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TAP BIBRACTEFEMME 03-12 17/05/06 10:30 Page 4 Trésors de femmes, À la découverte des femmes celtes 4 • EXPOSITION BIBRACTE 2006 • TRÉSORS DE FEMMES 1 Une impossible enquête ? La place de la femme dans les sociétés grecque et romaine est bien connue grâce à des textes anciens. Soumise en droit à son mari qui a droit de vie sur elle comme sur ses enfants, elle peut néanmoins connaître le prestige et le pouvoir… du moins quand elle est issue de l’aristocratie. La réalité quotidienne était certainement moins brillante. Qu’en est-il dans la société celte, contemporaine de la Rome républicaine et des royaumes hellénistiques ? C’est cette question que tente de poser l’exposition. Autant le dire d’emblée : la tâche est ardue. Les textes sont pratiquement muets sur le sujet. A première vue, l’archéologie n’apporte guère plus de renseignements. Ainsi, parmi les centaines de milliers d’objets récoltés sur l’oppidum de Bibracte, deux douzaines seulement peuvent être sans ambiguïté associés à la femme : noms inscrits sur des poteries, images féminines sur des monnaies, restes osseux. Il faut aussi reconnaître que, pour les archéologues, le genre neutre se transforme bien vite en genre masculin. Essayons donc de surmonter l’apparente indigence des sources pour retrouver ce qu’étaient la condition féminine et, plus largement, la place du féminin chez les Celtes. 1 - La femme celte dans l’imagerie romantique : La druidesse Velléda, peinture d’Arnaud La Roche, XIX e siècle. Velléda est connue par l’historien romain Tacite, qui la décrit comme une prophétesse qui vivait en Germanie au I er siècle après J.-C. L’image confuse de la femme celte Le sources écrites et iconographiques de l’Antiquité nous livrent bien peu d’éléments concrets sur la femme celte. Ainsi, les textes nous livrent le nom de seulement trois femmes celtes historiques, les reines bretonnes Boudicca et Catimandua, et la Galate Chiomara – qui toutes, d’ailleurs, avaient pris le pouvoir dans des circonstances inhabituelles. C’est l’exception qui confirme la règle. Dans les Commentaires sur la Guerre des Gaules de Jules César, notre meilleure source d’information, à peine vingt passages mentionnent des femmes. Et encore, il s’agit presque toujours de phrases toutes faites à propos de massacres qui ont touché «les femmes, les enfants et les vieillards». Cette indigence des sources laisse libre cours aux représentations modernes fantaisistes, qu’elles soient romantiques, ésotériques ou mystificatrices. 2 - Couple de Galates se donnant la mort. Sculpture romaine d’après un original du III e siècle avant J.-C., qui faisait partie d’un monument élevé par le roi Attale I er à Pergame (Asie mineure). 2
TAP BIBRACTEFEMME 03-12 17/05/06 10:30 Page 5 3 3 - Inscriptions après cuisson sur un vase en terre cuite, I er siècle avant J.C. On lit, en caractères grecs, le nom féminin MATERIAS. Oppidum de Bibracte. Des femmes à sortir de l’anonymat De la langue que parlaient les Celtes, seules des bribes nous sont parvenues. On connaît néanmoins plusieurs centaines de noms propres : noms de divinités sur des inscriptions d’époque romaine, noms de lieux transmis par la toponymie et noms de personnes inscrits sur des monnaies ou d’autres objets de la vie quotidienne. Heureusement pour nous, ces noms sont souvent porteurs de sens – Vercingétorix est « le roi des guerriers », Belisama, « la très puissante », Sénobéna, « la vieille femme »… De cette façon, on peut restituer, avec plus ou moins de sûreté, une liste de mots en rapport avec la femme et le féminin. 4 - Inscription avant cuisson, début du I er siècle après J.-C. L’écriture était suffisamment familière aux habitants de Bibracte pour que chacun soit capable d’écrire son nom, en caractères grecs ou latins (la langue gauloise ne disposant pas de son propre alphabet). Comme on peut s’y attendre, les propriétaires de ces modestes ustensiles de cuisine sont souvent des femmes. Le nom inscrit, DRVENTIA, est celui que les Gaulois donnaient à la rivière Durance. Faut-il établir un rapport avec le fait que le vase inscrit a été trouvé dans une conduite qui drainait une source ? Oppidum de Bibracte, aqueduc de la maison PC1. Glossaire aua : petite-fille ? bena : femme brunnio- : sein derti : concubine ? dona : femme ? druna : vigoureuse, rapide duxtir : fille exuertina : infidèle, déloyale geneta : jeune fille genos : lignée, famille gnata : fille iouinca : jeune isara : impétueuse litaui : la Terre lubita : aimée magus, mapat- : enfant, valet matir : mère matronae : déesses-mères matta : fille, gamine ? rigana : reine sena : vieille sentice : compagne, épouse suior- : sœur sulevia : conductrice teuta / touta : tribu, peuple tuto- : sexe féminin (opposé de moto- : membre viril) ueni- : clan, famille, lignée uidla : voyante, sorcière uimpa : jolie unna : l’eau (Liste établie d’après X. Delamarre, Dictionnaire de la langue gauloise,Paris 2001.) Des fusaïoles inscrites Le filage de la laine est une activité réservée aux femmes. Le sol de la ville d’Autun a livré une exceptionnelle série de fusaïoles (qui servaient de volant d’inertie au fuseau), fabriquées dans une pierre tendre locale, le lignite, et pourvues d’inscriptions. En pleine époque romaine, la langue de ces inscriptions est généralement le gaulois, qui est longtemps resté la langue de la vie quotidienne après la conquête de César. Pas toujours très faciles à traduire, ces inscriptions ont toutes une connotation féminine, voire érotique. geneta imi daga uimpi : «je suis une jeune fille bonne et belle» mattadagomota balineenata : «bonne à baiser» marcosior : «que je sois chevauchée» 5 - Trois fusaïoles en lignite, I er / II e siècles après J.-C. D. 2,5 cm. Autun (France), musée Rolin. EXPOSITION BIBRACTE 2006 • TRÉSORS DE FEMMES • 5 4 5
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