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“ Les souvenirs d'un gruyérien ” par Joseph Jaquet, d ... - pharisa.ch

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“ <strong>Les</strong> <strong>souvenirs</strong> d’un gruyérien ” <strong>par</strong> <strong>Joseph</strong> <strong>Jaquet</strong>, d’Estavannens, volume I, 1822-1871 Page 63L'aubergiste, François Rouiller, a affirmé qu'outre l'argent il avait sur lui, on lui avait enlevé une somme s'élevant à plus 600francs, ainsi que des créances et d'autres titres.La circonstance que la porte d'entrée de l'auberge était fermée à l'arrivée de la colonne, et le refus d'ouvrir peuvent avoir étél'occasion des dégâts commis. Mais un grand nombre de conservateurs de la contrée de Sales se trouvant dans l'intérieur,le refus de l'aubergiste était une mesure de prudence bien justifiée.Un témoin, méritant pleine confiance, m'a affirmé que, déjà avant l'arrivée de cette même colonne, à l'aubergede ta Grue, M. Genoud-Repond s'était rendu à celle de la Croix-Verte, où des désordres avaient eu lieu et étaitaussitôt <strong>par</strong>ti pour Châtel avec sa famille. C'est avec satisfaction que je relate ici ce fait, après l’avoir longtempsignoré". J’ai passé près de cette auberge l'un des jours suivants, et j’ai vu qu'en ce qui concerne l'extérieur dubâtiment, le rapport du conseil communal n'était point exagéré. Si mes <strong>souvenirs</strong> sont exacts, on ne voyait nifenêtres, ni jalousies ou volets; le bâtiment <strong>par</strong>aissait totalement dévasté et abandonné.Pendant ces dévastations. les habitants du village de Vaulruz voulaient sonner le tocsin; mais les <strong>ch</strong>efs du <strong>par</strong>ticonservateur dans la localité crurent devoir s'y opposer pour éviter de nouveaux malheurs.Il est presque superflu d'ajouter que les auteurs des blessures. et des dégâts de cette journée mémorable jouirent <strong>d'un</strong>eimpunité complète. Par contre, M. le préfet Fröhli<strong>ch</strong>er déploya une grande activité pour vérifier si les conservateurs nes'étaient pas rendus coupables de fraudes. Deux prébendaires de Gruyères, dont .les facultés intellectuelles étaient peudéveloppées, nommés l'un Nicolas Ansermoud, l'autre Marc Bussard, étant venus à Bulle dans l'après-midi du 1er mai, pourjouir du soleil et voir l'élection, furent, l'un des jours suivants, cités <strong>par</strong> un gendarme à com<strong>par</strong>aître devant le préfet. Cespauvres gens étonnés s'y présentèrent à l'heure et au jour fixés, 6 mai, à neuf heures du matin.Marc Bussard fut d'abord entendu. Le préfet lui demanda s'il n'avait pas voté avec les conservateurs le jour de l'élection?Sur sa réponse qu'il n'avait voté avec personne, M. Esseiva, receveur d'Etat à Bulle, un colosse à la voix puissante,probable ment présent pour la circonstance, s'appro<strong>ch</strong>a de lui en disant: “ Vous voulez le nier et moi je vous ai vu <strong>par</strong>mi .lesconservateurs, levant les deux mains.” Bussard, persistant à soutenir qu’il n'avait pas voté, fut conduit en prison. Sur sesréponses négatives, Nicolas Ansermoud fut aussi incarcéré. Le lendemain, nouvel interrogatoire. Ansermoud, qui continua ànier, fut relâ<strong>ch</strong>é. Le préfet se fit ensuite amener Bussard et lui dit : “Vous reconnaîtrez maintenant que vous êtes venu voteravec les conservateurs, car votre camarade vient de me l'avouer? ” Bussard persista à nier, et fut aussi relâ<strong>ch</strong>é. <strong>Les</strong>tratagème n'avait pas réussi.Voici en quels termes le “ Confédéré ” du 4 mai rend compte des scènes que j'ai décrites ci-dessus :< Election du cercle de la Montagne.“ Le citoyen Fracbeboud, président du tribunal, a été proclamé élu <strong>par</strong> le bureau ensuite <strong>d'un</strong>e double épreuve. La premièreayant laissé quelques doutes, une deuxième épreuve, suivie <strong>d'un</strong>e contre-épreuve, ne laissa plus aucun doute sur lamajorité. Aussitôt après cette proclamation: les libéraux quittèrent en grande <strong>par</strong>tie la place, mais la <strong>par</strong>tie adverse nes'ébranle pas. Des injures furent proférées, on <strong>ch</strong>er<strong>ch</strong>e à escalader le bureau. Un agent bien connu de la réaction, après yêtre écrié: “ La déclaration du bureau est fausse, frappez seulement (en patois : "fiédé pire). ” Un sergent ayant vouluintervenir contre l’un des agresseurs., fut frappé à coups de bâton. Un autre agresseur dégaine une canne à épée, mais aumoment où il allait en perforer son adversaire (radical), celui-ci <strong>par</strong>vint à ramasser un pieu et, esquivant le coup, arra<strong>ch</strong>a lestylet de l'agresseur. Un mêlée effroyable s'engage sur toute la ligne, la générale bat, les libéraux qui avaient quitté la placesont rappelés; ils se précipitent ; quelques militaires présents dégainent leurs sabres. <strong>Les</strong> colonnes des conservateurs sedisloquent aussitôt, elles sont mises en pleine déroute, et poursuivies à coups de pierre jusque près de la Tour.“ Dans la soirée, la colonne des libéraux de la Veveyse, passant devant l'auberge de la Grue à Vaulruz, y fut accueillie <strong>par</strong>des huées, et même <strong>par</strong> des coups de feu. Aussitôt l'auberge est envahie, une juste punition atteint les assaillants; au milieude la mêlée, les meubles de la salle ont été brisés.“ Nous tenons à constater et tous tes rapports sont d'accord à établir, que <strong>par</strong>tout l'agression est <strong>par</strong>tie des conservateurs,que le désordre est le fait des gens de l'ordre, et que si des citoyens se sont montrés indignes du droit le plus sacré ducitoyen, le droit électoral, en substituant la force brutale et des scènes déplorables à son exercice calme et régulier, cesactes sont dus à ceux qui revendiquent toujours les droits et les libertés de la démocratie.. ”L’audacieuse fausseté de cette relation étonne celui qui a été témoin du triste spectacle qui en fait l'objet. Voici commecomplément à ce que j'ai mentionné ci-dessus, pour l'avoir vu et en <strong>par</strong>tie entendu, ce qui avait eu lieu au moment où latroupe, sur l’ordre donné, se jeta sur les électeurs: Pendant que les libéraux-conservateurs réclamaient et criaient “ comptez,comptez ! ” une altercation survint entre un conservateur et un radical, qui se trouvaient près des cordages. Celui-ciayant frappé celui-là à coups de pied, plusieurs électeurs des deux camps intervinrent, et un commencement de rixes'engageait lorsque M. Perrier fit avancer les artilleurs et les carabiniers. Il n'y eut d'ailleurs, de la <strong>par</strong>t des libéraux-

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