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ÉTUDE Regard sur la littérature féminine algérienne

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Elle est sans doute <strong>la</strong> plus connue, <strong>la</strong> plus médiatisée aussi, de nos écrivaines depuis <strong>la</strong> parution de<br />

son premier roman, La Soif (Julliard, 1957) que l’on compara à l’époque au Bonjour tristesse de Françoise<br />

Sagan, œuvre de jeunesse que l’auteure elle-même considérait comme un “ exercice de style ”.<br />

Deux parties dans sa production : avant et après Femmes d’Alger dans leur appartement (Éditions<br />

des femmes, 1980), cette œuvre marquant un tournant remarquable dans l’ensemble de <strong>la</strong> production.<br />

Ce qu’on peut appeler les romans de jeunesse : La Soif, Les Impatients (Julliard, 1958), Les Enfants<br />

du nouveau monde (Julliard, 1962), Les Alouettes naïves (Julliard, 1967) mettent en scène des jeunes<br />

femmes en qui s’ébauche le caractère des personnages féminins qui viendront ensuite.<br />

Si La Soif apparaît comme en dehors de <strong>la</strong> lutte qui est alors celle du pays, plus préoccupé de<br />

l’intrigue psychologique, Les Impatients, sans faire davantage allusion à <strong>la</strong> tension d’alors (on est en<br />

1958) se déroule cependant dans un contexte plus algérien — le roman est, dit l’auteure, “ une image<br />

d’intérieur d’une maison traditionnelle, avec un patio, un premier étage, des rampes… ” — et le personnage<br />

de <strong>la</strong> jeune fille, Dali<strong>la</strong>, est en révolte contre l’enfermement, <strong>la</strong> tradition, prélude à d’autres révoltes<br />

; s’y amorce aussi une thématique de l’amour marqué, chez l’homme, par le désir de possession et,<br />

chez <strong>la</strong> femme, par le désir d’indépendance, de liberté.<br />

Les Enfants du nouveau monde, construit <strong>sur</strong> l’opposition dedans/dehors, met l’accent <strong>sur</strong> ce qui<br />

deviendra un axe majeur de l’œuvre, le thème de <strong>la</strong> c<strong>la</strong>ustration ; les femmes dans leur majorité n’ont<br />

d’écho de ce qui se passe à l’extérieur que par le biais des hommes qui se font médiateurs ou par ce<br />

qu’elles peuvent voir, de l’intérieur des cours, des combats <strong>sur</strong> <strong>la</strong> montagne dominant <strong>la</strong> ville ; si, comme<br />

Chérifa, elles ont, sous <strong>la</strong> pression des événements, à affronter <strong>la</strong> rue, c’est alors une aventure sans précédent,<br />

bouleversante et qui les expose, les met à nu même sous le voile, et devient geste héroïque, dépassement<br />

de soi.<br />

Les Alouettes naïves, œuvre très riche, installe l’histoire personnelle au cœur de l’histoire collective<br />

(comme le fera avec plus d’ampleur, L’Amour, <strong>la</strong> fantasia). L’Histoire est celle des derniers mois de <strong>la</strong><br />

guerre d’Algérie dans les camps de réfugiés de <strong>la</strong> frontière tunisienne, l’histoire individuelle est celle du<br />

personnage central, N’fissa, maquisarde emprisonnée puis libérée, et de <strong>la</strong> passion qui <strong>la</strong> lie à Rachid ; <strong>la</strong><br />

description de cette passion est d’une grande beauté mais <strong>la</strong> conception de l’amour qui <strong>la</strong> sous-tend est<br />

assez pessimiste, autre constante de l’œuvre : entre l’homme et <strong>la</strong> femme, un conflit fondamental mène à<br />

<strong>la</strong> séparation, échec inexorable ainsi formulé en fin de parcours : “ Car je sais à l’avance — vieux préjugé<br />

? — que <strong>la</strong> guerre qui finit entre les peuples renaît entre les couples ”.<br />

En 1980 et après un long silence dû, selon l’auteure, au fait que dans Les Alouettes…, elle arrivait “ à<br />

<strong>la</strong> limite de l’autobiographie ”, ce qui, alors, semble l’effrayer, paraît Femmes d’Alger dans leur appartement<br />

qui regroupe des textes écrits <strong>sur</strong> une vingtaine d’années ; son titre, <strong>la</strong> couverture reproduisant le<br />

tableau de De<strong>la</strong>croix — comme les couvertures des romans suivants, L’Amour, <strong>la</strong> fantasia, Vaste est <strong>la</strong><br />

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