Fonctionnalité calendaire dans les cosmogonies anciennes ... - AFEC

Marc Kalinowski
cessus cosmogonique demeurent présents, bien que sous une forme historicisée
et dans la langue propre aux récits de fondation 32 .
Quant au Taiyi shengshui, il rend compte de ce premier stade de manière
extrêmement concise, par une simple phrase plaçant les deux éléments
du processus de part et d'autre du verbe sheng Qi, « engendrer »,
« donner naissance ». La raison pour laquelle cet opuscule a suscité un si
vif intérêt dès sa parution en 1998 est, en plus de l'ancienneté du document
lui-même et de son lien étroit avec la philosophie du Dao, la présence de
l'élément aquatique dans la phase initiale de formation du monde. Contrairement
à beaucoup d'autres civilisations, on ne trouve pas dans les mythes
cosmogoniques chinois la notion d'eaux primordiales, sinon dans les récits
liés aux inondations et à l'aménagement des eaux 33 . De plus, aucune des
cosmogénèses philosophiques ultérieures, dans le Huainanzi ou ailleurs, ne
place l'eau à l'origine des choses, lui préférant en cela les notions
d'énergie indifférenciée (qi 0,, souffle, force vitale) et de chaos (hundun
ïftMi) 34 - L'originalité du Taiyi shengshui est sur ce point entière.
Le Grand Un (Taiyi) est par contre attesté dans les textes anciens en
tant qu'une des notions fondamentales de la philosophie chinoise 35 . Son
'' Sur les recoupements entre les notions de chaos cosmique et d'âge d'or de la civilisation,
voir J. Levi, « Le mythe de l'Âge d'or et les théories de l'évolution en Chine
ancienne », L'Homme, 17 (1977), p. 73-103.
" Sur le thème de l'eau dans la mythologie et la religion chinoises, voir
M. Kaltenmark, «La naissance du monde en Chine», p. 460-461, et S. Allan, The
Way ofwater and sprouts ofvirtue, Albany : State University of New York press,
1997.
A II y a cependant des exceptions notables telles que les théories exposées dans le chapitre
« Shuidi 7jdfe » du Guanzi ff 1 ? 1 et dans le Wuli lun ftSÎÉ de Yang Quan %$$.
(III e siècle de notre ère).
j5 La notion de « Grand Un » qui, dans la langue classique s'écrit taiyi ^— et signifie
à proprement parler « le Suprême Un », apparaît toujours dans les manuscrits préimpériaux
et du début des Han sous la forme dayi j^—, (littéralement « le Grand
Un »), les deux graphies ne se distinguant que par un petit trait ajouté dans la partie
inférieure droite du caractère da ~)\ « grand » pour former le caractère tai yfc
« suprême ». Je conserve ici la traduction littérale de dayi par « Grand Un », tout en
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