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ENQUÊTE - La Tribune

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VENDREDI 21 JUIN 2013 LA TRIBUNEL’ENQUÊTE 21doivent passer le témoin à leurs cadets. Sous la pression des investisseurs…ITAL-INVESTISSEMENT© STEVE MUREZStephen Schwarzman, PDG de Blackstone,a fêté en 2013 ses 66 ans. [MAT SZWAJKOS/GETTY IMAGES/AFP]clause dite « d’hommes clés », quia gelé la capacité du fonds à poursuivreses investissements.LE SUCCESSEUR DOIT FAIRECONSENSUS, URBI ET ORBI« Le patron d’une société decapital-investissement doit réfléchirassez tôt à « l’après », sinon ilrisque d’avoir du mal à décrocher», reconnaît Gonzague deBlignières, qui s’est lui-mêmeheurté à ce fameux plafond deverre lorsqu’il était en poste ausein du fonds Charterhouse : « Jene parvenais plus à évoluer, je sentaisque je ne ferais pas partie des“élus”, je suis donc parti. »Le départ du dirigeant-fondateurest une chose, le choix de«J’ai finalementpeut-êtretrop personnaliséBarclaysPrivate Equity. »GONZAGUE DE BLIGNIÈRES,ANCIEN PRÉSIDENT DE BARCLAYSPRIVATE EQUITY FRANCEson successeur en est une autre.Là aussi, il doit faire consensus,tant au sein de l’équipe qu’auprèsdes LPs. Pourtant, ces derniers,extérieurs à la société de capitalinvestissement,n’ont en théoriepas leur mot à dire sur le processusde succession. Mais « ils ensont les juges-arbitres via leurssouscriptions », admet EddieMisrahi. Et l’avis des LPs a d’autantplus de poids que les sociétésde capital-investissement sebattent, aujourd’hui, pour qu’ilsleur confient leur argent. Lesnouvelles réglementations de labanque et de l’assurance (Bâle IIIet Solvabilité II) rendant lesinvestissements en private equityplus onéreux pour ces deuxRepères1976 Jerome Kohlberg, HenryKravis et George Roberts créentle fonds américain KKR.31 MILLIARDS DE DOLLARSMontant du rachat du conglomérataméricain RJR Nabisco par KKR,en 1989. Opération qui demeurerale plus gros LBO (Leverage Buy-Out)de l’histoire du private equity, durantdix-sept ans.6,1 MILLIARDS D’EUROS Sommeinjectée par le capitalinvestissementfrançais dansdes entreprises, en 2012, alorsque la Bourse leur a apporté2,6 milliards seulement.270 Le nombre de sociétésde capital-investissementmembres de l’Afic, le lobbydu secteur en France.secteurs, les sociétés françaisesde capital-investissement ontlevé 5 milliards d’euros seulement,l’an dernier, un montant enchute de 22 % par rapport à 2011,et très éloigné des 12,7 milliardslevés en 2008.Un montant qui prouve égalementque le problème de la successionà la tête des équipes deprivate equity va bien au-delà dece secteur : c’est une partie dufinancement de l’économie qui esten jeu, les sociétés françaises decapital-investissement ayantapporté, en 2012, 6 milliardsd’euros à près de 1 550 entreprises,pour l’essentiel des PMEhexagonales. Bon an mal an, lesfonds de private equity membresde l’Afic contribuent à hauteur de7 % aux besoins de financementdes PME, contre 1 % seulementpour la Bourse.Or, rien n’est moins facile que dechoisir un successeur au big boss,dans un métier où, comme danscelui de la banque d’affaires, lesrelations humaines, de confiance,les réseaux jouent un rôle primordial.« Le LP classique n’aime pasle risque. Aussi, parmi les nombreuxfonds qui le sollicitent pourgérer son argent, il choisiral’équipe en laquelle il aura le plusconfiance », analyse FrançoisAguerre.« Certains investisseurs m’ontdit : “Je ne viens pas car je ne faisrien sans le fondateur [enl’occurrence MauricheTchenio, ndlr]. Je vaisd’abord vous observerafin de voir ce que vousvalez” », raconte EddieMisrahi, qui reconnaîtne pas avoir « du tout lamême personnalité queMaurice Tchenio ». Ilfaut dire que cette premièregénération decapital-investisseurs,animée d’un esprit pionnier,a compté nombrede personnalités charismatiqueset attachantes.Le hic, c’est que, « pour qu’unetransition soit réussie, il fautdépersonnaliser la société de capitalinvestissement », assure FrançoisAguerre. « Il est difficile d’organiserune succession au seind’une structure perçue comme unone-man-show », renchérit EddieMisrahi. « J’ai peut-être trop personnaliséBarclays PrivateEquity », s’interroge, de son côté,Gonzague de Blignières.RECRUTER À L’EXTÉRIEUR,UNE ERREUR « GRAVISSIME »C’est dire s’il faut préparer lesLPs au changement de patron. Untravail d’autant plus long que « lesLPs ne rencontrant l’équipe d’unfonds que deux fois par an, il leurfaut une dizaine d’années pour bienla connaître », indique FrançoisAguerre. « Dès 2006, dans le cadrede la levée de notre septième fonds,nous avions prévenu les LPs qu’ils’agirait du dernier fonds levé parMaurice Tchenio, et que je seraisson successeur », raconte EddieMisrahi. De la même façon, « j’aitravaillé en binôme avec GuillaumeJacqueau durant plusieursannées », rappelle Gonzague deBlignières. En interne aussi, lasuccession doit être soigneusementpréparée.5milliardsd’euros, c’estce queles sociétésfrançaisesde capitalinvestissementont levé l’andernier, enchute de 22 %sur 2011, ettrès loin des12,7 Mds levésen 2008.Afin d’éviter des jalousies et desdéparts lourds de conséquencesdans ce métier où les équipes necomptent parfois qu’une dizainede personnes, « il faut annoncertrès vite le nom du successeur »,recommande Eddie Misrahi. Etd’ajouter : « Celui-ci doit êtrechoisi en interne. Dans cette industriede petites structures, recruterle successeur du dirigeant-fondateurà l’extérieur constituerait uneerreur gravissime. »UNE GÉNÉRATION DEMANAGERS PLUS FINANCIERSNul doute que les prochainestransitions seront plus aisées,compte tenu des personnalitésdes nouveaux patronsdu capital-investissement,plus lisses quecelles de leurs aînés.« Le management desfonds de private equityest passé d’un profil d’entrepreneursà un profilde financiers », préciseFrançois Aguerre. Qu’onen juge : Guillaume Jacqueauest diplômé del’ESSEC et titulaire d’unDESS de finance del’université Paris-Dauphine,Frédéric Pescatoria fait HEC, EddieMisrahi, l’X et Harvard… Desformations autrement plus financièresque l’École supérieured’ingénieurs en électrotechniqueet électronique de Gonzague deBlignières, qui avoue par ailleurssans fard ne pas maîtriser lalangue de Shakespeare, pourtantcelle des affaires.Ce côté « low-profile » de la nouvellegénération de patrons duprivate equity peut égalementaider le capital-investissement àredorer son image auprès de l’opinionet des pouvoirs publics. Lesquelsse sont souvent émus del’arrogance de certains dirigeantsde fonds, notamment aux plusbelles heures du capital investissement,entre 2005 et 2008.Et les pionniers du privateequity, eux, que vont-ils devenir,une fois partis « à la retraite » ?On imagine mal ces « workaholics» se contenter de tailler leursrosiers. De fait, Gonzague deBlignières a profité de la conférenceannuelle de l’Afic, le17 avril, pour annoncer qu’ilcherchait 300 millions d’eurosafin de… monter un fonds decapital-développement, quiinvestira des tickets d’une vingtainede millions d’euros dans desPME. On ne se refait pas.

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