J'attends le numéro 63
Laboratoire de recherches créatives
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OLIVIER ISSAURAT
MARCHER EST TOUT
CE QU’IL LEUR RESTE
Le fleuve épais, obscur, s’écoule pesamment.
Si regard perçant, l’on plonge attentivement,
On y distingue une armée de spectres maudits.
Ils avancent lentement, leurs pas alourdis,
Enlisés dans la vase d’une étoffe moirée.
Ils remontent ainsi au pont de l’Archevêché
Qui enjambe la Seine pour l’Île de la Cité.
Les terrassiers ont creusé des marches pavées.
Les spectres sans morale, remontant des abysses,
Se répandent en villes parmi les fleurs de lys.
Cherchant des édifices élancés et pieux,
Ils essaient comme ils peuvent d’atteindre tous les cieux.
Avec les grands anciens, émergeant du sommeil,
Déchirant les nuages pour manger le soleil,
Les spectres font grincer les portails de l’enfer,
Se couchent sur le Porphyre, en chutant de l’éther.
Ils prient de mauvais dieux sensibles à leurs plaintes,
Chapelets de tristesse, qui leurs cœurs noirs, éreinte.
Si divinité fut, elle détourne les yeux
Et s’en va ripailler en d’autres sombres lieux.
Les spectres désolés s’en retournent alors,
Ils rampent dans la terre nauséabonde encore,
Qui n’accouchera que d’horribles silures.
Les figures spectrales rêvent pourtant d’un futur :
Elles rêvent, sans autre fin, qu’on trouve les clefs, un soir
Jetées de par les rampes, celles du Pont des Arts
Celle-là qui scellait une promesse d’amour
Et déferrons le lien mortel de leurs atours.
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