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360° magazine / mars 2022

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Non binarité, le soft<br />

power des séries TV<br />

Longtemps invisibles et invisibilisés dans les médias mainstream,<br />

les personnages non binaires commencent à prendre un peu plus<br />

de place dans les séries. Pour une meilleure compréhension et<br />

inclusivité hors de la fiction ? Assurément ! Par Laure Dasinieres<br />

Toutes les études menées sur les questions<br />

de genre se retrouvent sur au moins un<br />

chiffre : près de 10% des adulte·x·s s’identifient<br />

comme non binaires /gender queer /<br />

gender fluid, avec une prépondérance chez<br />

les moins de 30 ans. Pour autant, la non binarité<br />

demeure un impensé ou une source d’incompréhension<br />

pour nombre de personnes<br />

cis hétérosexuelles.<br />

Ainsi, d’après une enquête réalisée<br />

en 2021 par la GLAAD (Gay & Lesbian<br />

Alliance Against Defamation), association<br />

américaine de veille médiatique<br />

œuvrant à dénoncer les discriminations<br />

et les attaques à l’encontre<br />

des personnes LGBTIQ+ au sein des<br />

médias, 54% des personnes non-LG-<br />

BTIQ+ estiment que les personnes<br />

LGBTIQ+ ont des attentes trop compliquées<br />

en ce qui concerne les manières<br />

de s’adresser à elles (par<br />

exemple, l’usage du pronom « they »*).<br />

Elles sont 47% à se sentir peu familières<br />

des questions de transidentité<br />

et de non-binarité, et 45% éprouvent<br />

des difficultés quant aux termes utilisés<br />

par les personnes LGBTIQ+ pour<br />

s’identifier. Évidemment, derrière ces<br />

chiffres, se cachent les moqueries, les<br />

insultes et les discriminations qui sont<br />

le fruit de l’ignorance. Sans oublier, les<br />

vagues de cyber harcèlement envers<br />

les personnes queer et les paniques<br />

morales pour un « iel·le » ajouté au<br />

dictionnaire. Mais, il existe un territoire<br />

où la non binarité s’exprime avec<br />

une certaine liberté et permet aux<br />

non-concerné·e·x·s de se familiariser<br />

en douceur avec elle : les séries TV.<br />

DES REPRÉSENTATIONS CONTRE LES DIS-<br />

CRIMINATIONS<br />

Selon une étude menée par Variety, les personnes<br />

non binaires sont de plus en plus nombreuses<br />

dans les séries : 3,8 % des séries et<br />

2,8 % des films intègrent un·e·x protagoniste·x<br />

enby [ndlr : non binaire] depuis le 1er avril 2020,<br />

contre respectivement 2,7 % et 0,8 % avant le<br />

début de la crise sanitaire.<br />

Ces personnages ne sont plus uniquement<br />

présents dans des séries « communautaires »,<br />

mais également dans des œuvres plus mainstream<br />

: on pense à Taylor Mason dans Billions,<br />

à Syd dans One day at Time (photo ci-contre),<br />

Alex dans This Is Us, Cal dans Sex Education,<br />

Kai Bartley dans Grey’s Anatomy ou encore<br />

Eliott dans Ici tout commence. Cex dernierx<br />

marque une véritable révolution : l’apparition<br />

d’un personnage non binaire dans une<br />

série française diffusée quotidiennement à<br />

18h30 sur une chaîne hertzienne. En outre,<br />

rares sont les protagoniste·x non binaires<br />

adulte·x·s – les adolescent·e·x sont en effet<br />

sur-représenté·e·x. Rare aussi sont les personnes<br />

non-binaires assigné·e·x·s garçon à<br />

la naissance.<br />

L’essor de ces représentations dans<br />

des fictions du quotidien peut-il faire<br />

évoluer les mentalités ? Pour la politologue<br />

Virginie Martin, autrice de Le<br />

charme discret des séries, aux éditions<br />

humenSciences, la réponse est<br />

oui : « Sans représentation dans les<br />

médias, on n’existe pas, on reste dans<br />

un angle mort. Les séries permettent<br />

d’intégrer de manière fluide et naturelle<br />

les questions de genre dans le<br />

quotidien des personnes non-concernées.<br />

Elles leur permettent d’assimiler<br />

les problématiques, les questions<br />

d’usages linguistiques », explique<br />

t-elle. Et d’ajouter : « Les représentations<br />

de personnes non binaires dans<br />

les séries mainstream prennent acte<br />

de ce qui se passe aujourd’hui dans<br />

la vie de tous les jours et montrent<br />

combien les résistances de l’ancien<br />

monde sont stupides. »<br />

* CE PRONOM ANGLAIS PRÉSENTE UN ASPECT NEUTRE, EN-<br />

CORE PLUS MARQUÉ QUE LE PRONOM NEUTRE « IEL » EN<br />

FRANÇAIS.<br />

LA CHRONIQUE D’AYMERIC DALLINGE<br />

OK, BOOMER !<br />

Aymeric Dallinge s’amuse des mots et crée<br />

des ambiances saisies dans l’instant.<br />

Quand l’année a pointé le bout de son nez,<br />

je me suis fait la réflexion que c’était la<br />

dernière que je passais avant de changer<br />

de dizaine. Les trente ans me guettent. En<br />

soit, vieillir ne me fait pas peur. Je pars<br />

du principe que chaque jour vécu est une<br />

expérience acquise. Mes propos vous rappellent<br />

ceux d’une personne d’un âge avancé<br />

? Ça tombe bien, c’est justement la suite<br />

de mon idée.<br />

Il y a quelques semaines, j’ai été<br />

frappé de plein fouet par un « OK, boomer<br />

! ». Non pas par mon entourage, mais<br />

par toute une génération. Rien que ça.<br />

Il semblerait que la génération Z<br />

(née à partir de la deuxième moitié des<br />

années 90) estime que les personnes qui<br />

communiquent avec des GIFs sont des<br />

boomers. Je cite : « quand je vois une personne<br />

qui utilise un GIF, je sais qu’elle a<br />

plus de 33 ans. ». Pardon ?! J’ai à peine passé<br />

les 28 ans et demi !<br />

Pour rappel, on parle de boomer<br />

pour les personnes nées avant 1966, soit<br />

mon papa. Je suis interpellé par ce besoin<br />

permanent de parquer les gens dans<br />

des cases et de maintenir la lutte franche<br />

des générations. N’oublions pas que nos<br />

ancêtres ont pavé nos chemins et que les<br />

futures générations sont là pour questionner<br />

et faire évoluer la société dans<br />

un esprit d’innovation. Les vieux·ille·s<br />

d’aujourd’hui étaient les jeunes d’hier.<br />

Nous avons tant à apprendre et à partager<br />

en œuvrant ensemble.<br />

Sur ces belles paroles, je retourne<br />

photographier les fleurs du printemps avec<br />

mon smartphone pliable parce que j’adore<br />

voir le jardin fleuri de tonton Paul.<br />

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SÉRIES<br />

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