Turkestan chinois, LE MUQAM DES DOLAN - Document sans titre ...
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manche long différent du rawap ouïgour et<br />
qui, outre ses trois cordes de jeu, possède<br />
quinze cordes sympathiques ; le ghijak<br />
dolan, vièle à table d’harmonie en peau et à<br />
une corde en crin de cheval à laquelle est<br />
ajoutée dix à douze cordes sympathiques ;<br />
le qalun, grande cithare sur table trapézoïdale<br />
comportant seize chœur de deux cordes<br />
et deux cordes simples dans le grave, ces<br />
cordes en métal sont pincées de la main<br />
droite avec un long plectre de bois tendre,<br />
tandis que la main gauche exécute des ornements,<br />
vibratos et glissandos en faisant glisser<br />
sur les cordes la clef d’accordage. Les<br />
tambours sur cadre dap sont frappés par les<br />
chanteurs.<br />
Le muqam dolan se présente sous la forme de<br />
suites vocales et instrumentales et, comme<br />
c’est le cas dans la plupart des traditions de<br />
l’aire turco-arabo-persane, chacune de ces<br />
suites est jouée dans l’un des neuf modes<br />
musicaux : Bash Bayawan, Zil Bayawan, Chöl<br />
Bayawan, Ötang Bayawan (également appelé<br />
Ongamet), Hudek Bayawan, Dugamet<br />
Bayawan, Bom Bayawan, Sim Bayawan et Jula<br />
qui est toujours joué en dernier.<br />
Chaque suite se compose de quatre ou cinq<br />
parties qui sont enchaînées <strong>sans</strong> interruption<br />
: muqaddima, introduction vocale non<br />
mesurée ; chikitma, pièce en 6/4 ; sanam,<br />
pièce en 4/4 ; saliqa, pièce en 4/4 ; serilma,<br />
en 4/4 ou 5/8.<br />
Pendant l’exécution, les chanteurs et les<br />
musiciens bénéficient d’une grande latitude<br />
– 5–<br />
d’interprétation, ce qui explique comme on<br />
l’a dit plus haut le caractère très hétérophonique<br />
de cette musique. Cette liberté se<br />
retrouve aussi dans le choix des textes poétiques.<br />
Puisés dans un fond de poésie orale,<br />
les poèmes ne sont pas choisis préalablement<br />
mais “lancés” spontanément par le<br />
chanteur soliste sous formes de strophes<br />
(des distiques à double hémistiches, selon<br />
un schéma que l’on retrouve un peu partout<br />
au Moyen-Orient et en Asie centrale) qui<br />
s’organisent selon l’inspiration du moment<br />
<strong>sans</strong> véritable continuité thématique. Il<br />
n’est donc pas rare de voir certaines strophes<br />
se répéter au fil des muqam. La thématique<br />
récurrente de cette poésie est l’amour déçu<br />
ou contrarié qui a toujours constitué une<br />
source d’inspiration essentielle chez les<br />
poètes orientaux.<br />
Pour conclure, on pourrait donc dire que<br />
l’interprétation musicale et poétique du<br />
muqam dolan se présente comme une sorte<br />
de jeu de Lego dont chaque interprète<br />
connaît si bien les règles d’agencement qu’il<br />
suffit de l’impulsion d’un meneur de jeu<br />
pour que se réalise devant nous, en temps<br />
réel, la construction du muqam, toujours<br />
semblable mais jamais identique. Et c’est<br />
<strong>sans</strong> doute cela, plus que l’énergie qui se<br />
dégage de cette musique, qui appelle la comparaison<br />
avec le jazz.<br />
Ces enregistrements ont été réalisés à Paris<br />
pendant les concerts que les artistes ont<br />
donné à la Maison des Cultures du Monde les