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Envenimations en Afrique francophone : actes du deuxième ... - IRD

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détruis<strong>en</strong>t les tissus autour de la morsure et provoqu<strong>en</strong>t des<br />

nécroses sévères. D’autres <strong>en</strong>zymes agiss<strong>en</strong>t sur les différ<strong>en</strong>tes<br />

étapes de l’hémostase, <strong>en</strong> particulier sur la coagulation<br />

sanguine, le plus souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> se substituant aux <strong>en</strong>zymes physiologiques.<br />

La coagulation sanguine et la fibrinolyse sont<br />

activées à plusieurs niveaux (complexe prothrombinase et<br />

fibrinoformation <strong>en</strong> particulier). Il <strong>en</strong> résulte une coagulopathie<br />

liée à l’activation et la consommation de ces facteurs,<br />

mais égalem<strong>en</strong>t à la consommation de plaquettes (3).<br />

Les manifestations hémorragiques se caractéris<strong>en</strong>t par des<br />

saignem<strong>en</strong>ts prolongés inatt<strong>en</strong><strong>du</strong>s et <strong>en</strong> nappe (hématome<br />

au point de ponction, épistaxis, gingivorragies, hémorragies<br />

digestives, obstétricales ou rétini<strong>en</strong>nes) qui peuv<strong>en</strong>t mettre<br />

<strong>en</strong> jeu le pronostic vital (choc hémorragique, hémorragie<br />

intracérébrale).<br />

Manifestations cliniques<br />

On oppose classiquem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>v<strong>en</strong>imations cobraïques neurotoxiques<br />

et <strong>en</strong>v<strong>en</strong>imations vipérines, dominées par<br />

les nécroses et les syndromes hémorragiques. En pratique<br />

clinique, cette distinction est variable.<br />

Le syndrome neuromusculaire débute par l’apparition<br />

de signes cliniques peu spécifiques considérés comme des<br />

réactions d’angoisse, puis survi<strong>en</strong>t une aggravation l<strong>en</strong>te et<br />

progressive des symptômes ori<strong>en</strong>tant vers un diagnostic d’<strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation.<br />

Plusieurs syndromes neuromusculaires coexist<strong>en</strong>t<br />

<strong>du</strong> fait de différ<strong>en</strong>ts mécanismes d’action des toxines. Le<br />

syndrome muscarinique apparaît : sueurs diffuses, larmoiem<strong>en</strong>ts,<br />

écoulem<strong>en</strong>t de salive, dysphagie, nausées, troubles<br />

visuels, acouphènes et myosis. Le syndrome cobraïque, qui<br />

met <strong>en</strong> jeu le pronostic vital, réalise un tableau clinique de<br />

curarisation ; il débute par des paresthésies partant de la morsure<br />

et irradiant vers le tronc et la tête. Le premier symptôme<br />

physique visible est la ptôse palpébrale symétrique ; presque<br />

simultaném<strong>en</strong>t apparaît un trismus avec signe de l’abaisselangue<br />

captif comme dans le tétanos. Le tableau se complète<br />

avec dysphonie, dyspnée, bradypnée et hypot<strong>en</strong>sion.<br />

L’évolution se fait <strong>en</strong> deux à dix heures vers l’arrêt respiratoire.<br />

La consci<strong>en</strong>ce demeure conservée, les év<strong>en</strong>tuelles lésions<br />

neurologiques sont la conséqu<strong>en</strong>ce d’une hypoxie cérébrale<br />

prolongée.<br />

Le syndrome vipérin associe : inflammation, troubles cutanés,<br />

nécroses et troubles hématologiques. La douleur est constante<br />

et viol<strong>en</strong>te. L’œdème apparaît moins d’une demi-heure après<br />

la morsure pour s’ét<strong>en</strong>dre le long <strong>du</strong> membre mor<strong>du</strong> et augm<strong>en</strong>ter<br />

de volume au cours des premières heures. L’œdème<br />

décroît très l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t, ce qui <strong>en</strong> fait un médiocre élém<strong>en</strong>t de<br />

surveillance clinique. Les conséqu<strong>en</strong>ces fonctionnelles sont<br />

généralem<strong>en</strong>t favorables <strong>en</strong> cas d’<strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation sous-cutanée.<br />

La gangrène est une complication de l’anoxie tissulaire<br />

consécutive au mainti<strong>en</strong> d’un garrot trop serré p<strong>en</strong>dant trop<br />

longtemps ou à un syndrome des loges compliquant une <strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation<br />

intramusculaire.<br />

L’installation <strong>du</strong> syndrome hémorragique est le plus souv<strong>en</strong>t<br />

insidieuse. Les premières manifestations hémorragiques apparaiss<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> vingt-quatre ou quarante-huit heures et peuv<strong>en</strong>t<br />

s’aggraver rapidem<strong>en</strong>t.<br />

L’apparition des signes cliniques peut être considérablem<strong>en</strong>t<br />

retardée par rapport aux troubles biologiques qui apparaiss<strong>en</strong>t<br />

dans les minutes ou les heures qui suiv<strong>en</strong>t la morsure. L’hypovolémie<br />

absolue liée au syndrome hémorragique est aggravée<br />

par l’hypovolémie relative liée à une vasoplégie et une fuite<br />

capillaire (5). Le syndrome vipérin peut évoluer vers des com-<br />

J. P. Bellefleur & P. Le Dantec<br />

plications viscérales. Une insuffisance rénale, liée à la toxicité<br />

directe des <strong>en</strong>zymes ou non spécifique, peut apparaître.<br />

Prise <strong>en</strong> charge hospitalière<br />

La prise <strong>en</strong> charge hospitalière des morsures de serp<strong>en</strong>t se<br />

fait dans un service de référ<strong>en</strong>ce où sont disponibles des<br />

protocoles clairs.<br />

Action pré-hospitalière<br />

Cette prise <strong>en</strong> charge débute dès le pré-hospitalier par des<br />

conseils téléphoniques : calmer la victime, rassurer l’<strong>en</strong>tourage,<br />

désinfecter la plaie, exercer une compression légère par<br />

une bande crêpe, immobiliser le membre <strong>en</strong> position fonctionnelle,<br />

débuter un traitem<strong>en</strong>t antalgique par paracétamol<br />

mais contre-indiquer les salicylés (thrombopathie aggravant<br />

les troubles de la coagulation). Il faut insister à ce stade sur<br />

l’importance de ne pas nuire : proscrire cautérisation, amputation,<br />

débridem<strong>en</strong>t, succion et garrot serré.<br />

Prise <strong>en</strong> charge dans le service des urg<strong>en</strong>ces hospitalières<br />

Dans le service des urg<strong>en</strong>ces, il faut déterminer le délai <strong>en</strong>tre<br />

morsure et consultation qui peut être très variable et souv<strong>en</strong>t<br />

retardé et donc donner lieu à des tableaux cliniques variables<br />

et parfois trompeurs. Le retard de consultation permet souv<strong>en</strong>t<br />

de discriminer, dès l’arrivée, les victimes sans <strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation<br />

de celles qui nécessit<strong>en</strong>t un traitem<strong>en</strong>t. L’infirmier pr<strong>en</strong>d les<br />

constantes vitales : température, fréqu<strong>en</strong>ce cardiaque, pression<br />

artérielle, score de Glasgow. Le médecin recherche des signes<br />

cliniques d’<strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation d’Elapidés ou de Vipéridés mais<br />

aussi des tableaux moins typiques où les syndromes peuv<strong>en</strong>t<br />

s’intriquer. Il évalue rapidem<strong>en</strong>t la gravité de l'état <strong>du</strong> pati<strong>en</strong>t<br />

puis débute les mesures symptomatiques urg<strong>en</strong>tes : remplissage<br />

par macromolécules <strong>en</strong> cas de détresse hémodynamique,<br />

compression manuelle si le site est accessible <strong>en</strong> cas d’hémorragie<br />

active et oxygénothérapie (dix à quinze litres par minute)<br />

<strong>en</strong> cas de détresse respiratoire. Une voie veineuse périphérique<br />

est mise <strong>en</strong> place avec perfusion de sérum physiologique. La<br />

plaie est nettoyée, la vaccination antitétanique est vérifiée et<br />

un sérum et un vaccin anti-tétaniques sont prescrits <strong>en</strong> cas<br />

d’abs<strong>en</strong>ce de celle-ci ou de doute. Un traitem<strong>en</strong>t anxiolytique<br />

(hydroxyzine intra-veineux) est administré, sauf <strong>en</strong> cas<br />

de détresse vitale. L’analgésie est adaptée à la douleur et des<br />

antalgiques de niveau 3 (morphine sous-cutanée) sont souv<strong>en</strong>t<br />

nécessaires. Un bilan biologique est demandé : numération<br />

formule sanguine, plaquettes, taux de prothrombine (TP),<br />

temps de coagulation (TCA), év<strong>en</strong>tuellem<strong>en</strong>t fibrinogène. En<br />

cas d’indisponibilité <strong>du</strong> laboratoire d’analyse, un simple prélèvem<strong>en</strong>t<br />

au lit <strong>du</strong> malade dans un tube sec permet de mesurer<br />

le temps de coagulation. Normalem<strong>en</strong>t compris <strong>en</strong>tre quinze<br />

et tr<strong>en</strong>te minutes, il donne une indication sommaire sur la<br />

coagulation <strong>du</strong> pati<strong>en</strong>t.<br />

La con<strong>du</strong>ite à t<strong>en</strong>ir aux urg<strong>en</strong>ces est guidée par le fait de savoir<br />

si la morsure est suivie ou non d’une <strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant<br />

<strong>en</strong> compte : l’exam<strong>en</strong> clinique, les exam<strong>en</strong>s biologiques et le<br />

temps écoulé depuis la morsure. Un algorithme décisionnel<br />

est appliqué <strong>en</strong> fonction de ces résultats (figure 1). Chez un<br />

pati<strong>en</strong>t mor<strong>du</strong> ne prés<strong>en</strong>tant aucune symptomatologie et dont<br />

le bilan de coagulation est normal six heures après la morsure,<br />

on peut éliminer une <strong>en</strong>v<strong>en</strong>imation. Le pati<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>tre à<br />

domicile avec conseil de rev<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> cas d’apparition d’un des<br />

signes d’alerte précéd<strong>en</strong>ts ou proposer <strong>en</strong> cas de doute une<br />

mise <strong>en</strong> observation de 24 heures. La plaie doit néanmoins être<br />

<strong>Env<strong>en</strong>imations</strong> 274

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