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Pascal Roméas Introduction aux peuples et aux langues germaniques progressivement à une quasi-disparition des variétés germaniques parlées en Gaule, au profit de variétés galloromaines ayant simplement emprunté à ces langues germaniques. Cette influence romane touchera beaucoup moins les Germains restés sur les territoires de l’Allemagne actuelle, qui développeront les dialectes à l’origine du haut-allemand. La première mention écrite d’une langue de ce groupe apparaît en 788 dans la Chronique de Lorsch, sous l’appellation de theodisca lingua. Langue véhiculaire des divers peuples germaniques peuplant la Gaule jusqu’à la Rhénanie, utilisée, faut-il préciser, par les personnes cultivées, ecclésiastes pour la plupart (Raynaud, 1982). Ce terme évoluera pour devenir diutisc au XI e siècle, puis diutsch au XII e siècle, où il désigne alors une entité politico-ethnique. Les principales branches des langues westiques sont : • l’anglo-saxon, qui se détache après l’installation en Grande-Bretagne (grandes invasions) • le rameau frison, qui cessera de se diversifier • le bas allemand, d’où viennent le néerlandais et les parlers du nord de l’Allemagne • le vieil haut allemand, qui se distingue globalement des trois précédents et regroupe les parlers du centre et du sud de l’Allemagne (alémanique et bavarois), ainsi que les variétés parlées par les Francs en Rhénanie puis au moment de leur entrée en Gaule (variétés de francique). Raynaud (1982) rappelle que le vieil haut allemand n’a jamais constitué une langue unique, bien que les philologues du XIX e siècle l’aient considéré comme telle. En Gaule, les variétés franciques (dont la theodisca lingua) s’estompent dès le IX e siècle devant la prééminence numérique des variétés de gallo-romain, malgré le rôle majeur joué par le francique rhénan sous le règne de Charlemagne. Le langobard faisait aussi partie de ce phylum vieil haut allemand, mais a commencé à s’éteindre à partir du VIII e siècle, c’est-à-dire trois siècles après l’arrivée des populations en Italie du nord. Au X e siècle, l’espace germanique est clairement distinct de l’espace gallo-romain et italique en général. Pour sa partie européenne, il ne variera plus guère jusqu’à nos jours : Scandinavie, Allemagne, Pays-Bas et Flandres, Grande-Bretagne, Autriche et Suisse, avec, à l’est, une frontière relativement fluctante. Dans tous ces cas, le latin demeure la langue écrite commune pendant tout le Moyen-Age, même là où les langues germaniques westiques ont réussi à se maintenir comme langues vernaculaires, et même pendant ce qu’on appelle la « renaissance carolingienne », pendant laquelle la culture écrite demeure latine. A l’époque de la Hanse et de la dominance du bas-allemand, du lexique passe du bas-allemand aux langues scandinaves (exemple sprǻk = « langue » en suédois, alors qu’on trouve mǻl en dano-norvégien) Pendant la période hanséatique ont lieu des expéditions militaires violentes (Chevaliers Teutoniques), qui feront reculer les langues baltes et slaves au profit du bas-allemand. C’est la Renaissance, la Réforme et la traduction de la Bible par Luther en haut-saxon de Thuringe (parler hautallemand) qui vont complètement inverser la dominance : à partir du milieu du XVI e siècle, c’est le haut allemand qui s’impose durablement, notamment par sa dimension écrite. Pour ce qui concerne l’anglo-saxon ou vieil anglais, la migration vers la Grande-Bretagne aura comme conséquence une nouvelle exposition aux langues celtiques, dont l’influence sur le vieil anglais se produit principalement entre 450 et 600 de notre ère. On notera ensuite une période d’emprunts scandinaves lors de la période Viking, puis un emprunt rapide et massif au franco-normand au XI e siècle (Rogers & Erwin, 2001). 8
Pascal Roméas Introduction aux peuples et aux langues germaniques 1.3. Linguistique génétique des langues germaniques Le phylum germanique tel qu’il est proposé par le Summer Institute of Linguistics (SIL) est le suivant. Nous annotons par endroits en italique dans la partie droite. Cette présentation est accessible en ligne sur www.ethnologue.com. Germanique (53 langues) Est (1 langue) Gotique (Ukraine, éteinte) + Nombreuses langues éteintes avant le VI e siècle Nord (11 langues) Est-scandinave (6) Danois-Suédois (6) Danois-Bokmål (1) Danois-Riksmål (2) Suédois (3) Ouest-scandinave (5) Féroïen ou féringien (Îles Feroe) Islandais (Islande) Jamtska (Suède) 30 000 locuteurs, transmission problématique Norvégien, Nynorsk (Norvège) Norn (Royaume-Uni) éteinte au XV e siècle Ouest (41 langues) Nombreuses variétés éteintes à la fin du 1er millénaire de notre ère Anglais (3) Anglais (Royaume-Uni) Scots (Royaume-Uni) variété d’anglais parlée en Ecosse Yinglish (USA) variété d’anglais influencée par le yiddish, principalement parlée à New-York Frison (3) Frison occidental (Pays-Bas) Frison septentrional (Allemagne) Saterfriesisch (Allemagne) Haut Allemand (20) Allemand (18) Francique variétés éteintes de francique Allemand central (9) Allemand central de l’est (3) Allemand standard (Allemagne) Bas Silésien (Pologne) Haut Saxon (Allemagne) Allemand central de l’ouest (6) Franconien de Moselle (2) Luxembourgeois (Luxembourg) Mainfränkisch (Allemagne) Allemand de Pennsylvanie (USA) Franconien rhénan (2) Pfaelzisch (Allemagne) Limburgisch (Pays-Bas) Franconien ripuaire (1) Kölsch (Allemagne) Allemand méridional (Upper German) (8) Alémanique (4) Allemand de la Colonia Tovar (Venezuela) Schwyzerdütsch (Suisse) Souabe ou Schwäbisch (Allemagne) Walser (Suisse) Bavarois-Autrichien (4) Bavarois (Autriche) Cimbrien (Italie) moins de 2000 locuteurs, bilingues Allemand, Hutterite (Canada) Mócheno Italie) moins de 2000 locuteurs, bilingues Yiddish (2) Yiddish oriental (Israel) Yiddish occidental (Allemagne) Bas Saxon - Bas Franconien (15) On donnerait la dénomination de « bas allemand » à ce branchement dans d’autres classifications 9
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