NINA RICCI - Magazine Sports et Loisirs
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MODE<br />
CHIFFONS ET PARFUM<br />
Viviane Scaramiglia<br />
Photos: Nina Ricci<br />
<strong>NINA</strong> <strong>RICCI</strong><br />
CES<br />
QUI<br />
ROCKENT<br />
FEMMES<br />
L’HIVER<br />
Sous influence d’Anita<br />
Pallenberg, légendaire<br />
muse rock, Lars Nilsson<br />
fait l’alliance du chic<br />
urbain <strong>et</strong> de l’impertinence<br />
désinvolte en jouant avec<br />
maestria la carte de la nouvelle<br />
modernité. Voici, c<strong>et</strong><br />
hiver, le jeune créateur de<br />
Nina Ricci parfaitement en<br />
phase avec la renaissance<br />
du parfum Nina, un<br />
vintage ultracontemporain,<br />
absolument dans<br />
l’air du temps.<br />
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Clins d’œil déterminés aux rébellions rockeuses, les<br />
vestes d’homme en velours côtelé s’unissent aux<br />
jupes à l’organza ondulant, les volumes souples<br />
s’allient des p<strong>et</strong>its corsaires mutins. L’élégance<br />
discrète des robes en mousseline s’enveloppe dans<br />
de grandes capes de laine. Mariées à la maille en<br />
superpositions, même les robes du soir oscillent<br />
entre l’insouciance <strong>et</strong> l’élégance. Inspirées par le<br />
côté iconique d’Anita Pallenberg, sorte d’hommage<br />
à l’égérie sixties qui évite la parodie, <strong>et</strong> l’esprit raffiné<br />
de Nina Ricci, Lars Nilsson provoque de<br />
belles antinomies qu’il a su rendre harmonieuses,<br />
ludiques, désirables.<br />
Impertinent, décidé, le style de c<strong>et</strong>te saison est de<br />
blinder ces tenues fragiles à force de surpiqûres, de<br />
sangles brodées, de br<strong>et</strong>elles en poulain. Le créateur<br />
aime les constructions complexes <strong>et</strong> le travail des<br />
détails dont il raffole, sa collection en est pleine. Ses<br />
capes sont dotées de délicates manches froncées,<br />
une simple robe portefeuille en flanelle révèle contre<br />
toute attente une cascade de volants dans le dos. En<br />
parure, quelques touches de fourrure sur des cols, des<br />
gants, renforcent le jeu des contrastes graphiques. Les<br />
finitions se déclinent en vagues successives de<br />
tissus qui plongent dans une gigogne de nuances<br />
d’une rare subtilité <strong>et</strong> d’audacieux imprimés. Ici <strong>et</strong><br />
là, des éclats de blanc frimas, de lavande <strong>et</strong> de jaune<br />
moutarde réveillent des gris, des bronzes, des tons<br />
d’olive, de noir ou de bleu nuit.<br />
<strong>NINA</strong> <strong>RICCI</strong><br />
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Le talent venu du froid<br />
Atrente ans, le créateur suédois fait partie<br />
de c<strong>et</strong>te nouvelle vague qui commence à<br />
prendre les commandes du royaume de<br />
la mode. Eclipsé dans les années 90, le<br />
grand Paris du chic, relégué au rôle de<br />
ville-musée, vivait sur le nom de maisons<br />
de couture prestigieuses mais rivées<br />
à leur tradition. Comme Hedi Slimane<br />
chez Dior Homme, De Stefano Pilati chez<br />
Yves Saint Laurent, Nicolas Ghesquière<br />
chez Balenciaga, Lars Nilsson revigore<br />
l’emblématique capitale en lui redonnant<br />
une ampleur internationale. Perle dans<br />
c<strong>et</strong>te élite qui se distingue peu à peu en<br />
redéfinissant la donne pour les années à<br />
venir, la coqueluche des podiums newyorkais<br />
entrée chez Nina Ricci en 2003
evisite avec bonheur les traditions maison, avec une fraîcheur<br />
<strong>et</strong> une pertinence qui suscitent l’admiration de la<br />
profession. De son passage aux Etats-Unis chez Ralph<br />
Lauren puis chez Bill Blass, il a gardé le sens du luxe<br />
décontracté. Mais son travail dans les studios couture<br />
de Christian Lacroix, où il s’est formé, puis de Christian<br />
Dior auprès de John Galliano, ont aussi contribué à son<br />
esthétique individuelle. Lignes pures, coupe rigoureuse,<br />
trait délié, l’inspiration du créateur table toujours sur<br />
l’élégance fonctionnelle des arts décoratifs de sa Suède<br />
natale. On s’amuse à r<strong>et</strong>rouver, dans ses silhou<strong>et</strong>tes fluides,<br />
des inspirations aussi diverses que l’architecture de<br />
Josef Frank ou l’allure de sa compatriote Gr<strong>et</strong>a Garbo.<br />
Rien d’étonnant à ce que concept-stores pointus <strong>et</strong> rédactrices<br />
de mode s’enthousiasment pour la maison.<br />
« Nina Ricci est une marque très positive, très féminine,<br />
assure Lars Nilsson. Je m’attache simplement à renforcer<br />
ses codes, à jouer avec son romantisme léger, ses coloris<br />
acidulés, ses traditions de lingerie <strong>et</strong> de dentelle.<br />
Mais d’une manière allègre. Le style a évolué, il est en<br />
phase avec les souhaits des femmes d’aujourd’hui : se<br />
sentir belles <strong>et</strong> naturelles. » Avec lui, on est loin de<br />
toutes exubérances <strong>et</strong> autres paroxysmes qui se font<br />
d’ailleurs de plus en plus rares dans un milieu où le marché<br />
a finalement dévoré l’excentricité. En misant sur la<br />
carte de la féminité enjouée <strong>et</strong> du savoir-faire plutôt<br />
que celle du show off, le créateur fait de Nina Ricci une<br />
des maisons-phares du prêt-à-porter de luxe avec laquelle<br />
il faut désormais compter.<br />
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LE TRIOMPHE<br />
DE LA FéMINITé<br />
Inspiration artistique <strong>et</strong><br />
savoir-faire exceptionnel,<br />
la maison Nina Ricci,<br />
qui jouit d’une prestigieuse<br />
réputation dans l’univers<br />
de la mode, fait de ses<br />
parfums des obj<strong>et</strong>s précieux.<br />
Bien qu’elle doive en partie sa<br />
notoriété à son inoubliable fragrance<br />
L’Air du Temps, l’un des<br />
plus grands succès de parfumerie<br />
de tous les temps, l’aventure<br />
de Nina Ricci débute en réalité<br />
dans la haute couture, avec l’ouverture<br />
d’une maison éponyme<br />
en 1932 à Paris.<br />
Italienne, Marie Adélaïde Nielli<br />
épouse Louis Ricci, s’installe à<br />
Monte-Carlo, ensuite à Paris.<br />
Alors que la mode des garçonnes<br />
fait fureur en France, la créatrice,<br />
formée dans les meilleures<br />
maisons de son époque, se bâtit<br />
un succès grâce à une mode ultraféminine,<br />
aux finitions irréprochables.<br />
La maison de couture s’impose<br />
rapidement comme l’une des<br />
plus élégantes de la capitale <strong>et</strong><br />
s’enorgueillit bientôt, grâce au<br />
dynamisme de Robert Ricci, fils<br />
de la fondatrice, d’une ligne de<br />
parfums.<br />
C’est en 1948 que naît L’Air du<br />
Temps, dont le flacon créé en collaboration<br />
avec Marc Lalique en<br />
1951 le liera à jamais à l’image de<br />
colombes enlacées. Classé parmi<br />
les cinq meilleurs parfums du<br />
monde (avec Shalimar, Joy, Chanel<br />
No. 5 <strong>et</strong> Arpège), il sera suivi<br />
par d’autres succès, tels Cœur<br />
Joie, Fille d’Eve, Capricci, Farouche,<br />
qui feront de Nina Ricci un<br />
des grands noms de la parfumerie<br />
internationale.<br />
Tournant volontairement le dos<br />
aux épicrises d’identité <strong>et</strong> autres<br />
soubresauts des genres, les créations<br />
intemporelles de la maison<br />
font écho aux portraits<br />
Renaissance des Offices de<br />
Florence comme aux œuvres<br />
des artistes de son<br />
temps. Une collaboration<br />
de plus de vingt ans avec le<br />
photographe David Hamilton<br />
pour les campagnes de<br />
publicité ancreront la maison<br />
dans une imagerie romantique.<br />
Si la maison peut<br />
se targuer d’avoir collaboré avec<br />
Andy Warhol pour le dessin de<br />
vitrines à New York, ou Maurice<br />
Béjart pour le lancement<br />
d’un parfum, c’est avant tout<br />
grâce à la sensibilité esthétique<br />
de Robert Ricci. Réinterprétées,<br />
Les Trois Grâces du Printemps<br />
de Botticelli devinrent dès 1936<br />
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l’emblème de la maison <strong>et</strong> figurent<br />
aujourd’hui encore dans son<br />
identité visuelle.<br />
Sa passion lui valut bientôt de se<br />
lier d’amitié avec quelques<br />
grands créateurs de son temps,<br />
tel Jean Cocteau. Acteurs <strong>et</strong> actrices,<br />
Jean Marais, Micheline<br />
Presle ou encore Ingrid Bergman<br />
assistèrent bientôt aux défilés,<br />
<strong>et</strong> la maison se m<strong>et</strong> à dessiner<br />
pour le cinéma.<br />
Fidèle à c<strong>et</strong> esprit d’ouverture,<br />
Robert Ricci demanda à la maison<br />
Lalique, dont les créations<br />
Art Nouveau avaient révolutionné<br />
le travail du verre, de dessiner<br />
en exclusivité les flacons<br />
des parfums Nina Ricci, qui<br />
virent le jour dès les années<br />
40, avec le flacon de Cœur<br />
Joie, une prouesse technique<br />
au centre évidé. 1998<br />
marque l’acquisition de la<br />
maison par le groupe espagnol<br />
Puig Beauty and<br />
Fashion. Pas une rupture,<br />
mais un nouvel élan, une version<br />
contemporaine construite<br />
sans jamais la dépouiller de son<br />
essence ni de son supplément<br />
culturel. Ach<strong>et</strong>er du Nina Ricci<br />
n’est pas une simple démonstration<br />
de luxe. C’est la preuve<br />
d’un vrai sens actuel de la féminité<br />
<strong>et</strong> l’appréciation d’un travail<br />
somptueux.<br />
Nina, le Parfum<br />
Créé en 1987 par Robert Ricci en<br />
hommage à sa mère, le parfum<br />
Nina se réinvente <strong>et</strong> s’affirme c<strong>et</strong><br />
automne comme un désir absolu<br />
de desserts défendus. Pomme<br />
d’amour, gaufres pralinées, volutes<br />
caramélisées, sorb<strong>et</strong> au citron vert,<br />
un soupçon d’alcool fort… Régressif<br />
en apparence, ce jus ludique <strong>et</strong><br />
caressant qui vous transforme en<br />
fille d’Eve repose sur une architecture<br />
sensuelle très fac<strong>et</strong>tée. Composé<br />
par deux grands nez de Firmenich,<br />
né pour séduire, il prend<br />
pour image une fille délicieuse,<br />
amoureuse, perchée sur une<br />
échelle pour aller cueillir le fruit<br />
rouge de l’amour. Pour que le film<br />
publicitaire réussisse son travelling,<br />
il aura fallu abonder de trucages<br />
au tournage. Toute la scène du<br />
paysage avec l’arbre <strong>et</strong> ses centaines<br />
de pommes a été reproduite<br />
en miniature pour assurer les plans<br />
généraux, tandis que la création en<br />
studio d’un pommier grandeur nature<br />
a permis les gros plans. Au final,<br />
le nez dans le flacon, c’est un<br />
tourbillon de glamour, une sorte<br />
de folie douce élevée au rang de<br />
principe fondamental. Il ressemble<br />
à ces filles qui enlèvent toujours<br />
leur tee-shirt d’un seul mouvement,<br />
sortent cheveux au vent,<br />
font de la désinvolture leur élégance,<br />
candides, déterminées, fières<br />
<strong>et</strong> tendres, troublantes…<br />
<strong>NINA</strong> <strong>RICCI</strong><br />
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