celui, en Belgique, en 1990, coorganisépar PIWB.Les années septante furent résolumentmarquées par un foisonnementextraordinaire d’études,de projets et de reportages consacrésau patrimoine industrielancien. Le sauvetage et la réhabilitationfiguraient désormais àl’ordre du jour, en négligeantparfois la nécessité des choix, dufinancement et de la viabilisationà terme. Quoiqu’il en soit, laBelgique francophone se devaitde revendiquer sa place dans lecontexte d’une fédéralisation enmarche et par simple respectpour son identité historique, oùl’industrie a tenu une si largeplace. Ainsi, sous l’impulsion etavec l’appui de l’Exécutif de laCommunauté française futfondée, le 22 février 1984, l’associationsans but lucratif«<strong>Patrimoine</strong> industriel <strong>Wallonie</strong>-<strong>Bruxelles</strong>», que j’eus l’honneurde présider d’emblée et durantles dix premières années de sonexistence. Les trentequatremembres fondateursétaient animés du même désir dedéfendre et d’illustrer le patrimoineindustriel ancien de leurcommunauté, dans un souciaussi bien scientifique qu’identitaire.La même année était créeun bulletin de liaison :«<strong>Patrimoine</strong> industriel». Lemodeste numéro 1, de type «desktop», fut désormais suivi, dès lenumérosuivant,d’une présentationimprimée en bonne et dueforme. Ce périodique demeureaujourd’hui, près d’un quart desiècle plus tard, une contributionappréciée dans le domaine qui estle sien. Articles, reportages,comptes rendus, nouvelles brèvesapportent aux membres et auxautres une information soutenueet, on peut l’espérer, un stimulantà leur centre d’intérêt particulier.En 1984 encore, la section belgedu TICCIH, dénommée «TIC-CIH Belgium» fut structurée enéquilibrant, cette fois, le nouveauP.I.W.B. et son aînée, laV.V.I.A.Les tâches de PIWB étaient multiples,tant son domaine deprédilection était alors nouveau.Il s’agissait de mettre en valeurles grands sites réhabilités etd’encourager la préservation deceux, alors nombreux, qui pouvaientl’être. Il fallait aussi gérerune association qui couvrait uneaire assez vaste, nécessitant denombreux déplacements du conseild’administration, tant pourdiversifier les lieux de rencontreque pour se rendre compte desréalités locales. En 1987, cesdéplacements furent étendus auxmembres eux-mêmes, en leuroffrant la possibilité de visiter lesdivers sites intéressants au coursd’excursions organisées enBelgique et, par la suite, dès1991, dans les pays limitrophes.On mit également sur pied desexpositions itinérantes (en 1985et 1986), des colloques, notammentcelui sur la reconversiondes sites industriels en collaborationavec la Société royale belgedes ingénieurs et des industriels(1987), sans parler du congrèsinternational du TICCIH en1990. Des contacts formelsfurent noués avec les servicesd’archéologie industrielle duGrand-Duché de Luxembourg.P.I.W.B. participa également, en1994, aux Journées du<strong>Patrimoine</strong> en région wallonne,axées sur l’archéologie industrielle.Enfin, des contacts fréquentsfurent noués avec des mandatairespublics, dans un but desensibilisation, outre ceux, constantsceux-là, avec laCommunauté française deBelgique. Le Ministre del’Aménagement du Territoireconfia à l’association un inventairedes sites industriels wallons,projet qui fut mené de 1991 à1993, même si d’autres instancess’assurèrent le privilège,par la suite, de le paracheveren leur nom. Déjà, en effet, seposait la question des choix dansl’intervention des servicespublics en matière de réhabilitation.Entre-temps, le conceptmême d’archéologie industrielleétait en train de s’élargir considérablement,incitant à une vigilanceétendue à d’autresdomaines : techniques ancestraleset proto-industries, patrimoinemobilier et pas seulementimmobilier, histoire orale …La création et les débuts dePIWB ont constitué, pour moi,une expérience enthousiasmante,partagée avec des administrateurs– dont certains, hélas, nesont plus – et des adhérents souventtrès motivés. J’en retire, entoute modestie, le sentimentd’avoir apporté ma contribution,d’une part à la connaissance d’un phénomène historique que jeconsidère comme un des plusimportants de l’évolution del’humanité : la Révolutionindustrielle, d’autre part au renforcementde l’identité francophoneen Belgique (et ceci sansexclusive) et enfin à la promotionde l’image de cette communautéet de la Belgique à l’étranger.Jucundi acti labores,«heureux les travaux finis», disaitCicéron. Mais le sont-ils jamais? Mon successeur, Jean Defer, etceux après lui ont assumé etassument d’autres tâches,d’autres défis, dans un contextemouvant. Mais ceci est uneautre histoire …Claude GAIERAncien président - Fondateur4
ETUDE : PÉRENNITÉ DU PATRIMOINE INDUSTRIEL. L’EXEMPLE DEMOUSCRON 1994-2007 CLAUDE DEPAUWChacun sait que les lieux du patrimoineindustriel immobiliernon protégé par la loi ont tendance,pour toutes sortes deraisons, bonnes ou mauvaises, aupire, à disparaître purement etsimplement, au mieux, à êtretransformés, parfois correctementdu point de vue del’archéologie industrielle.Mais il faut bien dire que, le plussouvent, ils sont défigurés demanière irrémédiable.Et ne parlons pas du patrimoinemobilier : en ce qui concernel’industrie textile mouscronnoise,tellement peu de chosesont survécu à plus de deux sièclesde progrès technique qu’il nepourra pas être question ici de cequasi rien.Je m’attacherai donc aux seulsbâtiments industriels de la villede Mouscron.Or, Mouscron, c’est le textile.Après un itinéraire de plus dedeux siècles et demi, cette activitéa fait d’un village paysan unecité industrielle 1 , située dans unerégion où cette branche de l’industriea été durement touchéepar des transformations radicalesqu’elle a connues en Europe dansle dernier quart du XX e siècle 2 .Témoins d’un pan non négligeablede l’histoire de l’industrietextile en Belgique – une histoireencore largement méconnue,sauf exceptions 3 –, nombrede sites industriels mouscronnoisont réussi à se maintenir jusqu’àprésent. Les disparitions totalesont été assez peu nombreuses.Sous les nefs de la Manufacture Française de Tapis et Couvertures en 1997(cliché Florence Vanderhaegen,Archives de la Ville de Mouscron).Mais deux lieux qui ont vus’éteindre leur activité première ily a peu suscitent l’intérêt desinvestisseurs immobiliers parcequ’ils sont situés en zone d’habitat.Nul doute qu’ils subiront unjour l’assaut des démolisseurs envue de requalifier ces espacesurbains avant qu’ils ne deviennentchancres ou friches.Parmi les sites qui ont survécuaux démolitions ou auxincendies, la plupart ont ététransformés en tout ou en partieavec plus ou moins de bonheur.La difficulté réside à conserverl’intégrité du patrimoine industrieltextile quand l’entreprisemaintient son activité et surtoutlorsqu’une autre activité y a trouvéson siège.L’évolution normale d’un siteindustriel est de subir les contraintesdu développementéconomique.Cela entraîne des modificationsparfois radicales des bâtiments àtel point que leur aspect peutvite perdre les qualités architecturalesqui en faisaient un lieu depatrimoine alliant esthétisme etfonctionnalité au niveau du plangénéral et/ou des détails particuliers.En 1994, j’ai présenté quatre casdestinés à illustrer le patrimoineindustriel local au sein de celuide la <strong>Wallonie</strong> 4 : le tissage et teinturerieVanoutryve (depuis1880), la Manufacture Françaisede Tapis et Couvertures (depuis1925) 5 , la filature Motte (depuis1907) 6 et la filature Catteau(depuis 1929) 7 . Les plus ancienset les seuls encore aujourd’huidévolus à l’industrie textile, lesbâtiments de Vanoutryve, ontété les seuls jugés suffisammentintéressants pour faire l’objetd’une notice plus détaillée parmiles vingt-cinq lieux de l’entité1Pour reprendre le titre de la monographie de J. Debaes et R. Vandenberghe, « Mouscron 1789-1945. Itinéraire du village paysan à la citéindustrielle », Mémoires de la Société d’Histoire de Mouscron et de la Région [=M.S.H.M.R.], t. XIII, fasc. 1, 1991.2Un aperçu de ce passé industriel textile se trouve dans C. Depauw, « Mouscron, un passé industriel méconnu », M.S.H.M.R., t. XIX, 1997,pp. 51-124.3Id., « L’industrie textile en Belgique, en <strong>Wallonie</strong> et en Hainaut aux XIX e et XX e siècles », Le fil du temps. Revue de la Société d’Histoire deMouscron et de la Région, n° 6, septembre 2002, pp. 5-41 ; condensé dans Id., « Une industrie méconnue : le textile en <strong>Wallonie</strong> et enHainaut », Bulletin trimestriel de l’a.s.b.l. <strong>Patrimoine</strong> <strong>Industriel</strong> <strong>Wallonie</strong>-<strong>Bruxelles</strong> [=Bulletin PIWB], n° 58, avril-mai-juin 2004, pp. 3-7 ;n° 59-60, juillet-décembre 2004, pp. 3-7 (certaines illustrations de cet article représentent des entreprises mouscronnoises).4Id., « Mouscron. L’industrie textile », Le patrimoine industriel de <strong>Wallonie</strong>, Liège, 1994, pp. 310-313.5Sur la Manufacture Française de Tapis et Couvertures : Id., « Les Archives de la Ville de Mouscron. Chronique d’une naissance, 1979-2004 »,Le fil du temps, n° 8, décembre 2004, p. 81, note 46.6° 25, février 1993, pp. 2-13, et Id., « La «Tour Motte» à Mouscron », Bulletin PIWB, n° 27, décembre 1993, pp. 18-20 ; Id., « Les archives de lafilature Motte et Cie à Mouscron, Miscellanea Cécile Douxchamps-Lefèvre, Archives et Bibliothèques de Belgique, t. LIX, n° 3-4, 1988, pp. <strong>69</strong>-77.7Les 3 premières entreprises bénéficient d’une notice dans Id., « Le quartier de la Gare, une étape dans l’industrialisation de Mouscron », Le fildu temps, n° 6, septembre 2002, pp. 53-55 et 58. Une belle photo aérienne de ce quartier (reproduite dans Id., « L’industrie textile dans l’ouestde la <strong>Wallonie</strong>, particulièrement en Hainaut occidental », <strong>Wallonie</strong>-<strong>Bruxelles</strong> : berceau de l’industrie sur le continent européen, P.I.W.B.,Louvain-la-Neuve, 1990, p. 195) montre ces 3 lieux peu avant 19<strong>70</strong>.5