FOCUSCOUTURE<strong>DU</strong> RÊVE ANCRÉDANS <strong>LA</strong> RÉALITÉIndissociables de Paris, la haute couture et le prêt-à-porterde luxe ne sont pas seulement une vitrine de la créationfrançaise. Elles permettent aussi à l’industrie de la modehexagonale de s’imposer dans le monde entier.C’est en 1858 qu’est née la hautecouture, avec l’ouverture de la maisonWorth à Paris. Depuis, cette activitéa connu de nombreux bouleversements,comme l’apparition du prêt-à-porter deluxe dans les années 60. D’une centainede maisons de couture au début duXX e siècle, une dizaine seulement résisteaujourd’hui. Mais l’attrait de la capitale dela couture ne s’est jamais démenti, commele prouve l’incroyable médiatisation quientoure chacun des défilés parisiens.Aujourd’hui, seules onze maisons bénéficientde l’appellation haute couture, auxquelless’ajoutent des membres associéset invités. Des institutions comme Chanel,Dior ou Givenchy, mais aussi des membresplus récents, comme Anne-ValérieHash, Stéphane Rolland, Adeline André,Franck Sorbier ou Maurizio Galante.Une sélection rigoureusequi n’a pas de prixN’entre pas qui veut dans ce club trèsfermé des entreprises qui créent deuxfois par an des modèles originaux destinésà être adaptés, après essayage, auxmesures de chacune de leurs clientes.Pour y être admis, il faut en effet remplirdes conditions précises, notamment avoirau minimum vingt salariés et présenter aumoins vingt-cinq modèles par collection.La porte s’entrouvre néanmoinspour des couturiersinvités qui présentent égalementleurs collections dansle cadre du calendrier officieldes défilés. Actuellement,cette activité en ellemêmene représente qu’unpourcentage infime du chiffred’affaires des maisonsde couture et, tout au plus,un millier d’emplois. Mais cecapital immatériel symbolisele luxe et n’a pas de prix !Pour les grands groupes quifinancent les maisons decouture, celles-ci représententd’abord de formidablesoutils de communication auservice de leurs marques.Car les maisons de couture,c’est aussi du prêt-à-porter, des accessoireset des parfums dont 80 % vendusà l’exportation, aux États-Unis, au Japon,en Chine ou encore en Russie.<strong>LA</strong> CONTREFAÇON : EN CONSTANTE AUGMENTATIONUn véritable fléau ! La contrefaçon ne cesse de gagner du terrain, on trouve désormais des faussespièces détachées, de faux médicaments… Mais c’est dans le domaine du textile qu’elle reste la plusimportante. En 2008, sur les 6,5 millions d’articles contrefaits saisis par les douanes françaises,1,2 million étaient des pièces de textile, en majorité de faux vêtements de marque. Avec la venteen ligne, le phénomène s’est encore amplifié. Il suffit de visiter les sites de ventes aux enchèrespour le constater : les faux pullulent. Pourtant, les douanes multiplient les saisies et les marqueselles-mêmes se mobilisent face à ce fléau qui, en plus du manque à gagner qu’elle induit, porteatteinte à leur image, la qualité des copies n’étant jamais à la hauteur de celle des originaux. L’undes moyens de s’en prémunir, pour les marques, consiste à déposer leurs dessins et modèles,afin de limiter le pillage de leur créativité. Autre axe prometteur : le marquage anti-contrefaçon.Grâce aux nanotechnologies, il est d’ores et déjà possible d’insérer dans les produits textiles unevéritable « carte d’identité » permettant de distinguer le vrai du faux.20 I Le secteur du textile et de la mode 2009 onisep.fr/equipeseducativesCollection Jean-Paul Gaultier, été 2009.L’alliance des savoir-faireet de la stratégieEn maintenant cette tradition vivante,les multinationales du luxe préserventaussi des savoir-faire précieux, ceux desbrodeurs, des plumassiers, des chapeliers,des dentellières ou des gantiers.Et créent aussi des emplois, notammentdans le domaine du commercial et de lacommunication : 40 % des salariés dusecteur travaillent en effet à des fonctionsde chef de produit, de chef desventes, de responsable marketing, demerchandiser ou encore de responsablede boutique. Une spécificité quis’explique par deux raisons : d’abord,par l’abandon du système de licences,et par l’intégration des activités de productionet de distribution. Ensuite, par ledéveloppement de stratégies globales,centrées sur les marques et impliquantune cohérence parfaite entre la conceptiondu produit, la présentation en magasinet la communication.Dans ces entreprises, qui comptent 30 %de cadres en moyenne, les fonctionstransversales, liées au management, àla gestion et à la finance, se sont aussibeaucoup développées. Susciter le rêven’empêche pas de prendre en compteles réalités de l’économie. © PATRICE STAB<strong>LE</strong> / JEAN-PAUL GAULTIER
HABIL<strong>LE</strong>MENTUNE IN<strong>DU</strong>STRIE CENTRÉESUR SON CŒUR <strong>DE</strong> MÉTIERAvec ses 2 300 entreprises et son chiffre d’affaires annuel de 12 milliards d’euros,l’industrie de l’habillement est centrée sur la création et la commercialisation.’industrie de l’habillement constitueL un secteur relativement jeune,puisqu’elle est née dans le courant desannées 60. Très vite, elle a été confrontéeà ce qu’on allait appeler par la suitela « mondialisation », et s’est adaptéepour défendre un chiffre d’affaires quin’a d’ailleurs pas cessé de progresserces dix dernières années. Aujourd’hui,il pèse 12 milliards d’euros dont prèsdu tiers à l’export. Le secteur compte2 300 entreprises, implantées partouten France, avec des pôles particulièrementimportants dans l’Ouest, en Rhône-Alpes, Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA). Il existe d’ailleursdes particularités locales : les entreprisesdu vêtement de surf sont majoritairementinstallées près des meilleurs « spots » duPays basque tandis que celles du vêtementde plage se répartissent le Sud. Sices dernières années, les effectifs se sontréduits, la filière représente aujourd’hui50000 salariés dans l’hexagone. Un tiersd’entre eux travaille dans la production,les activités de bureau d’études, la conceptionet le patronage, les deux autrestiers à la commercialisation, la distribution,la logistique et au marketing.Matière grise et créationAujourd’hui, c’est hors de nos frontièresque se trouvent la plupart des salariésdu secteur, avec une écrasante majoritédans la fabrication.Car pour rester compétitives, un grandnombre d’entreprises ont dû délocaliserune part de plus en plus importantede leur production. D’abord vers despays proches, comme le Portugal ou laTurquie, puis de plus en plus loin, en Asieou encore sur le continent indien. La tendancedans le secteur de l’habillement està l’« immatériel » : les entreprises réalisentelles-mêmes les activités de création etde conception des vêtements voire, pour10 % d’entre elles, la distribution, maisla fabrication est majoritairement soustraitée.Ce qui n’exclut toutefois pas lemaintien en France d’ateliers très polyvalents,spécialisés dans la fabricationde haute qualité. En quelque sorte, deslaboratoires de recherche et développementtechnique. La taille des entreprisesdu secteur explique aussi qu’un grandnombre d’activités soient externalisées.Dans une entreprise d’une vingtaine depersonnes, il n’est pas rentable d’avoir unservice logistique qui ne va fonctionnerà plein régime que deux ou quatre foispar an, au moment de la livraison descollections.Vingt ans d’avanceDe fait, les entreprises de l’habillement,près de vingt ans avant les constructeursautomobiles, sont devenues de véritables« assembleurs » concentrés sur leur cœurde métier : la création et la vente. Unespécificité qui explique les évolutionsde l’emploi. Alors qu’il sort nombre destylistes des écoles spécialisées, lesentreprises recherchent surtout desstylistes modélistes, capables d’intégrer© THINKSTOCK LLC / JUPITERIMAGESles contraintes de fabrication et decoûts à la création des modèles. Ellesrecrutent également des ingénieurs pourleurs bureaux d’études, notamment desingénieurs textiles mais pas seulement,et des diplômés d’écoles de commercepour les fonctions marketing etcommercialisation.De manière générale, la profession va êtreconfrontée dans les années proches àune vague importante de départs enretraite du personnel de production.C’est l’occasion d’intégrer des jeunesaux compétences plus polyvalentes,acquises grâce à des diplômes rénovéset en adéquation immédiate avec lesformes de production actuelles.Autre aptitude recherchée : la capacitéà se remettre en cause. Car l’une desparticularités de l’habillement, c’est quela création y est quasiment continue.À peine une collection est-elle présentéequ’il faut en imaginer une nouvelle. Et c’està chaque fois un nouveau challenge. onisep.fr/equipeseducatives Le secteur du textile et de la mode 2009 I21