Tables des registrations - France Orgue
Tables des registrations - France Orgue
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dressées par <strong>des</strong> facteurs d’orgues : l’histoire a retenu le célèbre Dom Bedos de Celles, mais<br />
J.A. Silbermann a laissée une table de <strong>registrations</strong> pour l’orgue de Bouxwiller, Riepp pour<br />
celui de Salem par exemple. Dans un autre style, il existe une table de <strong>registrations</strong> de l’un <strong>des</strong><br />
facteurs Stiehr, malheureusement en partie illisible… Ici, les <strong>registrations</strong> ne sont pas notées<br />
mais indiquent <strong>des</strong> couleurs et <strong>des</strong> intensités Ŕ tout comme Rinck l’a fait sans son école<br />
d’orgue !<br />
D’abord, dans les cas de tables générales, il me semble important de relativiser leur utilisation<br />
stricte. Ici comme ailleurs, je doute de l’absolu. Selon les auteurs, les <strong>registrations</strong> doivent se<br />
faire selon le goût et la sensibilité de l’organiste. Les tables semblent ne pas être là pour<br />
enfermer l’interprète mais pour le guider dans le bon goût alors en vigueur. D’une table à<br />
l’autre, <strong>des</strong> variantes sur une même registration indiquent qu’il s’agit plus de recettes pour<br />
baliser le chemin que d’une vérité dogmatique. La liberté y est expressément permise voire<br />
encouragée. La registration perd son singulier au profit de la singularité. La subjectivité et la<br />
créativité de l’interprète semblent être convoquées par les auteurs <strong>des</strong> tables de <strong>registrations</strong>.<br />
La multiplicité <strong>des</strong> types <strong>des</strong> sources (compositeurs, facteurs, organistes), leurs divergences et<br />
leur diffusion inégale ont probablement favorisé l’erreur de s’appuyer sur un écrit Ŕ celui de<br />
Dom Bedos - faisant fi <strong>des</strong> autres textes.<br />
Ensuite, il me semble primordial de mettre en adéquation les dates <strong>des</strong> compositions, les<br />
caractéristiques techniques et sonores <strong>des</strong> orgues originalement utilisés et les dates <strong>des</strong> tables<br />
de <strong>registrations</strong>. Celles-ci s’appliquent dans un contexte qui est le leur, formant ici un<br />
ensemble insécable.<br />
Il nous manque toujours tout un contexte philosophique, moral, social, esthétique, littéraire,<br />
rhétorique et architectural de l’époque baroque pour utiliser au mieux ces tables.<br />
De plus, la facture d’orgue a toujours évolué. Les anches de la fin du XVIII e siècle avaient<br />
gagné en intensité et en fondamentale mais aussi avaient perdu leur faiblesse relative dans les<br />
aigus. Ainsi, les grands jeux s’appauvrissent en fonds et s’enrichissent par la multiplication et<br />
la doublure <strong>des</strong> jeux d’anches. Les couleurs changent ! De même, les fonds ont pris de la<br />
largeur, donnant plus de rondeur, d’ampleur et de profondeur aux mélanges tels que le pleinjeu<br />
et le jeu de tierce. De nouveaux jeux apparaissent aussi (Hautbois, Flûte 8…).<br />
Il est intéressant de noter qu’avec l’évolution technique, la dénomination de certains mélanges<br />
a évolué : on ne parle plus de Grand Jeu mais de Grand Chœur à la fin du XVIII e siècle 304 Les<br />
dénominations, les genres ont évolué pour laisser place à de nouvelles formes (rondeau,<br />
cromorne sur les fonds, récit de hautbois…). Michel Corrette intitule son recueil de 1787<br />
« Pièces dans un genre nouveau » ! À cet enrichissement <strong>des</strong> mélanges, l’écriture semble<br />
céder le pas pour aboutir au répertoire post-classique si souvent décrié. Or, ce répertoire prend<br />
de l’allure et de la grâce sur <strong>des</strong> orgues de la fin du XVIII e siècle. La qualité <strong>des</strong> timbres<br />
semble pallier à la faiblesse d’écriture. Ainsi, l’orgue de Ste Croix de Bordeaux a été créé<br />
dans ce contexte et pour lui. Séparer facture et littérature musicale me semble une erreur<br />
fréquemment répandue 305 .<br />
RÉFÉRENCES CONTEXTUALISÉES<br />
J’éviterai ici de donner <strong>des</strong> recettes toutes faites. Je renvoie le lecteur aux différentes tables.<br />
Leur lecture me semble la seule école de registration pour la musique qui nous interresse ici,<br />
304 Boyvin utilise déjà la terminologie de Grand Chœur dans le sens d’un plan sonore.<br />
305 Même si la musique de Grigny sonne admirablement à St Maximin…<br />
<strong>Tables</strong> de <strong>registrations</strong><br />
R. LOPES<br />
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