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DossIer<br />
Économies et solidarité<br />
À l’heure où un nombre croissant de famil<strong>le</strong>s ont des difficultés pour financer la cantine scolaire,<br />
des établissements réfléchissent à des modes de restauration alternatifs<br />
pour concilier impératifs économiques et solidarité.<br />
Depuis la rentrée 2010, l’éco<strong>le</strong> Saint-<br />
Joseph de Loiron (Mayenne) s’est<br />
engagée dans une démarche novatrice<br />
: « Nous étions confrontés à un véritab<strong>le</strong><br />
problème : alors que nous accueillons<br />
des enfants venus des communes limitrophes,<br />
la cantine municipa<strong>le</strong> ne<br />
facture pas <strong>le</strong> même prix pour <strong>le</strong>s<br />
élèves de la commune et ceux des<br />
environs. La différence, de l’ordre<br />
de 2 euros par repas, devenait<br />
insoutenab<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s qui<br />
ont de plus en plus de mal à joindre<br />
<strong>le</strong>s deux bouts », explique la<br />
directrice, Stéphanie Joré. Face<br />
à cette situation, l’établissement<br />
a décidé de proposer aux parents<br />
concernés de préparer des<br />
« paniers-repas » à réchauffer à<br />
l’heure du déjeuner. « Nous avons<br />
toutefois bien précisé <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s :<br />
<strong>le</strong>s repas devaient être équilibrés.<br />
Ils devaient comporter une entrée,<br />
un plat chaud et un dessert, tandis<br />
que <strong>le</strong>s sodas, <strong>le</strong>s chips et autres bonbons<br />
étaient bannis », poursuit la responsab<strong>le</strong><br />
qui a profité de cette situation pour faire de<br />
l’éducation à l’alimentation…<br />
La formu<strong>le</strong> a immédiatement rencontré<br />
un franc succès. Assez rapidement, ce sont<br />
une vingtaine d’élèves, de la maternel<strong>le</strong> au<br />
CM2, qui sont arrivés <strong>le</strong> matin avec une<br />
petite glacière à la main. Et quel<strong>le</strong> ne fut pas<br />
la surprise de l’équipe aux commandes de<br />
cette éco<strong>le</strong> de découvrir que loin des<br />
risques de ségrégation que cette initiative<br />
aurait pu engendrer, <strong>le</strong> dispositif a, au<br />
contraire, fait un grand nombre d’adeptes,<br />
y compris auprès d’enfants qui ne faisaient<br />
pas a priori partie du public cib<strong>le</strong>. « Une<br />
majorité d’élèves panachent, allant alternativement<br />
à la cantine ou mangeant sur<br />
place », observe la directrice. Certains préfèrent<br />
en effet déjeuner dans la grande sal<strong>le</strong><br />
transformée en réfectoire que de marcher,<br />
surtout l’hiver, pendant un quart d’heure<br />
pour rallier la cantine municipa<strong>le</strong>. « Les<br />
enfants ont éga<strong>le</strong>ment apprécié <strong>le</strong> calme<br />
qui régnait chez nous par comparaison au<br />
bruit de la cantine qui accroît <strong>le</strong>ur stress »,<br />
LAURENCE ESTIVAL<br />
remarque Stéphanie Joré. Sans compter<br />
ceux enchantés à l’idée de trouver dans <strong>le</strong>ur<br />
assiette des mets choisis par <strong>le</strong>ur maman en<br />
fonction de <strong>le</strong>urs goûts…<br />
À l’éco<strong>le</strong> Saint-Joseph de Loiron (Mayenne), c’est l’heure des paniers-repas.<br />
Mais la réussite de cette expérience tient<br />
éga<strong>le</strong>ment aux initiatives prises par l’établissement<br />
pour transformer ce temps de<br />
déjeuner en instants de partage. « Nous<br />
avons incité <strong>le</strong>s grands à venir aider <strong>le</strong>s<br />
petits. C’est pour eux un moyen de vivre au<br />
quotidien la solidarité », raconte la directrice.<br />
Par ail<strong>le</strong>urs, en plus du réfrigérateur et<br />
du four à micro-ondes, acquis pour l’occasion,<br />
l’éco<strong>le</strong> a mis un point d’honneur à<br />
organiser une aire de jeux pour recevoir <strong>le</strong>s<br />
enfants après <strong>le</strong> déjeuner. « Nous avons, là<br />
aussi, fait jouer la solidarité : <strong>le</strong>s parents<br />
nous ont apporté des jeux que <strong>le</strong>urs enfants<br />
avaient délaissés. Nous avons complété ce<br />
premier échantillon en parcourant <strong>le</strong>s videgreniers<br />
», se souvient Stéphanie Joré.<br />
Quadrature du cerc<strong>le</strong><br />
Des expériences similaires sont éga<strong>le</strong>ment<br />
conduites dans d’autres établissements<br />
avec <strong>le</strong>s mêmes résultats à la clé.<br />
« Au départ, quand nous avons institué <strong>le</strong>s<br />
paniers-repas, nous avions nous aussi<br />
beaucoup de craintes. Mais loin de diviser<br />
<strong>le</strong>s élèves, cette initiative n’a fait que renfor-<br />
cer la cohésion dans la mesure où nous<br />
avons fait en sorte qu’ils se retrouvent tous<br />
autour de la même tab<strong>le</strong> dans notre réfectoire<br />
», raconte Benoît Lecoutère, ancien<br />
directeur d’un établissement de la banlieue<br />
lilloise qui vient de mettre <strong>le</strong> cap sur l’ensemb<strong>le</strong><br />
scolaire Jean-Baptiste-de-La-<br />
Sal<strong>le</strong> - Notre-Dame-de-la-Compassion<br />
à Saint-Denis (Seine-Saint-<br />
Denis).<br />
Aussi intéressante soit-el<strong>le</strong>, cette<br />
formu<strong>le</strong> de paniers-repas n’est malheureusement<br />
pas généralisab<strong>le</strong>.<br />
El<strong>le</strong> est en effet plus diffici<strong>le</strong> à mettre<br />
en place dans un grand établissement<br />
car il faut du personnel<br />
pour réchauffer <strong>le</strong>s plats, veil<strong>le</strong>r sur<br />
<strong>le</strong>s élèves... En outre, <strong>le</strong>s parents<br />
n’ont pas toujours <strong>le</strong> temps ni l’habitude<br />
de préparer un repas la veil<strong>le</strong><br />
au soir. « Pour autant, il n’est pas<br />
concevab<strong>le</strong> que, faute de moyens,<br />
des enfants renoncent au déjeuner<br />
», ajoute Benoît Lecoutère,<br />
actuel<strong>le</strong>ment à la recherche d’un autre dispositif<br />
pour permettre aux famil<strong>le</strong>s modestes<br />
dont <strong>le</strong>s enfants fréquentent l’établissement<br />
de pouvoir bénéficier de la cantine. La possibilité<br />
de demander une contribution financière<br />
supplémentaire aux parents, un temps<br />
envisagée, ne semb<strong>le</strong> pas une solution réel<strong>le</strong>ment<br />
possib<strong>le</strong>. « De plus en plus de famil<strong>le</strong>s<br />
ont aujourd’hui des problèmes, et l’élan de<br />
solidarité risque d’être de courte durée »,<br />
poursuit <strong>le</strong> directeur qui prévoit du coup de<br />
se tourner vers <strong>le</strong>s entreprises pour <strong>le</strong>s inciter<br />
à desserrer el<strong>le</strong>s aussi <strong>le</strong>s cordons de la<br />
bourse. En sachant toutefois que cel<strong>le</strong>s-ci<br />
sont éga<strong>le</strong>ment fortement sollicitées…<br />
Comme Benoît Lecoutère, <strong>le</strong>s chefs d’établissement<br />
sont confrontés à cette quadrature<br />
du cerc<strong>le</strong> : concilier <strong>le</strong>s impératifs<br />
économiques et la solidarité. Partout <strong>le</strong>s<br />
réf<strong>le</strong>xions vont bon train, mais personne n’a<br />
encore trouvé de remède mirac<strong>le</strong>. Dans <strong>le</strong><br />
Morbihan, c’est <strong>le</strong> conseil général qui a choisi<br />
de faire un geste en accordant une subvention<br />
aux élèves boursiers qui fréquentent <strong>le</strong>s<br />
collèges tant publics que privés. « Cette aide<br />
est la bienvenue mais el<strong>le</strong> ne permet pas de<br />
D. R.<br />
38 <strong>Enseignement</strong> catholique actualités N° 345, octobre-Novembre 2011