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Travailler 2.0 - Le Monde

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Shanghaï, correspondance<br />

L<br />

a jeune génération d’ouvriers<br />

chinois se rebiffe, comme on a<br />

pu le constater une nouvellefois<br />

àl’approche du Nouvel Anlunaire<br />

2013. Au cours du mois de<br />

janvier,qui précédaitladizaine de jours de<br />

congés dont bénéficient les travailleurs<br />

pour rentrer auprès de leur famille le<br />

temps des célébrations, lesgrèvesetmanifestations<br />

ouvrières se sontmultipliées.<br />

L’organisation de protection des droits<br />

des travailleurs ChinaLabour Bulletin, basée<br />

àHongkong, en adénombré 71 :38<br />

dans le secteur des services, dont 15de<br />

chauffeurs de taxi, 26 sur des lignes de<br />

production industrielle, le reste sur des<br />

chantiers de construction.<br />

C’est que lesjeunes travailleurs sontàla<br />

fois mieux informés de leurs droits, depuis<br />

l’avènement des microblogs qui permettent<br />

de se renseigner sur des débrayages<br />

victorieux, et plus exigeants.<br />

<strong>Le</strong>urs revendications sont rarement excessives,<br />

mais ils tolèrent moins les abus<br />

flagrants, les salaires impayés, le nonpaiement<br />

decotisations d’assurance-santé<br />

ou lescadences intenables.<br />

<strong>Le</strong> Taïwanais Foxconn, l’incontournable<br />

sous-traitant enélectronique qui<br />

assemble les téléphones et tablettes<br />

d’Apple, a enregistré deux grèves en<br />

Chine rien qu’en janvier. Celle qui s’est<br />

déroulée le 11 du mois sur son site de la<br />

province du Jiangxi, dans le sud-est du<br />

pays,aété victorieuse :les employés ont<br />

obtenu 500 yuans d’augmentation du<br />

salaire de base, passé à 2200 yuans<br />

(270 euros) par mois pour une semaine<br />

de quarante heures. Il n’en fallait pas<br />

plus pour déclencher immédiatement<br />

une grève sur les chaînes d’assemblage<br />

Pékin, Shanghaï, Hongkong... Partout,<br />

lesgrèvessemultiplient. Une jeune<br />

génération de travailleurs, mieuxformée et<br />

informée, se batpour défendre sesdroits.<br />

Sans pouvoir créer de syndicatindépendant.<br />

<strong>Le</strong> nouvel<br />

activisme<br />

desouvriers<br />

chinois<br />

d’une autre entreprise taïwanaise dans<br />

la même ville, Fengcheng.<br />

Surtout, la multiplication des incidents<br />

chez Foxconn apoussé ce géant, qui n’emploie<br />

pas de salariés âgés de plus de 35 ans,<br />

àlaisser davantage de place àlareprésentation<br />

syndicale. Selon un porte-parole,le<br />

groupe apris le4février des «mesures<br />

afin d’augmenter la représentation des<br />

employés ausein du syndicat de Foxconn<br />

et de développer la connaissance de l’organisation<br />

auprès du personnel».<br />

Au service du parti<br />

En Chine, un syndicatunique existe en<br />

principe dans chaque entreprise, mais il<br />

se révèle généralement inutile. Ses dirigeants<br />

sontnommés par le Parti communiste<br />

(PCC) et, jusqu’aux plus bas échelons,<br />

ils restent au service du parti.<br />

Celui-ci ayant pour priorité lacroissance<br />

économique et la stabilité politique, il se<br />

positionne rarement enfaveur des mouvements<br />

sociaux.Ainsi, le PCCnes’oppose<br />

pas pour autant aux ouvriers et apour<br />

objectif établi deréduire le fossé entre<br />

riches et pauvres. Il s’assure d’ailleurs que<br />

chaque province revalorise régulièrementlesalaire<br />

minimum.<br />

AShenzhen, métropole-usine proche<br />

de Hongkong et laboratoire d’idées progressistes<br />

du PCC, les ouvriers ont toutefois<br />

remporté une victoire en mai2012. A<br />

l’issue d’une grève à l’usine d’électronique<br />

Ohms pour revendiquer une<br />

hausse de salaire, le parti alaissé les ouvriers<br />

élire démocratiquement leurs représentants.<br />

<strong>Le</strong> nouveau chef syndical a<br />

proclamé qu’il défendrait les 800 ouvriers<br />

et non plus le patron.<br />

«<strong>Le</strong>s jeunes ouvriers sont tout à fait<br />

aptes àarticuler leurs demandes et désireux<br />

d’avancer des exigences réalistes»,<br />

constate Geoffrey Crothall, porte-parole<br />

de China Labour Bulletin. «Jusqu’à pré-<br />

ilstolèrentmoins lesabus<br />

flagrants,les salairesimpayés,<br />

lescadencesintenables...<br />

sent, le syndicat officiel ne prenait pas la<br />

moindre part aux négociations collectives».La<br />

question-clé, estime M. Crothall,<br />

«est de savoir comment marier d’un côté<br />

la structure existante et de l’autre l’activisme<br />

montantdes jeunes travailleurs».<br />

Selon lui, la seule option réaliste est de<br />

voir le syndicat officiel, contrôlé au sommet<br />

par l’Etat-parti, se démocratiser progressivement<br />

au sein de chaque entreprise.<br />

Cela prendra du temps, même si,<br />

depuis la grève chez Ohms, les autorités<br />

de Shenzhen ont déjà promis que les employés<br />

de 163 entreprises pourront élire<br />

leurs représentants. Il faudra de toute façon<br />

que la jeune main-d’oeuvre chinoise<br />

se résolve àcecompromis. Car, constate<br />

M. Crothall, «leParti ne laissera jamais<br />

émerger des syndicats indépendants».<br />

Harold THiBaulT<br />

lundi 18 mars2013 <strong>Le</strong> <strong>Monde</strong> Campus /47

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