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The Red Bulletin Octobre 2019 (FR)

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<strong>FR</strong>ANCE<br />

OCTOBRE <strong>2019</strong><br />

HORS DU COMMUN<br />

Votre magazine<br />

offert chaque<br />

mois avec<br />

Aura, détermination,<br />

plaisir et interaction…<br />

Ce que la danseuse<br />

belge Mavinga doit<br />

donner dans un battle<br />

où tous les styles<br />

sont permis, et où les<br />

visages dansent aussi<br />

RED BULL DANCE<br />

YOUR STYLE<br />

LA FINALE<br />

MONDIALE<br />

À PARIS !


LG XBOOM, vivez l’intensité du son<br />

Des enceintes fun, festives et puissantes pour offrir une expérience<br />

sonore unique. Découvrez le son exceptionnel de la gamme XBOOM<br />

qui accompagnera tous vos moments de fête !<br />

En tant que partenaire de l’événement,<br />

LG accompagnera toutes les étapes<br />

du <strong>Red</strong> Bull Dance Your Style <strong>2019</strong>.<br />

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ÉDITORIAL<br />

L’INSPIRATION<br />

CONTRIBUTEURS<br />

NOS ÉQUIPIERS<br />

LITTLE SHAO (COUVERTURE), ASTID KAROUAL<br />

EN MOUVEMENT<br />

On insiste ! Après l’ovni Diablo en juin, voici notre<br />

seconde une de l’année honorant un danseur.<br />

Une danseuse pour être exact, la Belge Mavinga.<br />

Qu’ils soient des B-Boys, des adeptes du voguing<br />

ou encore de la house dance (comme Mavinga),<br />

ces phénomènes sont une source d’inspiration<br />

inépuisable. Et pas seulement par les moves qu’ils<br />

maîtrisent. On se souvient du guide de voyage de<br />

B-Boy Lilou dans lequel il partageait avec vous ses<br />

tips (dont : « Que faire si l’on te braque avec un<br />

flingue ? ») après avoir visité près de 90 pays. Avec<br />

cette compétitrice de la finale mondiale du <strong>Red</strong><br />

Bull Dance Your Style le 12 octobre à Paris, il est<br />

question de spontanéité et d’audace, de s’exprimer<br />

tel que l’on est, quel que soit son style, plus que<br />

d’un tutoriel de danse. On en est sûrs : au-delà de<br />

leurs spécialités, parfois très « core », nos invités<br />

ont la capacité de vous inspirer au quotidien.<br />

Lisez plus !<br />

Votre Rédaction<br />

« Mavinga est calme, humble et discrète, mais dotée<br />

d’une énergie explosive ! Son aura est particulière »,<br />

dit le photographe Little Shao à propos de la Liégeoise.<br />

LELO JIMMY<br />

BATISTA<br />

Sa bio, version courte, vaut le<br />

détour : « Lelo Jimmy Batista<br />

est auteur, scénariste, traducteur<br />

et journaliste (Libération,<br />

Sofilm, Binge Audio). Il a grandi<br />

dans un département où le<br />

premier escalator a été installé<br />

en 1995, se nourrit à 70 % de<br />

piment et sait à peu près tout<br />

ce qu’il y a à savoir sur Bob<br />

Dylan, Nicolas Cage et la série<br />

Seinfeld. » Pour vous, il a rencontré<br />

les graphistes très<br />

metal de Fortifem. Page 28<br />

LITTLE SHAO<br />

D’abord danseur, Little Shao<br />

a voulu documenter les péripéties<br />

de son crew, et représenter<br />

« avec justesse cette culture<br />

hip-hop » devenue sa passion<br />

première. S’ouvrant en<br />

parallèle à d’autres univers<br />

(musique, artistes, sports,<br />

haute couture, événementiel,<br />

portraits…), il s’est imposé<br />

comme le photographe référence<br />

pour la danse hip-hop.<br />

Little Shao était donc une<br />

évidence pour notre sujet de<br />

une sur Mavinga. Page 50<br />

THE RED BULLETIN 3


SOMMAIRE<br />

octobre <strong>2019</strong><br />

58<br />

84 Choper la fièvre du rallye, une<br />

autre raison de filer en Australie<br />

88 À l’époque de sa sortie, le jeu des<br />

Sims a plongé la planète dans le<br />

virtuel. En quoi la dernière version<br />

bénéficie-t-elle au monde réel ?<br />

90 Oubliez votre abonnement à la<br />

salle de fitness : c’est dehors que<br />

ça se passe, au naturel !<br />

92 Des surfeurs qui volent, une orgie<br />

de bosses, des B-Boys en feu et<br />

un festival de musique hors du<br />

commun : ne ratez rien !<br />

94 Sur <strong>Red</strong> Bull TV, les surfeurs<br />

volent aussi, et les crossmen se<br />

paient une ligne droite de l’enfer,<br />

tandis que les drifters s’en<br />

donnent à cœur joie. C’est trop !!!<br />

98 Le pilote VTT français Kilian Bron<br />

va tellement vite dans sa vidéo<br />

Follow Me que nous avons décidé<br />

de le mettre sur « pause<br />

prolongée »<br />

Tous ensemble ! Quand Loïc Bruni assure une descente, il emporte tous ses fans avec lui.<br />

6 Vous pourrez rester scotchés<br />

des heures sur ces photos<br />

d’action sports<br />

12 La playlist d’un vieux punk de<br />

72 ans ? On parle d’Iggy Pop,<br />

bien sûr !<br />

14 Face aux braconniers en Afrique<br />

du Sud, les Black Mambas sont en<br />

alerte, sans armes, entre femmes<br />

16 Pour améliorer la circulation des<br />

grandes villes, déplaçons-nous<br />

sur l’eau<br />

18 C’est beau, une carte orbitale !<br />

20 Dans ce piano à queue, se cache<br />

un véritable orchestre. Si, si !<br />

22 Man in black<br />

Beauden Barrett a des vérités<br />

à partager sur l’équipe de rugby<br />

la plus respectée au monde<br />

28 Metal ardent<br />

Un duo français dont les œuvres<br />

régalent la scène metal<br />

internationale<br />

36 « Je n’ai pas peur… »<br />

Pour préserver les espèces en<br />

danger, Andrea Crosta met en<br />

action ses méthodes héritées de<br />

l’espionnage et de la sécurité<br />

50 Mavinga<br />

Comment penser d’abord à soi<br />

et pas aux autres permet de<br />

mieux s’ouvrir à eux… Pigé ?<br />

58 Fans factor<br />

Ce que ses fans apportent au pilote<br />

de VTT descente Loïc Bruni<br />

68 C’est du lourd<br />

USA : l’autre pays du sumo<br />

28<br />

L’univers visuel des<br />

Fortifem a séduit le<br />

groupe Rammstein.<br />

TEDDY MORELLEC, WILLIAM LACALMONTIE<br />

4 THE RED BULLETIN


COL DU ROMBO,<br />

ITALIE<br />

Gare à la<br />

marche !<br />

Certains endroits sur la planète sont<br />

si extraordinaires qu’ils semblent<br />

avoir été créés dans le seul but d’être<br />

pris en photo. Comme cette terrasse<br />

d’observation, nichée au cœur des<br />

Alpes dans le nord de l’Italie : un site<br />

dont l’architecture épurée en fait un<br />

spot parfait pour les skateurs un peu<br />

chauds. C’est en tout cas ce que s’est<br />

dit un photographe du coin, Stefan<br />

Mahlknecht : « Je connais bien le lieu :<br />

l’idée d’y photographier un skateur<br />

en action m’est venue lors de l’une<br />

de mes visites, par une lourde soirée<br />

d’été. J’ai eu la chance, quelques mois<br />

plus tard, de trouver un mec suffisamment<br />

taré pour tenter ce gap. » Un<br />

« match » parfait pour cet instantané<br />

en apesanteur avec Simon Neulichedl.<br />

Instagram : @stefan_mahl<br />

7


ÖLÜDENIZ,<br />

TURQUIE<br />

Plus près<br />

du soleil<br />

« Ferdi Toy et Guillaume Galvani rejoignant<br />

le soleil à travers les nuages » :<br />

voici comment Tristan Shu décrit<br />

sa photo : un cliché surréaliste que<br />

le photographe d’aventures a pris<br />

en plein vol dans le cadre d’un projet<br />

pour Elinchrom, fabricant suisse de<br />

matériel photo. « De nouvelles limites<br />

ont été franchies dans le domaine<br />

de la photographie d’aventures :<br />

pour ce projet, nous avons en effet<br />

pu recréer un véritable studio dans<br />

les airs en impliquant un parapente,<br />

un base jumper et un wingsuit. »<br />

Instagram : @tristanshu


ST-PÉTERSBOURG,<br />

RUSSIE<br />

Gardez<br />

la ligne<br />

Une image que l’on croirait tirée<br />

d’une scène du film de science-fiction<br />

TRON : L’Héritage… Pourtant cette<br />

photo, présentée au concours Illume<br />

de <strong>Red</strong> Bull, est bien réelle : on y voit<br />

la grimpeuse russe Anna Zaikina en<br />

action sur le North Wall, le plus grand<br />

mur d’escalade indoor de Russie. Le<br />

photographe sportif Leo Zhukov, qui<br />

l’a immortalisée alors qu’il visitait le<br />

complexe l’année dernière, explique<br />

comment il s’y prend pour réaliser<br />

de tels clichés : « Dès le début, vous<br />

devez avoir votre plan en tête : visualiser<br />

et anticiper les mouvements de<br />

l’athlète, puis prendre la meilleure<br />

position au meilleur moment pour<br />

obtenir ce genre de prises. »<br />

Instagram : @tedescophoto<br />

9


HOKKAÏDO, JAPON<br />

À fond de<br />

blanche<br />

Les skieurs et snowboardeurs du<br />

monde entier s’y verraient bien : les<br />

montagnes de l’île d’Hokkaïdo sont un<br />

must en termes de neige fraîche. Les<br />

stations de ski y sont connues pour la<br />

régularité de leurs chutes de neige,<br />

garantissant une poudreuse abondante<br />

tout l’hiver. Cette photo prise<br />

par Matthias Fritzenwallner à Kiroro<br />

illustre ce qui attend les heureux amateurs<br />

de glisse qui débarquent sur<br />

l’île. De quoi méditer d’ici au début<br />

de votre saison de sports d’hiver.<br />

Instagram : @matthias_fritzenwallner<br />

11


IGGY POP<br />

Punk 4.0<br />

Le gourou bondissant nous<br />

présente quatre petites perles<br />

hurlantes qui prouvent que le punk<br />

n’est décidément pas mort.<br />

À la fin des années 60, Iggy Pop<br />

entreprend avec son groupe <strong>The</strong><br />

Stooges de désosser le rock’n’roll<br />

pour n’en garder que la substantifique<br />

rage, jetant par accident<br />

les bases d’une musique nouvelle<br />

: le punk. Considéré par<br />

beaucoup comme le parrain de<br />

ce genre musical, l’Américain,<br />

72 ans dans les gambettes, n’a<br />

pourtant jamais cessé d’explorer,<br />

comme un gamin curieux, tous<br />

les styles et toutes les possibilités<br />

– que ce soit en musique,<br />

avec un dernier album, Free,<br />

qui flirte avec le jazz avantgardiste,<br />

ou au cinéma, où il<br />

excelle en zombie dans le dernier<br />

Jim Jarmusch, <strong>The</strong> Dead Don’t<br />

Die. Désormais DJ sur BBC Radio<br />

6 Music, il s’est donné pour mission<br />

de faire découvrir, chaque<br />

semaine, les jeunes artistes qui<br />

incarnent à leur façon l’esprit<br />

tempétueux de la première génération<br />

punk. Voici une sélection<br />

de ses chouchous du moment,<br />

et leurs morceaux. iggypop.com<br />

IDLES<br />

Mercedes Marxist (<strong>2019</strong>)<br />

« En devenant DJ sur la BBC, je me<br />

suis intéressé à John Peel (célèbre<br />

présentateur de la radio britannique,<br />

ndlr) et à sa bio. C’était le mec que<br />

la jeunesse anglaise écoutait pour<br />

savoir ce qui se passait dans l’underground,<br />

alors je m’en suis inspiré.<br />

Je passe souvent IDLES, un groupe<br />

de Bristol, à l’antenne : ils sont cash<br />

et vraiment bons – ça me rappelle<br />

un peu mon vieux moi ! »<br />

Sleaford Mods<br />

McFlurry (2013)<br />

« Plus tout jeunes, mais à découvrir<br />

absolument si vous ne les connaissez<br />

pas encore. McFlurry parle de<br />

la folie du fast-food en Grande-<br />

Bretagne : le clip de la chanson<br />

montre une photo de 4 pom-pom<br />

girls, dont les uniformes épellent le<br />

mot c**t (vilain mot pour désigner<br />

le sexe féminin, ndlr). C’est bon, ça !<br />

(rires) Ils ont ce côté affreux, moche<br />

et méchant que j’aime bien. »<br />

Death Grips<br />

Death Grips is Online (2018)<br />

« C’est un groupe très, très hardcore,<br />

originaire de Sacramento en<br />

Californie, qui mélange des percus<br />

hardcore et électroniques avec de<br />

la guitare, et un chanteur complètement<br />

taré. Après, si les gens n’aiment<br />

pas, vous savez… (rires), rien<br />

à foutre, je passe ce que je veux !<br />

Mais je pense que cette musique<br />

déjantée peut beaucoup plaire<br />

à un certain public. »<br />

Diät<br />

Dogshit (<strong>2019</strong>)<br />

« Je lis les critiques des albums et<br />

j’écoute des extraits sur le net pour<br />

m’en faire une idée. Je me fie aussi<br />

aux algorithmes au hasard de mes<br />

recherches, ce qui procure parfois<br />

de belles surprises. Concernant<br />

Diät, je les ai découverts en lisant<br />

une critique quelque part : j’ai choisi<br />

leur titre Dogshit parce que c’est<br />

drôle et complètement dans l’esprit<br />

punk. Faites-vous plaisir ! »<br />

HARMONY KORINE FLORIAN OBKIRCHER<br />

12 THE RED BULLETIN


BLACK MAMBAS<br />

Pacifiquement,<br />

et sans réserve<br />

En Afrique du Sud, une unité de rangers exclusivement<br />

composée de femmes fait la chasse aux braconniers<br />

et protège les animaux en danger. Sans armes.<br />

Réserve naturelle de Balule, au<br />

cœur du grand Parc National<br />

du Kruger, en Afrique du Sud :<br />

c’est là que travaille une unité<br />

anti-braconnage un peu spéciale,<br />

uniquement constituéee<br />

de femmes : la Black Mamba<br />

Anti-Poaching Unit. Autre<br />

particularité : ces femmes,<br />

dont le travail et les patrouilles<br />

successives ont réussi à faire<br />

enfin chuter les prises de braconnage,<br />

ne sont pas armées.<br />

C’est peut-être là leur force :<br />

un engagement dévoué et pacifique<br />

au service de la nature<br />

qui leur assure une couverture<br />

médiatique valorisante depuis<br />

la création de l’unité en 2013<br />

et une efficacité prouvée en<br />

termes de préservation de la<br />

faune sauvage, notamment<br />

celle du rhinocéros blanc. Ces<br />

femmes doivent pourtant faire<br />

face à une triste réalité : le braconnage<br />

en Afrique du Sud<br />

représente une véritable industrie,<br />

avec 769 rhinocéros tués<br />

pendant la seule année 2018,<br />

et près de 8 000 ces dix dernières<br />

années. La raison de ce<br />

massacre est l’engouement<br />

toujours plus pressant des pays<br />

« L’objectif était de<br />

protéger la faune du<br />

parc tout en soutenant<br />

l’émancipation<br />

des femmes. »<br />

asiatiques – Chine et Vietnam<br />

en tête – pour la corne de<br />

rhinocéros, prisée pour ses<br />

prétendues vertus médicinales,<br />

sans compter le fait que son<br />

prix exorbitant en fait un symbole<br />

de richesse.<br />

Collet Ngobeni est l’une de<br />

ces Black Mambas : après<br />

avoir vu des rhinocéros et des<br />

éléphants en pleine nature<br />

lors d’un projet scolaire, elle<br />

s’est prise de passion pour la<br />

défense de l’environnement<br />

et a décidé de devenir ranger.<br />

Comme ses collègues, elle<br />

œuvre également à sensibiliser<br />

sa communauté à la protection<br />

des rhinocéros.<br />

the red bulletin : L’unité<br />

anti-braconnage des Blacks<br />

Mambas est la première<br />

unité de rangers 100 % féminine<br />

au monde. Pourquoi<br />

a-t-elle été créée ?<br />

collet ngobeni : Notre<br />

équipe a vu le jour en 2013,<br />

avec six membres. L’objectif<br />

était non seulement de protéger<br />

la faune du parc mais également<br />

de soutenir l’émancipation<br />

des femmes issues des<br />

communautés alentour – en<br />

montrant que les femmes pouvaient<br />

aussi faire ce boulot.<br />

Nous voulions faire connaître<br />

aux gens vivant près du<br />

Kruger l’importance de leur<br />

environnement naturel.<br />

Comment faites-vous pour<br />

détecter les braconniers ?<br />

Nous sommes les yeux et les<br />

oreilles de la réserve : notre<br />

travail consiste à surveiller,<br />

collecter le plus d’infos possible<br />

sur la présence des braconniers<br />

comme les traces de<br />

pas, vérifier l’état des barrières,<br />

reboucher les trous<br />

creusés par les phacochères,<br />

qui peuvent servir de passage.<br />

Une autre équipe est chargée<br />

de surveiller l’entrée et de<br />

contrôler le contenu des véhicules<br />

qui rentrent et sortent.<br />

Nous effectuons également<br />

des missions de patrouille aux<br />

quatre coins du parc, à la<br />

recherche d’éventuels pièges<br />

posés par les braconniers.<br />

Et si vous en trouvez un en<br />

train de braconner, que<br />

faites-vous ?<br />

Nous envoyons un signalement<br />

à notre équipe de contrôle, qui<br />

peut localiser directement sur<br />

un écran géant l’endroit d’où<br />

le signalement a été lancé. La<br />

Black Mamba sur place prend<br />

des photos, qui arrivent directement<br />

au bureau, pendant<br />

que nous appelons les gardes<br />

armés à la rescousse.<br />

Pourquoi faire patrouiller<br />

uniquement des femmes ?<br />

Nous sommes moins corruptibles<br />

que les hommes. Dans<br />

d’autres réserves, certains<br />

rangers n’hésitent pas à communiquer<br />

à l’extérieur de précieuses<br />

infos sur l’emplacement<br />

des proies.<br />

Les Black Mambas sont-elles<br />

exposées au danger ?<br />

Le danger ne vient pas des<br />

animaux, car nous savons<br />

exactement quel comportement<br />

adopter face aux animaux<br />

du bush pour éviter<br />

toute situation dangereuse.<br />

Quant aux braconniers, ils ne<br />

sont pas là pour nous mais<br />

pour les animaux.<br />

Êtes-vous armées ?<br />

Non, pour ne pas porter<br />

atteinte à la vie humaine.<br />

Avoir à tuer des êtres<br />

humains pour protéger la vie<br />

JULIA GUNTHER<br />

14 THE RED BULLETIN


Garde rapprochée pour le rhinocéros blanc : Collet Ngobeni (au milieu) et les Black Mambas en patrouille dans la réserve.<br />

animale serait insensé. Si nous<br />

avions des armes, nous<br />

serions peut-être tentées de<br />

nous en servir contre des braconniers,<br />

mais après, comment<br />

vivre avec cette culpabilité<br />

? Comment pourrais-je<br />

m’occuper de mes enfants en<br />

sachant que j’ai ôté la vie d’un<br />

homme qui est père ou oncle ?<br />

Nous ne voulons pas vivre<br />

dans une zone de non-droit<br />

ni avoir des veuves sur la<br />

conscience, au sein de nos<br />

communautés.<br />

Le commerce illégal de<br />

corne de rhinocéros dans<br />

le Parc National du Kruger<br />

cessera-t-il un jour ?<br />

Oui, je pense que ça finira par<br />

s’arrêter. Les gens qui vivent<br />

autour du parc sont nombreux<br />

à ne rien savoir de la vie des<br />

animaux à l’intérieur : c’est<br />

pour cela que nous consacrons<br />

du temps à les informer, surtout<br />

les enfants, qui vont à<br />

leur tour éduquer leurs<br />

parents. Les gens pensent que<br />

les animaux sauvages appartiennent<br />

aux Blancs, alors que<br />

c’est faux : ils n’appartiennent<br />

à personne.<br />

blackmambas.org<br />

THE RED BULLETIN 15


Bulles citadines : les taxis fluviaux de SeaBubbles sont équipés de foils pour aller plus vite.<br />

SEABUBBLES<br />

Un futur au<br />

fil de l’eau<br />

D’ici 2050, le nombre de véhicules<br />

polluant les routes aura dépassé les<br />

trois milliards. Un Français compte<br />

bien y remédier… par la voie des eaux.<br />

Et si le taxi du futur ne volait pas<br />

dans les airs, mais au-dessus de<br />

l’eau ? Conçues par la start-up<br />

française SeaBubbles, ces capsules<br />

hydrodynamiques pourraient<br />

bien débarquer dans les<br />

plus grandes métropoles du<br />

monde d’ici quelques années.<br />

Les ingénieurs et navigateurs<br />

Alain Thébault et Anders<br />

Bringdal, fondateurs du projet,<br />

espèrent ainsi désengorger les<br />

centres-villes en utilisant les<br />

cours d’eau qui les traversent.<br />

Alain Thébault (à g.) et Anders<br />

Bringdal, initiateurs de SeaBubbles.<br />

« 92 pour cent de la population<br />

mondiale est exposée à un<br />

air pollué et le trafic dans les<br />

grandes villes est de plus en<br />

plus saturé, explique Alain, alors<br />

que des villes comme Paris<br />

pourraient exploiter davantage<br />

leurs voies fluviales. » Le Français<br />

est le concepteur de l’Hydroptère,<br />

ce trimaran à hydrofoil<br />

qui a battu le record de<br />

vitesse en mer en 2009 grâce<br />

au foil qui lui permet de s’élever<br />

au-dessus de l’eau : une technologie<br />

appliquée sur ses Sea-<br />

Bubbles, de petits véhicules<br />

électriques, propres, silencieux<br />

et rapides, qui frôlent l’eau et<br />

peuvent être bookés grâce à<br />

une application mobile.<br />

« J’avais 20 ans quand j’ai<br />

dessiné l’Hydroptère, raconte<br />

Thébault, et j’ai parcouru le<br />

monde sur ce bateau jusqu’en<br />

2009 où j’ai battu le record du<br />

monde de vitesse. Alors, mes<br />

trois filles m’ont dit : “N’essaie<br />

pas seulement d’être le mec le<br />

plus rapide du monde, sois aussi<br />

celui qui va aider la prochaine<br />

génération.” Je me suis aussitôt<br />

mis à dessiner ce qui allait devenir<br />

la première Bubble. »<br />

Aujourd’hui, la start-up propose<br />

son concept à de grandes<br />

métropoles en bordure de<br />

fleuves ou de lacs : « Si cette idée<br />

convainc les populations de<br />

délaisser leurs voitures pour<br />

utiliser les cours d’eau, elles<br />

pourront changer le destin de<br />

leur ville, à chaque trajet ».<br />

seabubbles.com<br />

<strong>FR</strong>ANCIS DEMANGE LOU BOYD<br />

16 THE RED BULLETIN


ATLAS DE L’ESPACE<br />

C’est beau,<br />

la connaissance<br />

Une chercheuse en biologie américaine, Eleanor Lutz,<br />

crée de l’art en compilant les données brutes des<br />

sciences astronomiques.<br />

Notre connaissance de l’Univers,<br />

avec tous ses astres et planètes,<br />

peut sembler déroutante. Pas<br />

une année sans que nous apprenions<br />

l’existence d’une nouvelle<br />

planète ou des détails fascinants<br />

sur une autre qui se trouve à<br />

des millions de kilomètres de la<br />

nôtre. Dur de s’y retrouver dans<br />

une telle masse exponentielle de<br />

données : c’est là qu’intervient<br />

le génie d’Eleanor Lutz.<br />

Cette jeune doctorante américaine<br />

a rassemblé des milliers<br />

de données publiques fournies<br />

par la NASA et l’Institut Américain<br />

de Géologie pour créer<br />

quelque chose d’unique, baptisé<br />

An Atlas of Space (un atlas de<br />

l’espace, ndlr) : projet colossal à<br />

mi-chemin entre œuvre d’art et<br />

infographie scientifique. En bref :<br />

la vulgarisation des sciences<br />

portée à son plus beau niveau.<br />

Parmi les nombreuses visualisations<br />

ainsi créées, l’une des plus<br />

folles est sa Carte orbitale du<br />

système solaire. « Au début, je<br />

voulais y montrer les différentes<br />

trajectoires suivies par tous les<br />

objets qui composent notre système<br />

solaire », explique la jeune<br />

biologiste. « Mais cela aurait été<br />

impossible, j’ai donc dû me limiter<br />

à ceux qui font plus de 10 km<br />

de diamètre – au final, plus de<br />

10 000 astéroïdes, sans oublier<br />

toutes les planètes et leurs<br />

lunes. » Sa matière première : la<br />

multitude de données publiques<br />

de la NASA, que Lutz a patiemment<br />

sélectionnées, filtrées et<br />

combinées pour les assembler<br />

sur une seule carte. « Rassembler<br />

tout ça sur une carte qui soit<br />

également agréable à regarder<br />

m’a pris un bon moment »,<br />

explique Eleanor.<br />

Sur son site, elle dévoile<br />

d’autres œuvres, comme sa<br />

Carte topographique de Mercure,<br />

la Géologie de Mars, une<br />

Carte animée de la Terre, et ne<br />

compte pas s’arrêter là. « J’adore<br />

le fait que les données actuelles<br />

soient si précises, mais qu’il<br />

n’existe aucune norme quant à<br />

la façon de les présenter esthétiquement.<br />

Ce qui me plaît, c’est<br />

la recherche et la possibilité de<br />

partager toutes ces connaissances<br />

géniales avec les gens,<br />

grâce au design. »<br />

tabletopwhale.com<br />

AN ORBIT MAP OF THE SOLAR SYSTEM BY ELEANOR LUTZ LOU BOYD<br />

18 THE RED BULLETIN


Cette Carte orbitale du système<br />

solaire montre la position de<br />

plus de 18 000 astéroïdes,<br />

planètes, lunes et autres<br />

au 31 décembre 1999.<br />

THE RED BULLETIN 19


L’orgue et le mélodica placés à l’intérieur de ce piano sont alimentés par une pompe et des soufflets,<br />

tandis que le mécanisme d’une vieille machine à coudre sert à actionner les archers sur les cordes.<br />

BRUNETTES SHOOT BLONDES<br />

À queue…<br />

mais pas que<br />

Ce groupe indie-rock venu d’Ukraine a placé<br />

dans un piano à queue du XIX e siècle un<br />

orchestre de vingt instruments différents.<br />

En écoutant le groupe ukrainien<br />

Brunettes Shoot Blondes chanter<br />

leur chanson Houston, vous<br />

vous imaginerez probablement<br />

tout un orchestre présent dans<br />

le studio. En fait, derrière la voix<br />

langoureuse du chanteur<br />

Andrew Kovaliov, tous les instruments,<br />

qu’ils soient à cordes,<br />

percussions, ou à vent (vingt au<br />

total) sont logés à l’intérieur<br />

d’un vieux piano à queue traficoté<br />

à l’extrême. Pour actionner<br />

les claviers de ce synthé géant<br />

mécanique et multifonction : les<br />

deux Ukrainiens de Brunettes<br />

Shoot Blondes, c’est tout.<br />

« On s’est dit que ce serait<br />

cool d’inventer un piano qui<br />

contienne une vingtaine d’instruments<br />

de musique, raconte<br />

Andrew Kovaliov (sur la photo,<br />

à droite). L’idée était de créer<br />

un truc qui puisse être joué par<br />

deux personnes tout en donnant<br />

l’impression d’être accompagné<br />

par un véritable orchestre. »<br />

Aidé d’une équipe d’ingénieurs,<br />

les deux membres de BSB ont<br />

commencé à décortiquer un<br />

piano au fur et à mesure, remplaçant<br />

certaines octaves par<br />

des cordes de basse, ajoutant<br />

à d’autres endroits des percussions,<br />

tous ces éléments étant<br />

reliés par des câbles aux touches<br />

du clavier afin de permettre aux<br />

musiciens de jouer l’intégralité<br />

des instruments à seulement<br />

quatre mains. Au final, ce piano<br />

hybride contient deux violons,<br />

un violoncelle, un xylophone, une<br />

grosse caisse, des percussions,<br />

un orgue… et bien d’autres surprises,<br />

pouvant toutes être activées<br />

par une des 88 touches des<br />

claviers. « Par chance, aucun<br />

de nous n’a fait des études d’ingénieur<br />

: sinon, nous ne nous<br />

serions jamais lancés dans un<br />

tel projet, plaisante Kovaliov.<br />

Le plus grand défi fut de trouver<br />

les bonnes personnes avec qui<br />

travailler, parce que tout le<br />

monde nous prenait pour des<br />

fous au début. »<br />

Houston, de Brunettes Shoot<br />

Blondes, à voir sur YouTube.<br />

FESENKO MAKSYM LOU BOYD<br />

20 THE RED BULLETIN


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« Notre<br />

secret ?<br />

On bosse<br />

dur !»<br />

La coupe du monde de rugby a lieu en ce moment<br />

au Japon, et les All Blacks sont évidemment<br />

pressentis pour y faire sensation. On aura tout<br />

entendu ou presque à propos des Néo-Zélandais,<br />

équipe associée à nombre de mythes et à une<br />

tonne d’idées reçues. Alors nous avons questionné<br />

l’un d’entre eux, BEAUDEN BARRETT, pour rétablir<br />

quelques vérités sur les hommes en noir.<br />

Texte HANS HAMMER<br />

Avec plus de 70 sélections et deux titres<br />

de meilleur joueur de rugby au monde<br />

(en 2016 et 2017), l’athlète de 28 ans, fraîchement<br />

signé chez les Blues de Auckland,<br />

est une personnalité appréciée et respectée<br />

dans la sphère ovale. Nous nous sommes<br />

pointés à son contact avec une liste d’idées<br />

reçues pour les confronter à ce champion<br />

au cœur du sujet, et lui permettre de partager<br />

sa vision du rugby actuel, ainsi que sa<br />

philosophie. C’est un joueur tout en finesse<br />

et en mesure qui s’est exprimé, loin du<br />

cliché du néo- zélandais frontal auquel<br />

certains pourraient s’attendre.<br />

Les joueurs de l’équipe nationale<br />

néo-zélandaise font tous au<br />

moins 2 mètres et pèsent 150 kg…<br />

Non ! Beauden Barrett en est la preuve<br />

vivante ! Il mesure 1,87 m et pèse 92 kg.<br />

« En fait, tout dépend de ton rôle au sein de<br />

l’équipe, explique-t-il. Chaque place dans<br />

l’équipe requiert un physique et des qualités<br />

différentes. Certains doivent être très<br />

forts et puissants, d’autres doivent être<br />

plus explosifs, d’autres sont plus dans les<br />

tirs, les courses… Des joueurs doivent être<br />

rapides et bien taillés. Pour ma part, je suis<br />

là pour attraper les balles, faire des passes,<br />

courir, tirer, plaquer. Chez les All Blacks,<br />

être imposant physiquement ne fait pas de<br />

GRAEME MURRAY/RED BULL CONTENT POOL<br />

22 THE RED BULLETIN


« Chez les All Blacks, être<br />

imposant physiquement ne fait<br />

pas de toi un patron. »


« Dans cette<br />

attitude des<br />

Français, je vois<br />

avant tout une<br />

forme de respect. »<br />

Millennium<br />

Stadium de Cardiff,<br />

6 octobre 2007 : les<br />

Français s’avancent<br />

à quelques centimètres<br />

des Blacks<br />

durant le haka.<br />

L’un des moments<br />

les plus intenses de<br />

l’histoire du rugby.<br />

GETTY IMAGES, BRAD HANSON/RED BULL CONTENT POOL


« Être aux côtés de mes frères durant l’hymne national,<br />

c’est un instant puissant. »<br />

toi un patron, et chez nous, il n’y a pas<br />

vraiment de hiérarchie. Le truc, c’est de<br />

respecter les anciens, et les mecs plus<br />

expérimentés que toi. »<br />

Cette coupe du monde est pliée<br />

d’avance : les All Blacks les ont<br />

toutes remportées !<br />

C’est absolument faux : depuis la création<br />

de la Coupe du monde de rugby en 1987,<br />

la Nouvelle-Zélande l’a remportée trois<br />

fois, l’Australie et l’Afrique du Sud deux<br />

fois, et l’Angleterre une fois. « Une Coupe<br />

du monde, c’est plein de variables, précise<br />

Beauden. Des matches de poule jusqu’aux<br />

quarts de finale, on appréhende les<br />

matches un par un, l’un après l’autre. Il<br />

n’y aura qu’un vainqueur au final, ça c’est<br />

sûr, mais il y a beaucoup d’équipes qui se<br />

développent de manière très intéressante.<br />

Si tu prends le pays hôte, le Japon : leur<br />

équipe se développe très rapidement, et<br />

ils sont très bien coachés. Je peux te dire<br />

qu’ils vont taquiner deux ou trois équipes<br />

durant ce tournoi. N’oublions pas qu’ils<br />

ont battu l’Afrique du Sud lors de la coupe<br />

du monde 2015. »<br />

Les Blacks se la pètent !<br />

Normal, ils sont la meilleure<br />

équipe au monde !<br />

Au contact de l’ambassadeur des montres<br />

Tudor, c’est l’esprit contraire qui se dégage.<br />

Dans une interview en 2018, il se déclarait<br />

embarrassé par le fait d’être considéré<br />

comme une superstar du rugby. Et le<br />

confirme lors de notre entretien : « Être<br />

une bonne personne avant tout, c’est très<br />

important. Si tu es une bonne personne, tu<br />

seras un bon All Black. Quand on parle de<br />

culture d’équipe, chez nous, il n’y a pas de<br />

place pour les enfoirés… Je ne sais pas si<br />

tu pourras écrire ça… (rires) En fait, ce<br />

genre de gars n’arrivent même pas aux<br />

portes de l’équipe. Un All Black n’est pas<br />

recruté que pour son talent, encore une<br />

fois, il doit être une bonne personne. »<br />

Le jour où les Français ont défié<br />

les Néo-Zélandais durant le haka<br />

lors de la World Cup 2007, et les<br />

ont battus, le mythe des Blacks<br />

surpuissants s’est écroulé…<br />

Côté français, on en est persuadé ! Les<br />

fans de rugby n’oublieront jamais cette<br />

scène : le XV de France venant défier les<br />

Blacks durant le haka en quart de finale,<br />

jusqu’à se retrouver à quelques centimètres<br />

de leur visage, avec Sébastien<br />

Chabal en mode baston de regard. Une<br />

archive visible sur YouTube et présentée<br />

comme « le meilleur haka de tous les<br />

temps ». « Ce moment, au fond, c’était un<br />

moment d’opposition, se souvient Barrett.<br />

C’est la façon dont les Français ont voulu<br />

signifier leur opposition aux Blacks. Je ne<br />

m’en souviens pas comme de la fin de<br />

quelque chose pour les Néo-Zélandais, ou<br />

de quelque chose d’irrespectueux, de too<br />

much. Dans cette attitude des Français, je<br />

vois avant tout une forme de respect, du<br />

challenge. Durant le haka, certaines<br />

équipes sourient, d’autres sont flippées…<br />

Et de notre côté, nous montrons à quel<br />

point nous sommes puissants à l’instant T.<br />

Tu sais, ce haka, pour ne pas oublier sa<br />

signification et son importance, on le travaille<br />

chaque semaine, voire plus pour les<br />

nouveaux arrivants dans l’équipe. Quand<br />

on le fait devant des millions de personnes,<br />

on se doit de bien le faire. »<br />

THE RED BULLETIN 25


« Que votre<br />

équipe perde ou<br />

qu’elle gagne,<br />

soyez présents<br />

pour elle. »<br />

Stopper un All Black, une mission !<br />

Même quand il ne pèse que 92 kg,<br />

comme Barrett. Pour lui, la réunion<br />

des talents fait la force du groupe.<br />

GETTY IMAGES, TUDOR<br />

26 THE RED BULLETIN


Le maillot de la Nouvelle-Zélande<br />

a des propriétés magiques...<br />

Pour Beauden Barrett, c’est presque une<br />

conviction : quand il évoque le premier<br />

match durant lequel il a porté le jersey<br />

de son équipe nationale, il se souvient<br />

avoir ressenti quelque chose d’exceptionnel,<br />

et s’être senti comme Superman.<br />

Est-ce toujours le cas après plus de 70<br />

sélections en équipe nationale ? « Assurément,<br />

nous dit Barrett sans hésitation.<br />

Bien sûr, ce fameux match où j’ai porté le<br />

maillot pour la première fois restera un<br />

jour particulier, avec un sentiment incomparable<br />

de puissance. Aujourd’hui,<br />

chaque fois je l’enfile, je prends un petit<br />

moment pour rassembler mes pensées,<br />

et bien prendre la mesure de ce que je<br />

m’apprête à faire. Car à chaque fois que<br />

je mets ce maillot, un moment particulier<br />

s’annonce. Quand je vois un nouvel équipier<br />

mettre ce maillot à son tour, je sais<br />

qu’il se passe quelque chose en lui, que<br />

c’est une grande occasion. De nouvelles<br />

choses s’ouvrent à lui. Ce que je peux<br />

faire à mon niveau pour accompagner ce<br />

moment, c’est lui ouvrir la voie, et l’encourager<br />

à suivre la dynamique que nous<br />

essayons de créer avec l’équipe. »<br />

Les All Blacks, c’est l’esprit de<br />

fraternité poussé a l’extrême...<br />

La sélection néo-zélandaise est en effet<br />

réputée pour sa cohésion, et au cœur de<br />

cet effectif la fraternité est une réalité,<br />

littéralement, avec plus de quarante<br />

paires de frères recensées dans l’effectif<br />

historiquement. Plus fort encore, on<br />

compte trois Barrett au sein du groupe !<br />

Beauden est en effet accompagné de ses<br />

frères Scott (25 ans) et Jordie (22 ans).<br />

Seront-ils tous présents sur la World Cup ?<br />

« Mon frère Scott s’est blessé récemment,<br />

indique le plus âgé des trois, mais il est<br />

de retour. J’espère que nous jouerons tous<br />

ensemble. Ça nous est déjà arrivé, mais<br />

jamais durant une Coupe du monde. Pendant<br />

un match, le fait de jouer ensemble,<br />

on n’a pas trop ça en tête, mais pendant<br />

les préparations de matchs, et surtout<br />

durant l’hymne national, c’est vraiment<br />

émouvant d’être aux côtés de ses frères<br />

dans la même équipe. C’est un instant<br />

puissant. Pendant le match, le fait de<br />

jouer avec eux n’est pas quelque chose<br />

de particulièrement palpable, on se fait<br />

confiance pour donner le meilleur de soimême,<br />

comme avec n’importe quel autre<br />

joueur de la sélection. »<br />

« Si tu n’apprécies<br />

pas ce que tu<br />

fais, tu ne pourras<br />

pas te dépasser<br />

à l’entraînement ni<br />

durant un match. »<br />

C’est sûr, pour être aussi bons,<br />

les All Blacks ont un secret !<br />

Leur préparation, leur nourriture, un truc<br />

néo-zélandais ancestral ? Pour expliquer<br />

la prédominance des Blacks sur le rugby<br />

international ces dernières décennies,<br />

les explications les plus farfelues ont été<br />

avancées. Mais Barrett garde la tête<br />

froide. « Ça n’est pas une seule chose,<br />

c’est un ensemble de choses, temporise<br />

Barrett. Tout d’abord, on bosse dur.<br />

Il y a aussi la discipline. Et on se fixe des<br />

objectifs hauts. Il faut être lucide dans<br />

tes objectifs, ne pas t’emballer, mais<br />

tu dois surtout prendre du bon temps,<br />

apprécier les choses, pour te challenger,<br />

aller plus loin. Prendre du bon temps,<br />

c’est la clef. Si tu n’apprécies pas ce que<br />

tu fais, tu ne pourras pas te dépasser,<br />

que ce soit à l’entraînement ou durant<br />

un match. »<br />

Une vérité que Beauden souhaite<br />

partager avec vous, les Français<br />

« Je voudrais dire aux supporteurs français<br />

que, quelle que soit l’issue d’un<br />

match, il faut soutenir votre équipe.<br />

Qu’elle perde ou qu’elle gagne, soyez<br />

présents pour elle. C’est très important.<br />

De toute façon, une seule équipe va l’emporter.<br />

(rires) J’espère que vous serez présents<br />

en nombre au Japon pour apprécier<br />

ce que nous aurons à donner durant cette<br />

compétition, et n’oubliez pas, en 2023,<br />

la Coupe du monde de rugby, c’est chez<br />

vous, en France, que ça se passe ! »<br />

Instagram : @beaudenbarrett ;<br />

Coupe du monde de rugby au Japon,<br />

du 20 septembre au 2 novembre.<br />

THE RED BULLETIN 27


METAL<br />

ARDENT<br />

Couple d’illustrateurs parisiens, FORTIFEM a réussi en quelques<br />

années à se faire une place dans le paysage visuel international. Leur<br />

particularité : un style unique, qui emprunte à la gravure, au tatouage<br />

et à l’imagerie metal, et une éthique de travail forte. Quel que soit le<br />

degré de notoriété de ses clients, le duo est toujours à fond sur ses<br />

projets, il s’engage pleinement et place la barre très haut.<br />

XX EDITOR ILLUSTRATOR


Fortifem : sept<br />

ans d’illustrations,<br />

pied au<br />

plancher.<br />

Texte LELO JIMMY BATISTA<br />

Photos WILLIAM LACALMONTIE<br />

29


Illustration en duo,<br />

réalisée dans le cadre<br />

de Work of Love, la<br />

première rétrospective<br />

de Fortifem, qui<br />

a eu lieu à Paris en<br />

2018.<br />

« Qu’on travaille pour<br />

Rammstein, une<br />

marque de luxe ou<br />

pour un petit groupe<br />

qui n’a sorti qu’une<br />

démo, on y consacre<br />

la même énergie, la<br />

même exigence. »


J<br />

« On s’est donné<br />

rendez-vous à un<br />

concert de hardcore,<br />

et le lendemain,<br />

on emménageait<br />

ensemble. »<br />

esse est penché sur sa feuille depuis<br />

pas loin d’une heure. Après avoir fini<br />

le tracé d’une série de longues lignes<br />

sinueuses, Adrien vient noircir une<br />

partie du dessin à coups de stries<br />

microscopiques. La tâche est longue,<br />

minutieuse, effectuée avec une précision<br />

quasi-maniaque. Depuis plusieurs<br />

semaines, Fortifem travaillent<br />

sur la pochette du sixième album<br />

d’Alcest, groupe de metal atmosphérique<br />

français qui compte de nombreux<br />

fans en Europe – parmi lesquels<br />

Robert Smith, le leader de<br />

<strong>The</strong> Cure. Cette pochette est l’un des<br />

nombreux projets en cours pour ce<br />

couple d’illustrateurs parisiens qui<br />

rencontre depuis quelques années<br />

un succès grandissant, grâce à un<br />

style unique, inspiré des gravures du<br />

XIX e siècle, du tatouage et de l’esthétique<br />

metal, mais aussi à une forte<br />

éthique de travail. Le duo s’impose<br />

en effet de s’impliquer avec la même<br />

rigueur et la même exigence, qu’il<br />

travaille pour une grande marque,<br />

un artiste renommé ou un groupe<br />

qui sort son premier disque. Une histoire<br />

portée par la passion et née<br />

d’une série d’accidents heureux.<br />

Adrien Havet et Jesse Daubertes<br />

se sont trouvés il y a bientôt dix ans<br />

sur Tumblr, par hasard. Chacun<br />

possédait une page sur la plateforme<br />

où ils partageaient des photos et<br />

illustrations glanées sur internet.<br />

Tous deux réagissaient régulièrement<br />

sur la page de l’autre sans avoir la<br />

moindre idée de qui était en face.<br />

« Pour tout dire, raconte Adrien, au<br />

départ je pensais que Jesse était<br />

anglais et lui pensait que j’étais norvégien.<br />

Un jour, Jesse m’a laissé un<br />

message en anglais, je lui ai répondu<br />

que je parlais français. Quelques<br />

jours plus tard, on entrait en contact<br />

sur Facebook et on réalisait qu’on<br />

avait plusieurs amis communs. On<br />

s’est donné rendez-vous à un concert<br />

de hardcore, à Paris, et le lendemain,<br />

on emménageait ensemble. » À ce<br />

moment, chacun occupe encore un<br />

emploi de graphiste – freelance pour<br />

Jesse, en agence de pub pour Adrien<br />

– et il n’est pas encore question de<br />

collaboration. Mais tous deux<br />

occupent déjà leur temps libre à l’illustration,<br />

le soir, sans autre but que<br />

de se faire plaisir et de collaborer de<br />

temps à autre avec des amis musiciens<br />

ou tatoueurs. C’est l’un d’entre<br />

eux, Olivier Marescaux, sérigraphe<br />

basé à Reims, qui, le premier, va leur<br />

proposer de réaliser une dizaine de<br />

dessins pour une exposition. Hasard<br />

du calendrier, l’événement a lieu le<br />

Dessin pour la<br />

pochette intérieure<br />

d’Exile,<br />

deuxième album<br />

de Regarde Les<br />

Hommes Tomber.<br />

THE RED BULLETIN 31


Adrien dans l’intimité de la chambre de Bret Halford, le personnage fictif que l’on retrouve<br />

au centre des derniers albums de Carpenter Brut. Comme toujours avec cet artiste français,<br />

l’illustration est truffée de détails et de références qu’il partage avec Fortifem.<br />

21 février 2012, un an jour pour jour<br />

après la première rencontre de Jesse<br />

et Adrien.<br />

À ce stade, le duo n’est pas encore<br />

officiellement lancé et évolue encore<br />

sans nom, au gré des opportunités.<br />

« Ça restait quelque chose de très<br />

ponctuel, explique Jesse. Et quand<br />

on a fini par se donner un nom,<br />

c’était finalement plus par contrainte<br />

qu’autre chose. On avait répondu à<br />

un appel d’offre émis par une marque<br />

norvégienne qui faisait des vêtements<br />

d’inspiration metal. Elle avait<br />

diffusé une vidéo dont chaque artiste<br />

devait isoler une image et la réinterpréter.<br />

Pour y participer, il nous fallait<br />

un nom. Comme on revenait d’un<br />

séjour en Norvège et qu’on habitait<br />

au n° 45, on a opté pour førtifem,<br />

qui signifie 45 en norvégien. C’était<br />

simple, facile à prononcer dans<br />

toutes les langues et sans connotation<br />

particulière. Ça nous allait<br />

parfaitement. »<br />

Mais ce qui va vraiment changer<br />

les choses, l’élément qui va asseoir<br />

l’identité du duo et faire circuler<br />

« Emperor, l’une<br />

des plus grandes<br />

légendes de la<br />

scène black metal<br />

norvégienne, nous<br />

a demandé de revisiter<br />

leur logo. »<br />

son travail, c’est son ancrage dans le<br />

monde de la musique et plus précisément<br />

sur la scène metal. Et là encore,<br />

les choses vont se faire toutes seules,<br />

ou presque. Adrien : « Matthias<br />

Jungbluth, le fondateur du label<br />

rennais Throatruiner avait vu passer<br />

quelques-uns de nos dessins et nous<br />

a demandé de réaliser son logo, puis<br />

de réaliser la pochette du premier<br />

album de Cowards, un jeune groupe<br />

parisien qu’il venait de signer. Cette<br />

pochette a attiré l’attention de<br />

Regarde Les Hommes Tomber, un<br />

autre groupe basé à Nantes, qui<br />

démarrait tout juste et nous a<br />

demandé de réaliser la leur. »<br />

En trois coups, la machine est<br />

lancée, doucement. Mais ne semble<br />

bientôt plus vouloir s’arrêter, chaque<br />

commande en appelant systématiquement<br />

une autre. À tel point que<br />

le couple décide d’en faire son occupation<br />

principale. « Ça n’a pas été<br />

une décision facile, continue Adrien.<br />

Travailler pour la musique rapporte<br />

peu d’argent, notre style demande<br />

beaucoup de temps et de minutie et<br />

il était hors de question pour nous<br />

de faire des compromis sur la qualité.<br />

C’est quelque chose que l’on n’a pas<br />

voulu sacrifier. Le sacrifice, il s’est<br />

plutôt fait du côté de notre niveau<br />

de vie, qui a un peu baissé au départ.<br />

Il aura fallu environ quatre ans pour<br />

qu’on trouve un équilibre, le temps<br />

de se faire une place dans d’autres<br />

créneaux, plus porteurs, chez les<br />

grandes marques, dans l’édition… »<br />

Et d’attirer l’attention de gens<br />

comme Matt Heafy, chanteur du<br />

groupe metal américain Trivium, qui<br />

va permettre à Fortifem d’accéder<br />

à certains de leurs héros musicaux.<br />

« On a fait plusieurs illustrations<br />

pour Trivium, après quoi Matt a parlé<br />

de nous à Emperor, l’une des plus<br />

grandes légendes de la scène black<br />

metal norvégienne, qui nous a<br />

demandé rien de moins que de revisiter<br />

leur logo. Pour nous, c’était inespéré…<br />

Et tout cela est arrivé parce<br />

que Matt avait découvert notre travail<br />

avec les pochettes de Regarde<br />

Les Hommes Tomber, avec qui on a<br />

continué à travailler et qui ont acquis<br />

petit à petit une certaine notoriété. »<br />

C’est là un des aspects les plus<br />

excitants et les plus gratifiants du<br />

travail du duo : accompagner des<br />

groupes dans leur ascension. Comme<br />

32 THE RED BULLETIN


THE RED BULLETIN 33


Carpenter Brut, aujourd’hui pilier de<br />

la scène synthwave, un courant<br />

mêlant musique électronique, bandes<br />

originales de films d’horreur et esthétique<br />

metal, avec qui Fortifem a commencé<br />

à travailler à ses débuts, il y a<br />

six ans. Jesse : « Quand Carpenter<br />

Brut sont venus nous trouver pour<br />

qu’on fasse leur logo, ils n’avaient<br />

enregistré que quatre titres. Mais on<br />

trouvait le projet passionnant et on<br />

avait envie d’en être. Ça a été super<br />

ensuite de voir le groupe grandir et<br />

de pouvoir faire partie de l’aventure.<br />

C’est pour ce type de collaborations<br />

qu’on fait ce travail. Au fil du temps,<br />

la confiance et la compréhension<br />

s’installent entre les deux partis, c’est<br />

génial. »<br />

Car une des dernières clés, et sans<br />

doute la plus importante, pour comprendre<br />

la mécanique Fortifem, c’est<br />

l’élément humain. Pour Adrien et<br />

Jesse, l’échange, la confiance et la<br />

communication sont primordiaux et<br />

passent bien avant la musique. « On<br />

Deux portraits de « saints du rock » réalisés par Fortifem dans le cadre du projet <strong>The</strong> Holy<br />

Bloody Book, mêlant rock, design et édition. Des illustrations qui ont été imprimées en grand<br />

format avant d’être collées sur les murs du quartier de Montmartre, à Paris. À gauche, Lou<br />

Reed. À droite, Ian Curtis, le chanteur de Joy Division.<br />

34 THE RED BULLETIN


« On a dit non à de<br />

très gros groupes<br />

parce que le contact<br />

n’avait pas été<br />

bon. »<br />

peut tout à fait travailler pour un<br />

groupe dont on n’apprécie pas plus<br />

la musique que ça, ce n’est pas un<br />

problème. En revanche, il faut qu’il<br />

y ait une connexion avec la personne.<br />

Si ça coince, on refusera. De la même<br />

manière, on préférera décliner si on<br />

sait qu’on ne pourra pas faire notre<br />

travail correctement. On a dit non<br />

à de très gros groupes parce que le<br />

contact n’avait pas été bon, ou parce<br />

qu’on s’est rendu compte qu’on allait<br />

travailler pour un manager et pas<br />

pour un artiste. »<br />

Pour cette raison précisément,<br />

le duo démarche peu – hormis<br />

Rammstein et quelques groupes<br />

japonais dont ils sont fans, Adrien<br />

et Jesse contactent rarement les<br />

artistes. « Tout simplement parce<br />

que souvent, les choses ne fonctionnent<br />

pas aussi bien dans ce sens,<br />

continue Adrien. On n’est pas dans<br />

le même rapport. La personne en<br />

face va souvent vouloir prendre le<br />

dessus, être plus directive. Et ce<br />

qu’on cherche, c’est un échange sincère.<br />

On veut essayer de coller à<br />

l’esprit de l’artiste et de son projet.<br />

Quand une marque vient nous chercher,<br />

c’est souvent parce qu’elle a vu<br />

passer une illustration qui lui plaisait<br />

et qu’elle veut quelque chose de similaire.<br />

Ça reste intéressant, mais c’est<br />

cadré. Avec les groupes, on peut<br />

davantage expérimenter, tenter de<br />

nouvelles choses. Notre collaboration<br />

avec Carpenter Brut, par exemple,<br />

nous a permis de sortir du noir et<br />

blanc pour aller vers des couleurs<br />

très vives, fluorescentes, vers lesquelles<br />

on ne serait peut-être pas<br />

allés de notre plein gré. On n’a pas<br />

envie de se poser de limites et ce type<br />

de collaboration nous aide, justement,<br />

à les dépasser. »<br />

Limites qui vont être encore<br />

repoussées en cette rentrée <strong>2019</strong>,<br />

où les deux Fortifem vont passer du<br />

papier aux écrans géants, le temps<br />

d’un concert au Trianon (Paris).<br />

À cette occasion, ils ont invité six<br />

groupes de leur entourage proche –<br />

parmi lesquels Alcest et Regarde Les<br />

Hommes Tomber – à se produire<br />

dans le cadre de collaborations inédites<br />

et d’une scénographie qu’ils<br />

auront intégralement réalisée, inspirée<br />

des arcanes du jeu de tarot.<br />

Jesse : « On se lance encore dans<br />

quelque chose de nouveau, quelque<br />

chose qui nous excite et nous fait<br />

peur à la fois parce qu’on ne l’a<br />

jamais fait et qu’on ne sait pas trop<br />

où on va. Mais on sait qu’on a envie<br />

d’y aller. Parce que c’est le seul<br />

moyen d’avancer et de faire en sorte<br />

que ce boulot reste stimulant chaque<br />

jour. »<br />

Major Arcana - Une cérémonie<br />

metal illustrée par Fortifem :<br />

avec Alcest & Perturbator,<br />

Nostromo & Dehn Sora, Hangman’s<br />

Chair & Regarde Les Hommes<br />

Tomber ; le 25 septembre au Trianon,<br />

dans le cadre du <strong>Red</strong> Bull Music<br />

Festival Paris, et sur Arte Concert.<br />

THE RED BULLETIN 35


« Je<br />

n’ai<br />

pas<br />

peur »<br />

L’homme qui infiltre<br />

des réseaux criminels<br />

pour sauver des<br />

espèces menacées<br />

d’extinction raconte<br />

son quotidien.<br />

Andrea Crosta était conseiller en<br />

sécurité pour le compte de grandes<br />

entreprises, de gouvernements et<br />

de services secrets. Aujourd’hui,<br />

l’Italien dirige l’ONG Earth League<br />

International, dédiée au sauvetage<br />

d’espèces en voie de disparition,<br />

en employant des moyens dignes<br />

des renseignements. Il lève le voile<br />

sur ses méthodes d’engagement.<br />

Propos recueillis par MAN<strong>FR</strong>ED KLIMEK<br />

36 THE RED BULLETIN


Le bateau<br />

Le Sea of Shadows met le cap sur le golfe<br />

de Californie, au Mexique, où la vaquita,<br />

une espèce de marsouins en voie d’extinction,<br />

est en période de reproduction.<br />

THE RED BULLETIN 37


La question qu’on me pose le plus<br />

souvent, c’est si j’ai peur. Ça ne<br />

m’étonne qu’à moitié. Après tout,<br />

mon métier est risqué et m’expose<br />

à de nombreux dangers.<br />

Avec mon équipe, nous menons<br />

depuis près de dix ans un combat contre les criminels<br />

qui se livrent à un commerce illégal. Dans ce<br />

genre d’activité, on se fait forcément beaucoup<br />

d’ennemis. Et on peut partir du principe qu’on<br />

continuera à s’en faire. Je n’ai pas peur. Et je m’inquiète<br />

uniquement pour mes équipes lorsqu’elles<br />

sont en mission. Nos agents opèrent généralement<br />

sous couverture. S’ils étaient démasqués,<br />

ils se retrouveraient très vite en danger de mort.<br />

Je ne me fais pas de souci pour moi-même. Je vis<br />

seul avec mon chien en Californie et suis souvent<br />

en voyage. Je m’imagine parfois qu’on me surveille<br />

et que quelqu’un m’attend au coin de la rue<br />

pour me régler mon compte. Mais je m’efforce<br />

de m’ôter rapidement cette idée de la tête.<br />

« Je n’ai pas peur. Et je<br />

m’inquiète uniquement<br />

pour mes équipes lorsqu’elles<br />

sont en mission.<br />

Nos agents opèrent généralement<br />

sous couverture.<br />

S’ils étaient démasqués,<br />

ils se retrouveraient très<br />

vite en danger de mort. »<br />

Le sauveur<br />

Andrea Crosta (50 ans) vit avec son chien en<br />

Californie. La plupart du temps, il vadrouille<br />

à travers le monde. Toute compagne à<br />

ses côtés serait menacée. C’est pourquoi<br />

il préfère rester célibataire.<br />

Je m’appelle Andrea Crosta, j’ai 50 ans, je suis né<br />

près de Milan, j’ai étudié la zoologie, les sciences<br />

naturelles, l’économie et la psychologie. Je suis<br />

directeur exécutif de l’ONG Earth League International<br />

qui se consacre à la dénonciation des crimes<br />

perpétrés contre les espèces sauvages. Notre vocation<br />

est d’œuvrer pour la sauvegarde des espèces<br />

menacées et en voie de disparition. De nombreuses<br />

organisations poursuivent ce même objectif à travers<br />

le monde, et on ne peut que s’en réjouir. Mais<br />

nous nous distinguons des autres organisations<br />

par les méthodes que nous mettons en œuvre lors<br />

de nos opérations, des méthodes directement inspirées<br />

du domaine du renseignement. Oui, c’est<br />

très précisément ce que nous faisons : nous<br />

sommes une organisation professionnelle digne<br />

d’un service de renseignement agissant dans le<br />

monde entier, parfois clandestinement, qui met au<br />

jour des activités criminelles et livre aux autorités<br />

les résultats de ses enquêtes. Il ne s’agit pas pour<br />

nous de nous indigner, mais d’apporter la preuve<br />

d’agissements criminels permettant à la police et à<br />

la justice de sévir contre le massacre organisé et le<br />

trafic d’espèces en voie de disparition.<br />

J’ai entendu parler de la vaquita pour la première<br />

fois il y a environ quatre ans. La vaquita, qui signifie<br />

« petite vache » en espagnol, est un marsouin<br />

mesurant environ un mètre et demi de long qui<br />

ne vit le long des côtes mexicaines qu’au cours de<br />

sa période de reproduction. Avant et après cette<br />

période, ces animaux mènent une existence plutôt<br />

solitaire. On estime que seule une trentaine de<br />

TERRA MATER FACTUAL STUDIOS GMBH<br />

38 THE RED BULLETIN


La victime<br />

Une vaquita dans les filets d’un pêcheur<br />

mexicain. Une prise accessoire : les pêcheurs<br />

ciblent en fait le totoaba, poisson dont la vessie<br />

natatoire se vend à prix d’or en Chine.<br />

THE RED BULLETIN 39


vaquitas sont encore en vie à l’heure actuelle.<br />

Je présume malheureusement que ce nombre<br />

aura encore diminué entre-temps.<br />

Le repérage<br />

La nuit venue, les équipiers du<br />

Sea of Shadows scrutent les sonars<br />

de leurs instruments de surveillance<br />

des heures durant. Soudain,<br />

ils repèrent un bateau de pêcheur.<br />

« Après avoir étudié la<br />

question plus en détail,<br />

j’ai vite réalisé à quel point<br />

la vaquita était menacée<br />

et j’ai pris conscience<br />

du rythme effréné de<br />

son extinction. »<br />

La vaquita a un problème : elle partage son habitat<br />

naturel avec des bancs de totoabas. En Chine, la<br />

vessie natatoire de ce poisson est réputée pour ses<br />

vertus prétendument miraculeuses : les femmes<br />

enceintes la consomment pour prévenir les fausses<br />

couches. Le remède est en outre censé rendre la<br />

peau plus belle et, bien sûr, augmenter la puissance<br />

sexuelle de l’homme. Des effets jamais<br />

démontrés scientifiquement, mais il est difficile de<br />

lutter contre des croyances traditionnelles si profondément<br />

ancrées. Les totoabas sont capturés à<br />

l’aide de filets dits maillants posés dans les fonds<br />

marins. Les vaquitas sont prises dans les mailles<br />

du filet et meurent par asphyxie. La saison de<br />

pêche à venir, qui débutera à l’automne <strong>2019</strong>, sera<br />

peut-être sa dernière. Ensuite, la vaquita risque de<br />

disparaître intégralement du règne animal.<br />

En 2016, nous avons donc commencé à enquêter<br />

pour localiser la zone géographique vers laquelle<br />

les vessies séchées de totoaba étaient expédiées.<br />

Des recherches qui nous ont menés tout droit en<br />

Chine. Les membres de notre équipe asiatique se<br />

sont fait passer pour de riches businessmen qui<br />

menaient leurs affaires dans la province du<br />

Guangdong, dans le sud de la Chine. Canton, la<br />

capitale du Guangdong, est une ville côtière et<br />

un haut lieu du commerce des poissons et des<br />

crustacés. Nous nous sommes d’abord présentés<br />

comme des négociants sérieux traitant avec des<br />

marchandises légales. Puis, une fois bien établis<br />

dans le monde des affaires local, nous avons<br />

commencé à nous intéresser aux vessies natatoires<br />

de totoaba.<br />

40 THE RED BULLETIN


Les pirates<br />

Des pêcheurs mexicains remontent leurs filets.<br />

Ils représentent à la fois le maillon le plus important<br />

et le plus pauvre de la chaîne. On ne saurait pour<br />

autant leur accorder notre empathie.<br />

THE RED BULLETIN 41


L’attaque<br />

Les protecteurs d’espèces du<br />

Sea of Shadows tentent d’éloigner les<br />

pêcheurs illégaux de leurs filets.<br />

Une telle opération représente une somme de<br />

travail immense, financée en conséquence. Les<br />

membres de notre équipe asiatique devaient avoir<br />

l’air très fortunés : costumes haut de gamme,<br />

grosses berlines, les meilleurs hôtels et un budget<br />

généreux dédié aux invitations. Cette opération a<br />

nécessité l’engagement de sommes d’argent considérables,<br />

perdues en cas d’échec. Il a également<br />

fallu s’armer de patience pour gagner la confiance<br />

des gens et les amener à nous proposer des marchandises<br />

rares et illégales. Nous avons dû nous<br />

rendre plusieurs fois dans la région et attendre de<br />

longues semaines avant qu’on nous présente enfin<br />

une vessie séchée de totoaba. Nos agents ont filmé<br />

cette rencontre avec des caméras cachées dans les<br />

attachés-cases ou dissimulées dans les vêtements.<br />

Nous savions à présent à quoi ressemblait la marchandise<br />

– rien de très spectaculaire.<br />

Comble de l’absurdité, la vessie de totoaba n’est<br />

aujourd’hui quasiment plus vendue en Chine pour<br />

être consommée, mais fait essentiellement office<br />

de cadeau dans les milieux d’affaires afin de faciliter<br />

les relations commerciales. Cadeau qui sera par<br />

la suite offert à un autre partenaire commercial et<br />

voyagera de main en main. En raison de sa rareté,<br />

le prix au gramme de la vessie natatoire atteint<br />

aujourd’hui le double de celui de l’or. Un trafic<br />

dont on devine aisément la dimension lucrative.<br />

« Les membres de<br />

notre équipe asiatique<br />

devaient avoir l’air<br />

très fortunés : costumes<br />

haut de gamme,<br />

grosses berlines, les<br />

meilleurs hôtels et un<br />

budget généreux dédié<br />

aux invitations. »<br />

42 THE RED BULLETIN


THE RED BULLETIN 43


En Chine aussi, le commerce et la consommation<br />

de la vessie de totoaba sont strictement prohibés.<br />

Les autorités chinoises respectent généralement<br />

la Convention sur la protection des espèces.<br />

Et afin d’écarter tout soupçon de complaisance,<br />

la police chinoise peut également se montrer très<br />

répressive dès lors qu’elle obtient des<br />

informations.<br />

De retour en Californie avec nos données, il<br />

s’agissait à présent d’exploiter les informations<br />

recueillies. Une tâche digne d’une investigation<br />

policière. Trois de nos collaborateurs, des spécialistes<br />

de l’analyse de données, ont visionné nos<br />

innombrables heures d’enregistrements, parfois<br />

en organisant des équipes de nuit, afin d’identifier<br />

et de synthétiser les informations pertinentes.<br />

À la maison, au cours de nos recherches, j’avais<br />

dédié un mur entier de plusieurs mètres de large<br />

à nos travaux, sur lequel nous mettions en relation<br />

les différents lieux et individus. Oui, comme<br />

dans les séries policières. Quand vous reculiez<br />

de trois pas pour contempler le mur, vous étiez<br />

capable de dresser un tableau d’ensemble et<br />

d’appréhender l’affaire dans toute son ampleur.<br />

Je me suis alors rendu à l’évidence que ce projet<br />

devait prendre une dimension supérieure. J’avais<br />

certes déjà obtenu le soutien d’un financier qui<br />

avait réglé la facture de nos voyages et opérations<br />

en Chine, mais la question des vaquitas me semblait<br />

désormais présenter davantage de substance<br />

journalistique que ce que j’imaginais au départ.<br />

« Sur nos précédentes<br />

opérations, nous pouvions<br />

opérer tels des fantômes<br />

invisibles, mais la réalisation<br />

d’un documentaire<br />

implique le transport d’un<br />

volume conséquent de<br />

matos, ce qui signifiait la<br />

fin de notre clandestinité. »<br />

Il fallait donc lui donner une plus grande résonance.<br />

Ici, les négociants de Guandong qui<br />

vendent les vessies natatoires séchées de totoaba<br />

à une petite clientèle choisie. Là, les négociants<br />

basés au Mexique, généralement des Chinois<br />

expatriés, qui expédient les vessies à travers le<br />

monde en prenant soin d’éviter tout envoi direct<br />

vers la Chine, pour ne pas éveiller les soupçons.<br />

Ici encore, les hommes de main des cartels mexicains<br />

qui servent d’intermédiaire entre les<br />

pêcheurs et les Chinois mexicains et leur livrent<br />

les vessies. Là enfin, les pêcheurs qui capturent<br />

illégalement les totoabas et les vaquitas. J’en étais<br />

persuadé : un documentaire permettrait de lever<br />

le voile sur ce commerce criminel et d’en révéler<br />

le fonctionnement. Un trafic qui illustre dans une<br />

très large mesure les failles de la protection des<br />

espèces. J’ai donc appelé Richard Ladkani, le<br />

réalisateur autrichien avec lequel j’ai tourné le<br />

documentaire <strong>The</strong> Ivory Game en 2016 sur le<br />

trafic d’ivoire qui sévit en Chine et à Hongkong.<br />

44 THE RED BULLETIN


La fuite<br />

Après une confrontation mouvementée,<br />

voire carrément violente, les pêcheurs<br />

cherchent leur salut dans la fuite.<br />

THE RED BULLETIN 45


« À partir du mois d’octobre,<br />

les bateaux de pêche<br />

reprendront probablement<br />

leur activité illégale, la pêche<br />

au totoaba. Et il se peut qu’au<br />

cours de l’hiver, nous devions<br />

constater l’extinction des<br />

dernières vaquitas. »<br />

46 THE RED BULLETIN


La libération<br />

Les membres du Sea of Shadows parviennent à<br />

libérer un totoaba capturé illégalement et à le<br />

relâcher en mer. L’assistance vient généralement<br />

trop tard. Une fois prises au piège, les vaquitas<br />

meurent rapidement par asphyxie.<br />

Au début, Richard était peu emballé par l’idée.<br />

J’avais moi-même mis un certain temps avant de<br />

m’intéresser au problème. L’ivoire, ça c’était un<br />

sujet, et tout le monde sait ce qu’est un éléphant.<br />

Mais un petit marsouin dont il ne reste probablement<br />

plus qu’une trentaine de spécimens ? Richard<br />

se demandait sans doute : cette thématique est-elle<br />

suffisamment dense pour en faire un long métrage,<br />

un documentaire diffusé dans les cinémas ou en<br />

streaming ? C’était sans compter sur l’intervention<br />

de Leonardo DiCaprio – qui avait déjà co-produit<br />

<strong>The</strong> Ivory Game. DiCaprio disait qu’il fallait faire ce<br />

film. Et qu’il nous soutiendrait. Après lui, Terra<br />

Mater, la société de production du documentaire<br />

<strong>The</strong> Ivory Game, a à son tour accepté de financer ce<br />

nouveau projet. L’équipe que nous avions formée<br />

par le passé était à nouveau réunie.<br />

Avant de poursuivre, je tiens à raconter brièvement<br />

comment j’ai eu l’idée de créer mes petits<br />

services secrets personnels. Avant de partir m’installer<br />

en Californie, je détenais une société de services<br />

de sécurité en Afrique. Je protégeais des<br />

personnes qui vivaient et travaillaient dans différentes<br />

régions de l’Afrique, souvent au Kenya.<br />

C’est une activité qui vous confronte à des situations<br />

que l’on ne rencontre jamais en Europe et<br />

qui vous familiarise avec le sentiment de danger.<br />

Puis, des années durant, j’ai développé des technologies<br />

de sécurité et de surveillance dans le<br />

monde entier, dont certaines utilisées dans le<br />

cadre de la lutte contre le terrorisme. J’ai découvert<br />

lors de mon travail en Afrique que l’organisation<br />

terroriste islamiste Al-Shabaab se finançait<br />

grâce au trafic d’ivoire. J’ai effectué des<br />

recherches approfondies à ce sujet et ai publié<br />

mon travail avec l’aide de responsables politiques<br />

tels que le sénateur américain John Kerry. Mon<br />

initiative a permis par la suite d’endiguer ce trafic<br />

dans une large mesure, sauvant probablement<br />

des centaines d’éléphants.<br />

THE RED BULLETIN 47


Après l’enquête sur Al-Shabaab, je me suis mis à la<br />

recherche de thématiques similaires, impliquant<br />

également des agissements de marchands criminels<br />

qui mettaient en péril la survie d’espèces<br />

menacées. Et j’ai mis mes compétences dans le renseignement<br />

au service de l’organisation. L’Earth<br />

League International est sans doute la seule ONG<br />

qui réalise des enquêtes en s’appuyant sur des<br />

méthodes dignes des services secrets.<br />

Mais revenons aux vaquitas et au film. Lorsque<br />

Richard est arrivé au Mexique avec son équipe de<br />

tournage, il nous était difficile de passer inaperçus.<br />

Lors de nos précédentes opérations, nous pouvions<br />

opérer tels des fantômes invisibles, mais la réalisation<br />

d’un documentaire implique le transport d’un<br />

volume conséquent de matos, ce qui signifiait la fin<br />

de notre clandestinité. À Mexico, nous avons invité<br />

le journaliste d’investigation Loret Carlos de Mola<br />

à rejoindre notre équipe. Avec sa propre émission<br />

de télévision, il était l’homme idéal pour sensibiliser<br />

le grand public à des problématiques telles que<br />

celle de la vaquita.<br />

Les négociants<br />

Les membres des cartels mexicains ne font<br />

pas vraiment dans la dentelle. Celui ci-dessus<br />

a commis plusieurs homicides.<br />

À Mexico, le tournage du documentaire et nos<br />

enquêtes s’avéraient sensiblement plus compliqués<br />

qu’en Chine. Nous nous y étions préparés :<br />

nous savions que les cartels ne sont pas particulièrement<br />

connus pour reculer devant la violence,<br />

bien au contraire. Malgré la présence de gardes<br />

du corps à nos côtés, nous avons rencontré une<br />

situation particulièrement périlleuse, lorsque des<br />

pêcheurs furieux se sont mis à nous jeter des<br />

pierres et autres objets. Une pierre grosse comme<br />

mon poing a manqué ma tête de deux centimètres.<br />

Lorsqu’une telle situation se présente,<br />

il s’agit de garder son calme et de foutre le camp<br />

au plus vite.<br />

48 THE RED BULLETIN


Le marché<br />

Les vessies natatoires séchées de totoaba<br />

sur le marché noir chinois. Un gramme<br />

de vessies de totoaba coûte aujourd’hui<br />

deux fois plus cher qu’un gramme d’or.<br />

Notre documentaire est aujourd’hui terminé, et il<br />

voyage désormais à travers le monde. Nous avons<br />

fait tout ce qui était en notre pouvoir pour sensibiliser<br />

une large partie de l’opinion publique sur<br />

la situation désastreuse des vaquitas. Mais j’avoue<br />

ne pas être très optimiste quant à la fin réelle de<br />

cette pêche illégale. En revanche, il y a une chose<br />

que nous avons réussie : les autorités chinoises<br />

ont bloqué les routes commerciales par lesquelles<br />

transitent les vessies de totoaba. D’un point de<br />

vue tactique, il peut s’avérer judicieux de faire<br />

obstacle à tout réapprovisionnement en vessies<br />

pendant un certain temps, dans l’espoir que ce<br />

produit et sa légende finissent par tomber dans<br />

l’oubli et par perdre toute valeur. Souhaitons-le.<br />

Mais à partir du mois d’octobre, les bateaux de<br />

pêche reprendront probablement leur activité<br />

illégale, la pêche au totoaba. Et il se peut qu’au<br />

cours de l’hiver, nous devions constater l’extinction<br />

des dernières vaquitas qui se reproduisent<br />

dans le Pacifique le long des côtes mexicaines.<br />

La Terre aura une perte irrémédiable de plus<br />

à déplorer. »<br />

Sea of Shadows, le film<br />

Un film documentaire plusieurs fois récompensé, réalisé par<br />

Richard Ladkani, a vu le jour grâce au soutien de Leonardo<br />

DiCaprio et sous l’égide de la société de production Terra Mater.<br />

Il est actuellement à l’affiche dans les cinémas européens.<br />

Infos (en anglais) sur : terramater.at/cinema/sea-of-shadows<br />

THE RED BULLETIN 49


« Le regard<br />

des gens,<br />

on s’en fout ! »<br />

MAVINGA participera à la finale mondiale<br />

du <strong>Red</strong> Bull Dance Your Style à Paris<br />

(dont elle a remporté l’édition belge en<br />

2018). Lors de ce concours de danse très<br />

particulier où le public est juge, réactivité,<br />

adaptation et personnalité sont les clefs.<br />

La danseuse n’en manque pas.<br />

Texte PIERRE-HENRI CAMY<br />

Photos LITTLE SHAO<br />

50 THE RED BULLETIN


Upside down :<br />

le 12 octobre prochain,<br />

Mavinga et<br />

une trentaine de<br />

danseurs et danseuses<br />

s’affronteront<br />

lors du <strong>Red</strong> Bull<br />

Dance Your Style<br />

à Paris. Qui s’installera<br />

au sommet ?


« Issue des clubs,<br />

la house dance est<br />

une culture différente,<br />

où les gens sont<br />

eux-mêmes. »<br />

Venue de Liège<br />

(Belgique),<br />

Mavinga dédie sa<br />

vie à la danse et<br />

au graphisme.


the red bulletin : Mavinga, la<br />

danse et vous, ça date de quand ?<br />

mavinga : Quand j’avais neuf ans,<br />

j’avais tout le temps envie de danser.<br />

Mes parents voulaient que je sois<br />

concentrée sur mes études, mais<br />

c’était plus fort que moi, il fallait que<br />

je danse, tout le temps ! Vers l’âge de<br />

douze ans, j’ai commencé à aller<br />

dans les écoles de danse, dans les<br />

maisons de jeunes pour m’entraîner.<br />

C’est en gagnant mes premiers<br />

battles que j’ai voulu me consacrer<br />

essentiellement à la danse.<br />

Ces battles, c’était du breakdance ?<br />

J’ai démarré la danse par du breakdance,<br />

mais les premiers battles que<br />

j’ai remportés, c’était en house dance.<br />

Le côté compétition du break, en<br />

un contre un, vous a séduite ?<br />

Quand j’ai essayé le break, j’étais<br />

dedans dès le début. Les films de<br />

danse nous influençaient et nous<br />

mettaient en mode compétition. Mais<br />

j’ai évolué, et aujourd’hui, mon style<br />

de prédilection est la house dance.<br />

Que s’est-il passé entre ces premiers<br />

battles et aujourd’hui ?<br />

Je me suis lassée du côté rentrededans<br />

du break. Même si ça fait<br />

partie de cette culture, je n’étais pas<br />

vraiment épanouie. Alors je me suis<br />

investie dans la danse hip-hop, mais<br />

je n’avais pas encore la flamme.<br />

Quand j’ai découvert la house dance,<br />

j’ai rencontré une culture différente,<br />

née dans les clubs, là où les gens<br />

sont eux-mêmes, où ils ont juste<br />

envie de danser, de partager. Ils<br />

sont dans une bonne vibe. La<br />

musique te parle, elle est redondante,<br />

elle t’emmène vers le haut.<br />

Danser pour soi vous semblait plus<br />

épanouissant que contre un autre ?<br />

À la base, la house n’est pas un mode<br />

de battle, mais d’échange : montremoi<br />

ce que tu as, et on échangera.<br />

Sa variété vous ressemblait plus ?<br />

La house est inspirée de plusieurs<br />

styles de danse : la salsa, les danses<br />

africaines… Tu peux même y mélanger<br />

du break, du hip-hop. Tu peux<br />

tout mélanger, c’est différent, plus<br />

libre, avec plus de feeling. J’y ajoute<br />

mon parcours personnel, je suis passée<br />

par plusieurs styles, le break, le<br />

hip-hop, le dancehall, l’afro également,<br />

naturellement, car je suis<br />

d’origine congolaise. (rires)<br />

S’adapter à tous ces genres et les<br />

mixer est-il difficile ?<br />

En tant que personne, j’ai une facilité<br />

à m’adapter aux gens et à ce qui<br />

m’entoure. Même quand il m’arrive<br />

quelque chose de négatif, je<br />

m’adapte, j’essaie de trouver une<br />

solution. Il y a toujours une solution<br />

THE RED BULLETIN 53


<strong>Red</strong> Bull<br />

Dance<br />

Your Style<br />

Finale mondiale<br />

à La Villette<br />

Le 12 octobre, à Paris, des<br />

danseurs et danseuses issus<br />

de qualifications dans plus<br />

de trente pays sont invités à<br />

s’affronter sur un dancefloor<br />

géant lors de la finale mondiale<br />

du <strong>Red</strong> Bull Dance Your Style.<br />

Dans ce battle de danse en<br />

un contre un, l’improvisation<br />

et l’interaction avec le public<br />

feront la différence, quels que<br />

soient leurs moves de prédilection.<br />

Champions de hip-hop,<br />

de locking ou de popping, ils<br />

devront rivaliser de style,<br />

d’inventivité et de personnalité,<br />

pour emporter les faveurs<br />

du public. Seule juge de cet<br />

événement, la foule désignera<br />

le gagnant ou la gagnante de<br />

chaque battle à l’aide d’un<br />

carton rouge ou bleu.<br />

Autre particularité du<br />

<strong>Red</strong> Bull Dance Your Style, les<br />

sons sur lesquels danseront les<br />

compétiteurs sont inattendus,<br />

de Beyoncé à Boney M en passant<br />

par Britney Spears ou<br />

Nirvana, des hits du moment<br />

ou des titres old school révélés<br />

au moment précis où le danseur<br />

entre dans son battle.<br />

La finale mondiale du<br />

samedi 12 octobre à la Grande<br />

Halle de La Villette sera précédée<br />

d’une soirée la veille, et<br />

d’une semaine d’activations<br />

autour de la danse (workshops,<br />

initiations, démos) organisées<br />

à La Villette et dans Paris.<br />

Billeterie et infos sur<br />

redbulldanceyourstyle.com<br />

à tout. C’est au niveau de l’état d’esprit<br />

que ça se passe. Si tu es ouvert<br />

d’esprit, curieux, tu as envie de<br />

t’exprimer dans plusieurs styles.<br />

C’est exactement le propos du<br />

<strong>Red</strong> Bull Dance Your Style, que<br />

vous avez emporté en Belgique<br />

l’an dernier. En quoi est-ce une<br />

compétition de danse particulière ?<br />

Déjà, les musiques sur lesquelles il<br />

faut danser sont commerciales.<br />

Dans un battle classique, tu peux<br />

tomber sur différentes variétés de<br />

musiques hip-hop, mais pas sur<br />

Beyoncé, Justin Timberlake ou<br />

Michael Jackson.<br />

Leurs chansons sont hyper<br />

connues, il doit donc être facile<br />

de s’adapter à des musiques que<br />

l’on connaît déjà quasi par cœur ?<br />

Ça parait facile, mais ça ne l’est pas<br />

du tout. Quand tu connais bien une<br />

musique, tu as envie d’être hyper<br />

musicale dans ta danse, du coup,<br />

tu peux te perdre dans ton passage.<br />

Si tu es trop en mode stratégie, en<br />

mode : « Je vais mettre ça pour<br />

impressionner », tu n’es pas bien.<br />

Au Dance Your Style, il ne faut pas<br />

trop lancer de cartouches, de tricks,<br />

il faut vraiment penser à s’amuser.<br />

Parce que quand tu t’amuses, ton<br />

corps est bien, et tu fais de bons passages.<br />

Il faut d’abord s’amuser soimême,<br />

et amuser le public. C’est<br />

ça le plus compliqué.<br />

Si l’on prend un Beyoncé, dont<br />

vous connaissez bien les parties<br />

plus instrumentales ou vocales, il<br />

faut éviter « d’organiser » sa danse<br />

sur toutes ses structures ?<br />

En fait, c’est un mix de deux choses.<br />

Dans les battles, c’est 80 % de feeling<br />

et 20 % de préparation. Quand je<br />

parle de préparation, il s’agit de<br />

séquences que tu connais par cœur,<br />

que tu vas placer sur le son. Mais si<br />

tu es trop dans un calcul, à 100 %, ça<br />

« Si tu penses<br />

à ce que vont<br />

penser les gens,<br />

tu vas te bloquer. »<br />

ne marchera pas. Le feeling, c’est<br />

inexplicable, et quand la musique va<br />

faire « boom ! », quelque chose va sortir<br />

à ce moment-là. En fait, la stratégie<br />

c’est de ne pas être trop dans le<br />

calcul, car tu ne sais jamais sur quelle<br />

musique tu vas tomber.<br />

Quand la musique commence,<br />

quelle qu’elle soit, qu’est-ce qui se<br />

passe dans votre tête ?<br />

Je rentre immédiatement dans un<br />

personnage. L’an passé, j’étais habillée<br />

en mode arts martiaux, ambiance<br />

asiatique, avec une tenue ample<br />

orange. Là, je joue à la fois sur ma<br />

féminité et ma masculinité. Sur un<br />

Beyoncé par exemple, je vais plus<br />

aller vers mon côté féminin, si c’est<br />

Nirvana, j’irais plus vers le masculin,<br />

mais toujours dans ce délire d’art<br />

martial. Je garde la même souche<br />

de personnage, que je diversifie.<br />

Est-ce que la danse est un bon<br />

moyen d’assumer tous les traits<br />

de notre personnalité ?<br />

Si tu es un danseur homme face à<br />

une fille, et si tu sais montrer un côté<br />

féminin fort, il n’y a pas de gêne,<br />

c’est un plus pour toi. Si tu penses<br />

à ce que vont penser les gens, tu te<br />

bloques, tu ne pourras pas te libérer.<br />

Cela fait-il encore le lien avec ces<br />

clubs où des gens de tous horizons<br />

et toutes orientations sexuelles ont<br />

trouvé un terrain d’expression en<br />

dansant sur la house ?<br />

C’est ça, il n’y a pas de jugement, juste<br />

de la bienveillance et du partage.<br />

Quand vous ne dansez pas, vous<br />

êtes une graphiste indépendante.<br />

Est-ce aussi un moyen de libérer<br />

votre créativité, et tous les aspects<br />

de votre personnalité ?<br />

C’est très important, car si tu fais de<br />

la danse tout le temps, tu es comme<br />

coincée dans une bulle. Le graphisme<br />

est aussi une forme d’art qui m’inspire.<br />

Je me sers de la danse pour<br />

inspirer mon graphisme, et du graphisme<br />

pour inspirer ma danse. C’est<br />

un plus.<br />

La danse est-elle graphique ?<br />

Durant le shooting photo d’hier avec<br />

Little Shao, certaines pauses, certains<br />

54 THE RED BULLETIN


« Il faut d’abord<br />

s’amuser soi-même,<br />

et amuser le public.<br />

C’est ça le plus<br />

compliqué. »<br />

THE RED BULLETIN 55


« Si dans ton visage<br />

et dans ce que<br />

tu dégages, il n’y<br />

a rien, c’est nul. »<br />

Dans un concours<br />

de danse, pour<br />

la Belge, le visage<br />

aussi a son rôle.


steps de danse qu’il a photographiés<br />

étaient clairement des formes, des<br />

choses qui peuvent m’inspirer en tant<br />

que graphiste. La silhouette d’un<br />

danseur devient un élément graphique<br />

que tu peux agrémenter<br />

d’autres formes ou de mots, comme<br />

je l’ai déjà fait pour réaliser un flyer,<br />

en me basant sur la silhouette d’une<br />

amie danseuse. Danse et graphisme<br />

se marient vraiment bien.<br />

Le graphisme est un média, un<br />

moyen de transmission, est-ce le<br />

cas également avec la danse ? Comment<br />

connectez-vous avec le<br />

public ? Est-ce que le public peut<br />

aider à remporter la compétition ?<br />

Je joue tout le temps avec le public.<br />

Quand tu danses trop pour toi-même,<br />

ton aura n’est pas libérée. L’aura, c’est<br />

super important. Tu peux faire un step<br />

de fou, mais si dans ton visage et dans<br />

ce que tu dégages, il n’y a rien, c’est<br />

nul. Que le public soit connaisseur<br />

ou non, que les gens qui te regardent<br />

soient des danseurs ou non, ça se<br />

ressent. Ce que tu vas dégager, mais<br />

aussi ressentir, accompagne le mouvement.<br />

Un danseur n’est pas là seulement<br />

pour balancer plein de trucs<br />

techniques, il doit aussi ressentir ce<br />

qu’il fait. C’est un tout. Et bien sûr,<br />

jouer avec le public, c’est aussi une<br />

stratégie pour t’assurer son adhésion<br />

car sur un format de compétition<br />

comme le <strong>Red</strong> Bull Dance Your Style,<br />

seul le public décide du gagnant.<br />

« Respire, et<br />

imagine que la<br />

personne en face<br />

de toi est nue. »<br />

Est-ce intéressant d’être « jugé » par<br />

le public, notamment par des gens<br />

qui ne sont pas des danseurs ?<br />

C’est une toute autre ambiance. Sur<br />

l’édition belge, je n’avais pas besoin<br />

de faire trop de trucs techniques pour<br />

que le public crie. Quand il voyait<br />

que je m’amusais, il s’amusait avec<br />

moi. C’est un vrai échange.<br />

Dans les fêtes ou dans les clubs,<br />

beaucoup de gens n’osent pas<br />

danser. Pourquoi devraient-ils<br />

se lancer ? Quelle philosophie<br />

pourriez-vous leur transmettre ?<br />

Quand on me dit : « Je n’ose pas trop<br />

danser, les gens vont me regarder »,<br />

je leur explique toujours qu’ils n’ont<br />

rien à perdre. Si tu kiffes la musique,<br />

danse ! Tu ne vas pas perdre mille<br />

euros, tu as tout à gagner. On ne sait<br />

pas ce qu’il va arriver demain, alors<br />

profitons du moment présent, et le<br />

regard des gens, on s’en fout !<br />

Tous styles<br />

confondus<br />

Ces participants sont particulièrement<br />

attendus sur la finale mondiale<br />

du <strong>Red</strong> Bull Dance Your Style.<br />

Angyil (USA) Popping<br />

L’Américaine a débuté par la danse classique.<br />

Guerrière réputée dans les battles, elle<br />

développe une énergie sans limite.<br />

Maika (Japon) Hip-Hop<br />

La jeune danseuse a remporté le Juste Debout<br />

2016 à Paris, en duo avec sa camarade Kyoka.<br />

C’est cet évènement d’envergure qui l’a révélée<br />

à la planète danse.<br />

Jaja (Tchéquie) Krump/Robot<br />

Mavinga dit d’elle que son aura est « sale »,<br />

qu’elle est hyper forte. Au <strong>Red</strong> Bull Dance Your<br />

Style, saura-t-elle interagir avec le public pour<br />

emporter son adhésion ?<br />

Salah (France) Popping<br />

« Il est dans le même délire que moi, il sait tout<br />

faire, dit Mavinga à propos de Salah (avec la<br />

danseuse sur la photo-ci contre). Il a un visage<br />

très expressif, il sait amuser le public, ça va<br />

être un adversaire chaud. »<br />

Tebza (Afrique du Sud) Pantsula<br />

Avec le Pantsula, une danse de Johannesbourg,<br />

Tebza a été révélé sur l’édition du <strong>Red</strong> Bull<br />

Dance Your Style Afrique du Sud l’an dernier.<br />

Il est réputé pour sa dextérité et sa précision.<br />

Blondy (France) Popping<br />

Malgré une carrière copieuse, vous trouverez<br />

encore Blondy dans les rues de Paris, réalisant<br />

des performances de danse qui mettent systématiquement<br />

le public en feu.<br />

Cette confiance en vous, développée<br />

tout au long de votre carrière,<br />

comment la transmettre aux personnes<br />

plus timides, peu sûres<br />

d’elles ?<br />

Il faut savoir qu’à la base, j’étais moimême<br />

quelqu’un de très timide, qui<br />

ne parlait pas du tout. Faire ce que<br />

nous faisons en ce moment, une<br />

interview, il y a quelques années, ça<br />

aurait été impossible. Je n’aurais pas<br />

pu parler. Avant, on disait que j’étais<br />

bizarre. (rires) En fait, j’étais trop<br />

timide. Par contre, quand je dansais<br />

c’était autre chose. Ce que je pourrais<br />

conseiller aux gens qui sont bloqués,<br />

c’est de se forcer. Respire, et imagine<br />

que la personne en face de toi est<br />

nue. Il faut imaginer une situation<br />

qui te mette à l’aise. Force-toi.<br />

Vous avez appris à vous ouvrir, à<br />

être plus à l’aise, grâce à la danse ?<br />

J’ai appris dans tout. En échangeant<br />

avec les gens, en voyageant, en prenant<br />

des cours de danse, en donnant<br />

des cours moi-même. C’est un tout.<br />

Le plus dur, c’est d’essayer, de sortir<br />

de ta situation. Et le pire, c’est de ne<br />

pas essayer. Que ça marche ou non,<br />

au moins tu l’auras fait, et tu passeras<br />

à autre chose.<br />

Instagram : @s.mavinga<br />

THE RED BULLETIN 57


Aux yeux de ces kids, il<br />

est Superbruni. Aux Gets<br />

le 13 juillet dernier, le<br />

champion du monde de<br />

VTT descente Loïc Bruni<br />

dédie du temps à ses<br />

fans. Son parcours<br />

n’aurait pas été le même<br />

sans ses supporteurs.


FANS<br />

FACTOR<br />

Texte<br />

PIERRE-HENRI CAMY<br />

Photos<br />

TEDDY MORELLEC<br />

59


Superbruni… Le Pape de la descente…<br />

Sur le circuit international du VTT DH,<br />

Loïc Bruni n’est pas réputé que pour<br />

ses surnoms, son engagement et ses<br />

titres (il est trois fois champion du<br />

monde de descente). Ses fans, nombreux,<br />

ont contribué à sa carrière et l’ont<br />

installé comme un pilote à part. Nous nous<br />

sommes jetés parmi eux sur l’épreuve de<br />

Coupe du monde UCI de descente, aux<br />

Gets, en juillet dernier, et nous avons<br />

questionné ce Français de 25 ans sur<br />

l’impact de son public sur sa performance.<br />

<strong>The</strong> red bulletin :<br />

Loïc, parmi les<br />

pilotes de VTT<br />

descente de haut<br />

niveau, vous<br />

drainez l’une des<br />

fanbases les plus<br />

copieuses et motivées.<br />

Comment<br />

avez-vous réussi à<br />

fédérer cette foule autour de vous ?<br />

loïc bruni : Je ne sais pas si ma<br />

base de fan est plus vaste ou plus<br />

folle que celle d’autres pilotes, mais<br />

je sais que les fans français aiment<br />

bien se démarquer, se déguiser, faire<br />

des pancartes, faire du bruit au max,<br />

ce qui donne cette impression de<br />

folie quand on roule. S’ils sont là,<br />

je pense que c’est parce que depuis<br />

le début, je suis resté assez disponible<br />

pour les gens, j’ai essayé de leur<br />

répondre sur les réseaux sociaux,<br />

de faire des photos sur les courses<br />

avec eux, de toujours être là pour<br />

eux. Rencontrer un pilote, c’est<br />

toujours une grande opportunité<br />

pour le public.<br />

Voir très rarement vos fans, en<br />

vrai, entretiendrait leur passion<br />

pour votre performance ?<br />

Le fait de ne se voir que sur quelques<br />

rares moments de l’année préserve<br />

le côté unique de ces instants de<br />

rencontre et d’échange. Et quand<br />

on est sur la piste, on passe à 40 ou<br />

50 km/h, donc ils nous voient trois<br />

secondes. Tout est intense, il faut<br />

en profiter à chaque moment.<br />

Comment vous comportez vous<br />

dans ces moments rares ?<br />

J’essaie toujours d’être à la hauteur<br />

de leurs attentes, dans la mesure du<br />

Si l’on fait le compte des épreuves<br />

de descente auxquelles vous participez<br />

sur une saison, les chances<br />

de vous rencontrer physiquement<br />

sont finalement très limitées.<br />

Cela représente quoi ?<br />

Ça doit représenter à peu près un<br />

mois sur la saison, ce qui n’est vraiment<br />

pas beaucoup. Ça reste donc des<br />

moments privilégiés. Mais finalement,<br />

quand tu vois trop quelqu’un que tu<br />

suis, ou que tu le connais trop, probablement<br />

que cela te fait moins rêver.<br />

60 THE RED BULLETIN


Ci-dessus : les sentiers de la gloire. Page de gauche : sur une compétition de descente,<br />

le spectacle est aussi côté public. Ci-contre : autographe dans les paddocks pour un fan heureux.<br />

possible. Après, côté résultat, c’est<br />

parfois en dents de scie, mais en<br />

France, j’ai souvent bien roulé. Et<br />

puis, surtout, mon « histoire » est belle<br />

car les dernières années n’ont jamais<br />

été faciles : des blessures, des retours<br />

de blessure fracassants, des blessures<br />

à nouveau, des galères… Ça n’a jamais<br />

été tout beau ni tout rose.<br />

Cela a contribué à souder ce<br />

public, fidèle, autour de vous ?<br />

Je pense qu’à travers mes galères,<br />

les gens ont pu s’identifier, et quand<br />

j’arrivais à faire péter c’était encore<br />

plus beau. C’est peut-être ça aussi<br />

qui a créé cette adhésion des fans.<br />

C’est comme dans un film : si tout<br />

le monde est heureux, ou si tout le<br />

monde meurt, tu te fais chier. (rires)<br />

Pour les fans, c’est bien quand il y a<br />

des rebondissements, des moments<br />

de galère où c’est la merde, et<br />

d’autres où c’est l’extase. Les gens ont<br />

aimé me suivre, et j’ai l’impression de<br />

les avoir emmenés avec moi. Quand<br />

je suis revenu de blessures et que j’ai<br />

gagné les championnats du monde<br />

en Australie, ils se sont levés à je ne<br />

sais quelle heure pour regarder cette<br />

THE RED BULLETIN 61


course. Et contrairement aux réseaux<br />

sociaux où c’est orienté « chasse aux<br />

followers, chasse à l’engagement »,<br />

ce qui est un peu relou à mes yeux,<br />

dans ces moments de course, tu fais<br />

tout spontanément, et tu ne peux pas<br />

contrôler si le public va t’aimer ou<br />

pas. Que des fans aient accroché à<br />

mon parcours et à mon team, c’est<br />

vraiment cool.<br />

Un pilote spontané, qui rebondit,<br />

s’acharne, qui n’est pas en quête<br />

du like sur les réseaux : c’est tout<br />

ça qui attire les gens vers vous ?<br />

C’est dur à expliquer par A + B…<br />

Je ne sais pas te dire… Je n’ai jamais<br />

fait dans la langue de bois, j’ai toujours<br />

dit ce que je pensais, même si<br />

certains n’ont pas kiffé, et j’ai été apprécié<br />

pour dire le fond de ma pensée.<br />

Je suis assez simple comme gars,<br />

normal, alors quand quelqu’un vient<br />

me voir pour une photo ou autre sur<br />

une course, je tchatche avec lui et<br />

il en garde un bon souvenir. Ça le<br />

motive à me soutenir. Aussi, avec les<br />

sponsors, on fait attention à l’image<br />

que l’on transmet. On prend soin de<br />

nos tenues, de nos casques, de nos<br />

vélos… Tout cela fait rêver les gens,<br />

et contribue à entretenir une belle<br />

image de la descente, nickel.<br />

Être très soutenu peut-être néfaste<br />

pour la performance en course ?<br />

Ça peut l’être, parfois, quand tu te<br />

laisses emporter par les compliments.<br />

Les gens te mettent un peu sur un<br />

piédestal et tu ne te sens plus. Tu<br />

pars faire un run et tu roules à fond,<br />

ton ego est boosté, au taquet, ça<br />

déborde de partout, et au premier<br />

virage, tu te la colles… Il faut donc<br />

faire gaffe !<br />

Comment éviter de prendre trop de<br />

risques à trop vouloir satisfaire ses<br />

fans ?<br />

Aux Gets, cette année, plusieurs fois,<br />

je me suis calmé, je me suis mis à<br />

souffler, à tout relâcher. Quand les<br />

gens te sautent dessus, quand tu en<br />

Les épreuves de DH sont réputées pour leur ambiance survoltée, certains fans<br />

français s’y pointent avec des tronçonneuses customisées au bruit assourdissant.<br />

as 20, 25 sur toi en une seconde, en<br />

mode : « Allez Loïc, allez Loïc, tu vas<br />

gagner, tu roules trop bien ! », là ton<br />

ego et ta confiance prennent un coup<br />

de boost qui peut être too much.<br />

Vous avez dit avoir abordé cette<br />

descente de manière plus « intelligente<br />

». Honorer vos fans peut<br />

aussi vouloir dire ne pas aller trop<br />

vite, trop à fond, être plus stratégique<br />

que fulgurant ?<br />

Les années précédentes, aux Gets,<br />

je me mettais un peu le feu, au bord<br />

de la piste et en course. Je roulais<br />

un poil au-dessus de mes pompes, à<br />

cause du bruit, de l’euphorie, de tous<br />

62 THE RED BULLETIN


Champion du monde<br />

juniors en 2012 et<br />

trois fois en élites<br />

(2015, 2017 et 2018),<br />

Loïc est l’un des boss<br />

de la planète DH.<br />

« Pour les fans, c’est<br />

bien quand il y a des<br />

rebondissements,<br />

des moments de<br />

galère où c’est la<br />

merde, et d’autres où<br />

c’est l’extase. »


« En Australie, en<br />

2017, il y avait toute<br />

cette foule qui gueulait,<br />

qui gueulait,<br />

qui gueulait… alors<br />

je me suis arraché<br />

comme jamais sur<br />

le sprint final, et j’ai<br />

gagné la course ! »<br />

Aux Gets, après un<br />

départ à 1 719 mètres<br />

d’altitude, Loïc défie<br />

le chrono sur 2 300<br />

mètres et un dénivelé<br />

négatif de 550.


les gens qui sont présents et qui te<br />

soutiennent. Il m’est arrivé de me<br />

mettre un peu la pression, sans forcément<br />

tomber. Je savais que cette<br />

année, aux Gets, ça allait être blindé,<br />

un truc de malade, du coup, j’ai<br />

essayé de gérer.<br />

C’est-à-dire ?<br />

J’ai essayé d’avoir des créneaux de<br />

disponibilité pour signer des autographes<br />

et faire des photos avec le<br />

public. Et d’autres où je restais<br />

concentré sur mon week-end de<br />

course. J’ai l’impression que je n’arrive<br />

plus trop à faire les deux : être<br />

dispo pour les fans tout le temps,<br />

toute la journée, et faire une bonne<br />

course. J’ai donc essayé de canaliser<br />

les deux trucs, et de garder un pied<br />

dans la course.<br />

Concrètement, pendant la course,<br />

avec la foule qui vous soutient,<br />

comment faites-vous pour ne pas<br />

« déborder » ?<br />

Sur mon run final, les gens sur le<br />

bord étaient en folie, il y avait beaucoup<br />

de bruit. En tant que pilote, tu<br />

« Rencontrer<br />

son public,<br />

ça reste des<br />

moments<br />

privilégiés. »<br />

sentais qu’il se passait quelque chose<br />

de fort. J’en mettais, je roulais bien,<br />

mais dans un coin de ma tête, j’avais<br />

toujours la petite voix du classement<br />

général de la Coupe du monde qui<br />

me disait : « N’en met pas trop non<br />

plus… » J’ai donc essayé de ne pas<br />

partir à la faute, mais j’ai vraiment<br />

kiffé. J’étais concentré, mais j’arrivais<br />

à profiter du moment, des gens qui<br />

hurlaient. Arrivé en bas, je savais que<br />

mon run était bon, sans être fou. Je<br />

n’ai pas roulé pour gagner, mais pour<br />

marquer des points. Même si j’aurais<br />

kiffé l’emporter aux Gets avec tout ce<br />

monde qu’il y avait.<br />

Ne pas rouler trop à fond pour<br />

préserver une place en tête du<br />

classement général, ça ne doit pas<br />

être facile à assumer en tant que<br />

descendeur pro… Votre but, c’est<br />

bien d’être le plus rapide ?<br />

Je ne regrette rien, car si j’avais plus<br />

attaqué et que j’étais tombé, ça m’aurait<br />

coûté cher. C’est la première fois<br />

que j’avais une aussi bonne position<br />

au classement général, et avec mon<br />

team, on a pas mal discuté de la manière<br />

de marquer des points au général,<br />

tout en roulant bien. En plus,<br />

c’est un Français, Amaury Pierron,<br />

qui a gagné, et un autre Français,<br />

Loris Vergier, a terminé cinquième.<br />

Le public était au rendez-vous et<br />

nous aussi, je suis content.<br />

Les fans vous ont-ils déjà permis<br />

de vous dépasser, vous ont-ils fait<br />

passer dans une dimension supérieure<br />

de performance ?<br />

Oui, la première fois où j’ai roulé à<br />

Lourdes, en 2015. Il y avait un monde<br />

de fou, tout le week-end, ça nous a<br />

porté. On roulait presque sur eux,<br />

pour ainsi dire. On a toujours eu des<br />

fans, mais là, c’était la première fois<br />

de ma vie où je me sentais « connu ».<br />

Ça criait dans tous les sens, et dans<br />

les sections dans les bois, ça résonnait,<br />

c’était fou.<br />

« Make dowhnill great again », indique le panneau qui attend Loïc en bas de la piste. Son run<br />

final à peine terminé, il se tourne vers les panneaux de temps pour connaître son classement.<br />

À l’inverse, le bruit du public peutil<br />

perturber un pilote de descente ?<br />

Ça peut surprendre, car dans le haut<br />

du parcours, tu enchaînes des parties<br />

dans des sections calmes, et puis d’un<br />

coup, vers la fin, le bas, là où tous<br />

les gens sont concentrés, tu as toute<br />

cette foule amassée sur le bord…<br />

Baaaaah ! Ça fait un choc, ça met un<br />

coup d’adrénaline, mais si tu es bien<br />

concentré, bien dans ta course, ça va.<br />

C’est une fois arrivé en bas, quand tu<br />

THE RED BULLETIN 65


« Quand tout<br />

va bien et que ça<br />

soude, c’est la<br />

meilleure version<br />

de moi : c’est là<br />

que Superbruni<br />

est de sortie. »<br />

Avec Hugo, un fan acharné, et son<br />

père au short camo, Bruno. Ils ont<br />

créé ce portrait de Loïc « trumpisé »<br />

pour le soutenir. Mode second degré.


J’ai kiffé la pancarte, et je les ai kiffés<br />

aussi, parc qu’ils étaient grave sympas.<br />

Superbruni est né à ce moment-là.<br />

Quand je dis « when it goes well »,<br />

c’est quand tout va bien et que ça<br />

soude. C’est la meilleure version de<br />

moi-même : c’est là que Superbruni<br />

est de sortie. D’autres jours, c’est<br />

moins le cas. (rires)<br />

Loïc termine deuxième de l’épreuve des Gets mais se maintient en tête du classement<br />

général de la Coupe du monde. Avec deux Français sur le podium, le champagne s’impose.<br />

L’année suivante, on aussi vu<br />

un panneau « Bruni : 1st Pope of<br />

Downhill » (Bruni 1er : le pape<br />

de la descente, ndlr), les mêmes<br />

fans étaient encore à l’origine<br />

du délire ?<br />

Oui, comme pour Superbruni, il<br />

s’agit de Bruno Vallat et de son fils,<br />

Hugo. Ils ont aussi fait un panneau<br />

parodiant une pub Kinder, et un<br />

autre où je porte une coupe nuquelongue,<br />

un mulet, comme dans les<br />

années 80. (rires)<br />

te retournes que tu te dis : « Putain,<br />

à partir de là, il y avait un monde ! »<br />

À Cairns, en Australie, en 2017, il y<br />

avait toute cette foule qui gueulait,<br />

qui gueulait, qui gueulait… alors je<br />

me suis arraché comme jamais sur le<br />

sprint final, et j’ai gagné la course !<br />

C’était fou !<br />

À l’inverse, est-ce que vos fans<br />

vous ont déjà mis en difficulté ?<br />

Pas vraiment. Pas dans la course à<br />

proprement parler. Parfois c’est plus<br />

des à-côtés, des gens qui insistent<br />

un peu, qui te demandent de leur<br />

donner un truc, ton matos. Tu leur<br />

réponds gentiment que tu ne peux<br />

pas, alors ils te demandent un autre<br />

truc. (rires)<br />

Qu’est-ce que vos supporteurs<br />

vous demandent le plus ?<br />

Souvent, c’est le maillot. Des maillots,<br />

on en a très peu, et si on en<br />

donne, c’est aux amis, ou aux sponsors.<br />

Ou bien à des associations. Les<br />

gens ne comprennent pas forcément<br />

qu’on ne puisse pas donner nos<br />

lunettes, notre casque ou notre<br />

casquette. En soirée aussi, ça peut<br />

être chiant. (rires)<br />

Même si certains insistent parfois,<br />

est-ce que dans les moments de<br />

galère, de blessure, vos fans vous<br />

donnent de la motivation et du<br />

courage ?<br />

Quand tu es en galère côté résultat ou<br />

blessure, et que tu reçois des<br />

messages sur tes photos, que les mecs<br />

te répondent, te mettent du positif<br />

dans ton quotidien, ça fait du bien.<br />

Avec de bonnes hormones, ton cerveau<br />

marche bien, alors tout ça, c’est<br />

sûr, c’est du bon. Même si tu ne<br />

connais pas ces gens, même si tu ne<br />

les as jamais rencontrés, ils te font<br />

passer un message, ils te donnent<br />

l’impression d’être important et d’être<br />

bon, parce qu’ils te soutiennent. C’est<br />

toujours appréciable.<br />

Une nouvelle fois, cette année,<br />

aux Gets, on a pu voir des kids qui<br />

portaient des T-shirts « Superbruni<br />

» et sur votre compte Instagram,<br />

vous indiquez « Superbruni, when<br />

it goes well ». D’où est venu ce<br />

surnom et quand vous transformez-vous<br />

en Superbruni ?<br />

Superbruni, je crois que c’est parti<br />

d’un concours pour gagner une de<br />

mes tenues. Il fallait créer un visuel<br />

de pancarte stylé et la mettre sur un<br />

site Internet. Des gars qui avaient mis<br />

une création Superbruni sur le site<br />

l’ont carrément imprimée et sont<br />

venus avec sur la course de Lourdes.<br />

« Cette année, aux Gets,<br />

je savais que ça allait<br />

être blindé, un truc de<br />

malade, du coup, j’ai<br />

essayé de gérer. »<br />

Ils s’étaient préparés pour Les Gets<br />

cette année ?<br />

Carrément ! Ils avaient fait un panneau<br />

où ils m’ont photoshopé sur<br />

la gueule de Trump, avec marqué<br />

« Make downhill great again ». (rires)<br />

À chaque fois, c’est eux. C’est un bon<br />

délire, on rigole bien ensemble.<br />

Ce côté autodérision affiché et assumé,<br />

c’est important pour vous ?<br />

C’est clair, il n’y a rien de sérieux<br />

là-dedans, c’est juste pour le kiff. Ça<br />

motive plein de gens à faire des photos,<br />

des panneaux, je trouve ça cool.<br />

Est-ce que vous êtes vous-même<br />

fan d’un sportif, d’un artiste ou<br />

d’un acteur, que vous suivez sur les<br />

réseaux, à qui vous adressez des<br />

commentaires ?<br />

Je suis beaucoup le moto GP et le<br />

motocross aux US. J’aime bien commenter<br />

quand il se passe un truc.<br />

Quand je vois que le mec galère, si je<br />

pense à quelque chose de positif à lui<br />

adresser, je le fais. Parce que je sais<br />

à quel point c’est cool de recevoir des<br />

messages de la sorte.<br />

Instagram : @loicbruni29<br />

THE RED BULLETIN 67


Apparu il y a 2 000 ans,<br />

le sumo est encore le sport<br />

national au Japon, mais<br />

sa maîtrise a dépassé ses<br />

frontières. De nouveaux<br />

concurrents planétaires<br />

font leur apparition, et<br />

forcent les Japonais à<br />

redoubler d’efforts pour<br />

rester au top. En témoigne<br />

la plus grande compétition<br />

organisée en dehors du<br />

Japon : l’US Sumo Open.<br />

Texte TOM WARD<br />

Photos JEREMY LIEBMAN<br />

C’est<br />

du<br />

lourd<br />

68 THE RED BULLETIN


Byambajav Ulambayar<br />

est un géant du sumo à<br />

plus d’un titre : l’ancien<br />

professionnel mongol<br />

a remporté l’US Sumo<br />

Open dix fois depuis<br />

2007, dans la catégorie<br />

poids lourds.


« Le sumo, c’est un peu<br />

comme la lutte<br />

professionnelle américaine :<br />

un vrai spectacle. »<br />

Le 19 e US Sumo Open, le plus grand tournoi de sumo organisé en<br />

dehors du Japon, a attiré près de 5 000 spectateurs et 64 lutteurs<br />

internationaux à la Walter Pyramid de Long Beach (Californie).<br />

71


Le Norvégien Henning<br />

Westerby tente de faire<br />

sortir du ring l’Américain<br />

Robert Fuimaono, reconnaissable<br />

à son tatouage<br />

« Bulldozer ».


Le sumo mêle héritage<br />

et réinvention pour<br />

satisfaire les attentes<br />

d’un public plus large<br />

et international.<br />

Hiroki Sumi domine la compétition.<br />

En 2018, le lutteur de sumo japonais<br />

a été la grande surprise du WWE<br />

Greatest Royal Rumble, une compétition<br />

de catch organisée en Arabie<br />

saoudite, pendant laquelle se sont<br />

affrontés cinquante hommes.<br />

Sumi repose ses 220 kg.<br />

Il est l’un des sumos les plus<br />

lourds de la competition.<br />

73


Tout en haut des gradins, les trois lutteurs de<br />

sumo qui se mettent en position sur le terrain<br />

de basket-ball ressemblent à de gros ballons de<br />

plage en cuir. C’est une comparaison assez inhabituelle.<br />

Mais après tout, on est en Californie,<br />

et plus précisément dans le stade de l’université<br />

d’État de Californie (California State University)<br />

à Long Beach. La Walter Pyramid compte 4 000<br />

places et accueille les équipes de basket-ball et<br />

d’athlétisme des 49ers de Long Beach State.<br />

L’intérieur de la salle est tapissé de bannières noir et or sur lesquelles<br />

on peut lire : « Go Beach ». Il y a un stand de pop-corn et<br />

des vendeurs proposent des hot-dogs et des sodas XXL.<br />

Dans ce lieu aussi américain que peut l’être l’apple pie, deux<br />

lutteurs japonais et un lutteur mongol ne passent pas inaperçus<br />

lorsqu’ils s’échauffent sur le parquet lustré du terrain de basket.<br />

Les trois athlètes sont Byambajav Ulambayar, un Mongol de<br />

1,84 mètre et ancien lutteur de sumo professionnel ; Hiroki Sumi,<br />

un Japonais de 1,92 mètre ; et, avec son modeste 1,70 mètre,<br />

Takeshi Amitani, quintuple champion japonais universitaire. En<br />

cet après-midi de la mi-mars, ils sont venus pour le 19 e US Sumo<br />

Open annuel, le plus grand tournoi de sumo organisé en dehors<br />

du Japon. Tous les participants réunis ont récolté 18 titres de<br />

champion du monde de sumo et viennent de pays aussi lointains<br />

que le Japon, la Mongolie, l’Inde, l’Égypte, le Tadjikistan, la<br />

Géorgie, l’Ukraine, la Norvège ou l’Allemagne.<br />

Surprenant ? Pas vraiment. Plus que tout autre sport, le sumo<br />

est l’objet d’une tradition en pleine mutation. Au Japon, les meilleurs<br />

lutteurs sont régulièrement battus par de nouveaux concurrents<br />

venus de Russie, de Mongolie et d’Ukraine. En effet, ces<br />

pays ont adopté avec enthousiasme le sport national japonais<br />

et ont entrepris de le dominer.<br />

Cela vaut son pesant d’or<br />

Deux jours avant le début du 19 e US Sumo Open, dans la Walter<br />

Pyramid, nous retrouvons quelques-uns des plus célèbres compétiteurs<br />

à la pesée. Byambajav Ulambayar, l’ancien lutteur de<br />

sumo professionnel de 35 ans, affiche 161 kg sur la balance.<br />

« Je n’ai que la peau sur les os », plaisante-t-il.<br />

Alors que Byambajav Ulambayar revêt son peignoir violet aux<br />

motifs floraux et déambule avec la prestance d’un roi, Hiroki<br />

Sumi, 29 ans, saisit son ventre rebondi à pleines mains et grimpe<br />

sur la balance. Avec ses 220 kg, c’est l’un des lutteurs les plus<br />

lourds de la compétition. Quant à Takeshi Amitani, 26 ans et<br />

100 kg, il entre parfaitement dans la catégorie poids moyens.<br />

Pendant que Byambajav Ulambayar tente de marquer un<br />

panier avec une serviette roulée en boule, Takeshi Amitani et<br />

Hiroki Sumi forment un duo à la Laurel et Hardy, le premier<br />

traduisant nos questions à son collègue bien plus grand que lui.<br />

Affichant un éternel sourire, Hiroki Sumi, qui a combattu en<br />

2018 lors de l’un des plus grands événements de la WWE, le<br />

Greatest Royal Rumble, ressemble à une version japonaise de<br />

Dustin dans Stranger Things, la série Netflix.<br />

« Je m’entraîne très dur », raconte Hiroki Sumi par l’intermédiaire<br />

de Takeshi Amitani, un apollon musclé aux cheveux lissés<br />

vers l’arrière, une oreille gauche en chou-fleur et un œil en partie<br />

fermé à cause d’une blessure. « Je soulève 90 kg sur le banc,<br />

60 kg aux épaules et 140 kg aux jambes. » Sumi reproduit les<br />

mouvements tout en parlant, et ses membres, impressionnants,<br />

se contractent.<br />

Il montre son genou droit lézardé d’une méchante cicatrice<br />

rouge et boursouflée. Le prix à payer pour ses journées passées<br />

à soulever des poids et faire des squats.<br />

La routine de Takeshi Amitani est plus ou moins la même.<br />

Lorsqu’il était à l’université, il a voulu prendre de la masse<br />

74 THE RED BULLETIN


Les Ukrainiens se<br />

montrent performants<br />

dans le sumo moderne.<br />

Ici, les compatriotes<br />

Demid Karachenko et le<br />

futur vainqueur Sviatoslav<br />

Semykras s’affrontent<br />

lors de la finale hommes<br />

en poids légers.<br />

musculaire. Il a donc suivi un régime à base de sushis, de rāmen<br />

et du plat de base des lutteurs de sumo, le chankonabe, un<br />

ragoût assez sain et bourré de protéines (poulet, tofu, boulettes<br />

de viande ou poisson), ainsi que du riz gluant ou des nouilles, et<br />

des légumes (bok choy, champignons, daikon ou radis blanc et<br />

carottes), pour se forger un corps d’athlète. Officiant à présent<br />

dans la catégorie poids moyens, il a ajouté la course à pied à son<br />

hygiène de vie.<br />

Hier soir, les trois lutteurs de sumo ont profité d’un barbecue<br />

à l’hôtel. « Nous avons mangé entre 5 et 6 kg de viande », s’amuse<br />

Byambajav Ulambayar. Pour se bâtir le corps d’un lutteur de haut<br />

niveau, les homologues de Byambajav Ulambayar doivent<br />

enfourner des quantités astronomiques de ce ragoût chaque jour.<br />

Le dîner est plus léger et peut se composer de maquereau frit, de<br />

« Il est autorisé de gifler<br />

ou faire des balayettes.<br />

Pas de donner des coups<br />

ni de tirer les cheveux. »<br />

THE RED BULLETIN 75


Les Russes, Mongols ou<br />

Ukrainiens terrassent<br />

fréquemment les top<br />

lutteurs japonais.<br />

nouilles et de salade. Et comme le sumo est un sport qui se pratique<br />

365 jours par an, sans saisons compétitives spécifiques,<br />

le régime des lutteurs professionnels ne change jamais.<br />

Tout cela entretient l’image occidentale typique d’un lutteur<br />

de sumo obèse mais musclé. De nombreux lutteurs, et notamment<br />

les concurrents ukrainiens, sont issus d’un milieu de lutte<br />

plus traditionnelle, mais les grandes stars de la discipline se<br />

doivent de gagner le plus de masse possible, non seulement pour<br />

faire le spectacle, mais aussi pour devenir des poids inamovibles.<br />

Plus vous êtes lourd, plus votre adversaire aura du mal à vous<br />

sortir du ring.<br />

S’entraîner avec des adversaires de plus de 160 kg facilite<br />

aussi la préparation des matches : essayez d’en arrêter un et vos<br />

jambes développeront rapidement la force nécessaire pour supporter<br />

leurs assauts sur le ring. Les lutteurs peuvent prendre tellement<br />

de poids qu’en 1994, une étude réalisée par des experts<br />

en sciences du sport issus de quatre universités tokyoïtes a pu<br />

déterminer la limite supérieure de masse corporelle non grasse<br />

chez l’être humain. D’après les résultats obtenus, le corps d’un<br />

lutteur de sumo moyen contient 26,1 % de graisse, tandis que le<br />

corps d’un bodybuilder en contient 10,9 %.<br />

Mais pour devenir lutteur de sumo professionnel, un appétit<br />

d’ogre ne suffit pas. Il faut se consacrer entièrement à son équipe<br />

de sumo au Japon et s’entraîner chaque jour pour espérer<br />

concourir au plus haut niveau. Tous les autres sont considérés<br />

comme des amateurs.<br />

Alors que Takeshi Amitani n’était encore qu’un apprenti au<br />

Japon, Hiroki Sumi et Byambajav Ulambayar luttaient déjà à un<br />

niveau professionnel. Aujourd’hui, tous trois vivent en Californie<br />

et représentent donc parfaitement leur sport en dehors du<br />

Japon. Depuis que le sumo est devenu sport olympique (bien<br />

qu’il ne soit pas au programme des JO de Tokyo 2020), ils sont<br />

de plus en plus sollicités.<br />

Lorsqu’il ne participe pas à une compétition, Takeshi Amitani<br />

enseigne dans un dohyō (ring) dans son quartier et réalise régulièrement<br />

des performances pour la télévision, contribue à des<br />

expositions et des conférences, tout comme Hiroki Sumi. Byambajav<br />

Ulambayar est lui venu aux États-Unis en 2007 pour faire<br />

une apparition dans le film Ocean’s 13, et il n’est jamais reparti.<br />

Mais l’US Sumo Open n’est pas une exposition comme les autres<br />

pour ces lutteurs. C’est aussi la compétition la plus prestigieuse<br />

en dehors du monde professionnel du sumo, et c’est un excellent<br />

moyen de garder la forme auprès des concurrents étrangers.<br />

Byambajav Ulambayar a atteint le haut du classement dans la<br />

catégorie poids lourds dix fois depuis 2007, tandis que Hiroki<br />

Sumi a remporté 234 matches pendant toute sa carrière professionnelle<br />

au Japon.<br />

« Le sumo est d’une grande simplicité, explique Hiroki Sumi<br />

au travers de Takeshi Amitani. De nombreuses personnes respectent<br />

l’art du sumo, et cela ne m’ennuie pas que des étrangers<br />

concourent. Le sumo est toujours un sport mineur, mais j’aimerais<br />

qu’il soit plus populaire. J’ai été professionnel pendant longtemps<br />

au Japon, mais je voulais montrer mes techniques à plus<br />

de gens. C’est pourquoi je suis venu en Amérique. »<br />

Le résident mongol, Byambajav Ulambayar, est un homme<br />

peu disert mais d’une grande sagesse. « J’adore mon sport, dit-il.<br />

En Amérique, c’est un sport en plein essor. Les concurrents sont<br />

de plus en plus forts et ils apprennent énormément. Je pense<br />

qu’ils respectent cette culture. Toutefois, il est difficile d’affronter<br />

des gars qui n’ont jamais été professionnels. Avec un profes-<br />

Andrew McKnight prépare sa<br />

ceinture de sumo, mawashi,<br />

pour son premier tournoi.<br />

Sa longueur varie : de cinq à<br />

six mètres pour les amateurs,<br />

jusqu’à dix mètres pour les pros.<br />

76 THE RED BULLETIN


L’Américain Jose Galindo<br />

se fait sortir en finale de<br />

la catégorie poids lourds.<br />

sionnel, vous connaissez tous les mouvements. Eux viennent de<br />

sports différents, comme le judo, et vous ne savez pas comment<br />

ils vont bouger. » Il hausse les épaules. « Mais je m’y ferai. »<br />

Reborn in the USA<br />

Si les anciens pros se sentent au top, il y a toute une flopée de<br />

lutteurs américains désireux de se faire un nom. Originaire de<br />

Californie, le poids léger Andrew McKnight est un gars nerveux<br />

qui ne tient pas en place. « J’ai toujours fait de la lutte, et le sumo<br />

est venu naturellement, raconte-t-il. Je pense que beaucoup de<br />

gars espèrent devenir boxeurs professionnel ou combattants de<br />

MMA, mais une fois que vous avez accepté le fait que cela n’arrivera<br />

jamais, c’est un bon compromis. »<br />

Ayant trouvé l’inspiration il y a environ un an, McKnight a<br />

construit son propre ring dans son jardin et pratique le sumo<br />

avec ses colocataires. Ce sera sa première compétition. « J’adore<br />

le côté traditionnel de ce sport, ajoute-t-il. Le sumo, c’est un peu<br />

comme la lutte professionnelle américaine : un vrai spectacle.<br />

C’est bon de voir un endroit où les traditions sont respectées,<br />

même si elles n’ont plus tellement de sens aujourd’hui. »<br />

Luttant dans la catégorie poids lourds, Jose Galindo a découvert<br />

le sumo en regardant une vidéo YouTube de Byambajav<br />

Ulambayar qui balayait son adversaire.<br />

Né et ayant grandi dans l’Utah et à Los Angeles, Jose Galindo<br />

était joueur de football semi-pro. Il exerce à présent le métier de<br />

chiropracteur et fait son apparition pour la pesée avec des traces<br />

rouges de ventouses sur tout le corps.<br />

Comme Andrew McKnight, ce sera sa première compétition.<br />

« J’ai commencé il y a un mois et demi », explique-t-il. Il a rempli<br />

le formulaire d’inscription et payé les 30 dollars de frais. Et<br />

voilà ! « C’est un baptême du feu », reconnaît Jose Galindo.<br />

Cependant, les concurrents américains ne sont pas tous des<br />

débutants. Le poids lourd Kelly Gneiting est une légende dans ce<br />

sport : il a remporté cinq fois le championnat des États-Unis.<br />

Avec ses 197 kg, il est arrivé dans cette discipline après avoir<br />

dépassé le poids de compétition maximal autorisé pour la lutte<br />

gréco-romaine. Âgé de 48 ans, il est le seul concurrent à avoir<br />

participé au tout premier US Sumo Open en 2001.<br />

« Les plus grandes vérités sont cachées, philosophe-t-il. Le<br />

sumo est le sport le plus dur au monde. C’est de la brutalité à<br />

l’état pur. » Pendant l’un de ses combats à Tokyo en 2004, il a pris<br />

une main dans l’œil. « Vous ne faites pas ça au sumo, dit-il.<br />

C’était comme si l’évier de la cuisine m’était tombé sur la tête.<br />

Des choses qu’on ne tolérerait pas aux États-Unis ou au<br />

Royaume-Uni sont parfaitement normales au Japon. » Selon lui,<br />

l’équipe japonaise adverse ne voulait pas d’un étranger dans son<br />

sport. Une attitude courante dans l’univers du sumo professionnel<br />

à cette époque, d’après lui. Il pense cependant que les Japonais<br />

ont appris à lâcher du lest au fil des ans.<br />

Andrew Freund est le fondateur et l’organisateur de l’US<br />

Sumo Open, et on voit en lui l’énergie frénétique des personnes<br />

privées de sommeil. Après avoir vécu au Japon au début des<br />

années 1990, Andrew Freund a commencé à organiser des tournois<br />

de sumo en Californie pour le fun, puis il a créé le premier<br />

THE RED BULLETIN 77


« Pour les Japonais,<br />

le sumo, c’est simple :<br />

peu importe la nationalité<br />

du vainqueur. »<br />

US Open en 2001. Selon lui, la moitié des concurrents sont généralement<br />

Américains. Les autres sont étrangers. Et 90 % du<br />

temps, ce sont les concurrents étrangers qui terminent sur le<br />

podium. « Les États-Unis sont un peu à la traîne dans le domaine<br />

du sumo amateur international », dit-il avec nonchalance.<br />

D’après Andrew Freund, la dichotomie entre le sumo japonais<br />

et le sumo non japonais n’est pas le plus grand élément de division<br />

dans ce sport. Le plus grand contraste se situe en effet entre<br />

le monde professionnel et le monde amateur. « Le sumo professionnel<br />

au Japon est une entité à part entière, ajoute-t-il. Lorsque<br />

vous entrez dans le monde du sumo professionnel, vous n’avez<br />

pas de métier, vous n’avez pas de vacances, et vous n’avez pas<br />

votre chez-vous. Vous voulez aller quelque part pour la journée ?<br />

Vous devez en parler à vos entraîneurs. La plupart de ces gars<br />

s’entraînent 365 jours par an. Ce n’est pas comme le football<br />

américain où vous jouez pendant trois ou quatre mois, puis<br />

profitez d’une saison de liberté. »<br />

Il explique que Byambajav Ulambayar a été lutteur de sumo<br />

pro pendant cinq ans. Tout du long, il n’a vu sa famille qu’une<br />

seule fois. « Lorsque vous devenez pro, vous ne faites plus rien<br />

d’autre. Et quand vous prenez votre retraite, vous ne pouvez plus<br />

revenir en arrière. » Mais toutes les personnes qui pratiquent le<br />

sumo au Japon ne le font pas selon les règles strictes des temps<br />

anciens. « Des dizaines de milliers de personnes pratiquent, précise<br />

Andrew, mais entre 600 et 700 seulement sont pros. »<br />

Les autres pratiquent le sumo comme vous joueriez au foot.<br />

Il y a des équipes scolaires, régionales ou d’entreprise qui s’affrontent<br />

après les heures de cours ou de bureau. Vous pourrez<br />

par exemple voir l’équipe Nissan défier l’équipe Toyota. « Ce n’est<br />

pas une question de pratique au Japon ou en dehors du Japon»,<br />

précise Andrew Freund. C’est une question de standards professionnels<br />

et amateurs au Japon et dans le reste du monde. »<br />

Concernant l’attitude des Japonais vis-à-vis de la compétition<br />

étrangère, Andrew Freund reconnaît que les réactions sont miti-<br />

Dans la catégorie poids<br />

moyens, Takeshi Amitani<br />

expédie son adversaire.<br />

78 THE RED BULLETIN


F RA NCE


L’Américain Kelly<br />

Gneiting (à gauche)<br />

aux prises avec son<br />

adversaire lors des<br />

premiers tours de<br />

la compétition dans<br />

la catégorie hommes<br />

poids lourds.<br />

gées : « Certains puristes disent que nous édulcorons et corrompons<br />

leur sport, et que les étrangers ignorent les concepts d’honneur<br />

et de tradition japonaise. » Malgré cela, il existe un<br />

moratoire officiel concernant les étrangers qui rejoignent les<br />

écuries de sumo professionnelles, à savoir un par équipe. « On<br />

compte 700 lutteurs de sumo répartis dans 35 écuries. Autrement<br />

dit, 5 % d’entre eux peuvent être étrangers, tout au plus,<br />

estime Andrew Freund. Et c’est non négociable. »<br />

Les seigneurs du sumo<br />

C’est le jour J. Les 4 000 spectateurs s’installent avec leurs boîtes<br />

à bento et leurs canettes de Sapporo alors que les joueurs de<br />

taiko traditionnel entament leur performance. Folklore japonais<br />

mis à part, cela pourrait être le public de n’importe quel sport<br />

américain habituel : éclectique et pas timide pour deux sous.<br />

Sur le dohyō, un arbitre japonais officie calmement en chemise<br />

blanche, nœud papillon et gants. Les matches sont souvent<br />

très rapides : à peine 10 secondes avant que l’un des lutteurs ne<br />

mette son adversaire à terre ou ne l’entraîne hors du cercle. Il<br />

existe 82 techniques de combat reconnues, et la plupart d’entre<br />

elles impliquent de pousser ou projeter son adversaire. Il est<br />

autorisé de donner des gifles, de faire des balayages de jambe et<br />

de tirer sur la ceinture (mawashi) de son adversaire. Mais il est<br />

interdit d’asséner des coups de poing, de donner des coups de<br />

pied et de tirer les cheveux.<br />

En bas des gradins, les concurrents attendent leur tour. Les<br />

Ukrainiens, un groupe musclé assez atypique, s’échauffent dans<br />

leur coin. Certains athlètes alternent mouvements d’échauffement<br />

et moments de relaxation. L’équipe norvégienne, blonde<br />

comme sa tenue, a dressé le drapeau national dans un coin,<br />

comme sur un camp de base arctique de fortune.<br />

Les matches hommes poids légers sont vite expédiés : Andrew<br />

McKnight et les douze autres Américains sont éjectés du dohyō<br />

et du tournoi. Point fort de la compétition : l’Ukrainien Sviatoslav<br />

Semykras s’élance contre la poitrine de son adversaire et,<br />

dans un demi-salto, envoie valser ce dernier dans la foule avant<br />

de se réceptionner à la perfection sur ses pieds, ce qui lui permet<br />

de remporter la médaille d’or. Voilà pourquoi les Ukrainiens sont<br />

idolâtrés dans ce sport.<br />

Mais la plupart des spectateurs sont là pour assister à la<br />

compétition hommes poids lourds, et c’est au tour de Byambajav<br />

Ulambayar, qui se place face à l’Égyptien Ramy Elgazar, vainqueur<br />

de l’US Sumo Open en 2015. Un match de sumo commence<br />

lorsque les deux adversaires posent leurs poings sur le sol<br />

du dohyō et lorsqu’ils finissent par s’affronter, l’Égyptien met le<br />

Mongol à terre puis le sort du ring. Il ne s’agit là que de la septième<br />

défaite de Byambajav Ulambayar en plus de dix ans de<br />

matches de sumo aux États-Unis.<br />

Le tournoi du nouveau venu Jose Galindo semble promis<br />

à une fin abrupte alors qu’il se positionne face à Kelly Gneiting,<br />

mais contre toute attente, le vétéran se retrouve soudain hors du<br />

ring. Jose Galindo savoure sa victoire. Un résultat exceptionnel<br />

pour celui qui avoue ne s’être entraîné que quelques semaines.<br />

L’adversaire suivant de Jose Galindo est Hiroki Sumi. Ils se<br />

cherchent pendant un moment, puis Sumi s’effondre. L’arbitre,<br />

persuadé que le pied gauche de l’Américain est sorti du ring en<br />

premier, déclare le lutteur japonais vainqueur. Mais la foule<br />

siffle. La vidéo est consultée et le panel de juges officiels se prononce.<br />

Galindo remporte le match : il bat ainsi son deuxième<br />

champion du monde en deux matches. Alors que Hiroki Sumi<br />

s’assied sereinement, le vainqueur soulève la foule d’un geste.<br />

« J’ai été à des Super Bowls et des finales de la NBA, mais c’est<br />

encore plus génial ! », s’écrie un spectateur.<br />

Enfin, après l’élimination de tous les favoris, Jose se retrouve<br />

face à Oleksandr Veresiuk en finale, mais il tombe sous les<br />

assauts de l’Ukrainien. « Gagner contre Hiroki Sumi, c’était fantastique.<br />

Je ne pensais pas en être capable… J’espérais juste le<br />

fatiguer un peu. » Avec une confiance boostée, Jose Galindo<br />

veut continuer la compétition de sumo. Au point de devenir le<br />

meilleur lutteur américain depuis Kelly Gneiting.<br />

Les compétitions de la journée touchent à leur fin. Les Ukrainiens<br />

ont gagné dans chaque catégorie, hommes et femmes<br />

confondus, à l’exception de la catégorie poids moyens, pour<br />

laquelle Takeshi Amitani a représenté haut les couleurs de son<br />

pays, le berceau du sumo. De tels résultats ne sont plus rares,<br />

mais Takeshi Amitani semble n’éprouver aucune rancœur visà-vis<br />

de ces usurpateurs étrangers, car selon lui, le développement<br />

de la popularité du sumo est très positif. « Je pense que<br />

c’est une bonne chose, dit-il. Le sumo est d’une grande simplicité<br />

et beaucoup de gens peuvent le pratiquer pour s’amuser. Pour<br />

les Japonais, peu importe la nationalité du vainqueur. »<br />

usasumo.com<br />

80 THE RED BULLETIN


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Le prochain numéro le 31 octobre avec et le 7 novembre avec<br />

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guide<br />

au programme<br />

LA CARTE SIMS<br />

Dans le monde virtuel<br />

de ce jeu pionnier, vous<br />

serez bien plus dans le<br />

réel que dans le réel…<br />

PAGE 88<br />

NATURELLEMENT<br />

Erwan est « le plus en<br />

forme du monde », et il<br />

base son fitness sur les<br />

mouvements naturels.<br />

PAGE 90<br />

CLICHÉ DU MOIS<br />

Quand le pilote VTT<br />

Kilian Bron, poursuivi<br />

par un drone, prend<br />

son envol à son tour.<br />

PAGE 98<br />

THOMAS WIELECKI<br />

RALLIEZ LE RALLYE<br />

La dernière étape du WRC<br />

se déroule en Australie en<br />

novembre. Notre reporter<br />

est allé mordre le gravier<br />

et prendre des sensations<br />

« façon rallye ». À vous ?<br />

PAGE 84<br />

THE RED BULLETIN 83


G U I D E<br />

Faire.<br />

Andreas Mikkelsen a perdu du temps en Australie en 2018 après avoir évité un tracteur perdu sur la piste.<br />

FINALE DU WRC<br />

DEVENEZ UN<br />

MORDU DE RALLYE<br />

L’Australie est la Mecque des fans de rallye. Notre rédacteur<br />

en chef musique, Flo Obkircher, s’y est pointé, en<br />

quête de la piste off-road parfaite, et de sensations fortes.<br />

Les oiseaux pépient, les insectes<br />

bourdonnent, le vent<br />

souffle dans les arbres. Le<br />

calme d’un matin parfait. Le long<br />

de la Rhones Creek Road, une<br />

route de gravier qui traverse des<br />

pentes verdoyantes, une douzaine<br />

de lève-tôt s’assoient dans des<br />

chaises de camping. Quand un<br />

grondement sourd nous parvient<br />

au loin, ils bondissent puis courent<br />

vers la piste et s’installent avec<br />

leurs caméras et leurs smartphones.<br />

Le grondement s’amplifie<br />

et devient rugissement. Une voiture<br />

file entre les arbres après le<br />

Covoicourage : avec le pilote pro Brendan Reeves, Flo est violet.<br />

84 THE RED BULLETIN


voyage<br />

NOS RECOS VOYAGE<br />

LE GOÛT DE LA<br />

POUSSIÈRE<br />

Les pilotes parcourent 325 kilomètres<br />

en 25 étapes, répartis sur quatre jours :<br />

où prendre les meilleures photos et<br />

comment vibrer à l’unisson avec le rallye.<br />

Eastern Dorrigo Way : la route de gravier parfaite pour un ressenti rallye.<br />

Australie<br />

Coffs Harbour<br />

Canberra<br />

Sydney<br />

Le rallye a lieu durant le printemps australien, soit<br />

des journées chaudes et ensoleillées (autour de<br />

25 °C) et des soirées fraîches mais agréables.<br />

THOMAS WIELECKI<br />

Trop de poussière ? Les spectateurs en mangent pour être au plus près de l’action.<br />

virage. 160 km/h, 380 chevaux.<br />

Les cailloux volent. La voiture dérape<br />

sur la ligne droite. De longues<br />

secondes… Ensuite, tout devient<br />

brun. De la poussière dans les<br />

yeux, dans le nez, dans la bouche.<br />

Le nuage dense que Thierry Neuville<br />

a créé avec sa Hyundai i20<br />

Coupé WRC subsiste dix secondes.<br />

Tandis qu’il se dissipe, le pilote de<br />

rallye belge a disparu depuis longtemps<br />

vers la colline suivante.<br />

Le Rallye d’Australie disputé en<br />

novembre est un moment fort du<br />

calendrier du World Rally Championship<br />

(WRC), et le nouveau<br />

champion sera couronné ici (c’est<br />

la dernière course de la saison).<br />

Le paysage dans lequel baigne la<br />

ville portuaire de Coffs Harbour<br />

« Vérifiez toujours<br />

les sous-bois.<br />

Ici, les serpents ne<br />

sont jamais loin ! »<br />

sur la côte orientale australienne<br />

est à la fois grandiose et dangereux<br />

(le pilote Toyota Kris Meeke :<br />

« Pendant les pauses pipi, j’examine<br />

toujours les sous-bois, les<br />

serpents ici ne sont jamais loin »).<br />

Les pistes en gravier dans la forêt<br />

tropicale et l’arrière-pays sont parmi<br />

les plus rapides du monde.<br />

Le spectacle des pros du rallye<br />

sur des routes non pavées vu de<br />

POINTS DE VUE<br />

Les meilleurs endroits le long du parcours, pour regarder<br />

les voitures foncer le plus près possible<br />

FLOODED GUMS<br />

Caché au fin fond de la forêt de Wedding Bells, vous pouvez<br />

faire l’expérience des voitures filant à toute vitesse.<br />

SIMPSONS RIDGE<br />

Ici, les voitures passent deux fois. Idéal pour les familles<br />

grâce aux stands restaurants et aux toilettes mobiles.<br />

BLUEBERRY POINT<br />

Deux points d’observation au même endroit : quand les<br />

bagnoles vrombissent en haut et en bas de la colline.<br />

APERÇU<br />

Comment les fans du WRC à Coffs Harbour peuvent groover<br />

AUSTRALIAN RALLY MUSEUM<br />

Cette exposition présente des souvenirs provenant des six<br />

décennies du Rallye d’Australie, sélectionnés par le fondateur<br />

et l’encyclopédie vivante du rallye, Trevor Shelton.<br />

RALEIGH INTERNATIONAL RACEWAY<br />

Pendant le Rallye d’Australie, le parcours situé à 15 minutes<br />

au sud de Coffs Harbour est utilisé par des pros. En dehors du<br />

rallye, vous pouvez le louer pour des séances de drift.<br />

THE RED BULLETIN 85


G U I D E<br />

Faire.<br />

voyage<br />

BOUCLEZ-LA !<br />

RÉVEILLEZ LE PILOTE<br />

QUI EST EN VOUS<br />

Vous avez envie de conduire votre voiture<br />

hors des sentiers battus ? Vous apprendrez<br />

ici à drifter et à la transformer en voiture<br />

de course.<br />

LE DRIFT EN TOUTE SIMPLICITÉ<br />

PRENEZ CHAQUE VIRAGE COMME UN PRO DU RALLYE<br />

3<br />

2<br />

Rapide/furieux : Hayden Paddon, de Nouvelle-Zélande, a terminé deuxième en 2018.<br />

1<br />

Engagez-vous en douceur<br />

dans le virage à l’aide d’un<br />

subtil coup de gaz et mettez<br />

l’arrière de la voiture en<br />

mouvement.<br />

2<br />

Contrebraquez rapidement.<br />

Le frein moteur allège l’arrière<br />

au point qu’il se libère.<br />

4<br />

PLEINS GAZ<br />

Préparer sa voiture pour la course : trois conseils de<br />

l’équipe de développement australienne de Hyundai<br />

1. PNEUS<br />

Andrew Tuitahi : « Aux amateurs, je recommande les<br />

pneus R-Compound ou les Semi-Slicks. Malaisés sur<br />

route mouillée, ils offrent des performances optimales<br />

dans des conditions sèches et durent sans surchauffe. »<br />

2. PLAQUETTES DE <strong>FR</strong>EIN<br />

Jeff Fear : « Misez sur de meilleures plaquettes de frein<br />

au lieu d’investir dans de nouveaux freins. Je recommande<br />

le fabricant japonais Winmax. Avec ce modèle,<br />

plus la température est élevée, mieux c’est. »<br />

3. FORMATION CONTINUE<br />

Tim Rodgers : « Vous voulez de nouvelles suspensions ?<br />

Les bons modèles coûtent très cher… Ne jetez pas votre<br />

argent par la fenêtre pour des améliorations bon marché.<br />

Poursuivez votre formation, soyez copilote d’un pro. »<br />

1<br />

3<br />

Dirigez maintenant avec<br />

l’accélérateur. Mais attention<br />

: trop d’accélérateur et<br />

l’arrière dérape trop loin.<br />

4<br />

Réduisez maintenant les<br />

gaz pour rattraper l’arrière<br />

à nouveau et reprenez<br />

lentement.<br />

près est spectaculaire : le picotement<br />

des nerfs quand les voitures<br />

foncent vers vous ; l’onde de choc<br />

quand elles passent à deux<br />

mètres ; les éclaboussures de boue<br />

à hauteur d’homme quand elles<br />

passent en trombe dans les<br />

flaques. Il est facile de trouver des<br />

emplacements tout près de l’action<br />

(voir page précédente), même si<br />

tous ne sont pas faciles d’accès.<br />

Par conséquent, si vous voulez<br />

être vraiment bien placé, vous<br />

pourrez réservez un Spectator-Tour<br />

(par exemple via rallysportmag.com),<br />

ou demander<br />

aux gars du coin.<br />

Quels sont les effets après trois<br />

jours de spectacle ? Vous êtes bien<br />

sûr accro, et vous voulez faire du<br />

rallye vous-même. Bonne nouvelle<br />

: à trois quarts d’heure à<br />

l’ouest de Coffs Harbour se trouve<br />

une route de gravier de douze kilomètres<br />

sur laquelle vous pouvez<br />

tester vos aptitudes automobiles.<br />

En 2011, la piste montagneuse de<br />

la forêt tropicale entre Eastern<br />

Dorrigo Way et Coramba Road faisait<br />

partie de la quatrième étape<br />

du Rallye d’Australie que le Norvégien<br />

Petter Solberg avait alors<br />

remporté dans sa Citroën.<br />

Le bon tuyau vient d’un type<br />

plutôt crédible : Philip Rodgers,<br />

ancien participant au Rallye Asie-<br />

Pacifique et désormais expert en<br />

réglages de suspension avec<br />

l’équipe Hyundai. « En Australie,<br />

la conduite sur gravier fait partie<br />

de la vie quotidienne, 58 % de nos<br />

routes ne sont pas pavées, dit-il.<br />

C’est comme le ski : ça ne devient<br />

vraiment amusant que lorsque<br />

vous dérapez un peu et que vous<br />

êtes emporté, sans toutefois perdre<br />

le contrôle. » Avant de se lancer,<br />

il est essentiel d’évaluer la surface<br />

(la terre rouge est extrêmement<br />

glissante) et d’avoir une vision suffisamment<br />

globale (les plus grands<br />

dangers : les nids-de-poule, les<br />

grosses pierres et les kangourous).<br />

Et le truc avec lequel les pros<br />

rattrapent le temps perdu sur ces<br />

pistes, c’est quoi ? Ils déstabilisent<br />

leur voiture et font déraper l’arrière<br />

afin que l’avant pointe vers<br />

la ligne droite avant même que le<br />

virage ne soit terminé. Ils peuvent<br />

donc accélérer plus rapidement.<br />

Pilotes amateurs, soyez prudents,<br />

prévient Rodgers. « Ne faites pas<br />

les fous sur cette route publique,<br />

mais vous pourrez ressentir des<br />

sensations proches de celles des<br />

pros du rallye sur gravier. »<br />

Rallye d’Australie, 14-17 novembre,<br />

Coffs Harbour, Nouvelle-Galles du Sud.<br />

Tickets : rallyaustralia.com.au<br />

THOMAS WIELECKI FLORIAN OBKIRCHER<br />

86 THE RED BULLETIN


DE DÉLICIEUX FILETS DE POULET<br />

PANÉS ET <strong>FR</strong>IT-MAISON AVEC AMOUR<br />

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G U I D E<br />

Faire.<br />

gaming<br />

LES SIMS<br />

SAIN ET SIM<br />

Pour ses adeptes, Les Sims est plus qu’un jeu vidéo, c’est un<br />

espace de libération mentale qui apporte du réconfort IRL.<br />

A<br />

vec Les Sims 4, vous pouvez<br />

essayer toutes les vies que<br />

vous voulez en attribuant<br />

à votre personnage des traits et<br />

des singularités qui n’existent<br />

dans aucun autre jeu. Pour ce jeu,<br />

Will Wright, le concepteur des<br />

Sims et co-fondateur de la société<br />

de jeux Maxis, s’est basé sur la<br />

hiérarchie des besoins établie par<br />

le psychologue Abraham Maslow.<br />

À savoir qu’emmener votre personnage<br />

dans une galerie d’art ne<br />

le rendra pas heureux s’il n’a pas<br />

mangé depuis deux jours. Qui<br />

plus est, Wright s’est aperçu que<br />

les gens utilisaient son jeu comme<br />

un espace sécurisant pour rejouer<br />

des expériences passées ou explorer<br />

des scénarios de la vie réelle<br />

qui semblent tabous ou irréalisables.<br />

Le quotient émotionnel de<br />

Wright s’avère plus élevé que celui<br />

de la plupart des tech bros, ce qui<br />

a permis aux Sims de se bâtir une<br />

réputation de lieu inclusif où les<br />

joueurs entrent dans la peau de<br />

différents personnages, sans être<br />

confrontés à des commentaires<br />

humiliants ni dépréciatifs.<br />

FICHE<br />

EXPERT<br />

WILL<br />

RIGHT<br />

LE CRÉATEUR<br />

Le succès remporté<br />

par la série des Sims a<br />

donné raison à Wright<br />

face à ses détracteurs<br />

qui se moquaient de<br />

son jeu en le qualifiant<br />

de « maison de poupées<br />

interactive ». La<br />

dernière version, Les<br />

Sims 4, a été le jeu PC<br />

le plus vendu au monde<br />

en 2014 et 2015.<br />

Les joueurs peuvent explorer leur<br />

propre identité grâce aux Sims.<br />

DE A À B<br />

Les personnages des<br />

Sims vivent ou meurent<br />

selon les décisions des<br />

joueurs mais, parce que<br />

l’on ne « perd » pas vraiment,<br />

ils sont plus enclins<br />

à essayer de nouvelles<br />

approches, à procéder<br />

à une sorte de test A/B<br />

tout au long du jeu.<br />

Comme Les Sims est<br />

codé en fonction des<br />

connaissances psychologiques<br />

du monde réel, le<br />

jeu peut aussi donner<br />

confiance à ses joueurs<br />

dans la vraie vie. Prenons<br />

l’expérience de Bianca,<br />

@BeeSimsFanatic : « Les<br />

Sims est un réconfort<br />

pour moi. Chaque fois<br />

que je me sens triste, je<br />

joue un peu aux Sims.<br />

Je crée une Sim qui me<br />

ressemble, je m’occupe<br />

d’elle et mène une vie<br />

qui me rend heureuse.<br />

Ça m’aide beaucoup. »<br />

UNIVERS DIVERSIFIÉ<br />

Les jeux vidéo sont<br />

souvent normatifs : les<br />

seules options sont celles<br />

prédéfinies par les<br />

concepteurs. Mais Les<br />

Sims permet aux joueurs<br />

de s’exprimer librement.<br />

@blazdndc 0nfusd :<br />

« Quand Les Sims ont<br />

offert l’option de choisir<br />

ses tenues, je portais des<br />

vêtements androgynes<br />

IRL. Je suis une femme<br />

et je suis queer, et la possibilité<br />

de créer un avatar<br />

qui me ressemblait était<br />

très valorisant. »<br />

ÉVASION CRÉATIVE<br />

Les joueurs des Sims<br />

créent des personnages<br />

et construisent des lieux<br />

de vie pour eux, ce qui a<br />

favorisé l’éclosion de<br />

diverses communautés,<br />

dont une sur l’architecture<br />

d’intérieur. @Nels-<br />

Builds affirme que le jeu<br />

l’a même aidée à approfondir<br />

les liens avec sa<br />

famille. « Les Sims a été<br />

mon exutoire créatif pendant<br />

presque vingt ans.<br />

Ça m’a aidée à me rapprocher<br />

de mon père<br />

architecte, et à partager<br />

mes histoires avec ma<br />

mère avant sa mort. Le<br />

jeu m’inspire et m’aide à<br />

repousser les limites de<br />

ma créativité. C’est ma<br />

maison. »<br />

LIBÉRATION<br />

ÉMOTIONNELLE<br />

Le monde virtuel des<br />

Sims offre un espace où<br />

l’on se sent en sécurité,<br />

où l’on n’a pas peur d’être<br />

jugé, à l’instar de @enza_<br />

fiorentino : « Mes parents<br />

m’ont rejetée quand je<br />

leur ai annoncé que j’étais<br />

transsexuelle ; alors je me<br />

suis créé un avatar dans<br />

le jeu, en espérant qu’un<br />

jour, je me sentirais aussi<br />

à l’aise et bien dans ma<br />

peau IRL que dans mon<br />

personnage. Aujourd’hui,<br />

c’est le cas. »<br />

ESPACE MENTAL<br />

VIRTUEL<br />

Le jeu permet de reconfigurer<br />

des schémas de<br />

pensée négatifs et<br />

d’améliorer la santé<br />

mentale. @LucyBGaming<br />

a des antécédents de<br />

dépression épisodiques.<br />

« Je n’aime pas qu’on me<br />

touche ou qu’on me parle<br />

dans ces moments-là.<br />

Je n’arrive pas à me<br />

concentrer, je suis épuisée.<br />

Des tâches simples<br />

comme prendre une<br />

douche, m’habiller et<br />

sortir deviennent alors<br />

très difficiles. Avec Les<br />

Sims, je peux m’évader<br />

mentalement en me<br />

concentrant sur la vie<br />

pixelisée d’une autre<br />

personne. Je bâtis des<br />

maisons, je fonde une<br />

famille, je deviens un<br />

méchant… J’épuise mon<br />

cerveau et j’augmente<br />

les chances de me sentir<br />

bien au lieu de traîner<br />

et de retomber dans de<br />

mauvaises habitudes. »<br />

IMAGINATION<br />

FERTILE<br />

La vie peut à tout<br />

moment vous prendre<br />

au dépourvu et des personnes<br />

en bonne santé<br />

peuvent se retrouver aux<br />

prises avec des maladies<br />

et des handicaps. Les<br />

Sims ne se soucie pas<br />

de savoir si vous êtes<br />

capable de courir un cent<br />

mètres en dix secondes<br />

ou si vous êtes en fauteuil<br />

roulant. Seule votre<br />

imagination compte et<br />

offre de l’espoir à ceux<br />

qui souffrent. Comme<br />

@Pamtastic721 qui,<br />

après deux ans de lutte<br />

contre le cancer et une<br />

chimiothérapie, a commencé<br />

à jouer aux Sims<br />

à 47 ans. « J’avais enfin<br />

le contrôle de quelque<br />

chose. J’étais dans un<br />

monde sans cancer, un<br />

monde qui fonctionnait<br />

comme je le voulais,<br />

et c’était merveilleux.<br />

Encore aujourd’hui, c’est<br />

mon meilleur remède<br />

contre l’anxiété. » Elle<br />

est maintenant une<br />

adepte convaincue du<br />

jeu, et célébrait cinq ans<br />

de rémission en mars<br />

dernier.<br />

ELECTRONIC ARTS MATT RAY<br />

88 THE RED BULLETIN


G U I D E<br />

Faire.<br />

fitness<br />

Erwan Le Corre enseigne<br />

le fitness universel sans<br />

attirail complexe.<br />

EN FORME<br />

C’EST TOUT<br />

NATUREL<br />

Devenez un pro du<br />

MovNat grâce à ces<br />

trois exercice.<br />

MOUVEMENT NATUREL<br />

RETOUR AUX<br />

FONDAMENTAUX<br />

La vie moderne a annihilé notre capacité à nous mouvoir<br />

naturellement. Le MovNat nous aidera-t-il à la recouvrer ?<br />

La façon dont nous nous<br />

déplaçons au quotidien est<br />

contre nature, voire inhumaine,<br />

affirme Erwan Le Corre :<br />

« Nous passons des heures assis à<br />

un bureau, et notre pratique du<br />

sport est insuffisante. Pourtant, la<br />

structure de l’appareil locomoteur<br />

humain nécessite une activité<br />

physique variée et régulière sans<br />

quoi il devient malade. »<br />

Le Français a mis au point une<br />

méthode de remise en forme<br />

basée sur des mouvements qu’enfants<br />

nous répétions inlassablement<br />

: nous tenir en équilibre,<br />

sauter, grimper, ramper, courir,<br />

nager ou encore faire de l’apnée.<br />

Ces mouvements sont regroupés<br />

en fonction de leur pratique<br />

en extérieur ou en intérieur et<br />

sont combinés afin d’améliorer de<br />

manière ludique l’équilibre, la<br />

coordination, la vitesse, la puissance<br />

et la précision.<br />

Son concept MovNat prend<br />

racine dans la « Méthode Naturelle<br />

» développée par l’officier de<br />

marine français Georges Hébert<br />

autour de 1900, qui a également<br />

inspiré le Parkour.<br />

« L’objectif premier de MovNat<br />

n’est pas de booster votre vitesse<br />

ou votre forme mais de redécouvrir<br />

la structure originale des<br />

mouvements humains », explique<br />

cet innovateur de 47 ans. De là<br />

découlera ensuite tout le reste,<br />

y compris la confiance en soi.<br />

movnat.com<br />

« La pratique<br />

abondante de<br />

mouvements<br />

naturels au<br />

quotidien rend<br />

plus fort, plus<br />

sain et plus<br />

heureux. »<br />

Erwan Le Corre,<br />

fondateur du<br />

mouvement MovNat<br />

TRACTION AVEC<br />

AVANT-BRAS<br />

S’accrocher à la barre non pas<br />

avec les mains, mais en posant<br />

les avant-bras parallèle à celleci.<br />

Cela limite l’amplitude de<br />

mouvement et rend l’exercice<br />

plus efficace.<br />

POP UP<br />

Le mouvement débute comme<br />

pour la traction avec les avantbras.<br />

Mais au lieu de l’arrêter<br />

lorsque le menton atteint<br />

le niveau de la barre, continuer<br />

jusqu’à ce que le haut du corps<br />

dépasse complètement la<br />

barre de façon à pouvoir s’y<br />

appuyer.<br />

HAND SWING UP<br />

S’agripper à la barre des deux<br />

mains, passer une jambe<br />

par-dessus et maintenir l’autre<br />

aussi haut que possible<br />

au- dessus de la barre puis s’en<br />

servir comme d’un balancier<br />

pour ramener le corps audessus<br />

de la barre.<br />

Démonstration :<br />

youtube.com/user/MovNat<br />

Le dernier livre de Le Corre :<br />

<strong>The</strong> Practice of Natural<br />

Movement: Reclaim Power,<br />

Health and Freedom<br />

Men’s-Health a élu Le Corre « homme le plus en forme au monde ».<br />

JESSIKA LE CORRE FLORIAN STURM<br />

90 THE RED BULLETIN


À TOI<br />

DE DÉCIDER !<br />

<strong>Red</strong> Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658<br />

12 OCTOBRE PARIS<br />

LA GRANDE HALLE DE LA VILLETTE<br />

BILLETS EN VENTE MAINTENANT


Faire.<br />

G U I D E<br />

3 28<br />

Le surf décolle<br />

à Hossegor.<br />

septembre / octobre<br />

septembre<br />

<strong>Red</strong> Bull Pumptrack<br />

World Championship<br />

Créé par Velosolutions et <strong>Red</strong> Bull en 2018, le<br />

championnat du monde de Pumptrack revient<br />

cette année avec vingt étapes mondiales, de la<br />

Nouvelle-Zélande aux USA, en passant par le<br />

Japon, le Chili… et la France, où l’événement pose<br />

ses bosses sur le tracé de Carpentras. Et c’est l’ensemble<br />

de la communauté cycliste qui est concerné,<br />

puisque la compétition est ouverte à tout type<br />

de vélo ! En 2017, ce sont 19 pays qui ont été visités,<br />

et 67 riders ont participé, culminant dans une finale<br />

mondiale où des champions olympiques de BMX<br />

race et des champions du monde de VTT se sont<br />

affrontés. Qui sera LE Français élu ?<br />

Piste de Carpentras ;<br />

redbull.com<br />

au 9 octobre<br />

RED BULL AIRBORNE<br />

Amateurs de surf aérien, le <strong>Red</strong> Bull Airborne va vous gâter !<br />

Fort du succès de la première édition disputée l’an passé à<br />

Hossegor, ce rendez-vous spectaculaire dédié aux aerials est<br />

devenu, en <strong>2019</strong>, un circuit à part entière avec trois étapes autour<br />

du monde : la première en Australie, la seconde à Bali et<br />

cette étape finale à Hossegor/Seignosse/Capbreton, en marge<br />

du Quiksilver Pro France. Cette année, parmi les 18 surfeurs<br />

internationaux attendus, deux Français sont conviés en mode<br />

wild card : un sortant du <strong>Red</strong> Bull Airborne qualifié, et l’autre<br />

issu d’une sélection vidéo en ligne. Décollage imminent !<br />

Hossegor, Seignosse, Capbreton ; redbull.com/airborne<br />

26 11 20<br />

octobre<br />

Snipes Battle<br />

of <strong>The</strong> Year<br />

International<br />

Le Snipes Battle of <strong>The</strong> Year<br />

International, c’est une vingtaine<br />

de qualifications dans le monde,<br />

et plus de 400 crews et 4 000 danseuses<br />

et danseurs. Pour son trentième<br />

anniversaire et sa finale<br />

mondiale à Montpellier, ce battle<br />

promet un niveau de breakdance<br />

élevé. La saveur artistique de l'événement<br />

en fera une date incontournable<br />

de la culture hip-hop.<br />

Montpellier ;<br />

battleoftheyearfrance.com<br />

au 13 octobre<br />

Music Producer<br />

Convention<br />

La Music Producer Convention<br />

est le rassemblement européen<br />

des producteurs de musique urbaine<br />

et électronique, professionnels<br />

de l’industrie, DJ et beat<br />

makers, organisé dans les locaux<br />

de l’Abbey Road Institute France.<br />

Au menu : ateliers en studio,<br />

modules business, conférences,<br />

networking… Un must pour les<br />

acteurs installés ou en devenir<br />

de la musique.<br />

Paris, Suresnes ;<br />

musicproducerconvention<br />

Des bosses<br />

pour les boss.<br />

au 29 septembre<br />

<strong>Red</strong> Bull Music<br />

Festival Paris<br />

Plusieurs jours, plusieurs lieux,<br />

plusieurs genres et expériences<br />

musicaux proposés : le <strong>Red</strong> Bull<br />

Music Festival Paris excite les foules<br />

avec une prog’ unique alliant la hit<br />

makeuse Wondagurl (en live avec<br />

une dream team de MCs francophones),<br />

des artistes metal, une<br />

nuit de live techno, ou encore<br />

James Murphy (de LCD Soundsystem)<br />

aux platines sur une sono<br />

d’exception. Très fort !<br />

Paris ;<br />

redbull.com<br />

DAMIEN POULLENOT/WSL/ RED BULL CONTENT POOL, MARKO MAGISTER/RED BULL CONTENT POOL<br />

92 THE RED BULLETIN


ATTITUDE & SIX STEP présentent<br />

BATTLE OF THE YEAR<br />

BOTYOFFICIAL<br />

26 OCT. <strong>2019</strong> MONTPELLIER<br />

BREAKING WORLD FINALS<br />

BATTLES 1VS1 BBOYS & BGIRLS / BATTLE BOTY KIDS<br />

WORKSHOPS + LABORATOIRES DE CRÉATION / SOIRÉES HIP HOP EN CRÉATION<br />

RENCONTRES PROFESSIONNELLES RÉSEAU HIP HOP BOTY INTERNATIONAL / FESTIVAL RAP ÉMERGENCY<br />

WWW.BATTLEOFTHEYEAR.NET


G U I D E<br />

Voir.<br />

septembre/octobre<br />

Shane McElrath (g.)<br />

a remporté la compétition<br />

en 2018.<br />

VITESSE,<br />

ENVOL ET<br />

DEXTÉRITÉ<br />

Une bonne vieille ligne<br />

droite en motocross aux<br />

USA, du surf aérien audessus<br />

des vagues du Sud-<br />

Ouest et la fièvre du drift<br />

qui s’empare de l’Irlande…<br />

Juste un aperçu de ce qui<br />

vous attend ce mois-ci.<br />

REGARDEZ<br />

RED BULL TV<br />

PARTOUT<br />

<strong>Red</strong> Bull TV est une chaîne de<br />

télévision connectée : où que<br />

vous soyez dans le monde,<br />

vous pouvez avoir accès aux<br />

programmes, en direct ou en<br />

différé. Le plein de contenus<br />

originaux, forts et créatifs.<br />

Vivez l’expérience sur redbull.tv<br />

5<br />

octobre LIVE<br />

RED BULL<br />

STRAIGHT RHYTHM<br />

La sixième édition de cette course d’inspiration rétro revient<br />

sur la piste de Fairplex à Pomona, en Californie. Deux pilotes<br />

en parallèle sur des motos deux temps old-school se défient<br />

sur une piste d’un demi mile, en mode « meilleur des trois<br />

runs », tout droit, avec des enchaînements type supercross.<br />

Le premier au bout l’emporte. Un must annuel !<br />

3octobre LIVE<br />

RED BULL<br />

AIRBORNE <strong>FR</strong>ANCE<br />

Le <strong>Red</strong> Bull Airborne se voit clôturé sur les vagues<br />

d’Hossegor : il conviendra de ne pas louper ses grands<br />

moments de surf aérien, ni le couronnement du boss<br />

de cette série mondiale en trois étapes.<br />

21<br />

au 22 septembre LIVE<br />

DRIFT MASTERS IRELAND<br />

Le plus grand site de sports mécaniques d’Irlande<br />

reçoit la finale du Drift Masters European Championship<br />

<strong>2019</strong>. Avec les Irlandais en patron du drift pro<br />

ces dernières années, est-ce qu’un autre pays sera<br />

capable de mettre un terme à leur seize ans de règne ?<br />

CHRIS TEDESCO/RED BULL CONTENT POOL, RYAN MILLER/RED BULL CONTENT POOL, JORDAN BUTTERS/DMEC/RED BULL CONTENT POOL<br />

94 THE RED BULLETIN


ALPHATAURI.COM


THE RED<br />

BULLETIN<br />

WORLDWIDE<br />

<strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

est actuellement<br />

distribué dans sept<br />

pays. Vous voyez ici la<br />

couverture de l’édition<br />

américaine, dédiée au<br />

basketteur des Lakers,<br />

Anthony Davis.<br />

Le plein d’histoires<br />

hors du commun sur<br />

redbulletin.com<br />

Les journalistes de SO PRESS n’ont pas pris<br />

part à la réalisation de <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong>.<br />

SO PRESS n’est pas responsable des textes,<br />

photos, illustrations et dessins qui engagent<br />

la seule responsabilité des auteurs.<br />

MENTIONS LÉGALES<br />

Rédacteur en chef<br />

Alexander Macheck<br />

Rédacteurs en chef adjoints<br />

Andreas Rottenschlager<br />

Directeur créatif<br />

Erik Turek<br />

Directeurs artistiques<br />

Kasimir Reimann (DC adjoint),<br />

Miles English, Tara Thompson<br />

Directeur photos<br />

Fritz Schuster<br />

Directeurs photos adjoints<br />

Marion Batty, Rudi Übelhör<br />

Responsable de la production<br />

Marion Lukas-Wildmann<br />

Managing Editor<br />

Ulrich Corazza<br />

Maquette<br />

Marion Bernert-Thomann, Martina de<br />

Carvalho-Hutter, Kevin Goll, Carita Najewitz<br />

Booking photos<br />

Susie Forman, Ellen Haas,<br />

Eva Kerschbaum, Tahira Mirza<br />

Directeur commercial & Publishing Management<br />

Stefan Ebner<br />

Publishing Management<br />

Sara Varming (Dir.), Ivona Glibusic, Bernhard<br />

Schmied, Melissa Stutz, Mia Wienerberger<br />

Marketing B2B & Communication<br />

Katrin Sigl (Dir.), Agnes Hager, Teresa Kronreif<br />

Directeur créatif global<br />

Markus Kietreiber<br />

Co- Publishing<br />

Susanne Degn-Pfleger & Elisabeth Staber (Dir.),<br />

Mathias Blaha, Vanessa Elwitschger, Raffael<br />

Fritz, Marlene Hinterleitner, Valentina Pierer,<br />

Mariella Reithoffer, Verena Schörkhuber,<br />

Julia Zmek, Edith Zöchling-Marchart<br />

Maquette commerciale<br />

Peter Knehtl (Dir.), Sasha Bunch, Simone Fischer,<br />

Martina Maier, Florian Solly<br />

Emplacements publicitaires<br />

Manuela Brandstätter, Monika Spitaler<br />

Production<br />

Walter O. Sádaba, Friedrich Indich,<br />

Sabine Wessig<br />

Lithographie<br />

Clemens Ragotzky (Dir.),<br />

Claudia Heis, Nenad Isailovi c, ̀<br />

Sandra Maiko Krutz, Josef Mühlbacher<br />

Fabrication<br />

Veronika Felder<br />

Opérations<br />

Michael Thaler (MIT), Alexander Peham,<br />

Yvonne Tremmel (Office Management)<br />

Abonnements et distribution<br />

Peter Schiffer (Dir.), Klaus Pleninger<br />

(Distribution), Nicole Glaser (Distribution),<br />

Yoldaş Yarar (Abonnements)<br />

Siège de la rédaction<br />

Heinrich-Collin-Straße 1, 1140 Vienne, Autriche<br />

Téléphone +43 (0)1 90221-28800,<br />

Fax +43 (0)1 90221-28809<br />

Web redbulletin.com<br />

Direction générale<br />

<strong>Red</strong> Bull Media House GmbH,<br />

Oberst-Lepperdinger-Straße 11–15,<br />

5071 Wals bei Salzburg, Autriche, FN 297115i,<br />

Landesgericht Salzburg, ATU63611700<br />

Directeur de la publication<br />

Andreas Kornhofer<br />

Directeurs généraux<br />

Dietrich Mateschitz, Gerrit Meier,<br />

Dietmar Otti, Christopher Reindl<br />

THE RED BULLETIN<br />

France, ISSN 2225-4722<br />

Country Editor<br />

Pierre-Henri Camy<br />

Country Coordinator<br />

Christine Vitel<br />

Country Project Management<br />

Alessandra Ballabeni,<br />

alessandra.ballabeni@redbull.com<br />

Contributions,<br />

traductions, révision<br />

Lucie Donzé, Frédéric & Susanne<br />

Fortas, Suzanne Kříženecký,<br />

Claire Schieffer, Jean-Pascal Vachon,<br />

Gwendolyn de Vries<br />

Abonnements<br />

Prix : 18 €, 12 numéros/an<br />

getredbulletin.com<br />

Siège de la rédaction<br />

29 rue Cardinet, 75017 Paris<br />

+33 (0)1 40 13 57 00<br />

Impression<br />

Prinovis Ltd. & Co. KG,<br />

90471 Nuremberg<br />

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PROFIL<br />

134 bis rue du Point du jour<br />

92100 Boulogne<br />

+33 (0)1 46 94 84 24<br />

Thierry Rémond,<br />

tremond@profil-1830.com<br />

Elisabeth Sirand-Girouard,<br />

egirouard@profil-1830.com<br />

Edouard Fourès<br />

efoures@profil-1830.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Allemagne, ISSN 2079-4258<br />

Country Editor<br />

David Mayer<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (Dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Country Project Management<br />

Natascha Djodat<br />

Publicité<br />

Matej Anusic,<br />

matej.anusic@redbull.com<br />

Thomas Keihl,<br />

thomas.keihl@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Autriche, ISSN 1995-8838<br />

Country Editor<br />

Christian Eberle-Abasolo<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (Dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Publishing Management<br />

Bernhard Schmied<br />

Sales Management <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

Alfred Vrej Minassian (Dir.),<br />

Thomas Hutterer, Stefanie Krallinger<br />

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anzeigen@at.redbulletin.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Mexique, ISSN 2308-5924<br />

Country Editor<br />

Luis Alejandro Serrano<br />

Secrétaire de rédaction<br />

Marco Payán<br />

Relecture<br />

Alma Rosa Guerrero<br />

Country Project Management<br />

Giovana Mollona<br />

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Alfredo Quinones,<br />

alfredo.quinones@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Royaume-Uni, ISSN 2308-5894<br />

Country Editor<br />

Tom Guise<br />

Rédacteur associé<br />

Lou Boyd<br />

Rédacteur musical<br />

Florian Obkircher<br />

Directeur Secrétariat de rédaction<br />

Davydd Chong<br />

Secrétaire de rédaction<br />

Nick Mee<br />

Publishing Manager<br />

Ollie Stretton<br />

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Mark Bishop,<br />

mark.bishop@redbull.com<br />

Fabienne Peters,<br />

fabienne.peters@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Suisse, ISSN 2308-5886<br />

Country Editor<br />

Arek Piatek, Nina Treml<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (Dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Country Project Management<br />

Meike Koch<br />

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Marcel Bannwart (D-CH),<br />

marcel.bannwart@redbull.com<br />

Christian Bürgi (W-CH),<br />

christian.buergi@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN USA,<br />

ISSN 2308-586X<br />

Rédacteur en chef<br />

Peter Flax<br />

Rédactrice adjointe<br />

Nora O’Donnell<br />

Éditeur en chef<br />

David Caplan<br />

Directrice de publication<br />

Cheryl Angelheart<br />

Publicité<br />

Todd Peters, todd.peters@redbull.com<br />

Dave Szych, dave.szych@redbull.com<br />

Tanya Foster, tanya.foster@redbull.com<br />

96 THE RED BULLETIN


11 12 OCT <strong>2019</strong><br />

ROUBAIX - LILLE<br />

BEN KLOCK ELLEN ALLIEN<br />

FUR COAT LAURENT GARNIER<br />

LEHAR B2B MUSUMECI LEN FAKI<br />

MACEO PLEX MODESELEKTOR LIVE<br />

RECONDITE B2B MARCUS WORGULL<br />

RØDHÅD SOLOMUN...<br />

APM001 BLAC COEUS DAVID ASKO<br />

HAP KADOSH LEXX MAINRO<br />

PÉO WATSON SANTIAGO GARCIA...<br />

BILLETS EN EXCLUSIVITÉ<br />

SUR SHOTGUN


Pour finir en beauté<br />

Kilian airlines<br />

À La Clusaz, Kilian Bron est chez lui, et sa piste de décollage est nommée « La Trace ».<br />

C’est ici qu’a été réalisée sa vidéo Follow Me, filmée au plus près de ce rider VTT par le<br />

drone d’un autre Français, TomZ. Kilian y assure un road gap de toute beauté, saisi<br />

pour vous par le photographe Dom Daher. À voir sur Instagram : @redbullfrance<br />

Le prochain<br />

THE RED BULLETIN<br />

n° 93 disponible<br />

dès le 31 octobre<br />

<strong>2019</strong><br />

DOM DAHER/RED BULL CONTENT POOL<br />

98 THE RED BULLETIN

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