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N. 16 Italia : Imaginations Passions Parcours - ViceVersaMag

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Suite de la page 18<br />

pétrifiante, officielle, imposée à l'individu par le social. C'est<br />

aussi la fatalité des masques, la déstabilisation de la personne<br />

humaine et le conflit des altérités, la quête irréalisable<br />

de l'identité et la désarticulation de la mimésis, de la<br />

représentation braquée sur l'imitation des actions humaines.<br />

Avant Brecht, Pirandello s'en prend 6 Aristote et déloge tous<br />

les rouages de la machine théâtrale. Par ailleurs, on s'aperçoit<br />

aujourd'hui que l'auteur d'Henri IV a profondément ancré<br />

sa philosophie et son système dans la vie quotidienne. Il est<br />

certain que son oeuvre, voulue « humoristique », s'enracine<br />

dialectiquement dans l'idéologie et la mentalité italiennes<br />

de la fin du XIX e siècle et du début du XX e , mais en même<br />

temps, elle renvoie à d'innombrables cas individuels, aux voix<br />

— plaintives, railleuses, ironiques, désespérées et<br />

compatissantes - de ses nouvelles, de ses romans et de son<br />

théâtre. L'oeuvre de Pirandello, c'est la saisie microscopique<br />

de l'expérience négative de lo condition humaine, l'engrenage<br />

de l'être dans le social, la répétition du dialogue que<br />

les vivants récitent après les morts en sachant qu'ils ne peuvent<br />

rien changer à leurs répliques essentielles. Ainsi les<br />

mêmes questions reviennent : Qui suis-je ? Que veux-je ? Que<br />

puis-je? Qui .sont les autres? Pourquoi la société nous<br />

emprisonne-t-elle dans la répétitivité des masques, des conventions<br />

et des interdits ? Bien que Pirandello ne donne pas<br />

de réponses définitives à ces questions, il investit souvent le<br />

discours de ses personnages de formules radicales. Comme<br />

par exemple le monoloque d'Henri IVqvi, enfermé dans une<br />

folie tantôt réelle tantôt feinte, jette à la figure du monde :<br />

« Vous vous mettez à parler? C'est pour répéter toutes les<br />

phrases qui toujours se sont dites ! Vous croyez vivre ? Vous<br />

remâchez la vie des morts ! ? » Bien que le théâtre moderne<br />

et post-moderne ait évolué vers des formes scéniques de la<br />

dérision, de l'absurde et du spectacle-happening, il semblerait<br />

que ce constat d'Henri IV revient avec force dans quelques<br />

pratiques théâtrales contemporaines, notamment chez<br />

Peter Weiss, Beckett, Ionesco, Pinter et Kantor. Leurs théâtralités<br />

doivent beaucoup à Pirandello. En désarticulant les<br />

données de base du théâtre mimétique et linéaire, il a fait<br />

entrer la dramaturgie dans l'ère du jeu des limites, des miroirs<br />

brisés et de la réfraction des structures telles que le dialogue,<br />

le personnage, la fable dramatique et la représentation<br />

scénique. En somme, c'est Pirandello qui a fait que le<br />

théâtre du XX e siècle se mesure avec ses doubles.<br />

Des trois spectacles pirandelliens que j'ai vus en Europe<br />

au mois de mai, je donnerais la préférence à Pirandello Qui?<br />

(Pirandello, connais pas). Ce spectacle, conçu par Même<br />

Perlini, a été repris à Milan treize ans après la première représentation.<br />

L'idée en est originale. C'est une synthèse visuelle<br />

du pirandellisme traduit en structures géométriques, mouvements<br />

répétés avec insistance, équations scéniques abstraites<br />

avec quelques bribes de dialogue d'un premier théâtre<br />

que ce théâtre ou second degré reproduit librement. Pirandello<br />

Qui?donne l'impression d'une saturation, d'une densité<br />

et d'une insistance que le spectateur doit revivre presque<br />

jusqu'à la catharsis de cette vision scénique postpirandellienne.<br />

La vie des morts encore une fois, autrement<br />

remâchée.<br />

Présenté dans le cadre du grand colloque international<br />

« Pirandello .• poetica e presenza », qui s'est tenu à Louvain<br />

et à Anvers du 13 au <strong>16</strong> mai, le spectacle d'Henri IV par<br />

la compagnie Ninchi m'a considérablement déçu. Ce spectacle<br />

joué au ras du texte est un exemple du mauvais usage<br />

que l'on fait aujourd'hui de Pirandello. Le potentiel de la théâtralisation<br />

du jeu des masques et de la superposition des trois<br />

théâtres — historique, bourgeois-mimétique et subjectif — a<br />

été complètement gaspillé par le rythme trop rapide et par<br />

le jeu sans nuances de ce spectacle trop réaliste et trop explicite.<br />

Entre les mains de la compagnie Ninchi, Henri /y devient<br />

le reflet confus de son modèle, un reflet mi-mélodramatique,<br />

mi-boulevardier.<br />

En revanche, le spectacle de deux « atti unici », A la sortie<br />

et J'ai rêvé (mais peut-être non), représentés parlIGruppo<br />

Libero de Bologne a été un succès. Pirandello méditatif et<br />

onirique est inséré ici dans une théâtralité joueuse et désinvolte.<br />

On y sent la présence à l'arrière-fond de la campagne<br />

sicilienne, elle aussi méditative, pessimiste, vouée à sa<br />

tristesse et à son insularité Les comédiens (Biancamaria Birazzoli,<br />

Marina Pitta, Giorgio Bulla et Renzo Morselli) marquent<br />

la permanence de cet arrière-fond sicilien, une des sources<br />

du pirandellisme, tout en le dépassant adroitement, jouant<br />

la distance par rapport à une vision de l'existence humaine<br />

que leur théâtralité ne cesse de mettre en perspective. En<br />

somme, une tentative tout à fait réussie de montrer ce qui<br />

est encore vivant dans le pirandellisme. Reconnaître son<br />

actualité, c'est voir le théâtre comme la pratique scénique<br />

d'un dépassement du statu quo de l'être et du paraître, de<br />

la vie et de la scène. Cinquante ans après sa mort, Pirandello<br />

ne se porte pas si mal que ça. •<br />

Wladimir Krysinski<br />

Divagazioni<br />

Pirandelliane<br />

Cinquanfannifa. moriva Luigi Pirandello. M di là dellintenio celebrativo questo anniversario airà un senso se<br />

rmsara a mostrare, con rigore metodologico, quale posto Pirandello si sia conquistalo nel panorama délia letteralura<br />

mondiale e perché.<br />

Da qualche tempo, in (^OYYfldO TlnYI/lti amDit o letterario, gli<br />

anniversari rappresen- ^ C/K/Hy LJ\J l tanQ ^ suonerja jmpia.<br />

cabile per i risvegli a puntate délie menti organizzativo-celebrative-esegetiche dei<br />

nostri critici, e allora è tutto un fiorire di convegni, tavole rotonde, incontri, riletture,<br />

riproposte e rivisitazioni. In fondo, se ciô non nasconde un vuoto reale di interessi<br />

più urgenti e costanti, si tratta di un modo corne un altro per tener desta l'attenzione<br />

su certi autori, proseguire o riprendere il filo di un discorso interpretativo a volte<br />

interrotto o languente, a volte bisognoso di ampie sterzate che lo rimettano sui binari<br />

délia produttività di idee. E poi è consolatorio vedere che la distanza abissale tra la<br />

gioia di una nascita e il dolore di un decesso, che ci toccano cosî da vicino nella vita<br />

quotidiana, si riassorbono e si sublimano, nel volgere di pochi anni, nel significato<br />

globale di unesistenza legata alla creazione di un'opera e nella immagine puntuale<br />

che ce ne viene del suo autore. Sicché merito degli anniversari è anche quello di<br />

sostituire ai concetti di inizio e di fine quelli più rassicuranti di continuità e permanenza,<br />

almeno per quei pochi che hanno saputo sopravvivere nel piacere e/o nell'<br />

angoscia che ancora ci regalano attraverso la lettura dei loro testi. L'importante,<br />

tuttavia, è che l'intento celebrativo non costituisca un pre-testo, un condizionamento,<br />

cioè, che si esercita a priori sul discorso critico vincolandolo ad esprimere concetti<br />

quali grandezza, t'ama, attualità, modernità, precursione, o peggio ancora a dimostrare<br />

ad ogni costo, fuori da ogni rigoroso paramétra metodologico, la fortuna e l'influenza<br />

profonde di un autore sul suo tempo e sugli artisti che lo hanno seguito.<br />

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