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vraiment fi er de la qualité des vins de<br />
Genève. Ce n’était pas le cas en 1963, lorsque<br />
j’ai commencé en tant qu’œnologue<br />
cantonal», se souvient Claude Desbaillet.<br />
Jusque dans les années 1950, beaucoup<br />
de vignerons livraient leurs vins<br />
aux bistrots et aux troquets de Genève<br />
directement en fût. «Quand les fûts commençaient<br />
à se vider, les clients buvaient<br />
encore plus, pour que l’on puisse enfi n livrer<br />
à nouveau du vin frais», raconte Claude<br />
Desbaillet. À cette époque là, on dispensait<br />
des cours aux restaurateurs pour<br />
tenter de leur transmettre le b. a.-ba en<br />
matière d’œnologie et de conservation des<br />
vins en tonneaux. Dans les années 1970,<br />
le vin de Genève ne suscitait pas d’enthousiasme<br />
<strong>par</strong>ticulier, mais la production<br />
trouvait facilement preneur sur le<br />
marché suisse.<br />
À <strong>par</strong>tir de l’année 1978, la viticulture<br />
genevoise entra cependant dans une<br />
VINUM emotion GENÈVE<br />
Portrait de groupe avec dame :<br />
Françoise Berger, Nicolas<br />
Bonnet, Pierre Dupraz, Claude<br />
Desbaillet, et Jean Hutin, de<br />
gauche à droite, <strong>par</strong>ticipèrent à<br />
la création de la première AOC<br />
suisse en 1988, dans le canton<br />
de Genève.<br />
période de crise. De 1978 à 1981, ce furent<br />
quatre mauvaises années de petites<br />
récoltes successives qui entraînèrent une<br />
pénurie de vin à Genève, ce qui amena<br />
les restaurateurs et les commerçants à<br />
se tourner vers des vins blancs d’origine<br />
étrangère. Puis vint une année record<br />
en 1982, où les vignerons genevois vinifi<br />
èrent deux fois plus de volume de raisins<br />
qu’en temps normal. Cette hausse<br />
soudaine des rendements fi t imploser<br />
un marché déjà souffreteux. L’offre à la<br />
hausse, et la baisse des prix résultant de<br />
ce phénomène, menacèrent l’existence<br />
de nombreux vignerons. Pour Jean<br />
Hutin, producteur de 63 ans à Dardagny,<br />
avec le recul, les choses <strong>par</strong>aissent<br />
aujourd’hui assez claires : «Les caprices<br />
de la météo de cette époque, ainsi que les<br />
dis<strong>par</strong>ités extrêmes au niveau des rendements,<br />
furent les premières causes des<br />
changements à venir.»<br />
L’essor grâce à l’AOC<br />
«En même temps que l’introduction de<br />
l’AOC, les vignerons indépendants dont<br />
je fais <strong>par</strong>tie ont fortement œuvré pour<br />
une nouvelle image de qualité du vin<br />
de Genève, en plantant <strong>par</strong> exemple de<br />
nouveaux cépages comme le Sauvignon<br />
blanc, le Viognier ou le Merlot.»<br />
Pierre Dupraz, Domaine des Curiades,<br />
à Lully<br />
«L’AOC de Genève a réussi un tour<br />
de force en améliorant la qualité des<br />
vins à long terme, sans pour autant<br />
restreindre l’initiative et l’envie d’expérimenter<br />
des vignerons adhérents.»<br />
Jean Hutin, Domaine Les Hutins,<br />
à Dardagny<br />
«Les discussions autour de l’AOC ont<br />
suscité une vraie dynamique dans la<br />
viticulture genevoise. Cela a motivé la<br />
jeune génération, à laquelle j’ap<strong>par</strong>tenais<br />
moi aussi à l’époque, à croire<br />
dans l’avenir de la viticulture. Heureusement<br />
! Car je suis certain que personne<br />
n’a regretté d’avoir fait le pas.»<br />
Nicolas Bonnet, Domaine de la<br />
Comtesse Eldegarde, à Satigny<br />
«Grâce à l’introduction de l’AOC, les<br />
producteurs genevois ont pris conscience<br />
qu’il est devenu important de<br />
créer ensemble une plus-value, même<br />
si elle ne se répercute pas immédiatement<br />
sur le prix de la bouteille ou<br />
sur le revenu de l’année suivante.<br />
Aujourd’hui, nos vins jouissent d’une<br />
estime qui va bien au-delà de ce que<br />
nous pouvions espérer il y a vingt ans.»<br />
Françoise Berguer, Clos des<br />
Gondettes, à Satigny<br />
«Il y a à peine trente ans, les bouteilles<br />
de vins de Genève étaient presque<br />
exclusivement consommés à Genève.<br />
L’AOC nous a permis de développer nos<br />
ventes et de nous établir sur le marché<br />
national. Aujourd’hui, la qualité de<br />
nos vins de pointe est tellement bonne<br />
que nous devrions envisager de nous<br />
positionner sur le marché international.<br />
L’AOC Genève mérite une reconnaissance<br />
internationale.»<br />
Claude Desbaillet, œnologue du<br />
canton (de 1963 à 1999)<br />
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