Chat égyptien en bronze, Cabinet <strong>de</strong>s médailles (cat. n° 41). 92
Il était une fois un chat….. ou les antiquaires et le genre félin par irène Aghion et ALAin SchnApp François Augustin Paradis <strong>de</strong> Moncrif (1687-1770) 1 écrivit en 1727 un petit ouvrage intitulé Les Chats, lequel contenait huit figures originales du peintre Charles Antoine Coypel (1694-1752) gravées à l’eau-forte par le comte <strong>de</strong> Caylus (1692-1765). Moncrif, sur le ton le plus sérieux du mon<strong>de</strong>, y défend les chats à travers <strong>de</strong> nombreuses références historiques, empruntées notamment à l’ancienne Égypte. Lors <strong>de</strong> la parution du livre, publié anonymement, les réactions oscillèrent entre agacement et amusement. Il était difficile pour les lecteurs <strong>de</strong> comprendre s’il s’agissait d’un pastiche ou d’une véritable pédanterie. Le document conservé au Cabinet <strong>de</strong>s médailles nous en fournit une preuve 2 . Le 3 juin 1727, en effet, Gros <strong>de</strong> Boze adresse une lettre à l’abbé Bignon à ce propos : « Je ne puis me persua<strong>de</strong>r, Monsieur, que vous souhaitiez bien sérieusement savoir ce que je pense du livre intitulé LES CHATS […]. J’ai tout lieu <strong>de</strong> croire que vous m’en tenez quitte aujourd’hui que vous avez lu ou du moins parcouru ce livre. Il vous a d’abord présenté un auteur charmé <strong>de</strong> badiner avec son objet et nullement déterminé à l’épuiser par <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>s recherches. » Dans cette lettre longue <strong>de</strong> huit pages, Gros <strong>de</strong> Boze rédigea malgré tout un résumé critique <strong>de</strong> l’ouvrage. Écrivain, poète, musicien, acteur, Paradis <strong>de</strong> Moncrif était avant tout un homme du mon<strong>de</strong>. Lecteur <strong>de</strong> la Reine, courtisan accompli, doté <strong>de</strong> beaucoup d’esprit, il était très apprécié dans les cercles aristocratiques. Il fut tour à tour secrétaire du comte d’Argenson et du comte <strong>de</strong> Clermont. Son élection à l’Académie française en 1733, imposée, disait-on, par le duc d’Orléans et le comte <strong>de</strong> Clermont, fut vivement critiquée et même suivie <strong>de</strong> la parution d’une parodie anonyme <strong>de</strong> son discours <strong>de</strong> réception intitulée « Le Miaou ou très docte et très sublime harangue miaulée par le seigneur Raminagrobis le 29 décembre 1733, jour <strong>de</strong> sa réception à l’Académie française » 3 . De même que le comte <strong>de</strong> Caylus ou Gros <strong>de</strong> Boze, Moncrif faisait partie <strong>de</strong> la « Société du bout du banc », l’un <strong>de</strong>s plus célèbres salons littéraires du xviii e siècle. Cette « joyeuse et spirituelle société », comme la qualifiait le baron <strong>de</strong> Grimm, se réunissait tous les lundis <strong>de</strong>puis 1740 chez Melle Quinault. Madame <strong>de</strong> Créquy rapporte dans ses mémoires 4 que « Moncrif avait écrit une Histoire <strong>de</strong>s chats dont Voltaire et tous ses amis ne manquaient jamais l’occasion <strong>de</strong> se moquer ; mais c’était <strong>de</strong> parti pris et sans nulle raison, car « c’est un recueil <strong>de</strong> plaisanteries tout à fait divertissantes ». Et « Quand Voltaire apprit 93
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