884 G. PISON, N. COUVERTFigure 5.– Variations de la proportion <strong>des</strong> <strong>accouchem<strong>en</strong>ts</strong> <strong>gémellaires</strong><strong>en</strong> <strong>France</strong> selon l’âge de la mèreLecture : les mesures pour la période 1700-1829 sont par groupes d'âges quinqu<strong>en</strong>naux.Sources : période 1700-1829, Gutierrez et Houdaille (1983);pério<strong>des</strong> 1965-1967 et 1998-1997, Daguet (2002).condamnai<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t autrefois à une mort précoce. Il est possible queleurs naissances n’étai<strong>en</strong>t pas toutes déclarées lorsque l’un ou les deuxmourai<strong>en</strong>t avant la naissance (mort-né) ou dans les premiers jours qui suivai<strong>en</strong>t.Ce sous-<strong>en</strong>registrem<strong>en</strong>t qui frappait particulièrem<strong>en</strong>t les jumeaux adû diminuer avec la baisse de la mortalité générale et ne doit plus existeraujourd’hui. Il est difficile de le corriger car on ignore quelle était son ampleurautrefois.Pour le XX e siècle, si l’on fait abstraction <strong>des</strong> maternités tardives, audelàde 40 ans, qui sont de toute façon peu nombreuses, le taux de gémellitétous âges confondus est d’autant plus élevé que l’âge moy<strong>en</strong> à la maternitéest lui-même élevé. Or, ce dernier a varié s<strong>en</strong>siblem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>France</strong>au cours <strong>des</strong> c<strong>en</strong>t dernières années (figure 3). Un peu supérieur à 29 ans audébut du XX e siècle, il a diminué jusqu’à 26,5 ans <strong>en</strong> 1977, puis s’est mis àaugm<strong>en</strong>ter rapidem<strong>en</strong>t pour retrouver un niveau dépassant 29 ans à la fin<strong>des</strong> années 1990. L’évolution du taux de gémellité est <strong>en</strong> partie liée à cesvariations du cal<strong>en</strong>drier <strong>des</strong> maternités. Le pic de gémellité de la premièreguerre mondiale résulte ainsi <strong>en</strong> partie de la hausse de l’âge moy<strong>en</strong> à lamaternité p<strong>en</strong>dant les années de guerre. Cette hausse ti<strong>en</strong>t à ce qu’une partie<strong>des</strong> mariages ont été reportés ou empêchés par la guerre. Les femmesqui ont eu <strong>des</strong> <strong>en</strong>fants p<strong>en</strong>dant les années de guerre étai<strong>en</strong>t donc souv<strong>en</strong>tdéjà mariées au début de la guerre, et rarem<strong>en</strong>t de jeunes mariées. Lesjeunes femmes qui ont quand même pu se marier p<strong>en</strong>dant la guerre ont par
LA FRÉQUENCE DES ACCOUCHEMENTS GÉMELLAIRES EN FRANCE 885ailleurs eu peu d’<strong>en</strong>fants, leur mari étant souv<strong>en</strong>t mobilisé et au front.Alors que l’âge moy<strong>en</strong> <strong>des</strong> mères était proche de 29 ans <strong>en</strong>tre 1910 et1914, il a augm<strong>en</strong>té brutalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> 1915 et s’est maint<strong>en</strong>u à un niveauproche de 30 ans p<strong>en</strong>dant les années 1915-1919, pour re<strong>des</strong>c<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>suiteau niveau d’avant-guerre (figure 3). P<strong>en</strong>dant la seconde guerre mondiale,les maternités sont égalem<strong>en</strong>t dev<strong>en</strong>ues plus tardives temporairem<strong>en</strong>t,quoique la hausse de l’âge moy<strong>en</strong> à la maternité ait été moins marquée.Curieusem<strong>en</strong>t, elle ne s’est pas traduite par une hausse du taux de gémellité.Il faut imaginer que d’autres facteurs ont joué à la baisse au mêmemom<strong>en</strong>t, neutralisant l’effet <strong>des</strong> maternités plus tardives. Nous revi<strong>en</strong>dronsplus loin sur ce point.En s<strong>en</strong>s inverse, lorsque l’âge moy<strong>en</strong> à la maternité baisse, commedans les années 1960 et 1970, le taux de gémellité diminue. Et le retournem<strong>en</strong>tde t<strong>en</strong>dance à la fin <strong>des</strong> années 1970 avec la hausse de l’âge à la maternitéest concomitant à quelques années près du retournem<strong>en</strong>t det<strong>en</strong>dance du taux de gémellité. Mais le retard ou l’avancem<strong>en</strong>t <strong>des</strong> maternitésn’expliqu<strong>en</strong>t qu’une partie <strong>des</strong> évolutions de la gémellité.3. Les jumeaux du baby-boomNeutralisons l’influ<strong>en</strong>ce <strong>des</strong> variations du cal<strong>en</strong>drier <strong>des</strong> naissancessur le taux de gémellité <strong>en</strong> calculant celui-ci par groupe d’âges (figure 6)et <strong>en</strong> estimant un taux de gémellité standardisé, <strong>en</strong> utilisant une répartitionpar âge <strong>des</strong> mères constante et égale par conv<strong>en</strong>tion à celle de l’année1985 (figure 7). Les nouvelles courbes d’évolution montr<strong>en</strong>t toujours unpic de gémellité p<strong>en</strong>dant la première guerre mondiale, signe que la haussetemporaire de l’âge à la maternité n’était pas le seul facteur <strong>en</strong> jeu. Demême, la baisse du taux dans les années 1960 et sa remontée à partir de1972 s’observ<strong>en</strong>t pratiquem<strong>en</strong>t à tous les âges, ces mouvem<strong>en</strong>ts affectantaussi par voie de conséqu<strong>en</strong>ce le taux de gémellité standardisé.Après le pic de gémellité de la première guerre mondiale sur lequelnous revi<strong>en</strong>drons plus loin, le taux de gémellité retrouve un niveau plusfaible <strong>en</strong> 1920 et <strong>en</strong>tame <strong>en</strong>suite une diminution régulière chez les femmesayant <strong>en</strong>tre 25 ans et 44 ans, d’autant plus marquée que leur âge est élevé(figure 6). <strong>La</strong> baisse se poursuit <strong>en</strong> s’accélérant même p<strong>en</strong>dant la secondeguerre mondiale. Le taux de gémellité standardisé atteint p<strong>en</strong>dant cettepériode un niveau bas (figure 7). Si le taux de gémellité réel se mainti<strong>en</strong>t àpeu près au même niveau, c’est grâce à la hausse de l’âge moy<strong>en</strong> à lamaternité p<strong>en</strong>dant cette période qui comp<strong>en</strong>se la baisse <strong>des</strong> taux à chaqueâge. <strong>La</strong> t<strong>en</strong>dance séculaire à la baisse s’interrompt vers 1945. Le taux serelève alors légèrem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant quelques années, à peu près à tous lesâges. Puis, après avoir atteint un maximum temporaire, il se remet àdiminuer, la baisse dev<strong>en</strong>ant plus nette à partir du milieu <strong>des</strong> années 1960.Sur la courbe du taux de gémellité standardisé, cette période de gémellitéun peu plus élevée dans un contexte de baisse séculaire apparaît nettem<strong>en</strong>t