Point de mire Conseils pour réussir dans un cabinet de groupe L’époque du combattant solitaire est probablement bientôt révolue, du moins dans le contexte médical. Le modèle à succès du «cabinet de groupe» se propage de plus en plus. Mais s’agit-il dans tous les cas de figure de la solution la meilleure? Quels sont les chances et les risques du cabinet exploité en commun? Dieter J. Tschan, lic. oec. HSG et Dr Jörg Tschan, chirurgie orale, Nimeda Consulting GmbH Photos: Adobe Stock 30 2/23 vsao /<strong>asmac</strong> <strong>Journal</strong>
Point de mire «C’est pourquoi ceux qui s’unissent à tout jamais doivent s’assurer que le cœur répond au cœur. Courte est l’illusion, long est le repentir.» Friedrich Schiller Apparemment, les personnes désireuses de se marier ne sont pas nombreuses à tenir compte des célèbres vers du poète (et médecin) allemand. En effet, le taux de divorce a fortement augmenté dans de nombreux pays au cours des dernières décennies. Les séparations ne se produisent cependant pas seulement dans le privé. Il y a hélas aussi un nombre considérable de cabinets de groupe qui échouent. Souvent, un des partenaires se retire ou, dans le pire des cas, le cabinet de groupe doit être dissous, avec toutes les conséquences juridiques et financières que cela implique. Dans sa citation, Friedrich Schiller a clairement décrit quelles responsabilités un engagement peut entraîner. Dans son célèbre poème «Le chant de la cloche», il nous met en garde contre les décisions hâtives; un conseil que les médecins devraient également prendre à cœur lorsqu’ils veulent agrandir ou réorganiser leur cabinet. Comme le dit l’adage en référence à Schiller: «C’est pourquoi ceux qui s’unissent à tout jamais doivent s’assurer qu’il n’y a pas quelque chose de mieux!» Sur la même longueur d’onde Ce qui vaut pour le recrutement de nouveaux collaborateurs dans une entreprise s’applique aussi aux cabinets de groupe. Généralement, le recrutement s’effectue sur la base des qualifications professionnelles alors que la séparation se fait à cause de divergences de vue personnelles. Il s’agit donc de trouver un ou une partenaire qui s’intègre dans le cabinet non seulement sur le plan professionnel, mais aussi personnel. Il est impératif de définir préalablement une stratégie et philosophie communes pour la gestion du cabinet. L’esprit de compromis ne doit pas manquer et l’individualisme ne saurait Travailler en couple dans le cabinet de groupe Comme nous étions déjà en couple pendant notre formation postgraduée, nous avons veillé à travailler dans différents hôpitaux. Ce n’est que dans un grand centre hospitalier que nous avons été engagés en même temps. Cela nous a permis de découvrir les avantages pratiques d’avoir un employeur commun. Par exemple la possibilité de coordonner la planification des vacances ou de la formation postgraduée. <strong>No</strong>us tenions aussi à terminer notre spécialisation avant de fonder une famille. La prise en charge d’enfants en bas âge pendant la formation postgraduée représente un énorme défi qui nous paraissait difficile à gérer. Après la formation postgraduée, nous avons eu l’opportunité de nous engager dans un cabinet de médecins de famille avec la possibilité de l’élargir par la suite. A l’heure actuelle, nous sommes quatre médecins spécialistes, un médecin-assistant et un médecin retraité qui assure les remplacements. <strong>No</strong>us avons ainsi pu profiter du capital de confiance, du respect et de la générosité de nos prédécesseurs et poursuivre notre travail sur cette base, ce qui s’est avéré crucial. <strong>No</strong>us veillons à entretenir les relations dans l’équipe lors des réunions d’équipe et pendant les pauses. La même attitude est un principe directeur pour ce qui concerne la manière d’aborder les problèmes médicaux. Même si tout le monde fait preuve de générosité, il y aura forcément des conflits lorsque deux approches fondamentalement différentes se rencontrent. Pour clarifier les relations avec les patients, ces derniers ont leur médecin attitré qui est responsable de leur suivi à long terme. Lorsqu’il s’agit de remplacer un collègue, nous nous concentrons sur les problèmes aigus. L’organisation du cabinet comme société anonyme (SA) nous facilite la répartition des tâches administratives, qui sont également bien rémunérées. Compte tenu de la rémunération des médecins par le biais du tarif médical, il n’y a ni bonus ni malus si le budget n’est pas atteint. Chacun contribue à sa manière au bon fonctionnement du cabinet et l’engagement est directement rémunéré. La planification des vacances et des absences constitue un point délicat. En effet, il faut à chaque fois se mettre d’accord et le soulagement est grand lorsque l’on y parvient. Dans le contexte de la pénurie de médecins de famille, nous devons faire un effort particulier pour nous démarquer et veiller à notre bien-être. Le bon fonctionnement d’un couple n’est pas évident, que ce soit dans un cabinet ou dans le cadre du mariage. Dans le cabinet, nous ne pensons pas que notre statut de couple nous confère un rôle particulier. <strong>No</strong>us faisons partie de l’équipe et travaillons de manière indépendante, ce qui est très important pour nous. Comme nous avons réparti la garde des enfants et le travail au cabinet, nos heures de consultation se chevauchent peu, ce qui permet de bien séparer les deux. <strong>No</strong>us travaillons tous les deux des demi-journées, nous sommes donc présents à la fois au cabinet et à la maison. Cela exige une grande flexibilité et nous met fortement à contribution, car les préoccupations liées au travail nous accompagnent souvent jusqu’à la maison. <strong>No</strong>s divergences de vues en tant que couple concernent principalement la garde des enfants, notre temps libre où il n’est pas possible de clairement séparer les responsabilités. Au départ, nous ne voulions pas travailler dans le même établissement ou dans le même cabinet. C’est le hasard qui a fait les choses et cela a bien fonctionné jusqu’à aujourd’hui, heureusement. Judith et Hannes Balmer, Stedtli-Praxis.ch être accepté. Des aspects essentiels tels que l’ouverture d’esprit, les réunions régulières et le respect mutuel constituent la base d’un partenariat professionnel. Si un cabinet accueille de nouveaux médecins, cela signifie pour les «nouveaux» qu’ils doivent faire preuve de respect vis-à-vis des structures existantes et pour les «vieux» qu’ils doivent respecter les idées de la jeune génération. Le succès n’est pas garanti Les raisons d’un échec peuvent être multiples, le succès n’est pas garanti! Si on choisit une voie trop facile sans bien analyser toutes les conséquences possibles, si on ne se focalise que sur les avantages, le réveil risque d’être brutal. Certains propriétaires souhaitent travailler moins, se décharger d’une partie de la responsabilité et de la bureaucratie, ce vsao /<strong>asmac</strong> <strong>Journal</strong> 2/23 31