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juste des médIateurs »
« libérer la parole » d’abord, plutôt que
de recourir à la sanction sans préavis, et
ce d’autant plus qu’« à observer les jeunes
de cet âge, il apparaît clairement que ce
sont leurs pairs qu’ils écoutent et qui les
marquent le plus », souligne Nathalie
Gaillard. Mais cela ne s’improvise pas :
en début d’année, les futurs médiateurs
reçoivent une formation d’une dizaine
d’heures, dispensée par la psychologue
et l’un des professeurs volontaires associés
au dispositif. Une étape nécessaire, selon
la psychologue : « Beaucoup ne viennent
pas là par hasard, la démarche fait souvent
écho à leur histoire. »
Connus et reconnus
Derrière, un travail d’équipe solide est
à l’œuvre : en aucun cas, ce projet ne se
substitue aux responsabilités des adultes.
Ceux-ci se chargent de la mise en place
D. R.
Milan : Je ne pensais pas que l’on pouvait avoir une telle responsabilité en tant
qu’élève. Il n’y a pas beaucoup d’occasions comme celle-là à l’école. Ça nous fait
tous réfléchir à notre comportement.
Océane : Cela nous a apporté à chacun quelque chose de différent. Certains ont
appris à se calmer et à se réguler. D’autres ont appris à prendre la parole, à aller
vers les autres, à prendre confiance, même s’ils ont en face quelqu’un avec trois
têtes de plus. Pour moi qui veux travailler avec les enfants, cela m’a fait prendre
conscience que c’était vraiment avec les tout-petits que je voulais être.
Lucas : On a un rôle de lien important. Il y a plein de dysfonctionnements que
les adultes ne peuvent pas sentir ou deviner. Alors que nous on peut. Et on est
toujours à deux pour être plus justes et pour voir qu’il y a toujours au moins
deux solutions.
Amandine : C’est ça la différence entre les médiateurs et les surveillants. On s’intéresse
aux relations et on essaie de faire en sorte que chacun trouve sa place. On repère
les plus isolés dans la cour, ceux qui sont seuls, ceux qui sont tristes…
Océane : Cela aide l’école à devenir un lieu vivable. Même si on traîne un peu des
pieds parfois pour y venir, on y est quand même beaucoup, et mieux vaut contribuer
à s’y sentir bien, en paix et en sécurité.
Lucas : Cela a changé la relation avec les adultes. Pas trop avec les enseignants mais
avec la surveillante qui s’occupe de nous. On l’a regardée autrement, on a compris
le sens de son action, qu’elle n’est pas notre ennemie, que ce qu’elle fait c’est pour
notre bien. Avec les remplaçants c’est moins évident, ils nous prennent pour des
sous-surveillants et il faut leur réexpliquer.
Océane : On a chacun une mission et il faut qu’elle soit respectée. Si par exemple
on nous coupe la parole devant tout le monde lorsque l’on agit dans la cour, tout
ce que l’on essaie de mettre en place s’effondre.
Marwane : Pour que ça marche, il faut aussi que l’on reste tout le temps des
exemples, même lorsque l’on ne porte pas notre brassard. Si un jour on leur fait
la leçon et que le jour d’après, ils nous voient en train de faire le contraire, on
n’est pas crédibles.
Milan : On prend sur notre temps de midi volontairement, gratuitement. Pas pour
avoir une meilleure note. C’est important, sinon on ne le fait pas dans le bon esprit.
Océane : Mais c’est quand même agréable d’avoir des diplômes en fin d’année et
que les adultes nous félicitent. On se dit qu’on est reconnus, qu’on est des relais
importants. On n’a pas souvent l’occasion de se faire féliciter par
le chef d’établissement, les surveillants, le CPE !
Lucas : Cette expérience peut nous servir au-delà de l’école. Si on la met
dans notre CV, ça montre que l’on peut compter sur nous !
Propos recueillis par Aurélie Sobocinski
Tous les médiateurs sont fiers de leur diplôme.
de la médiation via une surveillante « passionnée
», Fabienne Nemoz, référente
pour les horaires, les plannings, l’affichage
des photos des médiateurs et les temps
d’échange avec ces derniers pour revenir
notamment sur les notes laissées dans le
cahier après chaque intervention et sur
leurs éventuelles difficultés… L’équipe
de la vie scolaire reste toujours par ailleurs
« en proximité » dans la cour pour prendre
le relais des médiateurs lorsque le processus
coopératif atteint ses limites et
que le dialogue cède le pas à la confrontation
physique...
Un peu chahutés au début, aujourd’hui
connus et reconnus, Marwane, Lucas et
leurs amis apparaissent comme des
« grands frères »bienveillants qui « rendent
service » à toute la communauté. « Ils se
sentent co-créateurs d’un climat beaucoup
plus serein, apaisé », souligne Bernard
Loubier. De quoi interpeller et transformer
le regard des adultes eux-mêmes : « En
brisant la loi du silence, la médiation
réinterroge le statut et la place de la parole
de l’élève au sein de nos établissements,
et appelle un changement profond de posture.
C’est à nous d’être “contenants”
pour aider les jeunes à devenir sujets
de leur construction sociale », ajoute
Dominique Campana, le directeur de Saint-
Charles. Désireuse d’initier une nouvelle
génération de médiateurs, l’équipe vient
de lancer un nouveau projet en 6 e .
1. Adresse : 1 place des Capucins, BP 267 – 38217 Vienne
Cedex. Internet : www.institution-saint-charles.fr
Contact : college@institution-saint-charles.fr
N° 345, octobre-Novembre 2011 Enseignement catholique actualités 49