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<strong>FR</strong>ANCE<br />
DÉCEMBRE <strong>2019</strong><br />
HORS DU COMMUN<br />
Votre magazine<br />
offert chaque<br />
mois avec<br />
14 PAGES<br />
(très)<br />
spéciales<br />
RED BULL<br />
ILLUME<br />
Le concours photo<br />
plus puissant que<br />
votre imagination
ÉDITORIAL<br />
TOUT LE MONDE<br />
CONTRIBUTEURS<br />
NOS ÉQUIPIERS<br />
FAIT DE LA PHOTO<br />
Avec un smartphone, semble-t-il, mais il reste des<br />
domaines délicats à documenter, auxquels nous<br />
consacrons nombre de nos pages chaque mois :<br />
l’aventure outdoor, les sports d’action, le monde<br />
aquatique… Tous les ans, ils sont des centaines<br />
de candidats, photographes confirmés, voire pros,<br />
ou émergents à participer au concours photo<br />
<strong>Red</strong> Bull Illume, justement dédié aux univers<br />
qui vous/nous excitent. Cette année, près de<br />
60 000 images ont été soumises et nous avons<br />
disséqué l’œuvre des finalistes des onze catégories<br />
(innovation, lifestyle, best of Instagram...) pour<br />
vous proposer un portfolio de quatorze pages, où<br />
l’on se demande parfois si ce que l’on y découvre est<br />
réel. Comme ce skateur dans la neige sur notre une,<br />
Levi Glenney, shooté par l’Américain Peter Cirilli.<br />
Votre expérience Illume commence sous peu.<br />
BEN READ<br />
Ce photographe anglais vous<br />
décrira son travail comme<br />
du storytelling à travers les<br />
détails et les paysages. Et<br />
c’est exactement ce qu’il nous<br />
a proposé à son retour du plus<br />
lointain des tournois de foot,<br />
au Groenland. Il y a également<br />
fait le plein en souvenirs personnels.<br />
« Je me souviendrai<br />
toujours de cette mi-temps<br />
où la sono balançait du gros<br />
death metal », dit Ben.<br />
P. 44<br />
PETER CIRILLI/RED BULL ILLUME (COUVERTURE)<br />
Ouvrez les yeux !<br />
Votre Rédaction<br />
Containers, grues, hangars… Pas le décor habituel d’un<br />
tournoi de foot validé par la FIFA ! Ben Reader a photographié<br />
cette compétition organisée au Groenland. P. 44<br />
TOM WIGGINS<br />
Basé à Londres, l’ancien rédacteur<br />
du magazine Stuff joue<br />
aux jeux vidéo depuis 1990.<br />
Les compétiteurs du tournoi<br />
F1 Esports Pro Series qu’il a<br />
rencontrés n’étaient pas nés<br />
à cette époque, mais ont assurément<br />
joué bien plus que lui.<br />
« En parlant avec eux, tu n’as<br />
pas l’impression qu’il s’agit<br />
d’un jeu, dit-il. Ils prennent ça<br />
avec le plus grand sérieux. »<br />
P. 58<br />
THE RED BULLETIN 3
74<br />
Peter Tabichi : le meilleur<br />
prof de l’année <strong>2019</strong> a<br />
des choses à dire.<br />
66<br />
La transition énergétique<br />
vous convie à son bord.<br />
6 Ce mois-ci, notre section galerie<br />
est géante, avec du top niveau :<br />
des images parmi les meilleures<br />
proposées pour le concours photo<br />
<strong>Red</strong> <strong>Red</strong> Bull Bull Illume Illume <strong>2019</strong>. <strong>2019</strong>. Fort Fort ! !<br />
photo<br />
20 « Ce serait trop cool de vivre dans<br />
un van ! »… La grimpeuse Kaya<br />
Lindsay en a fait son quotidien<br />
22 L’athlète de demain sera peutêtre<br />
dans un exosquelette<br />
24 Quand l’astronaute italien Luca<br />
Parmitano ambiance Ibiza depuis<br />
la Station spatiale : spaaaaaace !<br />
26 Retour inspirant en Zambie pour<br />
la rappeuse Sampa the Great<br />
28 De t.A.T.u à Rammstein, le Belge<br />
Todiefor se raconte en hits<br />
30 La perf’ sociale<br />
Bakary Sakho se bouge pour les<br />
siens, mode donnant-donnant<br />
36 Sunni le sage<br />
Il prône un rassemblement des<br />
générations du breakdance<br />
44 L’autre football<br />
Au Groenland, une saison de<br />
ballon qui dure une semaine<br />
58 Rêves de course<br />
Dans les baquets de F1 virtuelles,<br />
aux frontières du vrai pilotage<br />
66 No future ?<br />
À bord de l’Energy Observer,<br />
Jérôme Delafosse livre un<br />
message d’espoir<br />
74 Tabichi Code<br />
Quand les profs changent le<br />
monde, pour le meilleur<br />
82 Entre montagnes et mer, notre<br />
guide pour skier aux Lofoten<br />
86 Il y a toujours une partie de FIFA<br />
en cours dans le monde. Pourquoi<br />
ce jeu intéresse le vrai foot<br />
87 Faire du vélo d’appartement dans<br />
un sauna, c’est quoi l’intérêt ?<br />
88 Du paddle sur la Seine, sur scène<br />
avec Gotaga, en salle avec des<br />
Jedis ou en short avec les basketteurs<br />
pros : notre agenda de folie<br />
89 Au programme sur <strong>Red</strong> Bull TV<br />
90 Le top matos pour se pointer en<br />
fraîcheur sur les pistes cet hiver<br />
96 Ils et elles font <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />
98 Pour finir en beauté : comme<br />
Neymar, ce Brésilien sait aussi<br />
très bien se servir de ses jambes<br />
JON GAMBRELL/AP/PICTUREDESK.COM, DAVID CLERIHEW<br />
4 THE RED BULLETIN
CONTENUS<br />
décembre <strong>2019</strong><br />
36<br />
En galère, le B-Boy Sunni<br />
a dormi sur le sol, avant<br />
d’en faire son royaume.<br />
THE RED BULLETIN 5
<strong>Red</strong> Bull Illume<br />
VOS YEUX<br />
SONT-ILS<br />
PRÊTS ?<br />
59 551 images de photographes<br />
provenant de 110 pays : le plus<br />
grand concours photo de sports<br />
d’aventure et d’action au monde,<br />
c’est l’adrénaline magnifiée par la<br />
beauté de l’art. Voici une sélection<br />
des soixante finalistes de <strong>2019</strong>.<br />
Texte ANDREAS WOLLINGER
On se tient au courant<br />
Pour voir le jour, cette photo a nécessité de<br />
grandes aptitudes professionnelles des deux<br />
côtés de l’objectif : le photographe américain<br />
Karim Iliya a choisi une longue durée d’exposition<br />
avec son drone afin de procurer plus<br />
d’intensité dramatique aux eaux vives du<br />
Little White Salmon River, dans l’État de<br />
Washington, tandis que les deux kayakistes<br />
Adrian Mattern et Knox Hammack ont dû<br />
rester immobiles, dans la seule section<br />
du fleuve où cela était possible.<br />
KARIM ILIYA/RED BULL ILLUME<br />
7
C’est la teuf dans le tuf<br />
Le paysage unique de tuf de la Cappadoce,<br />
en Turquie, est le résultat d’une activité<br />
volcanique intense créant des sculptures<br />
rocheuses époustouflantes. Il n’est évidemment<br />
pas aisé de traverser ce « pays des<br />
beaux chevaux », à moins d’être équipé de<br />
motos tout-terrain. Par chance, le photographe<br />
Burhan Kapar était de la partie.<br />
8
BURHAN KAPAR/RED BULL ILLUME
Cherchez l’erreur<br />
Le skateur allemand Jost Arens réalise une<br />
figure le long d’un banc qui n’attendait que<br />
cela à Copenhague, et nous pouvons admirer<br />
son talent sous toutes les coutures :<br />
les expositions multiples sont un outil très<br />
apprécié pour capturer toute la dynamique<br />
d’un mouvement sur une image. Mais cette<br />
fois, le photographe britannique Leo Francis<br />
s’est permis une petite facétie.<br />
LEO <strong>FR</strong>ANCIS/RED BULL ILLUME<br />
11
Enterré sous l’eau<br />
Le Français Ben Thouard, féru de photo<br />
depuis ses 15 ans, s’est installé en Polynésie<br />
à l’âge de 22 ans. Les vagues de Teahupo’o<br />
près de Tahiti sont vite devenues son sujet<br />
préféré, sous tous les angles possibles et<br />
imaginables : cette photo montre le surfeur<br />
Tahurai Henry à la lutte sous l’eau, juste<br />
après que la vague a brisé.<br />
12
BEN THOUARD/RED BULL ILLUME
L’homme élastique<br />
Le Parc national des Arches dans l’Utah<br />
(USA) est célèbre pour ses formations<br />
rocheuses de grès bizarroïdes –un endroit<br />
rêvé pour les inconditionnels d’escalade<br />
libre. Pat Kingsbury, qui en est un, gravit<br />
une tourelle isolée de 250 mètres de haut<br />
au nom prometteur de Hellbitch, tandis<br />
que le photographe Jeremiah Watt capture<br />
un moment particulièrement intense.<br />
JEREMIAH WATT/RED BULL ILLUME
SIMON BISCHOFF/RED BULL ILLUME<br />
Sur un fil de lumière<br />
L’Australien Simon Bischoff est non seulement<br />
un photographe pro, mais aussi l’un des<br />
meilleurs grimpeurs de Tasmanie. Un aprèsmidi,<br />
il se rend au Gordon Dam pour aller<br />
regarder les highlineurs qui y défient l’impressionnant<br />
barrage. Alors qu’il s’apprête à rentrer<br />
chez lui, les lumières s’allument le long<br />
de la paroi : la chance sourit aux audacieux.<br />
15
TAL ROBERTS/RED BULL ILLUME<br />
Un coup double<br />
Le sujet préféré du photographe américain<br />
Tal Roberts ? Ses potes, pardi ! Voici l’un<br />
d’eux, le skateur Tom Asta, en train de livrer<br />
un trick élégant sur un quaterpipe. Ce n’est<br />
qu’au moment d’enclencher qu’il s’est rendu<br />
compte de l’ombre fantastique qui confère<br />
à cette photo un charme particulier.<br />
17
NILS OHLENDORF/RED BULL ILLUME<br />
L’homme qui tombe à pic<br />
Ce paysage enchanté de l’Utah, aussi appelé<br />
« Fruit bowl », est bien connu des amateurs<br />
de sensations fortes. Une fois par an, des<br />
basejumpeurs et highlineurs s’y retrouvent<br />
pour une fête follement aérienne. Le photographe<br />
allemand Nils Ohlendorf a immortalisé<br />
l’un des initiateurs de cet événement,<br />
Andy « Sketchy » Lewis.<br />
Tous les gagnants dès le 20 novembre sur<br />
redbullillume.com<br />
19
conversion : « J’ai rencontré<br />
une fille qui avait acheté une<br />
camionnette qu’elle venait de<br />
transformer en maison pour<br />
passer tout l’été à faire de<br />
l’escalade. Elle m’a bluffée.<br />
J’ai alors acheté une camionnette<br />
d’occasion pour environ<br />
9 000 €, dans laquelle je peux<br />
m’allonger et tenir debout. Je<br />
l’ai moi-même aménagée en<br />
cinq mois avec mon ex-petit<br />
ami, et à l’aide de tutoriels sur<br />
YouTube. » Lindsay livre ici<br />
cinq dispositions logistiques et<br />
spirituelles à adopter avant<br />
d’embrasser la van life… pour<br />
quelques mois, ou pour la vie !<br />
onechicktravels.com<br />
Prenez bien soin de la<br />
ventilation et de l’isolation<br />
« La rouille et la moisissure<br />
sont les ennemis jurés de la<br />
camionnette. Veillez à concevoir<br />
et à réaliser soigneusement<br />
l’étanchéité de votre véhicule<br />
et sa ventilation. »<br />
VIVRE DANS UN VAN<br />
La liberté tient<br />
sur quatre roues<br />
Se barrer, s’évader et vivre dans un van. La grimpeuse<br />
et blogueuse américaine Kaya Lindsay livre ses astuces<br />
pour mener une vie d’aventure au gré du vent.<br />
Êtes-vous prêt(e) à quitter votre<br />
logement, à léguer vos biens<br />
à une association caritative et<br />
à entamer une vie itinérante ?<br />
C’est ce que l’on appelle la van<br />
life, une dynamique où l’idée<br />
est de se libérer des contraintes<br />
quotidiennes en transformant<br />
un véhicule en foyer mobile.<br />
Et ainsi rouler en quête d’aventures,<br />
hors du système.<br />
Ce mode de vie, la grimpeuse<br />
et blogueuse Kaya Lindsay l’a<br />
adopté depuis trois ans en quittant<br />
son appartement californien<br />
et en devenant free-lance<br />
pour se lancer à bord de son<br />
fourgon Mercedes- Benz Dodge<br />
Sprinter de 2006. Sa chaîne<br />
YouTube fournit non seulement<br />
des conseils pour l’aménagement<br />
de sa fourgonnette — sa<br />
vidéo sur le sujet compte plus<br />
de 1,6 million de vues — mais<br />
aussi les récits d’autres femmes<br />
converties à ce mode vie. Lindsay<br />
se souvient de sa propre<br />
Lisez Marie Kondo,<br />
La magie du rangement<br />
« Soyez radical pour ce que<br />
vous voulez emporter avec<br />
vous. De ma vie d’avant, je n’ai<br />
gardé que trois tiroirs de linge<br />
et d’accessoires de toilette. »<br />
Soyez flexible et tourné<br />
vers la recherche de<br />
solutions<br />
« Vous devez être capable de<br />
gérer toutes les difficultés.<br />
Être endurant et apte à faire<br />
face aux imprévus est une<br />
qualité primordiale quand on<br />
vit dans une camionnette. »<br />
Respectez l’espace qui<br />
vous entoure<br />
« Je vois des gens jeter du marc<br />
de café sur les parkings, ou<br />
cracher leur dentifrice sur le<br />
sol. Faites ce genre de chose<br />
dans des lieux appropriés. »<br />
Ce que vous aimez faire<br />
doit devenir le fil rouge<br />
de vos pérégrinations<br />
« La vie dans un van est<br />
souvent empreinte de romantisme.<br />
Mais pour être heureux<br />
en route, il faut une motivation<br />
assez forte pour ne pas<br />
s’arrêter. »<br />
LOU BOYD<br />
20 THE RED BULLETIN
COPYRIGHT © <strong>2019</strong> MNA, INC. ALL RIGHTS RESERVED.<br />
N’ATTENDEZ PAS QUE L’AVENTURE VIENNE À VOUS.<br />
ALLEZ LA CHERCHER !<br />
WHAT ARE YOU BUILDING FOR?<br />
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Piloté par l’Homme,<br />
le Prosthesis peut se<br />
déplacer à 30 km/h.<br />
EXTENSION CORPORELLE FURRION<br />
L’athlète de demain ?<br />
Le tout premier exosquelette de course sera piloté par l’Homme.<br />
Ce monstre quadrupède de<br />
3,5 tonnes et 4 mètres de haut<br />
pourrait s’apparenter à un<br />
horrible robot tout droit sorti<br />
d’un film bourrin de Michael<br />
Bay (Pearl Harbor). Mais le<br />
Pros thesis, créature de la<br />
société d’électronique de luxe<br />
Furrion, est un exosquelette<br />
bionique entièrement piloté par<br />
l’Homme qui voit ainsi sa force<br />
et sa vitesse décuplées.<br />
« C’est un anti- robot, dit<br />
son créateur, Jonathan Tippett,<br />
directeur technique de Furrion.<br />
Il convient d’y voir un uniforme,<br />
une extension du corps du<br />
pilote qui impulse tous les mouvements<br />
de la bête. » La passion<br />
de Tippett pour les sports d’action<br />
a inspiré cette machine<br />
innovante, ou mecha. « En<br />
grandissant, la pratique du<br />
VTT, du snowboard, des arts<br />
martiaux et de la moto a été<br />
une grande source de joie,<br />
confie-t-il. À l’instar de ces<br />
sports, la conduite du mecha<br />
fait la part belle à la maîtrise<br />
physique et à l’habileté. Ici,<br />
il s’agit de contrôler un mastodonte<br />
de 200 chevaux. »<br />
L’entreprise planche déjà<br />
sur la prochaine génération de<br />
mecha et espère lancer sa<br />
propre X1-Mech Racing League<br />
pour une nouvelle dimension<br />
dans le sport, avec des courses<br />
d’athlètes qui s’affronteront<br />
dans leurs exosquelettes.<br />
« Manier un mecha reste accessible<br />
à toute personne en bonne<br />
santé, affirme Tippett. La puissance<br />
et la force requises sont<br />
fonction de la vitesse et de la<br />
force ciblées. Si vous maîtrisez<br />
les pistes bleues en ski et le ollie<br />
en skate, la bête se soumettra à<br />
votre volonté en peu de temps. »<br />
furrion.com<br />
SAM CARTER, JONATHAN TIPPETT LOU BOYD<br />
22 THE RED BULLETIN
Naturellement<br />
rafraîchissants<br />
N’EST PAS UNE BOISSON ÉNERGISANTE<br />
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UN DJ DANS L’ESPACE<br />
Carrément cosmix<br />
Cet été, à 400 km au-dessus de la Terre, la Station spatiale<br />
internationale a offert aux fêtards terriens un DJ set historique.<br />
Ce soir, on se met sur orbite ! Luca Parmitano fait tanguer le<br />
bateau à Ibiza depuis la Station spatiale internationale.<br />
Quand un DJ set est qualifié<br />
d’extraterrestre, cela tient<br />
généralement à sa sélection de<br />
morceaux ou au talent de celui<br />
ou celle derrière les platines. Ce<br />
qualificatif a pris tout son sens<br />
en août dernier, lorsque l’astronaute<br />
italien Luca Parmitano<br />
est devenu le premier DJ à se<br />
produire en direct de l’espace.<br />
Âgé de 43 ans, notre homme<br />
a travaillé avec le célèbre DJ<br />
allemand Le Shuuk pour réaliser<br />
ce set historique en utilisant<br />
un logiciel spécialisé chargé<br />
sur une tablette de la Station<br />
spatiale internationale. Le jour<br />
J, Parmitano fut projeté en<br />
direct sur écran géant devant<br />
3 000 clubbeurs à bord d’un<br />
bateau amarré dans les îles<br />
Baléares. « Bienvenue à bord<br />
du module Columbus, le laboratoire<br />
européen de la Station<br />
spatiale internationale, lancet-il<br />
en guise d’intro à son set,<br />
la plus étonnante des coopérations<br />
entre les agences spatiales<br />
du monde. »<br />
Cet événement pionnier est<br />
le fruit de la collaboration entre<br />
l’Agence spatiale européenne<br />
et un promoteur allemand,<br />
BigCityBeats, dont le festival<br />
de musique électronique sur<br />
les flots – le World Club Dome<br />
Cruise Edition – a diffusé le<br />
set de Parmitano pour les chanceux<br />
fêtards flottants basés<br />
à Ibiza. « J’avais les larmes aux<br />
yeux en voyant Luca hisser le<br />
drapeau de notre World Club<br />
Dome à bord de la Station spatiale,<br />
a déclaré Bernd Breiter,<br />
le PDG de BigCityBeats, après<br />
la prestation. Les mots me<br />
manquent pour décrire ce que<br />
j’ai ressenti au moment où la<br />
musique a retenti en direct<br />
depuis l’espace. Je rêvais<br />
depuis de nombreuses années<br />
de créer le premier club dans<br />
les étoiles et plus largement de<br />
tisser un lien entre science et<br />
musique. J’espère sincèrement<br />
que les générations à venir<br />
s’en inspireront. »<br />
bigcitybeats.tv<br />
BIG CITY BEATS LOU BOYD<br />
24 THE RED BULLETIN
SON PRO<br />
ÉCOUTEURS SANS FIL JBL<br />
JBL.COM
SAMPA THE GREAT<br />
Le son de la<br />
diasporap<br />
Née en Zambie et installée en Australie, l’étoile<br />
montante du rap politique explique comment un<br />
retour aux sources peut façonner votre avenir.<br />
Comment avez-vous surmonté vos<br />
doutes ?<br />
En échangeant avec les autres. Le sentiment<br />
de vivre les choses seul rend vulnérable.<br />
J’essaie toujours de parler de la<br />
vie avec les gens que je croise, cela aide<br />
à prendre conscience des peurs et<br />
angoisses que nous avons en commun.<br />
Comprendre que nous sommes tous<br />
confrontés aux mêmes difficultés aide<br />
à dédramatiser son cas personnel et<br />
incite à chercher les réponses dans<br />
l’acquisition du savoir.<br />
En mars de l’année dernière, Sampa<br />
Tembo, alias Sampa <strong>The</strong> Great,<br />
remportait avec Birds And <strong>The</strong> BEE9 le<br />
Australian Music Prize. Cette distinction<br />
prestigieuse pour tout musicien australien<br />
récompense l’excellence créative<br />
et non les ventes d’albums. Pourtant,<br />
Tembo n’est pas d’origine australienne,<br />
mais zambienne. Elle a quitté son pays<br />
natal en 2014 pour étudier la production<br />
audio. Dès sa première parution,<br />
<strong>The</strong> Great Mixtape sortie en 2015, la<br />
rappeuse suscite la curiosité des<br />
magazines de rap australiens, qui la<br />
consacrent comme l’une des leurs.<br />
L’idée du retour au pays est le fil<br />
conducteur des 19 titres de <strong>The</strong> Return,<br />
son premier album officiel sorti chez le<br />
label britannique Ninja Tune. La jeune<br />
femme de 26 ans nous explique pourquoi<br />
elle a réalisé la vidéo du single<br />
Final Form en Zambie, et comment elle<br />
a surmonté son manque de confiance.<br />
THE RED BULLETIN : Pourquoi avoir<br />
tourné la vidéo de Final Form en<br />
Zambie en y incluant vos amis et<br />
vos parents ?<br />
SAMPA THE GREAT : Je vis en Australie<br />
où j’ai lancé ma carrière d’artiste sans<br />
jamais me produire dans mon pays où<br />
aucune radio ne diffusait mes morceaux.<br />
Ma carrière en Australie a décollé<br />
subitement. Passages radio et concerts<br />
se sont enchaînés, et je suis même<br />
reconnue comme Australienne. Les<br />
Zambiens s’étonnaient alors de ne pas<br />
me voir me produire au pays, j’ai donc<br />
décidé de faire quelque chose pour me<br />
reconnecter avec eux.<br />
Comment avez-vous vécu ce retour ?<br />
La boucle était bouclée, je retrouvais ma<br />
terre natale en tant qu’artiste. Cela ne<br />
me gêne pas qu’on dise de moi que je<br />
suis basée en Australie, c’est en partie<br />
vrai. Au pays, mes amis me rappellent<br />
qu’ils savent d’où je viens, et je réponds<br />
n’avoir aucun contrôle en la matière.<br />
Pour moi, l’important était de raconter<br />
l’histoire qui m’a façonnée et ne pas<br />
laisser d’autres le faire à ma place.<br />
Que signifie ce retour au pays pour<br />
vous ? Vous y sentez-vous plus enracinée<br />
artistiquement désormais ?<br />
En Zambie, l’éducation ne tolère pas<br />
les prétentieux. Quand ma carrière a<br />
décollé, mes parents m’ont vite recadrée.<br />
Le retour aux sources consolide la<br />
progression. Ça vous rappelle d’où vous<br />
venez, et permet de remettre les choses<br />
en perspective, de se retourner pour voir<br />
le chemin parcouru. C’est important.<br />
En quoi avez-vous progressé ces<br />
dernières années ?<br />
J’ai plus d’assurance. Je fais ce pour<br />
quoi je suis née. Au début, j’étais rongée<br />
par le doute, car dans ma famille personne<br />
avant moi ne faisait de la musique<br />
en professionnel. Le fait d’y être parvenue<br />
et d’en tirer du plaisir renforce ma<br />
confiance en moi. Progressivement,<br />
l’assurance et le respect de soi se sont<br />
aussi accrus tout comme la volonté<br />
d’apprendre et de travailler sur mes<br />
faiblesses, afin d’éviter de tomber dans<br />
le piège de la suffisance.<br />
Vous avez dit un jour qu’un bon étudiant<br />
s’efforce de maîtriser ce en<br />
quoi il est doué, mais aussi ce qui lui<br />
fait défaut. Qu’avez-vous tenté de<br />
maîtriser en préparant <strong>The</strong> Return ?<br />
Tant de choses. Pour résumer, je dirais<br />
que j’ai tenté de mettre les choses en<br />
perspective. Avec <strong>The</strong> Return, l’idée<br />
d’un impossible retour au pays, quelle<br />
qu’en soit la raison, me consumait<br />
jusqu’à ce que je rencontre des gens<br />
sans aucun espoir de retour, contraints<br />
de se créer une nouvelle patrie. Cela m’a<br />
poussée à prendre du recul et à constater<br />
que mon petit malaise et l’exil que je<br />
ressentais pesaient peu comparés aux<br />
leurs. J’ai compris que j’étais privilégiée,<br />
contrairement à ce que j’imaginais.<br />
Qu’a produit en vous cette prise de<br />
conscience ?<br />
Je me suis demandé ce que j’allais faire<br />
de ce privilège. S’il m’est donné de rentrer<br />
chez moi, je partagerais tout ce que<br />
je sais. Si l’occasion se présentait, je<br />
transmettrais aux Zambiens qui n’ont<br />
pas la chance de retourner chez eux ce<br />
qu’est notre patrie et notre culture.<br />
C’est ce sentiment de posséder un<br />
savoir dont l’autre est dépourvu<br />
et dont il pourrait bénéficier. Cette<br />
transmission devient un devoir pour<br />
la diaspora.<br />
<strong>The</strong> Return, premier album de Sampa<br />
<strong>The</strong> Great, est disponible sur Ninja<br />
Tune ; sampathegreat.com<br />
BARUN CHATTERJEE<br />
26 THE RED BULLETIN
« Pour moi,<br />
l’important était de<br />
raconter l’histoire<br />
qui m’a façonnée. »
PLAYLIST<br />
Quand<br />
le Belge<br />
arrive<br />
Nos voisins pèsent dans le hiphop<br />
: le DJ et producteur belge<br />
Todiefor raconte des titres qui<br />
ont marqué son existence.<br />
Pour Todiefor, tout commence<br />
quand les serveurs du jeu en<br />
ligne World of Warcraft doivent<br />
passer en maintenance durant<br />
toute une nuit. Ce soir-là, pour<br />
passer le temps, le jeune geek<br />
télécharge le logiciel Fruity<br />
Loops et se prend de passion<br />
pour la production musicale.<br />
Il arrête l’école, passe ses<br />
soirées à composer sur son<br />
ordi, puis rencontre un certain<br />
Roméo Elvis qu’il invite à poser<br />
sur un de ses instrus. La suite ?<br />
Plusieurs collaborations,<br />
l’explosion du rap belge et de<br />
ses artistes et un single, Signals,<br />
qui s’est exporté bien au-delà<br />
des frontières du plat pays.<br />
Entre deux sessions studio, le<br />
producteur belge revient avec<br />
nous sur les morceaux décisifs<br />
qui ont tout changé pour lui.<br />
t.A.T.u<br />
All <strong>The</strong> Things She Said (2002)<br />
C’est le tout premier CD que j’ai<br />
reçu, quand j’avais 7 ou 8 ans. On<br />
m’avait offert une petite chaîne<br />
hifi pour Noël accompagnée de ce<br />
disque. Le truc, c’est qu’il n’y avait<br />
que deux morceaux dessus, la<br />
version en anglais et celle en<br />
russe, et comme je n’avais rien<br />
d’autre à écouter pendant plusieurs<br />
semaines, je l’ai saigné à<br />
fond, au point de connaître par<br />
cœur les paroles, en anglais ET<br />
en russe ! Merci Papa Maman !<br />
Rammstein<br />
Feuer Frei! (2002)<br />
Avec mon frère, on passait notre<br />
temps à télécharger des sons sur<br />
eMule ou Shareaza. Une fois, il est<br />
revenu à la maison en me disant :<br />
« J’ai trouvé un méga truc, faut que<br />
t’écoutes ! » Il avait téléchargé le<br />
nouvel album de Rammstein. On l’a<br />
écouté en boucle et ce morceau m’a<br />
particulièrement marqué, avec son<br />
mélange d’électro et de metal super<br />
énervé. C’est clairement à partir de<br />
là que j’ai commencé à apprécier les<br />
sonorités électroniques.<br />
<strong>The</strong> Subs & Party Harders<br />
Pope of Dope (2010)<br />
Ado, je n’étais pas un sorteur (sic),<br />
plutôt un petit geek qui faisait des<br />
sites Internet et qui jouait à World<br />
of Warcraft, mais mes potes m’ont<br />
traîné au Fuse, un club mythique de<br />
Bruxelles. À l’époque, on commençait<br />
à entendre ce mélange de rap/<br />
slam en français qui racontait des<br />
trucs horribles sur un beat electro<br />
super dur. J’ai mis un an à percuter<br />
que c’était belge ! Tous les DJ<br />
jouaient ce titre, ça passait à la<br />
radio et c’est devenu disque d’or.<br />
Roméo Elvis & Caballero<br />
Bruxelles Arrive (2016)<br />
Alors que j’habitais encore chez<br />
mes parents, à Anderlecht, et que<br />
je bossais jour et nuit dans ma<br />
chambre d’ado sur des sons, j’ai<br />
rencontré mon manager, qui gère<br />
aussi des artistes comme Damso,<br />
Roméo Elvis, Caballero… Il a cru en<br />
moi et m’a accueilli dans son écurie.<br />
Quand Bruxelles Arrive est sorti,<br />
c’est devenu un hit, on l’a entendu<br />
partout en Belgique, en France<br />
et ça a profité à tout le monde. On<br />
nous prenait enfin au sérieux.<br />
MARIE-VALENTINE GUILLARD ANTOINE CARBONNAUX<br />
28 THE RED BULLETIN
SOCIAL ET<br />
PERFORMANCE<br />
Gardien d’immeuble, écrivain,<br />
militant associatif, fondateur d’une<br />
maison d’édition, organisateur du<br />
tournoi de basket le plus ambitieux<br />
de France… BAKARY SAKHO est<br />
sans aucun doute le type le plus<br />
hyperactif du XIX e arrondissement.<br />
Texte SMAËL BOUAICI<br />
Photos FELIPE BARBOSA<br />
APOLLINE CORNUET<br />
30 THE RED BULLETIN
Bakary Sakho, l’homme<br />
multiple, motivé par une<br />
réussite… sur le terrain.<br />
Ci-contre : si ces joueuses<br />
peuvent s’exprimer sur le<br />
playground de Stalingrad,<br />
c’est parce que Bakary et<br />
son crew l’ont sauvé de<br />
l’abandon.<br />
« À QUEL MOMENT<br />
VA-T-ON AVOIR UN<br />
VRAI DISCOURS ? »
uand les autres<br />
laissent leur vie se dérouler en pilotage<br />
automatique, lui n’a qu’une philosophie ;<br />
prendre le volant et se donner les moyens<br />
d’atteindre ses objectifs. Français, Noir,<br />
musulman, vivant dans un quartier populaire<br />
? Bakary Sakho est surtout un mec<br />
qui bosse et qui ne jure que par la « performance<br />
sociale ». Sa première perf ? Elle<br />
date de 1996 : pour aider sa mère qui luttait<br />
afin d’obtenir un logement décent,<br />
après vingt ans passés dans un troispièces<br />
de 45 m² humide, « avec le plâtre<br />
qui se barrait », dans lequel se blottit sa<br />
famille de neuf personnes. Il a alors<br />
quinze ans, et il est stagiaire pour l’association<br />
Droit au logement (DAL), pour laquelle<br />
il organise des rassemblements devant<br />
les portes des bailleurs sociaux. « Ma<br />
mère était la première à se mobiliser dans<br />
le quartier, pour elle et pour des familles<br />
qui vivaient dans des conditions pires que<br />
la nôtre. Ça n’était pas une démarche politique.<br />
J’ai fait ça par amour pour ma<br />
mère, pour tout ce qu’elle avait fait pour<br />
moi », raconte-t-il assis au bureau de son<br />
QG cosy du 159 rue de Flandres, véritable<br />
petit temple dédié au basket.<br />
Il faudra quelques années pour reloger<br />
les familles, mais la machine à do-it-yourself<br />
est lancée. Elle montera en régime<br />
après un drame, la mort d’un copain de<br />
lycée d’une crise cardiaque. Une véritable<br />
prise de conscience pour lui et son groupe<br />
d’amis réunis sous l’alias BGA, pour Black<br />
Guerrilla Army, en référence au film Les<br />
Princes de la ville de Taylor Hackford.<br />
« IL FAUT<br />
FAIRE EN<br />
SORTE DE NE<br />
PLUS ÊTRE<br />
EXCLUS DES<br />
CERCLES DE<br />
DÉCISION. »<br />
« Après cette mort soudaine, j’ai réalisé<br />
qu’il fallait que je laisse une trace. J’ai<br />
décidé de moins traîner dans la rue et de<br />
donner un sens à ma vie avec tous ceux<br />
autour de moi. On a décidé de positiver<br />
ce qu’on faisait et BGA est devenu Braves<br />
Garçons d’Afrique. » Il se met à travailler<br />
sur la question de l’identité, et avec Christiane<br />
Taubira sur la loi sur la reconnaissance<br />
de la traite négrière. Déjà, il a dans<br />
l’idée de sortir de la Françafrique et de<br />
rééquilibrer les relations entre l’Hexagone<br />
et le continent noir : « D’un côté, on envoie<br />
des fusées dans l’espace, de l’autre, il n’y a<br />
pas d’eau potable. » Pendant cinq ans, il<br />
organise des conférences et débats avec<br />
des personnalités comme Lilian Thuram<br />
ou Olivier Laouchez. « L’idée, c’était de<br />
dire qu’on est fiers d’être Français, mais<br />
qu’on a aussi cette double culture, qui est<br />
racisée : quand on va quelque part, on est<br />
vus comme Noirs. On était dans l’air du<br />
temps, avec le débat sur l’identité nationale<br />
lancé par Sarkozy. »<br />
Un déclencheur<br />
Jusque-là, Bakary Sakho semblait parti<br />
pour une carrière assurée dans le milieu<br />
associatif. Mais sa conscience est bousculée<br />
en 2005, avec la mort de Zyed et<br />
Bouna, deux jeunes qui fuyaient la police<br />
à Clichy-sous-Bois, déclenchant trois<br />
semaines d’émeutes dans les cités françaises.<br />
« Pour moi, cet événement a été le<br />
tournant dans le milieu associatif. En tant<br />
qu’acteur principal, j’ai été choqué de voir<br />
que la réponse politique n’a pas été à la<br />
hauteur. Il n’y avait pas de leader, on ne<br />
parlait pas d’une même voix ! Nous vivons<br />
l’injustice de manière claire mais à quel<br />
moment va-t-on avoir un vrai discours ? »<br />
C’est lors de son séjour aux États-Unis,<br />
quelques mois plus tard, qu’il prend<br />
conscience des carences dans la « com »<br />
des quartiers populaires. Invité par l’ambassade<br />
américaine dans le cadre du<br />
programme des jeunes leaders internationaux,<br />
il se rend compte « qu’à part avoir<br />
fait du tort à l’intérieur des cités, on<br />
n’avait pas porté de message à l’extérieur<br />
». Pendant trois semaines, il rencontre<br />
des maires, députés, sénateurs et<br />
apprend « le lobbying, la force de la communauté,<br />
l’indépendance financière ».<br />
« Ce que j’ai aimé, c’est que les Américains<br />
n’attendent rien des politiques. Ils<br />
se prennent en main pour initier des levées<br />
de fonds, comme ce médecin qui a<br />
lancé Youthville à Detroit, grâce à son<br />
association avec un cadre de Kellogg’s.<br />
Ils ont levé 24 millions de dollars pour un<br />
bâtiment immense avec terrain de sport,<br />
piscine, studio, salles de cours, centre de<br />
réinsertion… » Il en revient conforté dans<br />
l’idée que si quelque chose doit bouger<br />
dans les quartiers, il faut que ça vienne<br />
de l’intérieur. Il se met alors à arroser sa<br />
communauté de cette philosophie. Il récupère<br />
une salle dans un centre sportif du<br />
quartier, où sont dispensés des cours de<br />
CrossFit ou de basket, organise une dizaine<br />
d’événements par an, entre concerts,<br />
conférences, projections de films… « Aujourd’hui,<br />
on a un staff de 80 personnes,<br />
de 12 à 45 ans, explique-t-il. On partage la<br />
valeur du travail et de la discipline. Et on<br />
n’attend pas les autres pour faire. Si, pour<br />
un événement, on n’a que 4 000 euros sur<br />
les 10 000 nécessaires, on ne va pas aller<br />
pleurnicher aux portes. On fait avec. On<br />
n’a rien mais l’idée est bonne et elle est<br />
réalisable quand même ? On le fait. C’est<br />
ce qui s’est passé pour notre dernière bloc<br />
Les proches de Bakary : en bleu, Mody Niakaté,<br />
chef de projet digital. À droite, Sali Sylla,<br />
présidente de l’association Oasis Sportive.<br />
En jeans, Paul Odonnat, co-fondateur des<br />
All Parisian Games et de Faces Cachées Éditions.<br />
À vélo, Elias Konaté, animateur réseau.<br />
32 THE RED BULLETIN
THE RED BULLETIN 33
« TU NE SAIS<br />
PAS ÉCRIRE<br />
MAIS TU AS<br />
UNE BELLE<br />
HISTOIRE À<br />
RACONTER ?<br />
VIENS ! »
L’ÉCOSYSTÈME DE<br />
LA BALLE ORANGE<br />
Quand il n’est pas en train de<br />
monter des projets dans tous<br />
les sens, Bakary Sakho se vide<br />
la tête avec le basket. Mais là<br />
encore, il a trouvé le moyen<br />
de faire progresser tout l’écosystème<br />
de la balle orange,<br />
avec l’organisation des All<br />
Parisian Games, un tournoi<br />
calqué sur le All-American<br />
aux USA, qui rassemble les<br />
meilleurs joueurs de lycée du<br />
pays. Chaque année depuis<br />
2013, 600 joueurs et joueuses<br />
de moins de 20 ans d’Île-de-<br />
France participent aux sélections,<br />
d’où sortent les 48 meilleurs<br />
(24 garçons, 24 filles),<br />
qui représentent la rive droite<br />
et la rive gauche. « On ne voulait<br />
pas créer un simple tournoi,<br />
mais un événement qui<br />
allait donner de la force à la<br />
culture basket à Paris. » L’initiative<br />
cartonne, soutenue par<br />
des joueurs NBA de passage<br />
dans la capitale, dont Lebron<br />
James en 2018.<br />
Bakary et son compère<br />
Paul sont aussi à l’origine du<br />
sauvetage du playground historique<br />
de Stalingrad, sous le<br />
métro aérien. Devenu impraticable,<br />
il devait disparaître.<br />
« On s’est positionnés en<br />
disant que ce terrain était un<br />
héritage du quartier, et qu’il<br />
fallait le garder. On a obtenu<br />
un budget de la mairie pour<br />
proposer un nouveau projet<br />
dans cet espace, qui lierait<br />
sport et cultures urbaines. »<br />
Le terrain flambant neuf a<br />
été inauguré le 21 septembre<br />
dernier, et depuis, il accueille<br />
sans discontinuer bloc parties<br />
hip-hop et matches à haute<br />
intensité.<br />
« MOI-MÊME,<br />
J’AI DU MAL À<br />
COMPRENDRE<br />
MON PROPRE<br />
CHEMIN. »<br />
party. On n’avait pas un rond, un copain<br />
a ramené des platines, l’autre la sono,<br />
et on a organisé un open mic. »<br />
Écrire son histoire<br />
Lassé par trente années de politique de<br />
la ville sans résultats, Bakary, qui trouve<br />
vaines les manifestations, a compris que<br />
pour être efficace, il fallait viser haut :<br />
« Il faut faire en sorte de ne plus être exclus<br />
des cercles de décision. Et ne pas se<br />
contenter des conseils de quartier, où<br />
l’une s’occupe des merdes de chien et<br />
l’autre se plaint des loyers qui explosent.<br />
Il faut être présent là où l’argent est distribué.<br />
» C’est dans cet esprit qu’il a monté<br />
sa maison d’édition, Faces cachées, inaugurée<br />
par son propre livre, Je suis, en<br />
2015, un plaidoyer pour l’énorme potentiel<br />
des quartiers populaires, qui fut parfois<br />
le premier livre lu hors programmes<br />
scolaires par des lycéens. Évidemment,<br />
pas question pour lui d’aller démarcher<br />
les grandes maisons parisiennes. « Le projet<br />
ne commence pas par l’envie de sortir<br />
un livre mais par celle de créer une maison<br />
d’édition. On a regardé comment ça<br />
fonctionnait et on s’est lancés. » Une idée<br />
cohérente avec sa démarche de faire<br />
s’exprimer les habitants des cités. « Il y a<br />
beaucoup de belles histoires à raconter.<br />
Au lieu de se plaindre sur le mode : “On<br />
ne parle pas de nous dans les livres”, écrivons<br />
les nôtres ! C’est important de faire<br />
connaître nos histoires, à l’extérieur, mais<br />
déjà pour nous ! »<br />
Depuis quatre ans, Faces cachées a<br />
édité quatre livres et vient de signer avec<br />
un distributeur pour se concentrer sur<br />
l’édition. La porte est ouverte à tous les<br />
talents : « Tu ne sais pas écrire mais tu as<br />
une belle histoire à raconter ? Viens ! Tu<br />
sais écrire mais tu avais peur de le faire ?<br />
Viens ! Tu ne sais pas écrire et tu n’as pas<br />
d’histoires à raconter ? Bon ben salut. Le<br />
social oui, mais la performance avant<br />
tout. » Performant, Bakary Sakho l’a été<br />
en 2017, lorsque le XIX e arrondissement<br />
a été secoué par une querelle entre<br />
bandes rivales qui causa un mort. Il<br />
monte au créneau et met les parents, qui<br />
« ne prennent plus leurs responsabilités »,<br />
les associations « qui ne font pas leur<br />
travail » et « les milieux politiques qui<br />
laissent faire tant que ça n’éclabousse pas<br />
les autres quartiers » devant leurs responsabilités.<br />
Il va même mettre la pression à<br />
l’imam de la mosquée du coin pour qu’il<br />
participe au retour à la paix. « J’ai allumé<br />
tout le monde politiquement ! Pour la<br />
première fois, après mes vidéos sur Facebook,<br />
on avait un car de CRS dans la cité.<br />
J’ai dit qu’on serait tous les dimanches sur<br />
le parvis de la gare Rosa-Parks tant que<br />
ça ne s’arrêterait pas. Quand on a lancé<br />
l’appel, les mamans sont sorties et tout<br />
s’est calmé tout de suite », raconte celui<br />
qui est devenu aujourd’hui bien plus<br />
qu’un gardien d’immeuble.<br />
La performance sociale<br />
Il quittera d’ailleurs sa loge en 2020,<br />
pour se lancer dans une nouvelle aventure<br />
avec son collègue Paul, avec qui il<br />
monte tous ses projets. Leur association,<br />
Le 99, va devenir une agence, qui exploitera<br />
le concept de performance sociale<br />
et surtout le stakhanovisme de ses fondateurs.<br />
« Aujourd’hui, je donne 35 heures<br />
par semaine à l’association, en plus de<br />
mes 35 heures de travail. L’an prochain,<br />
je donnerai 70 heures par semaine à<br />
l’agence ! On a bien travaillé, on a un modèle<br />
économique. Gardien d’immeuble,<br />
c’était un choix, je n’ai jamais voulu vivre<br />
de la politique ou du milieu associatif. Je<br />
n’ai pas gagné un euro, mais ça m’a ouvert<br />
un réseau incroyable et offert des<br />
compétences. Je donne des cours à la fac<br />
de Lyon, l’année prochaine à HEC, je suis<br />
parfois payé pour animer des colloques,<br />
qui l’eût cru ? »<br />
Si tout se passe comme il le veut,<br />
Bakary se voit bien, d’ici une dizaine<br />
d’années, faire la navette entre France et<br />
Afrique, pour travailler à une forme de<br />
réconciliation identitaire, « une nouvelle<br />
Françafrique » : « Un truc intelligent, où<br />
tout le monde s’y retrouve, pour éviter<br />
que les gens ne tombent dans cette schizophrénie.<br />
» Histoire de boucler une<br />
boucle qui s’étire dans tous les sens sans<br />
jamais casser depuis plus de vingt ans :<br />
« La dernière fois, j’étais à un colloque à<br />
Arras avec des intellectuels, des docteurs<br />
en sociologie… J’étais non seulement<br />
intervenant mais aussi l’un des grands<br />
témoins. Et sur mon badge, il y avait<br />
écrit : “Bakary Sakho, gardien d’immeuble<br />
et écrivain.” J’ai posté la photo sur les réseaux<br />
en rigolant : “Même moi, j’ai du mal<br />
à comprendre mon propre chemin !” »<br />
Instagram : @allparisiangames<br />
THE RED BULLETIN 35
Sunni<br />
le<br />
sage<br />
C’est un enfant prodige qui passait ses nuits par terre<br />
dans un bureau. Mais désormais SUNNI BRUMMITT est<br />
devenu un expert de la danse hip-hop, célèbre dans le<br />
monde entier. Le B-Boy de 24 ans nous raconte comment<br />
il remporte ses battles de manière créative et surmonte<br />
les stéréotypes agressifs sur sa discipline. Il s’exprime<br />
également sur le potentiel olympique du break.
Texte RACHAEL SIGEE<br />
Photos DAVID CLERIHEW<br />
37
Sunni Brummitt connaît la réalité du breakdance<br />
et lorsqu’il dit : « Il y a des hauts et<br />
des bas, comme dans n’importe quel<br />
boulot », il le pense vraiment. Assis<br />
sur un siège grinçant du studio de<br />
danse Centre Stage dans le quartier<br />
de Maryland, dans l’est londonien,<br />
il souligne que notre interview a lieu<br />
« dans le beau bureau ». Alors que<br />
celui d’à côté, avec le sol en béton,<br />
fut son refuge pendant un an, il y<br />
passait ses nuits : « Je me réveillais<br />
en toussant tous les matins. »<br />
Deux ans plus tôt, Sunni, enfant<br />
prodige du breakdance, était invité à<br />
toutes les compétitions importantes<br />
aux quatre coins de la planète. Il<br />
gagnait assez d’argent pour se décider<br />
à s’installer seul à Londres.<br />
C’était avant la crise, quand le<br />
groupe de street-dance Diversity<br />
remporta Britain’s Got Talent (dont<br />
La France a un incroyable talent est<br />
l’adaptation française) et que les<br />
danseurs étaient très demandés.<br />
Puis la bulle a éclaté. « J’ai traversé<br />
plusieurs années où il a fallu<br />
que je me décide entre être fauché et<br />
m’entraîner ou bien ne pas être fauché<br />
et ne pas m’entraîner, expliquet-il.<br />
Il n’y avait pas de juste milieu,<br />
pas pour le type de danse que je voulais<br />
pratiquer. Je pouvais enseigner,<br />
mais je voulais faire de la compétition.<br />
Je voulais être sur scène. »<br />
Sunni, 24 ans, est de retour à<br />
Londres pour une visite en coup de<br />
vent seulement. Il est arrivé ce matin<br />
des Pays-Bas, où il vit en ce moment,<br />
et repart demain pour une semaine<br />
en Hollande, en Autriche et en Slovaquie.<br />
Plus besoin de dormir sur des<br />
sols en béton, Sunni est aujourd’hui<br />
un B-boy à succès de renommée<br />
internationale, dont les victoires<br />
incluent celles de Notorious IBE,<br />
Unbreakable et les championnats<br />
britanniques de hip-hop deux années<br />
de suite. Il est également le premier<br />
membre des <strong>Red</strong> Bull BC One All Star<br />
originaire de Grande-Bretagne.<br />
Difficile de croire que Sunni –<br />
léger, plein d’énergie, et, lorsque<br />
nous nous rencontrons, en train de se<br />
délecter de Haribo – a déjà presque<br />
dix ans d’expérience à son compte.<br />
Il fut catapulté au sommet de la<br />
gloire en se qualifiant pour les finales<br />
du championnat du monde de breakdance<br />
en Angleterre en 2011, à l’âge<br />
de quinze ans. Simplement heureux<br />
d’être là et de vivre cette expérience,<br />
il finit même par battre la superstar<br />
sud-coréenne Hong 10 en quart de<br />
finale. Rétrospectivement, il compare<br />
cet événement à la sensation « Cori<br />
Gauff », cette ado qui a battu Venus<br />
Williams à Wimbledon cette année.<br />
« C’était la même situation. Cela<br />
reste probablement l’un des battles<br />
les plus célèbres auxquels j’ai participé.<br />
Dans la scène du break, c’est<br />
devenu viral. C’était un bouleversement<br />
de dingue, parce que personne<br />
n’avait représenté l’Angleterre depuis<br />
sept ou huit ans, et voilà que j’arrive<br />
et que je bats un gars qui était donné<br />
comme favori de la compétition. Et<br />
en plus, je le fais tout au début. À<br />
vrai dire, c’était presque triste, parce<br />
que c’était mon idole, l’idole de tout<br />
le monde. Tout Londres pleurait et<br />
moi j’étais sur scène genre “Nooooon,<br />
désolé, bro...” J’étais complètement<br />
dépassé. »<br />
Cela faisait beaucoup à digérer<br />
pour l’ado qu’il était, et lorsqu’on lui<br />
demande comment il s’en est sorti, il<br />
38 THE RED BULLETIN
PREVIOUS PAGE: COAT & JEANS, DOLCE & GABBANA; SHOES, TIMBERLAND. THIS PAGE: T-SHIRT & TROUSERS, DOLCE & GABBANA; JACKET, DSQUARED<br />
« Il a fallu que je<br />
me décide entre<br />
être fauché et<br />
m’entraîner ou<br />
bien ne pas être<br />
fauché et ne pas<br />
m’entraîner. »<br />
THE RED BULLETIN 39
hausse les épaules : « Je n’y suis pas<br />
vraiment arrivé. » L’industrie du<br />
breakdance n’était pas faite pour<br />
quelqu’un d’aussi jeune, et Sunni<br />
s’est retrouvé sous pression, à dormir<br />
dans des chambres d’hôtel anonymes<br />
dans des pays qu’il n’avait pas le<br />
temps de visiter ; pendant ce temps,<br />
ses copains vivaient une vie d’ado, à<br />
organiser des fêtes et tenter d’entrer<br />
en boîte de nuit. Il a fini par arrêter<br />
complètement la danse pendant un<br />
an afin de se débarrasser des « trucs<br />
idiots de l’adolescence ».<br />
« Je ne me mets pas<br />
souvent en colère<br />
– je suis tout le<br />
temps en train de<br />
sourire ou de me<br />
marrer. »<br />
Mais la scène finit par le rattraper,<br />
et Sunni rempile,<br />
avec l’appui de sa famille.<br />
« Ma mère me soutient à<br />
fond », dit-il en attrapant son téléphone<br />
pour montrer des photos où ils<br />
sont ensemble. « C’est une vrai hippie.<br />
Lorsqu’elle était jeune, elle a pris<br />
une année sabbatique, puis s’est finalement<br />
retrouvée dans un cirque pendant<br />
huit ans, et elle est revenue avec<br />
un gamin : moi. C’est ça, ma mère.<br />
Du délire. »<br />
Né en Malaisie, Sunni a quatre ans<br />
lorsque sa mère revient en Angleterre.<br />
Après s’être lassé du foot et de<br />
l’escalade, il passe son temps libre à<br />
acquérir des aptitudes différentes et<br />
plus inhabituelles, grâce à sa mère et<br />
son expérience du cirque. Sunni<br />
prend son premier cours de breakdance<br />
à l’âge de neuf ans.<br />
« Je faisais tout le temps des acrobaties<br />
avec ma mère, dit le danseur.<br />
Dès que j’étais libre, je la retrouvais<br />
au cirque et passais du temps avec<br />
ses amis – c’était normal. Rétrospectivement,<br />
c’était dingue, mais je n’y<br />
pensais jamais à l’époque. Je faisais<br />
de gros progrès en breakdance. Je<br />
savais déjà comment me servir de<br />
mon poids, parce que cela faisait cinq<br />
ans que je faisais des figures sur les<br />
mains. » Ayant dansé dans presque<br />
tous les contextes imaginables, dont<br />
deux ans dans la boîte de nuit londonienne<br />
haut de gamme Cirque le<br />
Soir, ce sont les battles qui font vraiment<br />
vibrer Sunni. Alors que certains<br />
danseurs sont célèbres pour leurs<br />
prestations expressives ou pour leur<br />
puissance, ce sont ses head spins vertigineux<br />
et sa créativité (il ne se sert<br />
d’aucun mouvement de base) qui<br />
démarquent Sunni. Ce type actionne<br />
son corps avec une aisance<br />
incroyable.<br />
« Je suis très mince et très léger.<br />
Lorsque je touche le sol, je rebondis.<br />
Grâce à mon poids, je vole. Mais je<br />
n’aime pas la muscu. Je déteste ça !<br />
J’ai participé une fois à un camp<br />
d’entraînement physique, et il y avait<br />
deux danseurs du Japon et du Maroc<br />
super musclés. Nous tournions<br />
autour des instruments et l’un des<br />
gars m’a demandé : “Combien de<br />
répétitions arrives-tu à faire sur cette<br />
machine ?” Je ne savais pas quoi lui<br />
répondre. “Mec, je ne sais même pas<br />
à quoi sert ce truc !” »<br />
Pour Sunni, il s’agit de bien plus<br />
que de se pointer et de faire les<br />
moves. « Il y a une différence fondamentale<br />
entre être un bon danseur et<br />
être un bon danseur de compétition,<br />
explique-t-il. Il existe un grand<br />
nombre de tactiques auxquelles personne<br />
ne pense vraiment. Disons<br />
qu’il y a trois tours, et ce gars est<br />
meilleur que toi, mais il débute le<br />
battle. Il fait un round de malade,<br />
mais qui dure une minute et demie,<br />
puis tu t’engages et en fais un de<br />
vingt secondes. Là tu sais que ses<br />
deux ou trois prochains rounds vont<br />
être pauvres parce que tu ne lui as<br />
pas laissé le temps de récupérer. »<br />
Désormais, Sunni se rend dans<br />
deux ou trois pays par semaine pour<br />
participer à des compétitions – en<br />
tant que juge ou participant – et<br />
organise des stages, mais il garde les<br />
battles en tête, et sait qu’il y a un million<br />
de possibilités de remporter un<br />
battle. « Il peut y avoir une personne<br />
qui passe deux minutes entières sur<br />
les mains et dont les pieds ne toucheront<br />
pas une seule fois le sol, et puis<br />
quelqu’un d’autre n’aura pas de force<br />
physique mais sera hypercréatif,<br />
innovateur et charismatique. Impossible<br />
de savoir qui gagnera avant de<br />
voir tout le battle. »<br />
Après avoir vécu sept ans à<br />
Newham, l’un des quartiers les plus<br />
défavorisés de Londres, Sunni ne se<br />
laisse pas impressionner par les faux<br />
durs, et la plupart des stéréotypes<br />
liés au fait d’être un B-Boy le laissent<br />
froid. « Les gens sont très attachés au<br />
cliché de ce à quoi un vrai B-Boy doit<br />
ressembler, et tout le monde semble<br />
vouloir y correspondre, indépendamment<br />
de qui ils étaient avant de<br />
débuter. Un peu mauvais garçon, un<br />
peu irrespectueux – quelqu’un qui se<br />
fiche de tout, qui ne sourit jamais.<br />
Ça me rend dingue. Les gens les plus<br />
sympas, des gens tellement cool,<br />
après un an de breakdance peuvent<br />
se retrouver transformés en gangster<br />
du Bronx. Là, tu te demandes : “Mais<br />
qu’est-ce qui lui arrive à celui-là ?”»<br />
Il y a six mois, Sunni a déménagé<br />
à Hilversum, une ville dans les environs<br />
d’Amsterdam, afin de mener<br />
une vie plus calme. « À Londres, je<br />
me réveillais au son des sirènes de<br />
police et j’allais me coucher au son<br />
des sirènes de police, explique-t-il.<br />
TROUSERS, SANDRO; BELT, DOLCE & GABBANA; SHOES, JOSHUA; JACKET, VINTAGE<br />
40 THE RED BULLETIN
Après avoir vécu dans<br />
un quartier tendu de<br />
Londres, Sunni s’est<br />
installé aux Pays-Bas.<br />
« Ici, plus de sirènes<br />
de police, mais des<br />
champs partout. »
« Nous nous trouvons<br />
à un moment charnière<br />
entre deux époques,<br />
celles du B-Boying en<br />
tant que forme d’art et<br />
en tant que sport pro. »<br />
STYLING: ADELE CANY. STYLING ASSISTANT: MORGAN HALL. GROOMING: SUSANA MOTA<br />
42 THE RED BULLETIN
« Il y a une différence fondamentale<br />
entre être un bon danseur et être<br />
un bon danseur de compétition. »<br />
JACKET, G STAR; T-SHIRT, JEANS & BELT, DOLCE & GABBANA; SHOES, TIMBERLAND<br />
Depuis que j’ai déménagé, je n’ai pas<br />
vu une seule voiture de police. Je vis<br />
au beau milieu des champs. Je sens<br />
aussi que je suis beaucoup plus calme<br />
intérieurement. »<br />
Si Sunni est détendu, le monde du<br />
breakdance est en plein mouvement,<br />
et il en vient à philosopher sur le<br />
positionnement de cette discipline,<br />
en passe d’être intégrée comme sport<br />
olympique à Paris en 2024. « C’est un<br />
moment charnière car nous nous<br />
trouvons entre deux époques. Ces<br />
vingt dernières années, le B-Boying<br />
en compétition était subjectif : trois<br />
juges et à la fin le jury se décide<br />
d’une manière ou d’une autre. Ça,<br />
aux JO, c’est impossible : il faut un<br />
système de points et un décompte.<br />
Tout le monde doit comprendre les<br />
décisions. Il y a aussi ceux de l’ancienne<br />
génération qui disent que l’on<br />
ne peut pas quantifier l’art. Nous<br />
sommes au milieu, entre le breakdance<br />
en tant que forme d’art et en<br />
tant que sport pro. »<br />
Sunni espère que le débat autour<br />
des JO forcera les différentes générations<br />
de B-Boy, parfois divisées, à se<br />
réunir. « Le B-Boying doit être<br />
reconnu, mais nous nous mettons<br />
sans cesse des bâtons dans les roues.<br />
Nous n’avons aucune infrastructure,<br />
pas de comité. Le skate et le break<br />
ont émergé au même moment, mais<br />
les skateurs ont avancé avec un but<br />
commun, tandis que nous n’arrivons<br />
pas à nous mettre d’accord. »<br />
Sunni poursuit : « Certains disent<br />
que nous sommes en train de perdre<br />
l’essence du vrai breakdance et de<br />
notre culture, mais je ne pense pas<br />
qu’elle se perde – je pense qu’elle<br />
progresse. Si vous aimez cette<br />
culture B-Boy de manière authentique,<br />
au lieu d’essayer d’inhiber ce<br />
qu’il y a de nouveau, il vaudrait<br />
mieux travailler à préserver ce qu’il<br />
y a d’ancien aussi. »<br />
Instagram : @sunnifourfizzy<br />
THE RED BULLETIN 43
La Coupe arctique
Un bien immobilier offrant<br />
des prestations rares : une<br />
vue sur les fans et le terrain<br />
de football de Sisimiut.<br />
La saison de foot qui dure une semaine<br />
Texte TOM WARD<br />
Photos BEN READ<br />
45
Le Groenland a pour ambition de se hisser sur la scène<br />
internationale du football, mais avec seulement trois mois<br />
de jeu sans neige par an, le match semble perdu d’avance.<br />
Il y a pourtant des joueurs qui pourraient transformer ce<br />
rêve en réalité : ceux-là se retrouvent dans la ville perdue<br />
de Sisimiut pour le seul tournoi annuel du pays.<br />
Ci-dessus : les joueurs de B-67 et leur rituel d’avant-match. En face : Helga, fervente supportrice des G-44, encourage son équipe favorite, qui vient de Qeqertarsuaq.<br />
46 THE RED BULLETIN
Àquarante kilomètres au-dessus du cercle<br />
arctique se déroule un match de foot de<br />
premier plan. À Sisimiut, sur la côte ouest<br />
du Groenland, sur un terrain aux 3/4 des<br />
dimensions réglementaires, les équipes<br />
B-67 et N-48 s’affrontent pour décrocher<br />
leur sésame en vue de la finale du tournoi<br />
national du pays, le Grønlandsbanken<br />
Final 6, qui a lieu tous les ans depuis<br />
1971, sur la maigre période sans neige<br />
(mi-juin à fin août).<br />
Situé au pied du Nasaasaaq (784<br />
mètres), le terrain en gazon synthétique<br />
est encerclé de maisons de ville traditionnelles<br />
aux couleurs vives, perchées au<br />
petit bonheur sur des affleurements de<br />
roche-mère groenlandaise. Armés de<br />
bruyantes cornes de brume, les supporteurs<br />
suivent le match depuis la falaise<br />
escarpée qui surplombe le terrain. Il y a<br />
des familles avec des chaises pliantes, des<br />
anciens passablement éméchés déclamant<br />
des chants en groenlandais ou en danois,<br />
une caméra de télévision en équilibre<br />
instable. Des chiens de traîneaux enchaînés<br />
à la roche devant les maisons avoisinantes<br />
joignent leurs hurlements aux cris<br />
des supporteurs. À l’ouest, on aperçoit les<br />
eaux du détroit de Davis. Par temps clair,<br />
on peut observer les parties de chasse des<br />
baleines boréales en quête de poissons.<br />
Mais aujourd’hui, toute l’attention est<br />
tournée sur le terrain. Victorieuse à treize<br />
reprises de ce championnat national<br />
d’une semaine, l’équipe de B-67 – originaire<br />
de Nuuk, la capitale – est considérée<br />
comme l’équivalent groenlandais du Real<br />
Madrid (de nombreuses équipes au<br />
Groenland sont désignées par une abréviation<br />
de leur nom complet, qui mentionne<br />
leur année de création : B-67 pour<br />
Boldklubben af 1967). Avec dix victoires,<br />
N-48 (Nagdlunguak 1948), une équipe<br />
Qeqertarsuaq<br />
Qaqortoq<br />
GROENLAND<br />
Sisimiut<br />
Nuuk<br />
Ilulissat<br />
Le Groenland est la plus grande île au<br />
monde. Avec 2 166 km², elle fait la taille<br />
des îles Britanniques, de la France, de<br />
l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Italie et<br />
de l’Autriche réunies. 80 % du pays est<br />
recouvert par l’inlandsis du Groenland et<br />
son point le plus septentrional se situe<br />
seulement à 740 km du pôle Nord.<br />
THE RED BULLETIN 47
d’Ilulissat, dans l’ouest du pays, est son<br />
principal adversaire. Le match du jour est<br />
donc empreint d’une certaine tension historique.<br />
Si B-67 venait à perdre, ce serait<br />
la première fois depuis 2009 qu’ils n’atteindraient<br />
pas la finale.<br />
Mais pour ce club, qui jouera à plus de<br />
320 km de chez lui, avec un effectif composé<br />
en majorité de joueurs de l’équipe<br />
des moins de 19 ans, le match ne sera<br />
clairement pas du gâteau. Un sondage<br />
local sur Facebook évalue leurs chances<br />
de victoire à tout juste 30 %. S’ils s’inclinent,<br />
outre la petite finale, leur saison<br />
de foot d’une semaine se terminera ici et<br />
ne reprendra que dans 365 jours. Quand<br />
on vit sur le territoire le moins densément<br />
peuplé du monde – recouvert de<br />
glace sur 80 % de sa surface et où la neige<br />
tombe sept mois et demi par an –, les<br />
opportunités de jouer au football sont<br />
rares. Pour B-67, les montagnes aux sommets<br />
enneigés, les baleines en chasse<br />
dans la mer à quelques encablures de là,<br />
les chiens de traîneaux qui hurlent, tout<br />
cela n’existe pas. Rien d’autre n’existe<br />
en dehors du terrain, du ballon et des<br />
90 prochaines minutes.<br />
Quatre jours plus tôt, Jimmy Holm<br />
Jensen, l’entraîneur de B-67, convie <strong>The</strong><br />
<strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong> à une visite officielle du QG<br />
de fortune de l’équipe à Sisimiut : un club<br />
social pour personnes âgées réquisitionné<br />
pour l’occasion. « Ça sent le vieux »,<br />
blague-t-il. Mais ce sera pourtant bien<br />
dans ces modestes locaux que séjourneront<br />
pour la semaine à venir vingt jeunes<br />
joueurs, accompagnés de Jensen et de<br />
David Janussen, l’entraîneur adjoint.<br />
Des corps endormis jonchent encore<br />
les matelas dans le dortoir improvisé,<br />
tandis que les lève-tôt font une partie<br />
d’Olsen, un jeu de cartes nordique plus<br />
connu chez nous sous le nom du Huit<br />
américain. Il y a du rap en musique de<br />
fond. Le couloir est envahi de baskets et<br />
de chaussures de foot, la cour est parcourue<br />
de fils d’où pendent des maillots en<br />
train de sécher et la cuisine a été transformée<br />
en une usine de préparation de<br />
pâtes à échelle industrielle.<br />
Ailleurs dans la ville – la deuxième<br />
plus grande du Groenland avec ses<br />
5 524 habitants –, d’autres équipes ont<br />
élu domicile tant bien que mal dans des<br />
salles de sport dont l’aspect, si ce n’est<br />
l’ambiance, évoque plus des centres de<br />
secours aux sinistrés, avec leurs matelas<br />
et autres lits de fortune entassés contre<br />
les murs.<br />
« On s’éclate, on essaie de toujours être<br />
à fond », explique Patrick Frederiksen,<br />
25 ans, capitaine de l’équipe. Il navigue<br />
entre les joueurs de cartes et ceux qui<br />
commencent à ouvrir l’œil afin de faire le<br />
point avec chacun d’entre eux. « Il y a toujours<br />
de la musique. Les gens s’amusent<br />
beaucoup, ils chantent et ils dansent. »<br />
Supporteur d’Arsenal, Frederiksen a été<br />
promu capitaine de B-67 en 2018 et ce<br />
tournoi est sa première opportunité de<br />
faire ses preuves. « C’est vraiment important,<br />
c’est comme la Coupe du monde.<br />
Ça nous donne la chance de montrer au<br />
Groenland que notre équipe est la meilleure<br />
et que nous travaillons dur pour<br />
Quand le numéro 3 de B-67<br />
se blesse, son remplaçant<br />
utilise du scotch pour transformer<br />
le numéro en 31<br />
afin de pouvoir jouer.<br />
48 THE RED BULLETIN
« C’est important,<br />
c’est comme la<br />
Coupe du monde. »<br />
Kop rocher : les supporteurs<br />
regardent le match,<br />
perchés sur les hauteurs<br />
de la falaise à Sisimiut.
Les joueurs de B-67 écoutent<br />
du rock groenlandais pour être<br />
gonflés à bloc avant un match.<br />
Leur QG de fortune se trouve<br />
dans les locaux d’un club social<br />
pour personnes âgées.<br />
51
Les joueurs de B-67 doivent s’accommoder des curieux et des gosses à vélo avant leur match.<br />
« La FIFA est<br />
venue ici deux<br />
ou trois fois. »<br />
atteindre nos objectifs. » Au Groenland,<br />
le football n’est populaire que depuis peu.<br />
Avec cet hiver qui dure toute l’année ou<br />
presque, le créneau est restreint pour les<br />
matches en extérieur – pas facile en effet<br />
de jouer sur un terrain recouvert par<br />
un mètre de neige. Les sports en salle,<br />
comme le tennis de table, le badminton<br />
ou le handball, sont des alternatives<br />
populaires, le dernier ex aequo avec le<br />
football en termes d’attrait. Mais c’est le<br />
succès d’un certain voisin nordique qui a<br />
encouragé les footballeurs groenlandais<br />
à voir les choses en grand.<br />
En 2014, l’Islande atteint pour la première<br />
fois les éliminatoires de la Coupe<br />
du monde (avant de perdre face à la<br />
Croatie). Deux ans plus tard, ils se qualifient<br />
pour la première fois pour une<br />
compétition majeure, l’Euro 2016, avant<br />
d’éliminer l’Angleterre 2-1 en huitièmes<br />
de finale, puis d’affronter la France en<br />
quarts (et de perdre sur un score honorable<br />
de 5-2). En 2018, l’Islande devient<br />
le plus petit pays du monde à se qualifier<br />
pour une Coupe du monde (même s’ils ne<br />
parviennent pas à passer le premier tour).<br />
Il est donc possible pour de petites<br />
nations insulaires comme le Groenland,<br />
assiégées par la glace, de concourir au<br />
niveau international.<br />
Mais les rêves de football international<br />
remontent à encore plus loin – au moins<br />
jusqu’en 1999, quand le sélectionneur<br />
de l’équipe nationale de l’époque et<br />
ancien membre de l’équipe d’Allemagne<br />
de l’Ouest, Josef Piontek, déclare avoir<br />
fait une demande afin d’intégrer l’UEFA<br />
(la Fédération danoise de football<br />
conteste toutefois le caractère officiel<br />
de cette demande). L’un des obstacles<br />
à la reconnaissance internationale du<br />
Groenland est son statut de territoire autonome<br />
au sein du royaume du Danemark.<br />
Autre obstacle, l’absence de surfaces de<br />
jeu et de stades conformes aux exigences<br />
de la FIFA.<br />
Mais les choses changent : en 2010,<br />
Sepp Blatter, président de la FIFA,<br />
approuve le premier terrain en gazon artificiel<br />
du Groenland, dans la ville de<br />
Qaqortoq. Nuuk obtient le sien en 2015,<br />
et B-67 partage désormais un terrain<br />
extérieur de taille réglementaire avec<br />
trois équipes locales. Il n’y a pas de<br />
gradins – ici encore, les supporteurs<br />
regardent le match depuis un affleurement<br />
rocheux, et les vestiaires consistent<br />
tout au plus en de simples cabanes de bois<br />
– mais c’est déjà mieux que le terrain en<br />
terre battue sur lequel ils jouaient jusqu’à<br />
présent. Plus tard, en 2016, le stade national<br />
de Nuuk a droit à un gazon artificiel<br />
52 THE RED BULLETIN
Hans Brummerstedt,<br />
ancien joueur de B-67,<br />
avant de quitter la salle de<br />
sport où il aura séjourné<br />
pendant une semaine.
« 95 % de nos<br />
fonds servent aux<br />
déplacements. »
Dans le sens des aiguilles<br />
d’une montre, du haut à gauche :<br />
le mini-trophée de l’homme<br />
du match ; un maillot d’entraînement<br />
d’Ek’aluk-54 avec le logo<br />
du sponsor, une boisson très<br />
populaire au Groenland ;<br />
les poteaux de corner officiels<br />
n’étant pas arrivés, en remplacement,<br />
des chiffons jaunes ont<br />
été fixés à des manches à balai<br />
en métal ; l’entraîneur adjoint<br />
Janussen en mode tactique au<br />
QG de B-67. En face : le terrain<br />
de Sisimiut, planté dans un<br />
décor rocheux typique du coin.<br />
FIFA deux étoiles – le plus haut niveau de<br />
surface synthétique pour les compétitions<br />
de l’UEFA.<br />
Frederiksen est certain que le Groenland<br />
pourrait participer à la Coupe du<br />
monde un jour. « Cela pourrait nous<br />
prendre un certain nombre d’années,<br />
mais je pense qu’on pourrait y arriver.<br />
L’Islande nous a inspirés. » Mais si l’Islande<br />
peut se vanter de nouveaux terrains<br />
couverts chauffés par géothermie qui permettent<br />
aux joueurs de s’entraîner tout<br />
au long de l’année, le Groenland n’est pas<br />
très fourni en conduits de géothermie et<br />
n’a pas le budget pour se payer des terrains<br />
couverts. « C’est difficile de trouver<br />
de l’argent. La FIFA est venue au Groenland<br />
deux ou trois fois et il y a aussi des<br />
entreprises qui nous aident. »<br />
« Il y a un problème avec le financement<br />
», admet Jensen, qui a joué pour<br />
B-67 dans sa jeunesse, avant d’intégrer la<br />
concession automobile familiale, et qui<br />
est devenu le nouvel entraîneur du club<br />
cette année, après le départ de son<br />
prédécesseur aux multiples succès, Tekle<br />
Ghebrelul. « 95 % de nos fonds servent à<br />
nos déplacements, déclare Jensen. C’est<br />
tellement cher de voyager au Groenland.<br />
En ce moment-même, nous avons un<br />
budget limité pour la nourriture. Nous<br />
ne sommes pas payés, c’est simplement<br />
pour la beauté du geste. »<br />
Ce manque de fonds handicape le<br />
football groenlandais sur tous les plans.<br />
Alors qu’il se rendait au tournoi depuis<br />
l’est du Groenland, l’un des joueurs star<br />
de B-67 s’est retrouvé coincé à l’aéroport<br />
car il n’avait pas son billet. N’ayant pas<br />
les moyens de lui en payer un autre – et<br />
en l’absence de routes reliant les villes<br />
isolées – le club n’a pas eu d’autre choix<br />
que de le renvoyer chez lui. Même une<br />
fois réunie, l’équipe s’est retrouvée<br />
coincée à l’aéroport de Kangerlussuaq,<br />
une escale perdue entre Nuuk et Sisimiut.<br />
Après avoir appelé tous ses contacts,<br />
y compris les membres de la Fédération<br />
de football du Groenland, Jensen a finalement<br />
réussi à caser l’équipe sur un bateau.<br />
Et ils sont arrivés six heures plus tard à<br />
Sisimiut – s’il avait été en service, l’avion<br />
les y aurait conduits en trente minutes.<br />
Pour éviter des vols internes à des prix<br />
exorbitants, G-44, une équipe de Qeqertarsuaq<br />
– une ville située sur une île à<br />
l’ouest du Groenland – a dû opter pour<br />
une traversée sur un bateau faisant le tour<br />
du Groenland une fois par semaine, et<br />
c’est au bout d’un éreintant voyage de<br />
22 heures qu’ils ont débarqué à Sisimiut.<br />
Il faut dire que se rendre et participer<br />
au tournoi Grønlandsbanken Final 6 est<br />
une nécessité : il est le plus important –<br />
et le seul – évènement au calendrier de<br />
la saison de football.<br />
Ici, un joueur de B-67 a droit à une mention<br />
spéciale : petit et trapu avec la tête<br />
rasée, toujours couronnée d’un bandeau<br />
Nike, Henning Bajare, 16 ans, a reçu<br />
le surnom de « Fat Mbappé » pour sa<br />
ressemblance avec l’attaquant du Paris<br />
Saint-Germain. « C’est un vrai bulldog,<br />
déclare Jensen, l’entraîneur de l’équipe,<br />
en riant. On l’a mis sur la feuille de match<br />
pour notre première rencontre et il était<br />
THE RED BULLETIN 55
« Le football<br />
groenlandais<br />
est comme une<br />
communauté. »<br />
toujours à l’attaque, et puis il revenait<br />
en demandant : “De l’eau ! De l’eau !”.<br />
Il n’a pas l’habitude de jouer des matches<br />
de cette longueur, donc il était crevé. »<br />
Malgré une saison de football minuscule<br />
et leur relative jeunesse, aucun de<br />
ces joueurs n’est novice en matière de<br />
compétition : l’équipe de B-67 est réputée<br />
pour son niveau en futsal, une variante<br />
de foot à cinq qui a été popularisée en<br />
Amérique du Sud et qui est devenue l’un<br />
des jeux les plus prisés pendant l’hiver<br />
au Groenland. Joué à l’intérieur, le futsal<br />
est plus rythmé et plus dynamique que<br />
le football « outdoor » ; les passes rapides<br />
et habiles des Brésiliens et des Argentins<br />
lui doivent beaucoup.<br />
« Le futsal, ça nous aide parce que<br />
ça nous apprend à faire des passes plus<br />
rapides au lieu de dribbler, déclare Frederiksen.<br />
Beaucoup de jeunes joueurs ne<br />
sont pas assez forts – ils ne peuvent pas<br />
faire de contrôles aériens sans se faire<br />
bousculer par un adversaire – donc on<br />
essaie de garder la balle au sol. »<br />
Plan de jeu terminé, direction le terrain.<br />
Il n’y a pas de bus, c’est donc à pied<br />
que s’y rendent les joueurs de B-67.<br />
Frederiksen porte un radiocassette à<br />
l’épaule, tandis que l’équipe passe devant<br />
l’ancienne église et les maisons de la ville,<br />
devant lesquelles des bois de rennes sont<br />
fièrement exposés – souvenirs de la saison<br />
de chasse de l’année dernière.<br />
La plupart des matches de compétition<br />
de B-67 commencent à 17 heures. En été,<br />
au Groenland, la nuit ne tombe pas avant<br />
23 heures, mais les matches se terminent<br />
dans un étrange semi-crépuscule permanent.<br />
Alors que nous attendons le début du<br />
match, un homme âgé nous aborde avec<br />
ces mots : « Le foot groenlandais est meilleur<br />
que le foot anglais. C’est une petite<br />
communauté : tout le monde se connaît. »<br />
Il évoque ses équipes anglaises préférées,<br />
Liverpool et Manchester United,<br />
avant de nous laisser sur la conviction<br />
que « les joueurs groenlandais pourraient<br />
venir en Europe et gagner des matches ».<br />
Les joueurs de B-67 s’échauffent à<br />
l’extérieur du terrain grillagé pendant<br />
qu’un autre match se déroule, puis ils se<br />
rendent aux vestiaires – deux cages de<br />
foot assemblées surmontées d’une bâche<br />
– au coup de sifflet final et attendent<br />
le coup d’envoi.<br />
« J’aime le foot, mais je le regarde<br />
seulement pendant le tournoi », déclare<br />
un supporteur d’une vingtaine d’années<br />
quand les joueurs entrent sur le terrain.<br />
56 THE RED BULLETIN
« Le football a vraiment la cote en ce<br />
moment au Groenland. Nos équipes<br />
seront peut-être meilleures si on les<br />
encourage plus, et alors il se pourrait<br />
qu’on ait une chance de participer à une<br />
compétition internationale ou quelque<br />
chose de ce genre. » La demi- finale, les<br />
joueurs de B-67 vont vite vouloir l’effacer<br />
de leur mémoire. Au bout de cinq<br />
minutes, le gardien arrête un coup franc,<br />
mais dans le cafouillage qui s’ensuit,<br />
N-48 marque le premier but. Plus tard en<br />
première mi-temps, le gardien doit intervenir<br />
encore une fois et bloque le tir d’un<br />
joueur de N-48 qui filait tout droit dans<br />
les filets de B-67.<br />
Des joueurs de N-48 se ruent<br />
sur le terrain pour célébrer<br />
leur statut de champions du<br />
Groenland <strong>2019</strong>. À gauche : la fin<br />
pour un joueur de B-67, équipe<br />
éliminée au cours du tournoi.<br />
En deuxième mi-temps, B-67 fait un<br />
triple changement. Peu après, Frederiksen<br />
se retrouve avec le bras en sang à cause<br />
d’une ancienne blessure qui s’est rouverte.<br />
Il met un pansement et revient dans le jeu.<br />
Avec moins de trente minutes à jouer,<br />
B-67 n’est clairement pas l’équipe qui<br />
domine. Un troisième but de N-48 à la 88 e<br />
minute et un quatrième pendant les arrêts<br />
de jeu viennent sceller le sort de B-67.<br />
C’est la première fois en dix ans qu’ils ne<br />
se qualifient pas pour la finale.<br />
Le jour suivant, N-48 continue sur sa<br />
lancée en éliminant G-44 en finale avec<br />
l’unique but du match. Pour leur dernier<br />
match, les joueurs de B-67 affrontent<br />
IT-79 dans le cadre de la petite finale.<br />
Mais, abattus par la défaite de la veille,<br />
ils s’inclinent sur le score terrible de 2-0.<br />
Qu’ils soient frustrés ou victorieux, pour<br />
les joueurs groenlandais, la saison est<br />
finie jusqu’à l’année prochaine.<br />
De retour à Nuuk deux jours après la<br />
finale, Jensen reçoit <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />
chez lui, dans sa maison au-dessus du<br />
fjord, où les icebergs flottent avec le<br />
Sermitsiaq en toile de fond, une montagne<br />
de 1 210 mètres d’altitude en forme<br />
de dent cassée. Tandis qu’il prépare un<br />
steak de renne au barbecue, Jensen nous<br />
livre une analyse pragmatique des performances<br />
de son équipe. « Ils sont doués,<br />
ces petits jeunes, mais il leur manque<br />
encore deux ou trois ans pour être au<br />
niveau, pour pouvoir jouer la finale et,<br />
avec un peu de chance, dominer de nouveau<br />
le football en extérieur. Ça prend<br />
du temps. »<br />
En attendant, la saison de chasse<br />
vient juste de commencer et l’entraîneur<br />
comme les joueurs ont hâte de se rendre<br />
en pleine nature. S’ensuivra la saison de<br />
futsal, puis les entraînements pour le<br />
football en extérieur recommenceront<br />
au printemps. Même si les joueurs inexpérimentés<br />
de B-67 ont vu leurs espoirs<br />
déçus sur le court-terme, la qualité de jeu<br />
mise en avant lors du Grønlandsbanken<br />
Final 6 laisse à penser que le football<br />
groenlandais pourrait avoir sa place au<br />
niveau international et qu’il pourrait<br />
même égaler la réussite de l’Islande…<br />
un jour.<br />
Patrick Frederiksen a eu son lot de<br />
victoires et de défaites. À l’inverse des<br />
jeunes qui regrettent cette opportunité<br />
manquée, il a une vision plus optimiste<br />
des choses. Perdre dans ce tournoi, c’est<br />
peut-être dur, mais au final, le véritable<br />
vainqueur dans l’histoire, c’est le football<br />
groenlandais. Ce regain d’attention, c’est<br />
une opportunité éventuelle de décrocher<br />
de nouveaux financements et peut-être<br />
de pouvoir s’offrir ces fameux terrains<br />
couverts qui permettraient aux joueurs<br />
de jouer toute l’année et de monter une<br />
équipe qui n’aurait rien à envier à ses<br />
homologues européens.<br />
« Le football est en pleine évolution<br />
au Groenland, déclare Frederiksen.<br />
Cela rapproche tout le monde. Le public<br />
adhère et nous encourage à avancer.<br />
Nous voulons prouver que même si nous<br />
sommes un petit pays avec très peu d’habitants,<br />
nous pouvons jouer au football<br />
à un haut niveau. »<br />
THE RED BULLETIN 57
L’autre star de la Formule 1 : Le double champion<br />
du monde de F1 Esport, Brendon Leigh, lors de<br />
la première épreuve de l’année à Londres.<br />
RÊVES DE<br />
COURSES<br />
La Formule 1, version esport : les<br />
écuries officielles s’y affrontent<br />
dans des simulations à la pointe de<br />
la technologie, et les concurrents<br />
ont la possibilité de façonner le<br />
sport automobile lui-même. Jusqu’à<br />
devenir d’authentiques pilotes ?<br />
Texte TOM WIGGINS<br />
Photos JANE STOCKDALE<br />
59
« La théâtralité<br />
et les exploits<br />
d’une véritable<br />
course de F1. »<br />
e circuit urbain de Formule 1 de Bakou est<br />
l’un des plus rapides et des plus chaotiques<br />
au monde. Il faut environ une minute<br />
et 41 secondes à une voiture pour y<br />
compléter un tour de piste, soit une boucle<br />
de 6 km autour des sites les plus célèbres<br />
de la capitale de l’Azerbaïdjan, à une vitesse<br />
de pointe de 360 km/h. C’est ici, en<br />
2017, que Sebastian Vettel, chez Ferrari,<br />
est rentré dans la Mercedes de Hamilton<br />
quand ce dernier a eu la mauvaise idée de<br />
freiner un peu trop brutalement. L’année<br />
suivante, Daniel Ricciardo et Max Verstappen,<br />
coéquipiers chez <strong>Red</strong> Bull Racing,<br />
sont entrés en collision et ont dû abandonner.<br />
Cette année, c’est Floris Wijers, pilote<br />
du Haas F1 Team, qui a bloqué ses freins<br />
au virage 15, perdu son train arrière, est<br />
monté sur une bordure et a quitté le sol<br />
pour s’écraser contre un mur.<br />
La petite différence avec les accidents<br />
de Vettel et de ses homologues, c’est que<br />
la mésaventure de Wijers ne s’est pas<br />
passée sur le vrai circuit de Bakou, mais<br />
sur sa version simulée, lors d’un GP virtuel<br />
diffusé à travers le monde. Hormis ce<br />
détail, le jeune Néerlandais est un vrai pilote<br />
de l’écurie Haas, qui se mesure à<br />
d’autres pilotes en chair et en os, dans des<br />
simulations de courses automobile. Dans<br />
son simulateur, il lutte pour un pactole à<br />
partager de 450 000 euros lors de qualifications<br />
dans le cadre de la F1 Esports Pro<br />
Series – le sport auto recréé numériquement<br />
avec toute la théâtralité, les déchirements<br />
et les exploits de l’original. Le tout<br />
organisé au Fulham Broadway Retail<br />
Centre, sud-ouest de Londres.<br />
Nous retrouvons ces jeunes coureurs<br />
de sim racing (les courses en simulation)<br />
dans le premier endroit en Angleterre entièrement<br />
dédié aux sports électroniques.<br />
En ce mois de juillet, Lucas Blakeley,<br />
jeune Écossais de 18 ans, y lutte pour<br />
retenir ses larmes alors que son rêve de<br />
piloter pour une équipe de F1 (virtuelle)<br />
devient réalité. Ce soir, c’est le Pro Draft<br />
du championnat, et d’ici la fin de la jour-<br />
60 THE RED BULLETIN
Sens des aiguilles d’une montre, partant du haut : le volant et les pédales<br />
utilisés – le Fanatec CSL Elite F1 Set – permettent d’ajuster la conduite de<br />
la voiture au centimètre près ; Floris Wijers du Haas F1 Team ; l’esthétique<br />
du Gfinity Arena est un mix entre le plateau de <strong>The</strong> Voice et un film de SF.<br />
THE RED BULLETIN 61
née, les trente finalistes ne seront plus<br />
que dix. Chacun représentera une véritable<br />
écurie de Formule 1.<br />
La sélection est ouverte à tous : il vous<br />
suffit d’avoir F1 2018, le jeu vidéo conçu<br />
par Codemasters, et une PlayStation 4,<br />
une Xbox One ou un PC. Plus de 100 000<br />
participants ont tenté de se qualifier en<br />
ligne pour l’édition <strong>2019</strong> de cette compétition<br />
en jouant à domicile et en conduisant<br />
sur les circuits désignés. Deux mois<br />
plus tard, les plus rapides ont été conviés<br />
dans un studio digne des meilleurs plateaux<br />
TV : vitres de plexiglas illuminées,<br />
écrans tactiles géants et un trio d’experts<br />
incluant Lando Norris, l’actuel pilote<br />
McLaren et fan d’esport, installé derrière<br />
un bureau, prêt à annoncer la bonne nouvelle<br />
aux rares chanceux.<br />
L’effet domino<br />
La tentative de sélection de Blakeley cette<br />
année ne constituait pas sa première pour<br />
accéder à la F1 Esports Pro Series – il<br />
62 THE RED BULLETIN
Pour rejoindre<br />
l’élite, il suffit<br />
d’avoir le jeu F1,<br />
une console ou<br />
un PC.<br />
première à accueillir les dix écuries de<br />
Formule 1 – la Ferrari Driver Academy,<br />
débutante, a été la dernière à se joindre<br />
au groupe – mais toutes n’ont pas logé<br />
leurs pilotes à la même enseigne ; certains<br />
restent chez eux et s’entraînent en ligne<br />
avec leurs coéquipiers, ne se réunissant<br />
au quartier général que quelques jours<br />
avant chaque épreuve de la Pro Series.<br />
Tous se voient offrir un kit par Fanatec, le<br />
fournisseur officiel de matériel F1 Esports<br />
: un volant avec une rétroaction réaliste<br />
qui permet aux pilotes de sentir les<br />
réactions de la voiture et des pédales avec<br />
un frein doté d’un capteur de force sensible<br />
à la pression. Si précis que les pilotes<br />
concourent en chaussettes.<br />
Comme dans la véritable Formule 1,<br />
Mercedes a dominé l’Esports Pro Series<br />
ces dernières années (son pilote britannique<br />
de vingt ans, Brendon Leigh, a remporté<br />
les championnats de 2017 et 2018)<br />
mais cela n’a rien à voir avec une quelconque<br />
supériorité technique : les équipes<br />
peuvent modifier des éléments tels que le<br />
réglage de la suspension, la répartition<br />
des freins et les réglages aérodynamiques,<br />
mais les voitures sont identiques en<br />
termes de performances. Tout ce qui les<br />
distingue, ce sont les livrées.<br />
« Les passionnés de Formule 1 réclament<br />
quelque chose d’un peu plus équilibré,<br />
et c’est là que F1 Esports intervient,<br />
explique Paul Jeal, directeur de franchise<br />
F1 pour Codemasters. On s’assure que<br />
tout le monde ait le même équipement et<br />
les mêmes machines : au final, on a une<br />
compétition où c’est véritablement le<br />
meilleur pilote qui gagne la course. »<br />
Une caractéristique qui distingue la<br />
compétition F1 Esports Pro (et l’esport de<br />
course en général) de celles liées à<br />
Fortnite ou FIFA. Bien qu’ils mettent en<br />
jeu des récompenses plus élevées et attirent<br />
des foules plus importantes – tant<br />
dans les événements qu’en ligne – une<br />
compétition FIFA ne vous offrira pas les<br />
mêmes déploiements ni le même rythme<br />
qu’un match de Ligue . De la même manière,<br />
seul un esprit sous l’emprise de<br />
substances chimiques croira que le monde<br />
en technicolor de Fortnite s’approche de<br />
la réalité. Alors qu’avec F1 2018, on a<br />
droit, grâce aux simulateurs actuels ultra-performants,<br />
à un spectacle remarquablement<br />
proche de l’expérience véritable<br />
de la course automobile, et ce<br />
malgré le fait que les compètes virtuelles<br />
soient plus courtes (de 25 pour cent) que<br />
les vrais GP et qu’elles ne comportent évidemment<br />
aucun danger réel.<br />
s’était également qualifié en 2018 mais<br />
ses espoirs avaient été déçus. « Le fait<br />
d’avoir participé au repêchage de l’an dernier<br />
a été le tremplin qui m’a mené ici,<br />
explique-t-il alors qu’il se prépare pour la<br />
Pro Series 1, la première épreuve du<br />
calendrier F1 Esports quelques semaines<br />
plus tard. Je considère l’esport comme un<br />
vrai boulot, en pratiquant sans relâche et<br />
en faisant des courses au sein de ligues du<br />
meilleur niveau possible. »<br />
La vie du jeune Écossais a changé<br />
depuis sa sélection par l’équipe SportPesa<br />
Racing Point. Blakeley a notamment quitté<br />
le foyer familial : plutôt que de passer<br />
cinq heures à jouer tous les soirs après<br />
l’école, ses journées sont désormais<br />
dédiées à l’entraînement avec ses deux<br />
coéquipiers. « Tu te réveilles et tu vas<br />
direct sur la simulation. Tout ce qui<br />
compte, c’est de s’améliorer. Chacun galvanise<br />
l’autre, comme un effet domino,<br />
comme une émulation. » L’édition de cette<br />
année de la F1 Esports Pro Series est la<br />
Page opposée, en bas : les coureurs<br />
de Williams Esports ; au-dessus :<br />
dans la Gfinity Arena, les moteurs<br />
tournent ; ci-dessous : Isaac Pride<br />
(Williams Esports) en compétition.<br />
THE RED BULLETIN 63
« On ne peut pas comparer MsDossary,<br />
le meilleur joueur de FIFA au monde, à<br />
Lionel Messi, admet Matt Huxley, ancien<br />
joueur professionnel de Counter-Strike et<br />
manager esport de Gfinity, aujourd’hui<br />
chargé de cours au Digital Institute de<br />
l’Université du Staffordshire à Londres.<br />
L’un utilise une manette, l’autre donne<br />
des coups de pied dans le ballon. L’avantage<br />
des championnats de course, c’est<br />
qu’ils simulent le comportement d’un<br />
pilote professionnel. »<br />
C’est pourquoi une grande partie des<br />
pilotes du monde virtuel s’adonnent aussi<br />
au karting. Même si Blakeley a dû abandonner<br />
cette discipline en raison de l’escalade<br />
incontrôlable de ses coûts, il attribue<br />
son succès dans l’esport à son<br />
expérience sur piste. « Cela m’a indéniablement<br />
aidé », dit-il, évoquant deux de<br />
ses avantages par rapport à ceux qui n’ont<br />
pas l’expérience du terrain, et ne<br />
connaissent ni les engins de course en<br />
général ni la façon de conduire sur piste<br />
humide. « Le lien entre les courses sim<br />
et la réalité est incontestable. D’ailleurs,<br />
c’est bien simple : toutes les écuries de<br />
F1 utilisent des simulateurs. »<br />
Le succès chevillé<br />
Isaac Price avait quinze ans quand il a<br />
subi son accident. Coureur de kart de niveau<br />
national, le Britannique passait ses<br />
vacances d’été à parcourir le pays pour<br />
participer à des compétitions. Puis, un<br />
jour, au cours d’un tour d’essai, la colonne<br />
de direction de son kart s’est brisée, l’accélérateur<br />
s’est bloqué et Isaac s’est retrouvé<br />
catapulté contre un mur. « Il m’a<br />
fallu dix à quinze minutes pour me dépêtrer,<br />
parce que ma cheville s’était enroulée<br />
sur le ressort du frein, se souvient-il.<br />
J’ai été transporté à l’hôpital en hélico et<br />
ils ont mis quelques heures à me remettre<br />
sur pied. »<br />
Pendant sa convalescence (cheville<br />
cassée), Price a occupé son temps libre en<br />
participant à des courses en ligne sur le<br />
jeu Live for Speed sur PC. C’était il y a dix<br />
ans, et après avoir participé à des compétitions<br />
de haut niveau en simulation de<br />
sport automobile iRacing et remporté le<br />
championnat du monde virtuel de GT en<br />
2017, Price est passé à temps complet,<br />
subsistant grâce à un emploi dans la saisie<br />
de données et aux gains qu’il pouvait tirer<br />
de ses victoires en ligne.<br />
La F1 Esports Pro Series a été lancée la<br />
même année : un moment décisif pour<br />
Price. Après avoir atteint la finale de la<br />
compétition World’s Fastest Gamer de<br />
« Toutes les<br />
écuries de F1<br />
utilisent un<br />
simulateur. »<br />
Pour l’Écossais Lucas Blakeley, 18 ans, la F1 Esports Pro Series a transformé<br />
un passe-temps après l’école en une véritable carrière.<br />
McLaren en 2017, puis une participation<br />
manquée au Pro Draft l’année suivante,<br />
Price a participé à d’autres épreuves pour<br />
Williams Esports, et s’est mérité une place<br />
dans la formation F1 Esports. « J’ai montré<br />
ce que je pouvais faire et je m’inscrivais<br />
dans la dynamique qu’ils avaient<br />
déjà, de sorte que c’était tout à fait logique,<br />
dit-il après avoir été sélectionné.<br />
En tant qu’équipe, je pense que nous pouvons<br />
être confiants, nous avons le potentiel<br />
pour réussir. »<br />
Une amitié rapide<br />
Floris Wijers, des Pays-Bas, n’a aucune<br />
expérience dans le sport automobile, mais<br />
il a commencé à jouer aux jeux de course<br />
dès l’âge de quatre ans.<br />
Wijers a acheté son premier volant en<br />
2017 et, comme Blakeley, il n’est pas parvenu<br />
à être repêché par une équipe de F1<br />
Esports l’année suivante, mais les deux<br />
sont rapidement devenus amis et ont passé<br />
les douze mois suivants à courir ensemble<br />
en guise de préparation pour le<br />
Pro Draft qui a eu lieu en juillet 2018.<br />
Parvenant à un équilibre entre l’esport<br />
et l’université ainsi qu’un stage dans la<br />
diffusion de contenus vidéo, Wijers, vingt<br />
64 THE RED BULLETIN
ans, consacre entre quatre et huit heures<br />
par jour à la simulation de course chez<br />
lui, à Soest, près d’Utrecht. « Je n’ai pas<br />
besoin de beaucoup de sommeil, alors je<br />
m’entraîne jusqu’à minuit ou une heure<br />
du matin », dit-il. Après avoir bien assuré<br />
dans les épreuves de qualifications, battant<br />
le premier choix au repêchage, David<br />
« Tonzilla » Tonizza, dans sa ronde de qualification,<br />
Wijers a été repêché par Haas.<br />
Au début de la saison, Blakeley et lui seront<br />
rivaux et non pas coéquipiers.<br />
Conduire, un jour<br />
Le jour des Pro Series 1, Blakeley ne se<br />
trouve pas là où vous l’attendez. Chaque<br />
épreuve se compose de trois courses et il<br />
n’a été retenu pour aucune d’entre elles<br />
par son équipe. « On me l’a dit il y a<br />
quelques jours, révèle-t-il en regardant<br />
ses coéquipiers s’entraîner depuis les fauteuils<br />
de cinéma du Gfinity Arena. Évidemment,<br />
en tant que pilote, c’est un<br />
coup dur : si tu n’es pas déçu à l’idée de ne<br />
pas courir, c’est que tu ne le fais pas bien.<br />
Mais j’accepte la décision, et je sais que je<br />
conduirai un jour. J’aurai ma chance. »<br />
Chez Williams Esports, Price reçoit le<br />
feu vert pour les deux premières courses,<br />
mais son coéquipier, le Finlandais Tino<br />
Naukkarinen, 19 ans, prendra la relève<br />
pour l’épreuve retransmise ce soir-là :<br />
treize tours du circuit urbain de Bakou.<br />
Cela permet à Naukkarinen de se concentrer<br />
sur un seul circuit. Price n’arrive<br />
qu’en 17 e position sur le circuit de<br />
Bahreïn et 14 e en Chine, attribuant son<br />
Vue en plongée sur les pilotes virtuels dans leur cockpit, en chaussettes.<br />
Max Verstappen ne se laisserait pas surprendre dans pareille tenue.<br />
Pierre Gasly,<br />
pilote de F1 dans<br />
la vraie vie, participe<br />
ce jour-là à la<br />
course virtuelle.<br />
manque de points à une mauvaise performance<br />
lors des qualifications, un manque<br />
de confiance en son simulateur et à la<br />
malchance – mais il ne se sent pas loin<br />
derrière. « Il y a des pilotes qui ne sont pas<br />
présents parce qu’ils n’ont pas été meilleurs<br />
que les autres pilotes de leur équipe,<br />
donc en ce sens, c’est un exploit, explique-t-il.<br />
La saison dernière, je participais<br />
à des championnats en ligne et j’étais<br />
en compétition avec les gars qui gagnent<br />
des courses ici, donc il n’y a aucune raison<br />
que je ne puisse pas gagner à mon tour. »<br />
Contrairement à Price et à Blakeley,<br />
Wijers participe aux trois courses de la<br />
Pro Series 1. Mais après de solides performances<br />
à Bahreïn et en Chine, où il a respectivement<br />
terminé neuvième et septième,<br />
le Néerlandais déçoit à Bakou.<br />
Alors que Naukkarinen et Frederik<br />
Rasmussen de <strong>Red</strong> Bull Racing tentent<br />
d’empêcher l’Italien Tonzilla de remporter<br />
sa troisième course de la journée, Wijers<br />
lutte pour se familiariser avec ses pneus<br />
medium et se bat en queue du peloton<br />
avec le coéquipier de Blakeley chez<br />
SportPesa Racing Point, Daniele Haddad.<br />
C’est au sixième tour que Wijers juge mal<br />
le virage 15, sa collision avec le mur l’obligeant<br />
à faire un arrêt imprévu au stand<br />
qui lui coûte cher : il finit finalement 18 e .<br />
Une fin décevante pour le pilote hollandais<br />
de la Pro Series 1. « J’étais satisfait<br />
de mes résultats antérieurs, mais j’aurais<br />
pu terminer sixième, voire cinquième en<br />
Chine, dit-il. Espérons que c’est la seule<br />
mauvaise course que nous aurons. »<br />
À Bakou, Rasmussen s’empare du drapeau<br />
à damier pour <strong>Red</strong> Bull Racing, avec<br />
Naukkarinen à trois secondes derrière<br />
lui. La Ferrari de Tonizza croise la ligne<br />
d’arrivée au coude à coude avec Álvaro<br />
Carretón de Williams Esports, avant de<br />
se voir attribuer la troisième place après<br />
que le pilote espagnol a reçu une pénalité<br />
de cinq secondes pour excès de vitesse<br />
dans le couloir de changement.<br />
Le rêve… de la réalité<br />
À neuf courses de la fin, dont la grande<br />
finale du 4 décembre, Blakeley, Price et<br />
Wijers auront tous de nombreuses occasions<br />
d’oublier leur déception (sans oublier<br />
la première édition chinoise de la F1<br />
Esports Pro Series qui aura lieu l’année<br />
prochaine). Pour certains de ces pilotes,<br />
il s’agit peut-être du premier pas vers une<br />
carrière dans le sport automobile. Trois<br />
membres de l’alignement actuel – Brendon<br />
Leigh, Enzo Bonito de McLaren Shadow et<br />
Cem Bölükbaşi de Toro Rosso – se sont vu<br />
remettre les clés de véritables voitures de<br />
course à la suite de leurs exploits esport.<br />
L’actuel pilote de Formule 1 de Toro<br />
Rosso, Pierre Gasly, qui participe à la<br />
course virtuelle ce jour-là, admet qu’il joue<br />
à des jeux de F1 entre les courses pour se<br />
mettre au rythme du circuit suivant inscrit<br />
au calendrier. « L’un de mes amis, Jann<br />
Mardenborough, qui a participé au programme<br />
Gran Turismo (GT Academy) avec<br />
Nissan, a participé au Mans, raconte le<br />
Français. Il est manifestement possible de<br />
passer du jeu à la réalité, mais il faut<br />
beaucoup d’entraînement pour maîtriser<br />
la conduite d’une véritable voiture. »<br />
Passer du virtuel au monde réel des<br />
courses auto, cela reste un rêve concret<br />
pour nombre de pilotes. « Les courses sim<br />
sont fantastiques, ne vous méprenez pas,<br />
dit Blakeley. Mais si la possibilité de passer<br />
du sport à la réalité s’offrait à moi, je<br />
n’hésiterais pas une seconde. »<br />
La finale de la F1 Esports Pro Series<br />
le 4 décembre en direct sur Facebook,<br />
YouTube et Twitch ; f1esports.com<br />
THE RED BULLETIN 65
PIONNIER<br />
Jérôme Delafosse,<br />
explorateur et auteur<br />
de best-sellers, par -<br />
court le monde à bord<br />
du premier cata maran<br />
équipé d’un moteur<br />
autonome en énergie.<br />
66
L’EXPLORATEUR<br />
DU FUTUR<br />
Il possède un puissant pouvoir de persuasion et navigue à bord<br />
d’un bateau qui promet de relever les défis énergétiques et<br />
écologiques de demain. Si nous avions tous quelque chose de<br />
JÉRÔME DELAFOSSE, changer le monde serait un jeu d’enfants.<br />
Texte ALEX LISETZ<br />
Photos KONSTANTIN REYER
AUTONOME<br />
L’Energy Observer<br />
génère ses propres ressources<br />
énergétiques<br />
pour les moteurs et<br />
l’électronique.
L<br />
e port d’Amsterdam, le cinquième plus<br />
grand d’Europe, n’a jamais accueilli<br />
de bateau comme celui-ci auparavant :<br />
chaque surface lisse y est recouverte de<br />
capteurs solaires, il dispose d’éoliennes<br />
mobiles de 12 mètres de portée sur les<br />
côtés et de huit réservoirs pour un total<br />
de 62 kilos d’hydrogène pur dans la<br />
salle des machines. Voici l’Energy<br />
Observer, le premier navire autonome<br />
en énergie au monde, 30 mètres de<br />
long et 12 de large. Sur le pont se tient<br />
Jérôme Delafosse, 48 ans, explorateur<br />
et auteur à succès. Avec le capitaine<br />
Victorien Erussard, 40 ans, ils ont<br />
mis au point un projet fou : pour<br />
convaincre le monde qu’une transition<br />
énergétique grâce à des solutions<br />
durables est possible, les Malouins<br />
veulent faire le tour du monde avec<br />
leur bateau pendant six ans.<br />
the red bulletin : Jérôme, vous<br />
êtes plongeur, réalisateur de films<br />
documentaires et auteur de<br />
romans. Est-ce que vous vous<br />
réveillez tous les matins avec une<br />
nouvelle idée ?<br />
jérôme delafosse : Mes métiers<br />
ne semblent différents que lorsqu’on<br />
les considère de l’extérieur. En fait,<br />
j’ai toujours été intéressé par les deux<br />
mêmes choses : vivre l’aventure et<br />
raconter des histoires.<br />
Que cherchez-vous à faire avec<br />
l’Energy Observer ?<br />
Prouver que nous pouvons répondre<br />
à nos besoins énergétiques avec des<br />
ressources renouvelables qui respectent<br />
l’environnement si nous les<br />
utilisons intelligemment. Notre équipe<br />
le démontre dans les conditions les<br />
plus difficiles avec le tout premier<br />
catamaran autonome aux énergies<br />
renouvelables et à l’hydrogène. Mais<br />
cela s’applique aussi bien à la voiture<br />
qu’à la maison, dans les industries et<br />
partout où l’énergie est nécessaire. Et<br />
les 11 000 milles nautiques que nous<br />
avons déjà parcourus depuis deux ans<br />
prouvent que l’avenir, c’est l’énergie<br />
renouvelable.<br />
Que fait l’Energy Observer différemment<br />
des autres ?<br />
Lorsque les conditions le permettent,<br />
quand le soleil brille ou que le vent<br />
souffle assez fort, nous naviguons<br />
grâce aux énergies renouvelables.<br />
Avec le surplus d’énergie, nous produisons<br />
de l’hydrogène par électrolyse<br />
de l’eau de mer grâce aux énergies<br />
CAPITAINES<br />
Le chef d’expédition<br />
Jérôme Delafosse<br />
(à droite) et le second<br />
capitaine Jean-Baptiste<br />
Sanchez au poste de<br />
pilotage.<br />
NIVEAU D’ÉNERGIE<br />
Un ordinateur de bord à<br />
côté de la barre indique<br />
le niveau de production<br />
des panneaux solaires<br />
(rouge) et le niveau de<br />
charge des bouteilles<br />
d’hydrogène (vert).<br />
« 11 000 milles<br />
nautiques déjà<br />
parcourus :<br />
voilà la preuve<br />
que l’avenir,<br />
c’est l’énergie<br />
renouvelable. »<br />
THE RED BULLETIN 69
« Il ne faut pas<br />
avoir peur de<br />
se jeter dans<br />
l’inconnu et<br />
prouver à quel<br />
point on croit<br />
en ses rêves. »<br />
ANALYSE<br />
Jérôme Delafosse<br />
inspecte la pile à<br />
combustible qui convertit<br />
l’hydrogène en<br />
électricité (en haut).<br />
SALLE DES MACHINES<br />
Ici, l’eau de mer est<br />
transformée en hydrogène<br />
pour l’alimentation<br />
du moteur électrique<br />
(visible à droite).<br />
renouvelables. C’est notre moyen<br />
de stockage. Ensuite, lorsque nous<br />
n’avons plus de soleil ni de vent, nous<br />
envoyons l’hydrogène stocké sous<br />
pression dans une pile à combustible<br />
qui va le transformer en électricité.<br />
C’est cela qui nous favorisera la navigation<br />
de nuit par exemple.<br />
Une bonne idée ne suffit pas. Il faut<br />
aussi convaincre les gens…<br />
Il faut les convaincre qu’on peut transformer<br />
le monde !<br />
Alors supposons que je veuille<br />
créer une start-up ou révolutionner<br />
l’approvisionnement<br />
énergétique mondial contre les<br />
intérêts d’opposants qui valent<br />
des milliards...<br />
Vous devez être sacrément motivé,<br />
et trouver des alliés plus intelligents<br />
et plus puissants qu’eux.<br />
Et ensuite ?<br />
Il ne faut pas avoir peur de se jeter<br />
dans l’inconnu et prouver à quel<br />
point on croit en ses rêves.<br />
En prenant des risques financiers<br />
personnels, par exemple ?<br />
Lorsqu’on se lance dans un projet<br />
comme ça, il y a toujours un facteur<br />
de risque. Il y a les succès et il y a les<br />
échecs qui font peur et douter, mais<br />
à un moment donné, on arrive à un<br />
point de non-retour. Peu importe ce<br />
qu’il se passe, vous ne pouvez plus<br />
revenir en arrière, vous devez réussir.<br />
Comment vous est venue cette<br />
idée ?<br />
Victorien Erussard, mon ami et partenaire<br />
de projet, qui en a développé<br />
l’aspect technique, a remporté de<br />
nombreuses régates et championnats,<br />
mais il a perdu la Transat Jacques<br />
Vabre parce que ses batteries l’ont<br />
lâché. Nous avons donc eu l’idée de<br />
construire un bateau qui pourrait<br />
s’auto-alimenter en énergie.<br />
Où en êtes-vous dans votre<br />
odyssée ?<br />
Nous avons déjà visité dix-sept pays.<br />
La première année, nous n’avons<br />
amarré que dans les ports français ;<br />
l’année dernière, nous avons navigué<br />
sur toute la Méditerranée. En <strong>2019</strong>,<br />
nous nous concentrons sur l’Europe<br />
du Nord. Puis viendront l’Asie, le<br />
Pacifique et la côte ouest des États-<br />
Unis et, en 2022, l’Amérique centrale<br />
et la côte est des États-Unis.<br />
Cette entreprise est-elle particulièrement<br />
risquée ?<br />
Nous avons déjà été pris dans des<br />
vents très violents et parfois « casse<br />
bateau » quand la houle est très<br />
serrée, comme en Méditerranée<br />
entre Barcelone et Marseille. Le plus<br />
inquiétant, c’est quand les vagues<br />
viennent se fracasser sous la nacelle,<br />
ça grince, ça craque, mais ça tient.<br />
Nous sommes fiers car, si nous prouvons<br />
que notre concept fonctionne<br />
en milieu extrême, nous pourrons<br />
l’adapter partout à terre, dès demain,<br />
dans une maison, dans les villes et<br />
70 THE RED BULLETIN
LA RÉVOLUTION<br />
HYDROGÈNE<br />
L’Energy Observer pourrait<br />
révolutionner nos méthodes<br />
de production et de stockage<br />
d’énergie.<br />
OCEAN WINGS<br />
Ces ailes propulsives se<br />
mettent automatiquement<br />
dans la position la plus<br />
efficace pour donner de la<br />
vitesse au bateau et produire<br />
de l’énergie éolienne.<br />
2MOTEURS<br />
électriques qui se<br />
transforment en<br />
hydro-générateurs.<br />
ORDI DE BORD<br />
Dans la salle de commandement<br />
sous le pont, les<br />
stocks et les flux énergétiques<br />
sont surveillés en<br />
permanence. Un deuxième<br />
écran est situé sur le pont.<br />
STOCK D’HYDROGÈNE<br />
L’hydrogène obtenu par<br />
électrolyse à partir de l’eau<br />
de mer est emmagasiné<br />
(pression de 350 bars)<br />
dans des réservoirs de<br />
part et d’autre de la proue.<br />
1 400<br />
KILOS DE<br />
BATTERIE<br />
stockent l’énergie<br />
utile à court terme<br />
dans des batteries<br />
Li-ion de 400 V.<br />
ARMOIRE ÉLECTRIQUE<br />
CENTRALE<br />
C’est le cœur de l’Energy<br />
Observer : un automate<br />
assure l’équilibre entre<br />
les énergies.<br />
PANNEAUX<br />
SOLAIRES<br />
168 mètres carrés<br />
de panneaux solaires<br />
praticables recouvrent<br />
le pont. Ils sont recouverts<br />
d’un revêtement caoutchouté<br />
antidérapant.<br />
8<br />
RÉSERVOIRS<br />
Leurs 332 litres<br />
de capacité<br />
permettent de<br />
stocker 62 kilos<br />
d’hydrogène,<br />
équivalent à deux<br />
mégawatts<br />
d’énergie.
HORIZON : 2022<br />
Quand nous rencontrons<br />
Jérôme Delafosse dans<br />
le port d’Amsterdam,<br />
l’Energy Observer n’en<br />
est qu’à sa 35 e étape.<br />
Arrivée prévue en 2022.<br />
« Nous proposons<br />
une alternative<br />
optimiste et<br />
fédératrice, et ça<br />
parle aux gens. »<br />
pourquoi pas à l’échelle d’un pays…<br />
Car notre voyage a aussi ses avantages<br />
: nous faisons des escales dans<br />
plus de cinquante pays, nous créons<br />
du lien ! Nous nous entretenons avec<br />
des journalistes, des scientifiques, des<br />
classes scolaires et des décideurs pour<br />
convaincre le monde qu’une révolution<br />
énergétique est possible.<br />
Et quelles sont leurs réactions ?<br />
Ils apprécient le fait que nous arrivions<br />
avec un discours différent des slogans<br />
apocalyptiques à propos de la catastrophe<br />
climatique. Nous proposons<br />
une alternative optimiste et fédératrice,<br />
qui irait même jusqu’à stimuler<br />
l’économie mondiale. Cela fascine<br />
les gens, en particulier là où l’on croit<br />
qu’ils ont d’autres soucis. La Tunisie,<br />
par exemple, s’enthousiasme pour<br />
notre projet et est très intéressée par<br />
les énergies renouvelables.<br />
Quelles leçons tirez-vous de cette<br />
expédition ?<br />
La navigation en mer dans des conditions<br />
extrêmes est un enseignement<br />
riche et surtout inestimable. Nous<br />
observons, testons, varions les systèmes<br />
chaque jour. Nous avons déjà<br />
changé les éoliennes parce qu’elles<br />
n’étaient pas efficaces. Nous naviguons<br />
désormais avec les nouvelles<br />
voiles Ocean Wings. C’est une technologie<br />
de l’America’s Cup, le bateau luimême<br />
était auparavant utilisé comme<br />
catamaran de course par différentes<br />
équipes avant sa conversion.<br />
Quel fut le moment le plus excitant<br />
jusqu’à présent ?<br />
C’est toujours le point de non-retour.<br />
Quand on a poussé une idée si loin<br />
qu’on se rend compte qu’on ne peut<br />
plus revenir en arrière, comme il y a<br />
deux ans, lorsque nous avons pris la<br />
mer à Saint-Malo.<br />
Alors, ce premier jour en mer ?<br />
Inoubliable. Parce que c’est à ce<br />
moment-là que nous avons réalisé<br />
que le cycle de l’énergie fonctionnait<br />
exactement comme nous l’avions imaginé.<br />
Je veux dire que nous savions que<br />
cela marcherait ; après tout, c’est de la<br />
science. Mais tant que la démonstration<br />
n’a pas été faite, le doute plane.<br />
Travailler des mois dans un espace<br />
confiné doit être rude. Comment<br />
rechargez-vous vos batteries ?<br />
Seul sur le pont la nuit, sous un ciel<br />
étoilé, en compagnie des dauphins<br />
qui suivent le bateau : voilà ma<br />
récompense pour chaque effort. Et<br />
en journée, il n’est pas interdit de<br />
piquer une tête et d’aller explorer les<br />
profondeurs. Après tout, je suis aussi<br />
plongeur pro !<br />
energy-observer.org<br />
72 THE RED BULLETIN
HORS DU COMMUN<br />
Le prochain numéro le 23 janvier avec et le 6 février avec<br />
dans une sélection de points de vente et en abonnement<br />
AARON BLATT / RED BULL CONTENT POOL
L’ÉTOFFE<br />
D’UN<br />
HÉROS<br />
« Les vrais superhéros, ce sont les profs, ce<br />
sont eux qui changent le monde ». C’est ce que<br />
déclarait l’acteur Hugh « Wolverine » Jackman<br />
lors de la cérémonie honorant PETER TABICHI<br />
du titre de meilleur enseignant de la planète<br />
en <strong>2019</strong>. Ce professeur kenyan nous explique<br />
comment il tire parti de sa vocation pour créer<br />
les conditions nécessaires à une (r)évolution<br />
en matière d’éducation.<br />
Texte CHRISTINE VITEL<br />
TONY KARUMBA/AFP/PICTUREDESK.COM
« Mes collègues et<br />
moi sommes déterminés<br />
à créer une différence<br />
dans la vie de nos élèves. »<br />
Peter Tabichi, lauréat du prix<br />
Best Global Teacher <strong>2019</strong>.<br />
75
Que feriez-vous si vous gagniez une somme<br />
colossale ? Est-ce que vous aussi, comme<br />
Peter Tabichi, vous décideriez de reverser<br />
la totalité au profit de votre communauté ?<br />
Un geste altruiste qui résume bien la philosophie<br />
de ce professeur kenyan : c’est en<br />
effet à lui que vient d’être décerné le prestigieux<br />
prix de meilleur prof au monde de<br />
la Varkey Foundation, équivalent d’un prix<br />
Nobel pour l’enseignement, doté d’une<br />
récompense à hauteur d’un million de dollars.<br />
Cet enseignant de mathématiques et<br />
de physique au Kenya, à Naishi, comté de<br />
Nakuru, œuvre au sein de l’établissement<br />
secondaire Keriko pour encourager l’accès<br />
à la formation des jeunes filles, et développer<br />
le potentiel du « brillant avenir de<br />
l’Afrique » : ses élèves. Comment s’y<br />
prend-il ? Las d’attendre que les conditions<br />
soient favorables, il les a créées. Grâce à<br />
Un Franciscain qui a foi en l’éducation.<br />
lui, le nombre d’élèves dans son établissement<br />
rural a doublé en trois ans, et l’implication<br />
des filles dans les succès de l’école<br />
a très fortement augmenté. Les héros sont<br />
faits de cela : une volonté d’agir là où les<br />
responsables échouent, et sans lésiner sur<br />
les moyens ni les efforts à déployer.<br />
the red bulletin : Qu’est-ce qui vous a<br />
motivé à devenir enseignant ?<br />
peter tabichi : J’ai grandi dans un village<br />
reculé du Kenya, au sein d’une famille<br />
d’enseignants. Mon père était instituteur,<br />
trois de mes oncles et quatre de mes cousins<br />
étaient profs. Petit, j’étais entouré de<br />
modèles à suivre. J’ai été le témoin de l’engagement<br />
de ma famille pour l’école et la<br />
communauté. J’ai compris très tôt que les<br />
enseignants, dont le rôle s’étend largement<br />
au-delà de la salle de classe, constituent les<br />
vrais trésors de notre société. Ils éclairent<br />
les jeunes esprits sur les meilleures voies à<br />
emprunter pour relever les défis de la vie.<br />
Enseigner est un métier noble, et c’est un<br />
honneur d’y consacrer ma vie.<br />
Quel est le plus gros défi que vous ayez<br />
eu à relever personnellement ?<br />
Ma mère est morte quand j’avais onze<br />
ans, laissant derrière elle mon père en<br />
charge de mes frères et sœurs et moi, en<br />
plus d’assumer ses responsabilités professionnelles.<br />
Son humilité, sa capacité de<br />
résilience et sa générosité m’ont sincèrement<br />
inspiré, car c’est tout cela qui nous<br />
a permis de surmonter le deuil et la douleur.<br />
Je retrouve les mêmes qualités chez<br />
mes collègues : ils se lèvent à l’aube, font<br />
la route à pied jusqu’à l’école sous une<br />
pluie ou une chaleur accablante ; restent<br />
après la fin des cours pour faire du soutien<br />
scolaire ; travaillent longtemps le soir<br />
pour corriger et noter les cahiers, et<br />
préparer la classe du lendemain.<br />
Avez-vous parfois l’impression de vous<br />
substituer aux politiciens de votre<br />
pays ?<br />
Disons que mes collègues et moi voulons<br />
aider nos jeunes à exploiter leur plein<br />
potentiel. C’est peu dire que l’investissement<br />
en temps que nous leur dédions tous<br />
en vaut la peine, nous autres enseignants,<br />
parents, communautés, gouvernements et<br />
garants de la loi. Les enfants ont besoin<br />
d’apprendre les standards académiques,<br />
mais aussi d’acquérir l’esprit d’équipe mais<br />
« Les enseignants<br />
constituent les<br />
vrais trésors de<br />
notre société. »<br />
RII SCHROER/EYEVINE/PICTUREDESK.COM, TONY KARUMBA/AFP/PICTUREDESK.COM (2)<br />
76 THE RED BULLETIN
Au sein de son établissement, Peter Tabichi a créé un club de développement de talents et un club de sciences, et promeut les compétitions de projets entre écoles.<br />
aussi les qualités nécessaires pour aborder<br />
la vie en société et résoudre des problèmes,<br />
pour travailler ensemble et penser<br />
de manière innovante.<br />
Que souhaitez-vous le plus ardemment<br />
pour vos élèves ?<br />
Je suis sur la ligne de front, je vois la promesse<br />
des jeunes générations : leur curiosité,<br />
leur talent, leur intelligence, leurs<br />
croyances, ils sont déterminés à surmonter<br />
les difficultés et donner le meilleur<br />
d’eux-mêmes. Qu’ils soient capables de<br />
mettre à profit cet énorme potentiel,<br />
atteindre leurs rêves et être armés pour<br />
rendre ce monde meilleur, voilà mon<br />
souhait le plus vif.<br />
Une cantine à ciel ouvert, et saine : dans la vallée du Rift, l’insécurité alimentaire menace.<br />
Quels sont les plus gros challenges<br />
auxquels les enfants sont confrontés<br />
au Kenya ?<br />
THE RED BULLETIN 77
Ses élèves avant tout : c’est avec eux que Tabichi a tenu à célébrer son titre de meilleur enseignant au monde, le Global Teacher Prize.<br />
Comme nous manquons cruellement de<br />
ressources dans cette partie reculée de<br />
l’Afrique, il y a beaucoup de pauvreté.<br />
Même la qualité de la nourriture n’est pas<br />
garantie. La communication avec les<br />
familles des élèves est donc essentielle,<br />
afin de leur faire comprendre comment et<br />
pourquoi nous voulons aider ces enfants<br />
en les mettant sur la voie d’une vie meilleure.<br />
Les jeunes d’Afrique ne doivent plus<br />
se sentir freinés, ni s’autosaboter avec des<br />
ambitions trop modestes ou des attentes<br />
trop basses.<br />
Faire venir les enfants à l’école semble<br />
être votre mission de vie…<br />
Oui, car l’enjeu est énorme, surtout pour<br />
ce qui est des filles. Dans certaines communautés,<br />
c’est souvent l’enseignant seul<br />
qui va pouvoir persuader les parents que<br />
la place de leur fille est à l’école, et que<br />
son éducation est plus importante que sa<br />
participation aux tâches ménagères. Ou<br />
qu’une année supplémentaire à l’école<br />
est une priorité avant de la marier. Si les<br />
filles jouent un rôle essentiel dans leur<br />
famille, cela ne doit pas se faire aux<br />
dépens de leur apprentissage ni de leur<br />
avenir, qui est aussi l’avenir du pays, et<br />
l’avenir de toute l’Afrique.<br />
De quoi êtes-vous le plus fier ?<br />
De mes élèves. Deux d’entre elles, Esther<br />
Amimo et Salome Njeri, ont mis au point<br />
un instrument pour aider les personnes<br />
« Le succès motive<br />
et engendre<br />
d’autres succès. »<br />
souffrant de problèmes de vue ou d’audition<br />
; elles viennent de remporter le prix<br />
des Nations Unies des objectifs de développement<br />
durable (SDG Award) lors de<br />
l’International Science and Engineering<br />
Fair (ISEF) organisée à Phoenix, Arizona,<br />
aux États-Unis. Nous avons célébré cet<br />
événement avec toute l’école, ce qui a<br />
transporté et enthousiasmé tous les<br />
élèves : leur estime de soi a décollé. Le<br />
succès motive et engendre d’autres succès.<br />
Mes collègues et moi sommes déterminés<br />
à créer une différence dans la vie<br />
de nos enfants, car ce sont eux le brillant<br />
avenir de l’Afrique.<br />
Comment contribuez-vous à mettre<br />
de la valeur ajoutée dans la vie de<br />
vos jeunes ?<br />
Cela passe par l’éducation, car elle a un<br />
réel pouvoir de transformation. Et par<br />
TONY KARUMBA/AFP/PICTUREDESK.COM<br />
78 THE RED BULLETIN
le fait que je me suis converti à une vie<br />
religieuse (Peter Tabichi s’est formé auprès<br />
des prêtres franciscains, une organisation<br />
internationale de l’église catholique pour<br />
l’émancipation des localités rurales, qui<br />
œuvre par le biais de l’éducation et de<br />
l’agriculture durable, tout en cultivant des<br />
valeurs pacifistes, ndlr) afin de pouvoir<br />
communiquer et transmettre librement<br />
ma passion à la communauté et être ainsi<br />
capable de me dédier pleinement à l’enseignement.<br />
Grâce aux Franciscains, je<br />
fais don de 80 % de mon salaire mensuel<br />
pour aider ceux qui en ont besoin, élèves<br />
ou habitants les plus pauvres du village.<br />
Quelle est la plus grande qualité que<br />
tout enseignant devrait posséder ?<br />
Pour être un bon prof, il faut être créatif.<br />
Il faut embrasser la technologie et promouvoir<br />
des méthodes d’apprentissage<br />
modernes. Il faut faire plus et parler<br />
moins. Les profs endossent des rôles de<br />
modèles et de mentors, ils se doivent<br />
d’équiper leurs élèves avec les qualités<br />
nécessaires pour réaliser leurs rêves.<br />
Pour cela, il faut que les jeunes se familiarisent<br />
avec l’idée d’échouer, car si vous<br />
n’échouez pas, vous n’apprenez pas, et si<br />
vous n’apprenez pas, vous ne changerez<br />
jamais. Les échecs nous aident à grandir<br />
et à devenir des personnes fortes, qui se<br />
développent avec un sentiment de sécurité<br />
intérieure. Cela nous aide à prendre<br />
des risques, à sortir de notre zone de<br />
confort, et à trouver des solutions.<br />
Les générations futures pourront-elles<br />
prétendre à une vie épanouie ?<br />
Pour réussir, elles devront travailler dur,<br />
poser des questions, nourrir leur curiosité.<br />
Les connaissances acquises à l’école les<br />
aideront toute leur vie, c’est pourquoi<br />
j’encourage mes élèves à lever le nez de<br />
leurs manuels pour être conscients de ce<br />
qu’il se passe autour d’eux, à développer<br />
leurs intérêts et multiplier leurs passions<br />
sans lien avec les sujets abordés en classe.<br />
Nous savons tous que les générations<br />
futures du monde entier devront faire face<br />
à d’énormes défis vu l’état de la planète<br />
dont ils vont hériter : changement climatique,<br />
migrations globales, épuisement des<br />
ressources, conflits politiques, intelligence<br />
artificielle et automatisation générale<br />
qui vont rendre beaucoup de métiers<br />
obsolètes, etc. Il est primordial que tous<br />
sachent penser de manière globale, et<br />
établissent et maintiennent de bonnes<br />
relations avec les générations suivantes.<br />
Ainsi, ils sauront gérer les problèmes de<br />
Easy Teacher : grâce à sa moto, Peter garde un lien fort avec sa communauté.<br />
Esther Amimo et Salome Njeri avec leur projet gagnant : l’Essameter.<br />
« Pour être un bon<br />
prof, il faut être<br />
créatif. Faire plus<br />
et parler moins. »<br />
manière efficace, en s’associant, en allant<br />
dans la résolution de problèmes et de<br />
conflits. C’est ce que nous pouvons espérer<br />
de mieux pour l’humanité.<br />
Qu’allez-vous faire de ce million de<br />
dollars, que vous avez remporté grâce<br />
au Global Teacher Prize ?<br />
Il sera dédié à mon école et à la communauté<br />
qui y est rattachée. Je veux continuer<br />
à booster la curiosité, l’inventivité et<br />
l’estime de soi des élèves, par le biais du<br />
club de développement de talents, du club<br />
de sciences et du club de paix. J’ai aussi<br />
l’idée d’investir dans un labo informatique<br />
pour garantir un meilleur accès internet à<br />
tous les acteurs de l’établissement. Enfin,<br />
une partie servira à aider financièrement<br />
les élèves doués mais désargentés, une<br />
autre à développer des cultures tolérantes<br />
à la sécheresse et à la promotion du jardinage<br />
dans la communauté. Mais surtout,<br />
gagner ce prix m’a permis d’accéder à une<br />
plateforme incroyable. J’ai rencontré de<br />
nombreuses personnes engagées elles<br />
aussi dans un changement positif. C’est un<br />
tremplin grâce auquel j’envisage d’investir<br />
dans des programmes STEM d’échange<br />
scolaire avec des institutions locales et<br />
internationales pour développer le potentiel<br />
et le talent de mes jeunes.<br />
globalteacherprize.org<br />
THE RED BULLETIN 79
ALPHATAURI.COM
guide<br />
au programme<br />
LA FIFA MANIA<br />
Ce jeu de foot rend fou,<br />
mais il intéresse aussi<br />
les vrais pros du ballon.<br />
PAGE 86<br />
CHAUD DEVANT<br />
Pour un marathon par<br />
60 °C, autant pédaler<br />
dans un sauna.<br />
PAGE 87<br />
SORTEZ LE MATOS<br />
Sur quoi glisser et quoi<br />
porter lors de vos plans<br />
neige cet hiver.<br />
PAGE 90<br />
LUKAS PILZ<br />
OBJECTIF MER<br />
Aux Lofoten, le bout de<br />
la piste, c’est de l’eau,<br />
et l’apéro d’après-ski se<br />
passe dans un bateau.<br />
Gilet de sauvetage inclus.<br />
PAGE 82<br />
THE RED BULLETIN 81
G U I D E<br />
Faire.<br />
Pas le temps de s’attarder avant la descente : aux Lofoten, le temps change toutes les dix minutes.<br />
HAUTE ROUTE ARCTIQUE<br />
TOUT SCHUSS<br />
JUSQU’À L’OCÉAN<br />
Un séjour de ski avec gilet de sauvetage : le journaliste de<br />
voyage Simon Schöpf embarque à bord d’un vieux bateau<br />
à vapeur norvégien pour aller skier une poudreuse de rêve.<br />
Le rituel de vérification du<br />
matériel précède chaque<br />
sortie : bip, pelle, sonde,<br />
gilet de sauvetage, tout y est. Mais<br />
pourquoi un gilet de sauvetage ?<br />
C’est que la notion de sécurité tout<br />
comme celle du décor alpin sont<br />
tout autre lorsque vous skiez la<br />
Haute Route de l’Arctique. Et si la<br />
montagne reste bien sûr accessible<br />
en voiture, s’y rendre à bord d’un<br />
bateau à vapeur de 80 mètres de<br />
long est bien plus élégant. Arrivé<br />
aux îles Lofoten sur le 68 e parallèle<br />
nord, au-dessus du cercle arctique,<br />
le MS Nordstjernen jette<br />
L’auteur, Simon Schöpf, bravant le froid norvégien.<br />
82 THE RED BULLETIN
voyage<br />
CE QUI VOUS ATTEND<br />
LA NATURE<br />
NORDIQUE<br />
Un voyage aux îles Lofoten exige de<br />
la patience mais sait la récompenser :<br />
le séjour se fait sur un navire marchand et<br />
les départs se font en fonction de la météo.<br />
Svolvær<br />
LOFOTEN<br />
Autrefois navire postal, le MS Nordstjernen achemine désormais les skieurs curieux.<br />
Norvège<br />
Oslo<br />
LUKAS PILZ SIMON SCHÖPF<br />
On a le temps : le merluche, poisson réputé ici, sèche pendant deux à trois mois.<br />
l’ancre dans le fjord d’Austnes,<br />
bien à l’abri. Cet ancien navire<br />
postal est notre camp de base<br />
flottant durant nos trois jours<br />
d’escapade.<br />
Dès cet instant, nous nous abandonnons<br />
à la nature. Nous rejoignons<br />
le rivage sur un canot avec<br />
masques de ski au visage pour<br />
nous protéger des embruns. Le<br />
rêve qui guide nos pas jusqu’aux<br />
confins du Grand Nord est la<br />
« summit-to-sea-ride », une descente<br />
unique qui commence au<br />
sommet de la montagne pour finir<br />
sur la plage. À peine débarqués<br />
sur la plage enneigée de Laupstad,<br />
nous chaussons nos skis, direction<br />
Sautinden à 596 mètres d’altitude.<br />
Une descente destinée aux<br />
« Nous rejoignons le<br />
rivage sur un canot,<br />
avec nos masques<br />
de ski sur le nez. »<br />
débutants, dirait le skieur des<br />
Alpes, mais ici au nord de la<br />
Norvège, c’est déjà une descente<br />
d’envergure. La plage est le point<br />
de départ pour rejoindre le sommet,<br />
par conséquent l’altitude à<br />
gravir correspond à celle du sommet<br />
choisi. Rapidement, nous<br />
dépassons la limite de pousse des<br />
arbres pour nous retrouver sur<br />
une magnifique étendue dégagée.<br />
DONNÉES CLÉS<br />
Du plaisir de skier au festin de merluche ou morue<br />
séchée, retrouvez ici toutes les infos<br />
sur votre voyage aux Lofoten.<br />
ARRIVÉE<br />
Un vol jusqu’à Svolvær (Lofoten) ou Tromsø<br />
avec escale à Oslo puis un ferry via Bodø.<br />
PÉRIODE PROPICE<br />
Privilégier mars et avril, les meilleurs mois pour<br />
y skier avec un bon niveau d’enneigement y compris<br />
sur la plage. Avec de la chance, le névé vous<br />
permettra de descendre jusqu’à la mer.<br />
DÉGUSTER<br />
La Haute Route de l’Arctique ne manque pas<br />
de spécialités : caviar de flétan fumé,<br />
confiture de plaquebière ou encore la morue séchée,<br />
le plus ancien produit d’exportation de la Norvège<br />
et qui fait partie du patrimoine culturel du pays,<br />
en particulier dans cette région.<br />
LOGEMENT<br />
Sorti du chantier naval de Hambourg en 1956,<br />
le MS Nordstjernen a servi de navire postal<br />
jusqu’en 2012. Rénové depuis, il peut accueillir<br />
70 passagers en cabine double avec douche.<br />
L’ORGANISATEUR<br />
Norwegian Adventure Company propose<br />
ce voyage d’une durée de trois jours et demi avec<br />
la garantie de skier trois journées complètes.<br />
Prix : 2 040 € / personne. Le MS Nordstjernen<br />
rejoint les Lofoten (puis pousse vers le nord),<br />
ou Tromsø (dans ce cas, cap vers le sud).<br />
THE RED BULLETIN 83
G U I D E<br />
Faire.<br />
voyage<br />
LA SÉCURITÉ AVANT TOUT<br />
SE PRÉMUNIR DES<br />
AVALANCHES<br />
Les avalanches sont l’ennemi naturel<br />
des skieurs. La seule règle d’or pour<br />
ne pas en être victime est de les éviter.<br />
ÉQUIPEMENT<br />
Si toutefois l’une d’elles vous surprend<br />
par malchance, ce type de matériel<br />
pourra vous sauver la vie.<br />
Le circuit de la Norwegian Adventure Company promet trois jours de poudreuse.<br />
1. UN AVALUNG<br />
Cette sorte de tuba améliore l’apport d’air frais<br />
si vous êtes prisonnier sous la neige. L’air chargé<br />
de CO 2 est évacué, tandis qu’une valve filtre<br />
l’oxygène extrait de la neige.<br />
2. DVA (DÉTECTEUR DE VICTIMES D’AVALANCHE)<br />
Cet émetteur de signal radio permettra aux sauveteurs<br />
de vous localiser rapidement si vous vous retrouvez<br />
bloqué(e) sous une avalanche.<br />
3. SAC À DOS AIRBAG<br />
Déclenché manuellement, l’airbag du sac à dos se gonfle<br />
en quelques secondes. Le principe repose sur « l’effet<br />
Noix du Brésil » selon lequel lorsqu’on mélange et secoue<br />
des objets de différentes tailles, les plus gros émergeant<br />
à la surface, très pratique donc en cas d’avalanche.<br />
Bientôt, le MS Nordstjernen ressemble<br />
à un jouet tant il paraît<br />
petit avec la distance. Derrière lui,<br />
le Higravtinden, plus haut sommet<br />
de l’archipel des Lofoten avec<br />
1 147 mètres, perce à travers le<br />
brouillard. Ces montagnes constituent<br />
une miniature des Alpes<br />
occidentales. Abruptes et inaccessibles,<br />
elles émergent du fjord<br />
et s’élèvent vers le ciel. Sans la<br />
présence de la mer, un pic de<br />
800 mètres ressemblerait à s’y<br />
méprendre à un 4 000 mètres<br />
suisse. Dès le premier col, l’océan<br />
surgit devant nous. Eau et îlots<br />
s’étendent à perte de vue partout<br />
où le regard se pose.<br />
Le Gulf Stream maintient des<br />
températures clémentes même au<br />
cœur de l’hiver. En revanche, la<br />
proximité de la mer rend la météo<br />
très instable. Ainsi, tempêtes de<br />
neige et éclaircies se succèdent<br />
toutes les dix minutes. « Aux<br />
Lofoten, nous pouvons vivre les<br />
quatre saisons en une heure »,<br />
explique notre guide Isaak. Soudain,<br />
le vent se rafraîchit, tourne<br />
rapidement à la tempête et nous<br />
oblige à redescendre. Tels des<br />
renards aux aguets, nous guettons<br />
le moindre rayon de soleil soutenus<br />
par l’optimisme d’Isaak, en<br />
attendant de pouvoir réembarquer<br />
: « Il ne va pas tarder à réapparaître.<br />
» Et de fait, après quelques<br />
virages, le MS Nordstjernen ressurgit<br />
grandeur nature dans l’horizon<br />
dégagé. La perspective d’une<br />
douche chaude et d’un dîner nous<br />
réjouit. Au menu : stockfish (filet<br />
de morue séchée) des Lofoten et<br />
steak de renne. Une fois à bord,<br />
le MS Nordstjernen démarre son<br />
moteur de 3 600 chevaux et gagne<br />
le large où la houle devient de plus<br />
en plus forte. Mieux vaut bien tenir<br />
son dessert si l’on veut encore y<br />
goûter. Nous mettons le cap au<br />
nord en direction de Kvaløya en<br />
passant par Vesterålen, où nous<br />
nous réveillons paisiblement le<br />
lendemain. Aujourd’hui, la météo<br />
semble nous sourire et annonce<br />
une embellie. Le temps de la traversée<br />
en canot et le ciel s’est déjà<br />
levé : à l’arrivée, c’est un soleil<br />
radieux qui nous accueille au sommet<br />
du Gråtiden (871 mètres).<br />
Nous exultons un instant à<br />
l’idée de ce qui nous attend : une<br />
descente continue jusqu’à la plage<br />
durant laquelle la mer reste en<br />
ligne de mire. Chaque virage<br />
devient alors un pur moment de<br />
bonheur.<br />
Découvrez les îles Lofoten à bord<br />
du MS Nordstjernen :<br />
norwegianadventurecompany.com<br />
LUKAS PILZ SIMON SCHÖPF<br />
84 THE RED BULLETIN
PHOTOS : T. HYTTE – KLIP PRODUCTION + MIRJA GEH PHOTOGRAPHY<br />
METHOD<br />
Un casque conçu pour résister aux impacts grâce à sa construction spéciale ABS<br />
tri zone (mélangeant ABS, EPS et EPP pour faire face à plusieurs types d’impacts),<br />
METHOD propose aussi des inserts en mousse EVA sur les zones où les impacts<br />
se produisent le plus souvent pour une sécurité améliorée.<br />
cebe.com
G U I D E<br />
Faire.<br />
gaming<br />
LE VECTEUR FIFA<br />
UN FOOTBALL<br />
AMÉLIORÉ<br />
Conçu pour devenir LE jeu de foot, FIFA<br />
influence désormais le sport lui-même.<br />
Lancé en 1993, il est devenu<br />
le jeu sportif le plus populaire<br />
au monde, avec plus de<br />
280 millions de copies vendues.<br />
Très proche du football réel, son<br />
succès a fini par influencer la<br />
réalité même de ce sport.<br />
À présent, les clubs y prospectent<br />
des recrues, les marques<br />
s’y bousculent à coups de<br />
contrats juteux et les footballeurs<br />
pros y découvrent – pour leur<br />
plus grand plaisir ou déplaisir –<br />
leur classement au palmarès.<br />
Avant de « goumer » vos potes ou<br />
collègues de bureau lors d’une<br />
partie endiablée, prenez quelques<br />
minutes pour lire l’analyse de<br />
Simon Parkin, expert de ce jeu<br />
incontournable.<br />
SON CLASSEMENT A DE L’ IMPACT<br />
Avant le lancement annuel de FIFA,<br />
EA, l’éditeur du jeu, publie une liste<br />
des cent meilleurs joueurs établie par<br />
9 000 analystes de datas (recruteurs,<br />
coachs, abonnés) qui distillent les performances<br />
de 18 000 pros en 34 attributs<br />
personnels. Une liste tellement<br />
influente que les recruteurs l’utilisent<br />
dans leurs recherches de talents.<br />
Sur FIFA 20, Lionel Messi, Cristiano<br />
Ronaldo, Neymar Jr et Eden Hazard<br />
occupent les premières places avec<br />
ces notes respectives : 94, 93, 92 et<br />
91. Pour d’autres, le résultat peut être<br />
sévère : Rio Ferdinand a déclaré en<br />
plaisantant qu’il démolirait les bureaux<br />
d’EA suite à un mauvais classement.<br />
UNE IMPORTANTE VITRINE<br />
L’éditeur du jeu se démène pour obtenir<br />
les droits des clubs, des joueurs, des<br />
stades et des voix off de commentateurs,<br />
mais reste très discret sur le coût<br />
financier que tout cela représente pour<br />
ce best-seller du gaming (certains<br />
avancent des sommes à neuf chiffres).<br />
Mais parfois l’argent ne suffit pas.<br />
Cette année notamment, EA a perdu les<br />
droits de la Juventus et a dû rebaptiser<br />
l’équipe « Piemonte Calcio » même si<br />
les ressemblances avec les joueurs<br />
demeurent. Apparaître dans FIFA, n’est<br />
pas qu’une question d’argent pour un<br />
footballeur, c’est aussi un statut. Pour<br />
FIFA 98 : En route pour la Coupe du<br />
monde, la couverture avec David<br />
Beckham « a contribué à faire de lui le<br />
sportif le plus lucratif de la planète »,<br />
déclarait en 2015 Andy Bell, fondateur<br />
de l’agence Soap Box London.<br />
PROFIL DE<br />
L’EXPERT<br />
SIMON<br />
PARKIN<br />
SPECIALISTE FIFA<br />
Journaliste pour<br />
<strong>The</strong> Observer,<br />
l’Anglais explore<br />
la culture gaming<br />
depuis quinze ans.<br />
Son livre A Game of<br />
Birds and Wolves<br />
raconte l’histoire<br />
d’un groupe de<br />
femmes ayant développé<br />
un jeu de<br />
stratégie pendant la<br />
Seconde Guerre<br />
mondiale qui aidera<br />
les Alliés à déjouer<br />
la menace des<br />
sous-marins<br />
allemands.<br />
UN JEU MOTEUR POUR LE FOOTBALL<br />
La popularité de FIFA dispense l’éditeur<br />
EA de chercher le soutien actif de<br />
grands noms. Ils s’en chargent naturellement<br />
! La star de la NBA LeBron<br />
James a posté sur Instagram une photo<br />
de ses fils y jouant, avec en légende<br />
: « Ce jeu est une tuerie ! » Et<br />
Justin Bieber de chauffer le rappeur<br />
Drake sur Twitter : « Je deviens bon à<br />
FIFA. Fais gaffe. » De plus, le jeu accroît<br />
l’intérêt pour le sport réel dans<br />
des pays comme les USA. « Désormais,<br />
explique Matt Prior, le directeur<br />
créatif de FIFA, les gens viennent au<br />
foot par le biais de notre jeu. »<br />
LE MEILLEUR RESTE À VENIR<br />
« Notre travail s’achèvera lorsque la<br />
franchise EA Sports FIFA ne se distinguera<br />
plus du football réel », déclare<br />
Prior. Une quête qui suscite sur <strong>Red</strong>dit<br />
des débats animés à chaque lancement.<br />
« Certains aiment la version<br />
simulation, d’autres des scoresfleuves<br />
», ajoute-t-il. FIFA 20 met<br />
l’accent sur l’intelligence du football<br />
en améliorant l’IA du comportement<br />
naturel et la dynamique de balle,<br />
et ajoute Volta, un mode foot de rue.<br />
En bref : l’avenir du foot numérique<br />
a encore de belles années devant lui.<br />
FIFA 20 est disponible sur PS4, Xbox<br />
One, Nintendo Switch et PC ; ea.com<br />
Injouable et jouable :<br />
le Borussia Dortmund et<br />
l’Anglais Jadon Sancho<br />
sont au top dans FIFA 20.<br />
IL AMÉLIORE LES JOUEURS PROS<br />
Les joueurs pros jouent à FIFA pour<br />
préparer leurs matches. L’attaquant<br />
d’Everton, Alex Iwobi, déclarait qu’à<br />
ses débuts, si un joueur d’une équipe<br />
adverse lui était inconnu, il cherchait<br />
son nom et son classement sur FIFA.<br />
Après avoir arrêté un penalty de<br />
Ronaldinho contre l’AC Milan en 2008,<br />
le gardien de but italien Marco Amelia<br />
a dit qu’il s’était familiarisé avec les<br />
tirs de l’attaquant sur FIFA. « C’était<br />
comme jouer contre lui à la PS, se souvient<br />
Amelia. C’était très étrange. »<br />
ELECTRONIC ARTS SIMON PARKIN<br />
86 THE RED BULLETIN
Faire.<br />
fitness<br />
CONSEILS<br />
PUREMENT<br />
MENTAL<br />
Rien de tel que<br />
la tête pour pousser<br />
le corps à aller<br />
plus haut, plus vite<br />
et plus loin.<br />
LA VOIX<br />
INTÉRIEURE<br />
Maîtrisez et orientez<br />
vos pensées avant et pendant<br />
la course en utilisant votre<br />
voix intérieure de manière<br />
ciblée, par exemple en<br />
répétant des messages<br />
positifs qui vous aideront<br />
à tirer le meilleur de vous.<br />
PHILIP PLATZER/RED BULL CONTENT POOL, HARALD TAUDERER/RED BULL CONTENT POOL FLORIAN STURM<br />
À 20 ans, Schiester fume et boit trop. Son médecin lui conseille de changer d’hygiène<br />
de vie : il s’exécute. Un an et demi plus tard, il court le marathon de New York.<br />
FORGER LE MENTAL<br />
COURSE À<br />
HAUT DEGRÉ<br />
Ses perfs dans le désert propulsent Christian Schiester au<br />
sein de l’élite de l’ultrafond. Retour sur un parcours gagnant.<br />
Une séance de sauna après<br />
un entraînement est une<br />
excellente manière de<br />
détendre les muscles, d’améliorer<br />
la circulation sanguine et de se<br />
vider la tête. Mais de là à transformer<br />
le sauna en salle de gym…<br />
Christian Schiester a osé, afin de<br />
préparer son trail dans le désert.<br />
Pour ce faire, l’athlète a installé un<br />
tapis roulant et un vélo ergomètre<br />
dans la cabine de bois chauffée à<br />
60 °C, pour enchaîner ensuite trois<br />
heures de pédalage intensif. « J’ai<br />
bu jusqu’à quinze litres d’eau tout<br />
en veillant à n’être jamais seul au<br />
cas où », confie le sportif de 52 ans<br />
qui, à l’époque, tenait déjà la<br />
forme grâce à ses entraînements<br />
« J’ai bu jusqu’à<br />
quinze litres<br />
d’eau tout en<br />
veillant à n’être<br />
jamais seul. »<br />
Christian Schiester,<br />
ultra-marathonien<br />
<strong>Red</strong> Bull<br />
OBJECTIFS<br />
Mettez de côté la perspective<br />
d’ensemble et focalisezvous<br />
sur les éléments<br />
clés que vous maîtrisez<br />
déjà. Ça renforcera votre<br />
confiance en vous.<br />
REPRÉSENTATION<br />
MENTALE<br />
Visualisez aussi clairement<br />
que possible la façon dont<br />
vous accomplissez chaque<br />
étape du défi. Plus cette<br />
visualisation est précise,<br />
mieux vous serez préparé<br />
à sa difficulté.<br />
disciplinés. « La préparation dans<br />
le sauna vise à recréer les conditions<br />
de course », explique l’Autrichien.<br />
Une méthode qui porte ses<br />
fruits. Lors de l’ultra-marathon en<br />
Égypte, il accuse le coup sur une<br />
dune, le thermomètre de sa<br />
montre indique 60 degrés.<br />
« J’étais très mal-en-point », se<br />
souvient-il. C’est alors que sa voix<br />
intérieure se manifeste : « Christian,<br />
ce n’est pas le moment de<br />
lâcher! Tu peux le faire. Après<br />
tout, il ne fait pas plus chaud que<br />
dans le sauna. » L’effet sur sa motivation<br />
est immédiat. Il repart et<br />
finit deuxième après 250 kilomètres<br />
de course dans le désert.<br />
christian-schiester.com La devise de Schiester : « Torture ton corps avant qu’il ne te torture !»<br />
THE RED BULLETIN 87
G U I D E<br />
Faire.<br />
décembre<br />
1<br />
13<br />
er au<br />
décembre<br />
Gotaga on Tour<br />
Après la Rochelle et Marseille, Gotaga revient à<br />
la rencontre de ses fans à Lille (Nouveau Siècle)<br />
et Paris (Grand Rex). Pour eux, la chance d’approcher<br />
celui qu’ils suivent assidûment dans<br />
le monde digital, et d’assister en direct à des<br />
parties endiablées de Fortnite où « Gota », des<br />
gamers pro et ses potes vont pouvoir exposer<br />
leurs skills. « Ses potes », ça peut être vous,<br />
puisque certains membres du public seront<br />
conviés à rejoindre le premier streamer français<br />
sur scène et jouer à ses côtés. Pour assister<br />
à ces soirées rares, il faut tester en ligne vos<br />
connaissances sur le Français, et mettre la main<br />
(chez Monoprix) sur les canettes collector à l’effigie<br />
de la super star du gaming. À vous de jouer !<br />
Lille et Paris ; redbull.com/gotaga<br />
LA SEINE EST À VOUS !<br />
Du 7 au 15 décembre, le Salon nautique transforme le Parc des expos de la<br />
Porte de Versailles en plus grand port indoor de France. En 2018, 200 000 visiteurs<br />
s’y sont pressés, sur 130 000 m² d’exposition (cinq halls) et ont eu la possibilité<br />
de voir et visiter plus de 1 000 embarcations, à voile et à moteur, faisant<br />
de 2 à 18 mètres de longueur. Cette année encore, le Nautic (aussi dédié aux<br />
sports de glisse) propose une très belle activation hors ses murs avec une session<br />
paddle sur la Seine, le 8 décembre : la Nautic Paddle. Pour cette dixième<br />
édition, le waterman français de renom Arthur Arutkin sera présent, parmi les<br />
centaines d’amoureux de l’eau venus savourer ce moment parisien d’exception.<br />
Qui affrontera<br />
Gotaga ?<br />
Paris ; salonnautiqueparis.com/fr<br />
18<br />
décembre<br />
Les Jedis de retour<br />
Le rire du méchant suprême Palpatine<br />
(alias Dark Sidious, alias l’Empereur)<br />
à la fin du premier trailer de ce Star<br />
Wars épisode 9 a fait sensation et<br />
excité les fans de la saga de l’espace<br />
la plus populaire de tous les temps.<br />
L’insoutenable attente touche à sa<br />
fin et cet Ascension de Skywalker<br />
se pointe comme il se doit à quelques<br />
heures des fêtes de fin d’année.<br />
Si vous ne le saviez pas encore (estce<br />
possible ?), vous voilà informés.<br />
Que la Force soit avec vous !<br />
Actuellement en salle ;<br />
starwars.com<br />
4 29<br />
au 7 décembre<br />
Coupe du monde<br />
de ski cross<br />
Des skieurs, par quatre, dévalent une<br />
piste composée d’éléments naturels<br />
ou artificiels (bosses, courbes relevées<br />
ou tremplins) le plus vite possible.<br />
Les Coupes du monde de ski cross,<br />
femmes et hommes, reprennent avec<br />
une première étape à Val Thorens.<br />
Notez la participation de Jean-Frédéric<br />
Chapuis, champion du monde 2013,<br />
champion olympique de skicross à<br />
Sotchi en 2014, Vice-Champion du<br />
Monde 2015 et vainqueur du Globe<br />
de Cristal 2015. Costaud !<br />
Val Thorens ; valthorens.com<br />
décembre<br />
All Star Game<br />
La recette du All Star Game du<br />
basket français est garantie<br />
100 % show et toujours à guichets<br />
fermés, depuis dix-sept ans, dans<br />
l’AccorHotels Arena. Le match<br />
exhibition de la Pro A entre la<br />
sélection française et celle des<br />
meilleurs étrangers est le summum<br />
d’une soirée où les concours de<br />
dunks, de tirs et autres animations<br />
font grimper l’ambiance. En attendant<br />
la venue de deux équipes<br />
NBA, Hornet et Bucks, dans cette<br />
même enceinte en janvier.<br />
Paris ; accorhotelsarena.com<br />
TEDDY MORELLEC/ RED BULL CONTENT POOL<br />
88 THE RED BULLETIN
Voir.<br />
novembre / décembre<br />
Le freestyle du Finlandais<br />
Antti Ollila.<br />
STEPHAN SUTTO, LUKAS PILZ/RED BULL CONTENT POOL, FUTURE7MEDIA/RED BULL CONTENT POOL<br />
COLLECTIF,<br />
EXTRÊME,<br />
BAGARRE<br />
Ce mois-ci sur <strong>Red</strong> Bull TV,<br />
différentes approches du<br />
sport et du dépassement :<br />
le ski en mode plaisir et<br />
collectif, le VTT en mode<br />
extrême, et la moto en<br />
mode baston.<br />
REGARDEZ<br />
RED BULL TV<br />
PARTOUT<br />
<strong>Red</strong> Bull TV est une chaîne de<br />
télévision connectée : où que<br />
vous soyez dans le monde,<br />
vous pouvez avoir accès aux<br />
programmes, en direct ou en<br />
différé. Le plein de contenus<br />
originaux, forts et créatifs.<br />
Vivez l’expérience sur redbull.tv<br />
25<br />
novembre FILM<br />
THE COLLECTIVE<br />
Tourné à travers le monde, ce film emmène le spectateur<br />
des sommets des Alpes bernoises aux neiges profondes<br />
d’Hakuba, au Japon, en passant par la poudreuse sinueuse<br />
de Colombie-Britannique, au Canada. Cinéastes et skieurs<br />
de renom, dont Will Berman, Cody Cirillo, Caroline Claire,<br />
Mac Forehand, Mathilde Gremaud, Alex Hall et Sarah Höfflin<br />
unissent leurs objectifs individuels pour livrer un message<br />
commun : le ski est une aventure collective.<br />
12<br />
novembre À LA DEMANDE<br />
ROB WARNER’S<br />
WILD RIDES<br />
Rob Warner, ex-vainqueur de la Coupe du monde<br />
de VTT et commentateur, rejoint la crème des<br />
riders pour une échappée sur des terrains où nul<br />
n’a encore osé s’aventurer.<br />
4décembre À LA DEMANDE<br />
WESS : LA FINALE<br />
La World Enduro Super Series <strong>2019</strong> a trouvé son<br />
épilogue dans l’enfer du Getzenrodeo. Pénétrez<br />
dans les coulisses de la compétition à Drebach<br />
en Allemagne, à la rencontre des top pilotes, les<br />
héros d’une saison déjà culte.<br />
THE RED BULLETIN 89
G U I D E<br />
Classe<br />
de neige<br />
Quelle que soit votre neige<br />
de prédilection ‒ trafollée,<br />
profonde, damée ou<br />
poudreuse intacte ‒ avec<br />
ce matos, vous glisserez<br />
avec style et affronterez<br />
l’hiver en toute sérénité.<br />
Photos DAVID CLERIHEW
Bonnet HELLY HANSEN<br />
North Sea Ridgeline,<br />
hellyhansen.com ;<br />
lunettes de soleil OAKLEY<br />
Clifden, oakley.com ;<br />
veste BURTON Frostner et<br />
gants Backtrack, burton.<br />
com ; pantalon goretex<br />
OAKLEY Alpine Shell 3L,<br />
oakley.com ; sac à dos<br />
HAGLÖFS Skrå 27,<br />
haglofs.com ; planche<br />
RIDE Warpig et<br />
fixations Revolt,<br />
ridesnowboards.com<br />
91
G U I D E<br />
Page opposée :<br />
casque MARKER<br />
Convoy+, marker.net ;<br />
masque de ski OAKLEY<br />
Fall Line XM Factory<br />
Pilot Whiteout,<br />
oakley.com ; veste<br />
VOLCOM Fern<br />
insulated goretex,<br />
volcom.fr ; sac à dos<br />
20L DAKINE Jamie<br />
Anderson Women’s<br />
Team Heli Pro,<br />
dakine.com<br />
Ci-contre :<br />
bonnet HELLY<br />
HANSEN Ridgeline,<br />
hellyhansen.com ;<br />
masque ZEAL<br />
OPTICS Portal XL,<br />
zealoptics.com ;<br />
hoodie technique<br />
<strong>FR</strong>ISKI <strong>The</strong> Flo 2.0,<br />
friskiwear.com ; veste<br />
THE NORTH FACE<br />
Purist Futurelight,<br />
thenorthface.fr ; pantalon<br />
JACK WOLFSKIN<br />
Exolight Mountain,<br />
jack-wolfskin.com ;<br />
chaussures SCOTT<br />
Celeste III, scottsports.com<br />
; gants<br />
Free Range BURTON,<br />
burton.com ; skis<br />
VÖLKL Secret Flat,<br />
voelkl.com<br />
THE RED BULLETIN 93
G U I D E<br />
Ci-contre :<br />
Casque OAKLEY<br />
MOD1 et masque Fall<br />
Line XL, oakley.com ;<br />
écouteurs SKULL-<br />
CANDY vert sans fil<br />
à accrocher partout,<br />
skullcandy.co.uk ;<br />
veste PROTEST Gutter<br />
Camo, protest.eu ;<br />
pantalon goretex<br />
VOLCOM Guch<br />
Stretch, volcom.fr ;<br />
gants THE NORTH<br />
FACE Patrol Steep<br />
Series, thenorthface.<br />
fr ; skis SCOTT<br />
Scrapper 105,<br />
scott-sports.com<br />
Page opposée :<br />
casque MARKER<br />
Convoy+, marker.net ;<br />
masque SWEET PRO-<br />
TECTION Interstellar,<br />
sweetprotection.com ;<br />
anorak unisexe<br />
HAGLÖFS Edge Evo<br />
Kurbits, haglofs.com ;<br />
pantalon SCOTT<br />
Explorair 3L,<br />
scott-sports.com ;<br />
moufles THE NORTH<br />
FACE <strong>The</strong>rmoball,<br />
thenorthface.fr ; sac à<br />
dos OSPREY Kamber<br />
16, ospreyeurope.com ;<br />
bâtons de ski LINE Pin,<br />
lineskis.com ; skis K2<br />
Mindbender 88 Ti<br />
Alliance, k2snow.com<br />
Coiffure et maquillage :<br />
SUSANA MOTA<br />
Mannequins :<br />
CONNAGH HOWARD,<br />
ANNA SALOMAA<br />
@ W Model Management<br />
Assistants photo :<br />
CHRIS PARSONS,<br />
LISA BENNETT<br />
94 THE RED BULLETIN
MENTIONS LÉGALES<br />
THE RED<br />
BULLETIN<br />
WORLDWIDE<br />
<strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />
est actuellement<br />
distribué dans six pays.<br />
Vous voyez ici la une de<br />
l’édition allemande, qui<br />
honore la star locale du<br />
rap, le dénommé Bausa.<br />
Le plein d’histoires<br />
hors du commun sur<br />
redbulletin.com<br />
Les journalistes de SO PRESS n’ont pas pris<br />
part à la réalisation de <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong>.<br />
SO PRESS n’est pas responsable des textes,<br />
photos, illustrations et dessins qui engagent<br />
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Rédacteur en chef<br />
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Clemens Ragotzky (Dir.),<br />
Claudia Heis, Nenad Isailovi c, ̀<br />
Sandra Maiko Krutz, Josef Mühlbacher<br />
Fabrication<br />
Veronika Felder<br />
Opérations<br />
Michael Thaler (MIT), Alexander Peham,<br />
Yvonne Tremmel (Office Management)<br />
Abonnements et distribution<br />
Peter Schiffer (Dir.), Klaus Pleninger<br />
(Distribution), Nicole Glaser (Distribution),<br />
Yoldaş Yarar (Abonnements)<br />
Siège de la rédaction<br />
Heinrich-Collin-Straße 1, 1140 Vienne, Autriche<br />
Téléphone +43 (0)1 90221-28800,<br />
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Direction générale<br />
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Oberst-Lepperdinger-Straße 11–15,<br />
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Landesgericht Salzburg, ATU63611700<br />
Directeur de la publication<br />
Andreas Kornhofer<br />
Directeurs généraux<br />
Dietrich Mateschitz, Gerrit Meier,<br />
Dietmar Otti, Christopher Reindl<br />
THE RED BULLETIN<br />
France, ISSN 2225-4722<br />
Country Editor<br />
Pierre-Henri Camy<br />
Country Coordinator<br />
Christine Vitel<br />
Country Project Management<br />
Alessandra Ballabeni,<br />
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Contributions,<br />
traductions, révision<br />
Lucie Donzé, Frédéric & Susanne<br />
Fortas, Suzanne Kříženecký,<br />
Claire Schieffer, Jean-Pascal Vachon,<br />
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Abonnements<br />
Prix : 18 €, 12 numéros/an<br />
getredbulletin.com<br />
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29 rue Cardinet, 75017 Paris<br />
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PROFIL<br />
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Thierry Rémond,<br />
tremond@profil-1830.com<br />
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THE RED BULLETIN<br />
Allemagne, ISSN 2079-4258<br />
Country Editor<br />
David Mayer<br />
Révision<br />
Hans Fleißner (Dir.),<br />
Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />
Billy Kirnbauer-Walek<br />
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THE RED BULLETIN<br />
Autriche, ISSN 1995-8838<br />
Country Editor<br />
Christian Eberle-Abasolo<br />
Révision<br />
Hans Fleißner (Dir.),<br />
Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />
Billy Kirnbauer-Walek<br />
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Bernhard Schmied<br />
Sales Management <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />
Alfred Vrej Minassian (Dir.),<br />
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THE RED BULLETIN<br />
Royaume-Uni, ISSN 2308-5894<br />
Country Editor<br />
Tom Guise<br />
Rédacteur associé<br />
Lou Boyd<br />
Rédacteur musical<br />
Florian Obkircher<br />
Directeur Secrétariat de rédaction<br />
Davydd Chong<br />
Secrétaire de rédaction<br />
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fabienne.peters@redbull.com<br />
THE RED BULLETIN<br />
Suisse, ISSN 2308-5886<br />
Country Editor<br />
Nina Treml<br />
Révision<br />
Hans Fleißner (Dir.),<br />
Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />
Billy Kirnbauer-Walek<br />
Country Project Management<br />
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marcel.bannwart@redbull.com<br />
Christian Bürgi (W-CH),<br />
christian.buergi@redbull.com<br />
THE RED BULLETIN USA,<br />
ISSN 2308-586X<br />
Rédacteur en chef<br />
Peter Flax<br />
Rédactrice adjointe<br />
Nora O’Donnell<br />
Éditeur en chef<br />
David Caplan<br />
Directrice de publication<br />
Cheryl Angelheart<br />
Country Project Management<br />
Laureen O’Brien<br />
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Dave Szych, dave.szych@redbull.com<br />
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96 THE RED BULLETIN
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TRBMAG
Pour finir en beauté<br />
L’arche de Felipe<br />
Comme Pelé et Neymar avant lui, ses héros d’enfance, Felipe Gustavo voulait<br />
devenir footballeur. En cours de route, il a fini par troquer le ballon pour une planche –<br />
le reste fait partie de l’histoire du skate. Dans la vidéo All on Me, le Brésilien établi<br />
aux USA revient sur les raisons et les choix qui l’ont poussé au sommet de son sport.<br />
La vidéo est à voir sur redbull.com<br />
Le prochain<br />
THE RED BULLETIN<br />
n° 95 disponible<br />
dès le 19 décembre<br />
<strong>2019</strong><br />
JONATHAN MEHRING/RED BULL CONTENT POOL<br />
98 THE RED BULLETIN