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Salluste Guerre de Jugurtha

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mi ÉTUDE SUR SALLUSTE .<br />

sent~ment<strong>de</strong>sonéter~~té .Aussi, dès les premiers temps,s'occupa-t-elle<br />

<strong>de</strong> fixer, par quelques monuments grossiers mais<br />

soli<strong>de</strong>s, livres auguraux, livres <strong>de</strong>s auspices, livres lintéens,<br />

livres <strong>de</strong>s magistrats, livres pont~ficaúx (i), ie souvenir<br />

<strong>de</strong>s événements qui la <strong>de</strong>vaient conduire à la conquête<br />

du mon<strong>de</strong> : elle gravait son histoire naissante sur la<br />

pierre <strong>de</strong>s tombeaux et sur l'airain <strong>de</strong>s temples . Quand les<br />

lettres commencèrent á pénétrer dans l'Italie, le génie romain<br />

s'éveilla tout d'abord á l'histoire . Une première génération<br />

d'historiens parut . Mais alors il se produisit un fait<br />

assez singulier et qui pourrait nous surprendre, s~ nous n'av~ons<br />

dans notre littérature un fait analogue . Les premiers<br />

h~storiens<strong>de</strong>~ome,Fab~usP~ctor, Luc~usCinciuset plusieurs<br />

antres écrivirent en grec (2) ; c'est ainsi que chez nous longtemps<br />

l'histoire s'écrivit en latin, et cela non-seulement au<br />

moyen âge, mais au seizième siécle même, quand no~~s avions<br />

eu les Villehardo~n, les Joinville, les Froissart . Il ne faut pas<br />

s'en étonner : une langue, alorsmême qu'elle paraît formée,<br />

n'est pas propre encore à porter le poids <strong>de</strong> l'histoire ; sa jeunesse<br />

peut convenir aux chroniques, aux mémoires ; il faut<br />

p~~r l'histoire sa maturité . Coton l'Ancien inaugura pour ia<br />

littératureromaine cette ère <strong>de</strong> l'histoirenati~nale, écrite en<br />

latin avec quelque éclat, comme il avait inauguré celle <strong>de</strong><br />

l'éloquence. Sur les traces <strong>de</strong> Coton parurent L . Calpurnius<br />

Piso, C . Fannius, L . Ccehus Antipater, faibles et mai •<br />

gres annalistes plutôt qu'historiens, et quo Cicéron estimait<br />

médiocrement (3) . Au temps <strong>de</strong> Sylla, il se fit dans l'histoire,<br />

comme dans le reste <strong>de</strong> la littérature, un mouvement remarquable,<br />

une espèce d'éma~c~pation . Écrite jusque-là<br />

par <strong>de</strong>s patriciens ou du moins par <strong>de</strong>s hommes libres, elle<br />

le f~~t pour la première fois par un affranchi, L . Otacilius<br />

(i ; M . V ict . le Clerc, Des journaux chez les Romains .<br />

(2) Justin, Pré/ace.<br />

(3) De T.e~ib~~s, i, 2<br />

ÉTUDE SUR SALLUSTE . ~~<br />

Pilit~~s : autre ressemblance avec nos vieilles chroniques,<br />

qui, rédigées d'abord par <strong>de</strong>s ecclés~ast~ques et dans les<br />

morastëres comme les fastes romains l'étaient dans les<br />

temples, ne le furent que plus tard par <strong>de</strong>s laïques . Une<br />

nouvelle génération d'écrivains s'éleva ; mais, c'est Cicéron<br />

encore qui nous le dit, elle ne fit que reproduire l'ignorance<br />

et la faiblesse <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>vanciers . Sisenna seul faisait<br />

pressentir <strong>Salluste</strong> .<br />

Pourquoi l'histoire, à Rome, a-t-elle a~ns~ été en retard<br />

sur l'élaquence`?Il faut sans doute attribuer cetteinférior~té<br />

<strong>de</strong> l'histoire à 1a langue elle-même, qui n'avait pas encore<br />

acquis la régularité, la force, la gravité, la souplesse nécessaires<br />

à l'histoire . On conçoit que, maniée chaque jour à la<br />

tribune et par les esprits les plus puissants, la langueoratoire<br />

ait <strong>de</strong> bonne heure reçu <strong>de</strong> ces luttes <strong>de</strong> la parole et du génie<br />

un éclat, une vigueur, une abondance que ne lui pouvait<br />

donner le lent exercice <strong>de</strong> la composition, qυί convent á<br />

l'histoire . L'insuffisance <strong>de</strong> la langue, c'est donc là une première<br />

cause <strong>de</strong> L'infériorité <strong>de</strong> l'histoire relativement à<br />

l'éloquence ; ce n'es est pas la seule . Théocratique et patric~enne<br />

á sa naissance, Rome conserva soigneusement ses<br />

traditions religieuses et poht~ques . Écrίre l'histoire fut un<br />

privilége et presque un sacerdoce dont les pontifes et les<br />

patr~cie~~s voulurent, aussi Lgngtemps qu'ils le purent, rester<br />

en possession, comme ils l'éta~e~~t <strong>de</strong> la religion et du<br />

droit . Le jour où, sous Sylla, une main d'affranchi tint ce<br />

burin <strong>de</strong> l'histoire que jusque-là <strong>de</strong>s mains nobles avaient<br />

seules tenu, ce jour-là ne fut pas regardé comme moins fatal<br />

que celui où, par l'indiscrétion d'un Flavzus, d'un scribe,<br />

avait été révélé le secret <strong>de</strong>s formules . II y eut enfin à ce<br />

retard <strong>de</strong> l'h~st~ire une <strong>de</strong>rniére cause et non moins profon<strong>de</strong><br />

.<br />

L'histoire ne se fait pas aussi simplement qu'on pourraίt<br />

le croire . Le nombre, la gran<strong>de</strong>ur, la variété <strong>de</strong>s événements,<br />

a .

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