Destination Portugal - Septembre/Novembre
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Ils reviennent de loin, ces dessins<br />
gravés dans la roche ! Ils étaient là<br />
depuis la nuit des temps, quasiment,<br />
mais ils ont bien failli disparaître<br />
sous près de 100 mètres d’eau,<br />
lorsqu’en 1991 fut décidée la<br />
construction d’un barrage à Vila Nova<br />
de Foz Côa. Il faut savoir que pour chaque<br />
projet de construction pouvant avoir<br />
des conséquences sur un territoire, des<br />
études préventives archéologiques sont<br />
systématiquement menées. Il est aisé de<br />
comprendre l’importance de cette veille,<br />
qui a permis de mettre au jour un site<br />
archéologique majeur, le plus important<br />
d’Europe concernant l’art rupestre du<br />
paléolithique supérieur. Respect à ces<br />
artistes primitifs, qui ont eu l’intuition de<br />
réaliser leurs dessins sur des surfaces<br />
rocheuses non friables, et par là même de<br />
les préserver des aléas du temps. Respect<br />
à eux, pour avoir su produire des effets de<br />
mouvements en 2D, grâce à la technique<br />
de la superposition d’images – c’est à eux<br />
qu’on doit les techniques fondamentales du<br />
cinéma. Ici, comme à Lascaux ou à Chauvet,<br />
le niveau artistique s’avère déjà très élevé :<br />
proportions des formes, simulation de<br />
mouvements, travail sur le relief et la<br />
finesse des traits, sur les premiers et les<br />
arrières plans… Tout n’était alors que<br />
talent et instinct pur. Ce qui interpelle, sur<br />
le terrain, c’est la faculté qu’avaient nos<br />
ancêtres d’observer la nature : ils vivaient<br />
au plus près de la faune et de la flore,<br />
ils avaient par exemple conscience du<br />
phénomène d’érosion des roches. Leur<br />
page blanche, c’était justement cette roche.<br />
Leur sujet d’inspiration ? Les animaux. Étaitce<br />
une façon pour eux de rendre hommage<br />
aux aurochs, cervidés, caprinés et autres<br />
chevaux, tous à l’honneur dans la vallée<br />
du Côa ? À ce titre, le cheval est le plus<br />
représenté, car certainement, déjà, le plus<br />
noble à leurs yeux.<br />
Incision et piquetage<br />
Les techniques les plus employées à<br />
l’époque étaient l’incision, réalisée avec une<br />
pointe fine et résistante, et le piquetage,<br />
qui consiste à réaliser un trait par une<br />
succession de coups donnés sur la<br />
roche. Point après point, des silhouettes<br />
voyaient ainsi le jour. Avant d’inciser<br />
ou de piqueter la roche, les artistes du<br />
paléolithique élaboraient une ébauche.<br />
Grâce à la technique du rainurage ou du<br />
raclage, par un mouvement de va-et-vient,<br />
ils obtenaient une sorte d’esquisse ou<br />
de calque, avec des lignes plus ou moins<br />
épaisses et des contrastes. Certains<br />
restaient en l’état, d’autres ont évolué<br />
en profondeur, grâce à l’incision ou au<br />
piquetage. Au fil de la visite, on découvre<br />
des corps d’animaux dotés de deux têtes,<br />
pour simuler un mouvement. Ailleurs, des<br />
parties de corps sont utilisées à double<br />
effet, le dos d’un animal devenant le ventre<br />
de l’autre. Si certaines gravures se devinent<br />
plus facilement que d’autres, la visite sous<br />
la conduite d’un guide permet de ne rien<br />
manquer de ce spectacle à ciel ouvert.<br />
C’est en compagnie de Sandra Naldinho,<br />
guide chez Memórias do Côa, que je<br />
découvre le circuit Canada do Inferno,<br />
© Shutterstock<br />
à visiter<br />
MUSÉE DU CÔA<br />
Il se situe au bout d’une petite route assez étroite et délimitée par deux murets de<br />
schiste. Une fois sur le parking, il faut emprunter un long couloir pour accéder<br />
à l’entrée. Une partie de l’édifice est souterraine. Le style extérieur est très<br />
design, épuré et froid. À l’intérieur, plusieurs salles s’enchaînent. Des projections<br />
illuminent les murs de couleurs vives. Des silhouettes d’animaux, telles qu’on les<br />
trouve gravées sur les roches, nous permettent d’interpréter plus facilement les<br />
dessins. L’exercice devient plus difficile quand on aborde les dessins superposés,<br />
mais fort heureusement, des techniques d’éclairage sont là pour nous aider. Des<br />
pierres sous verre, épargnées de tous risques de contacts avec l’homme, peuvent<br />
être analysées à l’aide d’une loupe. Dans une salle sont exposées des répliques de<br />
panneaux à l’échelle 1.1. On découvre de sublimes silhouettes de bovidés et de<br />
cervidés. À côté, une pancarte d’information révèle les animaux en couleur et tout<br />
devient plus évident.<br />
• Rua do Museu, Vila Nova de Foz Côa. Tél. : +351 279 768 260. www.arte-coa.pt<br />
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