<strong>Le</strong> château <strong>de</strong> <strong>Pont</strong>-d’Ain, <strong>place</strong> <strong>militaire</strong> <strong>et</strong> rési<strong>de</strong>nce <strong>comtale</strong> : nouvelles données livrées par les textes <strong>et</strong> l’archéologie du bâti Chantal Delomier <strong>et</strong> Alain Kersuzan Une fois c<strong>et</strong>te tour maîtresse achevée en 1303, <strong>Pont</strong>-d’Ain <strong>de</strong>vient le centre d’une châtellenie nouvelle, dont une partie importante du man<strong>de</strong>ment territorial est composé par ce qui a été r<strong>et</strong>iré <strong>de</strong> la châtellenie <strong>de</strong> Saint-André-en‐Revermont. <strong>Le</strong> premier châtelain en est Guillaume Musi, qui remplit également l’office <strong>de</strong> péager. À sa gestion <strong>de</strong>s constructions s’ajoutent celles <strong>de</strong>s œuvres tenus par d’autres officiers jusqu’en 1306 8 . Durant ce temps, on s’est employé au creusement du fossé, ainsi qu’ l’édification <strong>de</strong> la tour-porche <strong>de</strong> l’entrée principale du château <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>s murs adjacents <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre, enfin à la construction jusqu’au premier niveau <strong>de</strong> la porte orientale (dite porte « d’Oussiat ») <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> <strong>Pont</strong>-d’Ain <strong>et</strong> <strong>de</strong> la muraille crénelée menant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te porte jusqu’à l’Ain. En 1305, à partir du mur nord <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> tour, avec un r<strong>et</strong>rait <strong>de</strong> 2,60 mètres par rapport à l’angle nord ouest, on construit, avec les pierres provenant <strong>de</strong> l’élargissement <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’approfondissement du fossé, une forte courtine dite « triplée » : sa hauteur est égale à trois fois l’unité <strong>de</strong> hauteur standardisée à 2,50 toises (4,70 mètres) pour les constructions princières du comté <strong>de</strong> Savoie (ce standard avait été établi dès le <strong>de</strong>rnier tiers du xiii e siècle 9 ); la courtine s’élevait donc à 14,10 mètres environ. Au pied <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> tour, une poterne est ménagée dans c<strong>et</strong>te courtine. De l’autre côté <strong>de</strong> la tour maîtresse, la palissa<strong>de</strong> est renforcée <strong>et</strong> <strong>de</strong>scend en pente rai<strong>de</strong> jusqu’à une maison noble appartenant au sire Albert d’Ambronay, près <strong>de</strong> la porte ouest <strong>de</strong> la ville (dite « <strong>de</strong> Varambon ») que l’on construit à c<strong>et</strong>te époque avec les pierres tirées du fossé creusé <strong>de</strong>vant elle. C<strong>et</strong>te maison se trouve à proximité du pont <strong>et</strong> <strong>de</strong> la rive <strong>de</strong> l’Ain. Des constructions en bois <strong>et</strong> en encorbellement, que les comptes appellent <strong>de</strong>s échiffes 10 , défen<strong>de</strong>nt c<strong>et</strong>te palissa<strong>de</strong>. Cependant dès le printemps 1306, c<strong>et</strong>te palissa<strong>de</strong> est remplacée par une courtine en pierre dont le parap<strong>et</strong> est crénelé. Durant tout ce temps, pour protéger <strong>et</strong> défendre en permanence le pont comme le chantier, une garnison est installée dans les tours en bois (chaffaux) situées aux extrémités <strong>et</strong> au milieu du pont. De temps à autre, selon les rapports d’espions qui parcourent sans cesse les terres ennemies 11 , c<strong>et</strong>te garnison est renforcée par <strong>de</strong>s clients venant <strong>de</strong> la châtellenie <strong>de</strong> Saint- Andréen‐Revermont (sur‐Suran <strong>de</strong> nos jours). Pendant <strong>de</strong>ux années (du 5 mars 1306 au 24 juin 1308), les comptes témoignent d’un énorme travail effectué dans le fossé pour joindre les trois tronçons, pour élargir le fossé <strong>et</strong> l’approfondir, <strong>et</strong> enfin pour y récupérer une gran<strong>de</strong> masse <strong>de</strong> matériaux nécessaires à la construction <strong>de</strong>s courtines <strong>et</strong> <strong>de</strong>s autres tours du château. C’est en 1307-1308 que la tour dite neuve est élevée à l’extrémité <strong>de</strong> la courtine « triplée ». Comme pour la gran<strong>de</strong> tour, l’entrée est pratiquée au premier étage. La poutraison <strong>de</strong>s étages n’est réalisée qu’en juin 1311, sans doute à cause <strong>de</strong>s dépenses importantes liées à la guerre ; d’ailleurs, durant tout ce temps, on a constamment élargi <strong>et</strong> approfondi le fossé, muré <strong>et</strong> démuré les portes <strong>de</strong> la ville comme les accès au château. En 1314, un accord est signé à Villars-Benoit. Quoiqu’il ne soit pas vraiment respecté, on y r<strong>et</strong>rouve la mention <strong>de</strong>s moyens financiers perm<strong>et</strong>tant entamer d’importants travaux <strong>de</strong> construction : courtines, tours nouvelles, tours surélevées. C’est ainsi qu’en 1315, par une l<strong>et</strong>tre écrite au château <strong>de</strong> Ripaille (Haute-Savoie) <strong>et</strong> datée du 26 mars, le comte <strong>de</strong> Savoie ordonne la construction <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> salle, en indiquant l’endroit <strong>et</strong> les mesures qu’elle doit avoir. 8. <strong>Le</strong>s comptes d’œuvre tenus durant ce temps sont ceux <strong>de</strong> Guillaume <strong>de</strong> Saint-Cyr, B 9015 (2) en 1305, Hudry <strong>de</strong> la Têtière, B 9017 (1) en 1305 <strong>et</strong> (2) en 1306. 9. Pour une compréhension précise <strong>de</strong> l’établissement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te norme <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses valeurs voir Alain KERSUZAN, « L’organisation technique <strong>et</strong> financière <strong>de</strong>s châteaux savoyards dans l’ancienne Manche <strong>de</strong>s Coligny », Étu<strong>de</strong>s savoisiennes 9/10, Chambéry, 2001-2002, p. 169-175. 10. Alain Kersuzan, Défendre la Bresse <strong>et</strong> le Bugey, op. cit., p. 225- 231. 11. <strong>Le</strong>s terres ennemies sont les terres dauphinoises, genevoises <strong>et</strong> celles <strong>de</strong> Thoire Villars ; la guerre qui les oppose à la Savoie durera jusqu’en 1355.
<strong>Le</strong> château <strong>de</strong> <strong>Pont</strong>-d’Ain, <strong>place</strong> <strong>militaire</strong> <strong>et</strong> rési<strong>de</strong>nce <strong>comtale</strong> : nouvelles données livrées par les textes <strong>et</strong> l’archéologie du bâti Chantal Delomier <strong>et</strong> Alain Kersuzan 3. Plan du château <strong>de</strong> <strong>Pont</strong>-d’Ain ; <strong>de</strong>ssin <strong>de</strong> l’auteur. 3 1. Gran<strong>de</strong> tour 2. Tour neuve 3. Tour du châtelain 4. Tour « Mancisse » 5. Tour du « portier » 6. Fausses tours 7. Barbacane 8. Aula 9. Chapelle 10. Loges 11. Pral<strong>et</strong> 12. Recept 13. Chambre <strong>et</strong> tour du gardien 14. Maréchalerie 15. Cuisine 16. Maison du four <strong>et</strong> du grenier 17. « Dos d’âne »
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