n’est pas étonnant que <strong>de</strong>s migrations transfrontalières aient<br />

régulièrement lieu. Selon Condominas (1959) les Isan pauvres venaient même<br />

au Laos dans les années soixante pour y trouver du travail car Vientiane était<br />

prospère à cette époque.<br />

Mais <strong>la</strong> situation s’est renversée et aujourd’hui les <strong>la</strong>o sont attirés par le modèle<br />

<strong>de</strong> développement thaï<strong>la</strong>ndais, basé <strong>sur</strong> <strong>la</strong> consommation tant matérielle que<br />

culturelle. Cette situation d’influence concerne les provinces frontalières, celles<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> vallée du Mékong. Ce modèle <strong>de</strong> consommation est re<strong>la</strong>yé au Laos par les<br />

médias thaï<strong>la</strong>ndais (TV, radios, CD) et aussi par les enfants <strong>de</strong>s élites au pouvoir<br />

qui n’hésitent plus à afficher leurs richesses (Pholséna 2004). Les disparités se<br />

creusent, selon le PNUD, entre villes et campagnes et entre bourgeoisie qui<br />

s’enrichit et popu<strong>la</strong>tion pauvre.<br />

Mais <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion du pays<br />

vit encore <strong>la</strong>rgement <strong>de</strong> l’agriculture <strong>de</strong> subsistance<br />

(riziculture, élevage, cueillette) et <strong>de</strong> nombreux<br />

districts ruraux sont considérés comme pauvres ou<br />

très pauvres selon une enquête nationale réalisée<br />

au début <strong>de</strong>s années 2000.<br />

Le Laos figure parmi les pays les moins avancés du<br />

globe du fait notamment <strong>de</strong> certains indicateurs.<br />

Carte montrant les districts pauvres en couleur foncée<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Selon l’IDH <strong>de</strong> l’année 2002, le Laos est 135 ème <strong>sur</strong> 177 pays avec une espérance<br />

<strong>de</strong> vie à <strong>la</strong> naissance <strong>de</strong> 55 ans et un taux d'alphabétisation <strong>de</strong>s adultes <strong>de</strong> 77%<br />

pour les hommes et <strong>de</strong> 61% pour les <strong>femmes</strong>.<br />

Parmi les popu<strong>la</strong>tions les plus désavantagées on trouve certaines minorités<br />

ethniques (austro asiatiques notamment). Les politiques nationales <strong>de</strong> lutte<br />

contre les cultures <strong>sur</strong> brûlis et l’opium et les dép<strong>la</strong>cements <strong>de</strong> vil<strong>la</strong>ges pour<br />

rapprocher les popu<strong>la</strong>tions au bord <strong>de</strong>s routes ou dans les p<strong>la</strong>ines, contribuent à<br />

déstructurer les organisations sociales traditionnelles. Certaines popu<strong>la</strong>tions<br />

per<strong>de</strong>nt leurs repères et <strong>de</strong>viennent plus vulnérables (Lyttleton 2004).<br />

Avec un taux <strong>de</strong> croissance démographique élevé <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion est re<strong>la</strong>tivement<br />

jeune. Mais son niveau d’éducation générale considéré comme médiocre. Ces<br />

<strong>jeunes</strong> sont <strong>de</strong> plus en plus attirés par les villes et le modèle <strong>de</strong> vie urbaine où<br />

l’on a plus facilement accès aux services sociaux (santé, éducation, etc.) mais<br />

aussi à <strong>de</strong>s emplois plus rémunérateurs que ceux <strong>de</strong> l’agriculture.<br />

Dans ce contexte <strong>de</strong> transition vers une économie <strong>de</strong> marché beaucoup plus<br />

monétarisée qu’avant – même si les changements ne sont pas aussi rapi<strong>de</strong>s que<br />

dans d’autres pays du fait <strong>de</strong> <strong>la</strong> pru<strong>de</strong>nce du gouvernement à ne pas ouvrir trop<br />

vite le pays – les <strong>la</strong>o ont besoin <strong>de</strong> plus d’argent pour avoir accès à un nouveau<br />

mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie qu’ils considèrent – légitimement – comme « mo<strong>de</strong>rne ».<br />

Ainsi, on peut voir <strong>de</strong> nombreux <strong>la</strong>o (hommes et <strong>femmes</strong>, y compris <strong>de</strong>s<br />

mineurs) tenter leur chance en al<strong>la</strong>nt travailler, pour une saison ou quelques<br />

années, en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> ou dans les centres urbains du Laos. D’agriculteurs et<br />

ruraux dans <strong>de</strong>s milieux protégés, ils sont contraints <strong>de</strong> se convertir à <strong>de</strong>s<br />

activités <strong>de</strong> production ou <strong>de</strong> services. Certains travaillent dans <strong>de</strong>s usines, <strong>sur</strong><br />

<strong>de</strong>s chantiers <strong>de</strong> construction, d’autres dans <strong>de</strong>s restaurants, <strong>de</strong>s bars à bières<br />

ou d’autres lieux <strong>de</strong> divertissements.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

2. METHODE<br />

2.1. CHAMP DE L’ETUDE<br />

Cette recherche s’est limitée à un groupe <strong>de</strong> 8 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> <strong>la</strong>otiennes et<br />

quelques personnes impliquées <strong>sur</strong> ce sujet et <strong>sur</strong> <strong>de</strong>ux zones seulement à cause<br />

<strong>de</strong> plusieurs facteurs : 1) La durée <strong>de</strong> <strong>la</strong> recherche n’était que <strong>de</strong> 3 mois; 2) Il<br />

s’agit d’un sujet très sensible car <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> est officiellement interdite au<br />

Laos et il est donc long et difficile d’obtenir <strong>de</strong>s informations <strong>de</strong> terrain.<br />

Par conséquent, nous avons choisi <strong>de</strong> ne travailler que <strong>sur</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> <strong>de</strong>s<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> (entre 18 et environ 30 ans) en excluant <strong>de</strong> travailler : 1) <strong>sur</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong> masculine (encore peu développée au Laos) et 2) <strong>sur</strong> le trafic<br />

humain vers les pays étrangers (trop complexe et <strong>de</strong>mandant du temps).<br />

L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain visait un groupe <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent dans<br />

<strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s villes du Laos.<br />

Table 2 – Description <strong>de</strong> l’échantillon retenu<br />

Nombre <strong>de</strong> personnes 8 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> dont 1 à Paksé et 7 à Vientiane<br />

Age moyen 23 ans (entre 18 et 30 ans)<br />

Origine 5 <strong>de</strong> province (Luang Prabang, Sam Nua,<br />

Bolikhamsay, Vientiane) et 3 <strong>de</strong> Vientiane Capitale<br />

Niveau social <strong>de</strong>s parents 4 agriculteurs, 1 militaire, 3 inconnu (père décédé,<br />

épicerie, au chômage)<br />

Revenu <strong>de</strong>s parents 3 dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> <strong>la</strong> récolte <strong>de</strong> riz, 2 entre 20 et 40 USD<br />

par mois, 3 inconnu<br />

Nombre d’enfants dans <strong>la</strong> famille Entre 2 et 9 (avec une moyenne <strong>de</strong> 5 enfants)<br />

Niveau d’éducation 5 ont arrêté pendant ou à <strong>la</strong> fin du collège<br />

1 a arrêté au primaire et pour 2 on ne sait pas<br />

Source : Phouvanh Khamdavong<br />

Cette enquête incluait <strong>de</strong>s rencontres et discussions avec <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui<br />

se prostituent à Vientiane; <strong>la</strong> capitale du Laos, et à Paksé <strong>la</strong> ville <strong>la</strong> plus au sud<br />

du pays. Toutefois, étant donné les contraintes <strong>de</strong> temps, il n’a pas été possible<br />

<strong>de</strong> réaliser plus d’une interview à Paksé. Des contacts avaient été pris au cours<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> mission <strong>sur</strong> p<strong>la</strong>ce, mais les interviews n’ont pas pu être réalisées.<br />

Ce choix a été décidé <strong>sur</strong> les conseils <strong>de</strong> AFESIP International qui envisage <strong>de</strong>s<br />

interventions dans ces <strong>de</strong>ux régions. Pour eux, le choix <strong>de</strong> Paksé est logique car<br />

le sud du Laos est une zone <strong>de</strong> transition entre le Vietnam et <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong><br />

(routes transnationales) où les passages sont intenses et où <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> s’est<br />

développée.<br />

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2.2. ETUDE DES DONNEES EXISTANTES<br />

Nous avons fait une analyse <strong>de</strong> <strong>la</strong> bibliographie existante, <strong>de</strong> <strong>la</strong> presse locale<br />

(Vientiane Times et Rénovateur entre 2001 et 2004), <strong>de</strong>s textes réglementaires<br />

(co<strong>de</strong> civil, co<strong>de</strong> pénal) et <strong>de</strong>s données statistiques disponibles (At<strong>la</strong>s du Laos).<br />

Nous avons également fait <strong>de</strong>s recherches <strong>sur</strong> Internet.<br />

Des cartes et <strong>de</strong>s photos ont été recherchées ou réalisées pour illustrer les<br />

annexes du rapport.<br />

2.3. ENTRETIENS AVEC DES JEUNES FEMMES QUI SE PROSTITUENT<br />

Pour répondre à notre <strong>de</strong>uxième objectif, nous avons choisi d’utiliser <strong>la</strong><br />

métho<strong>de</strong> dite <strong>de</strong>s « histoires <strong>de</strong> vie » pour tenter <strong>de</strong> décrire les parcours <strong>de</strong> vie<br />

<strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent.<br />

Le but était <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s entretiens pour avoir <strong>de</strong>s informations qualitatives<br />

plutôt que quantitatives.<br />

Un gui<strong>de</strong> d’entretien a été é<strong>la</strong>boré afin <strong>de</strong> structurer les interviews qui se<br />

réalisaient au cours d’un entretien semi-directif (cf. annexe n°1). L’utilisation <strong>de</strong><br />

ce gui<strong>de</strong> d’entretien a apporté <strong>la</strong> souplesse nécessaire pour cette étu<strong>de</strong><br />

qualitative.<br />

Nous avons commencé à i<strong>de</strong>ntifier <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent à<br />

Vientiane. Ces personnes contact ont souvent été très utiles pour i<strong>de</strong>ntifier <strong>de</strong>s<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent et <strong>sur</strong>tout pour les mettre en confiance pour<br />

qu’elles acceptent d’être interviewées.<br />

Le tableau ci-<strong>de</strong>ssous précise les mo<strong>de</strong>s d’i<strong>de</strong>ntification et les lieux d’interviews.<br />

Table 3 – Mo<strong>de</strong> d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s 8 personnes interviewées<br />

Nom Mo<strong>de</strong> d’i<strong>de</strong>ntification/personne contact Lieu <strong>de</strong> l’interview<br />

Souk Un Katoey ami d’un ami <strong>de</strong> l’enquêtrice Chez l’enquêtrice<br />

Na La cousine <strong>de</strong> l’enquêtrice Dans son vil<strong>la</strong>ge<br />

Toui La cousine <strong>de</strong> l’enquêtrice Chez l’enquêtrice<br />

Khao Toui Chez elle<br />

Malee Le patron <strong>de</strong> <strong>la</strong> guesthouse où travaille Malee Dans sa guesthouse<br />

Fong Un ami français <strong>de</strong> l’enquêtrice (client <strong>de</strong> prostituées) Chez l’enquêtrice<br />

Nounou Kham Chez elle<br />

Kham Le Directeur <strong>de</strong> LYAP où travaille Kham Chez l’enquêtrice<br />

Source : Phouvanh Khamdavong<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

D’autres <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ont été contactées tant à Vientiane qu’à Paksé : bars à<br />

bière, restaurants, boîtes <strong>de</strong> nuit, dans le bus (en al<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> Vientiane à Paksé),<br />

etc. Mais les tentatives <strong>de</strong> prise <strong>de</strong> contact <strong>de</strong> l’enquêtrice n’ont pas toutes<br />

abouti notamment du fait du manque <strong>de</strong> temps pour reprendre contact avec les<br />

personnes après les avoir rencontrées une première fois.<br />

Avant <strong>de</strong> commencer l’entretien, nous avons expliqué les objectifs <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

recherche et <strong>de</strong>mandé <strong>la</strong> permission <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s notes et d’enregistrer<br />

l’entretien. Nous avons également <strong>de</strong>mandé l’accord pour utiliser les<br />

informations collectées en garantissant <strong>la</strong> confi<strong>de</strong>ntialité (en particulier<br />

l’anonymat <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong>). Après accord <strong>de</strong> <strong>la</strong> personne l’entretien commence.<br />

2.4. INTERVIEWS DIVERSES ET OBSERVATIONS DE TERRAIN<br />

En parallèle aux interviews avec les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent nous<br />

avons interviewé <strong>de</strong>s personnes <strong>de</strong> <strong>la</strong> société pour connaître leur avis <strong>sur</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong> : <strong>femmes</strong>, hommes (dont certains sont <strong>de</strong>s clients <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> qui<br />

se prostituent), un bonze. Pour plus <strong>de</strong> détails voir l’annexe n°8.<br />

D’autre part, <strong>de</strong>s rencontres et interviews ont été réalisées avec <strong>de</strong>s membres<br />

d’organisations qui – <strong>de</strong> près ou <strong>de</strong> loin – travaillent avec <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

qui se prostituent : ONG (comme PSI, AFESIP-Laos, LYAP, CWS, MSF-Suisse) ;<br />

Agences <strong>de</strong>s Nations Unies (ILO-IPEC, UNAIDS, UNFPA) ; Ministères Lao<br />

(justice, affaires sociales), Union <strong>de</strong> Femmes. Ces interviews ont été sollicitées<br />

par l’enquêtrice directement auprès <strong>de</strong>s institutions ou <strong>de</strong>s personnes. Pour plus<br />

<strong>de</strong> détails voir l’annexe n°8.<br />

En plus, <strong>de</strong>s interviews, <strong>de</strong>s observations <strong>de</strong> terrain ont permis <strong>de</strong> mieux cerner<br />

les conditions <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> se prostituant tant à Paksé qu’à Vientiane :<br />

bars à bière, boîtes <strong>de</strong> nuit, guesthouses. Ce<strong>la</strong> a également permis <strong>la</strong> réalisation<br />

<strong>de</strong> cartes <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> dans ces <strong>de</strong>ux villes. Pour plus <strong>de</strong> détails voir<br />

l’annexe n°6.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

3. RESULTATS<br />

3.1. DESCRIPTION DES JEUNES FEMMES QUI SE PROSTITUENT<br />

3.1.1. Situation <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> qui se prostituent à Paksé et à Vientiane<br />

Cette recherche montre que <strong>la</strong> société <strong>la</strong>o reconnaît que <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> existe.<br />

Les hommes interviewés disent qu’ils ont <strong>de</strong>s rapports sexuels avec <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong><br />

qui se prostituent pour <strong>de</strong> l’argent.<br />

Au Laos il est difficile d’avoir <strong>de</strong>s chiffres <strong>sur</strong> le nombre <strong>de</strong> personnes qui se<br />

prostituent, parce que c’est illégal (même si PSI ou NCCA ont quelques<br />

estimations basées <strong>sur</strong> <strong>de</strong>s repérages <strong>de</strong> terrain). D’autre part, les <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong> bougent beaucoup d’une région à une autre, elles ne restent pas<br />

longtemps dans un même lieu (quelques semaines à quelques mois). Elles<br />

changent parce que les clients aiment que les <strong>femmes</strong> qu’ils viennent chercher<br />

dans les lieux <strong>de</strong> distraction soient différentes au bout d’un certain temps. Les<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> vont ; en principe, dans <strong>de</strong>s lieux où elles ne sont pas connues,<br />

loin <strong>de</strong> leur région d’origine ou en tout <strong>cas</strong>, pas à proximité <strong>de</strong> leur vil<strong>la</strong>ge<br />

d’origine (c’est le <strong>cas</strong> à Vientiane).<br />

Certaines sont oc<strong>cas</strong>ionnelles (nous analyserons plus loin cette distinction). Les<br />

estimations que nous avons pu obtenir proviennent <strong>de</strong>s gens qui travaillent <strong>sur</strong><br />

le terrain avec les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> (PSI, par exemple).<br />

A Paksé une femme qui travaille au service <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> <strong>la</strong> province et qui<br />

col<strong>la</strong>bore avec le projet <strong>de</strong> PSI (sensibilisation <strong>sur</strong> le port <strong>de</strong>s préservatifs)<br />

estime qu’il y a environ 500 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent dans <strong>la</strong> province<br />

<strong>de</strong> Champassak dont 200 dans <strong>la</strong> ville et ses environs immédiats (<strong>sur</strong> une<br />

popu<strong>la</strong>tion d’environ 50 000 personnes dans <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Paksé – At<strong>la</strong>s du Laos).<br />

Nous n’avons récupéré aucune estimation quant au nombre estimé <strong>de</strong> <strong>femmes</strong><br />

qui se prostituent à Vientiane (dont <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion est estimée à environ<br />

200 000 personnes – At<strong>la</strong>s du Laos).<br />

3.1.2. Quelques types <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> rencontrés<br />

Il y a probablement <strong>de</strong> nombreux types <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> à Paksé et à Vientiane<br />

mais nous n’avons pas pu tout voir pendant l’étu<strong>de</strong>. Parmi les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

rencontrées, il y a celles qui ont <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions sexuelles :<br />

Avec plusieurs clients par semaine<br />

Elles vivent dans <strong>de</strong>s guesthouses ou à proximité <strong>de</strong>s bars à bière, etc. Dans ce<br />

<strong>cas</strong>, ce sont les clients qui viennent les chercher. Il y a celles qui le font tout au<br />

long <strong>de</strong> l’année et celles qui le font <strong>de</strong> façon saisonnière quand il n’y pas <strong>de</strong><br />

travail à <strong>la</strong> ferme (repiquage du riz).<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Oc<strong>cas</strong>ionnellement ou avec quelques clients réguliers<br />

Quand elles ont vraiment besoin d’une somme d’argent importante (ma<strong>la</strong>die,<br />

décès, <strong>de</strong>tte, etc.). Ce<strong>la</strong> concerne notamment le groupe <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui<br />

ven<strong>de</strong>nt leur virginité pour <strong>de</strong> l’argent (dans notre étu<strong>de</strong> 4 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> <strong>sur</strong><br />

8 interviewées) sans qu’on sache si elles continueront <strong>de</strong> se prostituer plus tard<br />

(nous verrons que lorsqu’une jeune femme <strong>la</strong>o a perdu sa virginité avec un<br />

homme avec qui elle ne se marrie pas il y a une chance qu’elle per<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’estime<br />

d’elle même et d’autant plus dans le <strong>cas</strong> d’une vente <strong>de</strong> <strong>la</strong> virginité). Trois parmi<br />

ces quatre <strong>femmes</strong> ont été introduites auprès d’un client par une amie, une<br />

cousine ou une personne qu’elles connaissaient (amie <strong>de</strong>s parents, propriétaire<br />

du bar à bière où elle travail<strong>la</strong>it).<br />

Celles qui ont été prostituées en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong><br />

Nous avons également rencontré <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui sont allées se prostituer<br />

en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> et qui continuent <strong>de</strong> se prostituer à leur retour au Laos. Il y a celles<br />

qui y sont allées en sachant ce qu’elles al<strong>la</strong>ient faire et celles qui ont été<br />

trompées (on leur a promis un travail qui <strong>de</strong>vait leur rapporter beaucoup<br />

d’argent).<br />

3.1.3. Les différents types <strong>de</strong> clients<br />

Les clients au Laos sont avant tout <strong>de</strong>s locaux, <strong>de</strong>s <strong>la</strong>o ou <strong>de</strong>s hommes venant<br />

<strong>de</strong>s pays voisins comme <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, le Vietnam ou <strong>la</strong> Chine. Les autres<br />

étrangers sont principalement <strong>de</strong>s expatriés rési<strong>de</strong>nts et travail<strong>la</strong>nt au Laos.<br />

Les clients <strong>la</strong>otiens<br />

Les hommes <strong>la</strong>o qui ont <strong>de</strong> l’argent aiment bien se réunir entre amis et sortir en<br />

groupe pour aller boire <strong>de</strong> <strong>la</strong> bière dans un lieu <strong>de</strong> divertissement Après avoir<br />

bu, ils ont parfois <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions sexuelles avec <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se<br />

prostituent (Lyttleton 1999).<br />

Les témoignages obtenus au cours <strong>de</strong> l’enquête auprès <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se<br />

prostituent ou d’homme qui sont <strong>de</strong>s clients (8 <strong>femmes</strong> et 4 hommes) montrent<br />

que <strong>la</strong> majorité <strong>de</strong>s clients <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent sont <strong>de</strong>s<br />

fonctionnaires <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> l’Etat : Douanes, impôts, forêts. Il y a<br />

certainement un lien très fort avec l’ai<strong>de</strong> internationale car ce sont <strong>de</strong>s<br />

personnes qui ont l’oc<strong>cas</strong>ion <strong>de</strong> gagner <strong>de</strong> l’argent en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leur sa<strong>la</strong>ire (per<br />

diem, corruption).<br />

La plupart <strong>de</strong>s hommes interviewés aiment bien les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> à <strong>la</strong> peau<br />

b<strong>la</strong>nche. C’est, semble-t-il, synonyme <strong>de</strong> <strong>la</strong> beauté selon les critères culturels <strong>de</strong>s<br />

hommes <strong>la</strong>o et plus généralement <strong>de</strong>s hommes asiatiques.<br />

Il existe un marché <strong>de</strong> <strong>la</strong> vente <strong>de</strong> virginité <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> vierges n’ayant<br />

jamais eu <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle avant. 4 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées ont vendu<br />

leur virginité entre 500 $ et 1 200 $. Ca existe à Paksé et à Vientiane (et<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

probablement dans tout le reste du pays). Les intermédiaires peuvent être <strong>de</strong>s<br />

<strong>femmes</strong> ou <strong>de</strong>s hommes. Ce<strong>la</strong> peut être <strong>de</strong>s gens qui vivent dans le même vil<strong>la</strong>ge<br />

que <strong>la</strong> jeune femme qui se prostitue. Ils contactent les hommes intéressés<br />

(clients) ou les hommes intéressés (clients) <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt s’il y a quelqu’un(e)<br />

connaît <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> vierges et qui veulent avoir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle<br />

contre <strong>de</strong> l’argent.<br />

Selon l’interview <strong>de</strong> Ouan on sait qu’il y a <strong>de</strong>s hommes qui passent<br />

régulièrement dans les bars pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r s’il y a <strong>de</strong>s vierges. Ils disent que si<br />

une fille arrive, il n’y a qu’à leur téléphoner. Il y a aussi <strong>de</strong>s intermédiaires qui<br />

cherchent <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> filles dans les vil<strong>la</strong>ges ruraux et leur proposent si elles<br />

veulent vendre leur virginité. Et si les filles sont d’accord ils les amènent dans<br />

un restaurant ou un bar à bière. Ensuite le propriétaire du bar emmène <strong>la</strong> fille<br />

dans une clinique pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au gynécologue si elle est vraiment vierge. La<br />

clinique produit un certificat <strong>de</strong> virginité.<br />

Les clients boivent souvent <strong>de</strong> l’alcool ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> bière <strong>la</strong>o avant d’avoir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion<br />

sexuelle avec les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong>. La bière permet aux hommes <strong>de</strong> se désinhiber<br />

et d’avoir du courage pour avoir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle avec <strong>la</strong> jeune femme qu’ils<br />

ont choisie.<br />

Mais après avoir bu, les clients sont ivres et <strong>de</strong>viennent violents avec elles tant<br />

physiquement que psychologiquement. Selon <strong>la</strong> recherche, parmi les 8 <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong>, 4 ont été forcées sexuellement par les clients <strong>de</strong> faire ce qu’elles ne<br />

vou<strong>la</strong>ient pas faire. Violence physique : ils les frappent, leur tirent les cheveux,<br />

les forcent à prendre <strong>de</strong>s positions sexuelles qu’elles n’aiment pas ou à faire <strong>de</strong>s<br />

actes qu’elles ne veulent pas faire (sexe oral et anal notamment). Violence<br />

psychologique : insultes <strong>sur</strong> leurs attributs physiques (petit sexe par exemple,<br />

selon Souk) ou <strong>sur</strong> leur situation sociale (témoignage <strong>de</strong> Malee : « Tu es une<br />

prostituée, il faut accepter tout ce que veulent les clients, sinon pourquoi tu fais<br />

ce travail ? »).<br />

Selon Malee, les clients donnent le même prix pour une re<strong>la</strong>tion sexuelle. C’est à<br />

dire « 500 Baht pour short time et 1 000 Baht par nuit, mais les <strong>la</strong>o sont plutôt<br />

radins parce que certains ne donnent que 500 Baht pour <strong>la</strong> nuit. Une fois<br />

même, un client <strong>la</strong>o ne m’a rien donné du tout et il est parti. »<br />

Selon Nounou, « il y a 2 ou 3 <strong>la</strong>o <strong>sur</strong> dix qui sont gentils. Il y en a parfois qui<br />

me trouvent mignonne, qui m'embrassent, et qui me caressent les cheveux<br />

quelque fois et puis me donnent <strong>de</strong> l'argent. »<br />

Les clients asiatiques (vietnamiens, chinois, coréens et thaïs)<br />

Ce sont <strong>de</strong>s hommes d’affaire qui voyagent pour faire le commerce du bois (pour<br />

les vietnamiens à Paksé par exemple) ou <strong>de</strong>s touristes (thaï<strong>la</strong>ndais par exemple).<br />

Malee raconte : « <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong> mes clients sont <strong>de</strong>s <strong>la</strong>o et <strong>de</strong>s vietnamiens. J’ai<br />

eu plus d’une quarantaine <strong>de</strong> clients chinois. Ils donnent 500 Baht pour un<br />

short time et 1 000 Baht pour <strong>la</strong> nuit. »<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Selon Souk, « <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s vietnamiens et <strong>de</strong>s chinois qu’elle a rencontrés ne<br />

prennent pas beaucoup <strong>de</strong> temps pour <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle, mais ils font au<br />

moins 4 à 5 fois par nuit. Elle pense qu’ils ont <strong>de</strong>s médicaments traditionnels<br />

pour avoir plusieurs érections. »<br />

Selon Nounou, les clients asiatiques sont plus gentils avec elle que les clients<br />

<strong>la</strong>otiens : « j'ai rencontré <strong>de</strong>s vietnamiens, <strong>de</strong>s chinois et <strong>de</strong>s coréens, qui sont<br />

gentils. Mais les chinois et les vietnamiens parlent très fort, ils ne veulent pas<br />

que je parle, ils veulent que je me taise, ils veulent que je sois au-<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> leur<br />

pouvoir. Et moi, je dois être patiente parce que je veux leur argent. Et il faut<br />

prendre soin d'eux. Ils donnent beaucoup d'argent mais ils me forcent<br />

beaucoup trop. »<br />

Les autres clients (b<strong>la</strong>ncs <strong>de</strong> type européen, noirs <strong>de</strong> type indien)<br />

Re<strong>la</strong>tivement peu nombreux pour les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées par rapport<br />

aux clients <strong>la</strong>o et asiatiques. Contrairement à ce qu’on peut croire ce ne sont pas<br />

les clients les plus nombreux.<br />

Malee dit qu’elle n’a eu qu’un seul client noir, elle pense que c’était un indien :<br />

« Je ne connaissais pas sa <strong>la</strong>ngue, on ne se par<strong>la</strong>it pas, on a juste eu une<br />

re<strong>la</strong>tion sexuelle <strong>de</strong>ux fois, <strong>la</strong> première ça a duré toute <strong>la</strong> nuit, <strong>la</strong> secon<strong>de</strong> c’était<br />

le matin. Après il m’a donné <strong>de</strong> l’argent. »<br />

Selon Souk, « les indiens ne prennent pas très longtemps pour l’acte sexuel,<br />

mais les fa<strong>la</strong>ngs sont trop longs. Ils aiment bien jouer avec mon sexe. Ils<br />

veulent lécher, etc. Comme si leurs sexes avaient besoin <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> temps<br />

pour durcir ! Ils veulent jouer avec mon corps, ils veulent caresser et tripoter<br />

corps, et que je les caresse aussi pour que leurs sexes soient durs. Le temps réel<br />

pour faire l’amour (pénétration et éjacu<strong>la</strong>tion) est court. Ils ont l’âge entre<br />

trente et quarante ans. Ils disent que leur culture est comme ça, qu’il faut<br />

prendre du temps d’embrasser, <strong>de</strong> tripoter, etc. » Elle n’aime pas car c’est long.<br />

Elle n’aime pas qu’ils lèchent son sexe parce que ça lui fait <strong>de</strong>s chatouilles.<br />

3.2. PARCOURS DE VIE DES JEUNES FEMMES QUI SE PROSTITUENT<br />

3.2.1. Origine <strong>de</strong> ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

Six <strong>de</strong>s 8 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées, viennent <strong>de</strong> <strong>la</strong> campagne (Provinces <strong>de</strong><br />

Xieng Khouang, Luang Prabang, Sam Nua, et aussi campagnes proches <strong>de</strong><br />

Vientiane). D’après <strong>la</strong> littérature et <strong>de</strong>s discussions lors <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong>, nous savons<br />

qu’une gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent viennent <strong>de</strong>s<br />

campagnes (milieu rural, agricole, souvent pauvre).<br />

Elles et leur famille n’arrivent pas à s’en sortir avec les revenus agricoles. Elles<br />

profitent après avoir récolté leur produits agricoles (riz essentiellement) <strong>de</strong><br />

venir travailler en ville pour gagner plus d’argent et envoyer à leur famille.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

3.2.2. Raisons <strong>de</strong> se prostituer<br />

Il n’y a souvent pas <strong>de</strong> cause unique mais plutôt un enchaînement <strong>de</strong> problèmes<br />

cumulés qui font que les parcours <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> sont tragiques.<br />

Selon le Vientiane Times du 3 juin 2003 : « Hard work combined with low<br />

income and parents waiting for money can lead someone to look for an<br />

opportunity to make more money and their choice is to work in the beer<br />

shop. »<br />

La recherche montre que <strong>sur</strong> l’échantillon <strong>de</strong>s 8 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> il n’y a pas <strong>de</strong><br />

violence sexuelle dans <strong>la</strong> famille. Une seule a été battues par ses parents<br />

lorsqu’elle était petite (elle ne se sentait pas aimée <strong>de</strong> ses parents). Une autre a<br />

été abandonnée par ses parents suite à leur divorce. Elle est restée seule avec ses<br />

frères.<br />

Mais souvent, les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> se prostituent car elles ont un problème<br />

familial comme le décès d’un parent ou le divorce <strong>de</strong>s parents.<br />

L’histoire <strong>de</strong> Malee<br />

Malee a perdu son père. Elle était en<strong>de</strong>ttée, car elle avait du emprunter pour les frais <strong>de</strong><br />

funérailles <strong>de</strong> son père. C’est <strong>la</strong> raison pourquoi elle a vendu sa virginité. Une fois qu’elle<br />

n’était plus vierge, elle pensait qu’elle <strong>de</strong>vait continuer à se prostituer. Elle ne sait pas<br />

comment elle peut gagner <strong>de</strong> l’argent. Sa mère est ma<strong>la</strong><strong>de</strong> et ne travaille pas beaucoup<br />

(elle a une petite épicerie). Elle doit aussi payer les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> son frère. Malee est allée à<br />

l’école mais elle a arrêté ses étu<strong>de</strong>s au collège à l’âge <strong>de</strong> 19 ans. Ses cousines ne l’ai<strong>de</strong>nt<br />

pas vraiment. « Lorsque j’ai <strong>de</strong> l’argent, mes cousines sont gentilles avec moi, mais si je<br />

n’ai pas d’argent elles ne sont pas gentilles. Elles ne peuvent pas comprendre non plus<br />

que mon travail est tellement difficile pour moi ».<br />

La famille est très importante au Laos, <strong>sur</strong>tout quand on est une fille. Car <strong>la</strong><br />

valeur d’une fille est moindre que celle d’un garçon pour les parents. Surtout le<br />

père aime bien admirer ses garçons plus que les filles car ils vont porter pour<br />

toujours le nom <strong>de</strong> famille <strong>de</strong> leurs parents.<br />

Deux <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées m’ont dit qu’elles se prostituaient pour que<br />

leurs frères puissent continuer leurs étu<strong>de</strong>s.<br />

Jeunes <strong>femmes</strong> venant <strong>de</strong> <strong>la</strong> campagne pour travailler à <strong>la</strong> ville<br />

Elles commencent souvent à travailler d’abord dans une usine (« garment<br />

factories »). Certaines n’arrivent pas à s’en sortir avec leur sa<strong>la</strong>ire d’ouvrière et<br />

commencent à se prostituer dans les bars à bière, les guesthouses, hôtels, boîtes<br />

<strong>de</strong> nuit pour compléter leurs revenus. Certaines finissent par quitter l’usine.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

L’histoire <strong>de</strong> Khao<br />

Khao a 18 ans, elle habite à Vientiane Capitale mais elle vient <strong>de</strong> <strong>la</strong> province <strong>de</strong> Sam Neua<br />

(nord du Laos). Ses parents sont agriculteurs. Elle est l’aînée <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux frères. Ses parents<br />

n’ont pas <strong>de</strong> revenu en <strong>cas</strong>h, mais ont suffisamment <strong>de</strong> riz pour subsister. Ils élèvent aussi<br />

<strong>de</strong>s vo<strong>la</strong>illes, <strong>de</strong>s buffles, <strong>de</strong>s vaches, etc. Elle a quitté son vil<strong>la</strong>ge pour venir travailler à<br />

Vientiane parce que tous ses amis avaient déjà quitté <strong>la</strong> province pour venir travailler à<br />

Vientiane et qu’elle se sentait seule à Sam Nua. Mais aussi parce que ses parents vou<strong>la</strong>ient<br />

<strong>la</strong> forcer à se marier avec un homme – qui habite dans le même vil<strong>la</strong>ge – qu’ils avaient<br />

choisi mais qu’elle n’aimait pas. Quand elle arrive à Vientiane Capitale en 2002, elle<br />

travaille d’abord dans une usine <strong>de</strong> taille <strong>de</strong> diamants. Elle gagnait environ 450 000 Kips<br />

par mois. A cette pério<strong>de</strong> elle habitait dans le dortoir <strong>de</strong> l’usine. Elle y a travaillé pendant<br />

2 ans. Elle vient juste <strong>de</strong> quitter son travail <strong>de</strong>puis un mois. Elle dit que les responsables<br />

<strong>de</strong> son secteur n’étaient pas respectueux envers les ouvriers. (suite plus loin…)<br />

Quatre <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées disent que <strong>la</strong> vie d’ouvrière dans l’usine<br />

n’est pas simple. A <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> chaque mois, elles doivent payer leurs <strong>de</strong>ttes (les<br />

repas, les vêtements, etc.) : elles mangent tous les jours dans <strong>de</strong>s petits<br />

restaurants à côté <strong>de</strong> leur usine mais elles paient à <strong>la</strong> fin du mois.<br />

L’histoire <strong>de</strong> Souk<br />

Souk a quitté l’école primaire <strong>de</strong>puis 1996. Elle avait 14 ans. C’est cette année là qu’elle a<br />

fait « déchirer le papier » (avoir <strong>la</strong> première re<strong>la</strong>tion sexuelle) par son petit copain qui<br />

faisait ses étu<strong>de</strong>s à <strong>la</strong> même école. Les parents <strong>de</strong> Souk sont fermiers. Le revenu <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

famille est basé <strong>sur</strong> <strong>la</strong> récolte <strong>de</strong> riz (dont une partie est vendue) et l’élevage <strong>de</strong> quelques<br />

poules. Ses parents ont beaucoup d’enfant. Elle est <strong>la</strong> première enfant. La famille ne<br />

pouvait pas s’en sortir pour nourrir tout le mon<strong>de</strong>. Souk travail<strong>la</strong>it dur dans <strong>la</strong> rizière. Elle<br />

vendait au marché <strong>de</strong>s produits qu’elle ramassait dans <strong>la</strong> forêt tel que les bambous, les<br />

champignons, etc. C’est <strong>la</strong> raison pourquoi elle a quitté son vil<strong>la</strong>ge (province <strong>de</strong> Luang<br />

Prabang) pour travailler dans un bar à bière dans <strong>la</strong> province <strong>de</strong> Xieng Khouang. Au<br />

début quand elle est arrivée au bar à bière, elle ne s’est pas prostituée immédiatement.<br />

Elle dit qu’elle a gagné beaucoup d’argent en touchant le pourcentage <strong>sur</strong> les bouteilles <strong>de</strong><br />

bière qu’elle faisait consommer aux clients. Elle gagnait 10% <strong>sur</strong> chaque bouteille qui était<br />

vendue environ 1 USD. Souk a travaillé dans ce bar pendant presque un an. Mais elle ne<br />

gagnait pas assez d’argent pour vivre. Elle a décidé <strong>de</strong> se prostituer au même endroit pour<br />

gagner plus d’argent et pour en envoyer à sa famille. Elle s’est prostituée à Xieng Khouang<br />

pendant trois ans.<br />

En 2001 elle a déménagé à Vientiane pour continuer le même travail jusqu’à maintenant.<br />

Le frère <strong>de</strong> son mari n’aimait pas Souk car elle travail<strong>la</strong>it dans <strong>de</strong>s endroits (bars à bière)<br />

que <strong>la</strong> société <strong>la</strong>o n’accepte pas toujours facilement. Servir <strong>la</strong> bière à <strong>de</strong>s clients est un<br />

travail qui n’est pas bien vu par les gens. Elle dit qu’elle ne pouvait pas arrêter son travail<br />

(sans préciser vraiment <strong>la</strong> raison) et elle a divorcé <strong>de</strong> son mari car elle ne pouvait plus<br />

supporter tout le mal que disait d’elle le frère <strong>de</strong> son mari. Elle a changé plusieurs fois <strong>de</strong><br />

restaurants pour mieux trouver les clients (car les clients n’aiment pas retrouver les<br />

mêmes <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> dans un même lieu).<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Elles préfèrent travailler dans les bars à bière pour se prostituer que travailler<br />

dans l’usine, car dans les bars à bière on peut gagner <strong>de</strong> l’argent plus vite qu’en<br />

travail<strong>la</strong>nt à l’usine. Malee dit : « Je travail<strong>la</strong>is à l’usine, je ne gagnais pas<br />

beaucoup d’argent. Je n’arrivais pas à m’en sortir. C’est un travail fatiguant<br />

pour lequel je ne gagnais que 30 à 40 USD par mois. C’était très long pour<br />

toucher le sa<strong>la</strong>ire. J’avais besoin <strong>de</strong> manger. J’ai du m’en<strong>de</strong>tter pour les repas<br />

aussi. A <strong>la</strong> fin du mois il n’y avait plus d’argent, car je <strong>de</strong>vais payer ma <strong>de</strong>tte<br />

pour les repas. Je ne savais pas quoi faire. Je n’arrivais pas à m’en sortir,<br />

j’étais très triste. Et en plus mon père est mort. Je me suis en<strong>de</strong>ttée beaucoup.<br />

C’est pourquoi j’ai décidé <strong>de</strong> travailler comme ça pour rembourser les <strong>de</strong>ttes. »<br />

Jeunes <strong>femmes</strong> qui ven<strong>de</strong>nt leur virginité contre <strong>de</strong> l’argent<br />

Pour certaines c’est pour rembourser une <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille (souvent quand il y<br />

a quelqu’un <strong>de</strong> leur famille qui tombe ma<strong>la</strong><strong>de</strong> très gravement ou qui meurt). La<br />

vente <strong>de</strong> leur virginité est un moyen pour celles qui ont une éducation très faible<br />

et peu <strong>de</strong> connaissances pour travailler. Lorsqu’elles ont vendu leur virginité<br />

elles continuent et se prostituent.<br />

L’histoire <strong>de</strong> Fong<br />

En 1996, Fong est allée travailler en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> <strong>sur</strong> le conseil <strong>de</strong> son père afin <strong>de</strong> pouvoir<br />

subvenir au problème financier <strong>de</strong> sa famille. Elle a travaillé en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> comme femme<br />

<strong>de</strong> ménage pendant 6 ans dans une famille d’épiciers chinois. Durant ces années Fong a<br />

travaillé dur. Elle se réveil<strong>la</strong>it chaque jour à 4 heures du matin et finissait à 23 heures.<br />

Avec un sa<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> 78 USD par mois, elle envoyait assez souvent <strong>de</strong> l’argent à sa famille.<br />

Mais malheureusement l’argent envoyé n’est pas arrivé dans sa totalité à <strong>de</strong>stination par<br />

<strong>la</strong> faute <strong>de</strong> l’intermédiaire à qui Fong avait confié l’argent. Bien que Fong aime bien son<br />

travail comme femme <strong>de</strong> ménage dans cette famille, elle a été obligée <strong>de</strong> démissionner<br />

parce que le fils adoptif <strong>de</strong> son patron a tenté <strong>de</strong> <strong>la</strong> violer.<br />

Une fois <strong>de</strong> retour au Laos, elle a retrouvé sa mère ma<strong>la</strong><strong>de</strong>. Pour joindre les <strong>de</strong>ux bouts,<br />

elle a vendu <strong>de</strong>s légumes, qu’elle jardinait, au marché. Mais comme le revenu est<br />

insuffisant pour d’une part, nourrir <strong>la</strong> famille et d’autre part, soigner sa mère. Elle a<br />

préféré faire une proposition à une femme comme suit : <strong>la</strong> femme prend en charge les<br />

soins <strong>de</strong> santé <strong>de</strong> sa mère et Fong travaille comme femme <strong>de</strong> ménage chez cette <strong>de</strong>rnière.<br />

Pour avoir un peu d’argent <strong>de</strong> poche elle travaille aussi comme serveuse dans un bar. C’est<br />

dans ce bar qu’elle a trouvé quelqu’un qui lui a acheté sa virginité contre 500 USD. Ce fut<br />

le début <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> <strong>de</strong> Fong.<br />

Jeunes <strong>femmes</strong> trompées par un premier amant<br />

Ces <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> attribuent une valeur importante à <strong>la</strong> virginité et au mariage<br />

(l’amour ?). Une fois qu’elles ont perdu leur virginité avec leur premier copain et<br />

si elles ne se marient pas, elles pensent qu’elles ne valent plus rien et que<br />

personne ne voudra se marier avec elles. Elles sont déprimées. Elles déci<strong>de</strong>nt<br />

alors <strong>de</strong> partir, et éventuellement <strong>de</strong> se prostituer. C’est un choix pour elles pour<br />

mieux gagner <strong>de</strong> l’argent dans les lieux divertissements et vivre leur vie.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Une fois qu’elles ont <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle avec l’homme, elles pensent que <strong>la</strong><br />

valeur d’être « une bonne femme » est très basse. Une jeune femme, Malee<br />

disait : « Une fois que j’avais perdu ma virginité, j’ai continué à me prostituer.<br />

Maintenant que ma virginité est perdue ma valeur est perdue ».<br />

Certaines d’entre elles, une fois qu’elles ont été trompées après avoir eu leur<br />

première re<strong>la</strong>tion sexuelle avec un copain, croyant que celui ci al<strong>la</strong>it se marier<br />

avec elles, peuvent avoir <strong>de</strong>s problèmes avec leur famille (dispute) et elles<br />

quittent leur famille pour aller travailler à <strong>la</strong> ville.<br />

Six personnes interviewées disent que les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> se prostituent par<br />

nécessité pour <strong>de</strong>s raisons économiques. Par exemple elles doivent nourrir leur<br />

famille (parents, frères et sœurs, conjoint, et enfants). Elles le font aussi pour<br />

payer les <strong>de</strong>ttes <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille ou pour avoir du capitale pour investir (magasin,<br />

maison, moto, téléphone, etc.).<br />

L’histoire <strong>de</strong> Khao (suite)<br />

Depuis 2 ans Khao a un copain qui est étudiant à l’université. Elle dit qu’elle l’avait<br />

rencontré à <strong>la</strong> sortie <strong>de</strong> l’usine. Lorsqu’elle sortait <strong>de</strong> l’usine elle retrouvait souvent son<br />

copain qui l’attendait <strong>de</strong>vant <strong>la</strong> porte <strong>de</strong> l’usine pour <strong>la</strong> draguer. Elle a eu son premier<br />

rapport sexuel avec lui en 2004. Elle était très amoureuse <strong>de</strong> lui, mais ne vou<strong>la</strong>it pas lui<br />

cé<strong>de</strong>r trop vite. Il a fait plusieurs tentatives, 4 en tout, mais elle a toujours refusé jusqu’à<br />

<strong>la</strong> quatrième. Le jour <strong>de</strong> <strong>la</strong> remise <strong>de</strong> diplôme <strong>de</strong> son copain, il lui a <strong>de</strong>mandé si elle<br />

vou<strong>la</strong>it lui donner sa virginité. Khao a accepté et ils sont allés dans une guesthouse pour<br />

avoir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle ce jour là. Juste le len<strong>de</strong>main le copain <strong>de</strong> Khao s’est marié avec<br />

une autre femme qui était déjà enceinte <strong>de</strong>puis quelques mois. Khao dit que son copain<br />

lui a raconté que cette femme et lui étaient ensemble <strong>de</strong>puis longtemps et qu’ils vou<strong>la</strong>ient<br />

vivre ensemble. Depuis ce jour-là, Khao n’a plus vu son copain car il est avec sa femme.<br />

Khao était très triste et déprimée.<br />

Elle ne fait rien pour le moment. Heureusement qu’elle a encore un peu d’argent qu’elle<br />

avait économisé quand elle travail<strong>la</strong>it à l’usine pour pouvoir payer son logement. Elle a<br />

tenté d’aller se prostituer en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> parce qu’elle a besoin d’argent pour vivre. Une<br />

voisine lui a dit : « se prostituer en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> est mieux payé qu’au Laos ». Khao a<br />

<strong>de</strong>mandé à Toui <strong>de</strong> l’emmener en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> plusieurs fois. Lorsque nous l’avons<br />

interviewée, elle a dit qu’elle vou<strong>la</strong>it bien retourner dans son vil<strong>la</strong>ge à Sam Nua pour<br />

travailler <strong>la</strong> rizière avec ses parents. Elle dit que travailler dans les champs c’est beaucoup<br />

mieux que <strong>de</strong> travailler dans les usines à Vientiane.<br />

Maintenant Khao a un nouveau copain qui est son voisin. Il est jeune, il a 17 ans, il est<br />

encore lycéen. Tous les jours, après les cours, son copain vient <strong>la</strong> voir pour avoir <strong>la</strong><br />

re<strong>la</strong>tion sexuelle avec elle. Il amène à manger pour Khao. Le jour que nous sommes allée<br />

l’interviewer, elle était en train <strong>de</strong> cueillir <strong>de</strong>s légumes dans un jardin à côté <strong>de</strong> sa maison.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

3.2.3. Leurs situations et conditions <strong>de</strong> vie<br />

Leurs lieux <strong>de</strong> vie<br />

A Paksé, selon une dizaine <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> rapi<strong>de</strong>ment interviewées (elles ne<br />

figurent pas dans <strong>la</strong> liste <strong>de</strong> 8 entretiens), 7 habitent <strong>de</strong>rrière le bar à bière ou <strong>la</strong><br />

boîte <strong>de</strong> nuit où elles travaillent et 3 habitent dans une guesthouse.<br />

A Vientiane, 5 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées habitent dans un appartement loué,<br />

seule ou avec leur copain ou une amie. Une seule habite <strong>de</strong>rrière le bar à bière<br />

où elle travaille<br />

Problèmes familiaux<br />

Parmi les 8 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées, une seule, Toui, dit qu’elle a été<br />

frappée par son père lorsqu’elle était enfant. Elle se sentait isolée, exclue par<br />

rapport aux autres enfants <strong>de</strong> sa famille.<br />

L’histoire <strong>de</strong> Nounou<br />

Les parents <strong>de</strong> Nounou ont divorcé lorsqu’elle était enfant (elle avait environ 8 ans). Son<br />

père a refait sa vie ailleurs. Sa mère est allée travailler en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>. Il ne restait que<br />

Nounou et son grand avec leurs <strong>de</strong>ux petits frères. Ils <strong>de</strong>vaient travailler pour se nourrir.<br />

« Quand je vendais <strong>de</strong> légumes au marché les autres <strong>femmes</strong> me disaient que je les<br />

dérangeais. Certaines personnes m’insultaient, je ne savais pas pourquoi. Mais j’était<br />

patiente. Certaines personnes m’arrosaient avec <strong>de</strong> l’eau quand je vendais au marché. Je<br />

ramassais aussi <strong>de</strong>s légumes dans les champs, <strong>de</strong>s escargots, <strong>de</strong>s crabes, pour vendre et<br />

acheter <strong>de</strong>s repas pour <strong>la</strong> maison. Et aussi je transportais <strong>de</strong> l’eau (avec un pa<strong>la</strong>nquin)<br />

pour les gens. » Ils vivaient seuls sans leurs parents. Elle s’arrangeait pour élever ses<br />

petits frères parce qu’ils buvaient encore du <strong>la</strong>it tellement ils étaient petits.<br />

Jusqu’à <strong>la</strong> première année <strong>de</strong> collège (M1) Nounou était une très bonne étudiante et elle a<br />

fait un concours <strong>de</strong>s meilleurs étudiants. Elle a aussi fait un concours <strong>de</strong> course à pied<br />

avec les étudiants d’autres écoles. Elle faisait du sport, du katorh (jeu <strong>de</strong> balle en rotin),<br />

du football. Quand elle gagnait une compétition elle recevait un peu d’argent et elle<br />

achetait à manger pour ses petits frères.<br />

Sa mère est revenue <strong>de</strong> <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> lorsque Nounou était en troisième année <strong>de</strong> collège.<br />

A cette époque elle vendait <strong>de</strong>s légumes au marché du matin, <strong>de</strong>s citrons, <strong>de</strong>s tomates, <strong>de</strong>s<br />

aubergines (2 sacs pour 0,25 USD). Sa mère n’a jamais montré d’argent à ses enfants. Elle<br />

n’achetait que du riz. Chose intéressante, <strong>la</strong> famille <strong>de</strong> Nounou a du riz qui vient <strong>de</strong>s<br />

paysans qui cultivent les rizières qui appartiennent à sa famille. Les paysans leur donnent<br />

environ 2 sacs <strong>de</strong> 50 kilos par année. Mais ça ne suffit pas et il faut acheter encore du riz.<br />

Nounou dit que comme ils étaient <strong>de</strong>s enfants ils ne savaient pas négocier avec les<br />

agriculteurs qui cultivaient leurs rizières.<br />

Nounou a donné <strong>de</strong>s cours <strong>de</strong> danse pour gagner <strong>de</strong> l’argent. Elle jouait au théâtre. Elle a<br />

composé aussi une histoire et une chanson concernant <strong>la</strong> drogue qui peut tuer un frère.<br />

Elle chantait <strong>la</strong> nuit dans un bar et le jour elle étudiait au collège. Mais elle a du quitter<br />

son école car elle ne pouvait pas supporter <strong>la</strong> fatigue. Finalement elle est <strong>de</strong>venue<br />

serveuse « sao drink » et se prostitue dans le bar où elle chantait pour nourrir sa famille.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Khao a déc<strong>la</strong>ré que ses parents vou<strong>la</strong>ient <strong>la</strong> forcer à se marier avec un homme<br />

qu’ils avaient choisi mais qu’elle n’aimait pas.<br />

Il est difficile <strong>de</strong> savoir <strong>de</strong> quelle manière les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> perçoivent les<br />

problèmes familiaux. Ce qui est sûr c’est que leurs parents ont tous du mal à s’en<br />

sortir économiquement.<br />

Problèmes économiques<br />

Parmi les 8 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées, 6disent qu’elles ont <strong>de</strong>s problèmes<br />

économiques. Trois disent qu’elles ont juste assez pour vivre, pour couvrir les<br />

dépenses quotidiennes ou louer leur logement.<br />

Une seule, Souk, dit qu’elle a réussi à économiser 500 USD. Par contre Kham dit<br />

que quand elle gagnait bien sa vie (entre 100 et 200 USD par mois) elle a<br />

beaucoup donné à sa famille (moto, maison) et elle a dépensé le reste en<br />

voyages, en amusement. Aujourd’hui elle n’a plus rien et doit même emprunter<br />

5 USD pour payer le bus pour aller chercher ses médicaments à Savannakhet.<br />

Problèmes <strong>de</strong> santé<br />

Elles ont peur <strong>de</strong>s ma<strong>la</strong>dies sexuelles (STD). 7 <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> interviewées disent<br />

qu’elles n’arrivent pas à obliger leurs clients à mettre le préservatif pendant <strong>la</strong><br />

re<strong>la</strong>tion sexuelle.<br />

La majorité <strong>de</strong>s hommes interviewés pendant l’étu<strong>de</strong> pensent que <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion<br />

sexuelle sans préservatif est meilleure. Mais certaines <strong>femmes</strong> aussi pensent que<br />

c’est meilleur sans préservatif.<br />

L’histoire <strong>de</strong> Kham<br />

Kham a probablement été contaminée par le VIH lorsqu’elle se prostituait en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>.<br />

Elle est partie en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> en 1998 et était prostituée à Bangkok dans un bor<strong>de</strong>l. Quand<br />

elle est rentrée au Laos en 2000 elle a du continuer <strong>de</strong> se prostituer à Vientiane car elle<br />

avait tout perdu en s’enfuyant <strong>de</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>. Elle dit que <strong>de</strong>s clients mettaient le<br />

préservatif, mais que ce n’était pas tous les clients qui acceptaient tant en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> qu’au<br />

Laos. Un client lui a dit que s’il <strong>de</strong>vait mettre le préservatif il ne vou<strong>la</strong>it pas avoir <strong>de</strong><br />

re<strong>la</strong>tion sexuelle avec elle et préférait encore dormir avec sa femme. Comme Kham avait<br />

besoin d’argent, elle acceptait <strong>de</strong> ne pas mettre le préservatif si le client <strong>de</strong>mandait. A ce<br />

moment là elle n’entendait pas beaucoup parler du SIDA. Elle avait juste entendu que<br />

c’était une ma<strong>la</strong>die sexuelle. Elle ne savait pas non plus comment cette ma<strong>la</strong>die se<br />

propageait vraiment. Elle savait par ses copines que beaucoup <strong>de</strong> « Sao bolikane » avaient<br />

le SIDA et Kham se disait que si elle <strong>de</strong>vait avoir le SIDA elle ne serait pas toute seule. Elle<br />

dit que les <strong>femmes</strong> qui se prostituent ont plus peur <strong>de</strong> ne pas avoir d’argent que d’avoir le<br />

SIDA (« AIDS Borh Yane, Tea Yane O<strong>de</strong> »). Elle pensait aussi que le SIDA ne viendrait<br />

pas <strong>sur</strong> elle. Elle ne savait pas non plus quels hommes avaient le SIDA et lesquels ne<br />

l’avaient pas. Malheureusement quand elle est tombée gravement ma<strong>la</strong><strong>de</strong> et qu’elle a fait<br />

vérifier le sang et elle a su que son sang était positif.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent ont <strong>de</strong>s problèmes d’estomac à cause <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

bière qu’elles boivent. Sans compter qu’e certaines, vues, lors <strong>de</strong> nos<br />

observations dans les bars à bière <strong>de</strong> Paksé et <strong>de</strong> Vientiane <strong>de</strong>viennent grosses à<br />

cause <strong>de</strong>s litres <strong>de</strong> bière qu’elles avalent chaque jour. Ce<strong>la</strong> pose à plus long<br />

terme <strong>de</strong>s problèmes d’alcoolisme, et <strong>de</strong> perte <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> soi lors <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

négociation/re<strong>la</strong>tion sexuelle avec un client.<br />

Problèmes <strong>de</strong> violences<br />

Certaines <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent disent que leurs clients (notamment<br />

les hommes <strong>la</strong>o) sont physiquement violents avec elles (ils les frappent, ils les<br />

forcent, tirent les cheveux, etc.). Malee : « Ils <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> sucer et je dis non,<br />

je ne fais pas. Il y en a qui prennent ma tête pour me forcer à approcher ma<br />

tête <strong>de</strong> leur sexe. Mais je me débats et même une fois je suis tombée, je me suis<br />

fait mal et j’ai eu <strong>de</strong>s bleus <strong>sur</strong> les jambes. Il m’a poussée dans le lit et ma<br />

jambe a frappé un montant du lit. Il s’est mis à quatre pattes pour que je le<br />

suce, mais je n’ai pas fait. » Nounou : « Ils me serrent le cou pour que je meure.<br />

Je leur dis que si je n’ai pas d’argent ce n’est pas grave et je m’enfuis <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

chambre. »<br />

Trois <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées ont parlé <strong>de</strong> <strong>la</strong> violence psychologique infligée<br />

par les (insultes). Malee raconté ce que les clients disent : « Quand on fait ce<br />

travail il faut bien servir le client et ne pas en faire à sa guise. C’est le<br />

propriétaire qui te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> refuser <strong>de</strong>s choses aux clients ? ». Ce sont<br />

<strong>sur</strong>tout les clients <strong>la</strong>otiens qui ne sont pas gentils selon Malee et Nounou. Pour<br />

Malee, 4 clients <strong>sur</strong> 10 sont bons les autres sont mauvais.<br />

3.2.4. Leurs re<strong>la</strong>tions avec les intermédiaires<br />

La re<strong>la</strong>tion avec les patrons <strong>de</strong> bars ou <strong>de</strong> guesthouses<br />

A Paksé Malee raconte qu’elle est venue dans <strong>la</strong> guesthouse où elle habite<br />

actuellement pour trouver <strong>de</strong>s clients. Le propriétaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> guesthouse gagne<br />

<strong>sur</strong> <strong>la</strong> location <strong>de</strong>s chambres (50 000 Kips par nuit) et <strong>sur</strong> les consommations<br />

dans <strong>la</strong> boîte <strong>de</strong> nuit <strong>de</strong> <strong>la</strong> guesthouse. Si Malee attire <strong>de</strong>s clients c’est bien pour<br />

le chiffre d’affaire du propriétaire. Et si elle a <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions sexuelles avec <strong>de</strong>s<br />

clients c’est bien pour elle car elle gagne <strong>de</strong> l’argent. Mais si un client ne <strong>la</strong> paie<br />

pas c’est tant pis pour elle, elle est <strong>la</strong> seule responsable d’elle-même (elle n’a<br />

qu’à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au client <strong>de</strong> payer d’abord). En fait, <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion entre <strong>la</strong> jeune<br />

femme qui se prostitue et le propriétaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> guesthouse est <strong>la</strong> suivante : Lui<br />

fournit le lieu et elle attire les clients. Le propriétaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> guesthouse <strong>de</strong> Malee<br />

nous a dit : « Nous nous entraidons mutuellement. »<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

La re<strong>la</strong>tion entre les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> et <strong>la</strong> Mama-san et le Papa-san<br />

Le rapport entre les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent et <strong>la</strong> Mama-san ou le<br />

Papa-san est le suivant : Ces <strong>de</strong>rniers s’intéressent plus au rapport financier<br />

qu’à <strong>la</strong> protection <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> contre les mauvais clients.<br />

Nounou a donné un exemple <strong>sur</strong> son <strong>cas</strong> : « Je n'ose pas <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r d’argent<br />

aux clients avant. Si <strong>la</strong> Mama-san est intelligente je peux gagner, sinon parfois<br />

je ne gagne même pas <strong>de</strong> l'argent. Comme hier j'ai dormi avec quelqu'un qui<br />

vient <strong>de</strong> l'étranger (il montre qu'il vient <strong>de</strong> l'étranger pour montrer qu'il est<br />

riche). Au début il me dit qu'il va me donner 1 000 Bahts, mais finalement il ne<br />

me donne que 100 000 Kips. Comme moi je n'ose pas à négocier avec les<br />

clients, donc, je <strong>la</strong>isse tomber. »<br />

Trafic par <strong>de</strong>s proches ou <strong>de</strong>s personnes connues par les parents<br />

Fong a été envoyée par son père pour travailler en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> comme une femme<br />

<strong>de</strong> ménage.<br />

Kham a été emmenée par l’amie d’une amie en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> (Nakhon Phanom) où<br />

elle a vendu sa virginité.<br />

Malee a été vendue par une tante pour être déflorée par un homme à Paksé.<br />

Toui a été introduite dans une maison <strong>de</strong> jeu/bor<strong>de</strong>l à Nongkhai par « une amie<br />

d’une amie ».<br />

A son tour, Toui a emmené sa voisine, Khao pour lui proposer <strong>de</strong> se prostituer à<br />

Nong Khai.<br />

3.2.5. Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> sont-elles libres d’arrêter ?<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent ne pensent pas se prostituer toute leur vie.<br />

Elles veulent bien arrêter <strong>de</strong> se prostituer et faire une autre activité économique.<br />

Selon un article du journal Vientiane Times (3 juin 2003) : « The beer shop girl<br />

said that currently she could earn a lot of money. She could buy new clothes<br />

and still send some money to her family. But she does not p<strong>la</strong>n to work there<br />

forever. “I hope to give up working as beer shop girl in the future after I have<br />

earned enough money,” she said. »<br />

Toutes les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées disent qu’elles veulent s’arrêter à<br />

condition d’avoir suffisamment d’argent pour créer une autre activité comme un<br />

salon <strong>de</strong> coiffure, une épicerie, un magasin <strong>de</strong> couture, un bar à bière, etc.<br />

Souk dit qu’elle a économisé pour créer un bar à bière dans l’avenir. Malee dit :<br />

« J’économise un peu d’argent pour sécuriser le moment où je serai ma<strong>la</strong><strong>de</strong>,<br />

mais je ne sais pas comment je peux faire avec le peu d’argent que j’ai ».<br />

Les autres <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> n’arrivent pas à économiser, car elles n’ont pas tous<br />

les jours <strong>de</strong>s clients, elles dépensent pour elles-mêmes et elles envoient souvent<br />

<strong>de</strong> l’argent à leur famille.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

3.3. LES DIFFERENTES PERCEPTIONS SUR LA PROSTITUTION<br />

3.3.1. La perception <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> <strong>sur</strong> elles-mêmes<br />

Quatre <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> que j’ai interviewées pensent que ce qu’elles font n’est pas<br />

bien. Na dit que sa sœur adoptive lui a conseillé <strong>de</strong> s’arrêter par ce que c’est pas<br />

bien. Trois autres pensent qu’elles font une activité qui n’est pas bien vu par <strong>la</strong><br />

société et <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière n’a pas d’avis.<br />

Souk et Malee disent : « Une fois que j’ai eu décidé <strong>de</strong> vendre ma virginité,<br />

après il a fallu accepter <strong>la</strong> réalité que j’étais <strong>de</strong>venue une prostituée, qu’il fal<strong>la</strong>it<br />

le faire, car sinon on ne reçoit pas d’argent ».<br />

Après avoir perdu leur virginité sans être mariées, les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> pensent<br />

qu’elles n’ont plus <strong>de</strong> valeur et donc, qu’elles peuvent vendre leur sexe. Selon<br />

A. Doré (1981) : « Les rares interviews […] obtenues à propos <strong>de</strong> l'expérience <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> défloration confirment qu'il s'agit pour <strong>la</strong> femme d'un moment capital […].<br />

C'est dire combien <strong>la</strong> virginité, en tant qu'élément d’honneur (piep) et<br />

d'échange était traditionnellement valorisée. […] Le sentiment <strong>de</strong> <strong>la</strong> « perte<br />

totale <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie » a été vérifié auprès <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> vierges <strong>de</strong>venues prostituées à <strong>la</strong><br />

suite d'un viol : "Puisque nous sommes perdues (siê lèo), disaient-elles, nous le<br />

restons (siê leuy)". […] Si <strong>la</strong> virginité n'était pas requise traditionnellement<br />

pour le mariage, celle-ci n'en était donc pas moins valorisée et revêtait pour <strong>la</strong><br />

femme une importance considérable au point d'être confondue avec sa propre<br />

vie. Pour être offerte, elle avait besoin d'une contre partie. »<br />

3.3.2. La perception <strong>de</strong>s clients <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent<br />

Un homme, Porn à Paksé, qui fréquente régulièrement les <strong>femmes</strong> qui se<br />

prostituent, donne son avis <strong>sur</strong> <strong>la</strong> question : « Les Phou Sao (<strong>femmes</strong> qui se<br />

prostituent) pensent que <strong>la</strong> société pense que ce qu’elles font n’est pas bien.<br />

Quand elles viennent dans ma guest house je les reçois normalement comme<br />

mes autres clients. Quand elles viennent avec <strong>de</strong>s hommes je fais semb<strong>la</strong>nt <strong>de</strong><br />

ne rien voir, <strong>de</strong> ne rien montrer. Par exemple elles viennent pour 2 heures<br />

(short time) et je les <strong>la</strong>isse faire, je fais comme si je ne savais rien. Mais ça ne<br />

m’intéresse pas <strong>de</strong> savoir pourquoi elles font ça. A mon avis il y a plusieurs<br />

raisons à l’origine <strong>de</strong> ce qu’elles font. Première raison, c’est parce que les<br />

prostituées aiment bien le sexe, elles sont Kadèt-Kadèt (elles aiment bien sortir,<br />

faire <strong>la</strong> vie, faire l’amour). Deuxièmement, c’est parce que c’est <strong>la</strong> nécessité. Par<br />

exemple, les étudiantes (<strong>jeunes</strong> filles) peuvent avoir été trompées par les<br />

autres. Ou alors c’est parce qu’elles voient les autres qui <strong>de</strong>viennent riches et<br />

qu’elles veulent être à <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>. Ca c’est ce que je pense. Je ne touche pas<br />

vraiment <strong>la</strong> réalité <strong>de</strong>s gens qui se prostituent ».<br />

Les filles qui voyagent seules et qui dorment dans <strong>de</strong>s guesthouses peuvent être<br />

perçues comme étant disponibles sexuellement. Lyttleton (1999) dit : « Very<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

often commercial sex has been associated with travel and this still has strong<br />

resonance today, particu<strong>la</strong>rly with the opportunities men assume are<br />

appropriate to exploit when they are away from home. And likewise, it is<br />

associated with itinerant female tra<strong>de</strong>rs, who set up food and drink stalls on<br />

riverbanks or at seasonal fairs throughout the country and who, on oc<strong>cas</strong>ion,<br />

will sell sex. The term mae hang (divorced woman), when used to <strong>de</strong>scribe<br />

women tra<strong>de</strong>rs who are separated from marital ties and impelled to move<br />

around the country selling small goods as their income, carries with it the<br />

specific implication of a woman who is avai<strong>la</strong>ble for sex. »<br />

3.3.3. La perception <strong>de</strong>s familles <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

Nous n’avons pas eu le temps ni l’opportunité <strong>de</strong> rencontrer les familles <strong>de</strong>s<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées. Il semble que les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ne tiennent pas à<br />

ce que leurs parents sachent quelle est leur activité. Seuls <strong>la</strong> mère <strong>de</strong> Malee et les<br />

parents <strong>de</strong> Kham sont au courant. Mais selon Malee, sa mère n’a pas grand<br />

chose à dire <strong>sur</strong> cette situation puisqu’elles ont besoin d’argent.<br />

Selon Manichanh P. qui écrit dans le Vientiane Times du 26 mai 2004 : « Most<br />

rural girls must leave school in or<strong>de</strong>r to help their parents and have to learn<br />

how to run a household at a young age. Parents commonly believe that<br />

education is not necessary for women. They feel that it is enough for them to be<br />

able to read and write and encourage their daughters to give up school, saying<br />

that their education will stop anyway when they get married. Once they are<br />

married, the main duty of women is to look after their family and children. It<br />

is believed that political and educational issues are the business of men only, so<br />

that women have less chance of pursuing their studies to a higher level. »<br />

3.3.4. Les autres perceptions <strong>de</strong> <strong>la</strong> société et <strong>de</strong>s organisations<br />

Nous nous appuyons <strong>sur</strong> un entretien avec une femme (Véa) d’une quarantaine<br />

d’années qui est ouvrière dans une usine à Vientiane. Pour Véa <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qu’elle connaît et qui travaillent dans les usines, viennent <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

province. Elles sortent avec leurs copains, elles boivent <strong>de</strong> <strong>la</strong> bière et ne veulent<br />

plus travailler à l’usine. Elles trouvent un travail dans un bar à bière, sortent<br />

avec les clients qui viennent boire et certains se prostituent, car elles ont besoin<br />

<strong>de</strong> l’argent pour payer les frais quotidiens.<br />

Quelques filles ont plus <strong>de</strong> chance, ce sont celles qui sont supportées par les<br />

« Thao Kéa » (hommes d’affaires), elles gagnent beaucoup d’argent, par<br />

exemple, pour acheter du terrain, une maison, une moto, etc. Elle <strong>de</strong>viennent<br />

leurs petites <strong>femmes</strong>. Selon Véa, les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> préfèrent vendre <strong>de</strong>s bières<br />

que <strong>de</strong> travailler dans l’usine parce qu’elles aiment bien faire cette sorte <strong>de</strong><br />

travail. C’est un travail plus facile, qui se fait à l’ombre, il suffit <strong>de</strong> se maquiller,<br />

s’occuper <strong>de</strong>s clients, etc.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Mais il y a celles qui n’ont pas <strong>de</strong> choix. Car elles ont divorcé <strong>de</strong> leur mari,<br />

certaines sont abandonnées par leur copain. Véa connaît une femme originaire<br />

<strong>de</strong> Paksé, divorcée, avec <strong>de</strong>ux enfants qui était déprimée <strong>de</strong> sa vie a cause du<br />

divorce. Elle a décidé <strong>de</strong> se prostituer dans un bar pour gagner <strong>de</strong> l’argent et<br />

envoyer à sa mère pour élever ses enfants.<br />

Pour Véa, les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> n’aiment pas les ouvriers qui viennent après leur<br />

travail <strong>sur</strong> les chantiers <strong>de</strong> construction. Ils puent <strong>la</strong> sueur parce qu’ils viennent<br />

directement après le travail pour boire <strong>de</strong> <strong>la</strong> bière, dansent avec les <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong> dans les bars. Mais même si elles n’aiment pas, elles le font quand<br />

même pour gagner leur pourcentage <strong>sur</strong> les bouteilles <strong>de</strong> bière. Véa parle d’une<br />

fille qui est riche et qui aime bien se prostituer avec p<strong>la</strong>isir. Mais elle reconnaît<br />

que pour <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> elles le font par nécessité.<br />

Vea dit que son mari sortait avec les prostituées avant, c’est pourquoi elle n’aime<br />

pas les filles <strong>de</strong>s bars à bière. Sinon ça ne <strong>la</strong> gêne pas du tout que ces filles<br />

fassent ce travail. Parce que c’est le choix <strong>de</strong>s gens, si les filles n’aiment pas<br />

travailler dans les usines, elles n’ont pas d’autre choix que d’aller travailler dans<br />

un bar à bière. Parce qu’elles n’ont pas <strong>de</strong> haut niveau d’éducation.<br />

Entretien avec un Bonze à Paksé<br />

La plupart <strong>de</strong> filles qui se prostituent à Paksé sont venues d’autres provinces (environ 80%). Mais<br />

il y a certaines filles qui mentent en disant qu’elles viennent <strong>de</strong> Vientiane pour cacher leurs vrai<br />

origine (Savannakhet ou <strong>de</strong> Luang Prabang). Elles mentent car elles pensent que ce qu’elles font<br />

n’est pas bien. Mais, il ne comprend pas : si ce n’est pas bien pour elles, pourquoi continuent-elles<br />

à le faire ? Pour le bonze, c’est <strong>la</strong> volonté <strong>de</strong>s filles. Mais en même temps, il pense que c’est aussi<br />

par nécessité. Certains filles ont été trompées. Mais normalement même si l’on a été trompé <strong>de</strong><br />

venir travailler dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> il est toujours possible <strong>de</strong> retourner à <strong>la</strong> maison. Il dit que les<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ont été trompées par <strong>de</strong>s copines qui leur promettent un bon travail en ville, bien<br />

payé, etc. Mais leurs copines ne leurs disent pas ce que c’est comme travail. Au moment où elles<br />

arrivent les filles ne savent pas qu’elles sont venues avec <strong>de</strong>s Sao Bolikane. Finalement elles<br />

voient que ce n’est pas le travail comme ce qu’on leur avait promis. Mais comme elles sont déjà<br />

venues, elles n’osent pas rentrer chez elles, car elles ont honte <strong>de</strong> savoir qu’elles sont parties avec<br />

<strong>de</strong>s Sao Bolikane. Elles ont aussi peur que les gens dans leurs familles disent du mal d’elles,<br />

qu’elles sont <strong>de</strong>s Sao Bolikane comme leurs copines. Une autre raison c’est qu’elles n’ont souvent<br />

pas d’argent pour retourner dans leur vil<strong>la</strong>ge. Elles continuent donc à se prostituer pour gagner<br />

d’argent.<br />

Selon lui, 90% <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> aiment bien faire ça. Ce<strong>la</strong> n’a rien à voir avec <strong>la</strong> pauvreté. Il dit<br />

que c’est le problème <strong>de</strong> l’honneur <strong>de</strong>s gens. Parce que les filles font toutes les sortes <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tions<br />

sexuelles avec les hommes pour <strong>de</strong> l’argent. Les hommes ont <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions sexuelles différentes<br />

d’avec leurs <strong>femmes</strong> (« line xou méan line sia, Line mia méan line chtong », – avoir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion<br />

sexuelle avec les prostitués est maximum, mais avec <strong>la</strong> femme on ne vas jamais jusqu’au bout).<br />

Il pense que si les prostituées n’aiment pas faire ce métier, pourquoi elles <strong>la</strong>issent les hommes les<br />

torturer ? Il parle <strong>de</strong> l’honneur <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong>. Si les prostituées disent qu’elles n’ont pas d’argent,<br />

pas <strong>de</strong> travail, pourquoi les parents pouvaient quand même nourrir leurs enfants dans le passé ?<br />

Nous lui suggérons que c’est à cause <strong>de</strong> leur revenu qui est très bas. Il répond que cette raison<br />

argumentée par les prostituées n’est pas va<strong>la</strong>ble.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

4. INTERPRETATION DES RESULTATS, DISCUSSION<br />

Il n'était pas question, <strong>sur</strong> un si petit échantillon, <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s comparaisons<br />

entre Vientiane et Paksé, par exemple, ou <strong>de</strong> tirer <strong>de</strong>s conclusions définitives <strong>sur</strong><br />

<strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos. On observe cependant <strong>de</strong>s similitu<strong>de</strong>s intéressantes<br />

dans les situations individuelles <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong>.<br />

4.1. LA SITUATION DES JEUNES FEMMES QUI SE PROSTITUENT<br />

4.1.1. Le <strong>cas</strong> <strong>de</strong> Malee et <strong>de</strong> Nounou<br />

Nous avons choisi <strong>de</strong> faire une brève analyse sociologique du parcours <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent l’une à Paksé et l’autre à Vientiane : Malee et<br />

Nounou.<br />

Malee a 21 ans, Nounou en a 18. Malee vient <strong>de</strong> <strong>la</strong> Capitale Vientiane, mais elle<br />

se prostitue à Paksé. Nounou vient <strong>de</strong> <strong>la</strong> campagne <strong>de</strong> <strong>la</strong> banlieue <strong>de</strong> Vientiane,<br />

elle se prostitue dans Vientiane. Malee n’a pas <strong>de</strong> travail en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong>. Nounou était chanteuse dans un bar avant <strong>de</strong> se prostituer. Toutes<br />

les <strong>de</strong>ux envoient au moins 30 USD à leur famille par mois. Malee a perdu son<br />

père et a dû trouver <strong>de</strong> l’argent pour ai<strong>de</strong>r sa famille. Nounou a vécu <strong>la</strong><br />

séparation (et l’abandon) <strong>de</strong> ses parents et a dû également subvenir aux besoins<br />

<strong>de</strong> ses frères. Toutes les <strong>de</strong>ux ont mentionné l’ai<strong>de</strong> qu’elles se sentent <strong>de</strong>voir<br />

apporter à leurs frères pour qu’ils finissent leurs étu<strong>de</strong>s. On a le sentiment d’un<br />

<strong>de</strong>voir <strong>de</strong> sacrifice pour les frères.<br />

Toutes les <strong>de</strong>ux ont eu <strong>de</strong>s débuts perturbés dans leur vie sexuelle : Malee a été<br />

violée par un homme (même si ce<strong>la</strong> s’appelle pudiquement « vendre sa<br />

virginité ») et Nounou a été plus ou moins trompées par ses copains (et<br />

menacée par une <strong>femmes</strong> jalouse). On ne peut pas dire que leur vie sexuelle a<br />

été très épanouissante.<br />

Toutes les <strong>de</strong>ux – comme <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> rencontrées pendant<br />

l’étu<strong>de</strong> – expriment <strong>de</strong>s problèmes simi<strong>la</strong>ires dans leur activité <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> :<br />

le sentiment <strong>de</strong> ne pas être comprises, <strong>de</strong> ne pas être respectées par <strong>la</strong> société et<br />

aussi par les clients. Elles sont victimes <strong>de</strong> violences physiques et<br />

psychologiques. Elles ne savent pas vraiment bien négocier avec les clients et<br />

parfois les clients ne les paient pas ou pas autant qu’elles le souhaitaient.<br />

Elles ne manquent pas d’intelligence, elles ont été à l’école (jusqu’au collège)<br />

mais elles n’ont pas pu finir leurs étu<strong>de</strong>s. Nounou est capable <strong>de</strong> chanter, <strong>de</strong><br />

faire du théâtre. Par contre Malee n’a pas exprimé <strong>de</strong> prédispositions<br />

particulières pour faire autre chose <strong>de</strong> sa vie. Il semble qu’elles n’ont pas eu <strong>de</strong><br />

chance dans <strong>la</strong> vie et qu’elles s’en sortent comme elles peuvent pour <strong>sur</strong>vivre.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Elles ont <strong>de</strong>s ambitions limités, mais elles savent ce qu’elles veulent faire à<br />

l’avenir : Malee veut ouvrir une épicerie, comme sa mère, tandis que Nounou<br />

voudrait être institutrice et chanteuse.<br />

Nounou pense qu’un jour elle aura <strong>de</strong> l’argent et qu’elle aura le pouvoir dans <strong>la</strong><br />

société pour que les voisins ne se moquent plus d’elle. Car même si elle est Kari<br />

(prostituée), elle ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas <strong>de</strong> riz aux autres pour manger. Et d’ailleurs<br />

elle a toujours rendu le riz qu’elle avait emprunté (expression <strong>la</strong>otienne qu’on<br />

utilise souvent pour comparer <strong>la</strong> pauvreté et l’honneur le « Piep »). Car même si<br />

on est pauvre, on n’a pas à emprunter le riz aux autres.<br />

Malee pense que <strong>la</strong> société <strong>la</strong> regar<strong>de</strong> comme si elle n’était pas une fille bien.<br />

Elle sent que <strong>la</strong> société ne veut pas d’elle et elle a peur qu’on se moque d’elle.<br />

Elle se dit que peut-être les gens voudraient lui parler, mais au fond, elle ne sait<br />

pas ce qu’ils pensent d’elle.<br />

Toutes les <strong>de</strong>ux expriment une souffrance commune, celle <strong>de</strong> faire un travail<br />

qu’elles n’aiment pas et qu’elles trouvent dégradant. Elles souffrent aussi du<br />

regard <strong>de</strong>s autres, celui <strong>de</strong>s gens biens, normaux et en particulier le regards <strong>de</strong>s<br />

clients (hommes aisés <strong>de</strong> <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse bourgeoise) qui les insultent parce qu’elles<br />

sont <strong>de</strong>s prostituées.<br />

4.1.2. Y a-t-il <strong>de</strong>s raisons dues à l’exclusion ?<br />

La <strong>prostitution</strong> n’est pas bien vue par <strong>la</strong> société. Pour cette raison, les <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong> se sentent exclues <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Mais avant d’entrer dan <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>,<br />

étaient-elles déjà exclues <strong>de</strong> <strong>la</strong> société ?<br />

Un niveau d’éducation faible<br />

Les gens à <strong>la</strong> campagne sont un accès à l’éducation limité parce qu’il y a peu <strong>de</strong><br />

bons professeurs qui veulent travailler à <strong>la</strong> campagne. Il y a <strong>de</strong>s écoles mais elles<br />

sont souvent loin <strong>de</strong>s maisons <strong>de</strong>s élèves. Les parents déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> ne pas <strong>la</strong>isser<br />

leurs enfants aller à l’école car ils ont besoin <strong>de</strong> main d’œuvre pour l’exploitation<br />

familiale. Les fournitures sco<strong>la</strong>ires pour les enfants sont <strong>de</strong> plus en plus chères<br />

pour le budget <strong>de</strong>s parents. Les familles n’ont pas assez d’argent pour supporter<br />

l’éducation <strong>de</strong> tous leurs enfants. Les premières à être exclues sont les filles.<br />

Pourtant, plus les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ont <strong>de</strong> l’éducation, plus elles pensent loin. Par<br />

contre, les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui n’ont que peu d’éducation, n’ont pas une vision <strong>de</strong><br />

leur vie à long terme. Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> interviewées ont le niveau collège.<br />

Mais si ce<strong>la</strong> paraît déjà un bon niveau, c’est insuffisant (car le niveau<br />

d’éducation est très faible) et ça ne permet pas d’intégrer le mon<strong>de</strong> du travail<br />

professionnel. Lorsqu’elles étaient en milieu rural agricole, elles reproduisaient<br />

les schémas traditionnels d’agriculture <strong>de</strong> subsistance. Dans un mon<strong>de</strong><br />

changeant, urbain, elles ont du mal à imaginer <strong>de</strong>s activités économiques pour<br />

gagner <strong>de</strong> l’argent et elles ont souvent <strong>de</strong>s schémas simples qui reproduisent ce<br />

qu’elles connaissent : créer un bar à bière ou ouvrir une épicerie.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Une inégalité liée au genre et à <strong>la</strong> différence <strong>de</strong> c<strong>la</strong>sse sociale<br />

Dans <strong>la</strong> société <strong>la</strong>o, même si <strong>de</strong>puis 1975 il y a eu <strong>de</strong>s efforts pour l’égalité<br />

hommes-<strong>femmes</strong>, <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> est toujours inférieure à celle <strong>de</strong>s<br />

hommes. Des lois sont en cours d’é<strong>la</strong>boration pour remédier à cette situation.<br />

Mais les habitu<strong>de</strong>s culturelles et sociales sont encore très présentes au Laos et<br />

l’effort <strong>de</strong> mise à niveau prendra du temps.<br />

Dans le <strong>cas</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>, on a assez c<strong>la</strong>irement une démarcation entre<br />

hommes riches (clients) et <strong>femmes</strong> pauvres (prostituées). C’est, selon nous,<br />

l’expression très nette d’une différence <strong>de</strong> c<strong>la</strong>sse sociale (ce qui peut paraître<br />

étonnant dans une société où les c<strong>la</strong>sses avaient été abolies).<br />

4.1.3. Les problèmes rencontrés par les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

Le piège <strong>de</strong> <strong>la</strong> pauvreté<br />

Ce qui étonnant c’est que les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> disent qu’elles ne peuvent pas<br />

arrêter <strong>de</strong> se prostituer parce qu’elles n’ont pas d’économies pour faire une<br />

autre activité. Il est possible qu’elles savent aussi qu’avec une autre activité elles<br />

n’auraient pas le même mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie (à l’usine ou à <strong>la</strong> rizière le travail est plus<br />

dur) et qu’elles ne gagneraient pas autant d’argent aussi rapi<strong>de</strong>ment.<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> rencontrées ont <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> pauvreté. On pourrait<br />

penser qu’avec <strong>de</strong>s tarifs <strong>de</strong> 25 USD pour une re<strong>la</strong>tion sexuelle d’une nuit, ce<strong>la</strong><br />

permet d’accumuler <strong>de</strong> l’argent. Il semble que ce ne soit pas aussi évi<strong>de</strong>nt.<br />

D’abord les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> n'ont pas toujours beaucoup <strong>de</strong> clients (leurs<br />

revenus ne sont ni très réguliers ni très élevés), ensuite, elles donnent <strong>de</strong><br />

l'argent à leur famille. Et puis elles doivent payer leur loyer, leur nourriture,<br />

leurs frais <strong>de</strong> vie (vêtements, etc.). Elles dépensent aussi pour <strong>de</strong>s choses<br />

qu’elles n’auraient pas eues lorsqu’elles étaient à <strong>la</strong> campagne : voyages,<br />

téléphone portable, vêtements à <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>, etc.<br />

Il y a un piège <strong>de</strong> cercle vicieux : on gagne <strong>de</strong> l’argent mais on en dépense aussi<br />

parce que <strong>la</strong> société <strong>de</strong> consommation pousse à <strong>la</strong> consommation et au désir<br />

d’avoir plus.<br />

Les problèmes <strong>de</strong> santé<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ont <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> santé (estomac, obésité, alcoolisme)<br />

car elles boivent beaucoup <strong>de</strong> bière.<br />

Outre les ma<strong>la</strong>dies sexuellement transmissibles dont elles peuvent être<br />

souffrantes, elles encourent un risque plus élevé que d’autres catégories sociales<br />

<strong>de</strong> contracter le VIH. Notamment parce que leurs clients refusent assez souvent<br />

<strong>de</strong> mettre un préservatif. Mais il est à noter qu’au Laos il y a quand même <strong>de</strong>s<br />

informations qui circulent et <strong>de</strong>s campagnes <strong>de</strong> sensibilisation car on note que<br />

les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ont le réflexe du préservatif. Si leurs clients acceptaient aussi<br />

le préservatif ça serait moins risqué pour les <strong>femmes</strong> qui se prostituent.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Perte <strong>de</strong> repères dans un environnement qui change<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui viennent <strong>de</strong> <strong>la</strong> campagne n'ont pas l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville,<br />

elles ne savent pas s'orienter, elles sont perdues. Elles n’ont pas les mêmes<br />

repères qu’à <strong>la</strong> campagne. Parfois elles ne connaissent personne quand elles<br />

arrivent. Elles sont donc très vulnérables. Les gens <strong>de</strong>s villes, notamment les<br />

hommes qui cherchent <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> filles, ont le pouvoir <strong>de</strong> manipuler, mentir à<br />

ces filles. On le voit par exemple avec les hommes qui viennent draguer les<br />

ouvrières à <strong>la</strong> sortie <strong>de</strong>s usines et qui profitent <strong>de</strong> <strong>la</strong> naïveté <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> filles <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> campagne.<br />

En al<strong>la</strong>nt plus loin, on voit que <strong>de</strong>s intermédiaires – notamment <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong> qui<br />

se sont elles même prostituées avant – gagnent <strong>de</strong> l’argent en entraînant <strong>de</strong>s<br />

<strong>jeunes</strong> filles dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> (vente <strong>de</strong> virginité, ou vente à <strong>de</strong>s trafiquants<br />

d’exploitation sexuelle dans <strong>la</strong> région – Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>, Ma<strong>la</strong>ysia, etc.).<br />

Migrations en <strong>de</strong>hors du Laos<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ne travaillent pas seulement dans les gran<strong>de</strong>s villes du pays,<br />

mais elles traversent aussi <strong>la</strong> frontière pour travailler dans les pays voisins.<br />

Souvent elles traversent <strong>la</strong> frontière sans papiers officiels et elles <strong>de</strong>viennent<br />

migrantes illégales. Elle <strong>de</strong>viennent vulnérables par rapport à <strong>la</strong> police mais<br />

aussi à ceux qui profitent <strong>de</strong> ces personnes en situation illégale (trafiquants).<br />

4.1.4. Une <strong>prostitution</strong> artisanale et re<strong>la</strong>tivement libre<br />

A Vientiane et à Paksé, nous avons observé <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent<br />

librement. Elles ne sont pas dominées ni forcées par <strong>de</strong>s proxénètes. Une <strong>de</strong>s<br />

<strong>femmes</strong> a dit qu’elle préfère travailler au Laos qu’en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> car au Laos elle<br />

est libre <strong>de</strong> choisir les clients qu’elle veut.<br />

Ce<strong>la</strong> se confirme dans <strong>de</strong> nombreux <strong>cas</strong> rencontrés et dans <strong>la</strong> littérature écrite à<br />

ce sujet. Chris Lyttleton (1999) parle <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tions sexuelles négociées entre<br />

hommes et <strong>femmes</strong>.<br />

Ce qui est c<strong>la</strong>ir c’est que l’on ne voit pas, à Ventiane ou à Paksé, aujourd’hui, ce<br />

qu’on peut voir en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> : <strong>de</strong>s filles dans <strong>de</strong>s vitrines que les hommes<br />

choisissent avec <strong>de</strong>s numéros.<br />

4.1.5. Une forme d’émancipation pour les <strong>femmes</strong> ?<br />

D’après <strong>de</strong> nombreux témoignages, il semble que les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> préfèrent<br />

travailler en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leur famille pour être autonomes et échapper aux<br />

traditions familiales et avoir une certaine liberté économique et sexuelle.<br />

Elles dépen<strong>de</strong>nt économiquement <strong>de</strong> leurs parents. Elles travaillent à <strong>la</strong> maison<br />

avec leurs parents. Elles ont <strong>la</strong> liberté limitée par leurs parents, par exemple,<br />

elles ne peuvent pas sortir <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>la</strong> nuit, parce que c’est dangereux pour<br />

elles. Le fait qu’elles quittent leur maison pour travailler en ville a permis aux<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> d’être plus indépendantes. Elles peuvent déci<strong>de</strong>r ce qu’elles<br />

veulent. Mais le problème c’est quand elles changent leur lieu <strong>de</strong> vie, elles ont du<br />

mal à trouver un endroit pour loger, c’est difficile pour elles <strong>de</strong> trouver du<br />

travail, car elles ont une éducation qui se limite souvent au niveau collège. Elles<br />

n’ont pas <strong>de</strong> formation leur permettant <strong>de</strong> s’en sortir. Le travail qu’elles peuvent<br />

faire, c’est dans le domaine <strong>de</strong> l’artisanat : tissage, travail <strong>de</strong> l’usine (garment<br />

factories), dans le domaine <strong>de</strong>s services comme serveuse dans les bars à bière<br />

ou les endroits <strong>de</strong> divertissements.<br />

Chaw (2003) décrit le phénomène <strong>de</strong>s ouvrières <strong>de</strong>s usines en Birmanie<br />

simi<strong>la</strong>ire à celui du Laos : « However, when it comes to daughters’ <strong>de</strong>cisions<br />

about whether to engage in factory work, these combine economic and<br />

personal motives. The economic motives inclu<strong>de</strong>d saving money to continue<br />

schooling or doing small business, sending money home, spending money on<br />

their own, having a regu<strong>la</strong>r income (unlike vil<strong>la</strong>ge work) and responsibility for<br />

the well-being of the household. In terms of personal motivation, women<br />

migrate to the city to experience new things and expand their knowledge, to<br />

flee from tiresome agriculture work, to gain a good reputation for working in<br />

the city, to escape the control of parents and el<strong>de</strong>rs, and to attain personal<br />

freedom. Therefore, it should be un<strong>de</strong>rstood that the <strong>de</strong>cision to seek factory<br />

work is not straightforwardly economic. It is also an opportunity for young<br />

women to look for alternatives in<strong>de</strong>pen<strong>de</strong>nt of parents and el<strong>de</strong>rs ».<br />

4.2. IL N’Y A PAS DE PROSTITUTION SANS CLIENTS !<br />

4.2.1. A propos <strong>de</strong> <strong>la</strong> virginité <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong><br />

La virginité semble être importante pour les hommes qui veulent que leur<br />

femme soit vierge. Mais il semble qu’ils soient aussi à <strong>la</strong> recherche <strong>de</strong> <strong>femmes</strong><br />

vierges, autres que leur propre femme, peut-être pour y trouver le p<strong>la</strong>isir d’être<br />

le premier (ou pour les hommes âgés <strong>de</strong> croire que ça va leur apporter <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

<strong>jeunes</strong>se) ou parce que l’on croit qu’on a moins <strong>de</strong> chances d’attraper <strong>de</strong>s<br />

ma<strong>la</strong>dies sexuellement transmissibles.<br />

Il y a comme une volonté <strong>de</strong> domination <strong>de</strong>s hommes <strong>sur</strong> les <strong>femmes</strong>, et <strong>de</strong><br />

contrôle <strong>de</strong> <strong>la</strong> sexualité (et <strong>de</strong> <strong>la</strong> virginité) <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong>.<br />

Les hommes qui paient pour pouvoir déflorer une fille vierge et qui en même<br />

temps veulent que leur épouse soit verge au mariage, savent que les <strong>jeunes</strong> filles<br />

qu’ils auront déflorées auront du mal à trouver un mari dans une société où l’on<br />

prise <strong>la</strong> virginité <strong>de</strong>s futures épouses.<br />

Il n’est pas étonnant que les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> une fois qu’elles ne sont plus vierges<br />

sans être mariées estiment que leur valeur est diminuée et <strong>de</strong> là, s’engagent<br />

dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

4.2.2. Pourquoi les hommes <strong>la</strong>o fréquentent-ils <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> ?<br />

Le divorce est mal perçu au Laos dans les c<strong>la</strong>sses bourgeoises et en Asie il est<br />

aussi aisé <strong>de</strong> prendre une petite épouse pour éviter le divorce et les problèmes<br />

avec les enfants. Parfois il y a <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> dépendance entre le mari<br />

fonctionnaire et sa femme qui a du bien et <strong>de</strong> l’argent. Et le mari n’a donc pas<br />

spécialement intérêt à divorcer.<br />

Mais Lyttleton (1999) va plus loin et explique : « Commercial sex is frequently<br />

associated in the local imaginary with travel from one province to another.<br />

Extra-marital sex in these situations is frequently <strong>de</strong>picted as happening ‘by<br />

chance’. Significantly, men actively maintain this image. Lao men all know<br />

that in various situations sexual partners can be found no matter where in the<br />

country one might be. But both men and women <strong>de</strong>pict the unassumed nature<br />

of these potential liaisons—you never quite know when you might encounter<br />

them. In this reading of events and their outcomes, men refuse to take<br />

responsibility for their actions by constantly referring to their <strong>la</strong>ck of concrete<br />

intention to find a partner. Often I would hear <strong>de</strong>scriptions such as:<br />

« I couldn’t help myself,—it was an ‘emergency’ [suksoen, meaning emergency<br />

is a euphemism for a chance encounter that has led to sex]; when I’m away<br />

from home, I meet a ‘mae hang’—it’s an ‘emergency’; sud<strong>de</strong>nly confronted with<br />

a beautiful woman, I had ’no control. » The term gai long (literally ‘lost<br />

chicken’) is used to specifically refer to a woman who one does not p<strong>la</strong>n to sleep<br />

with. For example, a man said: « I can’t restrain myself, a gai long comes<br />

along and I can’t stop myself. If I’m drunk and a pretty woman comes, I won’t<br />

use a condom, that would be a waste ». Mirroring patterns in other Asian<br />

countries where women commonly <strong>de</strong>pict sexuality using male standards, Lao<br />

women repeat the same exp<strong>la</strong>nations : « sometimes our husbands don’t always<br />

intend to sleep with other women. They just end up in situations ».<br />

Si l'on arrêtait tous les clients,<br />

il n'y aurait plus personne à <strong>la</strong> tête<br />

<strong>de</strong> l'Etat<br />

Mme le Dr Hoa, ancienne ministre <strong>de</strong> <strong>la</strong> Santé du Vietnam du Nord lors <strong>de</strong> <strong>la</strong> réunion internationale<br />

d'experts <strong>sur</strong> l'exploitation sexuelle <strong>de</strong>s êtres humains, Unesco, Séoul, Corée du Sud, Juin 1995.<br />

Ce que notre enquête a montré c’est que les clients viennent <strong>de</strong> tous les horizons<br />

socioculturels : ouvriers <strong>de</strong>s chantiers, commerçants, fonctionnaires, etc. Mais il<br />

est à noter, quand même, que parmi ceux qui fréquentent les lieux que nous<br />

avons visités, les fonctionnaires représentent une part importante <strong>de</strong> <strong>la</strong> clientèle<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>. Outre les traditionnels policiers et militaires (souvent affectés<br />

loin <strong>de</strong> leur lieu d’origine), il y a <strong>de</strong>s fonctionnaires <strong>de</strong>s douanes et <strong>de</strong>s forêts.<br />

Mais il y a aussi tous ceux qui bénéficient <strong>de</strong> <strong>la</strong> manne <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> internationale<br />

d’une manière ou d’une autre. Nos observations <strong>de</strong>s voitures à <strong>la</strong> sortie <strong>de</strong> boîtes<br />

<strong>de</strong> nuit le confirment (voitures à p<strong>la</strong>ques bleues avec <strong>de</strong>s autocol<strong>la</strong>nts <strong>de</strong>s<br />

projets). Ce sont <strong>de</strong>s hommes qui ont <strong>de</strong> l’argent et qui voyagent en province. A<br />

ce sujet, Marc Dufumier suggère <strong>de</strong> réfléchir au lien qui existe entre corruption<br />

(et l’effet corrupteur <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>) et <strong>prostitution</strong>.<br />

Et dans son livre Dakin (2003 : 169) raconte sa vie au Laos en 1998 : « The truth<br />

was, <strong>prostitution</strong> was rampant in Laos, and cheap. Lao men regu<strong>la</strong>rly visited<br />

brothels, both before and during marriage. In p<strong>la</strong>ces like Sayabuli, drinking<br />

and screwing were the main lei<strong>sur</strong>e activities; there wasn't much else to do ».<br />

4.3. LA MONDIALISATION ET LES CHANGEMENTS SOCIAUX<br />

4.3.1. L’impact <strong>de</strong> <strong>la</strong> mondialisation<br />

Tout le mon<strong>de</strong> est affecté par <strong>la</strong> mondialisation. Mais il n’est facile <strong>de</strong> faire le<br />

lien entre les forces qui tirent les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> vers <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> et<br />

l’accélération <strong>de</strong> <strong>la</strong> mondialisation <strong>de</strong> l’économie. Les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie sont en train<br />

<strong>de</strong> changer <strong>de</strong> plus en plus. La consommation <strong>de</strong>s produits avec <strong>de</strong>s nouvelles<br />

technologies se multiplie. Avec le changement vers une économie <strong>de</strong> libre<br />

marché, les gens ont besoin <strong>de</strong> plus en plus d'argent pour vivre car l’économie<br />

<strong>la</strong>o se monétarise <strong>de</strong> plus en plus.<br />

L’attraction <strong>de</strong>s gens dans <strong>la</strong> campagne vers les villes est importante et c’est un<br />

phénomène généralisé dans <strong>de</strong> nombreux pays. Il y a une augmentation <strong>de</strong>s<br />

migrations et on assiste à un mouvement général d’exo<strong>de</strong> rural. Les paysans se<br />

retrouvent à <strong>la</strong> ville pour travailler dans les usines.<br />

Selon Pholséna (2004) : « De nouveaux problèmes sociaux, en particulier chez<br />

les <strong>jeunes</strong>, causés par l'ouverture économique du pays [et <strong>de</strong> <strong>la</strong>] société<br />

<strong>la</strong>otienne au mon<strong>de</strong> extérieur. Les effets <strong>de</strong> ces bouleversements peuvent être<br />

observés dans les pays voisins où les migrations rurales-urbaines, <strong>la</strong><br />

criminalité juvénile et les problèmes liés à <strong>la</strong> drogue augmentent ». Souvent les<br />

problèmes sont reportés <strong>sur</strong> <strong>la</strong> faute <strong>de</strong>s étrangers : <strong>prostitution</strong>, Sida, drogue,<br />

etc. On dit ça dans les conversations ou dans <strong>la</strong> presse.<br />

Le Laos <strong>de</strong>vient un pays <strong>de</strong> transit pour les corridors économiques régionaux.<br />

Les nouvelles routes, les industries manufacturières ne nécessitant pas une<br />

main d’œuvre trop qualifiée et trop chère, attireront les ruraux du Laos vers <strong>de</strong>s<br />

centres plus urbains. Ils changeront leur économie <strong>de</strong> subsistance en économie<br />

<strong>de</strong> <strong>sur</strong>vivance où ils essaieront <strong>de</strong> vivre avec leur maigre sa<strong>la</strong>ire et <strong>de</strong>vront tout<br />

acheter : nourriture, vêtements, produits <strong>de</strong> consommation courante. Ils<br />

passeront du sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> paysans (pauvres et libres) à celui d’ouvriers sa<strong>la</strong>riés. Il<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

faudra voir si leurs enfants voudront s’adapter à l’usine ou si l’industrie du sexe<br />

fleurissante leur proposera <strong>de</strong>s emplois plus rémunérateurs.<br />

4.3.2. L’influence <strong>de</strong> <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> <strong>sur</strong> le Laos<br />

L’influence <strong>de</strong> <strong>la</strong> Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> est importante : TV, musique, radio, mo<strong>de</strong><br />

vestimentaire, présence <strong>de</strong> plus en plus importante <strong>de</strong> touristes thaïs qui<br />

viennent dépenser leur argent dans un pays qui a gardé les traditions que les<br />

thaïs ont perdues en se mo<strong>de</strong>rnisant. Il y a une dépendance culturelle, un besoin<br />

<strong>de</strong> consommer comme chez les voisins (les cousins) <strong>de</strong> l’autre côté du Mékong.<br />

Pour acquérir <strong>de</strong>s choses que leurs parents ne peuvent pas leur donner<br />

(téléphone portable, vêtements à <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>, etc.) les <strong>jeunes</strong> ont besoin d’argent.<br />

« Globalisation is in the process of transforming Laos's re<strong>la</strong>tions with the<br />

world at <strong>la</strong>rge. […] The Lao are equally ambivalent about the Thai. On the one<br />

hand they admire their mo<strong>de</strong>rnity and sophistication, which since the <strong>la</strong>te<br />

1980s they have followed via Thai TV. On the other hand, via this same<br />

medium, they are exposed daily to all of the most unattractive and frightening<br />

consequences of Thai<strong>la</strong>nd's rapid economic ascent […], whether they be<br />

problems of drug addiction, gangsterism, <strong>prostitution</strong>, corruption or marital<br />

breakdown » (Evans 2003 : 226).<br />

De nombreux <strong>la</strong>o (on parle <strong>de</strong> 300 000 personnes) tentent leur chance en<br />

Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong> pour y trouver du travail. Ils parlent <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>de</strong> leurs voisins<br />

(<strong>sur</strong>tout les <strong>jeunes</strong>) et tous ne finissent pas enfermés dans une usine ou un<br />

bor<strong>de</strong>l. Lorsqu’ils reviennent au Laos ils tentent les plus <strong>jeunes</strong>, ceux qui<br />

hésitent. Mais selon l’AFESIP-Laos, il y aurait environ 10 000 <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

<strong>la</strong>o qui seraient impliquées dans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> en Thaï<strong>la</strong>n<strong>de</strong>.<br />

4.3.3. Changements <strong>de</strong> valeurs dans <strong>la</strong> société<br />

La société <strong>la</strong>o change, quelle le veuille ou non, pour les bons aspects comme<br />

pour les mauvais. Certes, l’ouverture du pays apportera une dynamique<br />

économique qui n’existait pas, créera <strong>de</strong>s emplois, apportera <strong>de</strong>s facilités pour<br />

les nouvelles générations, ou du moins celles <strong>de</strong>s c<strong>la</strong>sses sociales les moins<br />

défavorisées. L’ouverture à un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> décisions politiques plus participatif<br />

sera aussi bénéfique pour ce pays resté longtemps fermé <strong>sur</strong> lui-même.<br />

Les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> sans qualification n’ont pas tellement d’opportunités entre le<br />

travail à l’usine ou dans les services (restaurants, bars à bière, etc.) qui<br />

rapportent <strong>de</strong> toute manière plus que <strong>la</strong> seule riziculture. C’est une main<br />

d’œuvre pas chère et docile qui vient servir les intérêts <strong>de</strong> l’élite bourgeoise et<br />

urbaine qui a l’argent et le pouvoir. On retrouve ce que Barbier (1975) décrivait<br />

avant <strong>la</strong> révolution :« […] le fossé s'é<strong>la</strong>rgit <strong>de</strong> plus en plus entre <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse<br />

dirigeante, hauts fonctionnaires et bourgeoisie commerçante compradore, où<br />

sévissent corruption et lutte pour le prestige social, et le reste <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion. »<br />

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Cette attraction du mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s c<strong>la</strong>sses riches provoque <strong>de</strong>s changements <strong>de</strong><br />

mentalité et <strong>de</strong> valeurs morales. Il s’agit <strong>de</strong> satisfaire <strong>de</strong>s désirs matérialistes,<br />

<strong>de</strong>s besoins nouveaux.<br />

Parallèlement il y a une évolution <strong>de</strong>s mœurs et <strong>de</strong>s pratiques sexuelles.<br />

Toutefois, les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> ne sont pas toujours bien préparées à évoluer dans<br />

un mon<strong>de</strong> différent <strong>de</strong> celui dans lequel elles ont été élevées. Elles ne réussissent<br />

pas toutes à s’en sortir sans dommages.<br />

4.4. QUI FAIT QUOI POUR AIDER CES JEUNES FEMMES ?<br />

4.4.1. Les interventions du gouvernement<br />

Il est difficile <strong>de</strong> discuter <strong>de</strong> ce que fait ou ne fait pas le gouvernement au sujet<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>. En effet, nous avons téléphoné à <strong>de</strong>ux fonctionnaires du<br />

tribunal <strong>de</strong> Vientiane pour prendre un ren<strong>de</strong>z-vous pour discuter <strong>sur</strong> « les<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent ». Ils nous ont répondu : « <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong><br />

n’existe pas » et ont refusé <strong>de</strong> donner un ren<strong>de</strong>z-vous.<br />

Selon une discussion informelle avec un policier : « Quand on arrête <strong>de</strong>s<br />

prostituées, on éduque celles qui sont mineures et on fait payer <strong>de</strong>s amen<strong>de</strong>s à<br />

celles qui recommencent. Mais, <strong>la</strong> plupart continuent parce qu’elles ne savent<br />

pas quoi faire d’autre et ce que c’est un travail qu’elles peuvent faire. »<br />

Le rôle <strong>de</strong> <strong>la</strong> justice<br />

Nous avons interviewé une femme fonctionnaire en charge <strong>de</strong>s dossiers au<br />

bureau <strong>de</strong> procureur <strong>de</strong> Paksé. Selon elle, les affaires <strong>de</strong> <strong>prostitution</strong> ne<br />

remontent jamais au bureau <strong>de</strong> procureur. Ce<strong>la</strong> reste géré au niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> police<br />

(il y a <strong>de</strong>s arrangements monnayés). Le Tribunal n’est impliqué à <strong>de</strong>s affaires <strong>de</strong><br />

<strong>prostitution</strong> qu’en <strong>cas</strong> d’un autre problème pénal (meurtre par exemple).<br />

Pourtant, <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> et le proxénétisme sont <strong>de</strong> <strong>la</strong> responsabilité pénale. Les<br />

articles 122 et 123 <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi pénale stipulent : « A person engaging in<br />

<strong>prostitution</strong> is punishable by three months to one year of imprisonment or by<br />

reformatory mea<strong>sur</strong>es without privation of liberty and fines from Kip 50,000<br />

to Kip 500,000. Assistance or facilitation of <strong>prostitution</strong> is punishable by three<br />

months to one year of imprisonment or reformation without privation of<br />

liberty and fines from Kip 300,000 to Kip 1,000,000 ».<br />

Le rôle <strong>de</strong> l’Union <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong><br />

Selon une discussion avec une dame qui s’occupe <strong>de</strong> <strong>la</strong> sensibilisation du SIDA,<br />

l’UFL col<strong>la</strong>bore avec plusieurs secteurs comme le Ministère <strong>de</strong> <strong>la</strong> Santé, PSI,<br />

pour <strong>la</strong> sensibilisation <strong>sur</strong> le SIDA.<br />

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DFD2 – Phouvanh Khamdavong Rapport d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain<br />

Le rôle du système <strong>de</strong> santé<br />

Selon une jeune femme interviewée, tous les samedi, l’hôpital Settathirat <strong>de</strong><br />

Vientiane organise une séance <strong>de</strong> sensibilisation et <strong>de</strong> conseil <strong>sur</strong> le SIDA pour<br />

les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> <strong>la</strong>otiennes et donc avant tout pour celles qui se prostituent.<br />

Le National Committee for the Control of AIDS (NCCA) du ministère <strong>de</strong> <strong>la</strong> Santé<br />

col<strong>la</strong>bore avec <strong>de</strong>s ONGs tel que le MSF pour <strong>la</strong> prévention du Sida. Selon une<br />

discussion avec une dame qui travaille au Département <strong>de</strong> <strong>la</strong> Santé (province <strong>de</strong><br />

Savannakhet) : « on col<strong>la</strong>bore avec MSF pour ai<strong>de</strong>r les gens qui sont<br />

séropositifs. On a commencé d’abord par <strong>la</strong> province <strong>de</strong> Savannakhet, car c’est<br />

là qu’il y a le plus <strong>de</strong> gens qui ont le SIDA après Vientiane Capitale. »<br />

4.4.2. Les interventions extérieures<br />

PSI : Une responsable m’a dit que PSI intervient <strong>sur</strong>tout dans les bars à bière<br />

où travaillent <strong>de</strong>s prostituées. L’objectif est <strong>de</strong> distribuer <strong>de</strong>s préservatifs et <strong>de</strong><br />

discuter et donner <strong>la</strong> formation « technique » aux <strong>femmes</strong> pour savoir négocier<br />

ou refuser d’avoir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion sexuelle avec un homme qui refuse <strong>de</strong> mettre le<br />

préservatif pendant l’acte sexuel ».<br />

UNICEF et ILO-IPEC travaillent <strong>sur</strong> le trafic <strong>de</strong>s enfants.<br />

UNPFA col<strong>la</strong>bore avec CARE International pour donner <strong>de</strong>s « conseils » aux<br />

<strong>femmes</strong> qui se prostituent (prévention SIDA et peer education).<br />

Church World Service travaille avec les enfants et les <strong>femmes</strong> en situation<br />

difficile. Ils essaient <strong>de</strong> prévenir l’entrée ans <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>.<br />

Lyap fait <strong>de</strong> <strong>la</strong> sensibilisation <strong>sur</strong> le SIDA et travaille aussi auprès <strong>de</strong>s <strong>femmes</strong><br />

qui se prostituent.<br />

Msf-Suisse fournit les soins gratuitement aux personnes atteintes du Sida.<br />

4.4.3. Ce que peut faire l’AFESIP au Laos<br />

L’AFESIP s’intéresse à <strong>la</strong> réintégration <strong>de</strong>s prostituées par métier, connaissance,<br />

éducation. Nous citons Pierre Le Roux (2004) : « L’autonomie économique <strong>de</strong>s<br />

victimes est tout aussi problématique qu’essentielle : elle constitue <strong>la</strong> meilleure<br />

garantie contre les risques <strong>de</strong> rechute et aussi <strong>la</strong> meilleure prévention. AFESIP<br />

réinsère chaque année <strong>de</strong>s victimes. Si <strong>la</strong> plupart souhaitent retourner dans<br />

leur communauté, nombre d'entre elles disparaissent, retournant parfois à <strong>la</strong><br />

<strong>prostitution</strong>. Il s’agit donc <strong>de</strong> leur proposer une véritable alternative en vue<br />

d’une réinsertion sociale et économique définitive, c’est-à-dire avec<br />

l’indépendance financière pour le restant <strong>de</strong> leur vie. »<br />

Nous avons discuté avec Didier Bertrand d’Afesip-Laos qui nous dit que <strong>la</strong><br />

gran<strong>de</strong> difficulté sera <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s activités économiques suffisamment<br />

rémunératrices qui seront une alternative acceptable pour les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong><br />

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prostituées. Ce<strong>la</strong> <strong>de</strong>vra passer par une connaissance fine <strong>de</strong> <strong>la</strong> situation <strong>de</strong>s<br />

<strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong>, <strong>de</strong> leurs problèmes, <strong>de</strong> leur psychologie.<br />

Il est certain qu’il faudrait aussi tout faire pour renforcer les formations<br />

professionnelles pour les <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong>.<br />

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5. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS<br />

En conclusion<br />

On ne peut pas nier les effets positifs du développement et <strong>de</strong> l’urbanisation <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion. Mais avant que les changements soient vraiment structurels il y<br />

aura <strong>de</strong>s ajustements difficiles et on ne peut pas ignorer que 80% <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

popu<strong>la</strong>tion vit en milieu rural et que <strong>de</strong>s changements trop brusques pourraient<br />

avoir <strong>de</strong>s conséquences néfastes (bidonvilles en périphérie <strong>de</strong>s villes, etc.) ce<br />

que le gouvernement arrive encore à limiter aujourd’hui.<br />

Selon Pierre Legros, d’Afesip, <strong>la</strong> seule solution à <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> (et aux trafics<br />

qui y sont liés) sera <strong>de</strong> permettre à chaque pays en voie <strong>de</strong> développement <strong>de</strong><br />

disposer d’un réel marché du travail, d’un cadre juridique approprié et exempt<br />

<strong>de</strong> corruption, d’une économie stable, et d’une protection sociale minimale. Et<br />

pour Marc Dufumier (2004) : « Une chose est sûre : nombreuses sont dans le<br />

mon<strong>de</strong> les catégories sociales qui ont intérêt à <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> développement<br />

agricole capables <strong>de</strong> garantir <strong>la</strong> sécurité alimentaire du plus grand nombre <strong>de</strong><br />

gens et le droit <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions à vivre et travailler dignement au pays ».<br />

Pour limiter l’extension <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> au Laos, il faudrait commencer par<br />

améliorer les conditions <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s paysans et ce<strong>la</strong> passe par <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong><br />

développement rural. Il serait aussi important que le gouvernement encourage<br />

les investisseurs capitalistes (qui s’enrichissent énormément) <strong>de</strong> mieux payer les<br />

ouvrières <strong>de</strong>s usines. Bien sûr, il faudra aussi s’occuper <strong>de</strong> celles qui sont déjà<br />

impliquées dans cette activité aujourd’hui.<br />

Quelques recommandations pour l’avenir<br />

La <strong>prostitution</strong> est majoritairement féminine. Il faudrait réfléchir au statut <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

femme. Ce serait bien <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s colloques impliquant l’Union <strong>de</strong>s Femmes et<br />

<strong>la</strong> Justice, dans le cadre d’un programme national <strong>sur</strong> <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong>. Il faudrait<br />

parvenir à c<strong>la</strong>rifier, <strong>sur</strong> le p<strong>la</strong>n juridique, le rôle <strong>de</strong>s guesthouse, <strong>de</strong>s hôtels et<br />

<strong>de</strong>s établissements tels que les boîtes <strong>de</strong> nuit, les karaoké et celui <strong>de</strong>s<br />

intermédiaires (Mama-san, Papa-san, recruteuses, etc.).<br />

Il serait intéressant <strong>de</strong> continuer et d’approfondir cette étu<strong>de</strong> dans l’avenir pour<br />

permettre à l’AFESIP <strong>de</strong> bien comprendre les spécificités du commerce sexuel<br />

au Laos et son évolution possible. Il serait utile d’approfondir, auprès <strong>de</strong>s <strong>jeunes</strong><br />

<strong>femmes</strong> qui se prostituent, <strong>la</strong> compréhension <strong>de</strong> ce que Amphay Doré décrit<br />

comme le « piep », l’honneur, dans <strong>la</strong> culture <strong>la</strong>o. Il faudrait continuer les<br />

interviews <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> qui se prostituent, tout en é<strong>la</strong>rgissant l’échantillon,<br />

pour bien comprendre <strong>la</strong> situation et avoir <strong>de</strong>s informations plus généralisables.<br />

Il faudrait s’intéresser à <strong>la</strong> <strong>prostitution</strong> masculine. Enfin, il paraît important <strong>de</strong><br />

s’intéresser aux dép<strong>la</strong>cements <strong>de</strong> popu<strong>la</strong>tions minoritaires dans le nord du Laos<br />

(Oudomxay, Luang Namtha, Bokéo) et leurs conséquences en termes <strong>de</strong><br />

<strong>prostitution</strong> et <strong>de</strong> trafic <strong>de</strong> <strong>jeunes</strong> <strong>femmes</strong> vers les pays voisins.<br />

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