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LE COMÉDIEN<br />
DU MOIS<br />
Vincent<br />
Lindon<br />
CACHÉ DERRIÈRE SA BARBE, VINCENT LINDON<br />
EST FASCINANT DANS LA PEAU DU SCULPTEUR<br />
AUGUSTE RODIN. ET RAPPELLE QU’IL PEUT<br />
TOUT JOUER.<br />
PAR JEANNE DE MAISONNEUVE<br />
Alors qu’on célèbre cette année la vie et l’œuvre<br />
du plus grand sculpteur français, mort il y a<br />
tout juste un siècle, Jacques Doillon propose sa<br />
vision de l’artiste dans Rodin, nouvelle tentative<br />
de porter à l’écran son existence tumultueuse. Pour le<br />
public français, l’auteur du Penseur a les traits puissants<br />
de Gérard Depardieu qui l’incarnait dans le film de Bruno<br />
Nuytten, Camille Claudel, en 1988. Même si le titre du film<br />
de Jacques Doillon indique un focus plus important sur la<br />
figure du sculpteur, sa relation avec Camille Claudel, son<br />
élève, sa muse et sa maîtresse, en constitue toujours le<br />
cœur. Vincent Lindon succède donc au monstre de cinéma<br />
qu’est Depardieu dans ce rôle fort, manière de rappeler<br />
qu’il fait partie des plus grands acteurs français en activité.<br />
Humain trop humain<br />
Vincent Lindon a longtemps été le visage du cinéma social :<br />
La Crise, de Coline Serreau, lui offre la notoriété en 1992,<br />
et La Loi du marché, de Stéphane Brizé, un prix d’interprétation<br />
à Cannes en 2015. Entre-temps, il aura tourné<br />
chez Philippe Lioret (un peu), Benoît Jacquot (beaucoup)<br />
et Pierre Jolivet (passionnément). Il est tour à tour la figure<br />
du Français moyen en proie aux difficultés de la vie<br />
(La Crise, La Moustache, Welcome, La Loi du marché), l’amoureux<br />
transi (L’Étudiante), le conjoint en détresse (<strong>Le</strong> Septième<br />
Ciel), l’homme d’action (Pour elle, Mea Culpa), la bête de<br />
comédie (Belle Maman, <strong>Le</strong> Coût de la vie, La confiance règne). Ce<br />
qui est absolument constant, c’est la capacité de cet acteur<br />
caméléon à insuffler une humanité sans pareille à chacun de<br />
ses personnages. <strong>Mai</strong>s aussi de la tension, de la passion et<br />
de l’émotion. Lindon est affable et brut de décoffrage. Il y a<br />
ces deux aspects chez lui, et c’est ce qui frappe aussitôt, ce<br />
qui fonde son charisme. Un cocktail improbable de prestance<br />
feutrée et de gouaille populaire. En quelques années, le<br />
comédien s’est imposé comme le pilier d’un nouveau cinéma<br />
du milieu, en prise sur l’actualité politique et entièrement<br />
voué au réalisme social. Proche des gens, accessible, il<br />
facilite comme personne le processus d’identification et<br />
entretient ainsi un lien privilégié avec le public – son discours<br />
de remerciement au Festival de Cannes, très engagé,<br />
a ému la planète entière. Ainsi, jamais le spectateur n’aura<br />
touché d’aussi près le génie créatif et tumultueux d’Auguste<br />
Rodin que sous les traits de Vincent Lindon. Caché derrière<br />
la barbe légendaire du sculpteur, l’acteur effectue un travail<br />
extraordinaire et parvient à livrer sa propre interprétation<br />
de l’artiste sans jamais évoquer la performance, pourtant<br />
excellente, de Gérard Depardieu. L’intensité avec laquelle<br />
il se livre à ce rôle, totalement habité par la puissance<br />
créatrice, la passion amoureuse, l’admiration et le rejet<br />
de ses contemporains est sans doute l’une des plus belles<br />
façons de célébrer Rodin.<br />
RODIN<br />
Réalisation : Jacques Doillon<br />
Avec : Vincent Lindon, Izïa Higelin,<br />
Séverine Caneele...<br />
Genre : Drame<br />
Durée : 1 h 59<br />
SORTIE : 24 MAI<br />
LES CINÉMAS GAUMONT ET PATHÉ 17