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Cass., 14 avril 2005 - Procedurecivile.be

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<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/1Cour de cassation de BelgiqueArrêtN° C.03.0<strong>14</strong>8.FGARAGE SPINOIT, société privée à responsabilité limitée en liquidation,représentée par son liquidateur, M. Jean-Claude Lefevre, domicilié à Villersla-Ville,drève de Cochet, 23 A,demanderesse en cassation,représentée par Maître Philippe Gérard, avocat à la Cour de cassation, dont lecabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 523, où il est fait élection dedomicile,contreGECIMA, société privée à responsabilité limitée dont le siège social est établià Wavre, Z. I. Nord, avenue Vésale, 24,défenderesse en cassation,


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/2en présence deP & V ASSURANCES, société coopérative dont le siège social est établi àSaint-Josse-ten-Noode, rue Royale, 151,partie appelée en déclaration d’arrêt commun,représentées par Maître Adolphe Houtekier, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est établi à Malines, Battelsesteenweg, 95, où il est fait élection dedomicile.I. La décision attaquéeLe pourvoi en cassation est dirigé contre l’arrêt rendu le 13 mai 2002par la cour d’appel de Bruxelles.II.La procédure devant la CourLe conseiller Daniel Plas a fait rapport.L’avocat général délégué Philippe de Koster a conclu.III.Le moyen de cassationLa demanderesse présente un moyen li<strong>be</strong>llé dans les termes suivants :Dispositions légales violées- articles 5, 774 et 1138, 3°, du Code judiciaire ;- articles 1<strong>14</strong>2 à 1151, 1319, 1320, 1322 et 1797 du Code civil ;- principe général du droit en vertu duquel le juge est tenu, tout enrespectant les droits de la défense, de déterminer la norme juridique applicableà la demande portée devant lui et d'appliquer celle-ci, qui trouve applicationnotamment dans l'article 774 du Code judiciaire.


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/3Décisions et motifs critiquésL'arrêt attaqué reçoit l'appel incident de la défenderesse, le ditpartiellement fondé, met à néant le jugement entrepris sauf en tant qu'il a reçules demandes et liquidé les dépens et, réformant, dit non fondée la demandereconventionnelle de la demanderesse dirigée contre la défenderesse, l'endéboute et condamne, en conséquence, la demanderesse à payer à ladéfenderesse 6.300,96 euros augmentés des intérêts conventionnels au taux de8 p.c. l'an depuis le 12 <strong>avril</strong> 1991 jusqu'au parfait paiement ainsi que lesdépens des deux instances et ce, pour tous ses motifs considérés ici commeintégralement reproduits et notamment les motifs :« Que l'expertise n'a pas permis de déterminer, à l'estime de la cour[d’appel], les causes techniques précises et certaines de l'accident ;Qu'il se lit à la page 10 du rapport de l'expert De Lange ce qui suit :‘Vu les déclarations divergentes des parties, il est presque impossiblede retrouver ce qui s'est passé exactement au moment de l'accident : Qui aplacé l'élingue ? Qu'est-ce qu'on a donné comme gestes de commandement augrutier ? Est-ce que le fardeau de tôles a heurté la costière du deuxièmebâtiment (l'atelier existant) ce qui a provoqué le glissement des poutrelles ?Est-ce que les tôles ont glissé d'elles-mêmes, à cause d'un amarrage médiocrede l'élingue ?’Qu'en l'absence de réponse à ces diverses questions, il faut retenircomme simples hypothèses, non démontrées :- la faute éventuelle de la [défenderesse] ou de V. d'avoir placé uneseule élingue au lieu de deux pour attacher les tôles entre elles ;- une éventuelle faute du chauffeur de la [société] V. dans l'arrimage del'élingue ou dans les gestes de commandement de la manœuvre ;- une éventuelle faute du grutier dans l'exécution de la manœuvre ;Qu'il n'est dès lors pas possible, dans ces conditions, de se borner, pourdéterminer les responsabilités et les condamnations qui en découlent, àavaliser l'impression subjective que l'expert a exprimé comme suit page 10 deson rapport :‘Personnellement, je pense que le paquet de tôles a heurté la costière etque les tôles ont commencé à glisser à cause de ce coup. Si l'utilisation d'une


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/4seule sangle, ou l'amarrage médiocre de celle-ci, avait provoqué le glissementdes tôles de l'élingue, je pense que ce phénomène se serait déjà produit aupremier moment de levage du fardeau du camion’ ;Que cette impression de l'expert, fondée sur le fait qu'il pense que lestôles auraient glissé au premier levage si l'utilisation d'une seule sangle ou unamarrage médiocre de celle-ci était à l'origine du glissement, ne permet pas deconsidérer, avec le degré de certitude requis, que la manoeuvre du grutier estnécessairement la cause de l'accident ;Qu'en outre, cette hypothèse ne permettrait pas encore de savoir si lafausse manoeuvre éventuelle du grutier n'a pas été provoquée par demauvaises indications du chauffeur de Vanderlinden, comme le suggèrel'expert lui-même ;Que, par ailleurs, la déclaration du chauffeur de Vanderlinden,adressée le 9 août 1991 à l'expert Hellio n'a pas de valeur probante suffisantedans le cadre de ses recherches sur l'imputabilité de l'accident ;Que cette déclaration, établie quatre mois après les faits dans le cadrede l'expertise, a d'autant moins de valeur probante que la [société]Vanderlinden n'a jamais invoqué auparavant une fausse manoeuvre du grutieret n'a pas réagi à la lettre qui lui a été adressée le jour même de l'accident par[la défenderesse] aux termes de laquelle il était fait état, comme cause dusinistre, de l'emploi d'une seule sangle ;Que la déclaration non datée de l'apprenti de [la demanderesse]suivant laquelle il aurait ‘entendu un choc avant que les poutrelles netraversent le toit de la salle d'exposition’ n'est pas significative dès lors que lechoc entendu peut fort bien être celui de la première poutrelle tombée avant lesautres ;Qu'il est essentiel de relever que [la demanderesse] n'invoquenullement la responsabilité contractuelle de la [défenderesse] chargée demonter le hangar mais uniquement sa responsabilité quasi-délictuelle ;Qu'il ne peut dès lors être recherché sur la base des principes de laresponsabilité contractuelle si, en l'absence de détermination précise descauses de l'accident - dès lors qu'il est en tout cas certain qu'une faute a étécommise par l'un ou par plusieurs des intervenants - la [défenderesse] nerépond pas contractuellement de leur faute éventuelle ;


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/5Que force est de constater que [la demanderesse] n'établit pas que la[défenderesse], la [société] Vanderlinden ou la [société] Trama ont commisune faute en relation avec le dommage qu'elle a subi ;Que le seul fait de l'accident ne permet pas d'affirmer que ce sont despersonnes non qualifiées ou incompétentes qui ont procédé à la manoeuvre àl'origine du glissement des poutrelles ;Qu'il suit des considérations qui précèdent que [la demanderesse] doitpayer à la [défenderesse] les factures impayées relatives à la construction duhangar ».GriefsPour déclarer non fondée la demande en réparation dirigée par lademanderesse contre la défenderesse, son cocontractant, l'arrêt attaquéconstate « qu'il est en tout cas certain qu'une faute a été commise par l'un ouplusieurs des intervenants » mais décide « qu'il ne peut être recherché sur labase des principes de la responsabilité contractuelle si, en l'absence dedétermination précise des causes de l'accident, la défenderesse ne répond pascontractuellement de leur faute éventuelle » dès lors que la demanderesse« n'invoque nullement la responsabilité contractuelle de [la défenderesse]chargée de monter le hangar mais uniquement sa responsabilité quasidélictuelle».1. Première brancheEn termes de conclusions principales déposées devant le tribunal decommerce de Bruxelles, la demanderesse a introduit une demandereconventionnelle contre la défenderesse afin d'obtenir la condamnation decette dernière à réparer le dommage qui lui avait été causé à la suite del'accident survenu le 8 <strong>avril</strong> 1991.Ni dans ces conclusions, ni dans ses conclusions additionnelleségalement déposées devant le premier juge, la demanderesse n'a expressémentprécisé le fondement juridique de sa demande reconventionnelle mais a


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/6postulé, en termes généraux, la condamnation de la défenderesse à réparer ledommage causé par ledit accident.Par jugement du 31 janvier 1996, le tribunal de commerce de Bruxellesa fait droit à la demande reconventionnelle de la demanderesse en estimantque « le fondement des actions incidentes menées par [la demanderesse] neparaît pas être de nature contractuelle » et en décidant partant que « laresponsabilité aquilienne in solidum [de la] société TRAMA et [de ladéfenderesse] doit être retenue ».Dans ses « nouvelles » conclusions d'appel, la demanderesse s'estbornée à solliciter la confirmation du jugement dont appel.La demanderesse ne s'est donc jamais limitée, en termes deconclusions, à invoquer la responsabilité quasi-délictuelle de la défenderesse.Au contraire, la demanderesse a sollicité, tant en première instancequ'en degré d'appel, la condamnation de la défenderesse au motif que « saresponsabilité, en tant qu'entrepreneur général, dans l'accident du 8 <strong>avril</strong>1991, est incontestablement engagée ». La demanderesse a ainsi postulé lamise en cause directe de la responsabilité contractuelle de la défenderesse, ensa qualité d'entrepreneur général chargé du montage du hangar, tant pour lesfautes personnellement commises par la défenderesse que pour les fautescommises par ses agents d'exécution, les sociétés anonymes Trama et EtsVanderlinden.Il s'ensuit que l'arrêt attaqué qui, pour rejeter la demandereconventionnelle de la demanderesse, décide que la demanderesse n'invoquenullement la responsabilité contractuelle de la défenderesse mais uniquementsa responsabilité quasi-délictuelle attribue aux conclusions principales etadditionnelles de la demanderesse déposées devant le tribunal de commerce deBruxelles ainsi qu'aux « nouvelles » conclusions d'appel de la demanderessedéposées devant la cour d'appel de Bruxelles une portée inconciliable avec ceque ces conclusions contiennent, affirment et mentionnent et, partant,méconnaît la foi qui est légalement due à ces conclusions (violation desarticles 1319, 1320 et 1322 du Code civil).


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/72. Seconde brancheIl appartient au juge, tout en respectant les droits de la défense,d'appliquer aux faits dont il est régulièrement saisi, sans modifier ni l'objet, nila cause de la demande, la règle de droit sur la base de laquelle il fera droit àla demande ou rejettera celle-ci.Le juge ne peut, sans violer ce principe général du droit qui trouveapplication notamment dans l'article 774 du Code judiciaire, rejeter lademande au seul motif que la règle de droit invoquée par la partiedemanderesse n'est pas applicable au litige alors qu'il constate simultanémentque cette demande est susceptible d'être accueillie sur la base d'une autre règlede droit.En l'espèce, l'arrêt attaqué constate que :1. il est impossible de déterminer de manière précise les causes del'accident survenu le 8 <strong>avril</strong> 1991 lors du montage du hangar que ladéfenderesse était contractuellement chargée de fournir à la demanderesse,2. il est toutefois certain qu'une faute a été commise par l'un ouplusieurs des intervenants à ce montage, c'est-à-dire la défenderesse et lesdeux sociétés auxquelles cette dernière a fait appel pour procéder à cemontage,3. la défenderesse, en qualité de cocontractant de la demanderesse etd'entrepreneur général, serait susceptible de répondre contractuellement de lafaute éventuelle des intervenants.L'arrêt attaqué décide néanmoins que la responsabilité contractuelle dela défenderesse, en qualité d'entrepreneur général, ne peut être recherchée duchef des fautes de l'un ou plusieurs des intervenants dès lors que lademanderesse n'invoque nullement la responsabilité contractuelle de lademanderesse mais uniquement sa responsabilité quasi-délictuelle.Ce sont pourtant les mêmes faits qui, d'une part, étaient invoqués par lademanderesse à l'appui de sa demande reconventionnelle et qui, d'autre part,sont considérés par l'arrêt attaqué comme susceptibles d'engager laresponsabilité contractuelle de la défenderesse.L'arrêt attaqué était dès lors tenu, tout en respectant les droits de ladéfense, de déterminer la norme juridique applicable à la demande


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/8reconventionnelle de la demanderesse et d'appliquer celle-ci, cette règle dedroit fût-elle différente de celle invoquée par la demanderesse.L'arrêt attaqué, qui refuse explicitement de rechercher si la demandereconventionnelle dirigée par la demanderesse contre la défenderesse peut êtreaccueillie sur la base des règles de la responsabilité contractuelle, ometd'appliquer la règle de droit aux faits qui constituent le fondement de lademande et, partant, viole les articles 5, 774 et 1138, 3°, du Code judiciaireainsi que le principe général du droit précité.L'arrêt attaqué méconnaît également les articles 1<strong>14</strong>2 à 1151 ainsi quel'article 1797 du Code civil en refusant de vérifier si la responsabilitécontractuelle de la défenderesse, entrepreneur général et seul cocontractant dela demanderesse, ne peut être recherchée, en l'absence de déterminationprécise des causes de l'accident, dès lors qu'il est en tout cas certain qu'unefaute a été commise par l'un ou plusieurs des intervenants et que lademanderesse doit répondre, en vertu de ces dispositions légales, despersonnes qu'elle s'est substituées ou qu'elle a utilisées afin d'exécuter lecontrat qui la liait à la demanderesse.IV.La décision de la CourQuant à la seconde branche :Attendu que le juge est tenu de trancher le litige conformément à larègle de droit qui lui est applicable ; qu’il a l’obligation, en respectant les droitsde la défense, de relever d’office les moyens de droit dont l’application estcommandée par les faits spécialement invoqués par les parties au soutien deleurs prétentions ;Attendu qu’il ressort des constatations de l’arrêt qu’un accident estsurvenu lors du montage du hangar que la défenderesse était contractuellementchargée de fournir à la demanderesse et que, pour obtenir la réparation de sondommage, celle-ci a recherché la responsabilité de la défenderesse et celle de


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/9deux entreprises auxquelles cette dernière avait fait appel pour exécuter lemontage ;Attendu que l’arrêt relève que la demanderesse n’invoque pas laresponsabilité contractuelle de la défenderesse mais seulement sa responsabilitéquasi-délictuelle et décide qu’il ne peut, dès lors, examiner si la défenderessen’a pas engagé sa responsabilité contractuelle ;Qu’en statuant ainsi, sans rechercher si, sur la base des faits que lademanderesse invoquait à l’appui de sa demande, la responsabilitécontractuelle de la défenderesse n’était pas engagée, l’arrêt n’a pas justifiélégalement sa décision ;Que dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fondé ;Attendu que la cassation de la décision disant non fondées les demandesde la demanderesse s’étend, en raison du lien établi par l’arrêt entre cesdécisions, à celle qui dit fondée la demande de la défenderesse contre lademanderesse et à celle qui dit sans objet les « demandes en garantie et lesdemandes de contribution » ;Quant aux autres griefs :Attendu qu’il n’y a pas lieu d’examiner le surplus de la secondebranche et la première branche du moyen qui ne sauraient entraîner unecassation plus étendue ;Et attendu que la demanderesse a intérêt à ce que l’arrêt soit déclarécommun à la partie appelée à la cause devant la Cour à cette fin ;


<strong>14</strong> AVRIL <strong>2005</strong> C.03.0<strong>14</strong>8.F/10PAR CES MOTIFS,LA COUR<strong>Cass</strong>e l’arrêt attaqué, sauf en tant qu’il statue sur la recevabilité desappels et des demandes, qu’il donne acte de son intervention volontaire dansl’instance d’appel à la partie appelée en déclaration d’arrêt commun et qu’ilrejette la demande de la demanderesse fondée sur la responsabilité aquilienne ;Déclare l’arrêt commun à la société coopérative P & V Assurances ;Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l’arrêtpartiellement cassé ;fond ;Réserve les dépens pour qu’il soit statué sur ceux-ci par le juge duRenvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d’appel de Mons.Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président de section Claude Parmentier, les conseillers DidierBatselé, Al<strong>be</strong>rt Fettweis, Daniel Plas et Philippe Gosseries, et prononcé enaudience publique du quatorze <strong>avril</strong> deux mille cinq par le président de sectionClaude Parmentier, en présence de l’avocat général délégué Philippe de Koster,avec l’assistance du greffier Marie-Jeanne Massart.

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