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The Red Bulletin Decembre 2019 (FR)

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<strong>FR</strong>ANCE<br />

DÉCEMBRE <strong>2019</strong><br />

HORS DU COMMUN<br />

Votre magazine<br />

offert chaque<br />

mois avec<br />

14 PAGES<br />

(très)<br />

spéciales<br />

RED BULL<br />

ILLUME<br />

Le concours photo<br />

plus puissant que<br />

votre imagination


ÉDITORIAL<br />

TOUT LE MONDE<br />

CONTRIBUTEURS<br />

NOS ÉQUIPIERS<br />

FAIT DE LA PHOTO<br />

Avec un smartphone, semble-t-il, mais il reste des<br />

domaines délicats à documenter, auxquels nous<br />

consacrons nombre de nos pages chaque mois :<br />

l’aventure outdoor, les sports d’action, le monde<br />

aquatique… Tous les ans, ils sont des centaines<br />

de candidats, photographes confirmés, voire pros,<br />

ou émergents à participer au concours photo<br />

<strong>Red</strong> Bull Illume, justement dédié aux univers<br />

qui vous/nous excitent. Cette année, près de<br />

60 000 images ont été soumises et nous avons<br />

disséqué l’œuvre des finalistes des onze catégories<br />

(innovation, lifestyle, best of Instagram...) pour<br />

vous proposer un portfolio de quatorze pages, où<br />

l’on se demande parfois si ce que l’on y découvre est<br />

réel. Comme ce skateur dans la neige sur notre une,<br />

Levi Glenney, shooté par l’Américain Peter Cirilli.<br />

Votre expérience Illume commence sous peu.<br />

BEN READ<br />

Ce photographe anglais vous<br />

décrira son travail comme<br />

du storytelling à travers les<br />

détails et les paysages. Et<br />

c’est exactement ce qu’il nous<br />

a proposé à son retour du plus<br />

lointain des tournois de foot,<br />

au Groenland. Il y a également<br />

fait le plein en souvenirs personnels.<br />

« Je me souviendrai<br />

toujours de cette mi-temps<br />

où la sono balançait du gros<br />

death metal », dit Ben.<br />

P. 44<br />

PETER CIRILLI/RED BULL ILLUME (COUVERTURE)<br />

Ouvrez les yeux !<br />

Votre Rédaction<br />

Containers, grues, hangars… Pas le décor habituel d’un<br />

tournoi de foot validé par la FIFA ! Ben Reader a photographié<br />

cette compétition organisée au Groenland. P. 44<br />

TOM WIGGINS<br />

Basé à Londres, l’ancien rédacteur<br />

du magazine Stuff joue<br />

aux jeux vidéo depuis 1990.<br />

Les compétiteurs du tournoi<br />

F1 Esports Pro Series qu’il a<br />

rencontrés n’étaient pas nés<br />

à cette époque, mais ont assurément<br />

joué bien plus que lui.<br />

« En parlant avec eux, tu n’as<br />

pas l’impression qu’il s’agit<br />

d’un jeu, dit-il. Ils prennent ça<br />

avec le plus grand sérieux. »<br />

P. 58<br />

THE RED BULLETIN 3


74<br />

Peter Tabichi : le meilleur<br />

prof de l’année <strong>2019</strong> a<br />

des choses à dire.<br />

66<br />

La transition énergétique<br />

vous convie à son bord.<br />

6 Ce mois-ci, notre section galerie<br />

est géante, avec du top niveau :<br />

des images parmi les meilleures<br />

proposées pour le concours photo<br />

<strong>Red</strong> <strong>Red</strong> Bull Bull Illume Illume <strong>2019</strong>. <strong>2019</strong>. Fort Fort ! !<br />

photo<br />

20 « Ce serait trop cool de vivre dans<br />

un van ! »… La grimpeuse Kaya<br />

Lindsay en a fait son quotidien<br />

22 L’athlète de demain sera peutêtre<br />

dans un exosquelette<br />

24 Quand l’astronaute italien Luca<br />

Parmitano ambiance Ibiza depuis<br />

la Station spatiale : spaaaaaace !<br />

26 Retour inspirant en Zambie pour<br />

la rappeuse Sampa the Great<br />

28 De t.A.T.u à Rammstein, le Belge<br />

Todiefor se raconte en hits<br />

30 La perf’ sociale<br />

Bakary Sakho se bouge pour les<br />

siens, mode donnant-donnant<br />

36 Sunni le sage<br />

Il prône un rassemblement des<br />

générations du breakdance<br />

44 L’autre football<br />

Au Groenland, une saison de<br />

ballon qui dure une semaine<br />

58 Rêves de course<br />

Dans les baquets de F1 virtuelles,<br />

aux frontières du vrai pilotage<br />

66 No future ?<br />

À bord de l’Energy Observer,<br />

Jérôme Delafosse livre un<br />

message d’espoir<br />

74 Tabichi Code<br />

Quand les profs changent le<br />

monde, pour le meilleur<br />

82 Entre montagnes et mer, notre<br />

guide pour skier aux Lofoten<br />

86 Il y a toujours une partie de FIFA<br />

en cours dans le monde. Pourquoi<br />

ce jeu intéresse le vrai foot<br />

87 Faire du vélo d’appartement dans<br />

un sauna, c’est quoi l’intérêt ?<br />

88 Du paddle sur la Seine, sur scène<br />

avec Gotaga, en salle avec des<br />

Jedis ou en short avec les basketteurs<br />

pros : notre agenda de folie<br />

89 Au programme sur <strong>Red</strong> Bull TV<br />

90 Le top matos pour se pointer en<br />

fraîcheur sur les pistes cet hiver<br />

96 Ils et elles font <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

98 Pour finir en beauté : comme<br />

Neymar, ce Brésilien sait aussi<br />

très bien se servir de ses jambes<br />

JON GAMBRELL/AP/PICTUREDESK.COM, DAVID CLERIHEW<br />

4 THE RED BULLETIN


CONTENUS<br />

décembre <strong>2019</strong><br />

36<br />

En galère, le B-Boy Sunni<br />

a dormi sur le sol, avant<br />

d’en faire son royaume.<br />

THE RED BULLETIN 5


<strong>Red</strong> Bull Illume<br />

VOS YEUX<br />

SONT-ILS<br />

PRÊTS ?<br />

59 551 images de photographes<br />

provenant de 110 pays : le plus<br />

grand concours photo de sports<br />

d’aventure et d’action au monde,<br />

c’est l’adrénaline magnifiée par la<br />

beauté de l’art. Voici une sélection<br />

des soixante finalistes de <strong>2019</strong>.<br />

Texte ANDREAS WOLLINGER


On se tient au courant<br />

Pour voir le jour, cette photo a nécessité de<br />

grandes aptitudes professionnelles des deux<br />

côtés de l’objectif : le photographe américain<br />

Karim Iliya a choisi une longue durée d’exposition<br />

avec son drone afin de procurer plus<br />

d’intensité dramatique aux eaux vives du<br />

Little White Salmon River, dans l’État de<br />

Washington, tandis que les deux kayakistes<br />

Adrian Mattern et Knox Hammack ont dû<br />

rester immobiles, dans la seule section<br />

du fleuve où cela était possible.<br />

KARIM ILIYA/RED BULL ILLUME<br />

7


C’est la teuf dans le tuf<br />

Le paysage unique de tuf de la Cappadoce,<br />

en Turquie, est le résultat d’une activité<br />

volcanique intense créant des sculptures<br />

rocheuses époustouflantes. Il n’est évidemment<br />

pas aisé de traverser ce « pays des<br />

beaux chevaux », à moins d’être équipé de<br />

motos tout-terrain. Par chance, le photographe<br />

Burhan Kapar était de la partie.<br />

8


BURHAN KAPAR/RED BULL ILLUME


Cherchez l’erreur<br />

Le skateur allemand Jost Arens réalise une<br />

figure le long d’un banc qui n’attendait que<br />

cela à Copenhague, et nous pouvons admirer<br />

son talent sous toutes les coutures :<br />

les expositions multiples sont un outil très<br />

apprécié pour capturer toute la dynamique<br />

d’un mouvement sur une image. Mais cette<br />

fois, le photographe britannique Leo Francis<br />

s’est permis une petite facétie.<br />

LEO <strong>FR</strong>ANCIS/RED BULL ILLUME<br />

11


Enterré sous l’eau<br />

Le Français Ben Thouard, féru de photo<br />

depuis ses 15 ans, s’est installé en Polynésie<br />

à l’âge de 22 ans. Les vagues de Teahupo’o<br />

près de Tahiti sont vite devenues son sujet<br />

préféré, sous tous les angles possibles et<br />

imaginables : cette photo montre le surfeur<br />

Tahurai Henry à la lutte sous l’eau, juste<br />

après que la vague a brisé.<br />

12


BEN THOUARD/RED BULL ILLUME


L’homme élastique<br />

Le Parc national des Arches dans l’Utah<br />

(USA) est célèbre pour ses formations<br />

rocheuses de grès bizarroïdes –un endroit<br />

rêvé pour les inconditionnels d’escalade<br />

libre. Pat Kingsbury, qui en est un, gravit<br />

une tourelle isolée de 250 mètres de haut<br />

au nom prometteur de Hellbitch, tandis<br />

que le photographe Jeremiah Watt capture<br />

un moment particulièrement intense.<br />

JEREMIAH WATT/RED BULL ILLUME


SIMON BISCHOFF/RED BULL ILLUME<br />

Sur un fil de lumière<br />

L’Australien Simon Bischoff est non seulement<br />

un photographe pro, mais aussi l’un des<br />

meilleurs grimpeurs de Tasmanie. Un aprèsmidi,<br />

il se rend au Gordon Dam pour aller<br />

regarder les highlineurs qui y défient l’impressionnant<br />

barrage. Alors qu’il s’apprête à rentrer<br />

chez lui, les lumières s’allument le long<br />

de la paroi : la chance sourit aux audacieux.<br />

15


TAL ROBERTS/RED BULL ILLUME<br />

Un coup double<br />

Le sujet préféré du photographe américain<br />

Tal Roberts ? Ses potes, pardi ! Voici l’un<br />

d’eux, le skateur Tom Asta, en train de livrer<br />

un trick élégant sur un quaterpipe. Ce n’est<br />

qu’au moment d’enclencher qu’il s’est rendu<br />

compte de l’ombre fantastique qui confère<br />

à cette photo un charme particulier.<br />

17


NILS OHLENDORF/RED BULL ILLUME<br />

L’homme qui tombe à pic<br />

Ce paysage enchanté de l’Utah, aussi appelé<br />

« Fruit bowl », est bien connu des amateurs<br />

de sensations fortes. Une fois par an, des<br />

basejumpeurs et highlineurs s’y retrouvent<br />

pour une fête follement aérienne. Le photographe<br />

allemand Nils Ohlendorf a immortalisé<br />

l’un des initiateurs de cet événement,<br />

Andy « Sketchy » Lewis.<br />

Tous les gagnants dès le 20 novembre sur<br />

redbullillume.com<br />

19


conversion : « J’ai rencontré<br />

une fille qui avait acheté une<br />

camionnette qu’elle venait de<br />

transformer en maison pour<br />

passer tout l’été à faire de<br />

l’escalade. Elle m’a bluffée.<br />

J’ai alors acheté une camionnette<br />

d’occasion pour environ<br />

9 000 €, dans laquelle je peux<br />

m’allonger et tenir debout. Je<br />

l’ai moi-même aménagée en<br />

cinq mois avec mon ex-petit<br />

ami, et à l’aide de tutoriels sur<br />

YouTube. » Lindsay livre ici<br />

cinq dispositions logistiques et<br />

spirituelles à adopter avant<br />

d’embrasser la van life… pour<br />

quelques mois, ou pour la vie !<br />

onechicktravels.com<br />

Prenez bien soin de la<br />

ventilation et de l’isolation<br />

« La rouille et la moisissure<br />

sont les ennemis jurés de la<br />

camionnette. Veillez à concevoir<br />

et à réaliser soigneusement<br />

l’étanchéité de votre véhicule<br />

et sa ventilation. »<br />

VIVRE DANS UN VAN<br />

La liberté tient<br />

sur quatre roues<br />

Se barrer, s’évader et vivre dans un van. La grimpeuse<br />

et blogueuse américaine Kaya Lindsay livre ses astuces<br />

pour mener une vie d’aventure au gré du vent.<br />

Êtes-vous prêt(e) à quitter votre<br />

logement, à léguer vos biens<br />

à une association caritative et<br />

à entamer une vie itinérante ?<br />

C’est ce que l’on appelle la van<br />

life, une dynamique où l’idée<br />

est de se libérer des contraintes<br />

quotidiennes en transformant<br />

un véhicule en foyer mobile.<br />

Et ainsi rouler en quête d’aventures,<br />

hors du système.<br />

Ce mode de vie, la grimpeuse<br />

et blogueuse Kaya Lindsay l’a<br />

adopté depuis trois ans en quittant<br />

son appartement californien<br />

et en devenant free-lance<br />

pour se lancer à bord de son<br />

fourgon Mercedes- Benz Dodge<br />

Sprinter de 2006. Sa chaîne<br />

YouTube fournit non seulement<br />

des conseils pour l’aménagement<br />

de sa fourgonnette — sa<br />

vidéo sur le sujet compte plus<br />

de 1,6 million de vues — mais<br />

aussi les récits d’autres femmes<br />

converties à ce mode vie. Lindsay<br />

se souvient de sa propre<br />

Lisez Marie Kondo,<br />

La magie du rangement<br />

« Soyez radical pour ce que<br />

vous voulez emporter avec<br />

vous. De ma vie d’avant, je n’ai<br />

gardé que trois tiroirs de linge<br />

et d’accessoires de toilette. »<br />

Soyez flexible et tourné<br />

vers la recherche de<br />

solutions<br />

« Vous devez être capable de<br />

gérer toutes les difficultés.<br />

Être endurant et apte à faire<br />

face aux imprévus est une<br />

qualité primordiale quand on<br />

vit dans une camionnette. »<br />

Respectez l’espace qui<br />

vous entoure<br />

« Je vois des gens jeter du marc<br />

de café sur les parkings, ou<br />

cracher leur dentifrice sur le<br />

sol. Faites ce genre de chose<br />

dans des lieux appropriés. »<br />

Ce que vous aimez faire<br />

doit devenir le fil rouge<br />

de vos pérégrinations<br />

« La vie dans un van est<br />

souvent empreinte de romantisme.<br />

Mais pour être heureux<br />

en route, il faut une motivation<br />

assez forte pour ne pas<br />

s’arrêter. »<br />

LOU BOYD<br />

20 THE RED BULLETIN


COPYRIGHT © <strong>2019</strong> MNA, INC. ALL RIGHTS RESERVED.<br />

N’ATTENDEZ PAS QUE L’AVENTURE VIENNE À VOUS.<br />

ALLEZ LA CHERCHER !<br />

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Piloté par l’Homme,<br />

le Prosthesis peut se<br />

déplacer à 30 km/h.<br />

EXTENSION CORPORELLE FURRION<br />

L’athlète de demain ?<br />

Le tout premier exosquelette de course sera piloté par l’Homme.<br />

Ce monstre quadrupède de<br />

3,5 tonnes et 4 mètres de haut<br />

pourrait s’apparenter à un<br />

horrible robot tout droit sorti<br />

d’un film bourrin de Michael<br />

Bay (Pearl Harbor). Mais le<br />

Pros thesis, créature de la<br />

société d’électronique de luxe<br />

Furrion, est un exosquelette<br />

bionique entièrement piloté par<br />

l’Homme qui voit ainsi sa force<br />

et sa vitesse décuplées.<br />

« C’est un anti- robot, dit<br />

son créateur, Jonathan Tippett,<br />

directeur technique de Furrion.<br />

Il convient d’y voir un uniforme,<br />

une extension du corps du<br />

pilote qui impulse tous les mouvements<br />

de la bête. » La passion<br />

de Tippett pour les sports d’action<br />

a inspiré cette machine<br />

innovante, ou mecha. « En<br />

grandissant, la pratique du<br />

VTT, du snowboard, des arts<br />

martiaux et de la moto a été<br />

une grande source de joie,<br />

confie-t-il. À l’instar de ces<br />

sports, la conduite du mecha<br />

fait la part belle à la maîtrise<br />

physique et à l’habileté. Ici,<br />

il s’agit de contrôler un mastodonte<br />

de 200 chevaux. »<br />

L’entreprise planche déjà<br />

sur la prochaine génération de<br />

mecha et espère lancer sa<br />

propre X1-Mech Racing League<br />

pour une nouvelle dimension<br />

dans le sport, avec des courses<br />

d’athlètes qui s’affronteront<br />

dans leurs exosquelettes.<br />

« Manier un mecha reste accessible<br />

à toute personne en bonne<br />

santé, affirme Tippett. La puissance<br />

et la force requises sont<br />

fonction de la vitesse et de la<br />

force ciblées. Si vous maîtrisez<br />

les pistes bleues en ski et le ollie<br />

en skate, la bête se soumettra à<br />

votre volonté en peu de temps. »<br />

furrion.com<br />

SAM CARTER, JONATHAN TIPPETT LOU BOYD<br />

22 THE RED BULLETIN


Naturellement<br />

rafraîchissants<br />

N’EST PAS UNE BOISSON ÉNERGISANTE<br />

<strong>Red</strong> Bull France SASU, RCS Paris 502 914 658<br />

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UN DJ DANS L’ESPACE<br />

Carrément cosmix<br />

Cet été, à 400 km au-dessus de la Terre, la Station spatiale<br />

internationale a offert aux fêtards terriens un DJ set historique.<br />

Ce soir, on se met sur orbite ! Luca Parmitano fait tanguer le<br />

bateau à Ibiza depuis la Station spatiale internationale.<br />

Quand un DJ set est qualifié<br />

d’extraterrestre, cela tient<br />

généralement à sa sélection de<br />

morceaux ou au talent de celui<br />

ou celle derrière les platines. Ce<br />

qualificatif a pris tout son sens<br />

en août dernier, lorsque l’astronaute<br />

italien Luca Parmitano<br />

est devenu le premier DJ à se<br />

produire en direct de l’espace.<br />

Âgé de 43 ans, notre homme<br />

a travaillé avec le célèbre DJ<br />

allemand Le Shuuk pour réaliser<br />

ce set historique en utilisant<br />

un logiciel spécialisé chargé<br />

sur une tablette de la Station<br />

spatiale internationale. Le jour<br />

J, Parmitano fut projeté en<br />

direct sur écran géant devant<br />

3 000 clubbeurs à bord d’un<br />

bateau amarré dans les îles<br />

Baléares. « Bienvenue à bord<br />

du module Columbus, le laboratoire<br />

européen de la Station<br />

spatiale internationale, lancet-il<br />

en guise d’intro à son set,<br />

la plus étonnante des coopérations<br />

entre les agences spatiales<br />

du monde. »<br />

Cet événement pionnier est<br />

le fruit de la collaboration entre<br />

l’Agence spatiale européenne<br />

et un promoteur allemand,<br />

BigCityBeats, dont le festival<br />

de musique électronique sur<br />

les flots – le World Club Dome<br />

Cruise Edition – a diffusé le<br />

set de Parmitano pour les chanceux<br />

fêtards flottants basés<br />

à Ibiza. « J’avais les larmes aux<br />

yeux en voyant Luca hisser le<br />

drapeau de notre World Club<br />

Dome à bord de la Station spatiale,<br />

a déclaré Bernd Breiter,<br />

le PDG de BigCityBeats, après<br />

la prestation. Les mots me<br />

manquent pour décrire ce que<br />

j’ai ressenti au moment où la<br />

musique a retenti en direct<br />

depuis l’espace. Je rêvais<br />

depuis de nombreuses années<br />

de créer le premier club dans<br />

les étoiles et plus largement de<br />

tisser un lien entre science et<br />

musique. J’espère sincèrement<br />

que les générations à venir<br />

s’en inspireront. »<br />

bigcitybeats.tv<br />

BIG CITY BEATS LOU BOYD<br />

24 THE RED BULLETIN


SON PRO<br />

ÉCOUTEURS SANS FIL JBL<br />

JBL.COM


SAMPA THE GREAT<br />

Le son de la<br />

diasporap<br />

Née en Zambie et installée en Australie, l’étoile<br />

montante du rap politique explique comment un<br />

retour aux sources peut façonner votre avenir.<br />

Comment avez-vous surmonté vos<br />

doutes ?<br />

En échangeant avec les autres. Le sentiment<br />

de vivre les choses seul rend vulnérable.<br />

J’essaie toujours de parler de la<br />

vie avec les gens que je croise, cela aide<br />

à prendre conscience des peurs et<br />

angoisses que nous avons en commun.<br />

Comprendre que nous sommes tous<br />

confrontés aux mêmes difficultés aide<br />

à dédramatiser son cas personnel et<br />

incite à chercher les réponses dans<br />

l’acquisition du savoir.<br />

En mars de l’année dernière, Sampa<br />

Tembo, alias Sampa <strong>The</strong> Great,<br />

remportait avec Birds And <strong>The</strong> BEE9 le<br />

Australian Music Prize. Cette distinction<br />

prestigieuse pour tout musicien australien<br />

récompense l’excellence créative<br />

et non les ventes d’albums. Pourtant,<br />

Tembo n’est pas d’origine australienne,<br />

mais zambienne. Elle a quitté son pays<br />

natal en 2014 pour étudier la production<br />

audio. Dès sa première parution,<br />

<strong>The</strong> Great Mixtape sortie en 2015, la<br />

rappeuse suscite la curiosité des<br />

magazines de rap australiens, qui la<br />

consacrent comme l’une des leurs.<br />

L’idée du retour au pays est le fil<br />

conducteur des 19 titres de <strong>The</strong> Return,<br />

son premier album officiel sorti chez le<br />

label britannique Ninja Tune. La jeune<br />

femme de 26 ans nous explique pourquoi<br />

elle a réalisé la vidéo du single<br />

Final Form en Zambie, et comment elle<br />

a surmonté son manque de confiance.<br />

THE RED BULLETIN : Pourquoi avoir<br />

tourné la vidéo de Final Form en<br />

Zambie en y incluant vos amis et<br />

vos parents ?<br />

SAMPA THE GREAT : Je vis en Australie<br />

où j’ai lancé ma carrière d’artiste sans<br />

jamais me produire dans mon pays où<br />

aucune radio ne diffusait mes morceaux.<br />

Ma carrière en Australie a décollé<br />

subitement. Passages radio et concerts<br />

se sont enchaînés, et je suis même<br />

reconnue comme Australienne. Les<br />

Zambiens s’étonnaient alors de ne pas<br />

me voir me produire au pays, j’ai donc<br />

décidé de faire quelque chose pour me<br />

reconnecter avec eux.<br />

Comment avez-vous vécu ce retour ?<br />

La boucle était bouclée, je retrouvais ma<br />

terre natale en tant qu’artiste. Cela ne<br />

me gêne pas qu’on dise de moi que je<br />

suis basée en Australie, c’est en partie<br />

vrai. Au pays, mes amis me rappellent<br />

qu’ils savent d’où je viens, et je réponds<br />

n’avoir aucun contrôle en la matière.<br />

Pour moi, l’important était de raconter<br />

l’histoire qui m’a façonnée et ne pas<br />

laisser d’autres le faire à ma place.<br />

Que signifie ce retour au pays pour<br />

vous ? Vous y sentez-vous plus enracinée<br />

artistiquement désormais ?<br />

En Zambie, l’éducation ne tolère pas<br />

les prétentieux. Quand ma carrière a<br />

décollé, mes parents m’ont vite recadrée.<br />

Le retour aux sources consolide la<br />

progression. Ça vous rappelle d’où vous<br />

venez, et permet de remettre les choses<br />

en perspective, de se retourner pour voir<br />

le chemin parcouru. C’est important.<br />

En quoi avez-vous progressé ces<br />

dernières années ?<br />

J’ai plus d’assurance. Je fais ce pour<br />

quoi je suis née. Au début, j’étais rongée<br />

par le doute, car dans ma famille personne<br />

avant moi ne faisait de la musique<br />

en professionnel. Le fait d’y être parvenue<br />

et d’en tirer du plaisir renforce ma<br />

confiance en moi. Progressivement,<br />

l’assurance et le respect de soi se sont<br />

aussi accrus tout comme la volonté<br />

d’apprendre et de travailler sur mes<br />

faiblesses, afin d’éviter de tomber dans<br />

le piège de la suffisance.<br />

Vous avez dit un jour qu’un bon étudiant<br />

s’efforce de maîtriser ce en<br />

quoi il est doué, mais aussi ce qui lui<br />

fait défaut. Qu’avez-vous tenté de<br />

maîtriser en préparant <strong>The</strong> Return ?<br />

Tant de choses. Pour résumer, je dirais<br />

que j’ai tenté de mettre les choses en<br />

perspective. Avec <strong>The</strong> Return, l’idée<br />

d’un impossible retour au pays, quelle<br />

qu’en soit la raison, me consumait<br />

jusqu’à ce que je rencontre des gens<br />

sans aucun espoir de retour, contraints<br />

de se créer une nouvelle patrie. Cela m’a<br />

poussée à prendre du recul et à constater<br />

que mon petit malaise et l’exil que je<br />

ressentais pesaient peu comparés aux<br />

leurs. J’ai compris que j’étais privilégiée,<br />

contrairement à ce que j’imaginais.<br />

Qu’a produit en vous cette prise de<br />

conscience ?<br />

Je me suis demandé ce que j’allais faire<br />

de ce privilège. S’il m’est donné de rentrer<br />

chez moi, je partagerais tout ce que<br />

je sais. Si l’occasion se présentait, je<br />

transmettrais aux Zambiens qui n’ont<br />

pas la chance de retourner chez eux ce<br />

qu’est notre patrie et notre culture.<br />

C’est ce sentiment de posséder un<br />

savoir dont l’autre est dépourvu<br />

et dont il pourrait bénéficier. Cette<br />

transmission devient un devoir pour<br />

la diaspora.<br />

<strong>The</strong> Return, premier album de Sampa<br />

<strong>The</strong> Great, est disponible sur Ninja<br />

Tune ; sampathegreat.com<br />

BARUN CHATTERJEE<br />

26 THE RED BULLETIN


« Pour moi,<br />

l’important était de<br />

raconter l’histoire<br />

qui m’a façonnée. »


PLAYLIST<br />

Quand<br />

le Belge<br />

arrive<br />

Nos voisins pèsent dans le hiphop<br />

: le DJ et producteur belge<br />

Todiefor raconte des titres qui<br />

ont marqué son existence.<br />

Pour Todiefor, tout commence<br />

quand les serveurs du jeu en<br />

ligne World of Warcraft doivent<br />

passer en maintenance durant<br />

toute une nuit. Ce soir-là, pour<br />

passer le temps, le jeune geek<br />

télécharge le logiciel Fruity<br />

Loops et se prend de passion<br />

pour la production musicale.<br />

Il arrête l’école, passe ses<br />

soirées à composer sur son<br />

ordi, puis rencontre un certain<br />

Roméo Elvis qu’il invite à poser<br />

sur un de ses instrus. La suite ?<br />

Plusieurs collaborations,<br />

l’explosion du rap belge et de<br />

ses artistes et un single, Signals,<br />

qui s’est exporté bien au-delà<br />

des frontières du plat pays.<br />

Entre deux sessions studio, le<br />

producteur belge revient avec<br />

nous sur les morceaux décisifs<br />

qui ont tout changé pour lui.<br />

t.A.T.u<br />

All <strong>The</strong> Things She Said (2002)<br />

C’est le tout premier CD que j’ai<br />

reçu, quand j’avais 7 ou 8 ans. On<br />

m’avait offert une petite chaîne<br />

hifi pour Noël accompagnée de ce<br />

disque. Le truc, c’est qu’il n’y avait<br />

que deux morceaux dessus, la<br />

version en anglais et celle en<br />

russe, et comme je n’avais rien<br />

d’autre à écouter pendant plusieurs<br />

semaines, je l’ai saigné à<br />

fond, au point de connaître par<br />

cœur les paroles, en anglais ET<br />

en russe ! Merci Papa Maman !<br />

Rammstein<br />

Feuer Frei! (2002)<br />

Avec mon frère, on passait notre<br />

temps à télécharger des sons sur<br />

eMule ou Shareaza. Une fois, il est<br />

revenu à la maison en me disant :<br />

« J’ai trouvé un méga truc, faut que<br />

t’écoutes ! » Il avait téléchargé le<br />

nouvel album de Rammstein. On l’a<br />

écouté en boucle et ce morceau m’a<br />

particulièrement marqué, avec son<br />

mélange d’électro et de metal super<br />

énervé. C’est clairement à partir de<br />

là que j’ai commencé à apprécier les<br />

sonorités électroniques.<br />

<strong>The</strong> Subs & Party Harders<br />

Pope of Dope (2010)<br />

Ado, je n’étais pas un sorteur (sic),<br />

plutôt un petit geek qui faisait des<br />

sites Internet et qui jouait à World<br />

of Warcraft, mais mes potes m’ont<br />

traîné au Fuse, un club mythique de<br />

Bruxelles. À l’époque, on commençait<br />

à entendre ce mélange de rap/<br />

slam en français qui racontait des<br />

trucs horribles sur un beat electro<br />

super dur. J’ai mis un an à percuter<br />

que c’était belge ! Tous les DJ<br />

jouaient ce titre, ça passait à la<br />

radio et c’est devenu disque d’or.<br />

Roméo Elvis & Caballero<br />

Bruxelles Arrive (2016)<br />

Alors que j’habitais encore chez<br />

mes parents, à Anderlecht, et que<br />

je bossais jour et nuit dans ma<br />

chambre d’ado sur des sons, j’ai<br />

rencontré mon manager, qui gère<br />

aussi des artistes comme Damso,<br />

Roméo Elvis, Caballero… Il a cru en<br />

moi et m’a accueilli dans son écurie.<br />

Quand Bruxelles Arrive est sorti,<br />

c’est devenu un hit, on l’a entendu<br />

partout en Belgique, en France<br />

et ça a profité à tout le monde. On<br />

nous prenait enfin au sérieux.<br />

MARIE-VALENTINE GUILLARD ANTOINE CARBONNAUX<br />

28 THE RED BULLETIN


SOCIAL ET<br />

PERFORMANCE<br />

Gardien d’immeuble, écrivain,<br />

militant associatif, fondateur d’une<br />

maison d’édition, organisateur du<br />

tournoi de basket le plus ambitieux<br />

de France… BAKARY SAKHO est<br />

sans aucun doute le type le plus<br />

hyperactif du XIX e arrondissement.<br />

Texte SMAËL BOUAICI<br />

Photos FELIPE BARBOSA<br />

APOLLINE CORNUET<br />

30 THE RED BULLETIN


Bakary Sakho, l’homme<br />

multiple, motivé par une<br />

réussite… sur le terrain.<br />

Ci-contre : si ces joueuses<br />

peuvent s’exprimer sur le<br />

playground de Stalingrad,<br />

c’est parce que Bakary et<br />

son crew l’ont sauvé de<br />

l’abandon.<br />

« À QUEL MOMENT<br />

VA-T-ON AVOIR UN<br />

VRAI DISCOURS ? »


uand les autres<br />

laissent leur vie se dérouler en pilotage<br />

automatique, lui n’a qu’une philosophie ;<br />

prendre le volant et se donner les moyens<br />

d’atteindre ses objectifs. Français, Noir,<br />

musulman, vivant dans un quartier populaire<br />

? Bakary Sakho est surtout un mec<br />

qui bosse et qui ne jure que par la « performance<br />

sociale ». Sa première perf ? Elle<br />

date de 1996 : pour aider sa mère qui luttait<br />

afin d’obtenir un logement décent,<br />

après vingt ans passés dans un troispièces<br />

de 45 m² humide, « avec le plâtre<br />

qui se barrait », dans lequel se blottit sa<br />

famille de neuf personnes. Il a alors<br />

quinze ans, et il est stagiaire pour l’association<br />

Droit au logement (DAL), pour laquelle<br />

il organise des rassemblements devant<br />

les portes des bailleurs sociaux. « Ma<br />

mère était la première à se mobiliser dans<br />

le quartier, pour elle et pour des familles<br />

qui vivaient dans des conditions pires que<br />

la nôtre. Ça n’était pas une démarche politique.<br />

J’ai fait ça par amour pour ma<br />

mère, pour tout ce qu’elle avait fait pour<br />

moi », raconte-t-il assis au bureau de son<br />

QG cosy du 159 rue de Flandres, véritable<br />

petit temple dédié au basket.<br />

Il faudra quelques années pour reloger<br />

les familles, mais la machine à do-it-yourself<br />

est lancée. Elle montera en régime<br />

après un drame, la mort d’un copain de<br />

lycée d’une crise cardiaque. Une véritable<br />

prise de conscience pour lui et son groupe<br />

d’amis réunis sous l’alias BGA, pour Black<br />

Guerrilla Army, en référence au film Les<br />

Princes de la ville de Taylor Hackford.<br />

« IL FAUT<br />

FAIRE EN<br />

SORTE DE NE<br />

PLUS ÊTRE<br />

EXCLUS DES<br />

CERCLES DE<br />

DÉCISION. »<br />

« Après cette mort soudaine, j’ai réalisé<br />

qu’il fallait que je laisse une trace. J’ai<br />

décidé de moins traîner dans la rue et de<br />

donner un sens à ma vie avec tous ceux<br />

autour de moi. On a décidé de positiver<br />

ce qu’on faisait et BGA est devenu Braves<br />

Garçons d’Afrique. » Il se met à travailler<br />

sur la question de l’identité, et avec Christiane<br />

Taubira sur la loi sur la reconnaissance<br />

de la traite négrière. Déjà, il a dans<br />

l’idée de sortir de la Françafrique et de<br />

rééquilibrer les relations entre l’Hexagone<br />

et le continent noir : « D’un côté, on envoie<br />

des fusées dans l’espace, de l’autre, il n’y a<br />

pas d’eau potable. » Pendant cinq ans, il<br />

organise des conférences et débats avec<br />

des personnalités comme Lilian Thuram<br />

ou Olivier Laouchez. « L’idée, c’était de<br />

dire qu’on est fiers d’être Français, mais<br />

qu’on a aussi cette double culture, qui est<br />

racisée : quand on va quelque part, on est<br />

vus comme Noirs. On était dans l’air du<br />

temps, avec le débat sur l’identité nationale<br />

lancé par Sarkozy. »<br />

Un déclencheur<br />

Jusque-là, Bakary Sakho semblait parti<br />

pour une carrière assurée dans le milieu<br />

associatif. Mais sa conscience est bousculée<br />

en 2005, avec la mort de Zyed et<br />

Bouna, deux jeunes qui fuyaient la police<br />

à Clichy-sous-Bois, déclenchant trois<br />

semaines d’émeutes dans les cités françaises.<br />

« Pour moi, cet événement a été le<br />

tournant dans le milieu associatif. En tant<br />

qu’acteur principal, j’ai été choqué de voir<br />

que la réponse politique n’a pas été à la<br />

hauteur. Il n’y avait pas de leader, on ne<br />

parlait pas d’une même voix ! Nous vivons<br />

l’injustice de manière claire mais à quel<br />

moment va-t-on avoir un vrai discours ? »<br />

C’est lors de son séjour aux États-Unis,<br />

quelques mois plus tard, qu’il prend<br />

conscience des carences dans la « com »<br />

des quartiers populaires. Invité par l’ambassade<br />

américaine dans le cadre du<br />

programme des jeunes leaders internationaux,<br />

il se rend compte « qu’à part avoir<br />

fait du tort à l’intérieur des cités, on<br />

n’avait pas porté de message à l’extérieur<br />

». Pendant trois semaines, il rencontre<br />

des maires, députés, sénateurs et<br />

apprend « le lobbying, la force de la communauté,<br />

l’indépendance financière ».<br />

« Ce que j’ai aimé, c’est que les Américains<br />

n’attendent rien des politiques. Ils<br />

se prennent en main pour initier des levées<br />

de fonds, comme ce médecin qui a<br />

lancé Youthville à Detroit, grâce à son<br />

association avec un cadre de Kellogg’s.<br />

Ils ont levé 24 millions de dollars pour un<br />

bâtiment immense avec terrain de sport,<br />

piscine, studio, salles de cours, centre de<br />

réinsertion… » Il en revient conforté dans<br />

l’idée que si quelque chose doit bouger<br />

dans les quartiers, il faut que ça vienne<br />

de l’intérieur. Il se met alors à arroser sa<br />

communauté de cette philosophie. Il récupère<br />

une salle dans un centre sportif du<br />

quartier, où sont dispensés des cours de<br />

CrossFit ou de basket, organise une dizaine<br />

d’événements par an, entre concerts,<br />

conférences, projections de films… « Aujourd’hui,<br />

on a un staff de 80 personnes,<br />

de 12 à 45 ans, explique-t-il. On partage la<br />

valeur du travail et de la discipline. Et on<br />

n’attend pas les autres pour faire. Si, pour<br />

un événement, on n’a que 4 000 euros sur<br />

les 10 000 nécessaires, on ne va pas aller<br />

pleurnicher aux portes. On fait avec. On<br />

n’a rien mais l’idée est bonne et elle est<br />

réalisable quand même ? On le fait. C’est<br />

ce qui s’est passé pour notre dernière bloc<br />

Les proches de Bakary : en bleu, Mody Niakaté,<br />

chef de projet digital. À droite, Sali Sylla,<br />

présidente de l’association Oasis Sportive.<br />

En jeans, Paul Odonnat, co-fondateur des<br />

All Parisian Games et de Faces Cachées Éditions.<br />

À vélo, Elias Konaté, animateur réseau.<br />

32 THE RED BULLETIN


THE RED BULLETIN 33


« TU NE SAIS<br />

PAS ÉCRIRE<br />

MAIS TU AS<br />

UNE BELLE<br />

HISTOIRE À<br />

RACONTER ?<br />

VIENS ! »


L’ÉCOSYSTÈME DE<br />

LA BALLE ORANGE<br />

Quand il n’est pas en train de<br />

monter des projets dans tous<br />

les sens, Bakary Sakho se vide<br />

la tête avec le basket. Mais là<br />

encore, il a trouvé le moyen<br />

de faire progresser tout l’écosystème<br />

de la balle orange,<br />

avec l’organisation des All<br />

Parisian Games, un tournoi<br />

calqué sur le All-American<br />

aux USA, qui rassemble les<br />

meilleurs joueurs de lycée du<br />

pays. Chaque année depuis<br />

2013, 600 joueurs et joueuses<br />

de moins de 20 ans d’Île-de-<br />

France participent aux sélections,<br />

d’où sortent les 48 meilleurs<br />

(24 garçons, 24 filles),<br />

qui représentent la rive droite<br />

et la rive gauche. « On ne voulait<br />

pas créer un simple tournoi,<br />

mais un événement qui<br />

allait donner de la force à la<br />

culture basket à Paris. » L’initiative<br />

cartonne, soutenue par<br />

des joueurs NBA de passage<br />

dans la capitale, dont Lebron<br />

James en 2018.<br />

Bakary et son compère<br />

Paul sont aussi à l’origine du<br />

sauvetage du playground historique<br />

de Stalingrad, sous le<br />

métro aérien. Devenu impraticable,<br />

il devait disparaître.<br />

« On s’est positionnés en<br />

disant que ce terrain était un<br />

héritage du quartier, et qu’il<br />

fallait le garder. On a obtenu<br />

un budget de la mairie pour<br />

proposer un nouveau projet<br />

dans cet espace, qui lierait<br />

sport et cultures urbaines. »<br />

Le terrain flambant neuf a<br />

été inauguré le 21 septembre<br />

dernier, et depuis, il accueille<br />

sans discontinuer bloc parties<br />

hip-hop et matches à haute<br />

intensité.<br />

« MOI-MÊME,<br />

J’AI DU MAL À<br />

COMPRENDRE<br />

MON PROPRE<br />

CHEMIN. »<br />

party. On n’avait pas un rond, un copain<br />

a ramené des platines, l’autre la sono,<br />

et on a organisé un open mic. »<br />

Écrire son histoire<br />

Lassé par trente années de politique de<br />

la ville sans résultats, Bakary, qui trouve<br />

vaines les manifestations, a compris que<br />

pour être efficace, il fallait viser haut :<br />

« Il faut faire en sorte de ne plus être exclus<br />

des cercles de décision. Et ne pas se<br />

contenter des conseils de quartier, où<br />

l’une s’occupe des merdes de chien et<br />

l’autre se plaint des loyers qui explosent.<br />

Il faut être présent là où l’argent est distribué.<br />

» C’est dans cet esprit qu’il a monté<br />

sa maison d’édition, Faces cachées, inaugurée<br />

par son propre livre, Je suis, en<br />

2015, un plaidoyer pour l’énorme potentiel<br />

des quartiers populaires, qui fut parfois<br />

le premier livre lu hors programmes<br />

scolaires par des lycéens. Évidemment,<br />

pas question pour lui d’aller démarcher<br />

les grandes maisons parisiennes. « Le projet<br />

ne commence pas par l’envie de sortir<br />

un livre mais par celle de créer une maison<br />

d’édition. On a regardé comment ça<br />

fonctionnait et on s’est lancés. » Une idée<br />

cohérente avec sa démarche de faire<br />

s’exprimer les habitants des cités. « Il y a<br />

beaucoup de belles histoires à raconter.<br />

Au lieu de se plaindre sur le mode : “On<br />

ne parle pas de nous dans les livres”, écrivons<br />

les nôtres ! C’est important de faire<br />

connaître nos histoires, à l’extérieur, mais<br />

déjà pour nous ! »<br />

Depuis quatre ans, Faces cachées a<br />

édité quatre livres et vient de signer avec<br />

un distributeur pour se concentrer sur<br />

l’édition. La porte est ouverte à tous les<br />

talents : « Tu ne sais pas écrire mais tu as<br />

une belle histoire à raconter ? Viens ! Tu<br />

sais écrire mais tu avais peur de le faire ?<br />

Viens ! Tu ne sais pas écrire et tu n’as pas<br />

d’histoires à raconter ? Bon ben salut. Le<br />

social oui, mais la performance avant<br />

tout. » Performant, Bakary Sakho l’a été<br />

en 2017, lorsque le XIX e arrondissement<br />

a été secoué par une querelle entre<br />

bandes rivales qui causa un mort. Il<br />

monte au créneau et met les parents, qui<br />

« ne prennent plus leurs responsabilités »,<br />

les associations « qui ne font pas leur<br />

travail » et « les milieux politiques qui<br />

laissent faire tant que ça n’éclabousse pas<br />

les autres quartiers » devant leurs responsabilités.<br />

Il va même mettre la pression à<br />

l’imam de la mosquée du coin pour qu’il<br />

participe au retour à la paix. « J’ai allumé<br />

tout le monde politiquement ! Pour la<br />

première fois, après mes vidéos sur Facebook,<br />

on avait un car de CRS dans la cité.<br />

J’ai dit qu’on serait tous les dimanches sur<br />

le parvis de la gare Rosa-Parks tant que<br />

ça ne s’arrêterait pas. Quand on a lancé<br />

l’appel, les mamans sont sorties et tout<br />

s’est calmé tout de suite », raconte celui<br />

qui est devenu aujourd’hui bien plus<br />

qu’un gardien d’immeuble.<br />

La performance sociale<br />

Il quittera d’ailleurs sa loge en 2020,<br />

pour se lancer dans une nouvelle aventure<br />

avec son collègue Paul, avec qui il<br />

monte tous ses projets. Leur association,<br />

Le 99, va devenir une agence, qui exploitera<br />

le concept de performance sociale<br />

et surtout le stakhanovisme de ses fondateurs.<br />

« Aujourd’hui, je donne 35 heures<br />

par semaine à l’association, en plus de<br />

mes 35 heures de travail. L’an prochain,<br />

je donnerai 70 heures par semaine à<br />

l’agence ! On a bien travaillé, on a un modèle<br />

économique. Gardien d’immeuble,<br />

c’était un choix, je n’ai jamais voulu vivre<br />

de la politique ou du milieu associatif. Je<br />

n’ai pas gagné un euro, mais ça m’a ouvert<br />

un réseau incroyable et offert des<br />

compétences. Je donne des cours à la fac<br />

de Lyon, l’année prochaine à HEC, je suis<br />

parfois payé pour animer des colloques,<br />

qui l’eût cru ? »<br />

Si tout se passe comme il le veut,<br />

Bakary se voit bien, d’ici une dizaine<br />

d’années, faire la navette entre France et<br />

Afrique, pour travailler à une forme de<br />

réconciliation identitaire, « une nouvelle<br />

Françafrique » : « Un truc intelligent, où<br />

tout le monde s’y retrouve, pour éviter<br />

que les gens ne tombent dans cette schizophrénie.<br />

» Histoire de boucler une<br />

boucle qui s’étire dans tous les sens sans<br />

jamais casser depuis plus de vingt ans :<br />

« La dernière fois, j’étais à un colloque à<br />

Arras avec des intellectuels, des docteurs<br />

en sociologie… J’étais non seulement<br />

intervenant mais aussi l’un des grands<br />

témoins. Et sur mon badge, il y avait<br />

écrit : “Bakary Sakho, gardien d’immeuble<br />

et écrivain.” J’ai posté la photo sur les réseaux<br />

en rigolant : “Même moi, j’ai du mal<br />

à comprendre mon propre chemin !” »<br />

Instagram : @allparisiangames<br />

THE RED BULLETIN 35


Sunni<br />

le<br />

sage<br />

C’est un enfant prodige qui passait ses nuits par terre<br />

dans un bureau. Mais désormais SUNNI BRUMMITT est<br />

devenu un expert de la danse hip-hop, célèbre dans le<br />

monde entier. Le B-Boy de 24 ans nous raconte comment<br />

il remporte ses battles de manière créative et surmonte<br />

les stéréotypes agressifs sur sa discipline. Il s’exprime<br />

également sur le potentiel olympique du break.


Texte RACHAEL SIGEE<br />

Photos DAVID CLERIHEW<br />

37


Sunni Brummitt connaît la réalité du breakdance<br />

et lorsqu’il dit : « Il y a des hauts et<br />

des bas, comme dans n’importe quel<br />

boulot », il le pense vraiment. Assis<br />

sur un siège grinçant du studio de<br />

danse Centre Stage dans le quartier<br />

de Maryland, dans l’est londonien,<br />

il souligne que notre interview a lieu<br />

« dans le beau bureau ». Alors que<br />

celui d’à côté, avec le sol en béton,<br />

fut son refuge pendant un an, il y<br />

passait ses nuits : « Je me réveillais<br />

en toussant tous les matins. »<br />

Deux ans plus tôt, Sunni, enfant<br />

prodige du breakdance, était invité à<br />

toutes les compétitions importantes<br />

aux quatre coins de la planète. Il<br />

gagnait assez d’argent pour se décider<br />

à s’installer seul à Londres.<br />

C’était avant la crise, quand le<br />

groupe de street-dance Diversity<br />

remporta Britain’s Got Talent (dont<br />

La France a un incroyable talent est<br />

l’adaptation française) et que les<br />

danseurs étaient très demandés.<br />

Puis la bulle a éclaté. « J’ai traversé<br />

plusieurs années où il a fallu<br />

que je me décide entre être fauché et<br />

m’entraîner ou bien ne pas être fauché<br />

et ne pas m’entraîner, expliquet-il.<br />

Il n’y avait pas de juste milieu,<br />

pas pour le type de danse que je voulais<br />

pratiquer. Je pouvais enseigner,<br />

mais je voulais faire de la compétition.<br />

Je voulais être sur scène. »<br />

Sunni, 24 ans, est de retour à<br />

Londres pour une visite en coup de<br />

vent seulement. Il est arrivé ce matin<br />

des Pays-Bas, où il vit en ce moment,<br />

et repart demain pour une semaine<br />

en Hollande, en Autriche et en Slovaquie.<br />

Plus besoin de dormir sur des<br />

sols en béton, Sunni est aujourd’hui<br />

un B-boy à succès de renommée<br />

internationale, dont les victoires<br />

incluent celles de Notorious IBE,<br />

Unbreakable et les championnats<br />

britanniques de hip-hop deux années<br />

de suite. Il est également le premier<br />

membre des <strong>Red</strong> Bull BC One All Star<br />

originaire de Grande-Bretagne.<br />

Difficile de croire que Sunni –<br />

léger, plein d’énergie, et, lorsque<br />

nous nous rencontrons, en train de se<br />

délecter de Haribo – a déjà presque<br />

dix ans d’expérience à son compte.<br />

Il fut catapulté au sommet de la<br />

gloire en se qualifiant pour les finales<br />

du championnat du monde de breakdance<br />

en Angleterre en 2011, à l’âge<br />

de quinze ans. Simplement heureux<br />

d’être là et de vivre cette expérience,<br />

il finit même par battre la superstar<br />

sud-coréenne Hong 10 en quart de<br />

finale. Rétrospectivement, il compare<br />

cet événement à la sensation « Cori<br />

Gauff », cette ado qui a battu Venus<br />

Williams à Wimbledon cette année.<br />

« C’était la même situation. Cela<br />

reste probablement l’un des battles<br />

les plus célèbres auxquels j’ai participé.<br />

Dans la scène du break, c’est<br />

devenu viral. C’était un bouleversement<br />

de dingue, parce que personne<br />

n’avait représenté l’Angleterre depuis<br />

sept ou huit ans, et voilà que j’arrive<br />

et que je bats un gars qui était donné<br />

comme favori de la compétition. Et<br />

en plus, je le fais tout au début. À<br />

vrai dire, c’était presque triste, parce<br />

que c’était mon idole, l’idole de tout<br />

le monde. Tout Londres pleurait et<br />

moi j’étais sur scène genre “Nooooon,<br />

désolé, bro...” J’étais complètement<br />

dépassé. »<br />

Cela faisait beaucoup à digérer<br />

pour l’ado qu’il était, et lorsqu’on lui<br />

demande comment il s’en est sorti, il<br />

38 THE RED BULLETIN


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« Il a fallu que je<br />

me décide entre<br />

être fauché et<br />

m’entraîner ou<br />

bien ne pas être<br />

fauché et ne pas<br />

m’entraîner. »<br />

THE RED BULLETIN 39


hausse les épaules : « Je n’y suis pas<br />

vraiment arrivé. » L’industrie du<br />

breakdance n’était pas faite pour<br />

quelqu’un d’aussi jeune, et Sunni<br />

s’est retrouvé sous pression, à dormir<br />

dans des chambres d’hôtel anonymes<br />

dans des pays qu’il n’avait pas le<br />

temps de visiter ; pendant ce temps,<br />

ses copains vivaient une vie d’ado, à<br />

organiser des fêtes et tenter d’entrer<br />

en boîte de nuit. Il a fini par arrêter<br />

complètement la danse pendant un<br />

an afin de se débarrasser des « trucs<br />

idiots de l’adolescence ».<br />

« Je ne me mets pas<br />

souvent en colère<br />

– je suis tout le<br />

temps en train de<br />

sourire ou de me<br />

marrer. »<br />

Mais la scène finit par le rattraper,<br />

et Sunni rempile,<br />

avec l’appui de sa famille.<br />

« Ma mère me soutient à<br />

fond », dit-il en attrapant son téléphone<br />

pour montrer des photos où ils<br />

sont ensemble. « C’est une vrai hippie.<br />

Lorsqu’elle était jeune, elle a pris<br />

une année sabbatique, puis s’est finalement<br />

retrouvée dans un cirque pendant<br />

huit ans, et elle est revenue avec<br />

un gamin : moi. C’est ça, ma mère.<br />

Du délire. »<br />

Né en Malaisie, Sunni a quatre ans<br />

lorsque sa mère revient en Angleterre.<br />

Après s’être lassé du foot et de<br />

l’escalade, il passe son temps libre à<br />

acquérir des aptitudes différentes et<br />

plus inhabituelles, grâce à sa mère et<br />

son expérience du cirque. Sunni<br />

prend son premier cours de breakdance<br />

à l’âge de neuf ans.<br />

« Je faisais tout le temps des acrobaties<br />

avec ma mère, dit le danseur.<br />

Dès que j’étais libre, je la retrouvais<br />

au cirque et passais du temps avec<br />

ses amis – c’était normal. Rétrospectivement,<br />

c’était dingue, mais je n’y<br />

pensais jamais à l’époque. Je faisais<br />

de gros progrès en breakdance. Je<br />

savais déjà comment me servir de<br />

mon poids, parce que cela faisait cinq<br />

ans que je faisais des figures sur les<br />

mains. » Ayant dansé dans presque<br />

tous les contextes imaginables, dont<br />

deux ans dans la boîte de nuit londonienne<br />

haut de gamme Cirque le<br />

Soir, ce sont les battles qui font vraiment<br />

vibrer Sunni. Alors que certains<br />

danseurs sont célèbres pour leurs<br />

prestations expressives ou pour leur<br />

puissance, ce sont ses head spins vertigineux<br />

et sa créativité (il ne se sert<br />

d’aucun mouvement de base) qui<br />

démarquent Sunni. Ce type actionne<br />

son corps avec une aisance<br />

incroyable.<br />

« Je suis très mince et très léger.<br />

Lorsque je touche le sol, je rebondis.<br />

Grâce à mon poids, je vole. Mais je<br />

n’aime pas la muscu. Je déteste ça !<br />

J’ai participé une fois à un camp<br />

d’entraînement physique, et il y avait<br />

deux danseurs du Japon et du Maroc<br />

super musclés. Nous tournions<br />

autour des instruments et l’un des<br />

gars m’a demandé : “Combien de<br />

répétitions arrives-tu à faire sur cette<br />

machine ?” Je ne savais pas quoi lui<br />

répondre. “Mec, je ne sais même pas<br />

à quoi sert ce truc !” »<br />

Pour Sunni, il s’agit de bien plus<br />

que de se pointer et de faire les<br />

moves. « Il y a une différence fondamentale<br />

entre être un bon danseur et<br />

être un bon danseur de compétition,<br />

explique-t-il. Il existe un grand<br />

nombre de tactiques auxquelles personne<br />

ne pense vraiment. Disons<br />

qu’il y a trois tours, et ce gars est<br />

meilleur que toi, mais il débute le<br />

battle. Il fait un round de malade,<br />

mais qui dure une minute et demie,<br />

puis tu t’engages et en fais un de<br />

vingt secondes. Là tu sais que ses<br />

deux ou trois prochains rounds vont<br />

être pauvres parce que tu ne lui as<br />

pas laissé le temps de récupérer. »<br />

Désormais, Sunni se rend dans<br />

deux ou trois pays par semaine pour<br />

participer à des compétitions – en<br />

tant que juge ou participant – et<br />

organise des stages, mais il garde les<br />

battles en tête, et sait qu’il y a un million<br />

de possibilités de remporter un<br />

battle. « Il peut y avoir une personne<br />

qui passe deux minutes entières sur<br />

les mains et dont les pieds ne toucheront<br />

pas une seule fois le sol, et puis<br />

quelqu’un d’autre n’aura pas de force<br />

physique mais sera hypercréatif,<br />

innovateur et charismatique. Impossible<br />

de savoir qui gagnera avant de<br />

voir tout le battle. »<br />

Après avoir vécu sept ans à<br />

Newham, l’un des quartiers les plus<br />

défavorisés de Londres, Sunni ne se<br />

laisse pas impressionner par les faux<br />

durs, et la plupart des stéréotypes<br />

liés au fait d’être un B-Boy le laissent<br />

froid. « Les gens sont très attachés au<br />

cliché de ce à quoi un vrai B-Boy doit<br />

ressembler, et tout le monde semble<br />

vouloir y correspondre, indépendamment<br />

de qui ils étaient avant de<br />

débuter. Un peu mauvais garçon, un<br />

peu irrespectueux – quelqu’un qui se<br />

fiche de tout, qui ne sourit jamais.<br />

Ça me rend dingue. Les gens les plus<br />

sympas, des gens tellement cool,<br />

après un an de breakdance peuvent<br />

se retrouver transformés en gangster<br />

du Bronx. Là, tu te demandes : “Mais<br />

qu’est-ce qui lui arrive à celui-là ?”»<br />

Il y a six mois, Sunni a déménagé<br />

à Hilversum, une ville dans les environs<br />

d’Amsterdam, afin de mener<br />

une vie plus calme. « À Londres, je<br />

me réveillais au son des sirènes de<br />

police et j’allais me coucher au son<br />

des sirènes de police, explique-t-il.<br />

TROUSERS, SANDRO; BELT, DOLCE & GABBANA; SHOES, JOSHUA; JACKET, VINTAGE<br />

40 THE RED BULLETIN


Après avoir vécu dans<br />

un quartier tendu de<br />

Londres, Sunni s’est<br />

installé aux Pays-Bas.<br />

« Ici, plus de sirènes<br />

de police, mais des<br />

champs partout. »


« Nous nous trouvons<br />

à un moment charnière<br />

entre deux époques,<br />

celles du B-Boying en<br />

tant que forme d’art et<br />

en tant que sport pro. »<br />

STYLING: ADELE CANY. STYLING ASSISTANT: MORGAN HALL. GROOMING: SUSANA MOTA<br />

42 THE RED BULLETIN


« Il y a une différence fondamentale<br />

entre être un bon danseur et être<br />

un bon danseur de compétition. »<br />

JACKET, G STAR; T-SHIRT, JEANS & BELT, DOLCE & GABBANA; SHOES, TIMBERLAND<br />

Depuis que j’ai déménagé, je n’ai pas<br />

vu une seule voiture de police. Je vis<br />

au beau milieu des champs. Je sens<br />

aussi que je suis beaucoup plus calme<br />

intérieurement. »<br />

Si Sunni est détendu, le monde du<br />

breakdance est en plein mouvement,<br />

et il en vient à philosopher sur le<br />

positionnement de cette discipline,<br />

en passe d’être intégrée comme sport<br />

olympique à Paris en 2024. « C’est un<br />

moment charnière car nous nous<br />

trouvons entre deux époques. Ces<br />

vingt dernières années, le B-Boying<br />

en compétition était subjectif : trois<br />

juges et à la fin le jury se décide<br />

d’une manière ou d’une autre. Ça,<br />

aux JO, c’est impossible : il faut un<br />

système de points et un décompte.<br />

Tout le monde doit comprendre les<br />

décisions. Il y a aussi ceux de l’ancienne<br />

génération qui disent que l’on<br />

ne peut pas quantifier l’art. Nous<br />

sommes au milieu, entre le breakdance<br />

en tant que forme d’art et en<br />

tant que sport pro. »<br />

Sunni espère que le débat autour<br />

des JO forcera les différentes générations<br />

de B-Boy, parfois divisées, à se<br />

réunir. « Le B-Boying doit être<br />

reconnu, mais nous nous mettons<br />

sans cesse des bâtons dans les roues.<br />

Nous n’avons aucune infrastructure,<br />

pas de comité. Le skate et le break<br />

ont émergé au même moment, mais<br />

les skateurs ont avancé avec un but<br />

commun, tandis que nous n’arrivons<br />

pas à nous mettre d’accord. »<br />

Sunni poursuit : « Certains disent<br />

que nous sommes en train de perdre<br />

l’essence du vrai breakdance et de<br />

notre culture, mais je ne pense pas<br />

qu’elle se perde – je pense qu’elle<br />

progresse. Si vous aimez cette<br />

culture B-Boy de manière authentique,<br />

au lieu d’essayer d’inhiber ce<br />

qu’il y a de nouveau, il vaudrait<br />

mieux travailler à préserver ce qu’il<br />

y a d’ancien aussi. »<br />

Instagram : @sunnifourfizzy<br />

THE RED BULLETIN 43


La Coupe arctique


Un bien immobilier offrant<br />

des prestations rares : une<br />

vue sur les fans et le terrain<br />

de football de Sisimiut.<br />

La saison de foot qui dure une semaine<br />

Texte TOM WARD<br />

Photos BEN READ<br />

45


Le Groenland a pour ambition de se hisser sur la scène<br />

internationale du football, mais avec seulement trois mois<br />

de jeu sans neige par an, le match semble perdu d’avance.<br />

Il y a pourtant des joueurs qui pourraient transformer ce<br />

rêve en réalité : ceux-là se retrouvent dans la ville perdue<br />

de Sisimiut pour le seul tournoi annuel du pays.<br />

Ci-dessus : les joueurs de B-67 et leur rituel d’avant-match. En face : Helga, fervente supportrice des G-44, encourage son équipe favorite, qui vient de Qeqertarsuaq.<br />

46 THE RED BULLETIN


Àquarante kilomètres au-dessus du cercle<br />

arctique se déroule un match de foot de<br />

premier plan. À Sisimiut, sur la côte ouest<br />

du Groenland, sur un terrain aux 3/4 des<br />

dimensions réglementaires, les équipes<br />

B-67 et N-48 s’affrontent pour décrocher<br />

leur sésame en vue de la finale du tournoi<br />

national du pays, le Grønlandsbanken<br />

Final 6, qui a lieu tous les ans depuis<br />

1971, sur la maigre période sans neige<br />

(mi-juin à fin août).<br />

Situé au pied du Nasaasaaq (784<br />

mètres), le terrain en gazon synthétique<br />

est encerclé de maisons de ville traditionnelles<br />

aux couleurs vives, perchées au<br />

petit bonheur sur des affleurements de<br />

roche-mère groenlandaise. Armés de<br />

bruyantes cornes de brume, les supporteurs<br />

suivent le match depuis la falaise<br />

escarpée qui surplombe le terrain. Il y a<br />

des familles avec des chaises pliantes, des<br />

anciens passablement éméchés déclamant<br />

des chants en groenlandais ou en danois,<br />

une caméra de télévision en équilibre<br />

instable. Des chiens de traîneaux enchaînés<br />

à la roche devant les maisons avoisinantes<br />

joignent leurs hurlements aux cris<br />

des supporteurs. À l’ouest, on aperçoit les<br />

eaux du détroit de Davis. Par temps clair,<br />

on peut observer les parties de chasse des<br />

baleines boréales en quête de poissons.<br />

Mais aujourd’hui, toute l’attention est<br />

tournée sur le terrain. Victorieuse à treize<br />

reprises de ce championnat national<br />

d’une semaine, l’équipe de B-67 – originaire<br />

de Nuuk, la capitale – est considérée<br />

comme l’équivalent groenlandais du Real<br />

Madrid (de nombreuses équipes au<br />

Groenland sont désignées par une abréviation<br />

de leur nom complet, qui mentionne<br />

leur année de création : B-67 pour<br />

Boldklubben af 1967). Avec dix victoires,<br />

N-48 (Nagdlunguak 1948), une équipe<br />

Qeqertarsuaq<br />

Qaqortoq<br />

GROENLAND<br />

Sisimiut<br />

Nuuk<br />

Ilulissat<br />

Le Groenland est la plus grande île au<br />

monde. Avec 2 166 km², elle fait la taille<br />

des îles Britanniques, de la France, de<br />

l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Italie et<br />

de l’Autriche réunies. 80 % du pays est<br />

recouvert par l’inlandsis du Groenland et<br />

son point le plus septentrional se situe<br />

seulement à 740 km du pôle Nord.<br />

THE RED BULLETIN 47


d’Ilulissat, dans l’ouest du pays, est son<br />

principal adversaire. Le match du jour est<br />

donc empreint d’une certaine tension historique.<br />

Si B-67 venait à perdre, ce serait<br />

la première fois depuis 2009 qu’ils n’atteindraient<br />

pas la finale.<br />

Mais pour ce club, qui jouera à plus de<br />

320 km de chez lui, avec un effectif composé<br />

en majorité de joueurs de l’équipe<br />

des moins de 19 ans, le match ne sera<br />

clairement pas du gâteau. Un sondage<br />

local sur Facebook évalue leurs chances<br />

de victoire à tout juste 30 %. S’ils s’inclinent,<br />

outre la petite finale, leur saison<br />

de foot d’une semaine se terminera ici et<br />

ne reprendra que dans 365 jours. Quand<br />

on vit sur le territoire le moins densément<br />

peuplé du monde – recouvert de<br />

glace sur 80 % de sa surface et où la neige<br />

tombe sept mois et demi par an –, les<br />

opportunités de jouer au football sont<br />

rares. Pour B-67, les montagnes aux sommets<br />

enneigés, les baleines en chasse<br />

dans la mer à quelques encablures de là,<br />

les chiens de traîneaux qui hurlent, tout<br />

cela n’existe pas. Rien d’autre n’existe<br />

en dehors du terrain, du ballon et des<br />

90 prochaines minutes.<br />

Quatre jours plus tôt, Jimmy Holm<br />

Jensen, l’entraîneur de B-67, convie <strong>The</strong><br />

<strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong> à une visite officielle du QG<br />

de fortune de l’équipe à Sisimiut : un club<br />

social pour personnes âgées réquisitionné<br />

pour l’occasion. « Ça sent le vieux »,<br />

blague-t-il. Mais ce sera pourtant bien<br />

dans ces modestes locaux que séjourneront<br />

pour la semaine à venir vingt jeunes<br />

joueurs, accompagnés de Jensen et de<br />

David Janussen, l’entraîneur adjoint.<br />

Des corps endormis jonchent encore<br />

les matelas dans le dortoir improvisé,<br />

tandis que les lève-tôt font une partie<br />

d’Olsen, un jeu de cartes nordique plus<br />

connu chez nous sous le nom du Huit<br />

américain. Il y a du rap en musique de<br />

fond. Le couloir est envahi de baskets et<br />

de chaussures de foot, la cour est parcourue<br />

de fils d’où pendent des maillots en<br />

train de sécher et la cuisine a été transformée<br />

en une usine de préparation de<br />

pâtes à échelle industrielle.<br />

Ailleurs dans la ville – la deuxième<br />

plus grande du Groenland avec ses<br />

5 524 habitants –, d’autres équipes ont<br />

élu domicile tant bien que mal dans des<br />

salles de sport dont l’aspect, si ce n’est<br />

l’ambiance, évoque plus des centres de<br />

secours aux sinistrés, avec leurs matelas<br />

et autres lits de fortune entassés contre<br />

les murs.<br />

« On s’éclate, on essaie de toujours être<br />

à fond », explique Patrick Frederiksen,<br />

25 ans, capitaine de l’équipe. Il navigue<br />

entre les joueurs de cartes et ceux qui<br />

commencent à ouvrir l’œil afin de faire le<br />

point avec chacun d’entre eux. « Il y a toujours<br />

de la musique. Les gens s’amusent<br />

beaucoup, ils chantent et ils dansent. »<br />

Supporteur d’Arsenal, Frederiksen a été<br />

promu capitaine de B-67 en 2018 et ce<br />

tournoi est sa première opportunité de<br />

faire ses preuves. « C’est vraiment important,<br />

c’est comme la Coupe du monde.<br />

Ça nous donne la chance de montrer au<br />

Groenland que notre équipe est la meilleure<br />

et que nous travaillons dur pour<br />

Quand le numéro 3 de B-67<br />

se blesse, son remplaçant<br />

utilise du scotch pour transformer<br />

le numéro en 31<br />

afin de pouvoir jouer.<br />

48 THE RED BULLETIN


« C’est important,<br />

c’est comme la<br />

Coupe du monde. »<br />

Kop rocher : les supporteurs<br />

regardent le match,<br />

perchés sur les hauteurs<br />

de la falaise à Sisimiut.


Les joueurs de B-67 écoutent<br />

du rock groenlandais pour être<br />

gonflés à bloc avant un match.<br />

Leur QG de fortune se trouve<br />

dans les locaux d’un club social<br />

pour personnes âgées.<br />

51


Les joueurs de B-67 doivent s’accommoder des curieux et des gosses à vélo avant leur match.<br />

« La FIFA est<br />

venue ici deux<br />

ou trois fois. »<br />

atteindre nos objectifs. » Au Groenland,<br />

le football n’est populaire que depuis peu.<br />

Avec cet hiver qui dure toute l’année ou<br />

presque, le créneau est restreint pour les<br />

matches en extérieur – pas facile en effet<br />

de jouer sur un terrain recouvert par<br />

un mètre de neige. Les sports en salle,<br />

comme le tennis de table, le badminton<br />

ou le handball, sont des alternatives<br />

populaires, le dernier ex aequo avec le<br />

football en termes d’attrait. Mais c’est le<br />

succès d’un certain voisin nordique qui a<br />

encouragé les footballeurs groenlandais<br />

à voir les choses en grand.<br />

En 2014, l’Islande atteint pour la première<br />

fois les éliminatoires de la Coupe<br />

du monde (avant de perdre face à la<br />

Croatie). Deux ans plus tard, ils se qualifient<br />

pour la première fois pour une<br />

compétition majeure, l’Euro 2016, avant<br />

d’éliminer l’Angleterre 2-1 en huitièmes<br />

de finale, puis d’affronter la France en<br />

quarts (et de perdre sur un score honorable<br />

de 5-2). En 2018, l’Islande devient<br />

le plus petit pays du monde à se qualifier<br />

pour une Coupe du monde (même s’ils ne<br />

parviennent pas à passer le premier tour).<br />

Il est donc possible pour de petites<br />

nations insulaires comme le Groenland,<br />

assiégées par la glace, de concourir au<br />

niveau international.<br />

Mais les rêves de football international<br />

remontent à encore plus loin – au moins<br />

jusqu’en 1999, quand le sélectionneur<br />

de l’équipe nationale de l’époque et<br />

ancien membre de l’équipe d’Allemagne<br />

de l’Ouest, Josef Piontek, déclare avoir<br />

fait une demande afin d’intégrer l’UEFA<br />

(la Fédération danoise de football<br />

conteste toutefois le caractère officiel<br />

de cette demande). L’un des obstacles<br />

à la reconnaissance internationale du<br />

Groenland est son statut de territoire autonome<br />

au sein du royaume du Danemark.<br />

Autre obstacle, l’absence de surfaces de<br />

jeu et de stades conformes aux exigences<br />

de la FIFA.<br />

Mais les choses changent : en 2010,<br />

Sepp Blatter, président de la FIFA,<br />

approuve le premier terrain en gazon artificiel<br />

du Groenland, dans la ville de<br />

Qaqortoq. Nuuk obtient le sien en 2015,<br />

et B-67 partage désormais un terrain<br />

extérieur de taille réglementaire avec<br />

trois équipes locales. Il n’y a pas de<br />

gradins – ici encore, les supporteurs<br />

regardent le match depuis un affleurement<br />

rocheux, et les vestiaires consistent<br />

tout au plus en de simples cabanes de bois<br />

– mais c’est déjà mieux que le terrain en<br />

terre battue sur lequel ils jouaient jusqu’à<br />

présent. Plus tard, en 2016, le stade national<br />

de Nuuk a droit à un gazon artificiel<br />

52 THE RED BULLETIN


Hans Brummerstedt,<br />

ancien joueur de B-67,<br />

avant de quitter la salle de<br />

sport où il aura séjourné<br />

pendant une semaine.


« 95 % de nos<br />

fonds servent aux<br />

déplacements. »


Dans le sens des aiguilles<br />

d’une montre, du haut à gauche :<br />

le mini-trophée de l’homme<br />

du match ; un maillot d’entraînement<br />

d’Ek’aluk-54 avec le logo<br />

du sponsor, une boisson très<br />

populaire au Groenland ;<br />

les poteaux de corner officiels<br />

n’étant pas arrivés, en remplacement,<br />

des chiffons jaunes ont<br />

été fixés à des manches à balai<br />

en métal ; l’entraîneur adjoint<br />

Janussen en mode tactique au<br />

QG de B-67. En face : le terrain<br />

de Sisimiut, planté dans un<br />

décor rocheux typique du coin.<br />

FIFA deux étoiles – le plus haut niveau de<br />

surface synthétique pour les compétitions<br />

de l’UEFA.<br />

Frederiksen est certain que le Groenland<br />

pourrait participer à la Coupe du<br />

monde un jour. « Cela pourrait nous<br />

prendre un certain nombre d’années,<br />

mais je pense qu’on pourrait y arriver.<br />

L’Islande nous a inspirés. » Mais si l’Islande<br />

peut se vanter de nouveaux terrains<br />

couverts chauffés par géothermie qui permettent<br />

aux joueurs de s’entraîner tout<br />

au long de l’année, le Groenland n’est pas<br />

très fourni en conduits de géothermie et<br />

n’a pas le budget pour se payer des terrains<br />

couverts. « C’est difficile de trouver<br />

de l’argent. La FIFA est venue au Groenland<br />

deux ou trois fois et il y a aussi des<br />

entreprises qui nous aident. »<br />

« Il y a un problème avec le financement<br />

», admet Jensen, qui a joué pour<br />

B-67 dans sa jeunesse, avant d’intégrer la<br />

concession automobile familiale, et qui<br />

est devenu le nouvel entraîneur du club<br />

cette année, après le départ de son<br />

prédécesseur aux multiples succès, Tekle<br />

Ghebrelul. « 95 % de nos fonds servent à<br />

nos déplacements, déclare Jensen. C’est<br />

tellement cher de voyager au Groenland.<br />

En ce moment-même, nous avons un<br />

budget limité pour la nourriture. Nous<br />

ne sommes pas payés, c’est simplement<br />

pour la beauté du geste. »<br />

Ce manque de fonds handicape le<br />

football groenlandais sur tous les plans.<br />

Alors qu’il se rendait au tournoi depuis<br />

l’est du Groenland, l’un des joueurs star<br />

de B-67 s’est retrouvé coincé à l’aéroport<br />

car il n’avait pas son billet. N’ayant pas<br />

les moyens de lui en payer un autre – et<br />

en l’absence de routes reliant les villes<br />

isolées – le club n’a pas eu d’autre choix<br />

que de le renvoyer chez lui. Même une<br />

fois réunie, l’équipe s’est retrouvée<br />

coincée à l’aéroport de Kangerlussuaq,<br />

une escale perdue entre Nuuk et Sisimiut.<br />

Après avoir appelé tous ses contacts,<br />

y compris les membres de la Fédération<br />

de football du Groenland, Jensen a finalement<br />

réussi à caser l’équipe sur un bateau.<br />

Et ils sont arrivés six heures plus tard à<br />

Sisimiut – s’il avait été en service, l’avion<br />

les y aurait conduits en trente minutes.<br />

Pour éviter des vols internes à des prix<br />

exorbitants, G-44, une équipe de Qeqertarsuaq<br />

– une ville située sur une île à<br />

l’ouest du Groenland – a dû opter pour<br />

une traversée sur un bateau faisant le tour<br />

du Groenland une fois par semaine, et<br />

c’est au bout d’un éreintant voyage de<br />

22 heures qu’ils ont débarqué à Sisimiut.<br />

Il faut dire que se rendre et participer<br />

au tournoi Grønlandsbanken Final 6 est<br />

une nécessité : il est le plus important –<br />

et le seul – évènement au calendrier de<br />

la saison de football.<br />

Ici, un joueur de B-67 a droit à une mention<br />

spéciale : petit et trapu avec la tête<br />

rasée, toujours couronnée d’un bandeau<br />

Nike, Henning Bajare, 16 ans, a reçu<br />

le surnom de « Fat Mbappé » pour sa<br />

ressemblance avec l’attaquant du Paris<br />

Saint-Germain. « C’est un vrai bulldog,<br />

déclare Jensen, l’entraîneur de l’équipe,<br />

en riant. On l’a mis sur la feuille de match<br />

pour notre première rencontre et il était<br />

THE RED BULLETIN 55


« Le football<br />

groenlandais<br />

est comme une<br />

communauté. »<br />

toujours à l’attaque, et puis il revenait<br />

en demandant : “De l’eau ! De l’eau !”.<br />

Il n’a pas l’habitude de jouer des matches<br />

de cette longueur, donc il était crevé. »<br />

Malgré une saison de football minuscule<br />

et leur relative jeunesse, aucun de<br />

ces joueurs n’est novice en matière de<br />

compétition : l’équipe de B-67 est réputée<br />

pour son niveau en futsal, une variante<br />

de foot à cinq qui a été popularisée en<br />

Amérique du Sud et qui est devenue l’un<br />

des jeux les plus prisés pendant l’hiver<br />

au Groenland. Joué à l’intérieur, le futsal<br />

est plus rythmé et plus dynamique que<br />

le football « outdoor » ; les passes rapides<br />

et habiles des Brésiliens et des Argentins<br />

lui doivent beaucoup.<br />

« Le futsal, ça nous aide parce que<br />

ça nous apprend à faire des passes plus<br />

rapides au lieu de dribbler, déclare Frederiksen.<br />

Beaucoup de jeunes joueurs ne<br />

sont pas assez forts – ils ne peuvent pas<br />

faire de contrôles aériens sans se faire<br />

bousculer par un adversaire – donc on<br />

essaie de garder la balle au sol. »<br />

Plan de jeu terminé, direction le terrain.<br />

Il n’y a pas de bus, c’est donc à pied<br />

que s’y rendent les joueurs de B-67.<br />

Frederiksen porte un radiocassette à<br />

l’épaule, tandis que l’équipe passe devant<br />

l’ancienne église et les maisons de la ville,<br />

devant lesquelles des bois de rennes sont<br />

fièrement exposés – souvenirs de la saison<br />

de chasse de l’année dernière.<br />

La plupart des matches de compétition<br />

de B-67 commencent à 17 heures. En été,<br />

au Groenland, la nuit ne tombe pas avant<br />

23 heures, mais les matches se terminent<br />

dans un étrange semi-crépuscule permanent.<br />

Alors que nous attendons le début du<br />

match, un homme âgé nous aborde avec<br />

ces mots : « Le foot groenlandais est meilleur<br />

que le foot anglais. C’est une petite<br />

communauté : tout le monde se connaît. »<br />

Il évoque ses équipes anglaises préférées,<br />

Liverpool et Manchester United,<br />

avant de nous laisser sur la conviction<br />

que « les joueurs groenlandais pourraient<br />

venir en Europe et gagner des matches ».<br />

Les joueurs de B-67 s’échauffent à<br />

l’extérieur du terrain grillagé pendant<br />

qu’un autre match se déroule, puis ils se<br />

rendent aux vestiaires – deux cages de<br />

foot assemblées surmontées d’une bâche<br />

– au coup de sifflet final et attendent<br />

le coup d’envoi.<br />

« J’aime le foot, mais je le regarde<br />

seulement pendant le tournoi », déclare<br />

un supporteur d’une vingtaine d’années<br />

quand les joueurs entrent sur le terrain.<br />

56 THE RED BULLETIN


« Le football a vraiment la cote en ce<br />

moment au Groenland. Nos équipes<br />

seront peut-être meilleures si on les<br />

encourage plus, et alors il se pourrait<br />

qu’on ait une chance de participer à une<br />

compétition internationale ou quelque<br />

chose de ce genre. » La demi- finale, les<br />

joueurs de B-67 vont vite vouloir l’effacer<br />

de leur mémoire. Au bout de cinq<br />

minutes, le gardien arrête un coup franc,<br />

mais dans le cafouillage qui s’ensuit,<br />

N-48 marque le premier but. Plus tard en<br />

première mi-temps, le gardien doit intervenir<br />

encore une fois et bloque le tir d’un<br />

joueur de N-48 qui filait tout droit dans<br />

les filets de B-67.<br />

Des joueurs de N-48 se ruent<br />

sur le terrain pour célébrer<br />

leur statut de champions du<br />

Groenland <strong>2019</strong>. À gauche : la fin<br />

pour un joueur de B-67, équipe<br />

éliminée au cours du tournoi.<br />

En deuxième mi-temps, B-67 fait un<br />

triple changement. Peu après, Frederiksen<br />

se retrouve avec le bras en sang à cause<br />

d’une ancienne blessure qui s’est rouverte.<br />

Il met un pansement et revient dans le jeu.<br />

Avec moins de trente minutes à jouer,<br />

B-67 n’est clairement pas l’équipe qui<br />

domine. Un troisième but de N-48 à la 88 e<br />

minute et un quatrième pendant les arrêts<br />

de jeu viennent sceller le sort de B-67.<br />

C’est la première fois en dix ans qu’ils ne<br />

se qualifient pas pour la finale.<br />

Le jour suivant, N-48 continue sur sa<br />

lancée en éliminant G-44 en finale avec<br />

l’unique but du match. Pour leur dernier<br />

match, les joueurs de B-67 affrontent<br />

IT-79 dans le cadre de la petite finale.<br />

Mais, abattus par la défaite de la veille,<br />

ils s’inclinent sur le score terrible de 2-0.<br />

Qu’ils soient frustrés ou victorieux, pour<br />

les joueurs groenlandais, la saison est<br />

finie jusqu’à l’année prochaine.<br />

De retour à Nuuk deux jours après la<br />

finale, Jensen reçoit <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

chez lui, dans sa maison au-dessus du<br />

fjord, où les icebergs flottent avec le<br />

Sermitsiaq en toile de fond, une montagne<br />

de 1 210 mètres d’altitude en forme<br />

de dent cassée. Tandis qu’il prépare un<br />

steak de renne au barbecue, Jensen nous<br />

livre une analyse pragmatique des performances<br />

de son équipe. « Ils sont doués,<br />

ces petits jeunes, mais il leur manque<br />

encore deux ou trois ans pour être au<br />

niveau, pour pouvoir jouer la finale et,<br />

avec un peu de chance, dominer de nouveau<br />

le football en extérieur. Ça prend<br />

du temps. »<br />

En attendant, la saison de chasse<br />

vient juste de commencer et l’entraîneur<br />

comme les joueurs ont hâte de se rendre<br />

en pleine nature. S’ensuivra la saison de<br />

futsal, puis les entraînements pour le<br />

football en extérieur recommenceront<br />

au printemps. Même si les joueurs inexpérimentés<br />

de B-67 ont vu leurs espoirs<br />

déçus sur le court-terme, la qualité de jeu<br />

mise en avant lors du Grønlandsbanken<br />

Final 6 laisse à penser que le football<br />

groenlandais pourrait avoir sa place au<br />

niveau international et qu’il pourrait<br />

même égaler la réussite de l’Islande…<br />

un jour.<br />

Patrick Frederiksen a eu son lot de<br />

victoires et de défaites. À l’inverse des<br />

jeunes qui regrettent cette opportunité<br />

manquée, il a une vision plus optimiste<br />

des choses. Perdre dans ce tournoi, c’est<br />

peut-être dur, mais au final, le véritable<br />

vainqueur dans l’histoire, c’est le football<br />

groenlandais. Ce regain d’attention, c’est<br />

une opportunité éventuelle de décrocher<br />

de nouveaux financements et peut-être<br />

de pouvoir s’offrir ces fameux terrains<br />

couverts qui permettraient aux joueurs<br />

de jouer toute l’année et de monter une<br />

équipe qui n’aurait rien à envier à ses<br />

homologues européens.<br />

« Le football est en pleine évolution<br />

au Groenland, déclare Frederiksen.<br />

Cela rapproche tout le monde. Le public<br />

adhère et nous encourage à avancer.<br />

Nous voulons prouver que même si nous<br />

sommes un petit pays avec très peu d’habitants,<br />

nous pouvons jouer au football<br />

à un haut niveau. »<br />

THE RED BULLETIN 57


L’autre star de la Formule 1 : Le double champion<br />

du monde de F1 Esport, Brendon Leigh, lors de<br />

la première épreuve de l’année à Londres.<br />

RÊVES DE<br />

COURSES<br />

La Formule 1, version esport : les<br />

écuries officielles s’y affrontent<br />

dans des simulations à la pointe de<br />

la technologie, et les concurrents<br />

ont la possibilité de façonner le<br />

sport automobile lui-même. Jusqu’à<br />

devenir d’authentiques pilotes ?<br />

Texte TOM WIGGINS<br />

Photos JANE STOCKDALE<br />

59


« La théâtralité<br />

et les exploits<br />

d’une véritable<br />

course de F1. »<br />

e circuit urbain de Formule 1 de Bakou est<br />

l’un des plus rapides et des plus chaotiques<br />

au monde. Il faut environ une minute<br />

et 41 secondes à une voiture pour y<br />

compléter un tour de piste, soit une boucle<br />

de 6 km autour des sites les plus célèbres<br />

de la capitale de l’Azerbaïdjan, à une vitesse<br />

de pointe de 360 km/h. C’est ici, en<br />

2017, que Sebastian Vettel, chez Ferrari,<br />

est rentré dans la Mercedes de Hamilton<br />

quand ce dernier a eu la mauvaise idée de<br />

freiner un peu trop brutalement. L’année<br />

suivante, Daniel Ricciardo et Max Verstappen,<br />

coéquipiers chez <strong>Red</strong> Bull Racing,<br />

sont entrés en collision et ont dû abandonner.<br />

Cette année, c’est Floris Wijers, pilote<br />

du Haas F1 Team, qui a bloqué ses freins<br />

au virage 15, perdu son train arrière, est<br />

monté sur une bordure et a quitté le sol<br />

pour s’écraser contre un mur.<br />

La petite différence avec les accidents<br />

de Vettel et de ses homologues, c’est que<br />

la mésaventure de Wijers ne s’est pas<br />

passée sur le vrai circuit de Bakou, mais<br />

sur sa version simulée, lors d’un GP virtuel<br />

diffusé à travers le monde. Hormis ce<br />

détail, le jeune Néerlandais est un vrai pilote<br />

de l’écurie Haas, qui se mesure à<br />

d’autres pilotes en chair et en os, dans des<br />

simulations de courses automobile. Dans<br />

son simulateur, il lutte pour un pactole à<br />

partager de 450 000 euros lors de qualifications<br />

dans le cadre de la F1 Esports Pro<br />

Series – le sport auto recréé numériquement<br />

avec toute la théâtralité, les déchirements<br />

et les exploits de l’original. Le tout<br />

organisé au Fulham Broadway Retail<br />

Centre, sud-ouest de Londres.<br />

Nous retrouvons ces jeunes coureurs<br />

de sim racing (les courses en simulation)<br />

dans le premier endroit en Angleterre entièrement<br />

dédié aux sports électroniques.<br />

En ce mois de juillet, Lucas Blakeley,<br />

jeune Écossais de 18 ans, y lutte pour<br />

retenir ses larmes alors que son rêve de<br />

piloter pour une équipe de F1 (virtuelle)<br />

devient réalité. Ce soir, c’est le Pro Draft<br />

du championnat, et d’ici la fin de la jour-<br />

60 THE RED BULLETIN


Sens des aiguilles d’une montre, partant du haut : le volant et les pédales<br />

utilisés – le Fanatec CSL Elite F1 Set – permettent d’ajuster la conduite de<br />

la voiture au centimètre près ; Floris Wijers du Haas F1 Team ; l’esthétique<br />

du Gfinity Arena est un mix entre le plateau de <strong>The</strong> Voice et un film de SF.<br />

THE RED BULLETIN 61


née, les trente finalistes ne seront plus<br />

que dix. Chacun représentera une véritable<br />

écurie de Formule 1.<br />

La sélection est ouverte à tous : il vous<br />

suffit d’avoir F1 2018, le jeu vidéo conçu<br />

par Codemasters, et une PlayStation 4,<br />

une Xbox One ou un PC. Plus de 100 000<br />

participants ont tenté de se qualifier en<br />

ligne pour l’édition <strong>2019</strong> de cette compétition<br />

en jouant à domicile et en conduisant<br />

sur les circuits désignés. Deux mois<br />

plus tard, les plus rapides ont été conviés<br />

dans un studio digne des meilleurs plateaux<br />

TV : vitres de plexiglas illuminées,<br />

écrans tactiles géants et un trio d’experts<br />

incluant Lando Norris, l’actuel pilote<br />

McLaren et fan d’esport, installé derrière<br />

un bureau, prêt à annoncer la bonne nouvelle<br />

aux rares chanceux.<br />

L’effet domino<br />

La tentative de sélection de Blakeley cette<br />

année ne constituait pas sa première pour<br />

accéder à la F1 Esports Pro Series – il<br />

62 THE RED BULLETIN


Pour rejoindre<br />

l’élite, il suffit<br />

d’avoir le jeu F1,<br />

une console ou<br />

un PC.<br />

première à accueillir les dix écuries de<br />

Formule 1 – la Ferrari Driver Academy,<br />

débutante, a été la dernière à se joindre<br />

au groupe – mais toutes n’ont pas logé<br />

leurs pilotes à la même enseigne ; certains<br />

restent chez eux et s’entraînent en ligne<br />

avec leurs coéquipiers, ne se réunissant<br />

au quartier général que quelques jours<br />

avant chaque épreuve de la Pro Series.<br />

Tous se voient offrir un kit par Fanatec, le<br />

fournisseur officiel de matériel F1 Esports<br />

: un volant avec une rétroaction réaliste<br />

qui permet aux pilotes de sentir les<br />

réactions de la voiture et des pédales avec<br />

un frein doté d’un capteur de force sensible<br />

à la pression. Si précis que les pilotes<br />

concourent en chaussettes.<br />

Comme dans la véritable Formule 1,<br />

Mercedes a dominé l’Esports Pro Series<br />

ces dernières années (son pilote britannique<br />

de vingt ans, Brendon Leigh, a remporté<br />

les championnats de 2017 et 2018)<br />

mais cela n’a rien à voir avec une quelconque<br />

supériorité technique : les équipes<br />

peuvent modifier des éléments tels que le<br />

réglage de la suspension, la répartition<br />

des freins et les réglages aérodynamiques,<br />

mais les voitures sont identiques en<br />

termes de performances. Tout ce qui les<br />

distingue, ce sont les livrées.<br />

« Les passionnés de Formule 1 réclament<br />

quelque chose d’un peu plus équilibré,<br />

et c’est là que F1 Esports intervient,<br />

explique Paul Jeal, directeur de franchise<br />

F1 pour Codemasters. On s’assure que<br />

tout le monde ait le même équipement et<br />

les mêmes machines : au final, on a une<br />

compétition où c’est véritablement le<br />

meilleur pilote qui gagne la course. »<br />

Une caractéristique qui distingue la<br />

compétition F1 Esports Pro (et l’esport de<br />

course en général) de celles liées à<br />

Fortnite ou FIFA. Bien qu’ils mettent en<br />

jeu des récompenses plus élevées et attirent<br />

des foules plus importantes – tant<br />

dans les événements qu’en ligne – une<br />

compétition FIFA ne vous offrira pas les<br />

mêmes déploiements ni le même rythme<br />

qu’un match de Ligue . De la même manière,<br />

seul un esprit sous l’emprise de<br />

substances chimiques croira que le monde<br />

en technicolor de Fortnite s’approche de<br />

la réalité. Alors qu’avec F1 2018, on a<br />

droit, grâce aux simulateurs actuels ultra-performants,<br />

à un spectacle remarquablement<br />

proche de l’expérience véritable<br />

de la course automobile, et ce<br />

malgré le fait que les compètes virtuelles<br />

soient plus courtes (de 25 pour cent) que<br />

les vrais GP et qu’elles ne comportent évidemment<br />

aucun danger réel.<br />

s’était également qualifié en 2018 mais<br />

ses espoirs avaient été déçus. « Le fait<br />

d’avoir participé au repêchage de l’an dernier<br />

a été le tremplin qui m’a mené ici,<br />

explique-t-il alors qu’il se prépare pour la<br />

Pro Series 1, la première épreuve du<br />

calendrier F1 Esports quelques semaines<br />

plus tard. Je considère l’esport comme un<br />

vrai boulot, en pratiquant sans relâche et<br />

en faisant des courses au sein de ligues du<br />

meilleur niveau possible. »<br />

La vie du jeune Écossais a changé<br />

depuis sa sélection par l’équipe SportPesa<br />

Racing Point. Blakeley a notamment quitté<br />

le foyer familial : plutôt que de passer<br />

cinq heures à jouer tous les soirs après<br />

l’école, ses journées sont désormais<br />

dédiées à l’entraînement avec ses deux<br />

coéquipiers. « Tu te réveilles et tu vas<br />

direct sur la simulation. Tout ce qui<br />

compte, c’est de s’améliorer. Chacun galvanise<br />

l’autre, comme un effet domino,<br />

comme une émulation. » L’édition de cette<br />

année de la F1 Esports Pro Series est la<br />

Page opposée, en bas : les coureurs<br />

de Williams Esports ; au-dessus :<br />

dans la Gfinity Arena, les moteurs<br />

tournent ; ci-dessous : Isaac Pride<br />

(Williams Esports) en compétition.<br />

THE RED BULLETIN 63


« On ne peut pas comparer MsDossary,<br />

le meilleur joueur de FIFA au monde, à<br />

Lionel Messi, admet Matt Huxley, ancien<br />

joueur professionnel de Counter-Strike et<br />

manager esport de Gfinity, aujourd’hui<br />

chargé de cours au Digital Institute de<br />

l’Université du Staffordshire à Londres.<br />

L’un utilise une manette, l’autre donne<br />

des coups de pied dans le ballon. L’avantage<br />

des championnats de course, c’est<br />

qu’ils simulent le comportement d’un<br />

pilote professionnel. »<br />

C’est pourquoi une grande partie des<br />

pilotes du monde virtuel s’adonnent aussi<br />

au karting. Même si Blakeley a dû abandonner<br />

cette discipline en raison de l’escalade<br />

incontrôlable de ses coûts, il attribue<br />

son succès dans l’esport à son<br />

expérience sur piste. « Cela m’a indéniablement<br />

aidé », dit-il, évoquant deux de<br />

ses avantages par rapport à ceux qui n’ont<br />

pas l’expérience du terrain, et ne<br />

connaissent ni les engins de course en<br />

général ni la façon de conduire sur piste<br />

humide. « Le lien entre les courses sim<br />

et la réalité est incontestable. D’ailleurs,<br />

c’est bien simple : toutes les écuries de<br />

F1 utilisent des simulateurs. »<br />

Le succès chevillé<br />

Isaac Price avait quinze ans quand il a<br />

subi son accident. Coureur de kart de niveau<br />

national, le Britannique passait ses<br />

vacances d’été à parcourir le pays pour<br />

participer à des compétitions. Puis, un<br />

jour, au cours d’un tour d’essai, la colonne<br />

de direction de son kart s’est brisée, l’accélérateur<br />

s’est bloqué et Isaac s’est retrouvé<br />

catapulté contre un mur. « Il m’a<br />

fallu dix à quinze minutes pour me dépêtrer,<br />

parce que ma cheville s’était enroulée<br />

sur le ressort du frein, se souvient-il.<br />

J’ai été transporté à l’hôpital en hélico et<br />

ils ont mis quelques heures à me remettre<br />

sur pied. »<br />

Pendant sa convalescence (cheville<br />

cassée), Price a occupé son temps libre en<br />

participant à des courses en ligne sur le<br />

jeu Live for Speed sur PC. C’était il y a dix<br />

ans, et après avoir participé à des compétitions<br />

de haut niveau en simulation de<br />

sport automobile iRacing et remporté le<br />

championnat du monde virtuel de GT en<br />

2017, Price est passé à temps complet,<br />

subsistant grâce à un emploi dans la saisie<br />

de données et aux gains qu’il pouvait tirer<br />

de ses victoires en ligne.<br />

La F1 Esports Pro Series a été lancée la<br />

même année : un moment décisif pour<br />

Price. Après avoir atteint la finale de la<br />

compétition World’s Fastest Gamer de<br />

« Toutes les<br />

écuries de F1<br />

utilisent un<br />

simulateur. »<br />

Pour l’Écossais Lucas Blakeley, 18 ans, la F1 Esports Pro Series a transformé<br />

un passe-temps après l’école en une véritable carrière.<br />

McLaren en 2017, puis une participation<br />

manquée au Pro Draft l’année suivante,<br />

Price a participé à d’autres épreuves pour<br />

Williams Esports, et s’est mérité une place<br />

dans la formation F1 Esports. « J’ai montré<br />

ce que je pouvais faire et je m’inscrivais<br />

dans la dynamique qu’ils avaient<br />

déjà, de sorte que c’était tout à fait logique,<br />

dit-il après avoir été sélectionné.<br />

En tant qu’équipe, je pense que nous pouvons<br />

être confiants, nous avons le potentiel<br />

pour réussir. »<br />

Une amitié rapide<br />

Floris Wijers, des Pays-Bas, n’a aucune<br />

expérience dans le sport automobile, mais<br />

il a commencé à jouer aux jeux de course<br />

dès l’âge de quatre ans.<br />

Wijers a acheté son premier volant en<br />

2017 et, comme Blakeley, il n’est pas parvenu<br />

à être repêché par une équipe de F1<br />

Esports l’année suivante, mais les deux<br />

sont rapidement devenus amis et ont passé<br />

les douze mois suivants à courir ensemble<br />

en guise de préparation pour le<br />

Pro Draft qui a eu lieu en juillet 2018.<br />

Parvenant à un équilibre entre l’esport<br />

et l’université ainsi qu’un stage dans la<br />

diffusion de contenus vidéo, Wijers, vingt<br />

64 THE RED BULLETIN


ans, consacre entre quatre et huit heures<br />

par jour à la simulation de course chez<br />

lui, à Soest, près d’Utrecht. « Je n’ai pas<br />

besoin de beaucoup de sommeil, alors je<br />

m’entraîne jusqu’à minuit ou une heure<br />

du matin », dit-il. Après avoir bien assuré<br />

dans les épreuves de qualifications, battant<br />

le premier choix au repêchage, David<br />

« Tonzilla » Tonizza, dans sa ronde de qualification,<br />

Wijers a été repêché par Haas.<br />

Au début de la saison, Blakeley et lui seront<br />

rivaux et non pas coéquipiers.<br />

Conduire, un jour<br />

Le jour des Pro Series 1, Blakeley ne se<br />

trouve pas là où vous l’attendez. Chaque<br />

épreuve se compose de trois courses et il<br />

n’a été retenu pour aucune d’entre elles<br />

par son équipe. « On me l’a dit il y a<br />

quelques jours, révèle-t-il en regardant<br />

ses coéquipiers s’entraîner depuis les fauteuils<br />

de cinéma du Gfinity Arena. Évidemment,<br />

en tant que pilote, c’est un<br />

coup dur : si tu n’es pas déçu à l’idée de ne<br />

pas courir, c’est que tu ne le fais pas bien.<br />

Mais j’accepte la décision, et je sais que je<br />

conduirai un jour. J’aurai ma chance. »<br />

Chez Williams Esports, Price reçoit le<br />

feu vert pour les deux premières courses,<br />

mais son coéquipier, le Finlandais Tino<br />

Naukkarinen, 19 ans, prendra la relève<br />

pour l’épreuve retransmise ce soir-là :<br />

treize tours du circuit urbain de Bakou.<br />

Cela permet à Naukkarinen de se concentrer<br />

sur un seul circuit. Price n’arrive<br />

qu’en 17 e position sur le circuit de<br />

Bahreïn et 14 e en Chine, attribuant son<br />

Vue en plongée sur les pilotes virtuels dans leur cockpit, en chaussettes.<br />

Max Verstappen ne se laisserait pas surprendre dans pareille tenue.<br />

Pierre Gasly,<br />

pilote de F1 dans<br />

la vraie vie, participe<br />

ce jour-là à la<br />

course virtuelle.<br />

manque de points à une mauvaise performance<br />

lors des qualifications, un manque<br />

de confiance en son simulateur et à la<br />

malchance – mais il ne se sent pas loin<br />

derrière. « Il y a des pilotes qui ne sont pas<br />

présents parce qu’ils n’ont pas été meilleurs<br />

que les autres pilotes de leur équipe,<br />

donc en ce sens, c’est un exploit, explique-t-il.<br />

La saison dernière, je participais<br />

à des championnats en ligne et j’étais<br />

en compétition avec les gars qui gagnent<br />

des courses ici, donc il n’y a aucune raison<br />

que je ne puisse pas gagner à mon tour. »<br />

Contrairement à Price et à Blakeley,<br />

Wijers participe aux trois courses de la<br />

Pro Series 1. Mais après de solides performances<br />

à Bahreïn et en Chine, où il a respectivement<br />

terminé neuvième et septième,<br />

le Néerlandais déçoit à Bakou.<br />

Alors que Naukkarinen et Frederik<br />

Rasmussen de <strong>Red</strong> Bull Racing tentent<br />

d’empêcher l’Italien Tonzilla de remporter<br />

sa troisième course de la journée, Wijers<br />

lutte pour se familiariser avec ses pneus<br />

medium et se bat en queue du peloton<br />

avec le coéquipier de Blakeley chez<br />

SportPesa Racing Point, Daniele Haddad.<br />

C’est au sixième tour que Wijers juge mal<br />

le virage 15, sa collision avec le mur l’obligeant<br />

à faire un arrêt imprévu au stand<br />

qui lui coûte cher : il finit finalement 18 e .<br />

Une fin décevante pour le pilote hollandais<br />

de la Pro Series 1. « J’étais satisfait<br />

de mes résultats antérieurs, mais j’aurais<br />

pu terminer sixième, voire cinquième en<br />

Chine, dit-il. Espérons que c’est la seule<br />

mauvaise course que nous aurons. »<br />

À Bakou, Rasmussen s’empare du drapeau<br />

à damier pour <strong>Red</strong> Bull Racing, avec<br />

Naukkarinen à trois secondes derrière<br />

lui. La Ferrari de Tonizza croise la ligne<br />

d’arrivée au coude à coude avec Álvaro<br />

Carretón de Williams Esports, avant de<br />

se voir attribuer la troisième place après<br />

que le pilote espagnol a reçu une pénalité<br />

de cinq secondes pour excès de vitesse<br />

dans le couloir de changement.<br />

Le rêve… de la réalité<br />

À neuf courses de la fin, dont la grande<br />

finale du 4 décembre, Blakeley, Price et<br />

Wijers auront tous de nombreuses occasions<br />

d’oublier leur déception (sans oublier<br />

la première édition chinoise de la F1<br />

Esports Pro Series qui aura lieu l’année<br />

prochaine). Pour certains de ces pilotes,<br />

il s’agit peut-être du premier pas vers une<br />

carrière dans le sport automobile. Trois<br />

membres de l’alignement actuel – Brendon<br />

Leigh, Enzo Bonito de McLaren Shadow et<br />

Cem Bölükbaşi de Toro Rosso – se sont vu<br />

remettre les clés de véritables voitures de<br />

course à la suite de leurs exploits esport.<br />

L’actuel pilote de Formule 1 de Toro<br />

Rosso, Pierre Gasly, qui participe à la<br />

course virtuelle ce jour-là, admet qu’il joue<br />

à des jeux de F1 entre les courses pour se<br />

mettre au rythme du circuit suivant inscrit<br />

au calendrier. « L’un de mes amis, Jann<br />

Mardenborough, qui a participé au programme<br />

Gran Turismo (GT Academy) avec<br />

Nissan, a participé au Mans, raconte le<br />

Français. Il est manifestement possible de<br />

passer du jeu à la réalité, mais il faut<br />

beaucoup d’entraînement pour maîtriser<br />

la conduite d’une véritable voiture. »<br />

Passer du virtuel au monde réel des<br />

courses auto, cela reste un rêve concret<br />

pour nombre de pilotes. « Les courses sim<br />

sont fantastiques, ne vous méprenez pas,<br />

dit Blakeley. Mais si la possibilité de passer<br />

du sport à la réalité s’offrait à moi, je<br />

n’hésiterais pas une seconde. »<br />

La finale de la F1 Esports Pro Series<br />

le 4 décembre en direct sur Facebook,<br />

YouTube et Twitch ; f1esports.com<br />

THE RED BULLETIN 65


PIONNIER<br />

Jérôme Delafosse,<br />

explorateur et auteur<br />

de best-sellers, par -<br />

court le monde à bord<br />

du premier cata maran<br />

équipé d’un moteur<br />

autonome en énergie.<br />

66


L’EXPLORATEUR<br />

DU FUTUR<br />

Il possède un puissant pouvoir de persuasion et navigue à bord<br />

d’un bateau qui promet de relever les défis énergétiques et<br />

écologiques de demain. Si nous avions tous quelque chose de<br />

JÉRÔME DELAFOSSE, changer le monde serait un jeu d’enfants.<br />

Texte ALEX LISETZ<br />

Photos KONSTANTIN REYER


AUTONOME<br />

L’Energy Observer<br />

génère ses propres ressources<br />

énergétiques<br />

pour les moteurs et<br />

l’électronique.


L<br />

e port d’Amsterdam, le cinquième plus<br />

grand d’Europe, n’a jamais accueilli<br />

de bateau comme celui-ci auparavant :<br />

chaque surface lisse y est recouverte de<br />

capteurs solaires, il dispose d’éoliennes<br />

mobiles de 12 mètres de portée sur les<br />

côtés et de huit réservoirs pour un total<br />

de 62 kilos d’hydrogène pur dans la<br />

salle des machines. Voici l’Energy<br />

Observer, le premier navire autonome<br />

en énergie au monde, 30 mètres de<br />

long et 12 de large. Sur le pont se tient<br />

Jérôme Delafosse, 48 ans, explorateur<br />

et auteur à succès. Avec le capitaine<br />

Victorien Erussard, 40 ans, ils ont<br />

mis au point un projet fou : pour<br />

convaincre le monde qu’une transition<br />

énergétique grâce à des solutions<br />

durables est possible, les Malouins<br />

veulent faire le tour du monde avec<br />

leur bateau pendant six ans.<br />

the red bulletin : Jérôme, vous<br />

êtes plongeur, réalisateur de films<br />

documentaires et auteur de<br />

romans. Est-ce que vous vous<br />

réveillez tous les matins avec une<br />

nouvelle idée ?<br />

jérôme delafosse : Mes métiers<br />

ne semblent différents que lorsqu’on<br />

les considère de l’extérieur. En fait,<br />

j’ai toujours été intéressé par les deux<br />

mêmes choses : vivre l’aventure et<br />

raconter des histoires.<br />

Que cherchez-vous à faire avec<br />

l’Energy Observer ?<br />

Prouver que nous pouvons répondre<br />

à nos besoins énergétiques avec des<br />

ressources renouvelables qui respectent<br />

l’environnement si nous les<br />

utilisons intelligemment. Notre équipe<br />

le démontre dans les conditions les<br />

plus difficiles avec le tout premier<br />

catamaran autonome aux énergies<br />

renouvelables et à l’hydrogène. Mais<br />

cela s’applique aussi bien à la voiture<br />

qu’à la maison, dans les industries et<br />

partout où l’énergie est nécessaire. Et<br />

les 11 000 milles nautiques que nous<br />

avons déjà parcourus depuis deux ans<br />

prouvent que l’avenir, c’est l’énergie<br />

renouvelable.<br />

Que fait l’Energy Observer différemment<br />

des autres ?<br />

Lorsque les conditions le permettent,<br />

quand le soleil brille ou que le vent<br />

souffle assez fort, nous naviguons<br />

grâce aux énergies renouvelables.<br />

Avec le surplus d’énergie, nous produisons<br />

de l’hydrogène par électrolyse<br />

de l’eau de mer grâce aux énergies<br />

CAPITAINES<br />

Le chef d’expédition<br />

Jérôme Delafosse<br />

(à droite) et le second<br />

capitaine Jean-Baptiste<br />

Sanchez au poste de<br />

pilotage.<br />

NIVEAU D’ÉNERGIE<br />

Un ordinateur de bord à<br />

côté de la barre indique<br />

le niveau de production<br />

des panneaux solaires<br />

(rouge) et le niveau de<br />

charge des bouteilles<br />

d’hydrogène (vert).<br />

« 11 000 milles<br />

nautiques déjà<br />

parcourus :<br />

voilà la preuve<br />

que l’avenir,<br />

c’est l’énergie<br />

renouvelable. »<br />

THE RED BULLETIN 69


« Il ne faut pas<br />

avoir peur de<br />

se jeter dans<br />

l’inconnu et<br />

prouver à quel<br />

point on croit<br />

en ses rêves. »<br />

ANALYSE<br />

Jérôme Delafosse<br />

inspecte la pile à<br />

combustible qui convertit<br />

l’hydrogène en<br />

électricité (en haut).<br />

SALLE DES MACHINES<br />

Ici, l’eau de mer est<br />

transformée en hydrogène<br />

pour l’alimentation<br />

du moteur électrique<br />

(visible à droite).<br />

renouvelables. C’est notre moyen<br />

de stockage. Ensuite, lorsque nous<br />

n’avons plus de soleil ni de vent, nous<br />

envoyons l’hydrogène stocké sous<br />

pression dans une pile à combustible<br />

qui va le transformer en électricité.<br />

C’est cela qui nous favorisera la navigation<br />

de nuit par exemple.<br />

Une bonne idée ne suffit pas. Il faut<br />

aussi convaincre les gens…<br />

Il faut les convaincre qu’on peut transformer<br />

le monde !<br />

Alors supposons que je veuille<br />

créer une start-up ou révolutionner<br />

l’approvisionnement<br />

énergétique mondial contre les<br />

intérêts d’opposants qui valent<br />

des milliards...<br />

Vous devez être sacrément motivé,<br />

et trouver des alliés plus intelligents<br />

et plus puissants qu’eux.<br />

Et ensuite ?<br />

Il ne faut pas avoir peur de se jeter<br />

dans l’inconnu et prouver à quel<br />

point on croit en ses rêves.<br />

En prenant des risques financiers<br />

personnels, par exemple ?<br />

Lorsqu’on se lance dans un projet<br />

comme ça, il y a toujours un facteur<br />

de risque. Il y a les succès et il y a les<br />

échecs qui font peur et douter, mais<br />

à un moment donné, on arrive à un<br />

point de non-retour. Peu importe ce<br />

qu’il se passe, vous ne pouvez plus<br />

revenir en arrière, vous devez réussir.<br />

Comment vous est venue cette<br />

idée ?<br />

Victorien Erussard, mon ami et partenaire<br />

de projet, qui en a développé<br />

l’aspect technique, a remporté de<br />

nombreuses régates et championnats,<br />

mais il a perdu la Transat Jacques<br />

Vabre parce que ses batteries l’ont<br />

lâché. Nous avons donc eu l’idée de<br />

construire un bateau qui pourrait<br />

s’auto-alimenter en énergie.<br />

Où en êtes-vous dans votre<br />

odyssée ?<br />

Nous avons déjà visité dix-sept pays.<br />

La première année, nous n’avons<br />

amarré que dans les ports français ;<br />

l’année dernière, nous avons navigué<br />

sur toute la Méditerranée. En <strong>2019</strong>,<br />

nous nous concentrons sur l’Europe<br />

du Nord. Puis viendront l’Asie, le<br />

Pacifique et la côte ouest des États-<br />

Unis et, en 2022, l’Amérique centrale<br />

et la côte est des États-Unis.<br />

Cette entreprise est-elle particulièrement<br />

risquée ?<br />

Nous avons déjà été pris dans des<br />

vents très violents et parfois « casse<br />

bateau » quand la houle est très<br />

serrée, comme en Méditerranée<br />

entre Barcelone et Marseille. Le plus<br />

inquiétant, c’est quand les vagues<br />

viennent se fracasser sous la nacelle,<br />

ça grince, ça craque, mais ça tient.<br />

Nous sommes fiers car, si nous prouvons<br />

que notre concept fonctionne<br />

en milieu extrême, nous pourrons<br />

l’adapter partout à terre, dès demain,<br />

dans une maison, dans les villes et<br />

70 THE RED BULLETIN


LA RÉVOLUTION<br />

HYDROGÈNE<br />

L’Energy Observer pourrait<br />

révolutionner nos méthodes<br />

de production et de stockage<br />

d’énergie.<br />

OCEAN WINGS<br />

Ces ailes propulsives se<br />

mettent automatiquement<br />

dans la position la plus<br />

efficace pour donner de la<br />

vitesse au bateau et produire<br />

de l’énergie éolienne.<br />

2MOTEURS<br />

électriques qui se<br />

transforment en<br />

hydro-générateurs.<br />

ORDI DE BORD<br />

Dans la salle de commandement<br />

sous le pont, les<br />

stocks et les flux énergétiques<br />

sont surveillés en<br />

permanence. Un deuxième<br />

écran est situé sur le pont.<br />

STOCK D’HYDROGÈNE<br />

L’hydrogène obtenu par<br />

électrolyse à partir de l’eau<br />

de mer est emmagasiné<br />

(pression de 350 bars)<br />

dans des réservoirs de<br />

part et d’autre de la proue.<br />

1 400<br />

KILOS DE<br />

BATTERIE<br />

stockent l’énergie<br />

utile à court terme<br />

dans des batteries<br />

Li-ion de 400 V.<br />

ARMOIRE ÉLECTRIQUE<br />

CENTRALE<br />

C’est le cœur de l’Energy<br />

Observer : un automate<br />

assure l’équilibre entre<br />

les énergies.<br />

PANNEAUX<br />

SOLAIRES<br />

168 mètres carrés<br />

de panneaux solaires<br />

praticables recouvrent<br />

le pont. Ils sont recouverts<br />

d’un revêtement caoutchouté<br />

antidérapant.<br />

8<br />

RÉSERVOIRS<br />

Leurs 332 litres<br />

de capacité<br />

permettent de<br />

stocker 62 kilos<br />

d’hydrogène,<br />

équivalent à deux<br />

mégawatts<br />

d’énergie.


HORIZON : 2022<br />

Quand nous rencontrons<br />

Jérôme Delafosse dans<br />

le port d’Amsterdam,<br />

l’Energy Observer n’en<br />

est qu’à sa 35 e étape.<br />

Arrivée prévue en 2022.<br />

« Nous proposons<br />

une alternative<br />

optimiste et<br />

fédératrice, et ça<br />

parle aux gens. »<br />

pourquoi pas à l’échelle d’un pays…<br />

Car notre voyage a aussi ses avantages<br />

: nous faisons des escales dans<br />

plus de cinquante pays, nous créons<br />

du lien ! Nous nous entretenons avec<br />

des journalistes, des scientifiques, des<br />

classes scolaires et des décideurs pour<br />

convaincre le monde qu’une révolution<br />

énergétique est possible.<br />

Et quelles sont leurs réactions ?<br />

Ils apprécient le fait que nous arrivions<br />

avec un discours différent des slogans<br />

apocalyptiques à propos de la catastrophe<br />

climatique. Nous proposons<br />

une alternative optimiste et fédératrice,<br />

qui irait même jusqu’à stimuler<br />

l’économie mondiale. Cela fascine<br />

les gens, en particulier là où l’on croit<br />

qu’ils ont d’autres soucis. La Tunisie,<br />

par exemple, s’enthousiasme pour<br />

notre projet et est très intéressée par<br />

les énergies renouvelables.<br />

Quelles leçons tirez-vous de cette<br />

expédition ?<br />

La navigation en mer dans des conditions<br />

extrêmes est un enseignement<br />

riche et surtout inestimable. Nous<br />

observons, testons, varions les systèmes<br />

chaque jour. Nous avons déjà<br />

changé les éoliennes parce qu’elles<br />

n’étaient pas efficaces. Nous naviguons<br />

désormais avec les nouvelles<br />

voiles Ocean Wings. C’est une technologie<br />

de l’America’s Cup, le bateau luimême<br />

était auparavant utilisé comme<br />

catamaran de course par différentes<br />

équipes avant sa conversion.<br />

Quel fut le moment le plus excitant<br />

jusqu’à présent ?<br />

C’est toujours le point de non-retour.<br />

Quand on a poussé une idée si loin<br />

qu’on se rend compte qu’on ne peut<br />

plus revenir en arrière, comme il y a<br />

deux ans, lorsque nous avons pris la<br />

mer à Saint-Malo.<br />

Alors, ce premier jour en mer ?<br />

Inoubliable. Parce que c’est à ce<br />

moment-là que nous avons réalisé<br />

que le cycle de l’énergie fonctionnait<br />

exactement comme nous l’avions imaginé.<br />

Je veux dire que nous savions que<br />

cela marcherait ; après tout, c’est de la<br />

science. Mais tant que la démonstration<br />

n’a pas été faite, le doute plane.<br />

Travailler des mois dans un espace<br />

confiné doit être rude. Comment<br />

rechargez-vous vos batteries ?<br />

Seul sur le pont la nuit, sous un ciel<br />

étoilé, en compagnie des dauphins<br />

qui suivent le bateau : voilà ma<br />

récompense pour chaque effort. Et<br />

en journée, il n’est pas interdit de<br />

piquer une tête et d’aller explorer les<br />

profondeurs. Après tout, je suis aussi<br />

plongeur pro !<br />

energy-observer.org<br />

72 THE RED BULLETIN


HORS DU COMMUN<br />

Le prochain numéro le 23 janvier avec et le 6 février avec<br />

dans une sélection de points de vente et en abonnement<br />

AARON BLATT / RED BULL CONTENT POOL


L’ÉTOFFE<br />

D’UN<br />

HÉROS<br />

« Les vrais superhéros, ce sont les profs, ce<br />

sont eux qui changent le monde ». C’est ce que<br />

déclarait l’acteur Hugh « Wolverine » Jackman<br />

lors de la cérémonie honorant PETER TABICHI<br />

du titre de meilleur enseignant de la planète<br />

en <strong>2019</strong>. Ce professeur kenyan nous explique<br />

comment il tire parti de sa vocation pour créer<br />

les conditions nécessaires à une (r)évolution<br />

en matière d’éducation.<br />

Texte CHRISTINE VITEL<br />

TONY KARUMBA/AFP/PICTUREDESK.COM


« Mes collègues et<br />

moi sommes déterminés<br />

à créer une différence<br />

dans la vie de nos élèves. »<br />

Peter Tabichi, lauréat du prix<br />

Best Global Teacher <strong>2019</strong>.<br />

75


Que feriez-vous si vous gagniez une somme<br />

colossale ? Est-ce que vous aussi, comme<br />

Peter Tabichi, vous décideriez de reverser<br />

la totalité au profit de votre communauté ?<br />

Un geste altruiste qui résume bien la philosophie<br />

de ce professeur kenyan : c’est en<br />

effet à lui que vient d’être décerné le prestigieux<br />

prix de meilleur prof au monde de<br />

la Varkey Foundation, équivalent d’un prix<br />

Nobel pour l’enseignement, doté d’une<br />

récompense à hauteur d’un million de dollars.<br />

Cet enseignant de mathématiques et<br />

de physique au Kenya, à Naishi, comté de<br />

Nakuru, œuvre au sein de l’établissement<br />

secondaire Keriko pour encourager l’accès<br />

à la formation des jeunes filles, et développer<br />

le potentiel du « brillant avenir de<br />

l’Afrique » : ses élèves. Comment s’y<br />

prend-il ? Las d’attendre que les conditions<br />

soient favorables, il les a créées. Grâce à<br />

Un Franciscain qui a foi en l’éducation.<br />

lui, le nombre d’élèves dans son établissement<br />

rural a doublé en trois ans, et l’implication<br />

des filles dans les succès de l’école<br />

a très fortement augmenté. Les héros sont<br />

faits de cela : une volonté d’agir là où les<br />

responsables échouent, et sans lésiner sur<br />

les moyens ni les efforts à déployer.<br />

the red bulletin : Qu’est-ce qui vous a<br />

motivé à devenir enseignant ?<br />

peter tabichi : J’ai grandi dans un village<br />

reculé du Kenya, au sein d’une famille<br />

d’enseignants. Mon père était instituteur,<br />

trois de mes oncles et quatre de mes cousins<br />

étaient profs. Petit, j’étais entouré de<br />

modèles à suivre. J’ai été le témoin de l’engagement<br />

de ma famille pour l’école et la<br />

communauté. J’ai compris très tôt que les<br />

enseignants, dont le rôle s’étend largement<br />

au-delà de la salle de classe, constituent les<br />

vrais trésors de notre société. Ils éclairent<br />

les jeunes esprits sur les meilleures voies à<br />

emprunter pour relever les défis de la vie.<br />

Enseigner est un métier noble, et c’est un<br />

honneur d’y consacrer ma vie.<br />

Quel est le plus gros défi que vous ayez<br />

eu à relever personnellement ?<br />

Ma mère est morte quand j’avais onze<br />

ans, laissant derrière elle mon père en<br />

charge de mes frères et sœurs et moi, en<br />

plus d’assumer ses responsabilités professionnelles.<br />

Son humilité, sa capacité de<br />

résilience et sa générosité m’ont sincèrement<br />

inspiré, car c’est tout cela qui nous<br />

a permis de surmonter le deuil et la douleur.<br />

Je retrouve les mêmes qualités chez<br />

mes collègues : ils se lèvent à l’aube, font<br />

la route à pied jusqu’à l’école sous une<br />

pluie ou une chaleur accablante ; restent<br />

après la fin des cours pour faire du soutien<br />

scolaire ; travaillent longtemps le soir<br />

pour corriger et noter les cahiers, et<br />

préparer la classe du lendemain.<br />

Avez-vous parfois l’impression de vous<br />

substituer aux politiciens de votre<br />

pays ?<br />

Disons que mes collègues et moi voulons<br />

aider nos jeunes à exploiter leur plein<br />

potentiel. C’est peu dire que l’investissement<br />

en temps que nous leur dédions tous<br />

en vaut la peine, nous autres enseignants,<br />

parents, communautés, gouvernements et<br />

garants de la loi. Les enfants ont besoin<br />

d’apprendre les standards académiques,<br />

mais aussi d’acquérir l’esprit d’équipe mais<br />

« Les enseignants<br />

constituent les<br />

vrais trésors de<br />

notre société. »<br />

RII SCHROER/EYEVINE/PICTUREDESK.COM, TONY KARUMBA/AFP/PICTUREDESK.COM (2)<br />

76 THE RED BULLETIN


Au sein de son établissement, Peter Tabichi a créé un club de développement de talents et un club de sciences, et promeut les compétitions de projets entre écoles.<br />

aussi les qualités nécessaires pour aborder<br />

la vie en société et résoudre des problèmes,<br />

pour travailler ensemble et penser<br />

de manière innovante.<br />

Que souhaitez-vous le plus ardemment<br />

pour vos élèves ?<br />

Je suis sur la ligne de front, je vois la promesse<br />

des jeunes générations : leur curiosité,<br />

leur talent, leur intelligence, leurs<br />

croyances, ils sont déterminés à surmonter<br />

les difficultés et donner le meilleur<br />

d’eux-mêmes. Qu’ils soient capables de<br />

mettre à profit cet énorme potentiel,<br />

atteindre leurs rêves et être armés pour<br />

rendre ce monde meilleur, voilà mon<br />

souhait le plus vif.<br />

Une cantine à ciel ouvert, et saine : dans la vallée du Rift, l’insécurité alimentaire menace.<br />

Quels sont les plus gros challenges<br />

auxquels les enfants sont confrontés<br />

au Kenya ?<br />

THE RED BULLETIN 77


Ses élèves avant tout : c’est avec eux que Tabichi a tenu à célébrer son titre de meilleur enseignant au monde, le Global Teacher Prize.<br />

Comme nous manquons cruellement de<br />

ressources dans cette partie reculée de<br />

l’Afrique, il y a beaucoup de pauvreté.<br />

Même la qualité de la nourriture n’est pas<br />

garantie. La communication avec les<br />

familles des élèves est donc essentielle,<br />

afin de leur faire comprendre comment et<br />

pourquoi nous voulons aider ces enfants<br />

en les mettant sur la voie d’une vie meilleure.<br />

Les jeunes d’Afrique ne doivent plus<br />

se sentir freinés, ni s’autosaboter avec des<br />

ambitions trop modestes ou des attentes<br />

trop basses.<br />

Faire venir les enfants à l’école semble<br />

être votre mission de vie…<br />

Oui, car l’enjeu est énorme, surtout pour<br />

ce qui est des filles. Dans certaines communautés,<br />

c’est souvent l’enseignant seul<br />

qui va pouvoir persuader les parents que<br />

la place de leur fille est à l’école, et que<br />

son éducation est plus importante que sa<br />

participation aux tâches ménagères. Ou<br />

qu’une année supplémentaire à l’école<br />

est une priorité avant de la marier. Si les<br />

filles jouent un rôle essentiel dans leur<br />

famille, cela ne doit pas se faire aux<br />

dépens de leur apprentissage ni de leur<br />

avenir, qui est aussi l’avenir du pays, et<br />

l’avenir de toute l’Afrique.<br />

De quoi êtes-vous le plus fier ?<br />

De mes élèves. Deux d’entre elles, Esther<br />

Amimo et Salome Njeri, ont mis au point<br />

un instrument pour aider les personnes<br />

« Le succès motive<br />

et engendre<br />

d’autres succès. »<br />

souffrant de problèmes de vue ou d’audition<br />

; elles viennent de remporter le prix<br />

des Nations Unies des objectifs de développement<br />

durable (SDG Award) lors de<br />

l’International Science and Engineering<br />

Fair (ISEF) organisée à Phoenix, Arizona,<br />

aux États-Unis. Nous avons célébré cet<br />

événement avec toute l’école, ce qui a<br />

transporté et enthousiasmé tous les<br />

élèves : leur estime de soi a décollé. Le<br />

succès motive et engendre d’autres succès.<br />

Mes collègues et moi sommes déterminés<br />

à créer une différence dans la vie<br />

de nos enfants, car ce sont eux le brillant<br />

avenir de l’Afrique.<br />

Comment contribuez-vous à mettre<br />

de la valeur ajoutée dans la vie de<br />

vos jeunes ?<br />

Cela passe par l’éducation, car elle a un<br />

réel pouvoir de transformation. Et par<br />

TONY KARUMBA/AFP/PICTUREDESK.COM<br />

78 THE RED BULLETIN


le fait que je me suis converti à une vie<br />

religieuse (Peter Tabichi s’est formé auprès<br />

des prêtres franciscains, une organisation<br />

internationale de l’église catholique pour<br />

l’émancipation des localités rurales, qui<br />

œuvre par le biais de l’éducation et de<br />

l’agriculture durable, tout en cultivant des<br />

valeurs pacifistes, ndlr) afin de pouvoir<br />

communiquer et transmettre librement<br />

ma passion à la communauté et être ainsi<br />

capable de me dédier pleinement à l’enseignement.<br />

Grâce aux Franciscains, je<br />

fais don de 80 % de mon salaire mensuel<br />

pour aider ceux qui en ont besoin, élèves<br />

ou habitants les plus pauvres du village.<br />

Quelle est la plus grande qualité que<br />

tout enseignant devrait posséder ?<br />

Pour être un bon prof, il faut être créatif.<br />

Il faut embrasser la technologie et promouvoir<br />

des méthodes d’apprentissage<br />

modernes. Il faut faire plus et parler<br />

moins. Les profs endossent des rôles de<br />

modèles et de mentors, ils se doivent<br />

d’équiper leurs élèves avec les qualités<br />

nécessaires pour réaliser leurs rêves.<br />

Pour cela, il faut que les jeunes se familiarisent<br />

avec l’idée d’échouer, car si vous<br />

n’échouez pas, vous n’apprenez pas, et si<br />

vous n’apprenez pas, vous ne changerez<br />

jamais. Les échecs nous aident à grandir<br />

et à devenir des personnes fortes, qui se<br />

développent avec un sentiment de sécurité<br />

intérieure. Cela nous aide à prendre<br />

des risques, à sortir de notre zone de<br />

confort, et à trouver des solutions.<br />

Les générations futures pourront-elles<br />

prétendre à une vie épanouie ?<br />

Pour réussir, elles devront travailler dur,<br />

poser des questions, nourrir leur curiosité.<br />

Les connaissances acquises à l’école les<br />

aideront toute leur vie, c’est pourquoi<br />

j’encourage mes élèves à lever le nez de<br />

leurs manuels pour être conscients de ce<br />

qu’il se passe autour d’eux, à développer<br />

leurs intérêts et multiplier leurs passions<br />

sans lien avec les sujets abordés en classe.<br />

Nous savons tous que les générations<br />

futures du monde entier devront faire face<br />

à d’énormes défis vu l’état de la planète<br />

dont ils vont hériter : changement climatique,<br />

migrations globales, épuisement des<br />

ressources, conflits politiques, intelligence<br />

artificielle et automatisation générale<br />

qui vont rendre beaucoup de métiers<br />

obsolètes, etc. Il est primordial que tous<br />

sachent penser de manière globale, et<br />

établissent et maintiennent de bonnes<br />

relations avec les générations suivantes.<br />

Ainsi, ils sauront gérer les problèmes de<br />

Easy Teacher : grâce à sa moto, Peter garde un lien fort avec sa communauté.<br />

Esther Amimo et Salome Njeri avec leur projet gagnant : l’Essameter.<br />

« Pour être un bon<br />

prof, il faut être<br />

créatif. Faire plus<br />

et parler moins. »<br />

manière efficace, en s’associant, en allant<br />

dans la résolution de problèmes et de<br />

conflits. C’est ce que nous pouvons espérer<br />

de mieux pour l’humanité.<br />

Qu’allez-vous faire de ce million de<br />

dollars, que vous avez remporté grâce<br />

au Global Teacher Prize ?<br />

Il sera dédié à mon école et à la communauté<br />

qui y est rattachée. Je veux continuer<br />

à booster la curiosité, l’inventivité et<br />

l’estime de soi des élèves, par le biais du<br />

club de développement de talents, du club<br />

de sciences et du club de paix. J’ai aussi<br />

l’idée d’investir dans un labo informatique<br />

pour garantir un meilleur accès internet à<br />

tous les acteurs de l’établissement. Enfin,<br />

une partie servira à aider financièrement<br />

les élèves doués mais désargentés, une<br />

autre à développer des cultures tolérantes<br />

à la sécheresse et à la promotion du jardinage<br />

dans la communauté. Mais surtout,<br />

gagner ce prix m’a permis d’accéder à une<br />

plateforme incroyable. J’ai rencontré de<br />

nombreuses personnes engagées elles<br />

aussi dans un changement positif. C’est un<br />

tremplin grâce auquel j’envisage d’investir<br />

dans des programmes STEM d’échange<br />

scolaire avec des institutions locales et<br />

internationales pour développer le potentiel<br />

et le talent de mes jeunes.<br />

globalteacherprize.org<br />

THE RED BULLETIN 79


ALPHATAURI.COM


guide<br />

au programme<br />

LA FIFA MANIA<br />

Ce jeu de foot rend fou,<br />

mais il intéresse aussi<br />

les vrais pros du ballon.<br />

PAGE 86<br />

CHAUD DEVANT<br />

Pour un marathon par<br />

60 °C, autant pédaler<br />

dans un sauna.<br />

PAGE 87<br />

SORTEZ LE MATOS<br />

Sur quoi glisser et quoi<br />

porter lors de vos plans<br />

neige cet hiver.<br />

PAGE 90<br />

LUKAS PILZ<br />

OBJECTIF MER<br />

Aux Lofoten, le bout de<br />

la piste, c’est de l’eau,<br />

et l’apéro d’après-ski se<br />

passe dans un bateau.<br />

Gilet de sauvetage inclus.<br />

PAGE 82<br />

THE RED BULLETIN 81


G U I D E<br />

Faire.<br />

Pas le temps de s’attarder avant la descente : aux Lofoten, le temps change toutes les dix minutes.<br />

HAUTE ROUTE ARCTIQUE<br />

TOUT SCHUSS<br />

JUSQU’À L’OCÉAN<br />

Un séjour de ski avec gilet de sauvetage : le journaliste de<br />

voyage Simon Schöpf embarque à bord d’un vieux bateau<br />

à vapeur norvégien pour aller skier une poudreuse de rêve.<br />

Le rituel de vérification du<br />

matériel précède chaque<br />

sortie : bip, pelle, sonde,<br />

gilet de sauvetage, tout y est. Mais<br />

pourquoi un gilet de sauvetage ?<br />

C’est que la notion de sécurité tout<br />

comme celle du décor alpin sont<br />

tout autre lorsque vous skiez la<br />

Haute Route de l’Arctique. Et si la<br />

montagne reste bien sûr accessible<br />

en voiture, s’y rendre à bord d’un<br />

bateau à vapeur de 80 mètres de<br />

long est bien plus élégant. Arrivé<br />

aux îles Lofoten sur le 68 e parallèle<br />

nord, au-dessus du cercle arctique,<br />

le MS Nordstjernen jette<br />

L’auteur, Simon Schöpf, bravant le froid norvégien.<br />

82 THE RED BULLETIN


voyage<br />

CE QUI VOUS ATTEND<br />

LA NATURE<br />

NORDIQUE<br />

Un voyage aux îles Lofoten exige de<br />

la patience mais sait la récompenser :<br />

le séjour se fait sur un navire marchand et<br />

les départs se font en fonction de la météo.<br />

Svolvær<br />

LOFOTEN<br />

Autrefois navire postal, le MS Nordstjernen achemine désormais les skieurs curieux.<br />

Norvège<br />

Oslo<br />

LUKAS PILZ SIMON SCHÖPF<br />

On a le temps : le merluche, poisson réputé ici, sèche pendant deux à trois mois.<br />

l’ancre dans le fjord d’Austnes,<br />

bien à l’abri. Cet ancien navire<br />

postal est notre camp de base<br />

flottant durant nos trois jours<br />

d’escapade.<br />

Dès cet instant, nous nous abandonnons<br />

à la nature. Nous rejoignons<br />

le rivage sur un canot avec<br />

masques de ski au visage pour<br />

nous protéger des embruns. Le<br />

rêve qui guide nos pas jusqu’aux<br />

confins du Grand Nord est la<br />

« summit-to-sea-ride », une descente<br />

unique qui commence au<br />

sommet de la montagne pour finir<br />

sur la plage. À peine débarqués<br />

sur la plage enneigée de Laupstad,<br />

nous chaussons nos skis, direction<br />

Sautinden à 596 mètres d’altitude.<br />

Une descente destinée aux<br />

« Nous rejoignons le<br />

rivage sur un canot,<br />

avec nos masques<br />

de ski sur le nez. »<br />

débutants, dirait le skieur des<br />

Alpes, mais ici au nord de la<br />

Norvège, c’est déjà une descente<br />

d’envergure. La plage est le point<br />

de départ pour rejoindre le sommet,<br />

par conséquent l’altitude à<br />

gravir correspond à celle du sommet<br />

choisi. Rapidement, nous<br />

dépassons la limite de pousse des<br />

arbres pour nous retrouver sur<br />

une magnifique étendue dégagée.<br />

DONNÉES CLÉS<br />

Du plaisir de skier au festin de merluche ou morue<br />

séchée, retrouvez ici toutes les infos<br />

sur votre voyage aux Lofoten.<br />

ARRIVÉE<br />

Un vol jusqu’à Svolvær (Lofoten) ou Tromsø<br />

avec escale à Oslo puis un ferry via Bodø.<br />

PÉRIODE PROPICE<br />

Privilégier mars et avril, les meilleurs mois pour<br />

y skier avec un bon niveau d’enneigement y compris<br />

sur la plage. Avec de la chance, le névé vous<br />

permettra de descendre jusqu’à la mer.<br />

DÉGUSTER<br />

La Haute Route de l’Arctique ne manque pas<br />

de spécialités : caviar de flétan fumé,<br />

confiture de plaquebière ou encore la morue séchée,<br />

le plus ancien produit d’exportation de la Norvège<br />

et qui fait partie du patrimoine culturel du pays,<br />

en particulier dans cette région.<br />

LOGEMENT<br />

Sorti du chantier naval de Hambourg en 1956,<br />

le MS Nordstjernen a servi de navire postal<br />

jusqu’en 2012. Rénové depuis, il peut accueillir<br />

70 passagers en cabine double avec douche.<br />

L’ORGANISATEUR<br />

Norwegian Adventure Company propose<br />

ce voyage d’une durée de trois jours et demi avec<br />

la garantie de skier trois journées complètes.<br />

Prix : 2 040 € / personne. Le MS Nordstjernen<br />

rejoint les Lofoten (puis pousse vers le nord),<br />

ou Tromsø (dans ce cas, cap vers le sud).<br />

THE RED BULLETIN 83


G U I D E<br />

Faire.<br />

voyage<br />

LA SÉCURITÉ AVANT TOUT<br />

SE PRÉMUNIR DES<br />

AVALANCHES<br />

Les avalanches sont l’ennemi naturel<br />

des skieurs. La seule règle d’or pour<br />

ne pas en être victime est de les éviter.<br />

ÉQUIPEMENT<br />

Si toutefois l’une d’elles vous surprend<br />

par malchance, ce type de matériel<br />

pourra vous sauver la vie.<br />

Le circuit de la Norwegian Adventure Company promet trois jours de poudreuse.<br />

1. UN AVALUNG<br />

Cette sorte de tuba améliore l’apport d’air frais<br />

si vous êtes prisonnier sous la neige. L’air chargé<br />

de CO 2 est évacué, tandis qu’une valve filtre<br />

l’oxygène extrait de la neige.<br />

2. DVA (DÉTECTEUR DE VICTIMES D’AVALANCHE)<br />

Cet émetteur de signal radio permettra aux sauveteurs<br />

de vous localiser rapidement si vous vous retrouvez<br />

bloqué(e) sous une avalanche.<br />

3. SAC À DOS AIRBAG<br />

Déclenché manuellement, l’airbag du sac à dos se gonfle<br />

en quelques secondes. Le principe repose sur « l’effet<br />

Noix du Brésil » selon lequel lorsqu’on mélange et secoue<br />

des objets de différentes tailles, les plus gros émergeant<br />

à la surface, très pratique donc en cas d’avalanche.<br />

Bientôt, le MS Nordstjernen ressemble<br />

à un jouet tant il paraît<br />

petit avec la distance. Derrière lui,<br />

le Higravtinden, plus haut sommet<br />

de l’archipel des Lofoten avec<br />

1 147 mètres, perce à travers le<br />

brouillard. Ces montagnes constituent<br />

une miniature des Alpes<br />

occidentales. Abruptes et inaccessibles,<br />

elles émergent du fjord<br />

et s’élèvent vers le ciel. Sans la<br />

présence de la mer, un pic de<br />

800 mètres ressemblerait à s’y<br />

méprendre à un 4 000 mètres<br />

suisse. Dès le premier col, l’océan<br />

surgit devant nous. Eau et îlots<br />

s’étendent à perte de vue partout<br />

où le regard se pose.<br />

Le Gulf Stream maintient des<br />

températures clémentes même au<br />

cœur de l’hiver. En revanche, la<br />

proximité de la mer rend la météo<br />

très instable. Ainsi, tempêtes de<br />

neige et éclaircies se succèdent<br />

toutes les dix minutes. « Aux<br />

Lofoten, nous pouvons vivre les<br />

quatre saisons en une heure »,<br />

explique notre guide Isaak. Soudain,<br />

le vent se rafraîchit, tourne<br />

rapidement à la tempête et nous<br />

oblige à redescendre. Tels des<br />

renards aux aguets, nous guettons<br />

le moindre rayon de soleil soutenus<br />

par l’optimisme d’Isaak, en<br />

attendant de pouvoir réembarquer<br />

: « Il ne va pas tarder à réapparaître.<br />

» Et de fait, après quelques<br />

virages, le MS Nordstjernen ressurgit<br />

grandeur nature dans l’horizon<br />

dégagé. La perspective d’une<br />

douche chaude et d’un dîner nous<br />

réjouit. Au menu : stockfish (filet<br />

de morue séchée) des Lofoten et<br />

steak de renne. Une fois à bord,<br />

le MS Nordstjernen démarre son<br />

moteur de 3 600 chevaux et gagne<br />

le large où la houle devient de plus<br />

en plus forte. Mieux vaut bien tenir<br />

son dessert si l’on veut encore y<br />

goûter. Nous mettons le cap au<br />

nord en direction de Kvaløya en<br />

passant par Vesterålen, où nous<br />

nous réveillons paisiblement le<br />

lendemain. Aujourd’hui, la météo<br />

semble nous sourire et annonce<br />

une embellie. Le temps de la traversée<br />

en canot et le ciel s’est déjà<br />

levé : à l’arrivée, c’est un soleil<br />

radieux qui nous accueille au sommet<br />

du Gråtiden (871 mètres).<br />

Nous exultons un instant à<br />

l’idée de ce qui nous attend : une<br />

descente continue jusqu’à la plage<br />

durant laquelle la mer reste en<br />

ligne de mire. Chaque virage<br />

devient alors un pur moment de<br />

bonheur.<br />

Découvrez les îles Lofoten à bord<br />

du MS Nordstjernen :<br />

norwegianadventurecompany.com<br />

LUKAS PILZ SIMON SCHÖPF<br />

84 THE RED BULLETIN


PHOTOS : T. HYTTE – KLIP PRODUCTION + MIRJA GEH PHOTOGRAPHY<br />

METHOD<br />

Un casque conçu pour résister aux impacts grâce à sa construction spéciale ABS<br />

tri zone (mélangeant ABS, EPS et EPP pour faire face à plusieurs types d’impacts),<br />

METHOD propose aussi des inserts en mousse EVA sur les zones où les impacts<br />

se produisent le plus souvent pour une sécurité améliorée.<br />

cebe.com


G U I D E<br />

Faire.<br />

gaming<br />

LE VECTEUR FIFA<br />

UN FOOTBALL<br />

AMÉLIORÉ<br />

Conçu pour devenir LE jeu de foot, FIFA<br />

influence désormais le sport lui-même.<br />

Lancé en 1993, il est devenu<br />

le jeu sportif le plus populaire<br />

au monde, avec plus de<br />

280 millions de copies vendues.<br />

Très proche du football réel, son<br />

succès a fini par influencer la<br />

réalité même de ce sport.<br />

À présent, les clubs y prospectent<br />

des recrues, les marques<br />

s’y bousculent à coups de<br />

contrats juteux et les footballeurs<br />

pros y découvrent – pour leur<br />

plus grand plaisir ou déplaisir –<br />

leur classement au palmarès.<br />

Avant de « goumer » vos potes ou<br />

collègues de bureau lors d’une<br />

partie endiablée, prenez quelques<br />

minutes pour lire l’analyse de<br />

Simon Parkin, expert de ce jeu<br />

incontournable.<br />

SON CLASSEMENT A DE L’ IMPACT<br />

Avant le lancement annuel de FIFA,<br />

EA, l’éditeur du jeu, publie une liste<br />

des cent meilleurs joueurs établie par<br />

9 000 analystes de datas (recruteurs,<br />

coachs, abonnés) qui distillent les performances<br />

de 18 000 pros en 34 attributs<br />

personnels. Une liste tellement<br />

influente que les recruteurs l’utilisent<br />

dans leurs recherches de talents.<br />

Sur FIFA 20, Lionel Messi, Cristiano<br />

Ronaldo, Neymar Jr et Eden Hazard<br />

occupent les premières places avec<br />

ces notes respectives : 94, 93, 92 et<br />

91. Pour d’autres, le résultat peut être<br />

sévère : Rio Ferdinand a déclaré en<br />

plaisantant qu’il démolirait les bureaux<br />

d’EA suite à un mauvais classement.<br />

UNE IMPORTANTE VITRINE<br />

L’éditeur du jeu se démène pour obtenir<br />

les droits des clubs, des joueurs, des<br />

stades et des voix off de commentateurs,<br />

mais reste très discret sur le coût<br />

financier que tout cela représente pour<br />

ce best-seller du gaming (certains<br />

avancent des sommes à neuf chiffres).<br />

Mais parfois l’argent ne suffit pas.<br />

Cette année notamment, EA a perdu les<br />

droits de la Juventus et a dû rebaptiser<br />

l’équipe « Piemonte Calcio » même si<br />

les ressemblances avec les joueurs<br />

demeurent. Apparaître dans FIFA, n’est<br />

pas qu’une question d’argent pour un<br />

footballeur, c’est aussi un statut. Pour<br />

FIFA 98 : En route pour la Coupe du<br />

monde, la couverture avec David<br />

Beckham « a contribué à faire de lui le<br />

sportif le plus lucratif de la planète »,<br />

déclarait en 2015 Andy Bell, fondateur<br />

de l’agence Soap Box London.<br />

PROFIL DE<br />

L’EXPERT<br />

SIMON<br />

PARKIN<br />

SPECIALISTE FIFA<br />

Journaliste pour<br />

<strong>The</strong> Observer,<br />

l’Anglais explore<br />

la culture gaming<br />

depuis quinze ans.<br />

Son livre A Game of<br />

Birds and Wolves<br />

raconte l’histoire<br />

d’un groupe de<br />

femmes ayant développé<br />

un jeu de<br />

stratégie pendant la<br />

Seconde Guerre<br />

mondiale qui aidera<br />

les Alliés à déjouer<br />

la menace des<br />

sous-marins<br />

allemands.<br />

UN JEU MOTEUR POUR LE FOOTBALL<br />

La popularité de FIFA dispense l’éditeur<br />

EA de chercher le soutien actif de<br />

grands noms. Ils s’en chargent naturellement<br />

! La star de la NBA LeBron<br />

James a posté sur Instagram une photo<br />

de ses fils y jouant, avec en légende<br />

: « Ce jeu est une tuerie ! » Et<br />

Justin Bieber de chauffer le rappeur<br />

Drake sur Twitter : « Je deviens bon à<br />

FIFA. Fais gaffe. » De plus, le jeu accroît<br />

l’intérêt pour le sport réel dans<br />

des pays comme les USA. « Désormais,<br />

explique Matt Prior, le directeur<br />

créatif de FIFA, les gens viennent au<br />

foot par le biais de notre jeu. »<br />

LE MEILLEUR RESTE À VENIR<br />

« Notre travail s’achèvera lorsque la<br />

franchise EA Sports FIFA ne se distinguera<br />

plus du football réel », déclare<br />

Prior. Une quête qui suscite sur <strong>Red</strong>dit<br />

des débats animés à chaque lancement.<br />

« Certains aiment la version<br />

simulation, d’autres des scoresfleuves<br />

», ajoute-t-il. FIFA 20 met<br />

l’accent sur l’intelligence du football<br />

en améliorant l’IA du comportement<br />

naturel et la dynamique de balle,<br />

et ajoute Volta, un mode foot de rue.<br />

En bref : l’avenir du foot numérique<br />

a encore de belles années devant lui.<br />

FIFA 20 est disponible sur PS4, Xbox<br />

One, Nintendo Switch et PC ; ea.com<br />

Injouable et jouable :<br />

le Borussia Dortmund et<br />

l’Anglais Jadon Sancho<br />

sont au top dans FIFA 20.<br />

IL AMÉLIORE LES JOUEURS PROS<br />

Les joueurs pros jouent à FIFA pour<br />

préparer leurs matches. L’attaquant<br />

d’Everton, Alex Iwobi, déclarait qu’à<br />

ses débuts, si un joueur d’une équipe<br />

adverse lui était inconnu, il cherchait<br />

son nom et son classement sur FIFA.<br />

Après avoir arrêté un penalty de<br />

Ronaldinho contre l’AC Milan en 2008,<br />

le gardien de but italien Marco Amelia<br />

a dit qu’il s’était familiarisé avec les<br />

tirs de l’attaquant sur FIFA. « C’était<br />

comme jouer contre lui à la PS, se souvient<br />

Amelia. C’était très étrange. »<br />

ELECTRONIC ARTS SIMON PARKIN<br />

86 THE RED BULLETIN


Faire.<br />

fitness<br />

CONSEILS<br />

PUREMENT<br />

MENTAL<br />

Rien de tel que<br />

la tête pour pousser<br />

le corps à aller<br />

plus haut, plus vite<br />

et plus loin.<br />

LA VOIX<br />

INTÉRIEURE<br />

Maîtrisez et orientez<br />

vos pensées avant et pendant<br />

la course en utilisant votre<br />

voix intérieure de manière<br />

ciblée, par exemple en<br />

répétant des messages<br />

positifs qui vous aideront<br />

à tirer le meilleur de vous.<br />

PHILIP PLATZER/RED BULL CONTENT POOL, HARALD TAUDERER/RED BULL CONTENT POOL FLORIAN STURM<br />

À 20 ans, Schiester fume et boit trop. Son médecin lui conseille de changer d’hygiène<br />

de vie : il s’exécute. Un an et demi plus tard, il court le marathon de New York.<br />

FORGER LE MENTAL<br />

COURSE À<br />

HAUT DEGRÉ<br />

Ses perfs dans le désert propulsent Christian Schiester au<br />

sein de l’élite de l’ultrafond. Retour sur un parcours gagnant.<br />

Une séance de sauna après<br />

un entraînement est une<br />

excellente manière de<br />

détendre les muscles, d’améliorer<br />

la circulation sanguine et de se<br />

vider la tête. Mais de là à transformer<br />

le sauna en salle de gym…<br />

Christian Schiester a osé, afin de<br />

préparer son trail dans le désert.<br />

Pour ce faire, l’athlète a installé un<br />

tapis roulant et un vélo ergomètre<br />

dans la cabine de bois chauffée à<br />

60 °C, pour enchaîner ensuite trois<br />

heures de pédalage intensif. « J’ai<br />

bu jusqu’à quinze litres d’eau tout<br />

en veillant à n’être jamais seul au<br />

cas où », confie le sportif de 52 ans<br />

qui, à l’époque, tenait déjà la<br />

forme grâce à ses entraînements<br />

« J’ai bu jusqu’à<br />

quinze litres<br />

d’eau tout en<br />

veillant à n’être<br />

jamais seul. »<br />

Christian Schiester,<br />

ultra-marathonien<br />

<strong>Red</strong> Bull<br />

OBJECTIFS<br />

Mettez de côté la perspective<br />

d’ensemble et focalisezvous<br />

sur les éléments<br />

clés que vous maîtrisez<br />

déjà. Ça renforcera votre<br />

confiance en vous.<br />

REPRÉSENTATION<br />

MENTALE<br />

Visualisez aussi clairement<br />

que possible la façon dont<br />

vous accomplissez chaque<br />

étape du défi. Plus cette<br />

visualisation est précise,<br />

mieux vous serez préparé<br />

à sa difficulté.<br />

disciplinés. « La préparation dans<br />

le sauna vise à recréer les conditions<br />

de course », explique l’Autrichien.<br />

Une méthode qui porte ses<br />

fruits. Lors de l’ultra-marathon en<br />

Égypte, il accuse le coup sur une<br />

dune, le thermomètre de sa<br />

montre indique 60 degrés.<br />

« J’étais très mal-en-point », se<br />

souvient-il. C’est alors que sa voix<br />

intérieure se manifeste : « Christian,<br />

ce n’est pas le moment de<br />

lâcher! Tu peux le faire. Après<br />

tout, il ne fait pas plus chaud que<br />

dans le sauna. » L’effet sur sa motivation<br />

est immédiat. Il repart et<br />

finit deuxième après 250 kilomètres<br />

de course dans le désert.<br />

christian-schiester.com La devise de Schiester : « Torture ton corps avant qu’il ne te torture !»<br />

THE RED BULLETIN 87


G U I D E<br />

Faire.<br />

décembre<br />

1<br />

13<br />

er au<br />

décembre<br />

Gotaga on Tour<br />

Après la Rochelle et Marseille, Gotaga revient à<br />

la rencontre de ses fans à Lille (Nouveau Siècle)<br />

et Paris (Grand Rex). Pour eux, la chance d’approcher<br />

celui qu’ils suivent assidûment dans<br />

le monde digital, et d’assister en direct à des<br />

parties endiablées de Fortnite où « Gota », des<br />

gamers pro et ses potes vont pouvoir exposer<br />

leurs skills. « Ses potes », ça peut être vous,<br />

puisque certains membres du public seront<br />

conviés à rejoindre le premier streamer français<br />

sur scène et jouer à ses côtés. Pour assister<br />

à ces soirées rares, il faut tester en ligne vos<br />

connaissances sur le Français, et mettre la main<br />

(chez Monoprix) sur les canettes collector à l’effigie<br />

de la super star du gaming. À vous de jouer !<br />

Lille et Paris ; redbull.com/gotaga<br />

LA SEINE EST À VOUS !<br />

Du 7 au 15 décembre, le Salon nautique transforme le Parc des expos de la<br />

Porte de Versailles en plus grand port indoor de France. En 2018, 200 000 visiteurs<br />

s’y sont pressés, sur 130 000 m² d’exposition (cinq halls) et ont eu la possibilité<br />

de voir et visiter plus de 1 000 embarcations, à voile et à moteur, faisant<br />

de 2 à 18 mètres de longueur. Cette année encore, le Nautic (aussi dédié aux<br />

sports de glisse) propose une très belle activation hors ses murs avec une session<br />

paddle sur la Seine, le 8 décembre : la Nautic Paddle. Pour cette dixième<br />

édition, le waterman français de renom Arthur Arutkin sera présent, parmi les<br />

centaines d’amoureux de l’eau venus savourer ce moment parisien d’exception.<br />

Qui affrontera<br />

Gotaga ?<br />

Paris ; salonnautiqueparis.com/fr<br />

18<br />

décembre<br />

Les Jedis de retour<br />

Le rire du méchant suprême Palpatine<br />

(alias Dark Sidious, alias l’Empereur)<br />

à la fin du premier trailer de ce Star<br />

Wars épisode 9 a fait sensation et<br />

excité les fans de la saga de l’espace<br />

la plus populaire de tous les temps.<br />

L’insoutenable attente touche à sa<br />

fin et cet Ascension de Skywalker<br />

se pointe comme il se doit à quelques<br />

heures des fêtes de fin d’année.<br />

Si vous ne le saviez pas encore (estce<br />

possible ?), vous voilà informés.<br />

Que la Force soit avec vous !<br />

Actuellement en salle ;<br />

starwars.com<br />

4 29<br />

au 7 décembre<br />

Coupe du monde<br />

de ski cross<br />

Des skieurs, par quatre, dévalent une<br />

piste composée d’éléments naturels<br />

ou artificiels (bosses, courbes relevées<br />

ou tremplins) le plus vite possible.<br />

Les Coupes du monde de ski cross,<br />

femmes et hommes, reprennent avec<br />

une première étape à Val Thorens.<br />

Notez la participation de Jean-Frédéric<br />

Chapuis, champion du monde 2013,<br />

champion olympique de skicross à<br />

Sotchi en 2014, Vice-Champion du<br />

Monde 2015 et vainqueur du Globe<br />

de Cristal 2015. Costaud !<br />

Val Thorens ; valthorens.com<br />

décembre<br />

All Star Game<br />

La recette du All Star Game du<br />

basket français est garantie<br />

100 % show et toujours à guichets<br />

fermés, depuis dix-sept ans, dans<br />

l’AccorHotels Arena. Le match<br />

exhibition de la Pro A entre la<br />

sélection française et celle des<br />

meilleurs étrangers est le summum<br />

d’une soirée où les concours de<br />

dunks, de tirs et autres animations<br />

font grimper l’ambiance. En attendant<br />

la venue de deux équipes<br />

NBA, Hornet et Bucks, dans cette<br />

même enceinte en janvier.<br />

Paris ; accorhotelsarena.com<br />

TEDDY MORELLEC/ RED BULL CONTENT POOL<br />

88 THE RED BULLETIN


Voir.<br />

novembre / décembre<br />

Le freestyle du Finlandais<br />

Antti Ollila.<br />

STEPHAN SUTTO, LUKAS PILZ/RED BULL CONTENT POOL, FUTURE7MEDIA/RED BULL CONTENT POOL<br />

COLLECTIF,<br />

EXTRÊME,<br />

BAGARRE<br />

Ce mois-ci sur <strong>Red</strong> Bull TV,<br />

différentes approches du<br />

sport et du dépassement :<br />

le ski en mode plaisir et<br />

collectif, le VTT en mode<br />

extrême, et la moto en<br />

mode baston.<br />

REGARDEZ<br />

RED BULL TV<br />

PARTOUT<br />

<strong>Red</strong> Bull TV est une chaîne de<br />

télévision connectée : où que<br />

vous soyez dans le monde,<br />

vous pouvez avoir accès aux<br />

programmes, en direct ou en<br />

différé. Le plein de contenus<br />

originaux, forts et créatifs.<br />

Vivez l’expérience sur redbull.tv<br />

25<br />

novembre FILM<br />

THE COLLECTIVE<br />

Tourné à travers le monde, ce film emmène le spectateur<br />

des sommets des Alpes bernoises aux neiges profondes<br />

d’Hakuba, au Japon, en passant par la poudreuse sinueuse<br />

de Colombie-Britannique, au Canada. Cinéastes et skieurs<br />

de renom, dont Will Berman, Cody Cirillo, Caroline Claire,<br />

Mac Forehand, Mathilde Gremaud, Alex Hall et Sarah Höfflin<br />

unissent leurs objectifs individuels pour livrer un message<br />

commun : le ski est une aventure collective.<br />

12<br />

novembre À LA DEMANDE<br />

ROB WARNER’S<br />

WILD RIDES<br />

Rob Warner, ex-vainqueur de la Coupe du monde<br />

de VTT et commentateur, rejoint la crème des<br />

riders pour une échappée sur des terrains où nul<br />

n’a encore osé s’aventurer.<br />

4décembre À LA DEMANDE<br />

WESS : LA FINALE<br />

La World Enduro Super Series <strong>2019</strong> a trouvé son<br />

épilogue dans l’enfer du Getzenrodeo. Pénétrez<br />

dans les coulisses de la compétition à Drebach<br />

en Allemagne, à la rencontre des top pilotes, les<br />

héros d’une saison déjà culte.<br />

THE RED BULLETIN 89


G U I D E<br />

Classe<br />

de neige<br />

Quelle que soit votre neige<br />

de prédilection ‒ trafollée,<br />

profonde, damée ou<br />

poudreuse intacte ‒ avec<br />

ce matos, vous glisserez<br />

avec style et affronterez<br />

l’hiver en toute sérénité.<br />

Photos DAVID CLERIHEW


Bonnet HELLY HANSEN<br />

North Sea Ridgeline,<br />

hellyhansen.com ;<br />

lunettes de soleil OAKLEY<br />

Clifden, oakley.com ;<br />

veste BURTON Frostner et<br />

gants Backtrack, burton.<br />

com ; pantalon goretex<br />

OAKLEY Alpine Shell 3L,<br />

oakley.com ; sac à dos<br />

HAGLÖFS Skrå 27,<br />

haglofs.com ; planche<br />

RIDE Warpig et<br />

fixations Revolt,<br />

ridesnowboards.com<br />

91


G U I D E<br />

Page opposée :<br />

casque MARKER<br />

Convoy+, marker.net ;<br />

masque de ski OAKLEY<br />

Fall Line XM Factory<br />

Pilot Whiteout,<br />

oakley.com ; veste<br />

VOLCOM Fern<br />

insulated goretex,<br />

volcom.fr ; sac à dos<br />

20L DAKINE Jamie<br />

Anderson Women’s<br />

Team Heli Pro,<br />

dakine.com<br />

Ci-contre :<br />

bonnet HELLY<br />

HANSEN Ridgeline,<br />

hellyhansen.com ;<br />

masque ZEAL<br />

OPTICS Portal XL,<br />

zealoptics.com ;<br />

hoodie technique<br />

<strong>FR</strong>ISKI <strong>The</strong> Flo 2.0,<br />

friskiwear.com ; veste<br />

THE NORTH FACE<br />

Purist Futurelight,<br />

thenorthface.fr ; pantalon<br />

JACK WOLFSKIN<br />

Exolight Mountain,<br />

jack-wolfskin.com ;<br />

chaussures SCOTT<br />

Celeste III, scottsports.com<br />

; gants<br />

Free Range BURTON,<br />

burton.com ; skis<br />

VÖLKL Secret Flat,<br />

voelkl.com<br />

THE RED BULLETIN 93


G U I D E<br />

Ci-contre :<br />

Casque OAKLEY<br />

MOD1 et masque Fall<br />

Line XL, oakley.com ;<br />

écouteurs SKULL-<br />

CANDY vert sans fil<br />

à accrocher partout,<br />

skullcandy.co.uk ;<br />

veste PROTEST Gutter<br />

Camo, protest.eu ;<br />

pantalon goretex<br />

VOLCOM Guch<br />

Stretch, volcom.fr ;<br />

gants THE NORTH<br />

FACE Patrol Steep<br />

Series, thenorthface.<br />

fr ; skis SCOTT<br />

Scrapper 105,<br />

scott-sports.com<br />

Page opposée :<br />

casque MARKER<br />

Convoy+, marker.net ;<br />

masque SWEET PRO-<br />

TECTION Interstellar,<br />

sweetprotection.com ;<br />

anorak unisexe<br />

HAGLÖFS Edge Evo<br />

Kurbits, haglofs.com ;<br />

pantalon SCOTT<br />

Explorair 3L,<br />

scott-sports.com ;<br />

moufles THE NORTH<br />

FACE <strong>The</strong>rmoball,<br />

thenorthface.fr ; sac à<br />

dos OSPREY Kamber<br />

16, ospreyeurope.com ;<br />

bâtons de ski LINE Pin,<br />

lineskis.com ; skis K2<br />

Mindbender 88 Ti<br />

Alliance, k2snow.com<br />

Coiffure et maquillage :<br />

SUSANA MOTA<br />

Mannequins :<br />

CONNAGH HOWARD,<br />

ANNA SALOMAA<br />

@ W Model Management<br />

Assistants photo :<br />

CHRIS PARSONS,<br />

LISA BENNETT<br />

94 THE RED BULLETIN


MENTIONS LÉGALES<br />

THE RED<br />

BULLETIN<br />

WORLDWIDE<br />

<strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

est actuellement<br />

distribué dans six pays.<br />

Vous voyez ici la une de<br />

l’édition allemande, qui<br />

honore la star locale du<br />

rap, le dénommé Bausa.<br />

Le plein d’histoires<br />

hors du commun sur<br />

redbulletin.com<br />

Les journalistes de SO PRESS n’ont pas pris<br />

part à la réalisation de <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong>.<br />

SO PRESS n’est pas responsable des textes,<br />

photos, illustrations et dessins qui engagent<br />

la seule responsabilité des auteurs.<br />

Rédacteur en chef<br />

Alexander Macheck<br />

Rédacteurs en chef adjoints<br />

Andreas Rottenschlager, Nina Treml<br />

Directeur créatif<br />

Erik Turek<br />

Directeurs artistiques<br />

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Responsable des infos et du texte<br />

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Managing Editor<br />

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Maquette<br />

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Carvalho-Hutter, Kevin Goll, Carita Najewitz<br />

Booking photos<br />

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Directeur commercial & Publishing Management<br />

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Schmied, Melissa Stutz, Mia Wienerberger<br />

Marketing B2B & Communication<br />

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Fritz, Marlene Hinterleitner, Valentina Pierer,<br />

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Julia Zmek, Edith Zöchling-Marchart<br />

Maquette commerciale<br />

Peter Knehtl (Dir.), Sasha Bunch, Simone Fischer,<br />

Martina Maier, Florian Solly<br />

Emplacements publicitaires<br />

Manuela Brandstätter, Monika Spitaler<br />

Production<br />

Walter O. Sádaba, Friedrich Indich,<br />

Sabine Wessig<br />

Lithographie<br />

Clemens Ragotzky (Dir.),<br />

Claudia Heis, Nenad Isailovi c, ̀<br />

Sandra Maiko Krutz, Josef Mühlbacher<br />

Fabrication<br />

Veronika Felder<br />

Opérations<br />

Michael Thaler (MIT), Alexander Peham,<br />

Yvonne Tremmel (Office Management)<br />

Abonnements et distribution<br />

Peter Schiffer (Dir.), Klaus Pleninger<br />

(Distribution), Nicole Glaser (Distribution),<br />

Yoldaş Yarar (Abonnements)<br />

Siège de la rédaction<br />

Heinrich-Collin-Straße 1, 1140 Vienne, Autriche<br />

Téléphone +43 (0)1 90221-28800,<br />

Fax +43 (0)1 90221-28809<br />

Web redbulletin.com<br />

Direction générale<br />

<strong>Red</strong> Bull Media House GmbH,<br />

Oberst-Lepperdinger-Straße 11–15,<br />

5071 Wals bei Salzburg, Autriche, FN 297115i,<br />

Landesgericht Salzburg, ATU63611700<br />

Directeur de la publication<br />

Andreas Kornhofer<br />

Directeurs généraux<br />

Dietrich Mateschitz, Gerrit Meier,<br />

Dietmar Otti, Christopher Reindl<br />

THE RED BULLETIN<br />

France, ISSN 2225-4722<br />

Country Editor<br />

Pierre-Henri Camy<br />

Country Coordinator<br />

Christine Vitel<br />

Country Project Management<br />

Alessandra Ballabeni,<br />

alessandra.ballabeni@redbull.com<br />

Contributions,<br />

traductions, révision<br />

Lucie Donzé, Frédéric & Susanne<br />

Fortas, Suzanne Kříženecký,<br />

Claire Schieffer, Jean-Pascal Vachon,<br />

Gwendolyn de Vries<br />

Abonnements<br />

Prix : 18 €, 12 numéros/an<br />

getredbulletin.com<br />

Siège de la rédaction<br />

29 rue Cardinet, 75017 Paris<br />

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134 bis rue du Point du jour<br />

92100 Boulogne<br />

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Thierry Rémond,<br />

tremond@profil-1830.com<br />

Elisabeth Sirand-Girouard,<br />

egirouard@profil-1830.com<br />

Edouard Fourès<br />

efoures@profil-1830.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Allemagne, ISSN 2079-4258<br />

Country Editor<br />

David Mayer<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (Dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Country Project Management<br />

Natascha Djodat<br />

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Thomas Keihl,<br />

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THE RED BULLETIN<br />

Autriche, ISSN 1995-8838<br />

Country Editor<br />

Christian Eberle-Abasolo<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (Dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Publishing Management<br />

Bernhard Schmied<br />

Sales Management <strong>The</strong> <strong>Red</strong> <strong>Bulletin</strong><br />

Alfred Vrej Minassian (Dir.),<br />

Thomas Hutterer, Stefanie Krallinger<br />

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anzeigen@at.redbulletin.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Royaume-Uni, ISSN 2308-5894<br />

Country Editor<br />

Tom Guise<br />

Rédacteur associé<br />

Lou Boyd<br />

Rédacteur musical<br />

Florian Obkircher<br />

Directeur Secrétariat de rédaction<br />

Davydd Chong<br />

Secrétaire de rédaction<br />

Nick Mee<br />

Publishing Manager<br />

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mark.bishop@redbull.com<br />

Fabienne Peters,<br />

fabienne.peters@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN<br />

Suisse, ISSN 2308-5886<br />

Country Editor<br />

Nina Treml<br />

Révision<br />

Hans Fleißner (Dir.),<br />

Petra Hannert, Monika Hasleder,<br />

Billy Kirnbauer-Walek<br />

Country Project Management<br />

Meike Koch<br />

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Marcel Bannwart (D-CH),<br />

marcel.bannwart@redbull.com<br />

Christian Bürgi (W-CH),<br />

christian.buergi@redbull.com<br />

THE RED BULLETIN USA,<br />

ISSN 2308-586X<br />

Rédacteur en chef<br />

Peter Flax<br />

Rédactrice adjointe<br />

Nora O’Donnell<br />

Éditeur en chef<br />

David Caplan<br />

Directrice de publication<br />

Cheryl Angelheart<br />

Country Project Management<br />

Laureen O’Brien<br />

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Todd Peters, todd.peters@redbull.com<br />

Dave Szych, dave.szych@redbull.com<br />

Tanya Foster, tanya.foster@redbull.com<br />

96 THE RED BULLETIN


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Pour finir en beauté<br />

L’arche de Felipe<br />

Comme Pelé et Neymar avant lui, ses héros d’enfance, Felipe Gustavo voulait<br />

devenir footballeur. En cours de route, il a fini par troquer le ballon pour une planche –<br />

le reste fait partie de l’histoire du skate. Dans la vidéo All on Me, le Brésilien établi<br />

aux USA revient sur les raisons et les choix qui l’ont poussé au sommet de son sport.<br />

La vidéo est à voir sur redbull.com<br />

Le prochain<br />

THE RED BULLETIN<br />

n° 95 disponible<br />

dès le 19 décembre<br />

<strong>2019</strong><br />

JONATHAN MEHRING/RED BULL CONTENT POOL<br />

98 THE RED BULLETIN

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