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Rabat - Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc

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Les CigognesJE croyais qu'il n'yen avait qu'en Alsace, et je lestrouve tout le long de cette côte marocaine, immobilessur leurs longues pattes, avec leurs plumesblanches et noires, leur cou flexible et leur bec decorail qui fait un bruit-de castagnettes... Je ne saiscomment aucune image, aucun hasard de lecture nem'avait préparé à les voir ici, ces cigognes. Et c'estpour moi un plaisir enfantin la rencontre de cesgrands oiseaux que j'imaginais seulement sur les cheminéesde chez nous. Avec le même air familier, lamême attitude pensive qu'au sommet d'un clocherd'Alsace, elles se posent sur les murs d'enceinte desvieilles petites cités mograbines, Fédalah, Bournika,Skrir:tt, Témara, qui s'échelonnent sur leg grèves deCasablanèa'à<strong>Rabat</strong>..De ces vieilles petites 'cités onn'aperçoit rien d'autre que le corset de leurs mursrouges, dont la ligne flamboyante n'est interrompueçà et:1à que par d'énormes tours carrées, une porte,un éboulis ou la ver<strong>du</strong>re .d'un figuier. Mais de la vieenfermée dans ces remparts couleur de feu on nevoit, on n'entend rien. Seuls lesgrands oiseaux blancset noirs animent ces c,asbahsmystérieuses, posées là'surJésable comme les gravures de quelque ancientraité de fortification. Debout sur les créneaux en .pomte, le bec tourné yers la mer ou vers le bleddésolé,on dirait les sentinelles d'une vaste cité .d'oiseaux;etl'indigène accroupi dans ses loques, aU pied<strong>du</strong> grand trou d'ombre que fait la pôrte de la ville,semble n'être que le gardien de cesni~s fortifiés, l'es.,clave de ces hôtes aérien~. ' ,A <strong>Rabat</strong>, 'à Salé, je les retrouve, reines <strong>du</strong> vaste'estuaire qui sépare les deux villes, et qu'elles franchissentcomme des flèches largement empennéesailes et pattes éten<strong>du</strong>es. Du haut de la casbah rougeâtre,elles regardent bondir sur la vague les lourdesbarques qui s'en vont décharger les navires ancrés aularge. Survivant à l'ancienne vie des pirates barbaresques,elles continuent de faire leurs nids sur lepuissant. promontoire chargé de toutes les ruinesqu'ont entassées id Carthaginois, Romains, Arabes,Berbères et Portugais, tous les peuples divers qui .sont venus s'établir sur cette côte pour une heure oupour des siècles... Et. de <strong>Rabat</strong> la Marchande ~ Saléla Barbaresque, de la solitaire tour .de Hassan à lamystérieuse Chellah, l'antique citérmsparue quimaintenantn'est plus qu'un sotlge, un souvenir 'de pierredans un jardin d'orangers, elles vont et vi,ennent, <strong>du</strong>matin jusqu'au soir, reliant d'un :tilinvisible ces trois'villes raniassées. dans un étroit espace; ces blancheurs,ces ver<strong>du</strong>res, ces eaux.Maisoû je les aime le mieux, ce. n'est pas sur lestours de fe;u qui flamboient en plein niidi, ni dansleur grand vol plané: c'est debout sur une patte, ausommet de la coupole. d'une blanche mosquée, lorsqueimmobiles, <strong>du</strong>rant des heures,' dans];;l. lumièreargentée,' elles semblent vraiment l'image de la cont,emplationsolitâire,la prière elle-mème prête à s'envoleren plein ciel.JÉROME·et JEAN THARAUD.9

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