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L'île au trésor(pdf)

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L’Île <strong>au</strong> Trésor<br />

Pendant tout ce temps il palpait l’étoffe de ma vareuse, caressait mes mains, regardait mes<br />

bottes et, de manière générale, dans les silences de son discours, manifestait un plaisir enfantin<br />

en présence d’un compagnon humain. Mais à mes derniers mots, il a redressé la tête avec une<br />

sorte d’expression étonnée et rouée.<br />

“Si jamais tu rmontes à bord, tu dis ? Et alors, qui t’en empêchera ?<br />

– Pas vous, je le sais.<br />

– T’as vu juste. Mais dis donc, comment t’appelles-tu, camarade ?<br />

– Jim.<br />

– Jim, Jim, répète-t-il, apparemment très satisfait. Ben t’sais, Jim, j’ai vécu si rude que<br />

t’<strong>au</strong>rais honte que j’te dise. Tiens, par exempe, tu penserais pas que j’ai eu une mère pieuse, à<br />

m’voir ?<br />

– Eh bien, non, pas spécialement.<br />

– Ah, ben pourtant, elle l’était, <strong>au</strong>ssi pieuse qu’on peut. Et moi que j’étais un ptit gas poli<br />

et pieux, et j’pouvais crachouiller mon catéchisse si vite que t’<strong>au</strong>rais pas reconnu un mot d’un<br />

<strong>au</strong>tre. Et vlà où j’en suis arrivé, Jim, et tout a commencé par jouer à la puce avec des sous sur<br />

les pierres tombales bénies ! Ça a commencé comme ça, mais ça s’est pas arrêté là ; et ma mère<br />

m’a averti, et a tout prédite, la pieuse femme ! Mais que j’dois à la Providence d’être ici. J’ai<br />

tout réfléchi sur cette île solitaire, et j’suis revenu à la piété. Tu m’verras pas tant goûter<br />

l’rhum ; ou juste un ptit dé à coud’ qui porte chance, sûr, si j’ai l’occasion. C’est certain que<br />

j’ferai l’bien, j’ai décidé comment. Et, Jim – regardant <strong>au</strong>tour de lui et abaissant sa voix<br />

jusqu’<strong>au</strong> murmure – j’suis riche.”<br />

J’étais maintenant convaincu que la solitude avait rendu fou ce p<strong>au</strong>vre homme. Je suppose<br />

que mon sentiment se lisait sur mon visage, car il a repris en s’emportant :<br />

“Rich! riche! j’te dis. Et t’sais quoi ? J’ferai un homme de toi, Jim. Ah, Jim, tu remercieras<br />

ta bonne étoile, sûr, que t’es l’premier qui m’as trouvé !”<br />

Soudain, une ombre a voilé son visage ; et il a serré ma main plus fort et levé un index<br />

menaçant devant mes yeux.<br />

“Écoute, Jim, dis-moi vrai : c’est pas le bate<strong>au</strong> de Flint ?”<br />

C’est alors qu’une heureuse inspiration m’est venue. Je commençais à penser que j’avais<br />

trouvé un allié, et je lui ai répondu <strong>au</strong>ssitôt.<br />

“Ce n’est pas le bate<strong>au</strong> de Flint, et Flint est mort ; mais je vais vous dire la vérité, comme<br />

vous me l’avez demandé – il y a des matelots de Flint à bord ; une terrible malchance pour<br />

nous <strong>au</strong>tres.<br />

– Pas un homme – avec une – jambe ? a-t-il hoqueté.<br />

– Silver ?” ai-je demandé.<br />

– Ah, Silver ! Ce srait bien son nom.<br />

– C’est le cuisinier ; et le meneur, <strong>au</strong>ssi.”<br />

Il tenait toujours mon poignet. En entendant ces mots, il l’a tordu plutôt brutalement.<br />

“Si c’est que t’es envoyé par Long John, j’suis cuit, et j’le sais. Mais toi, y t’arrive quoi, là,<br />

tu crois ?”<br />

J’avais pris ma décision en un instant, et en guise de réponse je lui ai dit toute l’histoire de<br />

notre voyage, et dans quelle m<strong>au</strong>vaise passe nous nous trouvions. Il m’a écouté avec le plus<br />

vif intérêt, puis m’a tapoté la tête.<br />

“T’es un bon garçon, Jim, et vous êtes tous dans un sale sac de nœuds, hein ? Ben faites<br />

juste confiance à Ben Gunn – Ben Gunn c’est çui qui peut l’faire. Mais dis, tu croirais possibe<br />

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