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360° magazine / mars 2022

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Dénigrement, contrôle, menaces d’outing, mégenrage volontaire,<br />

insultes, sérophobie, coups, homicides… La violence touche aussi<br />

les couples LGBTIQ+. A l’occasion de la Journée internationale<br />

des droits des femmes* le 8 <strong>mars</strong>, <strong>360°</strong> décrypte les enjeux et<br />

propose des pistes de solutions avec Manu, un spécialiste et deux<br />

personnes concernées.<br />

Violences<br />

dans le couple :<br />

les personnes<br />

LGBTIQ+<br />

pas épargnées<br />

Pourtant, le peu de données disponibles<br />

parlent d’elles-mêmes : 36% des HSH 3 ont vécu<br />

de la violence dans le couple durant leur vie,<br />

7% dans les 12 mois qui ont précédé l’enquête 4 .<br />

Côté FSF 5 , presque 70% des répondant·e·x·s<br />

ont vécu des violences sexuelles. Pour 15%<br />

d’entre elles·eux, elles sont survenues au sein<br />

du couple avec une partenaire féminine ou un<br />

homme trans*. Seul·es 8% ont eu recours à un<br />

service spécialisé dans les violences.<br />

L’association Pôle Agression Violence<br />

(PAV) propose écoute et suivi pour les<br />

personnes LGBTIQ+ qui font face à<br />

des violences. Vic est psychologue et<br />

répondant au PAV, ainsi qu’à l’association<br />

Vogay. Malgré l’explosion des<br />

sollicitations pendant les périodes<br />

de confinement, il indique que : « Le<br />

PAV reçoit peu de demandes d’aide<br />

concernant des violences dans le<br />

couple et elles sont en lien avec des<br />

parcours migratoires. Je suppose que<br />

c’est parce que les violences dans<br />

le couple restent tabous. De plus,<br />

j’ai l’impression que les personnes<br />

LGBTIQ+, en raison de leur parcours<br />

de vie et des difficultés liées au fait<br />

d’appartenir à une minorité sexuelle<br />

ou de genre, banalisent davantage les<br />

violences qui apparaissent au sein du<br />

couple ». Manu confirme : « En tant<br />

qu’enfant et ado gay confronté au<br />

quotidien à un environnement homophobe,<br />

j’ai été entraîné à tolérer<br />

la violence. »<br />

VULNÉRABILITÉS PLUS GRANDES<br />

POUR LES PERSONNES LGBTIQ+<br />

plexité s’ajoute, pour Manu : « Le sentiment<br />

induit par l’auteur que je mérite<br />

la violence et donc la crainte de ne<br />

pas être soutenu·e par l’entourage »,<br />

la « minimisation sociale des violences<br />

non physiques » et « la honte car la<br />

relation n’a duré que quatre mois. »<br />

Dans plusieurs cantons, les associations<br />

communautaires comme le PAV<br />

forment en continu les nouvelles recrues<br />

de la police. Cela étant, Vic précise<br />

que : « Ces formations ne peuvent<br />

garantir que tous·tes les agent·es réagissent<br />

adéquatement. » En outre, les<br />

foyers d’hébergement ne sont pas tous<br />

safe pour les personnes LGBTIQ+ et<br />

il en existe très peu pour les hommes<br />

confrontés à des violences.<br />

BESOIN DE DONNÉES<br />

ET DE SENSIBILISATION<br />

Des données au niveau national permettraient<br />

de mettre davantage en lumière ces violences<br />

spécifiques, pour autant qu’elles n’alimentent<br />

pas de nouveaux préjugés à l’encontre de la<br />

communauté. En parallèle, la formation des<br />

professionnel·les du domaine (pas seulement<br />

la police) doit être renforcée. Selon Manu : « Il<br />

est aussi important de sensibiliser les proches<br />

qui sont démunis face à ces violences. »<br />

Pour des raisons de simplification, <strong>360°</strong> propose<br />

de parler ici de violence « de couple »<br />

même si cette notion ne reflète pas la diversité<br />

des relations affectives et intimes possibles<br />

1 PRÉNOM D’EMPRUNT<br />

2 AFAB ET FEMMES TRANS<br />

3 HOMMES AYANT DU SEXE AVEC LES HOMMES (AMAB)<br />

4 ENQUÊTE SANTÉ GAIE 2011<br />

5 ENQUÊTE SANTÉ FSF 2019 (FEMMES AYANT DU SEXE<br />

AVEC LES FEMMES - AFAB ET FEMMES TRANS)<br />

Par Camille Béziane,<br />

responsable des Klamydia’s<br />

« Ça a commencé avec des rabaissements et<br />

des reproches. Puis les gifles. Je l’aimais et je<br />

n’ai rien vu arriver », raconte Léa 1 , femme trans*<br />

qui a été en couple avec une femme. Certains<br />

stéréotypes ont la vie dure et se heurtent à un<br />

impensé lié aux représentations hétéronormées<br />

de la violence. L’idée persiste que les couples de<br />

femmes 2 seraient doux (aussi dans la sexualité).<br />

Plus généralement, les couples de même sexe<br />

seraient égalitaires, exempt·e·x·s de domination<br />

ou d’emprise, car de force égale. La violence<br />

éventuelle serait forcément commise par la personne<br />

perçue comme la plus masculine.<br />

La bulle de protection que peut former le couple<br />

vis-à-vis d’une société qui peut être LGBTIQ+phobe<br />

ou hétérosexiste peut s’avérer délétère<br />

et contribuer tant à une forme de dépendance<br />

que d’isolement. Le fait d’appartenir à plusieurs<br />

minorités à la fois peut renforcer les mécanismes<br />

de domination. Léa* se rappelle : « Elle<br />

était tout pour moi. Je ne connaissais personne<br />

dans la communauté et elle m’a intégrée dans<br />

son cercle d’ami·es. Quand nous nous sommes<br />

quittées, j’ai tout perdu. » Le cas de Léa n’est<br />

pas isolé. Les ami·e·x·s de la personne agressée<br />

sont souvent aussi des connaissances, voire<br />

des ami·e·x·s de l’auteur·e·x.<br />

L’anonymat est d’autant plus compliqué<br />

à préserver que les communautés<br />

sont petites, comme c’est le cas en<br />

Romandie. La recherche d’aide ou le<br />

dépôt de plainte peut s’avérer difficile<br />

et signifier devoir s’outer. A cette com-<br />

RESSOURCES EN CAS<br />

DE VIOLENCES,<br />

NE PAS RESTER SEUL·ES :<br />

<br />

○ Conseils, écoute et accompagnement<br />

: association-pav.ch<br />

○ Conseil et information en ligne<br />

(aussi pour les personnes ayant<br />

recours à la violence) :<br />

Accueil - Violence que faire<br />

○ Conseils pratiques (aussi pour<br />

les témoins) :<br />

garance-lgbtiq2019-brochure-v3.pdf<br />

○ Bilan des blessures et soins :<br />

services d’Urgence des hôpitaux<br />

○ Suivi : Unité de médecine des<br />

violences (hôpitaux)<br />

○ Conseils et mise à l’abri pour<br />

les HSH (Genève): pharos-geneve.ch<br />

○ Centres LAVI<br />

64 SANTÉ<br />

VIOLENCES<br />

VIOLENCES<br />

SANTÉ<br />

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