Salvador Dada H.O.O.Q.-What the hell is Dada?Idée originale Alyna ReadingDadaïsme & emsicsaFpage 15Auf einen Kaffee und AbsinthSeiten 16-17Ne vous méprenez paspages 18-19Dadaism in a nutshellSeiten 20-21Niki de Saint Phalle, artistecomplète et engagéepage 2214 spectrum 09.22
DOSSIERTexte Alison Eugénie BenderFoto UnsplashDadaïsme & emsicsaFLe dadaïsme s’est vu censuré et rejeté pour de multiplesmotifs invoqués, tels que la vulgarité ou l’appropriationdu travail artisanal d’autrui — comme Fontaine de MarcelDuchamp — , mais aussi par les dirigeants fascistes qui yont vu une menace directe à leurs idéaux.e dadaïsme, ou dada, est l’enfant bâtardL de l’Art et du charnier de la GrandeGuerre. Nombre de ses ambassadeurs etambassadrices ont connu au plus près cerépugnant massacre et l’ont fui jusqu’à Zürich,où la mise à bas de dada eut lieu dans leCabaret Voltaire le 5 février 1916 –— aprèssa conception en février 1915, à Berlin, parHugo Ball et Richard Huelsenbeck qui publièrentle Manifeste littéraire.Une telle progéniture ne pouvait qu’êtrehautement antinomique et oxymorique, déclarantla guerre à la guerre, provoquant lechaos face au chaos, appelant à imposer ladictature à la dictature, le tout avec un humourcaustique et un cynisme cru. Son styleanticonformiste, anti-normes, « anti-tout »,ne lui a pas valu que des amis, en particulierauprès des Adolf, Benito et compagnie.Ainsi Hitler dit du dada et autres courantspeu conventionnels qu’ils sont un « art dégénéré» — mais est-il seulement plus beaucompliment à recevoir de l’incarnation dela haine et de l’autoritarisme en Europe quecelui-ci ?Absurdité historiqueDevant l’absurdité de la Première Guerreet de ses causes profondes, dont certainessont les moteurs mêmes du fascisme l’ayantsuccédé, le dada tente de proposer une alternativeà l’ordre établi jusqu’alors, n’ayant paspu empêcher ces horreurs, voire même lesayant provoquées. Ainsi le désordre, l’extravaganceet l’irrespect sont les mots d’ordrepour ouvrir la voie à la liberté individuelle età un monde — enfin — différent, sorti de sespulsions de mutilation et d’autodestruction.Tristan Tzara, auteur parmi les fondateur.trice.s et figures de proue du dada, déclaradonc en 1963 :« Dada n'était pas seulement l'absurde, passeulement une blague, dada était l'expressiond'une très forte douleur des adolescents,née pendant la guerre de 1914. Ce que nousvoulions c'était faire table rase des valeursen cours, mais, au profit, justement des valeurshumaines les plus hautes. »Ainsi, le dadaïsme n’est pas qu’une vulgaireblague au goût douteux, mais un véritabledanger pour les gouvernements autoritairesd’entre-deux guerres. Si cela peut paraîtrelogique aujourd’hui, puisque le fascisme nesupporte en aucun cas ce qui peut sortir ducadre et encore moins la critique, cela n’étaitpas si évident au départ, puisque le mêmeTzara écrit en 1918 :« Je suis contre les systèmes, le plus acceptabledes systèmes est celui de n'en avoir parprincipe aucun […] Il nous faut des œuvresfortes, droites, précises à jamais incomprises[…] Je détruis les tiroirs du cerveau et ceuxde l'organisation sociale. Dada ne signifierien. »Dada frondeurDe leur point de vue, les mouvements autoritairesont sans doute eu raison de craindreet de censurer ce courant. Il incarne sans retenuecette folle envie de vivre et de créerdans l’absurde et le déraisonnable, de vivreet de créer malgré tout. Mais les dictateursd’alors ne lui ont-ils pas ainsi finalementdonné un sens, une logique, un but extrêmementconcret et plein de sens : être absurdeoui, mais pas — ou plus seulement — pourl’absurdité elle-même, mais pour être libéréde cette folie qui pousse à s’entre-tuer.Par exemple, avant et pendant la SecondeGuerre mondiale, les photographes dadaïstesJohn Heartfield et George Grosz ontalors réalisé une série de collages antinazis— dont certains sont utilisés pour illustrercet article.Si le dada avait déjà de nombreuses failles etscissions en son sein dans les années 20, c’estbien le fascisme qui lui donne le coup degrâce, mais aussi raison à ses cris et dénonciations.Alors dada ne signifie plus « rien», mais bien « tout ». Cet anti-art devient lemartyr de tout art. Et la volonté d’émancipationde quelques-un.e.s, de quelques artistes« dégénéré·e·s », devient celle de toutun chacun, de tous les peuples, de tous lesindividus, et ainsi le cauchemar du fascisme.Le dada est mort, vive le dada.P09.22spectrum15