Les migrations bretonnes - Pays de Dinan
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La Bretagne était tiraillée entre les Normands <strong>de</strong> la Seine et ceux <strong>de</strong> La Loire. Au nord, Guillaume Longue<br />
Epée, après avoir reçu le Cotentin et l’Avranchin, porta aussi un temps le titre <strong>de</strong> duc <strong>de</strong>s Bretons, après s’être vu<br />
concé<strong>de</strong>r en 933 une « terre <strong>de</strong>s bretons en bordure <strong>de</strong> mer ». Au sud, les Scandinaves <strong>de</strong> la Loire contrôlaient une<br />
partie <strong>de</strong>s pays nantais et la Cornouaille, tandis qu’une autre partie du comté passait sous obédience angevine. Le<br />
risque était <strong>de</strong> voir la Bretagne démembrée, car abandonnée par ses élites.<br />
Pour le <strong>Pays</strong> <strong>de</strong> <strong>Dinan</strong>, la translatio<br />
sancti Maglorii, (la translation <strong>de</strong>s reliques <strong>de</strong><br />
saint Magloire), raconte comment Salvator,<br />
évêque d’Alet, prit le corps <strong>de</strong> saint Malo, se<br />
rendit à Léhon, d’où il se retira à Paris en compagnie<br />
<strong>de</strong>s moines <strong>de</strong> l’abbaye Saint-Magloire<br />
et <strong>de</strong> ceux du clergé <strong>de</strong> Dol et <strong>de</strong> Bayeux,<br />
tous transportant les reliques <strong>de</strong> leurs saints.<br />
Le texte raconte comment, après le retour <strong>de</strong><br />
la paix, certains moines revinrent en Bretagne<br />
et d’autres partirent s’installer ailleurs en<br />
Gaule, fondant <strong>de</strong>s établissements connus,<br />
telle l’abbaye Saint-Magloire <strong>de</strong> Paris, et expliquant<br />
ainsi la répartition dans toute la<br />
France, <strong>de</strong>s manuscrits bretons et <strong>de</strong>s reliques<br />
(B. Merdrignac, 1989).<br />
La pério<strong>de</strong> viking prit fin en 936. D’une part, dans l’année qui<br />
précéda la mort du roi Raoul 1 e , les principaux dirigeants du nordouest<br />
<strong>de</strong> la France, dont Guillaume Longue Epée, dirigeant <strong>de</strong> la<br />
Normandie, conclurent un accord, garanti par <strong>de</strong>s mariages, prouvant<br />
qu’aucun <strong>de</strong>s grands du royaume n’était <strong>de</strong> taille à s’imposer<br />
par la force. En 936, à la mort <strong>de</strong> Raoul, Louis IV d’Outremer, fils <strong>de</strong><br />
Charles le Simple, débarque à Boulogne et est sacré roi à Laon.<br />
Cette même année voit le retour d’Alain Barbetorte, comte <strong>de</strong> Cornouaille,<br />
réfugié en Angleterre. Suivant la chronique <strong>de</strong> Saint-Brieuc,<br />
il délivra la Bretagne après <strong>de</strong>s batailles contre les vikings à Dol,<br />
Saint-Brieuc, puis Nantes. D’autres sources permettent <strong>de</strong> dire que<br />
son retour est dû à un climat pacifié, car certainement les alliances<br />
contractées par Guillaume Longue Epée, lui firent abandonner les<br />
Normands <strong>de</strong> la Loire. Flodoard signale cependant, qu’après leur<br />
retour d’exil, les Bretons engagent <strong>de</strong>s combats avec les Normands<br />
qui avaient envahi leur terre. Des raids vikings sont encore signalés<br />
jusqu’en 1014, où la ville <strong>de</strong> Dol sera incendiée.<br />
Alain Barbetorte ne sera pas roi, mais duc. La Bretagne<br />
sort <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong> scandinave, amputée <strong>de</strong>s territoires <strong>de</strong> l’Avranchin et du Cotentin, acquis sous Salomon. Elle est<br />
loin d’avoir rompu avec les Carolingiens, mais le pouvoir s’exerce désormais sous un nouvel ordre, celui <strong>de</strong>s<br />
premiers temps féodaux.<br />
On admet que ces Vikings ou hommes du nord, occupèrent le pays à partir <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong> pénétration que<br />
sont les rivières. Ainsi la Rance, probablement l’Arguenon et le Frémur furent-ils le théâtre <strong>de</strong> ces épiso<strong>de</strong>s. Mais<br />
aucune trace matérielle n’en a été répertoriée avec certitu<strong>de</strong>.<br />
Une chanson <strong>de</strong> geste, rédigée au XII° siècle et<br />
remaniée au XV° siècle « Le Roman d’Aquin », relate la<br />
main-mise du chef normand Aquin sur Alet et son pays.<br />
L’histoire légendaire et donc enjolivée, trouve cependant<br />
un caractère historique au travers <strong>de</strong> multiples<br />
détails, dont celui <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scriptions <strong>de</strong> lieux.<br />
Elle raconte comment le Normand Aquin ou Aiquin<br />
s’empare <strong>de</strong> la Bretagne, occupe Quidalet (concision <strong>de</strong><br />
civitas Alet) tandis que ses cousins Grimouard et Doret tien-<br />
nent Dinard et Gardaine. Charlemagne, appelé par les Bretons,<br />
après quelques péripéties, obtient la réddition d’Alet,<br />
prend la ville <strong>de</strong> Gardaine et poursuit Aquin dans sa fuite<br />
vers le Finistère avant <strong>de</strong> le battre en combat singulier.<br />
Il est possible qu’Aquin soit Incon, chef normand <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> la Loire, cité dans les annales <strong>de</strong><br />
Flodoard en 931. <strong>Les</strong> fouilles <strong>de</strong> la cité d’Alet ont d’ailleurs mis à jour <strong>de</strong>s occupations carolingiennes. D’autre<br />
part, une fortification terroyée, située dans le lit actuel <strong>de</strong> la Rance à Saint-Suliac, rappelle la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong><br />
Gardaine. La prise en compte <strong>de</strong> la variation du niveau<br />
marin permet <strong>de</strong> la restituer, telle une île, hors <strong>de</strong> l’eau,<br />
comme il y a 1000 ans. D’autre part, le lieu-dit<br />
Rigourdaine (le gué <strong>de</strong> Gardaine) est situé sur l’autre<br />
rive <strong>de</strong> la Rance. Sous réserve <strong>de</strong> fouilles archéologiques,<br />
ce site pourrait faire référence à la ville <strong>de</strong><br />
Gardaine citée dans le Roman d’Aquin.<br />
L4-022 - Le site <strong>de</strong> l’Anse <strong>de</strong> Vigneux à St-Suliac.<br />
©<br />
« Et (<strong>de</strong>) Doreit un niés à l’amiré<br />
Qui tient Gardaine la mirable cité,<br />
Qui est assise sur un fleuve dérivé<br />
Bidan a nom celle (esve) en ceul regné.<br />
Jouste la ville avoit un grant fousé,<br />
Jusqu’à la mer est fait et compassé,<br />
Plus <strong>de</strong> XX piez ot la douve <strong>de</strong> lé<br />
Et bien LX <strong>de</strong> hauteur et d’esté. (vers 771-778)<br />
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