12.07.2015 Views

Ma plus belle histoire - Base de données en alphabétisation des ...

Ma plus belle histoire - Base de données en alphabétisation des ...

Ma plus belle histoire - Base de données en alphabétisation des ...

SHOW MORE
SHOW LESS
  • No tags were found...

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Recueil <strong>de</strong> textes publié par la Fédération <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>tet la C<strong>en</strong>trale <strong>de</strong>s syndicats du Québec320, Saint-Joseph Est, bureau 100, Québec (Québec) G1K 9E7Coordination du projetAlec LaroseComité <strong>de</strong> sélectionValérie Beaulieu, Gaston Beauregard, Emmanuelle Béguineau, Nathalie-Patricia Bélanger,Jean-François Boivin, Sébasti<strong>en</strong> Bouchard, Laurier Caron, Thérèse Cyr, Caroline Dessouroux,<strong>Ma</strong>rtin Dubé, Jean Dumais, Diane Dupuis, Lise Gravel, Guylaine Guèvremont, Lucie Hallé,Christine Isa<strong>belle</strong>, Fanny Lamache, Sylvie Lemieux, Annie Lepage, Pascal Morissette, JoëlleRivet-Sabourin, Mélissa Savard, Josée Scalabrini, <strong>Ma</strong>rc Séguin, <strong>Ma</strong>rie-Clau<strong>de</strong> Séguin, PaulSt-Hilaire, Monique Talbot, Élaine Thibo<strong>de</strong>au, Jacques Tondreau, Daniel Verreault, avec <strong>de</strong>sremerciem<strong>en</strong>ts particuliers à Isa<strong>belle</strong> Gagnon, Annie-Clau<strong>de</strong> Lachance, Éric Laroche, AlecLarose, Ariane Leblanc-Vinc<strong>en</strong>t, Frédéric <strong>Ma</strong>ltais et Mélanie Ruel pour leur temps et leurénergie, ainsi qu’à l’équipe <strong>de</strong> volontaires <strong>de</strong> l’Association <strong>de</strong>s retraitées et retraités <strong>de</strong>l’éducation et <strong>de</strong>s autres services publics du Québec (AREQ-CSQ) qui s’est investie sousla coordination dynamique <strong>de</strong> Jacques Boucher et <strong>de</strong> Paulyne Laplante : Claire Barry,Solange Bélanger, Réjean B<strong>en</strong>oit, Louise Bergeron, Hélène Bleau Fortin, Michel Caron,<strong>Ma</strong><strong>de</strong>leine Daigle, Nicole Gagnon, Claire Guay, D<strong>en</strong>ise Lachance, Jacqueline Lachance, LiseLaframboise, Nycole Lamarche, Rita Lapointe, Micheline Laviolette, Claire L’Itali<strong>en</strong>, ClaireMercier, Johanne Mercier, Lucille Pettigrew, Louis-<strong>Ma</strong>rie Pichette, Cécile Richard, DanielleRon<strong>de</strong>au, <strong>Ma</strong>rcelle Sauvageau, Francine Simard, Aline Tremblay et Louise Voyer.SecrétariatAnnie-Clau<strong>de</strong> Lachance et Mélanie Ruel, avec la collaboration <strong>de</strong> Guylaine Guèvremont,Ariane Leblanc-Vinc<strong>en</strong>t, Mélissa Savard et Monique Talbot.RelectureMicheline Jean, <strong>Ma</strong>rtine Lauzon et Susy BélangerDiffusionAlec LaroseImpression<strong>Ma</strong>rquis Imprimeur Inc.Tirage6 000 exemplairesDépôt légalBibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du CanadaISBN 978-2-89061-117-7FSE, CSQ, 2013


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Dix <strong>belle</strong>s années d’<strong>histoire</strong>s inspirantesIl y a <strong>de</strong> ces anniversaires quisont <strong>plus</strong> agréables qued’autres à souligner. C’est lecas du concours <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong><strong>histoire</strong>, cette <strong>belle</strong> av<strong>en</strong>turedéjà r<strong>en</strong>due à sa dixièmeédition.Avec raison, la Fédération <strong>de</strong>ssyndicats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t(FSE-CSQ) peut être fière <strong>de</strong>cette initiative originale réalisée <strong>en</strong> collaboration avec la CSQ. <strong>Ma</strong>is celleset ceux à qui revi<strong>en</strong>t la <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong> part <strong>de</strong> la fierté, ce sont certainem<strong>en</strong>tces c<strong>en</strong>taines d’adultes, <strong>plus</strong> <strong>de</strong> 3 000 au fil <strong>de</strong>s ans, qui ont trouvé lecourage <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ir à l’école, d’appr<strong>en</strong>dre et d’oser écrire une <strong>histoire</strong>,parfois leur propre <strong>histoire</strong>. À travers leur participation au concours, cesadultes exprim<strong>en</strong>t leur volonté <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre leur place dans la société, <strong>de</strong>pr<strong>en</strong>dre la parole, d’être <strong>de</strong>s citoy<strong>en</strong>nes et <strong>de</strong>s citoy<strong>en</strong>s à part <strong>en</strong>tière.Ces c<strong>en</strong>taines <strong>de</strong> textes sont autant <strong>de</strong> leçons <strong>de</strong> vie qui nous sont transmises.Derrière chacun d’eux, qu’il s’agisse <strong>de</strong> prose ou <strong>de</strong> poésie, setrouve une personne qui a décidé <strong>de</strong> vaincre les obstacles qui limitai<strong>en</strong>t sonhorizon pour se dépasser grâce aux appr<strong>en</strong>tissages et aux connaissancesacquises à l’école.Une bonne part <strong>de</strong> fierté revi<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t aux <strong>en</strong>seignantes et aux <strong>en</strong>seignantstravaillant à la formation générale <strong>de</strong>s adultes qui sont les véritablesartisans <strong>de</strong> ces vies transformées. C’est égalem<strong>en</strong>t grâce à leur souti<strong>en</strong> quele concours pr<strong>en</strong>d forme chaque année. Il faut égalem<strong>en</strong>t souligner laprécieuse contribution <strong>de</strong> leurs représ<strong>en</strong>tantes et représ<strong>en</strong>tants syndicaux,ainsi que <strong>de</strong>s nombreux part<strong>en</strong>aires.À ces écrivaines et écrivains <strong>en</strong> herbe qui ont noirci, sous l’inspiration <strong>de</strong>leur cœur et <strong>de</strong> leur intellig<strong>en</strong>ce, les pages <strong>de</strong> <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, à leurs<strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants, à tous ceux et celles qui ont aidé à nourrir,<strong>de</strong>puis tant d’années, cette <strong>belle</strong> av<strong>en</strong>ture : joyeux 10 e anniversaire !<strong>Ma</strong>non Bernard, prési<strong>de</strong>nteFédération <strong>de</strong>s syndicats<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ)Louise Chabot, prési<strong>de</strong>nteC<strong>en</strong>trale <strong>de</strong>s syndicatsdu Québec (CSQ)3


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>On annonçait la fin du mon<strong>de</strong>, mais notre bébé esttoujours vivant ! Dix ans ! Qui l’aurait cru ? Notrebébé, <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, a aujourd’hui dix ans !Une déc<strong>en</strong>nie <strong>de</strong> beaux témoignages, heureux etdouloureux, et <strong>de</strong> <strong>belle</strong>s surprises sous forme <strong>de</strong>narrations, <strong>de</strong> poèmes et <strong>de</strong> fictions. Dix ans <strong>de</strong>fierté ! Fierté <strong>de</strong> voir une consœur ou un confrèreporter un projet d’écriture avec ses élèves, ceux-cise réaliser, un projet pédagogique et personnelrejaillir sur l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s personnes fréqu<strong>en</strong>tant lec<strong>en</strong>tre où l’on travaille. Fierté aussi <strong>de</strong> savoir que la majorité <strong>de</strong>s équipes<strong>en</strong>seignantes <strong>de</strong>s c<strong>en</strong>tres <strong>de</strong> la province participe à cette œuvre <strong>de</strong> prise <strong>de</strong>parole et se démarque <strong>de</strong>s autres secteurs <strong>en</strong> publiant les uns dans unrecueil et <strong>en</strong> sout<strong>en</strong>ant les autres d’autres manières.Tout ça parce qu’un jour, une vice-prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> la FSE a cru <strong>en</strong> l’importance<strong>de</strong> trouver une activité qui permettrait à la FGA <strong>de</strong> mieux se faireconnaître et ainsi pr<strong>en</strong>dre la place qui lui rev<strong>en</strong>ait dans cette gran<strong>de</strong>machine du mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’éducation. Trop souv<strong>en</strong>t, le courage et la détermination<strong>de</strong> celles et ceux qui déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> se donner une secon<strong>de</strong> chance <strong>en</strong>retournant aux étu<strong>de</strong>s pass<strong>en</strong>t inaperçus. Créer ce concours littéraire, c’estainsi souligner leurs qualités et combler leurs lacunes <strong>en</strong> leur donnant lapossibilité <strong>de</strong> s’exprimer.Grâce à l’idée originale d’un conseiller, d’une vice-prési<strong>de</strong>nte ainsi qu’àquelques collaborateurs invisibles qui y ont cru dès le départ, nous sommesrapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t passés d’une soixantaine <strong>de</strong> participantes et participants, audébut, à <strong>plus</strong> <strong>de</strong> 500 aujourd’hui !Merci particulièrem<strong>en</strong>t à Pierre, à Paula ainsi qu’aux invisibles du débutpour cette <strong>belle</strong> initiative. D’ailleurs, je laisse à Paula, <strong>en</strong> cette année <strong>de</strong>fête, l’espace pour, à sa façon, participer à ce concours : à son concours !Et si l’on m’avait dit…Que dix ans <strong>plus</strong> tard je serais là à t’écrire, j’auraissouri sans nul doute.Écrire sa <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> est une œuvre d’art quel’on trace d’abord pour soi… et puis après… onaccepte <strong>de</strong> la partager, <strong>de</strong> l’exposer, tout comme lefont les vrais artistes.4


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Appr<strong>en</strong>dre à lire, appr<strong>en</strong>dre à écrire ce n’est pas facile, mais ô combi<strong>en</strong><strong>plus</strong> difficile d’accepter <strong>de</strong> s’écrire !À chacune et chacun son <strong>histoire</strong>, tantôt <strong>belle</strong>, tantôt triste, mais jamaisinutile à raconter. Des c<strong>en</strong>taines d’<strong>histoire</strong>s nous ont parlé <strong>de</strong> départs et <strong>de</strong>retours, d’amours perdus et retrouvés, d’espoirs <strong>en</strong> la vie, d’utopies etd’humour.Il <strong>en</strong> reste pour soi et les autres une marque dans le rétroviseur <strong>de</strong> la vie,une petite lumière qui, quoique vacillante certains soirs, jamais ne s’éteint.Ce recueil d’<strong>histoire</strong>s témoigne du dépassem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> soi <strong>de</strong>s appr<strong>en</strong>antes etappr<strong>en</strong>ants adultes qui ont osé le passage du doute à l’action et il veut ainsi,<strong>en</strong> ce dixième anniversaire, leur r<strong>en</strong>dre hommage.Pour avoir osé, un seul mot : bravo !Sans l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos nombreux part<strong>en</strong>aires, jamais ce beau projet n’aurait pusurvivre à travers les années. Donc, manquant un peu d’originalité, maisétant convaincues <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> remercier l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s ayantpris part à cette activité <strong>de</strong>puis 10 ans, MERCI à l’AREQ, aux protectionsRésAut, à SSQ Groupe financier, à la Caisse Desjardins <strong>de</strong> l’Éducation, auxLibrairies indép<strong>en</strong>dantes du Québec, à l’ICÉA, à la CSQ, à notre compliceet parrain, M. JiCi Lauzon ! Enfin, MERCI aussi à la dynamique équipe <strong>de</strong> laFSE, sous la supervision d’Alec Larose et <strong>de</strong> Jacques Boucher, qui nous apermis <strong>de</strong> vous prés<strong>en</strong>ter ce petit bijou pour notre 10 e anniversaire <strong>de</strong>publication !On poursuit maint<strong>en</strong>ant, espérant pouvoir un jour célébrer notre 20 e !Paula Duguay, ex-vice-prési<strong>de</strong>nteFédération <strong>de</strong>s syndicats<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ)Josée Scalabrini, vice-prési<strong>de</strong>nteFédération <strong>de</strong>s syndicats<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ)5


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Chez certaines personnes, écrire peut être unesource <strong>de</strong> libération, <strong>de</strong> fierté et <strong>de</strong> motivation.Chez d’autres, c’est l’occasion <strong>de</strong> se remémorer <strong>de</strong>doux mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> leur <strong>en</strong>fance ou <strong>de</strong> leuradolesc<strong>en</strong>ce.Cep<strong>en</strong>dant, dans tous les cas, cela pr<strong>en</strong>d une dose<strong>de</strong> courage et d’abnégation pour livrer un messagequi sera, <strong>en</strong>tre autres, lu par ses pairs.Je ti<strong>en</strong>s à souligner l’effort et l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tousces élèves adultes qui ont participé à la réalisation <strong>de</strong> ce recueil <strong>de</strong> textes.L’AREQ, par l’intermédiaire <strong>de</strong> ses bénévoles, est heureuse <strong>de</strong> contribuer àl’élaboration <strong>de</strong> ce projet <strong>en</strong> procédant à la lecture <strong>de</strong> tous les textes soumiset <strong>en</strong> faisant ainsi <strong>de</strong>s choix judicieux.Que le 10 e anniversaire <strong>de</strong> ce projet d’<strong>en</strong>vergure soit le gage d’une collaborationpour les années futures <strong>en</strong>tre la FSE et l’AREQ.Félicitations à celles et ceux dont le texte a été primé.Pierre-Paul Côté, prési<strong>de</strong>ntAssociation <strong>de</strong>s retraitées et retraités <strong>de</strong> l’éducationet <strong>de</strong>s autres services publics du Québec (AREQ-CSQ)6


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Un concours qui grandit et qui fait grandir !C’est avec une gran<strong>de</strong> fierté que j’applaudis une fois<strong>en</strong>core tous ceux et celles qui ont fait du concoursune si <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> ! Cela fait maint<strong>en</strong>ant dix ansque <strong>de</strong>s milliers d’interv<strong>en</strong>antes et d’interv<strong>en</strong>antss’investiss<strong>en</strong>t dans ce projet formateur et inspirant.Dix ans que jeunes et moins jeunes appr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à seraconter grâce à une meilleure connaissance et à unmeilleur usage <strong>de</strong> la langue française. Succès phénoménal! Les bilans sont <strong>plus</strong> que positifs ! Desplans d’expansion dans la francophonie internationalesont à l’étu<strong>de</strong>, Facebook sans fautes est peut-être même pour bi<strong>en</strong>tôt…Je vous le dis ! Tk !Non, mais dix ans et l’<strong>en</strong>gouem<strong>en</strong>t ne faiblit pas, bi<strong>en</strong> au contraire ! Lesparticipantes et participants ont été <strong>en</strong>core nombreux cette année et nosbénévoles ont été au r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous, elles et eux aussi. Cela donne ce beaurecueil que vous t<strong>en</strong>ez <strong>en</strong>tre les mains. Cela contribue à <strong>en</strong>richir culturellem<strong>en</strong>tla société. Cela ai<strong>de</strong> à mieux parler à celles et ceux que l’on aime,tout comme à celles et ceux que l’on aime moins. Le verbe a <strong>de</strong>s vertuspacifiques, c’est connu. Il est préférable d’<strong>en</strong> v<strong>en</strong>ir aux mots plutôt qu’auxmains. On peut soit se parler, soit aller faire tinter <strong>de</strong>s chaudrons sur laplace publique pour essayer <strong>de</strong> changer le mon<strong>de</strong>. Je préconise la premièremétho<strong>de</strong>. Jusqu’à ce que le couvercle saute, du moins !Car il s’agit bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> changer le mon<strong>de</strong>, ou à tout le moins <strong>de</strong> l’améliorer,non ? Le si<strong>en</strong> immédiat et celui <strong>de</strong>s autres. Préférablem<strong>en</strong>t les <strong>de</strong>ux <strong>en</strong>même temps, soyons éthiques. Améliorer sa situation sociale passe certainem<strong>en</strong>tpar la maîtrise d’au moins une langue. Certaines et certains vousdiront que <strong>de</strong>ux c’est <strong>en</strong>core mieux ! C’est sûr, trois ou quatre même, cequ’il faut pour travailler aux Nations Unies. Allez-y, foutez-moi un complexe !Non, non. Toutes et tous n’ont pas à avoir les mêmes ambitions ! Ce qui estcertain, c’est qu’il est souhaitable d’<strong>en</strong> connaître au moins une comme ilfaut, une langue. Chez nous, c’est le français. Une langue parfois subtile,parfois compliquée, farceuse, qui va jusqu’à écrire trait d’union sans traitd’union !N’empêche, j’aime lire vos <strong>histoire</strong>s. Les <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre lues à voix haute lors <strong>de</strong>slectures publiques. <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> à moi, c’est qu’un <strong>de</strong> mes par<strong>en</strong>tsm’a inculqué le goût <strong>de</strong> lire. Ça été ma mère, ça aurait pu être mon père.Qu’il y <strong>en</strong> ait eu un, voilà ce qui m’a aidé. Trop souv<strong>en</strong>t, les par<strong>en</strong>ts ne7


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>réalis<strong>en</strong>t pas l’importance <strong>de</strong> l’appr<strong>en</strong>tissage d’une langue et l’impact positifque cela pourrait avoir sur le <strong>de</strong>stin scolaire et le <strong>de</strong>stin social <strong>de</strong> leurs<strong>en</strong>fants. « Avec une langue, on va à Paris ! », lançait souv<strong>en</strong>t ma mère d’unton rieur. Comme pour nous rappeler que bi<strong>en</strong> s’exprimer pouvait nousouvrir <strong>de</strong>s portes, déblayer du chemin ou créer <strong>de</strong>s ponts. Ça m’a marqué,cette foi <strong>en</strong> la parole qu’elle montrait. J’aimais la conviction qu’elle y mettaitquand elle disait ça.Les par<strong>en</strong>ts jou<strong>en</strong>t un rôle irremplaçable dans cet appr<strong>en</strong>tissage fondam<strong>en</strong>talqui comm<strong>en</strong>ce dès la petite <strong>en</strong>fance. Accompagner celles et ceux qui n’ontpas eu la chance d’avoir un par<strong>en</strong>t apte à leur fournir ce passe-partoutqu’est l’acquisition <strong>de</strong> la lecture et <strong>de</strong> l’écriture, voilà ce qu’il y a <strong>de</strong> grandiosedans ce que font les <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants qui se prêt<strong>en</strong>t au jeu<strong>de</strong> MPBH. Enseigner comm<strong>en</strong>t marier les mots, se faire une <strong>histoire</strong>,appr<strong>en</strong>dre à parler pour exister. D<strong>en</strong>rée rare et précieuse que ces éducatriceset éducateurs concernés et pertin<strong>en</strong>ts ! Proposer l’écriture commeoutil pour sortir <strong>de</strong> son mutisme, pour s’affranchir <strong>de</strong> son mal-être solitaireou <strong>en</strong>core pour célébrer la beauté <strong>de</strong> la nature, c’est tout simplem<strong>en</strong>tgénial. Vous me faites heureux porte-parole ! Je gagerais qu’on pourrait allerà Paris avec <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>… J’<strong>en</strong> ai parlé à ma mère, elle seraitd’accord pour nous accompagner !JiCi Lauzon8


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Mot <strong>de</strong> l’équipeQuelle tâche ingrate <strong>de</strong> ne ret<strong>en</strong>ir qu’une petitecinquantaine <strong>de</strong> textes sur 510… et <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir <strong>en</strong>écarter autant alors qu’ils nous ont profondém<strong>en</strong>ttouchés ! Tant d’<strong>histoire</strong>s poignantes et <strong>en</strong>voûtantes,pleines d’espoir et <strong>de</strong> volonté !<strong>Ma</strong>is comm<strong>en</strong>t la sélection se fait-elle, vous<strong>de</strong>man<strong>de</strong>z-vous ?Notre démarche est fondée sur trois principes : lapru<strong>de</strong>nce, l’équité, la cohér<strong>en</strong>ce, le tout <strong>en</strong> recherchantla <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong> objectivité possible. Les textes sont regroupés parservice d’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (<strong>alphabétisation</strong>, 1 er cycle, etc.). Tous les g<strong>en</strong>res ontleur place : poésie, prose, fiction <strong>de</strong> toutes sortes, fait vécu… L’acc<strong>en</strong>t estmis non pas sur l’orthographe, mais sur la qualité <strong>de</strong> la langue <strong>en</strong> général(notamm<strong>en</strong>t la structure <strong>de</strong> la phrase) et, <strong>en</strong> particulier, sur la narration : lacohér<strong>en</strong>ce, le rythme, l’originalité, le caractère inspirant.Chaque texte est d’abord évalué individuellem<strong>en</strong>t et à l’aveugle par troisjurés, qui font partie d’une équipe <strong>de</strong> 70 personnes, composée pour moitié<strong>de</strong> membres <strong>de</strong> l’AREQ et pour moitié <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> la FSE et <strong>de</strong> ses collaborateurs,tous bénévoles. Les notes sont compilées pour déterminer lestextes qui franchiront cette étape.Il faut savoir que, dans le recueil, nous garantissons à chaque service uneplace proportionnelle au nombre <strong>de</strong> textes reçus. Si la francisation a fourni60 textes sur 500, nous <strong>en</strong> publierons donc 6 dans le recueil (sur 50). Parprécaution, nous ferons cheminer au <strong>de</strong>uxième niveau <strong>de</strong> sélection les12 textes ayant la meilleure moy<strong>en</strong>ne, tous ceux dont les notes sont prochesainsi que ceux qui ont une ou <strong>de</strong>ux notes élevées parmi les trois reçues. Cequi pourrait nous m<strong>en</strong>er, par exemple, à un total provisoire <strong>de</strong> 20 <strong>en</strong>francisation.Pour la sélection finale, une équipe responsable d’un service y compare<strong>en</strong>tre eux tous les textes ayant franchi cette étape, <strong>en</strong> <strong>plus</strong>ieurs vagues successives,avec <strong>de</strong> moins <strong>en</strong> moins <strong>de</strong> textes toujours <strong>en</strong> lice. Au total, untexte aura été lu <strong>de</strong> 5 à 11 fois. Une <strong>de</strong>rnière phase permet <strong>en</strong>suite d’attribuerles prix spéciaux.9


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Par conséqu<strong>en</strong>t, que tous ceux et celles qui ont pris leur courage à <strong>de</strong>uxmains pour partager ces mots sach<strong>en</strong>t qu’ils ont été lus et appréciés et que,bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s fois, il a fallu trancher <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s récits tous aussi séduisants. Merci<strong>de</strong> tout cœur à chacune et chacun, aux <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants qui lesont sout<strong>en</strong>us ainsi qu’à tous ceux et celles qui ont contribué au concours !Alec Larose, conseillerFédération <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ)10


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Le prix Coup <strong>de</strong> pouceIntitulé à juste titre Coup <strong>de</strong> pouce, le nom <strong>de</strong> ce prix <strong>de</strong>stiné aux équipes<strong>en</strong>seignantes fait écho au Coup <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong>stiné à l’élève ayant soumis lemeilleur texte. D’une valeur totale <strong>de</strong> 1 000 $, il vise à reconnaître et à<strong>en</strong>courager l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t, la créativité et les initiatives locales. Toute activitécompte, qu’elle soit organisée par l’équipe, par son syndicat ou pardiffér<strong>en</strong>ts part<strong>en</strong>aires.Nous avons l’imm<strong>en</strong>se fierté <strong>de</strong> souligner le dynamisme et le travail exceptionnelaccompli par :l’équipe <strong>en</strong>seignante <strong>de</strong>s pavillons Damase-Boulanger et Goyer (C.S. duLac-Saint-Jean), à Alma, avec le souti<strong>en</strong> du Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t duLac-Saint-Jeanl’équipe <strong>en</strong>seignante du C<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> formation générale <strong>de</strong>s adultes (C.S. DeLa Jonquière), à Jonquière, avec le souti<strong>en</strong> du Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>tDe La Jonquièrel’équipe <strong>en</strong>seignante du c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s <strong>Ma</strong>skoutains (C.S. <strong>de</strong>Saint-Hyacinthe), à Saint-Hyacinthe, avec le souti<strong>en</strong> du Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>tVal-<strong>Ma</strong>skal’équipe <strong>en</strong>seignante du c<strong>en</strong>tre du Phénix (C.S. <strong>de</strong>s Découvreurs), àQuébec, avec le souti<strong>en</strong> du Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Deux RivesVotre <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t, gage du succès <strong>de</strong> ce concours,est une véritable source d’inspiration.Au nom <strong>de</strong> tous vos pairs,<strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants,félicitations !11


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Parmi les initiatives <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> ces équipes et <strong>de</strong>s syndicats locaux qui les ontactivem<strong>en</strong>t sout<strong>en</strong>us, m<strong>en</strong>tionnons :Au chapitre <strong>de</strong> la promotion :• Implication <strong>de</strong> <strong>plus</strong>ieurs <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants pour une meilleure stabilitédu projet, et concertation ;• Participation <strong>de</strong> <strong>plus</strong>ieurs services d’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (<strong>alphabétisation</strong>, présecondaire,insertion sociale, insertion socioprofessionnelle, etc.), y compris les c<strong>en</strong>tres<strong>de</strong> dét<strong>en</strong>tion ;• Tournée <strong>de</strong> promotion dans les classes (au lancem<strong>en</strong>t et avant la date <strong>de</strong> retour) ;• Diffusion <strong>en</strong> grand nombre <strong>de</strong>s affiches, formulaires et anci<strong>en</strong>s recueils ;• Intégration dans le cadre d’activités <strong>de</strong> lecture et d’appr<strong>en</strong>tissage dans lesclasses ;• Création <strong>de</strong> versions thématiques du concours (<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>… d’amour,<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>… d’horreur) ;• Utilisation <strong>de</strong>s circuits télévisuels internes pour <strong>de</strong> la publicité <strong>en</strong> circuit fermé ;• Jumelage avec la Semaine du français, la Francofête, etc. ;• Participation du syndicat au sein <strong>de</strong> la Table régionale <strong>de</strong> la Semaine québécoise<strong>de</strong>s adultes <strong>en</strong> formation (SQAF).Au chapitre <strong>de</strong> la célébration et <strong>de</strong> la valorisation :• Bonification <strong>de</strong>s prix, création <strong>de</strong> certificats locaux ;• Sélection locale <strong>de</strong> textes gagnants additionnels ;• Cérémonie <strong>de</strong> remise <strong>de</strong> prix et lecture publique <strong>en</strong> prés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>sélèves du c<strong>en</strong>tre, <strong>de</strong>s autres personnels du c<strong>en</strong>tre et <strong>de</strong> la commission scolaire,<strong>de</strong>s part<strong>en</strong>aires et <strong>de</strong> la communauté (invités d’honneur, auteurs littéraires,familles, anci<strong>en</strong>s élèves, etc.) ;• Enregistrem<strong>en</strong>ts audio-vidéo <strong>de</strong>s lectures, photographies ;• Confér<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> presse ;• Activités pédagogiques et <strong>de</strong> lecture individuelle <strong>de</strong>s textes ;• Production d’un recueil local compr<strong>en</strong>ant les textes <strong>de</strong> tous les élèvesparticipants ;• Articles dans les journaux locaux, syndicaux et scolaires et les médiasélectroniques ;• Création d’une page Web ;• Participation et lecture publique à <strong>de</strong>s émissions <strong>de</strong> radio ou <strong>de</strong> télévision et tirage<strong>de</strong> recueils parmi le public ;• M<strong>en</strong>tion au Conseil <strong>de</strong>s commissaires, à la Direction générale, au Conseil d’établissem<strong>en</strong>t,à l’Assemblée <strong>de</strong>s personnes déléguées ;• Plaques commémoratives, Mur <strong>de</strong>s célébrités, bannières et autres affichages dansle c<strong>en</strong>tre et à l’extérieur ;• Recherche <strong>de</strong>s élèves participants ;• Célébrations lors d’activités syndicales avec l’équipe <strong>en</strong>seignante et les élèves(reconnaissance, soupers, etc.) ;• Réalisation d’une bibliothèque dans l’école ;• Participation à La Gran<strong>de</strong> Lecture, coordonnée par l’Institut <strong>de</strong> coopération pourl’éducation <strong>de</strong>s adultes (ICÉA), <strong>en</strong> collaboration avec la FSE-CSQ.12


Remerciem<strong>en</strong>tsLa Fédération <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ) et la C<strong>en</strong>trale <strong>de</strong>ssyndicats du Québec (CSQ) ti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à remercier chaleureusem<strong>en</strong>t leurspart<strong>en</strong>aires pour leur contribution à ce projet d’expression littéraire et <strong>de</strong>valorisation unique <strong>en</strong> son g<strong>en</strong>re.Nos part<strong>en</strong>aires :Nous t<strong>en</strong>ons égalem<strong>en</strong>t à souligner la collaboration remarquable <strong>de</strong>l’AREQ (CSQ) – Association <strong>de</strong>s retraitées et retraités <strong>de</strong> l’éducation et <strong>de</strong>sautres services publics du Québec dans le cadre <strong>de</strong> la sélection <strong>de</strong>s textespour le recueil <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>.13


Sommaire1. Mon roi Arthur(Coup <strong>de</strong> cœur 2004)Guillermo Rivas172. Le voyage (Coup <strong>de</strong> cœur 2005)Kathy Chouinard203. Vol par schizoïdie(Coup <strong>de</strong> cœur 2006)Louis Rodrigue234. Mots fusionnés(Coup <strong>de</strong> cœur 2007)Mélissa Ferron325. Le pim<strong>en</strong>t rouge masqué(Coup <strong>de</strong> cœur 2009)Francisco Ales Gonzalez356. Le courage d’une championne (Coup <strong>de</strong>cœur 2010)Diane McNicoll397. La chasse aux o<strong>de</strong>urs(Coup <strong>de</strong> cœur 2011)Colette Vézina448. Une <strong>histoire</strong> parfaitem<strong>en</strong>t imparfaite(Coup <strong>de</strong> cœur 2012)Myriam Côté499. La première journée(Coup <strong>de</strong> cœur 2013)<strong>Ma</strong>ryse Blackburn5310. Ah ! Ces mathématiques...Leidy Melissa Barajas Sarmi<strong>en</strong>to5511. La montagne<strong>Ma</strong>rio Vachon5712. Le <strong>plus</strong> courageux<strong>de</strong>s combattantsLina-<strong>Ma</strong>rie Houle5813. La fleur <strong>de</strong> l’âgeEric Bleau6114. Le vieillard<strong>Ma</strong>rilou Lafleur-Dubuc6315. La routeMélanie Séguin6416. Le sang du dragonPatrick Roch-Pétrin6717. Un film <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>ce-fictionGabriel Bugeaud7018. La crique magiqueEmmanuel Chréti<strong>en</strong>7319. À mon fils <strong>de</strong> cœurCarmelle Gr<strong>en</strong>ier7420. Un périple pour la vieAudrey Doucet7614


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>21.A. Je t’aimerai toujoursStéphanie Gagnon-Lafleur8121.B. Elle sera toujours làStéphanie Gagnon-Lafleur8322. Carpe diem…Ludovic Paradis8623. Le pouvoir <strong>de</strong>s motsPierre-Luc Audit8724. La fourmi et la feuilleLyndsey N. Rosevear9025. La nouvelle bicycletteRichard Carrière9226. Je rêve à toi qui es loin<strong>de</strong> moi…Alexandre Ménard9427. Logan, mon amourKim Dufour-Breton9628. Le baluchon du VagabondCharles-Phillip <strong>Ma</strong>cIntyre Godue9729. Les <strong>de</strong>ux papillonsextraordinairesNicolas Schaller10030. Le courage d’une viePatricia Gagné10231. Toi, petite filleSuzie Leroux10432. Amour astralFrancy Ramirez10633. Plongé dans l’obscuritéFrédéric Fiore10834. ElleJosée H<strong>en</strong>ri11035. Souv<strong>en</strong>irsTrycia Lebel11236. RésisterChantal Racine11337. Mon <strong>plus</strong> beau souv<strong>en</strong>irJoël Flageole11738. L’élueMichel Allard12039.A. Inébranlable<strong>Ma</strong>thieu Desjardins12339.B. Parmi tant d’<strong>histoire</strong>s,il y a moi<strong>Ma</strong>thieu Desjardins12515


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, une anthologieLa publication du dixième recueil est une occasion <strong>en</strong> or <strong>de</strong> faire une rétrospective<strong>de</strong> dix ans <strong>de</strong> Coups <strong>de</strong> cœur. Lancé <strong>en</strong> 2003 par la Fédération <strong>de</strong>ssyndicats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ) pour mettre <strong>en</strong> valeur la persévérance,la détermination et le courage dont font preuve les adultes <strong>en</strong> formation,ce concours nous a donné l’occasion <strong>de</strong> lire <strong>de</strong>s récits exceptionnelsrédigés par <strong>de</strong>s personnes… exceptionnelles, ayant une caractéristiquecommune : l’amour <strong>de</strong>s mots. Ces textes ne sont pas que <strong>de</strong>s exercices <strong>de</strong>style, mais racont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> <strong>belle</strong>s <strong>histoire</strong>s, vraies, celles d’adultes qui ont<strong>en</strong>trepris <strong>de</strong> se donner les moy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> réussir, <strong>de</strong> s’intégrer dans la société,<strong>de</strong> s’affranchir <strong>de</strong> leurs limites.Le premier vainqueur, <strong>en</strong> 2003-2004, était un élève du c<strong>en</strong>tre Sainte-Croix<strong>de</strong> la Commission scolaire <strong>de</strong> Montréal, Guillermo Rivas C<strong>en</strong>t<strong>en</strong>o. Tout ceque nous savons malgré nos efforts, c’est qu’il a poursuivi sa formation p<strong>en</strong>dant<strong>de</strong>ux ans après avoir ret<strong>en</strong>u l’att<strong>en</strong>tion du jury, qu’il a obt<strong>en</strong>u sondiplôme d’étu<strong>de</strong>s secondaires et qu’il a laissé le souv<strong>en</strong>ir d’un élève déterminé.D’ailleurs, la prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> la FSE <strong>de</strong> l’époque, Johanne Fortier, <strong>en</strong> luir<strong>en</strong>dant hommage, n’a pu s’empêcher <strong>de</strong> souhaiter « à tous ces adultesméritoires <strong>de</strong> pouvoir trouver, comme Guillermo, ce roi Arthur, ce m<strong>en</strong>torgénéreux qui va les ai<strong>de</strong>r à développer leur s<strong>en</strong>s critique, à se dépasser, à<strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>s hommes et <strong>de</strong>s femmes responsables, à s’appuyer sur leur forceintérieure, malgré les difficultés et quelquefois les épreuves qu’ils ont dûtraverser ».1. Mon roi ArthurCoup <strong>de</strong> cœur2004Je ne me rappelle pas très bi<strong>en</strong> qui a dit que « nous sommes la somme <strong>de</strong>sg<strong>en</strong>s que l’on r<strong>en</strong>contre ». J’y crois. Je n’ai pas besoin <strong>de</strong> l’expliquer. Il mesuffit <strong>de</strong> plonger dans ma mémoire pour y retrouver intacts les souv<strong>en</strong>irsd’un être cher qui a fait partie <strong>de</strong> cette somme qui complète l’équation <strong>de</strong>ma vie.17


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Il s’appelait Arthur, il habitait la même ville que moi, il avait <strong>de</strong>ux filles, sonépouse était décédée <strong>de</strong>ux ans auparavant lors du <strong>de</strong>rnier accouchem<strong>en</strong>t. Ilavait un magasin <strong>de</strong> plomberie, il avait 40 ans, les cheveux noirs, un largesourire, un regard perçant et un tempéram<strong>en</strong>t hors du commun qui faisait <strong>de</strong>lui quelqu’un <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>veillant, d’unique et qui allait <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir sans le vouloirune personne significative dans ma vie. Lors <strong>de</strong> ma r<strong>en</strong>contre avec Arthur, je<strong>de</strong>vais avoir 15 ou 16 ans. À ce mom<strong>en</strong>t-là, je traversais la pério<strong>de</strong> la <strong>plus</strong>sombre <strong>de</strong> ma vie. À 15 ans, j’aurais dû normalem<strong>en</strong>t m’amuser avec mescopains, sortir avec <strong>de</strong>s filles, aller au cinéma, faire mes propres expéri<strong>en</strong>ceset découvertes dans le mon<strong>de</strong> mystérieux <strong>de</strong> l’intimité sexuelle et affective.À 15 ans, on recherche sa propre i<strong>de</strong>ntité, on essaie <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir soi-mêmepour affronter <strong>de</strong> son mieux l’av<strong>en</strong>ir que l’on a <strong>de</strong>vant soi, mais cela n’étaitpas mon cas. À 15 ans, je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u chef <strong>de</strong> famille, chef d’une familledécimée par la guerre, pr<strong>en</strong>ant soin d’une mère folle <strong>de</strong> chagrin, impuissanteface au <strong>de</strong>stin, ce <strong>de</strong>stin implacable qui nous promet tout et ne nousdonne ri<strong>en</strong>. J’avais l’impression d’avoir été catapulté dans un mon<strong>de</strong> d’adultes,hostile et sans les outils nécessaires pour y survivre. J’<strong>en</strong> étais sûr que, tôt outard, j’allais finir par sombrer dans le désespoir le <strong>plus</strong> total ou dans un vicequelconque, question <strong>de</strong> faire disparaître toutes les nouvelles responsabilitésque j’avais sur les épaules, mais c’est là qu’Arthur est <strong>en</strong>tré dans ma vie.Je ne me rappelle <strong>plus</strong> comm<strong>en</strong>t je l’ai connu. Au début, il m’intimidait,mais je ne me suis jamais s<strong>en</strong>ti rejeté par lui. En sa prés<strong>en</strong>ce, je me s<strong>en</strong>taismaladroit ; malgré cela, j’aimais être avec lui, j’avais un plaisir fou à l’observer,j’avais l’impression d’être une éponge absorbant tout <strong>de</strong> lui ; dans le fond<strong>de</strong> moi-même, je rêvais <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir comme lui : avoir sa force <strong>de</strong> caractère,inspirer chez les autres la confiance et la bi<strong>en</strong>veillance qui faisait <strong>de</strong> lui unhomme fort. Il avait cette capacité <strong>de</strong> <strong>de</strong>viner mes p<strong>en</strong>sées, mes états d’âme,mes angoisses et mes questionnem<strong>en</strong>ts intérieurs. Il avait « l’humilité » <strong>de</strong>reconnaître mes qualités. Il savait gar<strong>de</strong>r le sil<strong>en</strong>ce sans me faire s<strong>en</strong>tir coupable.Il reconnaissait mes joies. Il respectait mes chagrins. Il était capable<strong>de</strong> corriger mes écarts <strong>de</strong> conduite. Il était capable d’éveiller <strong>en</strong> moi la fiertédu travail bi<strong>en</strong> accompli. Il m’a montré à conduire. Il m’a poussé à toujoursremettre <strong>en</strong> question mes choix et la raison <strong>de</strong> ceux-ci. Il m’a aidé à développermon s<strong>en</strong>s critique, à me surpasser, à <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un « homme responsable »avant mon temps. Il m’a montré à faire appel aux forces qui r<strong>en</strong>aiss<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dres du désespoir.J’avais 22 ans la <strong>de</strong>rnière fois que je l’ai vu. C’était le 26 octobre 1986, dateà laquelle j’ai quitté le pays, sa photo quelque part dans mes bagages, lesouv<strong>en</strong>ir d’une étreinte maladroite et un terrible chagrin dans le fond <strong>de</strong>18


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>D’ailleurs, une <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignantes qui l’a accompagnée à l’époque, SylvieDesranleau, nous confie ceci :Lorsqu’on m’a <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> contacter Kathy et son <strong>en</strong>seignante, dans le cadre <strong>de</strong> <strong>Ma</strong><strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, mon cœur a chaviré. Tel un voyage agréable, <strong>de</strong> beaux souv<strong>en</strong>irsont refait surface. La s<strong>en</strong>sibilité <strong>de</strong> son texte m’est apparue tout <strong>de</strong> suite, mais je mesuis aussi rappelé la s<strong>en</strong>sibilité <strong>de</strong> Kathy comme personne.D’autres images me sont rev<strong>en</strong>ues : son <strong>en</strong>seignante et moi versant quelques larmesp<strong>en</strong>dant que Kathy lisait son texte d’une voix assurée lors d’un Conseil fédéral.Depuis, <strong>plus</strong>ieurs années se sont écoulées. Kathy a continué sa route. Ce dixièmeanniversaire nous permet <strong>de</strong> faire coïnci<strong>de</strong>r nos itinéraires respectifs afin <strong>de</strong> nousraconter quelques anecdotes <strong>de</strong>s voyages <strong>de</strong> nos vies, sauf pour l’<strong>en</strong>seignante qui l’aaccompagnée, qui, elle, est partie pour son <strong>de</strong>rnier voyage…2. Le voyageCoup <strong>de</strong> cœur2005Il y a déjà neuf ans, un merveilleux voyage que la vie m’a réservé acomm<strong>en</strong>cé…Un soir d’hiver, le 23 janvier 1996, le verglas avait tapissé les rues <strong>de</strong>Montréal. Elles semblai<strong>en</strong>t désertes. Pour ma part, je m’y trouvais av<strong>en</strong>ue<strong>de</strong>s Pins <strong>en</strong> direction <strong>de</strong> l’hôpital Royal-Victoria car le jour « J » était arrivé :je m’apprêtais à donner la vie.Depuis <strong>plus</strong>ieurs mois, je m’y préparais comme pour un grand voyage (mavalise, mes lectures, mes gui<strong>de</strong>s) pour cette nouvelle expéri<strong>en</strong>ce. Quelquesheures <strong>plus</strong> tard, elle était déjà là, dans mes bras. Seigneur que je la trouvais<strong>belle</strong> avec son petit nez rond et ses joues roses. Dans la soirée, une infirmière<strong>en</strong>tra et me <strong>de</strong>manda quel était son nom. Je regardai ce petit être etj’essayais d’imaginer <strong>plus</strong> tard ce qu’elle aurait l’air ? Quel métier elle ferait ?Plein d’images inondai<strong>en</strong>t mon esprit. Voilà ! elle s’appellera « Joanie-<strong>Ma</strong>rika ».20


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Les mois avai<strong>en</strong>t passé, quatorze mois exactem<strong>en</strong>t, et Joanie ne semblait paspressée <strong>de</strong> s’asseoir, <strong>de</strong> marcher, même <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir sa tête. Alors quelquescoups <strong>de</strong> téléphone <strong>plus</strong> tard, j’étais assise dans le cabinet d’un docteur qui,je vous l’avoue, ressemblait à tous les autres. J’expliquai mes inquiétu<strong>de</strong>s aupédiatre. Ensuite sur sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, je dévêtis ma puce. Il la regarda, la plia,la replia, la tourna. Joanie semblait rigoler, elle semblait se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce quecet homme cherchait. La séance étant terminée, le docteur s’était assis etm’avait dit : « C’est clair que votre <strong>en</strong>fant est atteint <strong>de</strong> paralysie cérébrale etqu’elle ne marchera sûrem<strong>en</strong>t jamais ». En <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dant ces paroles, on auraitdit que mon esprit s’était détaché <strong>de</strong> mon corps. Je le voyais, il me parlait,ses lèvres bougeai<strong>en</strong>t, mais pourtant aucun son ne v<strong>en</strong>ait à mes oreilles : le« CHOC ».Arrivée à la maison, j’avais pleuré, pleuré toute la nuit, même si au fondj’ignorais l’<strong>en</strong>semble <strong>de</strong>s conséqu<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> la paralysie, mais justem<strong>en</strong>tc’était l’inconnu et j’avais peur. Je savais désormais qu’elle ne serait jamaiscomme le petit Miguël d’<strong>en</strong> face, Jérémi le voisin ou même ma nièce NikiLee. Quelques jours avai<strong>en</strong>t passé, le calme était rev<strong>en</strong>u et je réalisai que,avant le diagnostic et après, elle restait la même : elle me semblait <strong>en</strong>core<strong>plus</strong> <strong>belle</strong>, <strong>plus</strong> forte.Un jour, je tombai sur un poème <strong>de</strong> Hélène Muiller. Enfin, quelqu’un quisemblait avoir fait un bout <strong>de</strong> chemin similaire au mi<strong>en</strong>, mais elle, elle étaitparv<strong>en</strong>ue à le mettre <strong>en</strong> mots. Elle expliquait le fait d’avoir un <strong>en</strong>fant mala<strong>de</strong><strong>en</strong> faisant une métaphore avec la symbolique du voyage. Elle racontait <strong>en</strong>effet la grossesse comme une préparation à un voyage <strong>en</strong> Italie :On achète <strong>de</strong>s tas <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>s, on planifie et on imagine. Plein <strong>de</strong> g<strong>en</strong>sont déjà vu l’Italie et nous vant<strong>en</strong>t les mérites <strong>de</strong> ce pays. <strong>Ma</strong>is quandla vie nous donne un <strong>en</strong>fant handicapé, c’est comme si dans l’avionl’ag<strong>en</strong>t <strong>de</strong> bord se lève et dit : « Bi<strong>en</strong>v<strong>en</strong>ue <strong>en</strong> Hollan<strong>de</strong> ! ». « EnHollan<strong>de</strong> ! », je suis s<strong>en</strong>sée aller <strong>en</strong> Italie… Toute ma vie, j’ai rêvé <strong>de</strong>ce pays… Or, il y a eu <strong>de</strong>s changem<strong>en</strong>ts dans le plan <strong>de</strong> vol et désormaisc’est ici que l’on doit rester. La chose importante à compr<strong>en</strong>dre,c’est qu’on ne se retrouve pas dans un <strong>en</strong>droit sale où règn<strong>en</strong>t famineet maladies, c’est juste un <strong>en</strong>droit différ<strong>en</strong>t.À partir <strong>de</strong> cet instant, j’ai compris qu’on doit sortir, aller chercher <strong>de</strong> nouveauxgui<strong>de</strong>s et appr<strong>en</strong>dre une nouvelle langue, sans compter qu’on feraalors la connaissance <strong>de</strong> nouvelles personnes qu’on n’aurait jamais r<strong>en</strong>contréesautrem<strong>en</strong>t. C’est un <strong>en</strong>droit où le rythme est un peu <strong>plus</strong> l<strong>en</strong>t, maislorsqu’on y a séjourné un certain temps, qu’on a pu repr<strong>en</strong>dre son souffle et21


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>3. Vol par schizoïdieCoup <strong>de</strong> cœur2006« Certains humains sont nés pour un petit pain, parmi eux,quelques-uns <strong>en</strong> sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>us à ce point malsain par leur avidité et laconvoitise <strong>de</strong> la situation d’autrui, qu’ils <strong>en</strong> sont v<strong>en</strong>us à <strong>en</strong> concocter<strong>de</strong>s plans qui, croyez-moi, sont tout ce qu’il y a <strong>de</strong> <strong>plus</strong> déviant. »À tous les incapables…Un ivrogne <strong>en</strong> réflexion, lors d’une crise exist<strong>en</strong>tielleSalut, mon nom est John, et je profite d’un <strong>de</strong> ces rares mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> luciditépour vous saluer, vous tous, êtres humains. Je crois qu’il serait préférable quemon ami Éric vous raconte ma petite av<strong>en</strong>ture…Tout va bi<strong>en</strong> pour John. Au bureau, les secrétaires souri<strong>en</strong>t, les collèguessont g<strong>en</strong>tils et les succès se multipli<strong>en</strong>t. <strong>Ma</strong>lgré le fait que John vit <strong>en</strong>corechez sa mère à 23 ans, ri<strong>en</strong> ne l’empêche d’avancer et <strong>de</strong> vivre ses rêves àfond ! Comme il le répète si souv<strong>en</strong>t à ses collègues : « <strong>Ma</strong> situation est temporaire,à chacun sa galère mon frère. » John a été promu assistant-chefestimateur <strong>de</strong> l’est du Canada, il n’y a que <strong>de</strong>ux semaines, juste <strong>de</strong>vant legros Roger et Lu<strong>de</strong>vic, le <strong>plus</strong> anci<strong>en</strong> du bureau, à la suite <strong>de</strong> <strong>plus</strong>ieursexploits remarquables dont le <strong>de</strong>rnier est d’avoir estimé une foule <strong>de</strong>20 326 personnes à 32 personnes près, lors <strong>de</strong> la manifestation <strong>de</strong>s hommesdivorcés pour l’allaitem<strong>en</strong>t. Du jamais vu dans les huit <strong>de</strong>rnières années !Ça plane pour Johny ! Parfaitem<strong>en</strong>t heureux comme dans le cliché : « Y’a uneo<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> bonheur, vi<strong>en</strong>s pas gerber dans mes fleurs. » Nous sommes samedile 3 juillet, à vous <strong>de</strong> vérifier sur vos vieux cal<strong>en</strong>driers quelle année c’était…Soirée d’été idéale pour une fiesta, probablem<strong>en</strong>t la 2000 e cette année ; lesg<strong>en</strong>s du bureau aim<strong>en</strong>t la fête ! Tout le mon<strong>de</strong> y est, à comm<strong>en</strong>cer par notrehôte, <strong>Ma</strong>rc-Antoine, ami d’<strong>en</strong>fance <strong>de</strong> John, fidèle serviteur <strong>de</strong>s forcesarmées canay<strong>en</strong>nes, 5 e meilleur <strong>de</strong> son cours <strong>de</strong> tir <strong>en</strong> <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>s années,jusqu’au mom<strong>en</strong>t où une balle perdue n’atteigne la partie inférieure droite<strong>de</strong> sa boîte crâni<strong>en</strong>ne… Ce jour-là, il est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u mi-humain, et mi-atteint dusyndrome Gilles <strong>de</strong> la Tourette, qui consiste à insulter les autres à répétition,23


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>et ce, sans raison… Une bénédiction dans certaines soirées arrosées ! Parmile mon<strong>de</strong> que je connais, il y a Lucie, l’allumeuse du bureau qui se tape11 mots aux 10 minutes, secrétaire choisie par le patron sans même avoirpassé d’<strong>en</strong>trevue, excepté celle à stores fermés, <strong>en</strong>trevue que le patron acurieusem<strong>en</strong>t oublié d’inscrire dans les archives… Il y a aussi Roger, vieuxcochon avec ses farces <strong>de</strong> caleçons, mamelons et suçons. Il ne faut pasoublier Eugène, Jean-Yves, Karina, Josée, Bernard, Lu<strong>de</strong>vic, et j’<strong>en</strong> passe…J’estime que nous étions <strong>en</strong>viron 27 à cette soirée, y compris moi-même.Je suis à la cuisine avec John, Roger, <strong>Ma</strong>rc-Antoine et Lu<strong>de</strong>vic.Voulez-vous une bière les boys ? nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> Lu<strong>de</strong>vic. Certainem<strong>en</strong>t mongars, une pour moi et une pour notre nouvelle ve<strong>de</strong>tte John, « assistant-chefestimateur <strong>de</strong> l’est du Canada ». Bravo mec, lance Lu<strong>de</strong>vic d’un ton <strong>plus</strong> quesincère. Tu nous as dépassés <strong>de</strong> peu pour ce poste, moi et Roger, mais tu lemérites certainem<strong>en</strong>t jeune prodige. À la ti<strong>en</strong>ne ! À ce mom<strong>en</strong>t précis, <strong>Ma</strong>rc-Antoine y va d’une séance <strong>de</strong> tourette : « mangeur <strong>de</strong> peanut, mangeur <strong>de</strong>peanut, mangeur <strong>de</strong> peanut… ». Stop ! dit John d’un ton poli, mais concis…<strong>Ma</strong>is <strong>Ma</strong>rc-Antoine continue <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> : « avaleur <strong>de</strong> balle, avaleur <strong>de</strong>balle, avaleur <strong>de</strong> b… ». Peux-tu nous lâcher un peu <strong>Ma</strong>rc-Antoine, ajouteRoger. Il rétorque : « y avait une balle <strong>de</strong> fusil dans ta bière mon frère ! » <strong>en</strong>regardant John. Qu’est-ce que tu dis là ? Non, ri<strong>en</strong>, excusez-moi les gars,vous savez que j’ai pas beaucoup <strong>de</strong> contrôle sur mes p<strong>en</strong>sées et paroles,surtout quand j’bois, ça m’pr<strong>en</strong>d <strong>en</strong>core <strong>plus</strong> souv<strong>en</strong>t !La soirée avance et les cerveaux recul<strong>en</strong>t. <strong>Ma</strong>is, <strong>de</strong>puis une <strong>de</strong>mi-heure<strong>en</strong>viron, quelque chose <strong>de</strong> vraim<strong>en</strong>t bizarroï<strong>de</strong> semble s’être mystérieusem<strong>en</strong>tproduit chez mon ami John, et il n’arrête pas <strong>de</strong> se ronger les s<strong>en</strong>s… Ilinterprète tout <strong>de</strong> façon difforme. Il s’assied dans le corridor qui mène à lachambre <strong>de</strong>s maîtres, la tête <strong>en</strong>tre les g<strong>en</strong>oux. Non, ça ne tourne pas, non,il n’a pas trop bu le conard. En fait, il ne s’est jamais s<strong>en</strong>ti comme ça, mêmedans le pire <strong>de</strong>s débauches. Les conversations ricoch<strong>en</strong>t <strong>de</strong> partout etsembl<strong>en</strong>t toutes finir dans ce foutu couloir, exactem<strong>en</strong>t comme si chaqueparole était une boule <strong>de</strong> billard jouée <strong>en</strong> angle parfait par un pro <strong>de</strong> labaguette, et qu’elle finisse inévitablem<strong>en</strong>t par aboutir dans ce tunnel ultimed’où il se s<strong>en</strong>t prisonnier ; un vortex <strong>de</strong> paroles transformées <strong>en</strong> poignardsvolants. Le problème est que John se met à focuser sur <strong>de</strong>s bouts <strong>de</strong> phrase…« John #%= mort @Z& moins <strong>de</strong> un zzz ! » ou « %@foÜ?u ! ? estim@teur *+&$ <strong>de</strong> mes femmes @#* » ou <strong>en</strong>core « ?%$ lèche $Q%@ du p@tron *#$ »Pauvre John ! ! ! Paranoïa et interprétations parallèles schizo-paranormales ;voilà ce qui est fâcheux. John a probablem<strong>en</strong>t ingéré quelque chose <strong>de</strong>24


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>louche ! Si vous saviez toutes les <strong>données</strong> qui me sont v<strong>en</strong>ues à l’esprit :colle, guacamole, champignons, pilule du bonheur, bidule du malheur,motrin 246, PCP, LSD ou THC… Aucune idée ! Seulem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s scénariosincongrus comme visualiser John <strong>en</strong> train d’avaler, inhaler, siphonner ouaspirer une substance illicite… Jamais dans 100 ans ! Du moins pas <strong>de</strong>puis<strong>de</strong>ux ans, quand il a <strong>en</strong>fin cessé <strong>de</strong> se conduire <strong>en</strong> adolesc<strong>en</strong>t stagnant.Quelque temps après, mon pauvre Johny vi<strong>en</strong>t me trouver, mou comme unecompote <strong>de</strong> prunes, il met sa main gauche sur mon épaule droite :– Éric, mon ami, help me Éric SVP ; ils conspir<strong>en</strong>t tous pour m’<strong>en</strong>lever lavie.– Qui ça mer<strong>de</strong> ?– Tous, tous sauf toi, à moins que… Ah ! Toi aussi, maudit traître !Insulté, mais compatissant <strong>de</strong> son état, je lui réponds calmem<strong>en</strong>t :– Hey, hey, Johny, calme-toi mon p’tit Johny mon ami, tu sais que j’aitoujours été là pour toi et vice versa et bla bla bla…– S’cuse moé batince, c’est que j’badtrip man, on dirait que j’ai pris b<strong>en</strong>du stock, mais j’te garantis que j’fais pu ça, à part 4 ou 5 bières, pis tu saisb<strong>en</strong> que ça l’a pas <strong>de</strong> quoi faire zigner un grand-père.– P<strong>en</strong>ses-tu que quelqu’un t’aurait joué un tour ?– J’sais pas mais peu importe, ça reste qu’y a vraim<strong>en</strong>t un complot, teinpar exemple, quand j’tais assis dans l’couloir tantôt, j’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du clairem<strong>en</strong>tLucie dire : « John sera mort <strong>en</strong> moins <strong>de</strong> un ».– B<strong>en</strong> voyons donc !– J’te l’dis Éric.– Tu sais bi<strong>en</strong> que c’est impossible, nos amis sont pas <strong>de</strong>s fans <strong>de</strong> Charles<strong>Ma</strong>nson ! <strong>Ma</strong>is j’vais quand même aller vérifier.– Non mer<strong>de</strong>, ça pourrait faciliter leur plan !25


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>– John, fais-moi confiance, je revi<strong>en</strong>s dans maximum <strong>de</strong>ux minutes pis <strong>en</strong><strong>plus</strong> j’nous ramène une bière !De retour du frigo, je file discrètem<strong>en</strong>t au salon et accroche Lucie par lasacoche pour l’emm<strong>en</strong>er à l’<strong>en</strong>trée arrière, loin <strong>de</strong>s oreilles et <strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong>quiconque. Humilier John <strong>de</strong>vant tout le mon<strong>de</strong> était tout sauf mon but.– Lucie, aurais-tu parlé <strong>de</strong> John tantôt ?Avec son air <strong>de</strong> Dolly Parton mixé d’une insuffisance intellectuelle, elle merépond :– John, c’est qui ça John ?– B<strong>en</strong> John, voyons, le gars avec qui tu travailles au bureau à tous lesjours, le gars qui a son auto stationnée à côté <strong>de</strong> la ti<strong>en</strong>ne, voyons ! (La terreappelle Pluton, la terre appelle Pluton… Est-ce qu’il a quelque chose dansces ballons ?) « Ça, j’ai gardé ça <strong>en</strong> <strong>de</strong>dans, mais c’était t<strong>en</strong>tant j’vous dis. »– Ah, oui… Je vois, John. C’est drôle, parlant <strong>de</strong> John, tout à l’heure jem’obstinais justem<strong>en</strong>t avec Eugène sur la date <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> John L<strong>en</strong>non ;lui il disait 80 ou 81, et moi je disais 1931, je suis sûre que j’ai raison, j’aitoujours été bonne dans les chiffres.– C’est beau Lucie, salut. De toute évi<strong>de</strong>nce, John a dû <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre un bout<strong>de</strong> cette conversation et la déformer… Je ne vois pas autre chose !Je retourne voir John avec la bière promise.– Hé John, ça va mieux ?Il me fixa alors comme jamais personne ne l’avait fait, les yeux ronds comme<strong>de</strong>s biscuits Ritz.– Je t’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du discuter avec Lucie, la sauterelle du bureau, je vous ai<strong>en</strong>t<strong>en</strong>du prononcer mon nom, parler <strong>de</strong> mort et <strong>de</strong> 81 $. C’est ça h<strong>en</strong>, vousavez fait un complot à la Jean Chréti<strong>en</strong>, et pour quelques brins d’oseille,vous allez m’extirper <strong>de</strong> votre cercle à perpétuité, voire m’éliminer ou aumieux me p<strong>en</strong>dre par les cheveux !– Pas du tout John, tu y es pas du tout !26


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>– Ah non, dit-il <strong>en</strong> tremblant et <strong>en</strong> bégayant, le front pleurant <strong>de</strong> sueurs ;c’est quoi ça d’abord ?Les trois secon<strong>de</strong>s qui suivir<strong>en</strong>t me sembl<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core presque aussi péniblesque trois minutes que j’avais un jour passées à m’obstiner avec un sursyndiqué<strong>de</strong> la RTC borné du fait que son salaire valait bel et bi<strong>en</strong> trois fois celuid’une infirmière. C’est alors que survi<strong>en</strong>t l’événem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s événem<strong>en</strong>ts : parla <strong>plus</strong> intransigeante <strong>de</strong>s coïnci<strong>de</strong>nces, Roger, le vieux cochon s’am<strong>en</strong>aitjuste à côté <strong>de</strong> nous… POUF ! Un bruit si assourdissant qu’un sourd-néaurait <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du pour la première fois. Roger avait pris le vieux fusil à blanc<strong>de</strong> notre hôte <strong>Ma</strong>rc-Antoine dans le sous-sol et décidé <strong>de</strong> faire changem<strong>en</strong>t<strong>en</strong> substituant une habituelle farce <strong>de</strong> cul par une réelle farce <strong>de</strong> con. Levéritable problème c’était pas vraim<strong>en</strong>t ça ! C’était plutôt John évanoui etaussi pâle qu’un albinos qui a passé sa vie sans voir le soleil ; je ne l’auraispas reconnu si ça aurait pas été <strong>de</strong> son bouton véreux qu’il porte fièrem<strong>en</strong>tau-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> son œil gauche. En panique extrême, pas d’autres choix quej’ai eu que <strong>de</strong> composer à l’instant le 911. « Oui bonjour, pour quelle ville ? »me répond un robot vocal féminin. « Cherchez- vous un numéro <strong>de</strong> commerceou <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce ? » Pauvre imbécile que je suis, dans mon état <strong>de</strong>stress névrosé, j’ai dû faire le 411. Je raccroche et compose <strong>en</strong>fin le bonnuméro, avec Roger <strong>en</strong> arrière-plan <strong>en</strong> train <strong>de</strong> déblatérer sur le fait quel’ambulance coûtait 62 piastres à chaque appel et que tout ça c’était la fauteà l’aile droite <strong>de</strong> l’anci<strong>en</strong> sous-conseil municipal ; comme si c’était le temps<strong>de</strong> disjoncter sur la politique, p<strong>en</strong>dant que notre ami agonise sur le plancheravec <strong>de</strong> la broue qui lui sort par les narines… Pauvre con <strong>de</strong> Roger, avec sons<strong>en</strong>s aiguisé <strong>de</strong>s priorités.– Roger, va donc faire ton spectacle ailleurs, ou bi<strong>en</strong> ça va mal finir.En att<strong>en</strong>dant l’ambulance, pas d’autre choix que <strong>de</strong> veiller sur John, pauvrelui, les yeux à l’<strong>en</strong>vers et la bouche <strong>en</strong> train <strong>de</strong> marmonner « êtres <strong>de</strong> l’hyperespace,ne v<strong>en</strong>ez point m’emporter » ou b<strong>en</strong> <strong>en</strong>core pire « Je suis agressé parun escadron <strong>de</strong> teletubbies mc téléguidés. À l’ai<strong>de</strong>, terri<strong>en</strong>s du clan <strong>de</strong>svulcains ». Ouch ! Mon ami avait vraim<strong>en</strong>t changé <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>ce, mais jecomm<strong>en</strong>çais à me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si le bouton pour rev<strong>en</strong>ir au bon poste nes’était pas cassé, ou du moins s’il serait réparable <strong>en</strong> bout <strong>de</strong> ligne.L’ambulance arrive 38 minutes après l’appel, comme ils dis<strong>en</strong>t aux nouvelles.Les <strong>de</strong>ux professionnels surconfiants <strong>en</strong> chi<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> garage bleue sort<strong>en</strong>t <strong>de</strong>leur cube jaune ; « où est-il, où est-il ? » Ils ont l’air empressé comme si12 secon<strong>de</strong>s allai<strong>en</strong>t changer quelque chose sur 38 minutes, qui donn<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fait 2 280 secon<strong>de</strong>s… Quelle paire d’imbéciles ! Le problème, c’est pas que27


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>j’<strong>en</strong> veux aux ambulanciers, mais plutôt à tous ceux qui ont écouté l’émission« Urg<strong>en</strong>ce » quelque part <strong>en</strong>tre leur <strong>en</strong>fance et leur adolesc<strong>en</strong>ce et quiont choisi leur métier principalem<strong>en</strong>t à cause <strong>de</strong> leur attrait pour leur programmepréféré… Par contre, ça m’ai<strong>de</strong> à compr<strong>en</strong>dre pourquoi y a <strong>de</strong>smala<strong>de</strong>s qui se déguis<strong>en</strong>t <strong>en</strong> « SPOK » dans les conv<strong>en</strong>tions <strong>de</strong> « Star Trek ».En tout cas… Les <strong>de</strong>ux clowns sort<strong>en</strong>t leur civière et embarqu<strong>en</strong>t John, ilsmett<strong>en</strong>t <strong>en</strong>suite les sirènes et fil<strong>en</strong>t à toute allure ; quelques voisins qui regardai<strong>en</strong>tla scène <strong>de</strong> leurs balcons r<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t à l’intérieur, <strong>en</strong> espérant au fondd’eux-mêmes que ce g<strong>en</strong>re d’événem<strong>en</strong>t se produise à nouveau, afin <strong>de</strong> leurprocurer d’autres s<strong>en</strong>sations fortes qu’ils ont l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> récolter par lagran<strong>de</strong> culture du voyeurisme socialem<strong>en</strong>t accepté ; la télé-réalité.Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main, un appel à l’hôpital Ste-<strong>Ma</strong>rie du Bon Conseil, où les ambulanciersont emm<strong>en</strong>é John… La secrétaire me répond : « Non, Mr. John Tardifest parti ce matin ». C’est alors que je réalise que la seule option pour avoir<strong>de</strong>s nouvelles <strong>de</strong> Johny est un appel chez eux, au risque d’affronter samaman, la g<strong>en</strong>tille et aimable Béatrice.– Bonjour M me Tardif, est-ce que John est là ?– Hypocrite, sale petit hypocrite, fais pas semblant que t’es pas au courantÉric, fils <strong>de</strong> ta mère, femme bourgeoise et vaniteuse… Johny, mon petitJohny, n’est <strong>plus</strong>.– Quoi ?– Il a perdu la raison et ce serait surpr<strong>en</strong>ant qu’il revi<strong>en</strong>ne ; la seule chosequ’il a pu prononcer dans les <strong>de</strong>rnières heures c’est : « Ils sont v<strong>en</strong>us mechercher, les hommes bleus avec leur capsule jaune ».J’avais pitié <strong>de</strong> Béatrice, pauvre maman <strong>de</strong> John, je s<strong>en</strong>tais le désespoir et lapanique dans sa voix tremblante ; j’aurais même accepté <strong>de</strong> la consoler sielle ne m’haïssait pas autant.– M me Tardif, ne vous <strong>en</strong> faites pas, John est fort, je suis sûr qu…– Non, non, non, non, non ! qu’elle beuglait <strong>en</strong> pleurant. Elle ajoute :« <strong>de</strong>ux spécialistes <strong>en</strong> neurologie ont scanné son cerveau et ils sont unanimes: John est victime d’une apoplexie névralgique qui serait causée par uneconsommation <strong>de</strong> LSD <strong>en</strong> gran<strong>de</strong> dose, suivie d’un choc nerveux spontané.Le choc qu’il a subi a provoqué une combustion instantanée <strong>de</strong> son liqui<strong>de</strong>28


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>cervi-adrénalique, qui s’est mélangé au LSD… Il s’est produit un peucomme le big bang, mais à l’échelle <strong>de</strong> sa cervelle… Tout ceci a transforméJohn <strong>en</strong> légume sur <strong>de</strong>ux pattes… La seule petite chance d’y remédier serait<strong>de</strong> retirer le caillot <strong>de</strong> LSD qui s’est formé et qui est coincé <strong>en</strong> <strong>de</strong>ssous dunerf mitoy<strong>en</strong> cervical ; les chances <strong>de</strong> réussite <strong>de</strong> ce type d’opération sontsupposém<strong>en</strong>t inférieures à 10 %… Je suis désespérée !! Pourquoi l’avez-vous<strong>en</strong>traîné à repr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong> la drogue ? Vous saviez que c’était néfaste pour monpetit John !– M me Tardif, je vous promets sol<strong>en</strong>nellem<strong>en</strong>t sur la tête <strong>de</strong> mon grandpèreGéraldin que je n’ai ri<strong>en</strong> à voir là-<strong>de</strong>dans.– La police va faire son <strong>en</strong>quête et si t’as quoi que ce soit à te reprocherp’tit morveux, j’te conseille <strong>de</strong> nous l’cracher maint<strong>en</strong>ant ! Décidém<strong>en</strong>t,l’épreuve n’avait pas ramolli la mère <strong>de</strong> John…Quelques semaines <strong>plus</strong> tard, aux bureaux <strong>de</strong> « Estimation Power inc. »...Je suis là lassé, inefficace, marqué par la tragédie qui a frappé mon ami quirési<strong>de</strong> maint<strong>en</strong>ant à l’institut pour attardés m<strong>en</strong>taux Gilbert-Bécaud, institutayant fait l’objet d’<strong>en</strong>quêtes pour viol<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>vers <strong>de</strong>s pati<strong>en</strong>ts six fois déjà,<strong>de</strong>puis son ouverture il y a <strong>de</strong>ux ans. Moi, je suis le bouche-trou du bureau ;toutes les jobs sales je me les tape ; comme aller déchiqueter les brouillonsou les contrats expirés… Les choses ont changé au bureau <strong>de</strong>puis le départ<strong>de</strong> Johny ; l’atmosphère est malsaine, <strong>en</strong>tre autres parce que <strong>plus</strong>ieursmembres du personnel ont obt<strong>en</strong>u une promotion reliée directem<strong>en</strong>t avec lasubstitution du poste que John occupait… Lu<strong>de</strong>vic a eu le poste d’assistantchefque John v<strong>en</strong>ait tout juste d’obt<strong>en</strong>ir, Roger a par le fait même obt<strong>en</strong>u lajob <strong>de</strong> Lu<strong>de</strong>vic à l’aile marketing (et la hausse <strong>de</strong> salaire qui va avec), Joséea eu le poste <strong>de</strong> Roger, Josianne celui <strong>de</strong> Josée… Un effet domino qui afrappé onze postes. Ce qui m’agace ce n’est pas vraim<strong>en</strong>t que certainespersonnes bénéfici<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la situation, mais plutôt que <strong>plus</strong>ieurs sont <strong>de</strong> toutsourire comme si <strong>de</strong> ri<strong>en</strong> n’était, ou pire <strong>en</strong>core, comme s’ils avai<strong>en</strong>t méritéleur asc<strong>en</strong>sion. Pour ma part, j’ai refusé toute promotion reliée au départ <strong>de</strong>John, par consci<strong>en</strong>ce, du moins je p<strong>en</strong>se ; excepté si je mets mon manqued’ambition dans la balance.Un lundi matin ordinaire, <strong>en</strong>core <strong>en</strong> mission pour déchiqueter du papier…Je suis sur le point d’insérer les premières feuilles pour leur <strong>de</strong>rnier voyage.(((John))) Non, ce n’est pas une apparition, mais seulem<strong>en</strong>t Roger et Lu<strong>de</strong>vic<strong>en</strong> train <strong>de</strong> jaser <strong>en</strong> privé, dans la pièce d’à-côté où sont archivés <strong>de</strong>s29


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>docum<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> comptabilité. Trop curieux, je t<strong>en</strong>ds l’oreille <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>ant soin<strong>de</strong> ne pas faire la moindre parcelle <strong>de</strong> son.– Non Roger, fais-toi <strong>en</strong> pas, y vont jamais fouiller <strong>plus</strong> loin, certain.– T’es sûr ?– Écoute-moi b<strong>en</strong>, c’est la <strong>de</strong>rnière fois qu’on <strong>en</strong> jase. Ils ont déjà conclul’<strong>en</strong>quête. John consommait comme un dévergondé dans le passé, ça lui amême valu un casier y a quelques années !– En tout cas, t’avais raison Lu<strong>de</strong>vic, le coup du gun à blanc ça l’a achevé,mais sauf que ça m’a foutu une maudite chi<strong>en</strong>ne.– J’t’avais dit que ça marcherait, le site clan<strong>de</strong>stin sur lequel j’ai pris mapetite formule était clair là-<strong>de</strong>ssus, 1 capsule suivie du choc nerveux dansles 3 heures qui suiv<strong>en</strong>t, taux <strong>de</strong> réussite <strong>de</strong> 80 % mon chum.– T’as pas <strong>de</strong> remords toi <strong>de</strong>s fois ?– Pff ! T’es-tu mala<strong>de</strong> ou quoi ? C’te jeune blanc bec <strong>de</strong> p’tit John nous avolé nos postes successivem<strong>en</strong>t un après l’autre, on a juste repris ce qui nousappart<strong>en</strong>ait avec un p’tit intérêt… Là c’est fini on <strong>en</strong> parle <strong>plus</strong>, c’est troprisqué.Je suis maint<strong>en</strong>ant seul avec leur arnaque… J’ai une peur incroyable qu’ilsne se r<strong>en</strong><strong>de</strong>nt compte que je suis au courant <strong>de</strong> leur sordi<strong>de</strong> plan et que jesais tout <strong>de</strong> leur complot sadique. Moi qui avais déjà peur d’avoir peur…Comm<strong>en</strong>t prouver une telle chose ? Si je vais à la police, ils risqu<strong>en</strong>t <strong>de</strong>m’interner moi aussi, tellem<strong>en</strong>t tout ça semble invraisemblable ! Semble-t-ilque la mère <strong>de</strong> John a recomm<strong>en</strong>cé à trouver sommeil dans les <strong>de</strong>rniersjours… Pas question d’aller la tourm<strong>en</strong>ter cette bornée avec <strong>de</strong>s <strong>histoire</strong>s àdormir <strong>de</strong>bout. Ça changerait ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> toute façon. Chacun sa route, chacunson chemin, désolé mon John, j’ai pas les couilles pour dénoncer cettemagouille. « See you au paradis mon ami. »Louis RodrigueC<strong>en</strong>tre Le Phénix, CS <strong>de</strong>s DécouvreursEnseignante : Aline Ross, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Deux Rives30


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Plus <strong>de</strong> c<strong>en</strong>t cinquante élèves ont participé <strong>en</strong> 2006-2007. Mélissa Ferron(c<strong>en</strong>tre Saint-François-Xavier, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Vieilles-Forges, Commission scolaire du Chemin-du-Roy) avoue qu’elle ne s’att<strong>en</strong>daitpas à gagner et <strong>en</strong>core moins à ce point, elle qui avait participé « pourl’amour <strong>de</strong>s mots, qu’elle écrit avec son cœur », comme <strong>en</strong> témoigne cetexte qu’elle a rédigé pour prés<strong>en</strong>ter son œuvre :Mes mots, mes chers mots.Je me souvi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> vous, d’une <strong>en</strong>seignante, <strong>de</strong> quelques lettres que je <strong>de</strong>vais composerpour un concours qui ne me disait ri<strong>en</strong>.Cette femme croyait <strong>en</strong> vous et <strong>en</strong> ma façon <strong>de</strong> jouer avec vous, je me suis donclancée.À cette époque, je voulais avoir ce bout <strong>de</strong> papier que l’on appelle diplôme, je voulaistrouver l’amour, un av<strong>en</strong>ir. Je voulais construire ma place avec les outils que le tempsm’apportait, finalem<strong>en</strong>t je voulais être bi<strong>en</strong> dans ma peau.J’ai composé et recomposé mes façons <strong>de</strong> voir la vie. Vous savez mes mots, meslettres que je vous aime.Vous ne m’avez jamais quittée, grâce à vous j’ai gagné, je me suis remplie <strong>de</strong> fierté etc’était la fête dans tout mon corps. Parmi toutes les écoles <strong>de</strong>s adultes <strong>de</strong> la province,nous étions les meilleurs, du coup, je croyais <strong>plus</strong> <strong>en</strong> mes capacités à relever les défis.<strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant, mes chers mots, j’ai <strong>de</strong>ux papiers que l’on appelle diplômes pour mesétu<strong>de</strong>s secondaires et professionnelles. Je suis une préposée aux bénéficiaires, je suismariée et je vais bi<strong>en</strong>tôt fon<strong>de</strong>r une famille dans cette jolie maison que nous avonschoisie.Et je vous retrouve <strong>en</strong>core <strong>en</strong> parcelles <strong>de</strong> lettres, je vous acrostiche, je vous voismême <strong>en</strong>dormie. My love, je m’y love les mots, maint<strong>en</strong>ant et pour toujours.Mélissa a marqué la mémoire <strong>de</strong>s personnes qui l’ont accompagnée, et son<strong>en</strong>seignante <strong>de</strong> l’époque, Christiane Asselin, se souvi<strong>en</strong>t d’une jeune femmeattachante :La classe est pleine. J’offre un cours <strong>de</strong> grammaire aux élèves <strong>de</strong> la 1 re à la 5 e secondaire.Mélissa Ferron est <strong>en</strong> <strong>alphabétisation</strong> avec Jocelyne Hébert, son <strong>en</strong>seignante,aussi éprise qu’elle et moi du verbe et <strong>de</strong> la poésie. Avec la permission <strong>de</strong> Jocelyne,pour qui elle compose <strong>de</strong>s dizaines <strong>de</strong> poèmes, Mélissa assiste donc à mes cours.Jocelyne la sait <strong>en</strong> quête <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s qui savour<strong>en</strong>t l’écriture. Si la matière ne l’interpellepas vraim<strong>en</strong>t, les mots le font allègrem<strong>en</strong>t. C’est par cette porte que nous <strong>en</strong>tronsdans son univers où se bataill<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s c<strong>en</strong>taines <strong>de</strong> textes qui veul<strong>en</strong>t sortir… Elle <strong>en</strong>écrit sans relâche et nous les partage comme <strong>de</strong>s trésors qu’ils sont.31


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Le concours est annoncé. Évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t, je le propose au groupe <strong>de</strong> jeunes que jeconsidère comme <strong>de</strong>s artistes. Certains sont musici<strong>en</strong>s sans guitare, d’autres chanteurssans parole et <strong>en</strong>fin, quelques-uns poètes sans papier. Plusieurs élèvess’inscriv<strong>en</strong>t.Mélissa travaille fort. Les émotions jailliss<strong>en</strong>t avec une application nouvelle. C’est ainsiqu’elle remportera le prix. L’épopée <strong>de</strong> ce voyage à Montréal est gravée dans nosmémoires. Mélissa voit tout, photographie tout, cause <strong>de</strong> tout.Après la lecture <strong>de</strong> son texte, le brin <strong>de</strong> tristesse qui voilait parfois son regard est<strong>de</strong>v<strong>en</strong>u soleil levé. Elle signe <strong>de</strong>s autographes à chaque personne <strong>de</strong> la salle, mais pasn’importe comm<strong>en</strong>t : un poème exclusif pour chacune !Oui, ce jour-là, Mélissa Ferron, qui se t<strong>en</strong>ait <strong>en</strong> marge du mon<strong>de</strong>, y est véritablem<strong>en</strong>t<strong>en</strong>trée, par la plume et par l’amour <strong>de</strong>s mots, mais aussi par ce concours qui lui apermis d’approfondir l’une et d’exister par l’autre.4. Mots fusionnésCoup <strong>de</strong> cœur2007Petit jardin <strong>de</strong> souv<strong>en</strong>irs, j’ai parsemé <strong>de</strong>s fleurs pour les couleurs <strong>de</strong> mesjours, pour la beauté <strong>de</strong> moi-même.Toi, petit soldat <strong>de</strong> pierre, tu gui<strong>de</strong>s mon cœur dans les éclats <strong>de</strong> granite,parcourant mes fantaisies multiples.Mon retour aux étu<strong>de</strong>s me ramène à toi, comme chacun <strong>de</strong> mes pas dans lajungle <strong>de</strong> la vie complexe.Des chiffres <strong>en</strong> forme <strong>de</strong> lettres, <strong>de</strong>s lettres <strong>en</strong> forme <strong>de</strong> mots.J’ai <strong>de</strong> la difficulté, car quand tu n’es <strong>plus</strong> là, je ne trouve aucun s<strong>en</strong>s à ma<strong>de</strong>stinée, je me refoule dans d’innombrables cahiers pour te trouver <strong>en</strong> parcelles<strong>de</strong> lettres. Je t’acrostiche, je te vois, même <strong>en</strong>dormie.Tu m’alphabétises dans la folie, tu me jures d’être mon ami, d’être là, aussiprés<strong>en</strong>t que les cheveux sur ma tête.32


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>J’ai peur que tu cesses d’exister, que tu trouves une autre tête à tourm<strong>en</strong>ter.Elles chant<strong>en</strong>t, les douces paroles, quand je coagule les raisons <strong>de</strong> t’aimer.J’amorce la réussite, mais toi et moi avons peur du <strong>de</strong>hors. « Compr<strong>en</strong>drontils? », nous sommes-nous dit…Mes 20 ans sont arrivés. Tu sonnes la porte <strong>de</strong> mon église et je t’épouse. Jevous épouse. Mots, <strong>en</strong> rafale dans ma tête, mots qui me manqu<strong>en</strong>t et quemes doigts brûl<strong>en</strong>t <strong>de</strong> composer.My love. Je m’y love les mots.Mélissa FerronC<strong>en</strong>tre Saint-François-Xavier, CS du Chemin-du-RoyEnseignante : Christiane Asselin, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Vieilles-ForgesLe Coup <strong>de</strong> cœur 2008-2009 a été décerné à Francisco Ales Gonzalez, dontla prose a été ret<strong>en</strong>ue pour son originalité parmi les 350 textes soumis àl’exam<strong>en</strong> du jury. Francisco a pondu une nouvelle aussi bi<strong>en</strong> ficelée quecolorée qui révèle les ingrédi<strong>en</strong>ts ess<strong>en</strong>tiels à une bonne recette. L’auteur,qui terminait à l’époque sa cinquième secondaire au c<strong>en</strong>tre L’Av<strong>en</strong>ir(Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong>s Moulins, Commission scolaire<strong>de</strong>s Afflu<strong>en</strong>ts), se prés<strong>en</strong>te ainsi :Je suis arrivé au Canada <strong>en</strong> octobre 2003. Après <strong>plus</strong>ieurs petits boulots et avec l’ai<strong>de</strong><strong>de</strong> Francine Lemieux d’Emploi-Québec, je suis retourné aux étu<strong>de</strong>s afin d’obt<strong>en</strong>ir unmeilleur av<strong>en</strong>ir. Ce texte n’était qu’un exercice <strong>de</strong> français que j’ai écrit pour r<strong>en</strong>dre<strong>plus</strong> agréable sa correction à mon professeur, David Leduc, qui m’a poussé à le prés<strong>en</strong>terau concours. Après une réécriture et quelques lignes supplém<strong>en</strong>taires, j’ai<strong>en</strong>fin remis mon <strong>histoire</strong> une semaine avant la clôture <strong>de</strong>s inscriptions.Le jour du dévoilem<strong>en</strong>t, le directeur du c<strong>en</strong>tre L’Av<strong>en</strong>ir, M. Vachon, m’a fait toute unesurprise <strong>en</strong> l’annonçant <strong>de</strong>vant tous les <strong>en</strong>seignants et tous les élèves réunis pourl’occasion au réfectoire. Ça a été une expéri<strong>en</strong>ce magique et le voyage à Québecpour la remise <strong>de</strong>s prix, avec mon épouse, un mom<strong>en</strong>t inoubliable. D’autant <strong>plus</strong>inoubliable que j’ai fait <strong>de</strong> ce mom<strong>en</strong>t « notre mom<strong>en</strong>t » <strong>en</strong> lui <strong>de</strong>mandant sa main<strong>de</strong>vant l’assemblée prés<strong>en</strong>te. La chance m’était donnée <strong>de</strong> remercier tous ceux quiœuvr<strong>en</strong>t pour l’éducation ainsi que ma femme pour son inébranlable confiance.33


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>La suite est tout aussi merveilleuse, j’ai réussi mon exam<strong>en</strong> d’<strong>en</strong>trée à l’école <strong>de</strong>smétiers <strong>de</strong> l’aérospatiale <strong>de</strong> Montréal et, DEP <strong>en</strong> main, je me suis lancé à la recherche<strong>de</strong> mon emploi <strong>de</strong> rêve. Je suis fier aujourd’hui d’être monteur mécanique <strong>en</strong> aérospatiale,au service <strong>de</strong> la société MDA <strong>de</strong>puis un an et <strong>de</strong>mi. Je fabrique <strong>de</strong>s satellites<strong>de</strong> communication à côté <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s formidables, comme M. Lacoste, qui ont travailléà la réalisation du bras canadi<strong>en</strong>.Je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u citoy<strong>en</strong> <strong>de</strong> ce pays. Il m’a permis <strong>de</strong> réaliser mes rêves et ces g<strong>en</strong>s ontaidé à ma réussite <strong>en</strong> m’accompagnant dans mes efforts. Encore une fois, merci àtoutes et à tous.David Leduc, Francisco Ales Gonzalez,JiCi Lauzon.D’ailleurs, son <strong>en</strong>seignant David Leduc sesouvi<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> cet élève :C’est incroyable comm<strong>en</strong>t les mots voyag<strong>en</strong>t etnous permett<strong>en</strong>t <strong>de</strong> vivre <strong>de</strong>s expéri<strong>en</strong>ces aussiriches que diversifiées. C’était <strong>en</strong> décembre 2008,un matin comme les autres dans la routine <strong>de</strong>s<strong>de</strong>rnières journées avant les vacances <strong>de</strong> Noël.Certains élèves s’efforçai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s idéesgéniales pour leurs compositions ; d’autres se<strong>de</strong>mandai<strong>en</strong>t à quoi pouvait bi<strong>en</strong> leur servir le participe passé employé avec avoirdans la vie !Sur mon tableau noir, dans la colonne « CORRECTIONS », il y avait le nom <strong>de</strong>Francisco Ales Gonzalez. Je me suis r<strong>en</strong>du à son bureau pour corriger son texte <strong>de</strong>révision grammaticale… mais ce qui m’att<strong>en</strong>dait, c’était un petit bijou d’imaginationà la fois rafraîchissant et naïf (dans le beau s<strong>en</strong>s du terme). À côté <strong>de</strong> la colonne« CORRECTIONS », il y avait l’affiche <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>. J’ai incité Francisco àsoumettre son texte…Imaginez… Il n’était pas certain <strong>de</strong> la qualité ! Finalem<strong>en</strong>t, après quelques jours <strong>de</strong>réflexion, il m’est arrivé avec une version revue et améliorée, celle que vous pouvezlire dans ce recueil. Nous avons expédié le texte au syndicat à la date limite… commeune bonne transaction au hockey qui permet d’aspirer à la coupe Stanley ! Au cours<strong>de</strong>s années, il y a toujours eu un mom<strong>en</strong>t où le texte <strong>de</strong> Francisco a eu <strong>de</strong>s échos. Parexemple, le chanteur Thomas Hellman a déjà lu Le pim<strong>en</strong>t rouge masqué lors d’unévénem<strong>en</strong>t à Montréal.Je suis très fier et très heureux d’avoir pu côtoyer Francisco. Il créait une <strong>belle</strong> atmosphèredans la classe et pr<strong>en</strong>ait part à une multitu<strong>de</strong> d’événem<strong>en</strong>ts <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>scours. « Les mots val<strong>en</strong>t la peine qu’on les vive », disait Vigneault. En voilà un bonexemple.34


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>5. Le pim<strong>en</strong>t rouge masquéCoup <strong>de</strong> cœur2009À ma louveAvec tout mon amourLe secret <strong>de</strong> la réussite consiste à bi<strong>en</strong> choisir ses ingrédi<strong>en</strong>ts. Le respect <strong>de</strong>la recette est primordial. Les quantités et le temps <strong>de</strong> cuisson ont une inci<strong>de</strong>ncedirecte sur le résultat final. Les épices sont les notes <strong>de</strong> musique quivi<strong>en</strong>dront ponctuer la partition <strong>de</strong> saveurs qui compos<strong>en</strong>t votre plat. Tous les« GRANDS CHEFS » vous le diront : l’ordre et la discipline font partie <strong>de</strong>srègles <strong>de</strong> base dans toutes « les cuisines » dignes <strong>de</strong> ce nom et c’est ainsi tousles jours. <strong>Ma</strong>is il arrive parfois que…Il faisait assez beau ce jour-là, une journée <strong>en</strong>soleillée suffisamm<strong>en</strong>t fraîchepour ne pas avoir à ouvrir la f<strong>en</strong>être. C’était bi<strong>en</strong> avant l’heure du repas, lamaison était <strong>en</strong>core calme comme chaque avant-midi. Tout laissait p<strong>en</strong>serque le jour s’écoulerait quiètem<strong>en</strong>t dans cette « pratico-pratique » cuisinesuédoise assemblée… Qui aurait pu imaginer qu’un drame culinaire allaitmettre son nez dans la farine ? Personne… Non, pas même les ingrédi<strong>en</strong>tsprés<strong>en</strong>ts qui s’apprêtai<strong>en</strong>t à vivre un méli-mélo digne d’un plat <strong>de</strong> nouillesasiatiques. Tous étai<strong>en</strong>t arrivés dans le calme le <strong>plus</strong> complet et <strong>en</strong> ordre<strong>de</strong>vant le chaudron. Tous, à part peut-être trois jeunes patates qui ne respectai<strong>en</strong>tpas la file d’att<strong>en</strong>te. Leur jeu allait, malgré elles, être l’instigateur <strong>de</strong>cette funeste av<strong>en</strong>ture. Le fait que ce soi<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s pommes <strong>de</strong> terre « nouvelles» n’allait pas excuser leur sottise.Le regard réprobateur <strong>de</strong> l’assistance n’avait pour effet que <strong>de</strong> les amuserdavantage et v<strong>en</strong>ir nourrir leurs railleries, ce qui choquait, car personneavant n’avait osé sortir du moule. Un tel comportem<strong>en</strong>t était imp<strong>en</strong>sable et,<strong>en</strong>tre sauts et bouscula<strong>de</strong>s, l’inévitable survint : la <strong>plus</strong> maladroite <strong>de</strong>s troistubercules s’emmêla les germes et tomba dans l’huile qui frémissait d’impati<strong>en</strong>ce.Ce légume v<strong>en</strong>ait, par acci<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong> bouleverser l’ordre établi. Le grosnavet, qui v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> perdre sa place, protesta. Cela faisait <strong>de</strong>s années qu’iloccupait cette place, <strong>de</strong>rrière l’oignon, mais <strong>de</strong>vant la carotte qui v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong>se râper le cou<strong>de</strong> <strong>en</strong> glissant sur le comptoir <strong>de</strong> marbre noir. Qu’allait-il sepasser maint<strong>en</strong>ant ?35


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Les légumes se tournèr<strong>en</strong>t alors vers le chou-fleur qui faisait office <strong>de</strong> jugedans les cas délicats, chacun y allait <strong>de</strong> son comm<strong>en</strong>taire dans un brouhahagrandissant afin <strong>de</strong> l’interpeller. Le vieux sage, amer comme du chocolatnoir, ne sut que dire, jamais telle situation n’avait eu lieu auparavant.Comm<strong>en</strong>t se sortir <strong>de</strong> cette sala<strong>de</strong> ? Les avocats, d’habitu<strong>de</strong> si loquaces, faisai<strong>en</strong>tune face <strong>de</strong> fruits confits. L’aubergine, avec son cœur d’artichautqu’on lui connaît, avait <strong>de</strong>s papillotes dans l’estomac. Toute cette déconfitureexhortait le citron vert, il était pressé <strong>de</strong> montrer quel fin limier il était.D’autres, au contraire, s’amusai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> voir cette affaire pr<strong>en</strong>dre comme unemayonnaise. C’est le cas du céleri, qui se payait une bonne tranche <strong>de</strong> rireavec ses acolytes, avec ses réflexions comme : « Battez-vous, ça fera unemacédoine ! Les carottes sont cuites ! Plus il y a <strong>de</strong> fous, moins il y a <strong>de</strong> riz !Dessers le cerf et sers le <strong>de</strong>ssert ! » Les l<strong>en</strong>tilles convergeai<strong>en</strong>t vers l’<strong>en</strong>droitd’où prov<strong>en</strong>ait toute cette agitation.L’opinion <strong>de</strong>s pignons ne comptait pour personne ; la tomate, saupoudrée <strong>de</strong>doutes et inquiète, mijotait dans son jus <strong>en</strong> se <strong>de</strong>mandant pourquoi on <strong>en</strong>faisait tout un fromage. La citrouille, bonne pâte, mais pas vieille croûtepour autant, voyait que ça tournait au vinaigre. « Ras-le-bol ! » se dit-elle.C’est alors que l’extraordinaire survint, v<strong>en</strong>u <strong>de</strong> nulle part, pour ajouter songrain <strong>de</strong> sel, le pim<strong>en</strong>t rouge masqué apparut comme un cheveu sur lasoupe. Nos amis vitaminés qui cuisai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> trouver une solution, poussèr<strong>en</strong>tun fumet <strong>de</strong> soulagem<strong>en</strong>t, celui dont la robe <strong>en</strong>soleillait nos ratatouillesavait-il la solution ?– Mes frères ! Inutile <strong>de</strong> vous brouiller ou <strong>de</strong> vous battre comme <strong>de</strong>s œufs,dit-il avec assurance. Que ceux dont la chair est ferme y aill<strong>en</strong>t <strong>en</strong> premierafin qu’ils cuis<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> longuem<strong>en</strong>t, les autres suivront quelques minutesaprès.– Assurém<strong>en</strong>t, dit la crème, sûre d’elle.– Pourquoi n’y avons-nous pas p<strong>en</strong>sé avant ? s’indigna un grand nombre.– Ça s<strong>en</strong>tait le roussi ! s’exclama un autre.36


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>C’est alors que reprit la tambouille, aucun ne manqua <strong>de</strong> saluer le héros <strong>de</strong>ce plat, il n’avait pas fait chou blanc et, grâce à lui, tout finit à point.Francisco Ales Gonzalez, 2 e cycle / Préparation aux étu<strong>de</strong>s postsecondairesC<strong>en</strong>tre L’Av<strong>en</strong>ir, CS <strong>de</strong>s Afflu<strong>en</strong>tsEnseignant : David Leduc, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong>s MoulinsDiane McNicoll, <strong>de</strong> Chambord (c<strong>en</strong>tre L’Envol, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> Louis-Hémon, Commission scolaire du Pays-<strong>de</strong>s-Bleuets), a vécu <strong>de</strong>sannées <strong>de</strong> grands bouleversem<strong>en</strong>ts avant <strong>de</strong> voir son texte reconnu <strong>en</strong> 2009-2010. Il y eut d’abord la perte <strong>de</strong> son emploi chez Louisiana Pacific : elle seretrouvait tout à coup avec ri<strong>en</strong> <strong>de</strong>vant elle. Puis, <strong>en</strong> 2007, sa petite-fillerecevait un diagnostic <strong>de</strong> cancer :Je pleurais, je mangeais, je ne voulais <strong>plus</strong> me coucher et je ne voulais <strong>plus</strong> me lever.Je n’avais <strong>plus</strong> le goût à ri<strong>en</strong>. <strong>Ma</strong> petite-fille <strong>de</strong>meurait chez moi et je m’occupaisd’elle jour et nuit, car elle était gavée 20 heures sur 24. La voir ainsi, intubée, sanscheveux et sans force m’a permis <strong>de</strong> me relever et cela m’a conduit à un retour auxétu<strong>de</strong>s. Je savais qu’il y avait <strong>de</strong>s programmes pour les pertes d’emploi et mon ex m’a<strong>en</strong>couragée. En 2009, j’ai participé au concours et j’espérais me retrouver dans lelivre <strong>de</strong>s <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>s <strong>histoire</strong>s. Imaginez ma surprise <strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dant mon nom dans lehaut-parleur <strong>de</strong> l’école. J’ai été très émue. <strong>Ma</strong> petite-fille a été ma source d’inspiration,parce que <strong>de</strong>puis sa naissance, nous avons un li<strong>en</strong> très spécial et j’ai aussi lebonheur <strong>de</strong> l’avoir près <strong>de</strong> moi. En p<strong>en</strong>sant à elle, les mots se sont mis à courir sur lepapier ; une bonne thérapie. Remporter le Coup <strong>de</strong>cœur n’a ri<strong>en</strong> changé dans ma vie sur le plan académique,mais, sur le plan personnel, je suis fière <strong>de</strong> moi,car mon estime <strong>de</strong> soi n’était pas très haute à cemom<strong>en</strong>t-là. Ensuite, j’ai terminé ma 5 e secondaire et jeme suis inscrite à un cours d’éducation à l’<strong>en</strong>fance. Jesuis fière <strong>de</strong> moi d’avoir réussi mes étu<strong>de</strong>s. Actuellem<strong>en</strong>t,je travaille avec les personnes âgées et à temps partiel<strong>en</strong> gar<strong>de</strong>rie dans <strong>de</strong>s milieux familiaux. Dans un procheav<strong>en</strong>ir, j’espère me trouver un troisième emploi mieuxrémunéré. Tous les soirs avant <strong>de</strong> m’<strong>en</strong>dormir, jeDiane McNicoll, Lydia BouchardParadis (petite-fille), ClaudieLaroche.<strong>de</strong>man<strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> ceux que j’aime à Jésus et àmon ange gardi<strong>en</strong> et je p<strong>en</strong>se qu’il faut mordre dans lavie à pleines <strong>de</strong>nts.37


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Son <strong>en</strong>seignante <strong>de</strong> l’époque, Claudie Laroche, nous décrit ainsi le « parcoursd’une battante » :Diane McNicoll est une fonceuse. Elle a effectué un retour aux étu<strong>de</strong>s après la perte<strong>de</strong> son emploi. Retourner sur les bancs d’école, ce n’est jamais facile et <strong>en</strong>core moinsà l’aube <strong>de</strong> ses 48 ans. Ainsi, <strong>de</strong> son cheminem<strong>en</strong>t scolaire jusqu’au professionnel,ri<strong>en</strong> ne lui a été donné, mais elle n’a jamais abandonné. Par ailleurs, sa vie personnelleaussi a connu <strong>de</strong>s chambar<strong>de</strong>m<strong>en</strong>ts. Cette femme a traversé <strong>plus</strong>ieurs épreuvesqui aurai<strong>en</strong>t pu décourager n’importe qui, mais pas elle.En effet, la vie n’a pas été t<strong>en</strong>dre avec Diane, cep<strong>en</strong>dant, ces difficultés ont su, jecrois, la r<strong>en</strong>dre <strong>plus</strong> forte. Cette <strong>de</strong>rnière frappe du <strong>de</strong>stin, le cancer <strong>de</strong> sa petite-fille,a été dévastatrice, mais <strong>en</strong>core une fois, Diane s’est relevée. Et finalem<strong>en</strong>t, son petittrésor a connu la rémission.MPBH était pour elle l’occasion <strong>de</strong> libérer <strong>en</strong> mots ce qui, parfois, s’avère trop difficile<strong>en</strong> paroles. Le travail s’est révélé ardu, l’effet saisissant et le résultat, ô combi<strong>en</strong>libérateur !Merci <strong>de</strong> nous avoir permis d’<strong>en</strong>trer, l’espace d’un court mom<strong>en</strong>t, dans ce mon<strong>de</strong>vibrant d’émotions.L’<strong>histoire</strong> soumise par Diane McNicoll a même eu <strong>de</strong>s répercussions dans la presselocale. Le 23 mars 2010, Daniel Migneault, chroniqueur à L’Étoile du Lac, soulignaitque : « En effet, il faut beaucoup <strong>de</strong> persévérance et <strong>de</strong> courage pour effectuer unretour aux étu<strong>de</strong>s. » C’est ainsi que la vie apporte souv<strong>en</strong>t son lot <strong>de</strong> contradictions.D’une vie bouleversée, tant du point <strong>de</strong> vue personnel que professionnel, est néel’inspiration qui a redonné l’espoir à une grand-mère et nous a donné le texte quevoici :38


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>6. Le courage d’une championneCoup <strong>de</strong> cœur2010Elle court dans tous les s<strong>en</strong>s, <strong>en</strong>jouée.Elle est amusante, excitée,Assise dans son fauteuil préféré,Couchée par terre, allongée.Moi, souriante, je la contemple ainsi,Déployée sur le dos, si jolie.Je regar<strong>de</strong> ma petite-fille adorée,<strong>Ma</strong> <strong>belle</strong> aux yeux bleu azuré.Elle observe d’un regard étonnéSon petit v<strong>en</strong>tre, <strong>plus</strong> gros d’un côté.Je m’assois près d’elle, consternée.Je l’examine à mon tour, hébétée.Du haut <strong>de</strong> ses trois pieds, elle me dit :« Bi<strong>en</strong>tôt, il va me falloir un appui. »Elle, qui n’a pas <strong>en</strong>core cinq ans,Je la serre et l’embrasse t<strong>en</strong>drem<strong>en</strong>t.Tous les soirs, brûlante dans son lit,L’angoisse s’installe pour la nuit.Elle tousse sans pouvoir s’arrêter.Et moi, dans mon lit, je suis réveillée et troublée.Courage, je suis toujours làAprès tous les exam<strong>en</strong>s passés,Des mois s’écoul<strong>en</strong>t sans ri<strong>en</strong> trouver.R<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous chez le mé<strong>de</strong>cin,Aussitôt à l’urg<strong>en</strong>ce pour <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s.39


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Après une longue att<strong>en</strong>te, tourm<strong>en</strong>tée,Sa petite frimousse angoissée,Ét<strong>en</strong>due sur un lit, elle se pose <strong>de</strong>s questions.Je lui dis <strong>de</strong> faire att<strong>en</strong>tion.Les exam<strong>en</strong>s terminés, <strong>en</strong>core nous att<strong>en</strong>dons.« Le spécialiste du rein, que c’est long ! »« Deux heures d’att<strong>en</strong>te, c’est l’<strong>en</strong>fer ! »Pour nous dire qu’elle a un cancer.Une masse <strong>de</strong> la grosseur d’une tête <strong>de</strong> bébé,Sur son rein gauche, écrasé.Nous suffoquons <strong>de</strong> panique et <strong>de</strong> pleurs,Mon petit trésor, amour <strong>de</strong> mon cœur.Le cœur gros, nous repartons à la maison avec elle.Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main à sept heures, un appel.Le mé<strong>de</strong>cin nous dit <strong>de</strong> nous déplacerAu CHUL à Québec, pour la faire opérer.Courage, je suis toujours làPauvre petite, elle ne compr<strong>en</strong>d ri<strong>en</strong>.C’est nous les mala<strong>de</strong>s, elle se dit bi<strong>en</strong>.Dans son lit d’hôpital, elle s’émeut,Pas moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> la toucher, elle nous <strong>en</strong> veut.En fin <strong>de</strong> journée, les mé<strong>de</strong>cins l’opèr<strong>en</strong>t.En chirurgie, <strong>de</strong> peine et <strong>de</strong> misère.Une interv<strong>en</strong>tion d’<strong>en</strong>viron quatre heuresQui, finalem<strong>en</strong>t, dure sept heures.Petit amour, piquée partout, intubée,En la voyant, nous sommes sidérés.Les infirmières n’<strong>en</strong> finiss<strong>en</strong>t <strong>plus</strong>D’essayer <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s veines qu’elle n’a <strong>plus</strong>.Enfin, dans sa chambre, elle sommeille.Les infirmières sont <strong>de</strong>s merveilles.Elle se repose et essaie <strong>de</strong> récupérer,Parce que la « chimio » doit débuter.40


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Quelques jours pass<strong>en</strong>t, le cauchemar r<strong>en</strong>aît.Elle rejette sa nourriture, la température réapparaît.Elle pleure, elle se lam<strong>en</strong>te et a mal à l’estomac.Les mé<strong>de</strong>cins sont impuissants face à son état.Courage, je suis toujours làIls lui <strong>en</strong>lèv<strong>en</strong>t son tube à gavage,Pour lui remettre un tube à drainage.De son intraveineuse, sort du liqui<strong>de</strong> noir et sale,Les infirmières dis<strong>en</strong>t que c’est normal.Je reste à ses côtés, jour et nuit,Sur le divan, à côté d’elle, <strong>en</strong>dormie.Elle se réveille, se tortille et pleure.On lui donne <strong>de</strong> la morphine toutes les quatre heures.À l’hôpital pour une semaine,Deux mois pass<strong>en</strong>t, toujours la même r<strong>en</strong>gaine.Intubée, un médicam<strong>en</strong>t pour stimuler l’estomac,Et un autre pour protéger son état.Les chirurgi<strong>en</strong>s se réuniss<strong>en</strong>t tous les <strong>de</strong>ux,Se regar<strong>de</strong>nt et s’interrog<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s yeux.La décision prise, ils déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la réopérer,Et découvr<strong>en</strong>t son intestin grêle bloqué.La voir heureuse, c’est un <strong>en</strong>chantem<strong>en</strong>t.Nous décidons <strong>de</strong> lui fêter ses cinq ans,Avec son « papi », les infirmières et son père à ses côtés,Qui dans un acci<strong>de</strong>nt, meurt au mois <strong>de</strong> juin, noyé.Courage, je suis toujours làLe soir même, recomm<strong>en</strong>ce le tourm<strong>en</strong>t,Les joues rouges, souffrance et vomissem<strong>en</strong>ts.Je pleure à ses côtés, désarmée, anéantie,Par le mauvais sort <strong>de</strong> la vie.41


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Au matin, une transfusion <strong>de</strong> sang,Il faut la préparer tout doucem<strong>en</strong>t.Il est impératif <strong>de</strong> comm<strong>en</strong>cer la chimiothérapie,À cause <strong>de</strong>s métastases, ces damnées <strong>en</strong>nemies.Tous les jours, on lui passe <strong>de</strong>s exam<strong>en</strong>s,Prises <strong>de</strong> sang, échographies, pour évaluer son rein.Elle pleure, a mal, a peur.Je console comme je peux, mon petit cœur.Encore <strong>de</strong>ux autres mois <strong>de</strong> calvaire,À se consulter, pour ce qu’ils doiv<strong>en</strong>t faire.Quand tout à coup, est arrivéeUne docteure, qui veut la réopérer.Le dimanche matin, <strong>en</strong> chirurgie,Encore une laparoscopieEncore <strong>de</strong>s questions,Une autre incision.Courage, je suis toujours làAprès cette opération réussie,Pâle dans son lit, <strong>en</strong>dormie,Un vrai petit soldat courageux.Une semaine après, elle va mieux.De retour à la maison,Ses amis ont peur d’elle, avec raison :Plus <strong>de</strong> cheveux et intubée par le nez.Après un an et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong> gavage, elle recomm<strong>en</strong>ce à manger.Aujourd’hui <strong>en</strong> rémission,Je suis fière d’elle, pleine d’émotions.Avec <strong>de</strong> nouveaux amis autour d’elle,Se regar<strong>de</strong> dans le miroir, se trouve <strong>belle</strong>.Elle repart à toute allure, aussi vite,Tourne sur elle-même, ma petite,Sur le bout <strong>de</strong>s pieds, face au ciel,Qu’elle est <strong>belle</strong> !42


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Elle court, danse et chante,Cette petite boule d’énergie, rayonnante,Qui redonne un s<strong>en</strong>s à ma vie,<strong>Ma</strong> petite-fille à moi, Lydia Bouchard Paradis.Courage, tu es toujours làDiane McNicoll, Préparation aux étu<strong>de</strong>s postsecondairesC<strong>en</strong>tre L’Envol, CS du Pays-<strong>de</strong>s-BleuetsEnseignante : Claudie Laroche, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> Louis-HémonLa huitième édition a vu Colette Vézina, du c<strong>en</strong>tre Monseigneur-Côté(Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Bois-Francs, Commission scolaire <strong>de</strong>s Bois-Francs) remporter les grands honneurs. Elle se souvi<strong>en</strong>t très bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> sonav<strong>en</strong>ture littéraire :C’est à l’automne 2010, après 18 mois d’inertie, une perte d’emploi et une dépression,que je me retrouve au c<strong>en</strong>tre local d’emploi pour y chercher <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> afin <strong>de</strong>retourner sur le marché du travail. C’est à ce mom<strong>en</strong>t que l’on m’offre l’opportunité<strong>de</strong> suivre une formation aux adultes me permettant d’acquérir ce qui m’ai<strong>de</strong>ra à metrouver un nouvel emploi.Ayant déjà <strong>en</strong> poche un diplôme <strong>de</strong> 5 e secondaire et un DEP <strong>en</strong> coiffure qui onttr<strong>en</strong>te ans d’âge, je déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire une révision volontaire qui ne peut certainem<strong>en</strong>tpas faire <strong>de</strong> tort. Quand le concours se prés<strong>en</strong>te, j’y vois l’occasion <strong>de</strong> m’exprimer,<strong>de</strong> jouer avec les mots et surtout la possibilité <strong>de</strong> lire les <strong>histoire</strong>s <strong>de</strong>s autres étudiants.C’est un projet qui souti<strong>en</strong>t mon intérêt p<strong>en</strong>dant <strong>plus</strong>ieurs semaines et qui me donnemon premier coup d’<strong>en</strong>vol dans cette expéri<strong>en</strong>ce difficile <strong>de</strong> ma vie.À ma gran<strong>de</strong> surprise, j’appr<strong>en</strong>ds <strong>en</strong> mars 2011 que mon texte est choisi parmi450 autres <strong>histoire</strong>s prov<strong>en</strong>ant <strong>de</strong> différ<strong>en</strong>tes écoles. Quelle joie <strong>de</strong> découvrir que <strong>de</strong>spersonnes inconnues reconnaiss<strong>en</strong>t mon travail ! Mon texte, qui amène une réflexionsur la mémoire olfactive, rappelle que chaque o<strong>de</strong>ur agréable ou désagréable nousremémore une <strong>histoire</strong>.Hasard, coïnci<strong>de</strong>nce ou prémonition, je ne sais comm<strong>en</strong>t l’exprimer, mais aujourd’hui,je travaille comme conseillère aux cosmétiques dans une pharmacie. Je suis <strong>en</strong> formationcontinue <strong>en</strong> ce qui a trait aux soins <strong>de</strong> la peau et <strong>en</strong> parfumerie. Je travailledonc dans un milieu qui m’allume, qui comble ma soif d’appr<strong>en</strong>dre, qui est plein <strong>de</strong>petites douceurs et surtout d’o<strong>de</strong>urs.43


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Merci à toutes les personnes qui travaill<strong>en</strong>t <strong>de</strong> près ou <strong>de</strong> loin à l’élaboration duprojet <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, à votre façon, vous faites une différ<strong>en</strong>ce dans la vie <strong>de</strong>sg<strong>en</strong>s. Je ne me considère pas une auteure, mais cette expéri<strong>en</strong>ce d’écriture m’a permis<strong>de</strong> reconnaître ma valeur, d’avoir <strong>plus</strong> d’assurance et surtout <strong>de</strong> croire <strong>en</strong> monpot<strong>en</strong>tiel.La prési<strong>de</strong>nte du Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Bois-Francs (SEBF), NancieLafond, nous prés<strong>en</strong>te une femme pour qui le retour aux étu<strong>de</strong>s et le prix ontcontribué à construire une <strong>belle</strong> assurance :<strong>Ma</strong>dame Vézina mérite, à bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s égards, toute notre admiration. Après <strong>plus</strong>ieursannées sur le marché du travail, cette femme <strong>de</strong> tête et <strong>de</strong> cœur a pris la décisiond’effectuer un retour aux étu<strong>de</strong>s.Au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> s’inscrire, notre auteure était à mille lieues <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser qu’elle remporteraitles grands honneurs. Avec La chasse aux o<strong>de</strong>urs, qui nous <strong>en</strong>traîne dans unmon<strong>de</strong> rempli <strong>de</strong> parfums et d’images, elle a réussi à attirer l’att<strong>en</strong>tion du jury et àséduire bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s lecteurs.Discrète et sans prét<strong>en</strong>tion, elle n’a pas dévoilé à son <strong>en</strong>tourage sa participation auconcours. Aussi, s’il est évi<strong>de</strong>nt que la surprise <strong>de</strong> ses proches fut totale à l’annonce<strong>de</strong> sa victoire, leur fierté et leur bonheur étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core <strong>plus</strong> int<strong>en</strong>ses <strong>de</strong>vant sonaccomplissem<strong>en</strong>t et, surtout, son imm<strong>en</strong>se tal<strong>en</strong>t.Hugues Laroche, <strong>de</strong> KYQ-FM, a d’ailleurs repris le communiqué émis par leSEBF à l’occasion d’un reportage sur la Semaine québécoise <strong>de</strong>s adultes <strong>en</strong>formation.7. La chasse aux o<strong>de</strong>ursCoup <strong>de</strong> cœur2011Vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z-vous parfois pourquoi tel air vous r<strong>en</strong>d très heureux, tandisqu’un autre vous rappelle un mom<strong>en</strong>t nostalgique ? Pourquoi une saveurvous répugne, tandis qu’une autre ravit vos papilles ? Dans mon cas, ce sontles o<strong>de</strong>urs qui m’allum<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis ma <strong>plus</strong> t<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>fance. Déjà toute petite,j’adorais coller mon nez partout afin <strong>de</strong> découvrir les textures et les parfums,que ce soit la lessive propre qui séchait dans la gran<strong>de</strong> cuisine ou les poilssoyeux et doux <strong>de</strong>s petits chatons qui v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> naître et qui embaumai<strong>en</strong>t44


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>le foin <strong>de</strong> la grange. Tel un répertoire, toutes ces o<strong>de</strong>urs amèn<strong>en</strong>t avec ellesun épiso<strong>de</strong> triste ou <strong>plus</strong>ieurs évènem<strong>en</strong>ts agréables <strong>de</strong> ma vie.D’ailleurs, il n’y a pas <strong>de</strong> meilleur <strong>en</strong>droit que le c<strong>en</strong>tre commercial pourretrouver cette s<strong>en</strong>sation <strong>de</strong> titillem<strong>en</strong>t dans mes narines qui évoque à la foisautant <strong>de</strong> désirs que <strong>de</strong> plaisirs. Ce mélange d’effluves remet mes s<strong>en</strong>s <strong>en</strong>éveil, le bon café aux émanations <strong>de</strong> vanille m’attire automatiquem<strong>en</strong>t versla brûlerie. Ah ! c’est réconfortant comme l’aube <strong>de</strong> mon <strong>en</strong>fance où, blottiedans mon lit, j’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>ds les chuchotem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> mes par<strong>en</strong>ts qui se prépar<strong>en</strong>tpour le travail. Tandis qu’ils s’affair<strong>en</strong>t au petit déjeuner, le cliquetis <strong>de</strong>scuillères sur le rebord <strong>de</strong>s tasses chante l’heure du lever pour mon frère etmoi.<strong>Ma</strong>is quelle est donc cette o<strong>de</strong>ur qui me ramène à la réalité ? Cela ne provi<strong>en</strong>tcertainem<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> mon café. N’<strong>en</strong> trouvant pas la prov<strong>en</strong>ance, je medirige <strong>de</strong> ce pas vers la pharmacie. Il y a un nouvel assouplissant textile <strong>en</strong>sol<strong>de</strong> cette semaine. Fraîcheur printanière, bruine matinale, fleurs <strong>de</strong> printempssont autant <strong>de</strong> parfums qui m’étourdiss<strong>en</strong>t et me propuls<strong>en</strong>t dans unimm<strong>en</strong>se champ <strong>de</strong> marguerites. J’attache les tiges pour <strong>en</strong> faire un collier,un bracelet et <strong>en</strong>fin une couronne. Je clame haut et fort que je suis la princesse<strong>de</strong>s fleurs qui att<strong>en</strong>d son prince charmant. Il n’y a pas si longtemps,c’était les piss<strong>en</strong>lits <strong>en</strong>filés l’un dans l’autre qui faisai<strong>en</strong>t office d’apparatautour <strong>de</strong> mon cou et aux boutonnières <strong>de</strong> mon chemisier. De grosses tachesbrunâtres couvrai<strong>en</strong>t mes m<strong>en</strong>ottes et souillai<strong>en</strong>t mes vêtem<strong>en</strong>ts au granddésespoir <strong>de</strong> maman.Ah ! ah ! <strong>en</strong>core cette o<strong>de</strong>ur sucrée et apaisante qui trouble ma recherche <strong>de</strong>fragrance. <strong>Ma</strong>is d’où provi<strong>en</strong>t-elle ? Pas sous le bouchon <strong>de</strong> bruine d’été <strong>en</strong>tout cas ! Je cherche tant bi<strong>en</strong> que mal à la repérer <strong>en</strong> humant du mieux queje peux, me dirigeant d’une boutique à une autre. Je crois que ça y est ! Lesbrioches fumantes aux pommes et à saveur <strong>de</strong> cannelle sont maint<strong>en</strong>ant mapriorité, car mes papilles s’excit<strong>en</strong>t et saliv<strong>en</strong>t à <strong>en</strong> perdre tout contrôle.Comme ils sont doux les samedis matin <strong>de</strong> mon <strong>en</strong>fance ! Mon cousin quihabite les terres adjac<strong>en</strong>tes à notre ferme m’accompagne pour le petit déjeuner.Il ti<strong>en</strong>t le rôle <strong>de</strong> grand frère, <strong>de</strong> gardi<strong>en</strong>, <strong>de</strong> compagnon <strong>de</strong> jeux et <strong>de</strong><strong>plus</strong> fidèle dégustateur <strong>de</strong>s pâtisseries <strong>de</strong> ma mère. Au fait, je ne sais pas s’ilmange toujours ce délice pour déjeuner ? Cette fois, ce parfum qui m’attireet m’intrigue <strong>de</strong>puis le début <strong>de</strong> la matinée est <strong>plus</strong> prés<strong>en</strong>t que jamais, pasquestion <strong>de</strong> le perdre à nouveau. Tel un chi<strong>en</strong> policier, je me conc<strong>en</strong>tre surle lieu où je dois me diriger et je pr<strong>en</strong>ds la ferme décision <strong>de</strong> ne pas melaisser distraire par quoi que ce soit. Mon organe olfactif me conduit45


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>directem<strong>en</strong>t à la parfumerie du magasin Sears. <strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant je me rappelle,c’est le parfum que j’ai offert à mon père le jour <strong>de</strong> son anniversaire il y aquelques années. Il l’appréciait tellem<strong>en</strong>t qu’il s’<strong>en</strong> aspergeaitquotidi<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t.Il y a longtemps tout ça ! Au moins quinze ans que j’avais oublié cette o<strong>de</strong>urfamilière. Ce jour <strong>de</strong> janvier où j’ai déposé ton flacon <strong>en</strong>core fraîchem<strong>en</strong>tdéballé dans un sac <strong>de</strong> plastique avec tous tes effets personnels a été l’une<strong>de</strong>s choses les <strong>plus</strong> difficiles à faire après ton décès, papa. Le temps s’est figécomme ce premier mois <strong>de</strong> l’année où il y a, pour un certain temps, <strong>de</strong>longues pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> noirceur et <strong>de</strong> froid glacial. Il n’y a pas que ton o<strong>de</strong>urcorporelle qui fait faux bond dans ma mémoire. Quand je ferme les yeux,même les traits <strong>de</strong> ton visage s’estomp<strong>en</strong>t jusqu’à disparaître tel un reflet surl’eau d’un lac. Les sons qui éman<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ta bouche rieuse se per<strong>de</strong>nt commele souffle du v<strong>en</strong>t dans la cime <strong>de</strong>s arbres.<strong>Ma</strong>is tout n’est pas perdu ; je m’empresse d’abor<strong>de</strong>r l’esthétici<strong>en</strong>ne quis’affaire à son prés<strong>en</strong>toir. « S’il vous plaît madame, je cherche un parfum… »Devant cet étalage <strong>de</strong> multiples flacons, il est impossible <strong>de</strong> déterminer aveccertitu<strong>de</strong> ce que mon nez hume <strong>de</strong>puis le début <strong>de</strong> la journée. « Si vousconnaissez le nom ou la compagnie, ce serait <strong>plus</strong> facile, me répond-elle… »Le nom joue à cache-cache dans ma cervelle, si près du but, je le touchaispresque et il s’est <strong>en</strong>core <strong>en</strong>volé avec son propriétaire qui faisait probablem<strong>en</strong>tses courses du samedi matin comme moi. Comm<strong>en</strong>t expliquer à cettev<strong>en</strong><strong>de</strong>use que c’est un parfum <strong>en</strong>veloppant, chaleureux, réconfortant,aimant, doux comme la caresse d’un par<strong>en</strong>t que je désire ? Parfois, je m’imagineque <strong>de</strong> là-haut, c’est toi papa qui me taquines avec un autre <strong>de</strong> tes bonstours.Pourquoi oublie-t-on le titre d’une chanson qui nous a fait vibrer ? Pourquoioublie-t-on les traits <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s que l’on a aimés ? Pourquoi oublie-t-on le son<strong>de</strong> la voix <strong>de</strong>s personnes que l’on a côtoyées quotidi<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>sannées ? Finalem<strong>en</strong>t, le hasard ne m’a pas remis sur la trajectoire <strong>de</strong> cettepersonne qui porte le même après-rasage que celui <strong>de</strong> mon père et je n’aipoint retrouvé le nom du produit d’ailleurs. Néanmoins, je suis heureused’avoir s<strong>en</strong>ti pour quelques instants un petit peu <strong>de</strong> toi aujourd’hui, papa.Colette Vézina, Intégration socioprofessionnelleC<strong>en</strong>tre Monseigneur-Côté (Victoriaville), CS <strong>de</strong>s Bois-FrancsEnseignante : Katharina <strong>Ma</strong>rtin, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Bois-Francs46


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>En 2011-2012, <strong>de</strong>ux élèves du c<strong>en</strong>tre d’éducation <strong>de</strong>s adultes <strong>de</strong> Bellechasse<strong>de</strong> Saint-Gervais (Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Côte-du-Sud, Commissionscolaire <strong>de</strong> la Côte-<strong>de</strong>-Sud) se sont distingués et Myriam Côté <strong>en</strong> a remportéles honneurs :Je me suis inscrite à l’éducation <strong>de</strong>s adultes <strong>en</strong> juillet 2011, après avoir manqué la<strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> ma quatrième année <strong>de</strong> secondaire pour <strong>de</strong>s raisons médicales.Tout ce que j’ai vécu au CEA a été bénéfique pour moi, <strong>de</strong> la r<strong>en</strong>contre <strong>de</strong> jeunesadultes et d’<strong>en</strong>seignants merveilleux à l’acquisition d’une autonomie nouvelle, sansoublier le fait <strong>de</strong> remporter le prix Coup <strong>de</strong> cœur du concours, auquel mon <strong>en</strong>seignante<strong>de</strong> français, Amélie, m’avait poussée à participer.J’ai écrit le texte qui figure dans ce recueil d’un seul jet, un peu parce que j’étais trèsinspirée, mais surtout, parce que je v<strong>en</strong>ais d’appr<strong>en</strong>dre que la date limite du concoursétait, il me semble, le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main ou le surl<strong>en</strong><strong>de</strong>main. Je ne saurais vous expliquer cequ’il veut dire… Je crois qu’il a un s<strong>en</strong>s différ<strong>en</strong>t pour chaque personne qui le lit,même pour moi qui, au départ, ne voulais que philosopher un peu sur ce que pouvaitbi<strong>en</strong> vouloir dire le titre du concours.Avoir remporté le Coup <strong>de</strong> cœur a amélioré la confiance que j’avais <strong>en</strong> moi et <strong>en</strong> mescompét<strong>en</strong>ces d’écrivaine. Me retrouver <strong>de</strong>vant ces g<strong>en</strong>s, qui applaudissai<strong>en</strong>t mesmots et v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t me féliciter, m’a fait réaliser à quel point j’avais bi<strong>en</strong>, non l’<strong>en</strong>vie,mais le besoin d’écrire, <strong>de</strong> partager ces milliers d’<strong>histoire</strong>s que je porte <strong>en</strong> moi <strong>de</strong>puisl’<strong>en</strong>fance.Au mom<strong>en</strong>t d’écrire ces lignes, j’étudie <strong>en</strong> littérature au cégep Garneau et, même sije planifie <strong>de</strong> m’ori<strong>en</strong>ter vers un métier conv<strong>en</strong>tionnel un jour ou l’autre, je travaillesur quelques projets d’écriture, sur d’év<strong>en</strong>tuels romans, parce que, même si j’essaietrès fort, je n’arrive pas à imaginer quelque chose qui me r<strong>en</strong>drait <strong>plus</strong> heureuse que<strong>de</strong> vivre <strong>de</strong> ma plume.Myriam a mérité les louanges <strong>de</strong> la presse locale, car Sylvie Gour<strong>de</strong> esttombée sous le charme <strong>de</strong> sa prose et lui a consacré un article dans le journalLe Tour <strong>de</strong>s Ponts <strong>de</strong> St-Anselme :Son écrit, Une <strong>histoire</strong> parfaitem<strong>en</strong>t imparfaite, remporta le prix Coup <strong>de</strong> cœur parmiles 414 textes soumis et lui valut <strong>plus</strong>ieurs privilèges. D’abord, il s’arrimera aux 50 textesles <strong>plus</strong> évocateurs publiés dans un recueil qui sera distribué à raison <strong>de</strong> 6 000 exemplairesdans les c<strong>en</strong>tres d’éducation <strong>de</strong>s adultes du Québec. De <strong>plus</strong>, dans le cadre<strong>de</strong> la Semaine québécoise <strong>de</strong>s adultes <strong>en</strong> formation, Une <strong>histoire</strong> parfaitem<strong>en</strong>t imparfaite<strong>de</strong> Myriam fut déclamée par une comédi<strong>en</strong>ne lors <strong>de</strong> La Gran<strong>de</strong> Lecturepublique qui se t<strong>en</strong>ait le 27 mars <strong>de</strong>rnier à la bibliothèque Gabrielle-Roy à Québec.Enfin, une bourse <strong>de</strong> 500 $ lui fut remise par JiCi Lauzon, parrain <strong>de</strong> la 9 e édition […],lors <strong>de</strong> la clôture <strong>de</strong> cette activité d’<strong>en</strong>vergure nationale. Myriam eut l’ultime bonheur47


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>de</strong> lire son <strong>histoire</strong> <strong>de</strong>vant un auditoire att<strong>en</strong>tif. Le Tour <strong>de</strong>s Ponts est heureux <strong>de</strong>célébrer et <strong>de</strong> valoriser la qualité exceptionnelle d’écriture <strong>de</strong> Myriam et publie avecfierté son texte primé. Bravo pour ta persévérance scolaire !Son <strong>en</strong>seignante, Amélie Aubin, se souvi<strong>en</strong>t avec émotion d’une gran<strong>de</strong>amoureuse <strong>de</strong>s mots :C’est une chance inouïe que j’ai eue <strong>de</strong> côtoyer cette magnifique jeune femme. Sasanté rev<strong>en</strong>ue, nous l’avons accueillie à l’automne 2011. Son implication au c<strong>en</strong>trefut remarquable. Prési<strong>de</strong>nte du conseil <strong>de</strong>s élèves, elle a aussi écrit un conte <strong>de</strong> Noëlpour l’école primaire <strong>de</strong> St-Gervais, elle participait aux activités et elle faisait partiedu groupe <strong>de</strong> pairs aidants. Elle a décroché avec brio son diplôme d’étu<strong>de</strong>s secondaires<strong>en</strong> juin 2012 et est prés<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t inscrite au cégep.Le jour où elle m’a remis le texte qu’elle avait écrit pour participer au concours, jedois vous avouer que j’ai eu un choc. J’étais <strong>en</strong> classe, je l’ai lu et mes yeux se sontremplis d’eau. J’avais dans les mains un texte qui reflétait une maturité rare, unehabileté à jouer avec les mots qui l’était <strong>en</strong>core davantage, une vision <strong>de</strong>s choses quime r<strong>en</strong>versait. En neuf ans d’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t, je n’ai jamais r<strong>en</strong>contré une aussi gran<strong>de</strong>amoureuse <strong>de</strong>s mots pour savoir mettre autant <strong>en</strong> valeur toute leur richesse. J’aimaint<strong>en</strong>ant la profon<strong>de</strong> certitu<strong>de</strong> que cette jeune femme poursuivra sa route et nousoffrira son âme, <strong>en</strong>core et <strong>en</strong>core, par le biais <strong>de</strong> sa plume débordante d’<strong>en</strong>cre pourinon<strong>de</strong>r <strong>de</strong> sa main les années à v<strong>en</strong>ir. Voilà comm<strong>en</strong>t Myriam Côté a su inon<strong>de</strong>r <strong>de</strong>lumière ma vie professionnelle l’an passé.48


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>8. Une <strong>histoire</strong> parfaitem<strong>en</strong>t imparfaiteCoup <strong>de</strong> cœur2012J’aurais bi<strong>en</strong> aimé vous raconter une lég<strong>en</strong><strong>de</strong> où évolu<strong>en</strong>t dragons et princesses,héros et vilains. Un conte où se mari<strong>en</strong>t la magie et le réalisme, oùles anges se mêl<strong>en</strong>t aux démons. J’aurais aimé écrire <strong>de</strong>s mots perlés <strong>de</strong>tristesse, <strong>de</strong> joie, <strong>de</strong> rage peut-être. Des mots qui vous aurai<strong>en</strong>t bercés le soiret réveillés <strong>en</strong> sursaut p<strong>en</strong>dant la nuit. J’aurais aimé partager avec vous une<strong>histoire</strong> qui fait rêver, réfléchir. Qui donne <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> décrocher la Lune, <strong>de</strong>soulever la Terre. <strong>Ma</strong>is cette <strong>histoire</strong>, sous tous ses artifices, n’aurait pas étéla <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>.<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> est la seule que je peux véritablem<strong>en</strong>t vous racontersans avoir peur d’omettre quelques détails. Elle ne comm<strong>en</strong>ce point par laformule : « Il était une fois… » et ne finit malheureusem<strong>en</strong>t pas par : « Ilsvécur<strong>en</strong>t heureux et eur<strong>en</strong>t beaucoup d’<strong>en</strong>fants. » <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> n’<strong>en</strong>est pas une d’amour ou d’av<strong>en</strong>ture. Ce n’est pas un drame, <strong>en</strong>core moinsune comédie. Elle ne sera pas jouée au théâtre, ne se verra pas au cinéma.On ne lui accor<strong>de</strong>ra pas autant d’importance qu’aux autres puisqu’elle ne selit pas. En fait, elle ne se raconte même pas. <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, elle se vit.Elle débute dans un cri et finira peut-être <strong>de</strong> la même façon. Les personnagesqu’on y r<strong>en</strong>contre sont difficilem<strong>en</strong>t analysables, passant du bi<strong>en</strong> au mal <strong>en</strong>l’espace <strong>de</strong> quelques pages. Elle conti<strong>en</strong>t beaucoup <strong>de</strong> phrases inachevéeset quelques paragraphes qui, malgré le nombre <strong>de</strong> mots qu’ils comport<strong>en</strong>t,ne veul<strong>en</strong>t absolum<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> dire. Ils sont flous, incompréh<strong>en</strong>sibles parfois.<strong>Ma</strong>l écrits, biffés à divers <strong>en</strong>droits. Ils sont là, pourtant. Et sans eux, l’<strong>histoire</strong>ne se ti<strong>en</strong>drait ironiquem<strong>en</strong>t pas.Elle a – heureusem<strong>en</strong>t ! – <strong>de</strong>s passages dignes d’un best-seller, calligraphiésesthétiquem<strong>en</strong>t et bi<strong>en</strong> mis <strong>en</strong> valeur. On voudrait les lire et les relire, etrecomm<strong>en</strong>cer <strong>en</strong>core. Ils accroch<strong>en</strong>t à nos lèvres un sourire serein, calm<strong>en</strong>tcertaines tempêtes et, dans quelques cas, ai<strong>de</strong>nt notre cœur à se rappeler lerythme qu’il a parfois t<strong>en</strong>dance à vouloir oublier. Ces passages-là <strong>de</strong>vrai<strong>en</strong>têtre <strong>en</strong>cadrés ou tatoués, appris par cœur ou chantés. Arrêtés pour mieuxs’<strong>en</strong> délecter.49


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Nous voici donc <strong>en</strong> 2012-2013. Dix ans <strong>de</strong> littérature… Un dixième Coup<strong>de</strong> cœur qui nous fait connaître une autre <strong>belle</strong> amoureuse <strong>de</strong>s mots, quiécrit avec le cœur : <strong>Ma</strong>ryse Blackburn, du c<strong>en</strong>tre Christ-Roi (Syndicat dupersonnel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Hautes-Rivières, Commission scolairePierre-Neveu), qui nous explique l’origine <strong>de</strong> sa motivation :Lorsque j’étais petite, je rêvais d’être une écrivaine. La dure réalité <strong>de</strong> la vie m’a viterattrapée, les factures à payer, le rythme effréné <strong>de</strong> la vie quotidi<strong>en</strong>ne… J’ai peu à peudélaissé mes cahiers et mes livres (et mes rêves) pour me lancer sur le marché dutravail. J’ai toujours eu un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> non-accomplissem<strong>en</strong>t… Je suis mère d’unbeau garçon pour qui j’ai <strong>en</strong>vie d’être un modèle positif. À ses débuts au secondaire,j’ai compris que je <strong>de</strong>vais moi aussi retourner aux étu<strong>de</strong>s, au moins pour un DES.Mon <strong>en</strong>seignant <strong>de</strong> français a su reconnaître l’amour <strong>de</strong>s lettres caché sous ma plumeet m’a fortem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>couragée à participer à ce concours. Je croyais accepter pour luifaire plaisir ! Finalem<strong>en</strong>t, cette expéri<strong>en</strong>ce m’a fait l’effet d’un électrochoc. Depuis, jepoursuis mes étu<strong>de</strong>s, j’écris maint<strong>en</strong>ant presque chaque jour et je me suis <strong>en</strong>finréconciliée avec mon vieil amour <strong>de</strong> jeunesse. Ensemble, qui sait, peut-être accoucherons-nousun jour d’un roman ?Ainsi, le concours <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t bel et bi<strong>en</strong>, MA <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>.Il y a dix ans, Gaston Beauregard, duSyndicat du personnel <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>s Hautes-Rivières, collaborait au lancem<strong>en</strong>tdu concours, avec un dynamisme quiallait le caractériser p<strong>en</strong>dant toute cettedéc<strong>en</strong>nie. Il n’aurait jamais pu prédire,cep<strong>en</strong>dant, qu’au mom<strong>en</strong>t même <strong>de</strong> sa<strong>Ma</strong>ryse Blackburn et Gaston Beauregard.retraite, le hasard allait lui faire un <strong>de</strong>rnierclin d’œil. Alors que, cette année, nousavons reçu 510 créations <strong>en</strong> prov<strong>en</strong>ance <strong>de</strong> 78 c<strong>en</strong>tres à travers le Québec,iI se souvi<strong>en</strong>t qu’à la première année une soixantaine <strong>de</strong> textes seulem<strong>en</strong>tavai<strong>en</strong>t été soumis :Une déc<strong>en</strong>nie <strong>de</strong> <strong>belle</strong>s <strong>histoire</strong>s. D’aucuns diront que ça ne nous rajeunit pas. <strong>Ma</strong>isdisons que pour quelqu’un aspirant à la retraite sous peu, c’est très jeune. Avec passion,j’ai suivi, appuyé et contribué au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> cette magnifique av<strong>en</strong>ture<strong>de</strong>puis le début. Cep<strong>en</strong>dant, il ne faut pas confondre l’appellation et son cont<strong>en</strong>u. La<strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> <strong>de</strong> l’un peut aussi être le drame <strong>de</strong> l’autre. La véritable et magnifique<strong>histoire</strong> <strong>de</strong> tout cela est bi<strong>en</strong> celle <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> parole par <strong>plus</strong>ieurs c<strong>en</strong>taines <strong>de</strong>personnes qui, souv<strong>en</strong>t, croyai<strong>en</strong>t n’avoir ri<strong>en</strong> à dire et n’avai<strong>en</strong>t jamais p<strong>en</strong>sé qu’unjour, elles pourrai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir intéressantes et même être publiées.51


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Mon passage au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Mont-Laurier m’a permis <strong>de</strong> r<strong>en</strong>contrer <strong>plus</strong>ieurs <strong>de</strong> ces« auteurs » qui s’ignorai<strong>en</strong>t. Les inciter à participer à ce concours <strong>en</strong> a maint<strong>en</strong>u <strong>plus</strong>ieurssur le chemin <strong>de</strong> la persévérance et <strong>de</strong> la résili<strong>en</strong>ce. Je revois <strong>en</strong>core les figuresépanouies et rayonnantes <strong>de</strong> celles et ceux qui ont pu se lire et se faire lire. Je mesouvi<strong>en</strong>s <strong>de</strong>s <strong>Ma</strong>rtine, Yanik, Catherine, Jazon, Nancy, Stéphane ou Vanessa lorsquele recueil leur était remis. Ça valait une paye… <strong>en</strong>fin presque.C’est avec bonheur et fierté que j’ai appris que le Coup <strong>de</strong> cœur <strong>de</strong> cette dixièmeédition était le fruit d’une discrète étudiante qui m’a fait l’honneur <strong>de</strong> fréqu<strong>en</strong>ter maclasse. <strong>Ma</strong>ryse, je te remercie <strong>de</strong> ce ca<strong>de</strong>au inespéré. Gagner un prix, c’est quelquechose, mais croire <strong>en</strong> soi <strong>en</strong> est un bi<strong>en</strong> <strong>plus</strong> grand.52


t Texte Coup <strong>de</strong> cœur t Texte Coup <strong>de</strong> cœur t Textet Texte Coup <strong>de</strong> cœur t9. La première journéeElle éteignit le cadran aussitôt que la sonnerie se fit <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre. Depuis longtempsdéjà, elle ne dormait <strong>plus</strong>. La nuit avait été courte, mais avait cep<strong>en</strong>dantsemblé durer une éternité. Elle se leva d’un bond, <strong>en</strong>fila sa robe <strong>de</strong>chambre et <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dit à la cuisine. Elle mit la cafetière <strong>en</strong> marche et se s<strong>en</strong>titun peu mieux. Elle était t<strong>en</strong>due, crispée, l’angoisse parcourant son corps telun orage électrique. Elle savait que la caféine ne l’ai<strong>de</strong>rait <strong>en</strong> ri<strong>en</strong>, maisl’o<strong>de</strong>ur réconfortante du breuvage lui permettait <strong>de</strong> croire, pour un instantdu moins, qu’aujourd’hui n’était qu’un jour comme les autres. Après s’êtreversé une tasse, <strong>Ma</strong>rianne remonta à l’étage et se glissa sil<strong>en</strong>cieusem<strong>en</strong>tdans la chambre <strong>de</strong> son fils.Aurait-elle la force <strong>de</strong> le tirer hors <strong>de</strong>s bras <strong>de</strong> Morphée ? Il avait l’air si bi<strong>en</strong>,si paisible, si jeune <strong>en</strong>core… Elle se revoyait le berçant, le cajolant, caressantses si petits pieds… Une vague <strong>de</strong> t<strong>en</strong>dresse et <strong>de</strong> mélancolie déferla <strong>en</strong>elle, une mer d’amour l’<strong>en</strong>vahit et déborda <strong>de</strong> ses yeux. Elle avait l’impressionque dès qu’il serait réveillé, elle le perdrait pour toujours. Le garçongémit dans son sommeil. Elle essuya prestem<strong>en</strong>t ses larmes du revers <strong>de</strong> lamain, respira un bon coup et s’assit sur le lit.- Bon matin mon coco, c’est l’heure…Il gémit <strong>en</strong>core, elle l’embrassa sur le front puis les yeux du garçon s’ouvrir<strong>en</strong>td’un coup.- Ça y est maman, c’est aujourd’hui !!!Un large sourire éclairait maint<strong>en</strong>ant le visage <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>fant. Elle savait qu’il ne<strong>de</strong>vait pas s<strong>en</strong>tir sa peur alors elle lui sourit <strong>en</strong> retour.- Allez hop ! À la douche jeune homme ! Tu ne veux certainem<strong>en</strong>t pas être<strong>en</strong> retard aujourd’hui, n’est-ce pas ?Evans obtempéra sans se faire prier. Il semblait si heureux, si confiant ! Elle<strong>en</strong> avait le cœur au bord <strong>de</strong> l’éclatem<strong>en</strong>t… De tristesse ou <strong>de</strong> fierté, elle nesavait <strong>plus</strong>. Un peu <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sans doute. Pourquoi ne ress<strong>en</strong>tait-elle pas lamême hâte, la même excitation que lui ? Pourquoi se s<strong>en</strong>tait-elle si fragile, sivieille, si paniquée ? Elle fit cuire le gruau auquel elle ajouta <strong>de</strong>s cubes <strong>de</strong>pommes et un peu <strong>de</strong> cassona<strong>de</strong>, puis <strong>en</strong>treprit <strong>de</strong> remplir la boîte à lunch<strong>de</strong> son fils. Elle s’aperçut avec étonnem<strong>en</strong>t que c’était déjà fait. Elle aurait dû53


t Texte Coup <strong>de</strong> cœur ts’<strong>en</strong> douter, Evans s’<strong>en</strong> était sûrem<strong>en</strong>t chargé la veille. Elle <strong>de</strong>vait se r<strong>en</strong>dreà l’évi<strong>de</strong>nce, son fils n’avait presque <strong>plus</strong> besoin d’elle à prés<strong>en</strong>t. Ses yeuxs’embuèr<strong>en</strong>t une secon<strong>de</strong> fois, mais elle parvint à ret<strong>en</strong>ir ses larmes. Evansla rejoignit à la cuisine et ils s’assir<strong>en</strong>t <strong>en</strong>semble pour manger. Elle auraitvoulu parler <strong>de</strong> tout et <strong>de</strong> ri<strong>en</strong>, prét<strong>en</strong>dre que cette journée n’allait pas changerleur vie pour toujours, mais Evans, au contraire, ne cessait d’expliquerles mille et une raisons <strong>de</strong> sa fébrilité : « Je vais r<strong>en</strong>contrer <strong>de</strong> nouvelles personnes,je vais pouvoir faire <strong>de</strong> la planche à roulettes p<strong>en</strong>dant les récréations,le gymnase est imm<strong>en</strong>se, je pourrai m’impliquer dans la radioétudiante… » <strong>Ma</strong>rianne fit tout son possible pour partager l’<strong>en</strong>thousiasme <strong>de</strong>son fils, <strong>en</strong> appar<strong>en</strong>ce du moins. À huit heures moins cinq minutes, ilsétai<strong>en</strong>t fin prêts et prir<strong>en</strong>t place à bord <strong>de</strong> l’automobile.<strong>Ma</strong>rianne stationna la voiture près <strong>de</strong> la polyval<strong>en</strong>te et coupa le moteur.Bi<strong>en</strong> que cet instant fût <strong>plus</strong> que douloureux pour elle, <strong>Ma</strong>rianne préférait seconc<strong>en</strong>trer sur la nostalgie <strong>de</strong> ce qu’elle était sur le point <strong>de</strong> perdre plutôtque <strong>de</strong> réfléchir à ce qui suivrait. Elle aurait voulu profiter <strong>de</strong>s quelquesminutes d’avance qu’ils avai<strong>en</strong>t pour discuter, pour repousser le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong>la séparation, mais Evans se tortillait d’impati<strong>en</strong>ce sur son siège, reconnaissantcertains amis à travers le flot d’étudiants grouillant dans la cour. Elleserra fort son fils contre elle. Elle se s<strong>en</strong>tait si petite dans ses bras larges etforts. Comm<strong>en</strong>t avait-il pu <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir si grand, si vite ? Comme s’il <strong>de</strong>vinait sesp<strong>en</strong>sées, Evans prit délicatem<strong>en</strong>t le visage <strong>de</strong> sa mère <strong>en</strong>tre ses mains et laregarda droit dans les yeux.– Tout va bi<strong>en</strong> aller maman. Ça va bi<strong>en</strong> se passer pour moi, comme pourtoi, j’<strong>en</strong> suis convaincu. Je t’aime et… je suis fier <strong>de</strong> toi.Incapable <strong>de</strong> se ret<strong>en</strong>ir, <strong>Ma</strong>rianne fondit <strong>en</strong> larmes. C’était le comble ! Ellepleurait comme une fillette et son propre fils la réconfortait comme l’auraitfait un chef <strong>de</strong> famille. Elle rit au travers <strong>de</strong> ses larmes.– Merci mon grand. Tu as raison, je le sais. Je suis juste un peu émotive,tu vois, c’est beaucoup <strong>de</strong> changem<strong>en</strong>ts pour moi… Je t’aime tellem<strong>en</strong>t, tule sais, hein ? Bon, allez, on se rejoint ici à quatre heures ?Voilà, c’était fait. La première journée au secondaire… <strong>Ma</strong>rianne p<strong>en</strong>sa àces longues journées <strong>de</strong> jeux et <strong>de</strong> câlins qu’elle passait avec Evans avantqu’il ne comm<strong>en</strong>ce à fréqu<strong>en</strong>ter l’école. Elle revit, comme dans un songe,les années qui s’étai<strong>en</strong>t écoulées tranquillem<strong>en</strong>t, mais inéluctablem<strong>en</strong>t.<strong>Ma</strong>rianne avait consacré les douze <strong>de</strong>rnières années <strong>de</strong> sa vie à r<strong>en</strong>dre la vie54


t Texte Coup <strong>de</strong> cœur td’Evans facile et agréable malgré leur pauvreté. Elle avait passé <strong>de</strong>s jours<strong>en</strong>tiers à inv<strong>en</strong>ter <strong>de</strong>s recettes à partir <strong>de</strong> ri<strong>en</strong>, à décorer la maison avec <strong>de</strong>sobjets recyclés, à inv<strong>en</strong>ter <strong>de</strong>s jeux et <strong>de</strong>s activités aux frais <strong>de</strong> la princesse,à s’assurer qu’Evans ne remarque pas que, parfois, elle ne mangeait pas afinque lui puisse manger. Et elle croyait avoir assez bi<strong>en</strong> réussi. <strong>Ma</strong>is les temps<strong>de</strong>v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> durs et les besoins <strong>de</strong> son fils <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong>grands. Son cocon d’amour ne suffisait <strong>plus</strong>. C’est pourquoi elle avait priscette décision que la peur lui faisait presque regretter à prés<strong>en</strong>t. Aujourd’hui,sa vie telle qu’elle la connaissait pr<strong>en</strong>ait fin. « Je suis fier <strong>de</strong> toi maman… »La voix <strong>de</strong> son fils passait <strong>en</strong> boucle dans sa tête. Elle décida <strong>de</strong> s’inspirer <strong>de</strong>lui et puisa sa force <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rnières paroles. Elle le r<strong>en</strong>drait fier, ça oui !« Courage ! se dit-elle, ta nouvelle vie comm<strong>en</strong>ce. » Elle mit le moteur <strong>en</strong>marche et se dirigea vers le c<strong>en</strong>tre d’éducation aux adultes…<strong>Ma</strong>ryse Blackburn, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Christ-Roi (Mont-Laurier), CS Pierre-NeveuEnseignant : Gaston Beauregard, Syndicat du personnel<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Hautes-Rivières10. Ah ! Ces mathématiques...Les mathématiques sont lat<strong>en</strong>tes dans ma vie. Nous n’avons pas <strong>de</strong> proportionsprécises : il y a <strong>de</strong>s cercles, <strong>de</strong>s angles, <strong>de</strong>s courbes, <strong>de</strong>s droites danstout notre corps.À l’intérieur <strong>de</strong> l’utérus <strong>de</strong> notre mère au comm<strong>en</strong>cem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la compétition<strong>de</strong> la vie, nous sommes <strong>de</strong>s millions, mais un seulem<strong>en</strong>t va être <strong>en</strong>tier, quelquesfois <strong>de</strong>ux, trois ou <strong>plus</strong>, si le pourc<strong>en</strong>tage <strong>de</strong> gamètes le permet, si quelquesunsd’<strong>en</strong>tre eux calcul<strong>en</strong>t le mom<strong>en</strong>t exact d’atteindre le point d’<strong>en</strong>tréeexact.À la naissance, chacun <strong>de</strong> nous est i<strong>de</strong>ntifié avec un numéro, le poids <strong>de</strong>notre corps, l’heure, le jour, le mois, l’année. Comme une multiplication <strong>de</strong>cellules conséqu<strong>en</strong>tes, nous allons grandir, nous allons appr<strong>en</strong>dre <strong>plus</strong>ieursfois, comme un indicateur solitaire, la valeur indéfinie <strong>de</strong> la vie.55


M<strong>en</strong>tion spécialeIl nous vi<strong>en</strong>dra à la tête comme un claquem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> doigts <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong>problèmes à résoudre, <strong>de</strong>s questions qui ont <strong>de</strong>s valeurs contraires, <strong>de</strong>séquations <strong>de</strong> la vie à résoudre. Il nous faudra i<strong>de</strong>ntifier le X et le Y, trouverla réponse à toutes nos questions. Beaucoup <strong>de</strong> probabilités seront utiliséespour déduire la solution <strong>de</strong> notre vie.Nous <strong>de</strong>vons utiliser la logique pour tout, comme calculer le temps pouraller à un r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous. Nous <strong>de</strong>vons être prés<strong>en</strong>ts chaque fraction <strong>de</strong>secon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> minute, d’heure, <strong>de</strong> jour. Les fonctions <strong>de</strong> nos vies port<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sconséqu<strong>en</strong>ces : allégresse, tristesse, émotions incalculables que peuv<strong>en</strong>tavoir parfois les personnes qui vont vieillir jusqu’à 116 ans.Dans les ajouts <strong>de</strong> ces émotions, il y a certaines choses dans les statistiqueset les probabilités <strong>de</strong> la vie. Les mé<strong>de</strong>cins nous donn<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s bonnes et mauvaisesnouvelles dans les mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> la fécondation, d’innombrables interdictionset <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs que nous <strong>de</strong>vons suivre au pied <strong>de</strong> la lettre. Nousavons le risque infini <strong>de</strong> maladies que nous ajoutons, nous soustrayons, nousmultiplions facilem<strong>en</strong>t à notre corps.Comme une fraction lat<strong>en</strong>te qui se propage d’une façon aérodynamique, <strong>en</strong>s’assurant que certains pourc<strong>en</strong>tages s’alli<strong>en</strong>t à la partie la <strong>plus</strong> faible <strong>de</strong>notre corps, <strong>en</strong> créant un champ électromagnétique s<strong>en</strong>sible à quelques-uns<strong>de</strong>s produits consommés et à la résistance physique <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> nous.On peut tellem<strong>en</strong>t énumérer d’actions ou <strong>de</strong> choses qui se pass<strong>en</strong>t dans nosvies, comme att<strong>en</strong>dre 365 jours pour la commémoration d’un événem<strong>en</strong>t,pour le jour <strong>de</strong> Noël, pour un anniversaire, pour 9 mois <strong>de</strong> la v<strong>en</strong>ue d’unbébé humain, sans compter que chaque animal a son propre cycle <strong>de</strong> gestation,comme le cycle le <strong>plus</strong> court est <strong>de</strong> 13 jours chez l’opossum jusqu’à640 jours chez l’éléphant, tout ça pour la création <strong>de</strong> l’esprit et le corps d’unêtre vivant.Si on fait le calcul <strong>de</strong>s choses que l’on fait p<strong>en</strong>dant toute la journée, nousparlons seulem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> numéros, à quelle heure nous nous réveillons, <strong>en</strong>combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps nous nous brossons les <strong>de</strong>nts, <strong>en</strong> combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps nousfaisons le lit, <strong>en</strong> combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps nous choisissons nos vêtem<strong>en</strong>ts, combi<strong>en</strong><strong>de</strong> fois nous mastiquons chaque bouchée <strong>de</strong> nourriture, combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> foisnous rions, combi<strong>en</strong> d’escaliers nous <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dons et nous montons, combi<strong>en</strong><strong>de</strong> fois nous bâillons, combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> pulsations notre cœur bat par minute, çadép<strong>en</strong>d si nous sommes agités ou tranquilles, <strong>de</strong>s incalculables analyses56


M<strong>en</strong>tion spécialepour lesquelles, si on utilisait la logique, nous serions <strong>plus</strong> <strong>en</strong>clins à aimerles mathématiques.Ce n’était pas mon cas au primaire et au secondaire. La seule chose que jesais et dont je suis sûre maint<strong>en</strong>ant est que si mon <strong>en</strong>seignante m’avait dittout ça durant les cours <strong>de</strong> mathématiques <strong>de</strong> ma première année d’école,les mathématiques aurai<strong>en</strong>t été <strong>plus</strong> faciles et <strong>plus</strong> supportables pour moiparce que, dans le fond, elles seront avec moi partout jusqu’au <strong>de</strong>rnier jour<strong>de</strong> ma vie.Leidy Melissa Barajas Sarmi<strong>en</strong>to, FrancisationC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse (Drummondville), CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignante : Pascale Héroux, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville11. La montagneAu début <strong>de</strong> l’été 2010, ma situation s’aggravait <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong>. J’avaisperdu mon emploi, ma maison et tous mes amis à cause <strong>de</strong> mon abusiveconsommation <strong>de</strong> drogues. II ne me restait que mon petit minivan danslequel je vivais et qui me servait <strong>de</strong> maison. J’étais à la recherche d’un<strong>en</strong>droit à l’écart <strong>de</strong> la ville où je pourrais m’installer. Je <strong>de</strong>vais limiter aumaximum mes déplacem<strong>en</strong>ts, car je n’avais aucun rev<strong>en</strong>u et l’état <strong>de</strong> monvéhicule était pitoyable. Donc, je <strong>de</strong>vais absolum<strong>en</strong>t le gar<strong>de</strong>r : il était monabri et mon moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> transport.Après <strong>plus</strong>ieurs kilomètres, j’ai fini par trouver un <strong>en</strong>droit formidable. C’étaitun petit s<strong>en</strong>tier qui m<strong>en</strong>ait tout droit au sommet d’une montagne. Là-haut,j’avais tout ce dont j’avais besoin : un petit ruisseau d’eau <strong>de</strong> source pourboire et me laver, <strong>de</strong>s poissons, <strong>de</strong> la faune et <strong>de</strong>s fruits sauvages pour m<strong>en</strong>ourrir et une vue spl<strong>en</strong>di<strong>de</strong> sur toute la ville pour me divertir. De <strong>plus</strong>, uneportion <strong>de</strong> la montagne regorgeait <strong>de</strong> vieux rebuts <strong>de</strong> métal. Donc, je savaisqu’<strong>en</strong> ramassant ces vieux métaux, je pourrais les rev<strong>en</strong>dre aux ferrailleurset, <strong>en</strong> <strong>plus</strong>, cela nettoyait la nature. Avec cet arg<strong>en</strong>t, j’arrivais à survivre avecun minimum d’équipem<strong>en</strong>t : petite glacière 12 volts, petit poêle au propaneet même la douche que j’avais fabriquée avec une petite cale à bateau quej’avais mise au fond d’une gran<strong>de</strong> chaudière <strong>de</strong> plastique. Reliée à unedouche téléphone, je n’avais qu’à faire chauffer <strong>de</strong> l’eau que je transvidais57


M<strong>en</strong>tion spécialedans la chaudière. Je pouvais pr<strong>en</strong>dre ma douche au beau milieu <strong>de</strong> nullepart avec une vue à couper le souffle. C’était magique malgré la situationplutôt critique. Je n’avais pas le temps <strong>de</strong> m’<strong>en</strong>nuyer. J’avais toujours quelquechose à faire, ma survie <strong>en</strong> dép<strong>en</strong>dait. J’adorais vivre <strong>en</strong> forêt avec cettefaune qui m’inspirait beaucoup. La montagne m’offrait beaucoup d’avantages.Étant donné sa haute altitu<strong>de</strong>, les moustiques étai<strong>en</strong>t presque inexistants. Lesoir, j’installais mon matelas gonflable sur le toit du minivan, j’étais auxpremières loges pour observer le ciel étoilé. Un vrai spectacle à couper lesouffle !Ce contact privilégié avec la nature m’a permis <strong>de</strong> me ressourcer et <strong>de</strong> lâcherprise sur les petits problèmes <strong>de</strong> la vie courante. J’avais une soudaine joie <strong>de</strong>vivre que moi-même je ne compr<strong>en</strong>ais pas. J’ai habité cette montagne toutl’été, jusqu’à tard l’automne. Cette expéri<strong>en</strong>ce a été très bénéfique pour moi.Elle a eu l’effet d’une thérapie. Elle m’a permis <strong>de</strong> remettre les p<strong>en</strong>dules àl’heure. J’ai appris à mieux me connaître et à me repr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> main. C’estsouv<strong>en</strong>t dans ce g<strong>en</strong>re <strong>de</strong> situation qu’on découvre nos vraies forces. Depuisce jour, je reconstruis ma vie. Je me suis inscrit à l’école et je vis chaque jourcomme un ca<strong>de</strong>au. Peu importe la situation dans la vie, il ne faut jamaislâcher : il reste toujours quelque chose à essayer. J’ai i<strong>de</strong>ntifié mes buts queje veux atteindre et je suis prêt maint<strong>en</strong>ant à mettre les efforts nécessairespour les réaliser. Plus ri<strong>en</strong> ne peut m’arrêter !<strong>Ma</strong>rio Vachon, AlphabétisationC<strong>en</strong>tre L’Escale (Thetford Mines), CS <strong>de</strong>s AppalachesEnseignante : Kathele<strong>en</strong> Daigle, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Amiante12. Le <strong>plus</strong> courageux <strong>de</strong>s combattantsCe fut la <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> ma vieLes g<strong>en</strong>s nous regardai<strong>en</strong>t avec <strong>en</strong>vie.Nous étions amis et amoureuxNous avions tout pour être heureux.Un jeune garçon souriant et fort<strong>Ma</strong>lgré son jeune âgeA dû vite connaîtreLa dure réalité <strong>de</strong> la vie.58


M<strong>en</strong>tion spécialeQuand il jouait, on aurait ditQue tout était simple !C’est vrai, il n’avait que 3 ansAucun souci à se faire.Et quand il dormaitUn ange, il <strong>de</strong>v<strong>en</strong>aitTous les jours, c’était dur <strong>de</strong> le voir souffrirVoyager constamm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre l’hôpitalEt la maison pour ses traitem<strong>en</strong>ts.C’était une bi<strong>en</strong> vilaine maladie, cette leucémieJ’y ai perdu mon petit cousin, Charles.Voilà maint<strong>en</strong>ant qu’elle s’<strong>en</strong> pr<strong>en</strong>d à mon petit <strong>Ma</strong>téo.Face à l’océan,Ri<strong>en</strong> ne peut t’arriver, mon bébéTu seras toujours protégé.Il ne compr<strong>en</strong>ait ri<strong>en</strong>, pauvre petit !Les exam<strong>en</strong>s, les prises <strong>de</strong> sangLes piqûres pour installer le soluté, les médicam<strong>en</strong>tsIl se s<strong>en</strong>tait mal après chaque r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous.Il nous disait souv<strong>en</strong>t :« On est supposé aller bi<strong>en</strong> après avoir vu le docteur. »Chaque fois, on lui répondait :« Dans ton cas, <strong>Ma</strong>téo, ça pr<strong>en</strong>d <strong>plus</strong>ieurs fois pour guérir,Pour tuer les méchants qui sont dans ton sang,Tes petits soldats ne sont pas aussi forts que papa,Il nous faut les ai<strong>de</strong>r ; après, ça ira mieux. »Jours et nuits, je les ai passés à ses côtésNous l’avons consolé, bercé, rassuréLui avons lu <strong>de</strong>s <strong>histoire</strong>s, chanté <strong>de</strong>s berceusesOn le voyait si fragileEt sans pouvoir faire quoi que ce soit.Il n’a pas vécu comme il aurait dûComme un <strong>en</strong>fant, on ne lui a pas permisDe courir, <strong>de</strong> jouer, <strong>de</strong> tomber,De grandir, d’appr<strong>en</strong>dre…59


M<strong>en</strong>tion spécialeNe pas partir pour toujours,Peut-être, seulem<strong>en</strong>t dormir quelques jours, s’<strong>en</strong> remettre,<strong>Ma</strong>is toujours finir par rev<strong>en</strong>ir.Tu n’aurais pas dû mourir, <strong>Ma</strong>téo !Je n’y compr<strong>en</strong>ds ri<strong>en</strong>, pourtant tu te battaisDe toutes tes forces, tu luttais jours et nuitsLa mort, elle, te voulait tout <strong>en</strong>tier.Même si tu lui résistais <strong>de</strong> toutes tes forces.Tu as été fort p<strong>en</strong>dant longtemps,<strong>Ma</strong>is elle t’att<strong>en</strong>dait au tournantTu avais beau survivre avec ton cœur vaillantTu partais l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t, calmem<strong>en</strong>t, g<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t…Ta santé baissaitEn même temps que tes cheveux tombai<strong>en</strong>tPuis il y eut un mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> paixTes cheveux repoussai<strong>en</strong>tEt ta santé repr<strong>en</strong>ait.Des contrôles se régularisai<strong>en</strong>tMême les mé<strong>de</strong>cins y croyai<strong>en</strong>t…Jusqu’au mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tes 6 ans, où ta maladie se réveillaEt <strong>plus</strong> jamais, elle ne te quitta.À ce mom<strong>en</strong>t, il était <strong>plus</strong> vieuxIl compr<strong>en</strong>ait mieux<strong>Ma</strong>is il nous <strong>en</strong> voulaitCar il était différ<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s autres <strong>en</strong>fants.De nouveau, on repr<strong>en</strong>ait les « médics »Jours et nuits à ses côtés à le réconforter.Sa santé naissait à nouveau, l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t…Il voulait ai<strong>de</strong>r les <strong>plus</strong> jeunesAvant <strong>de</strong> partir au firmam<strong>en</strong>t.Il voulait que tous compr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t sa maladieAvant <strong>de</strong> partir vers l’infini, le paradis.60


M<strong>en</strong>tion spécialeIl n’a pas eu assez <strong>de</strong> temps,Il restait tellem<strong>en</strong>t à faireEt la mort le désirait tellem<strong>en</strong>t…<strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant, il est partiPour <strong>plus</strong>ieurs, il est tombé dans l’oubli…Moi, je ne t’oublierai jamaisJe ne pourrais pasTu as tellem<strong>en</strong>t changé ma vieEt pour cela je t’<strong>en</strong> remercie.Je t’ai aimé, je t’aime et je t’aimerai toujours et à jamais.Je p<strong>en</strong>se à toi chaque jour,À toi, mon premier et unique amour, mon petit trésor, <strong>Ma</strong>téo !Tu es maint<strong>en</strong>ant un angeTu fais partie du firmam<strong>en</strong>tTu veilleras sur ta mamanElle qui aurait donné sa vie pour toi.Elle t’a accompagné du mieux qu’elle a pu dans ta maladie.Repose <strong>en</strong> paix pour l’éternité, <strong>Ma</strong>téo !Lina-<strong>Ma</strong>rie Houle, Intégration socioprofessionnelleC<strong>en</strong>tre Monseigneur-Côté (Victoriaville), CS <strong>de</strong>s Bois-FrancsEnseignante : Monique Hébert, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Bois-Francs13. La fleur <strong>de</strong> l’âgeJ’ai été semée par le v<strong>en</strong>t, imprévue et perdue, <strong>en</strong> peur, dans un champ <strong>de</strong>roseaux, <strong>de</strong> mauvaises herbes et <strong>de</strong> jolies fleurs. J’ai poussé timi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t lev<strong>en</strong>t, il m’a répondu, trop fort, il m’a presque déracinée. Parfois <strong>de</strong> parfumsdoux et celui d’un marécage crasseux. Je me suis appuyée sur d’autres fleurspour ne pas plier, pour me libérer <strong>de</strong> cette cage qui m’<strong>en</strong>vahissait et qui étaitcoriace. Les autres fleurs voulai<strong>en</strong>t toutes leur place et pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’expansiondans le sol, m’empêchant <strong>de</strong> respirer. Comme si j’étais prise dans laglace et j’ai continué <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r là-haut. Et <strong>de</strong> prier pour mon salut. Jevoulais ce petit point, éblouissant, qu’on appelle soleil. Je le surnommais61


M<strong>en</strong>tion spécialeamour. Je voulais <strong>en</strong> être <strong>plus</strong> près et ne <strong>plus</strong> vivre dans l’ombre <strong>de</strong> toutesces fleurs, désirant le même but. Voir au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> cette haie <strong>de</strong> chèvrefeuilles,je me suis protégée <strong>de</strong>s épines <strong>de</strong> mes voisines et j’ai fait semblant d’êtreforte. Cep<strong>en</strong>dant, mes pétales continuai<strong>en</strong>t d’être fragiles et parfois ellesvacillai<strong>en</strong>t sous la pluie. Des larmes semblables à celles d’un <strong>en</strong>fant. Desinsectes v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t, par mom<strong>en</strong>t, me voler <strong>de</strong> mon poll<strong>en</strong>. Certains répandai<strong>en</strong>tcet amour trouvé <strong>en</strong> moi. Et d’autres choisissai<strong>en</strong>t la haine. Je necompr<strong>en</strong>ais pas. <strong>Ma</strong>is j’ai continué <strong>de</strong> me tourner vers la lumière, vers leciel. Mes prières <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ues quotidi<strong>en</strong>nes, j’ai pris l’initiative <strong>de</strong> pousser pourtoucher cette chaleur au passage. À ce mom<strong>en</strong>t, mes épines écorchai<strong>en</strong>t mesvoisines et me blessai<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t. J’ai compris que pour atteindre lescieux, je <strong>de</strong>vais laisser tomber les armes et ainsi me rapprocher <strong>de</strong> l’amour.Je me suis dirigée sans vacarme et j’ai réussi à <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir une gran<strong>de</strong> fleur respl<strong>en</strong>dissante.Si <strong>belle</strong> que personne n’oserait me cueillir. J’ai grandi soli<strong>de</strong>m<strong>en</strong>tet <strong>en</strong> souplesse. Les v<strong>en</strong>ts ne me briseront <strong>plus</strong>. Un monarque mer<strong>en</strong>dait visite à l’occasion. Il v<strong>en</strong>ait s’installer sous mes feuilles soigneusem<strong>en</strong>t<strong>de</strong>ntelées. <strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant, il est parti <strong>en</strong> voyage. Le temps a passé <strong>plus</strong>l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t, j’étais <strong>en</strong>core obnubilée par l’activité réc<strong>en</strong>te. Par la suite, lagrisaille s’est graduellem<strong>en</strong>t installée, me laissant peu <strong>de</strong> temps avec monamour, ma clarté. J’ai vu certaines <strong>de</strong> mes consœurs comm<strong>en</strong>cer à défailliravant <strong>de</strong> constater ma propre vieillesse. Puis, j’ai terni et jauni par <strong>en</strong>droits,ma peau a perdu <strong>de</strong> sa vigueur, s’est amollie. Et ma tête s’est relâchée. Lesol est alors <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u mon seul décor. C’était déprimant. Le temps est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>upluvieux et la froi<strong>de</strong>ur m’a ass<strong>en</strong>ée, d’abord la nuit <strong>en</strong>suite le froid et monsoleil se partageai<strong>en</strong>t leur temps. Quelques accalmies me permir<strong>en</strong>t <strong>de</strong> meredresser, mais ce fut pour une courte durée. Le froid gagna sur moi et noircitmes atours. <strong>Ma</strong> fierté s’est noircie avec eux. Un jour, froi<strong>de</strong> jusqu’aux racines,je me suis laissé faner.Je fus, <strong>en</strong> quelque sorte, cette fleur qui, maladroitem<strong>en</strong>t, a percé les herbes,malgré les embûches et le branlebas quotidi<strong>en</strong> avec son lot <strong>de</strong> surprises etd’imprévus, qui a atteint son objectif et règne du haut <strong>de</strong> son bonheur, jerespire <strong>en</strong>fin librem<strong>en</strong>t. Désormais, mes couleurs se fon<strong>de</strong>nt à celles <strong>de</strong> cetteprairie qui est ma vie.Eric Bleau, 1 er cycleCFGA <strong>de</strong> Nicolet, CS <strong>de</strong> la RiveraineEnseignant : François Guay-Fleur<strong>en</strong>t, Syndicat <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignanteset <strong>en</strong>seignants <strong>de</strong> la Riveraine62


M<strong>en</strong>tion spéciale14. Le vieillardIl marchait difficilem<strong>en</strong>t dans la chaleur oppressante du soleil, sa marchetteraclait le trottoir brûlant dans un crissem<strong>en</strong>t sans fin. Déjà, il regrettait lafraîcheur du supermarché. Le soleil dardait ses rayons mortels sur chaqueparcelle <strong>de</strong> son corps ch<strong>en</strong>u et la sueur perlait sur son visage ridé. Ses yeuxétai<strong>en</strong>t bleus, vieux et portai<strong>en</strong>t les vestiges d’un passé difficile. Ses lèvrespincées <strong>en</strong> une mince ligne laissai<strong>en</strong>t transparaître un profond s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>td’amertume. Il était vieux et tout son corps le lui rappelait lorsqu’il marchait.Sa fausse hanche grinçait à chacun <strong>de</strong>s pas qu’il faisait, ses g<strong>en</strong>oux pleinsd’arthrose le faisai<strong>en</strong>t horriblem<strong>en</strong>t souffrir et son dos scoliotique le torturait.Son cœur palpitait et ses mains étai<strong>en</strong>t parcourues <strong>de</strong> fourmillem<strong>en</strong>t ; sonhypert<strong>en</strong>sion ne le laisserait jamais tranquille.La canicule cuisante asséchait toute l’eau que son corps pouvait cont<strong>en</strong>ir. Ilavait soif, si soif. Sa gorge était <strong>en</strong> feu, sa langue était <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue rêche et sèchetel un grand morceau <strong>de</strong> papier <strong>de</strong> verre. Il se mit à rêver à son litre <strong>de</strong> jus<strong>de</strong> canneberges non sucré qui était tout au fond <strong>de</strong> sa besace, <strong>en</strong> <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong>la margarine non hydrogénée et <strong>de</strong>s clém<strong>en</strong>tines biologiques.Il s’arrêta au milieu du trottoir et se rangea pour laisser passer un jeunecouple pressé qui soupirait <strong>de</strong>vant sa l<strong>en</strong>teur exaspérante. Le vieillardcompre nait. Précautionneusem<strong>en</strong>t, il délia les attaches du sac qui était fixéà sa marchette, mais le sac, affaibli par les lour<strong>de</strong>s provisions, se f<strong>en</strong>dit <strong>en</strong>son c<strong>en</strong>tre et une pluie <strong>de</strong> clém<strong>en</strong>tines se déversa sur le trottoir. Elles roulèr<strong>en</strong>tdans la rue et éclatèr<strong>en</strong>t <strong>en</strong> <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong>s pneus <strong>de</strong>s voitures. Sous lechoc, la margarine <strong>en</strong> perdit son couvercle et le précieux litre <strong>de</strong> cannebergesse fracassa sur l’asphalte, répandant son élixir cramoisi aux pieds <strong>de</strong> l’ancêtre.<strong>Ma</strong>is le vieillard était fort et il décida <strong>de</strong> ne pas se laisser abattre par sesmalchances.Il agrippa son pantalon au niveau <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>oux pour le remonter et l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t,alors que ses articulations lui criai<strong>en</strong>t d’arrêter, il se p<strong>en</strong>cha pour ramasserles clém<strong>en</strong>tines intactes qu’il fourra dans sa poche. Il prit dans ses mains lamargarine et <strong>en</strong>treprit d’<strong>en</strong>lever les roches et les brindilles qui s’y étai<strong>en</strong>tcollées. Il regarda piteusem<strong>en</strong>t les débris <strong>de</strong> sa bouteille <strong>de</strong> jus. Les effluves<strong>de</strong> canneberge lui emplissai<strong>en</strong>t les narines, il <strong>en</strong> frémissait d’<strong>en</strong>vie. Les <strong>de</strong>uxpieds dans la mare couleur sang, il regardait <strong>de</strong> haut son reflet fatigué, sonregard était usé et triste. Le liqui<strong>de</strong> imbibait l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t ses souliers <strong>de</strong> tissubon marché et pénétrait ses chaussettes. Le bruyant soupir qu’il poussa parla suite était celui d’un homme épuisé et éreinté par la vie.63


M<strong>en</strong>tion spécialeNonchalamm<strong>en</strong>t, il se remit <strong>en</strong> marche. Il était <strong>en</strong>core <strong>plus</strong> assoiffé qu’il nel’avait jamais été. Il atteignit son logis après <strong>de</strong> longues minutes épuisantes.Le soir, lorsqu’il fut dans son lit, il rêva que la mort v<strong>en</strong>ait <strong>en</strong>fin l’arracher àcette longue agonie qu’était sa vieillesse et l’am<strong>en</strong>ait finalem<strong>en</strong>t auprès <strong>de</strong>tous ceux qu’il avait aimés.<strong>Ma</strong>rilou Lafleur-Dubuc, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre l’Accore, CS <strong>de</strong>s Gran<strong>de</strong>s-SeigneuriesEnseignant : Frédéric Routhier, Association <strong>de</strong>s professeurs <strong>de</strong> Lignery15. La routeJe v<strong>en</strong>ais juste <strong>de</strong> débarquer à Montréal, je galérais sur les routes <strong>de</strong> laTranscanadi<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>puis déjà trois ans. Sur le parcours <strong>en</strong>tre Victoria etMontréal, j’avais eu la chance <strong>de</strong> découvrir tous les bas-fonds <strong>de</strong> chaqueville où les rejetons <strong>de</strong> notre <strong>belle</strong> société se désillusionn<strong>en</strong>t <strong>en</strong> sil<strong>en</strong>ce.Putain, j’avais <strong>plus</strong> <strong>de</strong> vingt mille kilomètres au cul et <strong>de</strong> me retrouver ici,après un hiver sous la pluie épaisse <strong>de</strong> l’ouest, me remontait le moral. J’allaisretrouver toute la meute, Jr, Criss, Taz et <strong>de</strong>s dizaines <strong>de</strong> voyageurs arrivésdirectem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s voies ferrées <strong>de</strong> l’oubli et leur jolie gueule fraîchem<strong>en</strong>tdécongelée. On se retrouvait parfois dans les déserts <strong>de</strong> la route, sous un cielancestral au creux d’une ville dans l’ombre <strong>de</strong> l’après-midi. Chacun poursuivantune quête sacrée, la réminisc<strong>en</strong>ce du murmure d’un écho lointain,un paradis perdu… Montréal, <strong>en</strong>core une fois, me promettait ce qu’elle nem’avait jamais donné, mais j’aimais croire <strong>en</strong> ces matins pleins d’espoir,toute la ville ressemblait alors à une jolie bête qui sommeillait. J’allais regagnerle quartier qui se situait à mi-chemin <strong>en</strong>tre l’est et l’ouest <strong>de</strong> la ville.Naguère, j’avais l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> traînasser dans ses rues et j’y connaissais lespaumés <strong>de</strong> toutes les races, <strong>de</strong> gros et grands gaillards, <strong>de</strong>s types bâtis àmême la terre brute, expulsés tout droit <strong>de</strong> ses <strong>en</strong>trailles.C’est Criss qui se pointa le premier. Il était foutrem<strong>en</strong>t mal <strong>en</strong> point. Il avaitl’allure d’un punk défraîchi par les années, comme une toile <strong>de</strong> Riopelle quiaurait mijoté dans une vieille pou<strong>belle</strong> crasseuse un jour <strong>de</strong> canicule. Cetteputain d’œuvre d’art était foutue, ses couleurs lui avai<strong>en</strong>t toutes dégouliné<strong>de</strong>ssus, l’imprégnant maint<strong>en</strong>ant d’un brun sale et morne. Il avait fricoté toutl’hiver avec une junkie <strong>de</strong> Vancouver et s’était lui-même éméché à <strong>plus</strong>ieurs64


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>reprises jusqu’à ce qu’il se retrouve complètem<strong>en</strong>t déplumé, accro et à larue. Je décidai <strong>de</strong> le suivre. Du haut <strong>de</strong> mes vingt ans, j’avais cette inconsci<strong>en</strong>cedu danger qui pousse les jeunes à jouer avec leur vie avec insouciance.On alla chez son rev<strong>en</strong><strong>de</strong>ur, il v<strong>en</strong>ait d’Arabie saoudite et il possédaitla meilleure came <strong>de</strong> la ville. Il se la faisait livrer <strong>en</strong> petits paquets par bateaudirectem<strong>en</strong>t au vieux port. Il avait une gueule merveilleusem<strong>en</strong>t inquiétante,avec son dichdacha, ses yeux injectés jaunâtres d’opium et sa barbe touffue.Il avait l’air <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong>s quarante voleurs échappé tout droit <strong>de</strong>s Contes <strong>de</strong>smille et une nuits d’Ali Baba et qui se serait transformé <strong>en</strong> caïd occi<strong>de</strong>ntal.Criss fit la transaction p<strong>en</strong>dant que j’att<strong>en</strong>dais dans l’<strong>en</strong>trée, puis nous quittâmesles lieux. Bon Dieu que ce mec me plaisait, même tout amoché parla vie, il avait gardé tout son charme. Il était un être hypers<strong>en</strong>sible trouvantbeauté et tristesse <strong>en</strong> tout, s’émerveillant et jurant <strong>en</strong> même temps. Un <strong>de</strong>ces êtres trop s<strong>en</strong>sibles qui ne peut accepter toute la lai<strong>de</strong>ur, l’injustice et latristesse du mon<strong>de</strong>. Il était un <strong>en</strong>fant <strong>de</strong> la terre, un esprit libre qui s’appart<strong>en</strong>aitet moi, <strong>en</strong> quelque sorte, je lui ressemblais. Nous marchâmes p<strong>en</strong>dantun mom<strong>en</strong>t, puis nous nous dirigeâmes à notre gauche dans une ruelledéserte. La ruelle la <strong>plus</strong> spl<strong>en</strong>di<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t infecte comme celle que l’on voitdans les films, avec ses gros cont<strong>en</strong>eurs à ordures, ses escaliers rétractableset ses graffitis écrits à la hâte par <strong>de</strong>s jeunes surexcités. Le sol était maculé<strong>de</strong> taches d’huile à friture usée que les restaurateurs déversai<strong>en</strong>t dans <strong>de</strong> grosbarils près <strong>de</strong>s pou<strong>belle</strong>s qui débordai<strong>en</strong>t jusque sur le bitume. L’exhalaisonpestil<strong>en</strong>tielle <strong>de</strong> tous les rebus <strong>de</strong> l’homme, ainsi s<strong>en</strong>tait secrètem<strong>en</strong>t l’humanité,l’o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la surabondance qui pourrissait. Le soleil n’y pénétraitjamais et on n’y <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dait que le vrombissem<strong>en</strong>t sourd <strong>de</strong>s voitures. Celadonnait l’effet d’un sanctuaire et je m’y s<strong>en</strong>tis bi<strong>en</strong>… Il prépara la came etm’<strong>en</strong> offrit une part. Je me s<strong>en</strong>tais comme Dieu le père tout puissant. Touts’offrait à moi sous <strong>de</strong>s facettes infinies, <strong>en</strong> particules d’éternité. Vivre <strong>en</strong>cette vie ou une autre, quelle était la différ<strong>en</strong>ce ? Il me semblait que nousétions <strong>de</strong>stinés à vivre toutes les émotions et les situations possibles <strong>de</strong> cemon<strong>de</strong> et j’acceptai. Je ne craignais pas la mort. Je ne craignais pas les voyagessolitaires, j’y étais habituée, je connaissais l’inconnu, je connaissais les routesqui nous mèn<strong>en</strong>t partout et nulle part à la fois. Je pris ma dose et Criss comm<strong>en</strong>çaà jouer <strong>de</strong> la guitare. Il la traînait partout, elle était le seul vestige <strong>de</strong>sa vie passée, le seul bi<strong>en</strong> qui eut valu la peine d’être sauvé. Il joua quelquesnotes au début, puis <strong>de</strong>s mélodies peuplées <strong>de</strong> mystères aux reflets <strong>de</strong> forêtsbrumeuses s’éveillant au matin, il joua <strong>de</strong>s horizons azurés aux beautésimpénétrables dansant <strong>en</strong>tre ciel et terre. Ne faillant pas une secon<strong>de</strong> àl’int<strong>en</strong>sité <strong>de</strong> chaque note, portant mon voyage à son paroxysme vers <strong>de</strong>slieux inconnus, je m’<strong>en</strong>dormis… Mon souffle virevoltait l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t autour <strong>de</strong>moi, il <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dait <strong>en</strong> tournoyant légèrem<strong>en</strong>t, puis il s’est arrêté doucem<strong>en</strong>t65


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>sur le trottoir. <strong>Ma</strong> vie était <strong>en</strong> susp<strong>en</strong>sion : ma vie, ce merveilleux prélu<strong>de</strong> àla mort... J’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dis <strong>de</strong>s voix, <strong>de</strong>s murmures d’un autre mon<strong>de</strong> : « <strong>Ma</strong>rie-Anne, <strong>Ma</strong>rie-Anne… »Le reste ne fut que confusion, les lumières s’agitèr<strong>en</strong>t aux vitres teintéesnoires, <strong>de</strong> grands coups me ram<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t sur le bord du rivage et <strong>de</strong>s hommestout <strong>en</strong> blanc, comme <strong>de</strong>s anges, me dénudant : l’écho lointain d’un paradispromis.Je repris consci<strong>en</strong>ce quelques heures <strong>plus</strong> tard à l’hôpital, <strong>en</strong> salle d’observation.Putain, cela me prit un bon mom<strong>en</strong>t à compr<strong>en</strong>dre ce qui m’étaitarrivé. Il y avait un vieux qui était allongé à ma droite, il était si pâle que sapeau luisait dans la pénombre. Il ressemblait à un macchabée si m<strong>en</strong>u et sifragile, il avait dû être victime d’une crise cardiaque. Je me dis que j’avaisprobablem<strong>en</strong>t la même allure, nous partagions cette même fragilité et celame fit pleurer. Des torr<strong>en</strong>ts sil<strong>en</strong>cieux jaillir<strong>en</strong>t <strong>de</strong> mes yeux… Douleurmuette <strong>de</strong> tout ce que j’aurais pu perdre, pleurs étouffés <strong>de</strong> douleur, toutmon être t<strong>en</strong>dait vers un mom<strong>en</strong>t extraluci<strong>de</strong> où je réalisais toutes les blessures<strong>en</strong>fouies <strong>en</strong> moi… J’étais seule, seule au mon<strong>de</strong> face à ma mort.Personne ne savait ce qui m’était arrivé. Je v<strong>en</strong>ais <strong>de</strong> mourir et j’affrontaiscela seule… Je me s<strong>en</strong>tais comme un <strong>en</strong>fant face au mystère <strong>de</strong> la vie… Jer<strong>en</strong>aissais d’un grand trou noir qui consuma tout souv<strong>en</strong>ir et, comme quelquesinstants avant ma naissance, j’étais seule, j’avais mal… Je me r<strong>en</strong>dormis.Quelques heures <strong>plus</strong> tard, je regardai mon voisin <strong>de</strong> chambre à nouveau,je songeai que, parmi les milliards d’humains sur la Terre, nous étions les<strong>de</strong>ux êtres réunis <strong>en</strong> cette chambre <strong>en</strong> ce mom<strong>en</strong>t précis, <strong>en</strong> ce lieu, <strong>de</strong>uxêtres qui ne se parlerai<strong>en</strong>t jamais et qui, pourtant, avai<strong>en</strong>t vécu une <strong>de</strong>s <strong>plus</strong>gran<strong>de</strong>s expéri<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> leur vie côte à côte : le retour à la vie.Je partis <strong>de</strong> nouveau quelques semaines <strong>plus</strong> tard après m’être remise, maiscette fois-ci, vers l’est. Tout <strong>en</strong> moi faisait allusion à un nouveau départ et jeress<strong>en</strong>tais cela profondém<strong>en</strong>t à chaque instant. Chaque nouvelle p<strong>en</strong>sée,chaque geste, chaque lever et chaque coucher <strong>de</strong> soleil, chaque personner<strong>en</strong>contrée, chaque mot écrit et chaque nouvelle feuille blanche me donnai<strong>en</strong>tla chance <strong>de</strong> r<strong>en</strong>aître <strong>de</strong>s milliards <strong>de</strong> fois et cela était merveilleux.Mélanie Séguin, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Élisabeth-Bruyère, CS <strong>de</strong> Rouyn-NorandaEnseignantes : Suzie Robichaud et Chantal Dallaire,Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Ungava et <strong>de</strong> l’Abitibi-Témiscamingue66


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>16. Le sang du dragonPour la première fois, Ja<strong>de</strong> allait r<strong>en</strong>contrer le dragonnet qui l’accompagneraitpour sa vie <strong>en</strong>tière. Son grand-père, le seigneur <strong>de</strong> Fortefort, lui avaitexpliqué que les dragons, avec qui le premier seigneur, <strong>plus</strong>ieurs c<strong>en</strong>tainesd’années <strong>plus</strong> tôt, avait signé une alliance, lui avai<strong>en</strong>t fait parv<strong>en</strong>ir unmessage pour le prév<strong>en</strong>ir que leurs œufs allai<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>tôt éclore et que sapetite-fille pourrait alors les r<strong>en</strong>contrer pour établir un li<strong>en</strong> avec eux.Ja<strong>de</strong> était nerveuse. À peine 8 ans, et pourtant elle <strong>de</strong>vait se lier à un dragon,l’espèce la <strong>plus</strong> puissante <strong>de</strong> la planète. Elle avait <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du les servantesparler <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s <strong>en</strong>levés et <strong>de</strong> villages détruits par les dragons ; son grand-pèrelui avait dit que ce n’était que <strong>de</strong>s <strong>histoire</strong>s. <strong>Ma</strong>lgré tout, elle passa la nuit àfaire <strong>de</strong>s cauchemars.Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main matin, alors qu’elle marchait aux côtés <strong>de</strong> son grand-père, elleregardait la grotte <strong>de</strong>s dragons approcher. Rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t et nerveusem<strong>en</strong>t, elleagrippa la cape <strong>de</strong> son grand-père. Devant la grotte, il fit signe à l’escorte <strong>de</strong>rester à l’extérieur et r<strong>en</strong>tra seul avec Ja<strong>de</strong> pour la prés<strong>en</strong>ter aux dragons.Dans le fond <strong>de</strong> la grotte, Ja<strong>de</strong> vit pour la première fois <strong>de</strong>s dragons aussigrands qu’une grange, armés <strong>de</strong> griffes et <strong>de</strong> <strong>de</strong>nts <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong>s que <strong>de</strong>sépées. Capables <strong>de</strong> brûler <strong>de</strong>s cités avec leurs flammes, ils inspirai<strong>en</strong>t lerespect. Ja<strong>de</strong> vit dans un coin <strong>de</strong> la grotte les œufs <strong>de</strong>s dragons. Elle tira surla cape <strong>de</strong> son grand-père. Il lui sourit et s’avança <strong>de</strong>vant les bêtes avec Ja<strong>de</strong>pour la prés<strong>en</strong>tation officielle.– Puissant protecteur <strong>de</strong> Fortefort, moi, seigneur Roch, vi<strong>en</strong>s à vousaujourd’hui pour vous prés<strong>en</strong>ter ma petite-fille, Ja<strong>de</strong>, fille unique <strong>de</strong> mondéfunt fils et héritière <strong>de</strong> mon titre, pour la cérémonie <strong>de</strong> liaison.Ja<strong>de</strong> vit les dragons la regar<strong>de</strong>r et <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dit leur voix dans sa tête.– Nous l’accueillons, vieux seigneur. Si un <strong>de</strong> nos dragonnets l’accepte,alors la cérémonie aura lieu. Partez et att<strong>en</strong><strong>de</strong>z notre appel, car sous peu ilsnaîtront.Après quelques jours, l’appel fut <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du, c’est-à-dire le rugissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sdragons qui accompagne la naissance <strong>de</strong> leurs petits. En une heure, uneescorte fut préparée et Ja<strong>de</strong> se mit <strong>en</strong> route.67


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Sur les lieux, Ja<strong>de</strong> put voir les dragonnets, bi<strong>en</strong> <strong>plus</strong> petits que leurs par<strong>en</strong>ts.Ja<strong>de</strong> s’approcha d’eux. Aucun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux dragonnets noirs ne la regarda, ladragonnette bleue s’éloigna à son approche et seul le dragonnet rouge vintprès <strong>de</strong> Ja<strong>de</strong>, ce qui surprit tout le mon<strong>de</strong>. Les dragons rouges ont <strong>de</strong>puistoujours la réputation <strong>de</strong> dragons colériques et bagarreurs. Ils sont peu<strong>en</strong>clins à se lier aux humains et ça, peu importe l’âge qu’ils ont. Ja<strong>de</strong> touchale dragonnet. Froid au début, il sembla <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir subitem<strong>en</strong>t chaud, mais sansdouleur, il lui apportait du réconfort. Après quelques minutes, le dragonnetmit fin au contact, mais même après, elle pouvait s<strong>en</strong>tir le dragonnet dansson esprit. Il lui parlait soit <strong>en</strong> images, soit <strong>en</strong> mots, ce qui lui permitd’appr<strong>en</strong>dre son nom : Draq.Plusieurs années passèr<strong>en</strong>t. Ja<strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait une magnifique jeune femme,mais son li<strong>en</strong> avec Draq leur avait fait partager leurs s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts et leurs p<strong>en</strong>sées,toujours unis par ce li<strong>en</strong>. Ils pouvai<strong>en</strong>t voir à travers leurs yeux et<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre par leurs oreilles et Draq, <strong>en</strong> bon dragon rouge qu’il était, partageaitsouv<strong>en</strong>t sa mauvaise humeur avec Ja<strong>de</strong> qui, sans le vouloir, se mettait<strong>en</strong> colère souv<strong>en</strong>t pour ri<strong>en</strong>. Ja<strong>de</strong> et Draq passai<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t du temps<strong>en</strong>semble. Chaque mois qui s’écoulait, on pouvait voir grandir Draq à unpoint tel qu’il ne pouvait <strong>plus</strong> dormir dans le château et que c’était elle quiallait dormir avec lui. Ja<strong>de</strong> allait même jusqu’à ne pas aller à ses cours pourpouvoir passer du temps avec lui, ce qui amusait beaucoup son grand-père.Un jour, alors qu’ils étai<strong>en</strong>t partis chasser, l’o<strong>de</strong>ur d’un dragon étranger futs<strong>en</strong>tie par Draq. Encore jeune, il avait peu <strong>de</strong> connaissances sur les autresespèces <strong>de</strong> dragons. Il prit la décision avec Ja<strong>de</strong> <strong>de</strong> le chasser <strong>de</strong> leur territoireet suivit les traces dans la forêt. Chaque heure qui passait les rapprochait<strong>de</strong> leur cible qui, au <strong>de</strong>rnier mom<strong>en</strong>t, sortit d’un arbre. Un petit dragonvert sans écailles se laissa tomber sur Draq pour l’attaquer à coups <strong>de</strong> griffes.L’attaque, bi<strong>en</strong> que réussie, ne lui fit aucun dégât. Ja<strong>de</strong>, surprise, ne put quefrapper le petit dragon vert qui, pour répliquer, lui infligea une morsure. Celafit reculer Ja<strong>de</strong>, mais surtout mit Draq <strong>en</strong> colère, qui déchiqueta le petitdragon à coups <strong>de</strong> <strong>de</strong>nts.Calmé après son combat, il ress<strong>en</strong>tit <strong>en</strong>fin que quelque chose n’allait pas etretourna auprès <strong>de</strong> Ja<strong>de</strong>. Il ress<strong>en</strong>tait sa douleur, mais elle était étrange ettrop gran<strong>de</strong> pour une simple morsure. L’esprit <strong>de</strong> Ja<strong>de</strong> lui refusait l’accès etle peu qu’il pouvait obt<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> leur li<strong>en</strong> lui fit compr<strong>en</strong>dre qu’elle risquait <strong>de</strong>mourir. Il approcha sa langue <strong>de</strong> la plaie et s<strong>en</strong>tit le poison. Il comprit quele dragon vert avait empoisonné Ja<strong>de</strong> et que, sans ai<strong>de</strong>, elle allait mourir.68


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Désemparé, une seule solution lui vint <strong>en</strong> tête, bi<strong>en</strong> que dangereuse pourlui. Il ne voulait pas perdre son li<strong>en</strong>. Cette humaine qui avait partagé sa vie<strong>de</strong>puis son éclosion était tout pour lui à prés<strong>en</strong>t et sa perte ne pourrait quele détruire. Il leva sa patte au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la tête <strong>de</strong> Ja<strong>de</strong> et, <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>nts,s’infligea une blessure et fit couler son sang que Ja<strong>de</strong> avala. Alors que sonsang r<strong>en</strong>forçait le corps <strong>de</strong> Ja<strong>de</strong>, elle changeait, mais il <strong>de</strong>vait aussi r<strong>en</strong>forcerson esprit et par le li<strong>en</strong> qui les unissait, il transféra autant <strong>de</strong> force qu’il leput dans le corps <strong>de</strong> Ja<strong>de</strong>. Affaibli, il perdit connaissance à ses côtés.Après <strong>plus</strong>ieurs heures, Ja<strong>de</strong> fut la première à se réveiller. Changée, elle ses<strong>en</strong>tait <strong>plus</strong> forte. Bi<strong>en</strong> que la nuit fût tombée, elle pouvait très bi<strong>en</strong> voir etson li<strong>en</strong> avec Draq s’était r<strong>en</strong>forcé. Sans le toucher, elle le réveilla et ilsrepartir<strong>en</strong>t pour Fortefort.À la seigneurie les att<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t son grand-père et les dragons protecteurs. Ilétait rare <strong>de</strong> voir les dragons au château et <strong>en</strong>core <strong>plus</strong> <strong>en</strong> pleine nuit. Unefois sur place, Ja<strong>de</strong> put s<strong>en</strong>tir les dragons qui l’inspectai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leurs pouvoirs.Leur colère, pour une raison inconnue, inquiétait Ja<strong>de</strong>. Son contact avecDraq lui apprit qu’ils avai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s problèmes et que ça avait à voir avec lafaçon que Draq avait utilisée pour la sauver.Le seigneur Roch, sout<strong>en</strong>u <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux dragons protecteurs, déclara d’une voixforte et claire :– Pour que les erreurs du passé ne soi<strong>en</strong>t pas répétées, Ja<strong>de</strong> et Draq, nousvous bannissons <strong>de</strong> la seigneurie.À suivre…Patrick Roch-Pétrin, 1 er cycleC<strong>en</strong>tre La Relance (Saint-Jean-sur-Richelieu), CS <strong>de</strong>s Hautes-RivièresEnseignante : Sabine Gervais, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Haut-Richelieu69


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>17. Un film <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>ce-fictionLe v<strong>en</strong>t glacial semblait souffler quelques flocons, une o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> moisissurelui montait tranquillem<strong>en</strong>t au nez, le contact d’un sol dur et froid eut finalem<strong>en</strong>traison <strong>de</strong> sa torpeur. Il ouvrit les yeux. De sa vision troublée, il nedistingua ri<strong>en</strong> qui ne l’aidait à se situer. Un goût métallique se mélangeait àcette atmosphère plutôt étrange. Il réalisa qu’il avait <strong>en</strong>core tous ses membres,c’était au moins cela. En se <strong>de</strong>mandant pourquoi il ne les aurait pas tous, ilporta la main à sa bouche et toucha sa lèvre. Celle-ci était largem<strong>en</strong>t f<strong>en</strong>dueet le sang comm<strong>en</strong>çait à peine à coaguler. Une fois sa vision complètem<strong>en</strong>trev<strong>en</strong>ue, il posa les yeux sur l’étrange décor qui l’<strong>en</strong>tourait. Il y avait ici etlà <strong>de</strong>s feuilles éparpillées ainsi qu’une panoplie d’ordinateurs éteints. Desnéons ne fonctionnant qu’à moitié éclairai<strong>en</strong>t faiblem<strong>en</strong>t ce décor directem<strong>en</strong>tsorti d’un film <strong>de</strong> sci<strong>en</strong>ce-fiction. De la neige fondait un peu partoutcomme si, p<strong>en</strong>dant longtemps, la nature avait eu ses droits à l’intérieur etque quelqu’un avait brusquem<strong>en</strong>t coupé cela <strong>en</strong> allumant le chauffage. Avecle cliquetis <strong>de</strong> la neige fondant goutte à goutte, cette pièce totalem<strong>en</strong>t inconnuepour lui l’angoissait au <strong>plus</strong> haut point. <strong>Ma</strong>is que fichait-il là ?N’ayant cette fois pas l’impression, mais bi<strong>en</strong> la certitu<strong>de</strong> qu’il y avait unelégère brise glaciale dans la pièce, il se mit <strong>de</strong>bout et jeta <strong>de</strong> nouveau unregard circulaire dans la petite salle où il se trouvait. Totalem<strong>en</strong>t déboussolé,il se passa les mains sur le visage et s<strong>en</strong>tit une barbe <strong>de</strong> <strong>plus</strong>ieurs jours.Pourtant, il se l’était rasée le matin précé<strong>de</strong>nt, lui semblait-il… Dans cettepièce carrée où il n’y avait aucune f<strong>en</strong>être, il remarqua un couloir d’où lev<strong>en</strong>t semblait v<strong>en</strong>ir. Les bourrasques lui donnant la chair <strong>de</strong> poule lui indiquai<strong>en</strong>tclairem<strong>en</strong>t qu’il n’était pas à quelques pas <strong>de</strong> sa petite ville, car déjàlà, <strong>de</strong> la neige <strong>en</strong> juillet il n’avait jamais vu ça. Quand il eut atteint la portegran<strong>de</strong> ouverte d’où s’<strong>en</strong>gouffrait le v<strong>en</strong>t d’un froid mordant, il fut submergépar un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> terreur, non pas parce que la neige l’effrayait, mais bi<strong>en</strong>parce que l’ét<strong>en</strong>due blanche que lui faisait voir ses yeux semblait à perte <strong>de</strong>vue. Ne pr<strong>en</strong>ant même pas le temps <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre son courage à <strong>de</strong>ux mains,il partit aussi vite que ses jambes le lui permettai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> suivant les traces <strong>de</strong>pas qu’il v<strong>en</strong>ait tout juste d’apercevoir. Ça ne fut pas bi<strong>en</strong> long avant qu’ilne se r<strong>en</strong><strong>de</strong> compte que c’était peine perdue, car le v<strong>en</strong>t avait eu vite raison<strong>de</strong>s empreintes laissées. Ne voulant pas mourir <strong>de</strong> froid, il retourna dans lebâtim<strong>en</strong>t d’où il était sorti. Il se guida à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> ses pas sinon il se seraitperdu à coup sûr. La tempête faisant rage l’aveuglait et la bâtisse aurait pupasser pour une petite colline <strong>de</strong> neige sans la porte <strong>en</strong>trouverte. Il passa leseuil <strong>de</strong> celle-ci, puis se dépêcha <strong>de</strong> la fermer. Elle semblait être ouverte<strong>de</strong>puis déjà un bon mom<strong>en</strong>t…70


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>De retour à l’intérieur, laissé à lui-même, il réfléchit quelques instants à lasituation dans laquelle il se trouvait. S’il s’attardait sur ses premières p<strong>en</strong>sées,il n’irait pas bi<strong>en</strong> loin, car tout ce qu’il avait <strong>en</strong> tête était qu’il était seulet <strong>en</strong>fermé au milieu <strong>de</strong> nulle part, coincé dans une tempête. Il se mit doncà fouiller un peu partout : dans les papiers, les tiroirs, les placards… Il essayamême <strong>de</strong> mettre <strong>en</strong> fonction les ordinateurs. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, aucun nerépondait, à l’exception d’un qui n’affichait que <strong>de</strong>s séries <strong>de</strong> chiffres et <strong>de</strong>lettres sans aucune ordonnance appar<strong>en</strong>te. Le temps passait, ses idées sebousculai<strong>en</strong>t. Finalem<strong>en</strong>t, il mit la main sur une trappe qui se situait non passur le plancher ni au plafond, mais bi<strong>en</strong> sur le mur. Il l’ouvrit et traversa <strong>de</strong>l’autre côté. Il se retrouva dans ce qui semblait être un mélange <strong>de</strong> chambreà coucher, <strong>de</strong> salle <strong>de</strong> bain, <strong>de</strong> salon, <strong>de</strong> cuisine et <strong>de</strong> salle d’<strong>en</strong>traînem<strong>en</strong>t.La pièce n’était pas très gran<strong>de</strong>, mais tout y était. Voyant le réfrigérateur,malgré son manque d’appétit apparemm<strong>en</strong>t causé par les nausées qu’ilavait, il se dit que s’il était pour rester là quelque temps, un peu <strong>de</strong> nourritur<strong>en</strong>e lui ferait pas <strong>de</strong> mal. Lorsqu’il l’ouvrit, ri<strong>en</strong> ne s’y trouvait, mis à part uneinfime quantité <strong>de</strong> vian<strong>de</strong> dans le congélateur.<strong>Ma</strong>is que faisait-il là, comm<strong>en</strong>t s’y était-il r<strong>en</strong>du ? Il ne se souv<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> ri<strong>en</strong>.Comm<strong>en</strong>t était-ce possible, qu’avait-il fait ? Lorsqu’il regarda par l’uniquef<strong>en</strong>être du bâtim<strong>en</strong>t, située dans la pièce récemm<strong>en</strong>t découverte, le tempsn’avait étrangem<strong>en</strong>t pas changé. Il v<strong>en</strong>tait toujours autant, la neige prisedans les bourrasques ne semblait jamais vouloir se déposer au sol. Le ciel,ni clair ni sombre, était du même gris terne et sans vie <strong>de</strong>puis maint<strong>en</strong>ant…il n’aurait su le dire. Il se s<strong>en</strong>tait seul au mon<strong>de</strong>. Il avait déjà exploré les <strong>de</strong>uxpièces au moins une c<strong>en</strong>taine <strong>de</strong> fois sans ri<strong>en</strong> y trouver <strong>de</strong> <strong>plus</strong>. Il était aussiinutile <strong>de</strong> retourner à l’extérieur puisqu’il était au milieu d’un champ <strong>de</strong>neige interminable et qu’il n’avait aucun vêtem<strong>en</strong>t chaud. Le désespoir legagnait petit à petit.Soudain, par magie, exactem<strong>en</strong>t comme dans un rêve, la police débarqua.Les ag<strong>en</strong>ts lui <strong>de</strong>mandèr<strong>en</strong>t s’il allait bi<strong>en</strong> et s’il était capable <strong>de</strong> marcher. Illeur répondit par un hochem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tête, puis ils l’emm<strong>en</strong>èr<strong>en</strong>t vers l’extérieur.Le <strong>plus</strong> étrange était que, comme lui, aucun n’avait <strong>de</strong> manteau.N’ayant pas trop le choix, il les suivit. Le petit groupe franchit le seuil qui lesséparait du champ <strong>en</strong>neigé. Le temps extérieur, toujours aussi maussa<strong>de</strong>, luidonna froid dans le dos. Quand ils dépassèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong> quelques pas l’<strong>en</strong>droit oùil semblait s’être arrêté <strong>plus</strong> tôt, ils traversèr<strong>en</strong>t une porte découpée à mêmele vi<strong>de</strong>. Il s<strong>en</strong>tit immédiatem<strong>en</strong>t une chaleur bi<strong>en</strong>faisante l’<strong>en</strong>vahir. D’où ilse trouvait à prés<strong>en</strong>t, il pouvait voir ce dans quoi il avait été <strong>en</strong>fermé. C’étaitune cage <strong>en</strong> verre un peu <strong>plus</strong> grosse qu’un gymnase munie <strong>de</strong> canons àneige et d’une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> v<strong>en</strong>tilateurs.71


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Avant qu’il n’ait eu le temps <strong>de</strong> questionner tout le mon<strong>de</strong>, le policier <strong>en</strong>chef lui prés<strong>en</strong>ta la situation. Il avait été attaqué dans un bar cinq jours <strong>plus</strong>tôt pour <strong>en</strong>suite être am<strong>en</strong>é à un chercheur faisant diverses expéri<strong>en</strong>ces surles humains et, bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du, ses recherches n’étai<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> aucun cas,approuvées par qui que ce soit. Celui-ci disait s’être écœuré <strong>de</strong>s animaux etvoulait <strong>de</strong>s sujets p<strong>en</strong>sants. L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cas dans laquelle il avait été impliquépar la force et sans vraim<strong>en</strong>t s’<strong>en</strong> r<strong>en</strong>dre compte à cause <strong>de</strong>s effets <strong>de</strong> ladrogue qu’on lui avait administrée consistait à savoir jusqu’où l’humain étaitprêt à aller <strong>en</strong> situation désespérée. Heureusem<strong>en</strong>t, cette fois-ci, les policiersétai<strong>en</strong>t fiers d’être arrivés à temps, car ce n’était pas la première situation dug<strong>en</strong>re qu’ils avai<strong>en</strong>t eue à affronter. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, le résultat <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnièresopérations n’avait pas eu un dénouem<strong>en</strong>t aussi joyeux. En effet, lechercheur démoniaque leur avait causé bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s soucis durant les six <strong>de</strong>rnièresannées. En tout, il avait m<strong>en</strong>é à terme quatre expéri<strong>en</strong>ces du g<strong>en</strong>re,toutes aussi répugnantes les unes que les autres. Les trois premières victimesavai<strong>en</strong>t été retrouvées complètem<strong>en</strong>t démembrées et la <strong>de</strong>rnière avait finifolle et s’était mangé un pied et un bras, <strong>en</strong> <strong>plus</strong> <strong>de</strong> s’arracher la moitié ducuir chevelu.Le chef <strong>de</strong> la briga<strong>de</strong> policière, qui avait participé à toutes ces <strong>en</strong>quêtes,cesserait peut-être <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> l’insomnie <strong>en</strong> p<strong>en</strong>sant aux autres victimespuisque le chercheur fou était maint<strong>en</strong>ant sous surveillance et <strong>en</strong> direction<strong>de</strong> la prison à sécurité maximale la <strong>plus</strong> redoutée <strong>de</strong> l’Amérique. Pour l’instant,le calme était rev<strong>en</strong>u. Peut-être pas éternellem<strong>en</strong>t, mais pour un bonbout <strong>de</strong> temps… du moins, l’espérait-il.Gabriel Bugeaud, Préparation aux étu<strong>de</strong>s postsecondairesC<strong>en</strong>tre Nouvel-Horizon (Québec), CS <strong>de</strong>s Premières-SeigneuriesEnseignante : Sylvie Pageau, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Québec72


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>18. La crique magiqueLorsque nous étions petits, moi, mes sœurs et mon cousin, nous allions souv<strong>en</strong>tà la pêche sur les terres d’un <strong>de</strong> nos voisins. Il nous appréh<strong>en</strong>dait pratiquem<strong>en</strong>tà tous les coups et il nous expliquait que c’était dangereux d’yaller. Car il s’agissait d’une partie <strong>de</strong> ses terres où vivait le taureau dominant<strong>de</strong> son troupeau <strong>de</strong> vaches, « une bête agressive ». <strong>Ma</strong>is nous nous croyions<strong>plus</strong> rapi<strong>de</strong>s et futés que lui, et ri<strong>en</strong> au mon<strong>de</strong> ne nous faisait peur.Cette crique que nous disions magique, on l’avait baptisée la « ThousandFishes », car il y avait <strong>de</strong>s bancs <strong>de</strong> ménés à profusion et il était très facile <strong>de</strong>les attraper. Notre but était d’être celui ou celle qui <strong>en</strong> attraperait le <strong>plus</strong>.Juste <strong>de</strong> savoir qu’Hubert, notre voisin, ne voulait pas nous voir là, c’était lamoitié du fun. Car nous avions à nous trouver <strong>de</strong>s manières <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong>futées <strong>de</strong> nous y r<strong>en</strong>dre sans nous faire pr<strong>en</strong>dre.Nous avons mis au point toutes sortes <strong>de</strong> plans <strong>de</strong>s <strong>plus</strong> laborieux pour nepas nous faire attraper. On passait par le petit bois <strong>de</strong>rrière les terres. Ou un<strong>de</strong> nous allait <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à Hubert <strong>de</strong> mettre <strong>de</strong> l’air dans ses pneus <strong>de</strong> bicyclette.Ou nous marchions <strong>de</strong>vant chez lui avec notre chi<strong>en</strong> pour que le si<strong>en</strong>coure après le nôtre et crée une diversion. Semble-t-il qu’il voyait toujoursclair dans notre jeu.À croire qu’il avait <strong>de</strong>s pouvoirs magiques. Même que certaines personnesdisai<strong>en</strong>t qu’il s’agissait d’un vieux sorcier et que, s’il attrapait quelqu’un <strong>en</strong>train <strong>de</strong> pêcher dans sa crique, il l’<strong>en</strong>fermerait dans sa cave que nous appelionsson « cachot » pour mieux nous faire peur. Car il ressemblait vraim<strong>en</strong>tà une sorte <strong>de</strong> personnage macabre. Il avait un œil <strong>plus</strong> gros que l’autre etil était un peu croche. Et que dire <strong>de</strong> son grand nez pointu avec <strong>de</strong>ux grossesverrues poilues... Il était vraim<strong>en</strong>t épeurant. Il était dans presque toutes nos<strong>histoire</strong>s d’épouvante, assez que j’<strong>en</strong> ai souv<strong>en</strong>t rêvé. « Brrrr… »Une fois, mon grand frère s’était fait pr<strong>en</strong>dre. Quand il est rev<strong>en</strong>u à la maison<strong>plus</strong> tard dans l’après-midi, il nous a conté toutes sortes <strong>de</strong> choses <strong>plus</strong>épouvantables les unes que les autres. À faire raidir tous les poils sur lecorps. Le vieux Hubert lui avait dit qu’il voyait à travers les yeux <strong>de</strong> sontaureau ; c’était comme ça qu’il le savait toujours quand nous allions pêcherdans sa crique.Aujourd’hui, je compr<strong>en</strong>ds que ce vieil homme, si effrayant à nos yeuxd’<strong>en</strong>fants, nous aimait beaucoup <strong>plus</strong> que nous n’aurions jamais pu73


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>l’ima giner et qu’il nous a protégés <strong>de</strong> la noya<strong>de</strong> toute notre jeunesse. C’estpourquoi notre crique magique portait le nom <strong>de</strong> son frère Ubald, disparudans les eaux à l’été 1923.Alors, si j’ai bi<strong>en</strong> compris… Sorcier pour les tout-petits et saint homme pourles grands. Aujourd’hui, je te remercie au nom <strong>de</strong> tous nos petits. Mille foismerci, vieil homme incompris.Même après toutes ces années, tu es toujours dans mes p<strong>en</strong>sées, cherHubert.Emmanuel Chréti<strong>en</strong>, PrésecondaireÉtablissem<strong>en</strong>t Drummond, CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignant : Jacques Lambert, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la région <strong>de</strong> DrummondvilleÀ mon fils <strong>de</strong> cœur,19. À mon fils <strong>de</strong> cœurJe ne t’ai ni porté, ni donné naissance, ni vu grandir. Quand je t’ai r<strong>en</strong>contréla première fois, j’ai dû me lever la tête pour te regar<strong>de</strong>r. Tu avais dix-huitans. J’ai immédiatem<strong>en</strong>t perçu <strong>en</strong> toi un jeune homme t<strong>en</strong>dre, fragile, avi<strong>de</strong>d’amour avec un imm<strong>en</strong>se désir <strong>de</strong> faire plaisir. Ton intellig<strong>en</strong>ce, ta facilité àt’émerveiller et ta volonté pour accomplir <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s choses étai<strong>en</strong>t évi<strong>de</strong>ntes,même si pour toi cela te semblait probablem<strong>en</strong>t invraisemblable.Pour toi, cette r<strong>en</strong>contre a sûrem<strong>en</strong>t suscité beaucoup <strong>de</strong> questions. « Quiétait la nouvelle blon<strong>de</strong> <strong>de</strong> mon père, combi<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps serait-elle dans savie ? Quel impact aurait-elle sur notre vie familiale qui comm<strong>en</strong>çait toutjuste à pr<strong>en</strong>dre forme, à la suite <strong>de</strong> notre déménagem<strong>en</strong>t à Burlington ?Quelle serait ma place dans cette nouvelle relation ? »Je compr<strong>en</strong>ds mieux aujourd’hui l’impact que mon arrivée a eu dans ta vie.À dix-neuf ans, tu as décidé <strong>de</strong> voler <strong>de</strong> tes propres ailes. Ton père et toijugiez que tu étais maint<strong>en</strong>ant un adulte.<strong>Ma</strong>is comm<strong>en</strong>t peut-on vraim<strong>en</strong>t <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un adulte quand on n’a pas reçutout l’<strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t nécessaire dans son <strong>en</strong>fance ? As-tu pris cette décision74


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>pour nous laisser le champ libre ? Trop conc<strong>en</strong>trée sur ma propre vie, je n’aipas réalisé que nous t’avons incité à quitter le nid familial peut-être un peutrop tôt.Doucem<strong>en</strong>t, nous avons appris à nous apprivoiser et au fil du temps et <strong>de</strong>stempêtes nous avons développé <strong>de</strong>s li<strong>en</strong>s très forts. Tu m’as prouvé quej’avais vu juste le jour où tu as accepté que je <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>ne pour toi un m<strong>en</strong>toret lorsque tu as accompli avec brio toute la longue liste <strong>de</strong> tâches et <strong>de</strong>règlem<strong>en</strong>ts que cet <strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t t’imposait : me téléphoner à huit heures tousles matins pour me donner un compte r<strong>en</strong>du <strong>de</strong> la journée précé<strong>de</strong>nte et medétailler ton ag<strong>en</strong>da pour celle à v<strong>en</strong>ir. L’obligation <strong>de</strong> consacrer au moinsdix heures par jour au travail ou aux étu<strong>de</strong>s, me confier toutes tes cartes <strong>de</strong>crédit avec l’historique <strong>de</strong> tes dép<strong>en</strong>ses antérieures et t’astreindre à un budgettrès austère. Probablem<strong>en</strong>t, le <strong>plus</strong> difficile pour toi a été <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir r<strong>en</strong>contrerton conseiller pédagogique avec ton père pour établir un plan <strong>de</strong>travail et <strong>de</strong>s échéanciers qui te permettrai<strong>en</strong>t d’obt<strong>en</strong>ir ton diplôme d’étu<strong>de</strong>ssecondaires. Je ne connais pas beaucoup <strong>de</strong> jeunes <strong>de</strong> vingt-trois ans qui seserai<strong>en</strong>t soumis à une telle discipline spécialem<strong>en</strong>t quand le m<strong>en</strong>tor était « ta<strong>belle</strong>-mère ».Lors <strong>de</strong> la remise <strong>de</strong>s diplômes, quand je t’ai aperçu dans ta toge bleu royalavec ton mortier qui recouvrait ta <strong>belle</strong> crinière rousse et avec la démarched’un homme fier <strong>de</strong> ses accomplissem<strong>en</strong>ts et qui se s<strong>en</strong>t prêt à conquérir lemon<strong>de</strong>, je suis certaine que je n’aurais pas été <strong>plus</strong> fière si tu avais été monpropre fils. Tu m’as fait le ca<strong>de</strong>au le <strong>plus</strong> précieux que je n’avais jamais reçuquand tu es v<strong>en</strong>u me serrer dans tes bras et que tu m’as dit que cette réussiteétait grâce à moi. Cela était très égoïste <strong>de</strong> ma part d’apprécier à ce point cecomplim<strong>en</strong>t. <strong>Ma</strong>lgré tous mes conseils et mon <strong>en</strong>cadrem<strong>en</strong>t, c’est toi seulqui as eu la volonté <strong>de</strong> les suivre, je n’ai été qu’un facilitateur.Tu impressionnais tout le mon<strong>de</strong> avec tes tal<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> chef cuisinier hors ducommun et ta facilité à préparer <strong>de</strong>s repas gastronomiques pour un grandnombre <strong>de</strong> personnes. Mon <strong>plus</strong> bel exemple est le souper que tu as préparépour vingt-huit personnes à l’occasion du quatre-vingtième anniversaire <strong>de</strong>mon père. Tous les convives ont été émerveillés par ton habileté à préparerseul un repas aussi succul<strong>en</strong>t <strong>en</strong> un temps record. J’étais très fière <strong>de</strong> toi.Même si tous t’<strong>en</strong>courageai<strong>en</strong>t fortem<strong>en</strong>t à continuer dans ce domaine, tu aseu la volonté <strong>de</strong> poursuivre ton rêve : <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir mécanici<strong>en</strong> <strong>de</strong> machinerielour<strong>de</strong>. Cette décision t’a <strong>de</strong>mandé beaucoup d’efforts et <strong>de</strong> travail. Tu m’asune autre fois prouvé que tu avais la volonté pour réussir <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s choses.75


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>N’oublie jamais qu’avec cette gran<strong>de</strong> volonté qui t’habite et le souti<strong>en</strong> <strong>de</strong>sg<strong>en</strong>s qui t’aim<strong>en</strong>t, tu as la possibilité <strong>de</strong> dompter tous tes vieux démons…<strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant avec ton diplôme, <strong>plus</strong>ieurs autres certificats <strong>de</strong> spécialisation ettes nombreuses années d’expéri<strong>en</strong>ce, tu as un brillant av<strong>en</strong>ir <strong>de</strong>vant toi et jesuis certaine que tu réussiras.L’annonce <strong>de</strong> ton projet <strong>de</strong> mariage et votre désir <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r une famille<strong>en</strong>semble ne peuv<strong>en</strong>t me r<strong>en</strong>dre <strong>plus</strong> heureuse. Je rêve déjà du jour où tonpère et moi pourrons cajoler, gâter et chérir ces petits bouts <strong>de</strong> chou.Depuis ma t<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>fance, mon <strong>plus</strong> grand souhait était d’avoir <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants,malheureusem<strong>en</strong>t la vie <strong>en</strong> a décidé autrem<strong>en</strong>t et j’<strong>en</strong> avais fait mon <strong>de</strong>uil.Jamais je n’aurais pu m’imaginer que ma r<strong>en</strong>contre avec ton père me permettrait<strong>de</strong> réaliser ce beau rêve. Tu représ<strong>en</strong>tes pour moi le fils que j’aitoujours désiré avoir.Je remercie la vie tous les jours <strong>de</strong> m’avoir mise sur ton chemin. Je t’aimecomme mon propre fils.Avec toute ma t<strong>en</strong>dresse et mon amour,Carm.Carmelle Gr<strong>en</strong>ier, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Le Moyne-D’Iberville (Longueuil), CS <strong>Ma</strong>rie-VictorinEnseignante : France Na<strong>de</strong>au, Syndicat <strong>de</strong> Champlain20. Un périple pour la vieJe n’étais <strong>en</strong>core qu’une <strong>en</strong>fantJ’étais toute jeuneJe n’avais que 8 ansJe vivais pleinem<strong>en</strong>t ma vieProfitant <strong>de</strong> ces petits plaisirsComme on la vit quand on est jeune et sans souciInoff<strong>en</strong>sive, voulant me faire une place dans ce mon<strong>de</strong>76


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Déjà bi<strong>en</strong> appréciée et <strong>en</strong>touréeDe mes compagnons <strong>de</strong> classeParmi les <strong>plus</strong> doués d’<strong>en</strong>tre eux,Je me voyais déjà gran<strong>de</strong>Avec mes idées un peu re<strong>belle</strong>sGrandissant comme bon me sembleQuand un jour, sans prév<strong>en</strong>ir,Le <strong>de</strong>stin s’acharna sur moiSe faisant discret et inquiétant<strong>Ma</strong>lin et rusé, <strong>en</strong> trompait <strong>plus</strong>ieursDonnant du fil à retordreÀ tous ceux voulant le déjouerI<strong>de</strong>ntifié à temps par <strong>de</strong>s expertsPour me sauver <strong>de</strong>s bras <strong>de</strong> LuciferTraité comme une urg<strong>en</strong>ceD’une gran<strong>de</strong> importanceNuisible et dévastateurDestructeur <strong>de</strong> toute forme <strong>de</strong> vieGuérissant le mal par le malPour mieux vaincre l’<strong>en</strong>nemiDépourvue <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> mon corpsAffaiblie et sans déf<strong>en</strong>sePour le combat <strong>de</strong> ma vieUne lutte sans merciUn remè<strong>de</strong> <strong>de</strong>s <strong>plus</strong> dévastateurs que réparateursEng<strong>en</strong>drant <strong>de</strong> multiples séquellesCréant une vie que je n’avais pas choisieD’innombrables souffrances aprèsLa <strong>plus</strong> cruciale opération d’une exist<strong>en</strong>ceUne famille sacrifiée pour accompagnerSa ca<strong>de</strong>tte dans son cauchemarSans que le mon<strong>de</strong> ne cesse <strong>de</strong> tourner pour autant77


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Avec courage et persévérancePour surmonter toutes les <strong>en</strong>traves sur ma routeAcc<strong>en</strong>tuant la complexité <strong>de</strong> la rémissionEntourée <strong>de</strong> bons chréti<strong>en</strong>sFaisant <strong>de</strong>s pieds et <strong>de</strong>s mainsAidant à l’amélioration <strong>de</strong> la guérisonDu sort <strong>de</strong> la jeune victimeAvec un far<strong>de</strong>au imm<strong>en</strong>seVivant un jour à la foisSurmontant les difficultésD’une bataille sans relâcheD’une manière bi<strong>en</strong> adéquateJe pus poursuivre un niveau scolaire <strong>de</strong> mon âgeAppuyée <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s aidants et compréh<strong>en</strong>sifsEspérant rattraper le tempsRepr<strong>en</strong>dre ma place dans le mon<strong>de</strong> comme autrefois<strong>Ma</strong>lgré les différ<strong>en</strong>ces <strong>de</strong>s circonstances<strong>Ma</strong>is dans ma tête et mon corpsBi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s choses avai<strong>en</strong>t changéCompliquant la tâche à réaliserRedoubler l’effort et la durée d’exécutionPour arriver à un résultat commun aux g<strong>en</strong>s <strong>de</strong> mon âgeRépondant aux normes <strong>de</strong>s exig<strong>en</strong>cesPr<strong>en</strong>ant consci<strong>en</strong>ce qu’al<strong>en</strong>tour le mon<strong>de</strong> avait évoluéAlors que j’étais restée au même sta<strong>de</strong>,Ral<strong>en</strong>tie par le poids <strong>de</strong>s répercussions du péripleAvec effort, persévérance et déterminationL<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t mais sûrem<strong>en</strong>t,Je n’avais pas dit mon <strong>de</strong>rnier motAvançant dans un mon<strong>de</strong> barbareTrébuchant, me relevantGardant espoir dans mon cœur et ma têteQu’un jour, j’atteindrais le haut <strong>de</strong> la montagne78


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Cep<strong>en</strong>dant, la partie n’était pas gagnéeM’accrochant avec volonté à un désir <strong>de</strong> réussite<strong>Ma</strong>is je n’avais pas fait tout ce cheminPour arrêter parce que quelqu’un disait que je n’avais pas la capacitéEt je ne baisserais pas les bras avant d’être persuadéeD’avoir tout fait pour y arriverBi<strong>en</strong> <strong>de</strong>s doutes se sont prés<strong>en</strong>tésEt <strong>de</strong>s remises <strong>en</strong> question poséesTrouvant moy<strong>en</strong> <strong>de</strong> les contournerChaque fois malgré tout,Permettant <strong>de</strong> continuer à avancer <strong>de</strong> nouveauPlus on monte, <strong>plus</strong> ça se corseLe temps nous ramène aux règles <strong>de</strong>s institutionsL’âge <strong>de</strong> la majorité atteinte,Les services et l’ai<strong>de</strong> ne sont <strong>plus</strong> les mêmesTravailler d’arrache-pied pour avoir les compét<strong>en</strong>ces d’exig<strong>en</strong>cesDéfinitives pour une exist<strong>en</strong>ceVoir certains réussir, d’autres échouer<strong>Ma</strong>is jamais avec facilitéArrivant à se faire une placeÊtre semblable à d’autresProcurant un petit bonheur pour soiJusqu’à ce que le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> vérité arriveRedouté et définitif pour <strong>plus</strong>ieursD’un parcours dans une vieComme toute bonne chose a une finMême si on a utilisé toute l’ai<strong>de</strong> possibleL’échec s’avère parfois inévitableLorsqu’on ne possè<strong>de</strong> pas les compét<strong>en</strong>ces nécessairesQue les causes justifiées ne peuv<strong>en</strong>t être r<strong>en</strong>duesSi un côté <strong>de</strong> la montagne est trop abrupt pour le monterOn peut trouver un autre moy<strong>en</strong> d’arriver au sommetToute hypothèse mise <strong>en</strong> doute doit être exécutée79


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Avant <strong>de</strong> r<strong>en</strong>oncer complètem<strong>en</strong>t à quoi que ce soitSupportée d’une ai<strong>de</strong> adéquate à laquelle on n’aurait cruPouvoir justifier mon cas au ministère <strong>de</strong> l’ÉducationCe ne fut pas chose faite, chose permiseCe n’était pas gagné d’avanceUne lutte contre <strong>plus</strong> haut que soiPuis une t<strong>en</strong>tative que nombre <strong>de</strong> personnes croyai<strong>en</strong>tIrréaliste et impossible fut faiteQuelque chose <strong>de</strong> rare et <strong>de</strong> <strong>de</strong>rnier recoursQu’était l’exemption d’une matière ardueEss<strong>en</strong>tielle pour un DESAyant réussi tout le resteC’était un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers recours<strong>Ma</strong>is non le moindreUn travail prestigieux y fut consacréAtt<strong>en</strong>dant avec espérance et impati<strong>en</strong>ceUne réponse bi<strong>en</strong> élaboréeEt, qui sait, démontrerait la bontéQu’il y a dans ce mon<strong>de</strong>La nouvelle arriva un jour sans s’y att<strong>en</strong>dre,Fébrile et joyeuse, jusqu’à sa <strong>de</strong>stinatairePuis dévoilée au grand jour soulageant celle-ciEt tous ceux ayant contribué à sa réussiteUne surprise pour <strong>plus</strong>ieurs qui n’avai<strong>en</strong>tJamais vu une telle chose <strong>de</strong> leur carrièreUn cas exceptionnel qu’ils ne verrai<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>Pour moi, ce fut une pure réjouissance,Procurant les s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> fierté et <strong>de</strong> réussiteDes efforts qui ont duré p<strong>en</strong>dant près <strong>de</strong> 9 ansUn far<strong>de</strong>au qui allait <strong>en</strong>fin me libérerLa nouvelle étant arrivée avant la fin <strong>de</strong> l’annéeJe fus invitée à la soirée <strong>de</strong> remise <strong>de</strong> diplômesDeux semaines <strong>plus</strong> tard80


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>On m’a déjà dit que les efforts qui <strong>en</strong> val<strong>en</strong>t la peineSont toujours récomp<strong>en</strong>sésSi vous <strong>en</strong> voulez une preuve <strong>en</strong> voici uneIl y a 13 ans, j’étais une autre personneEt je n’aurais pas été la même aujourd’huiSi je n’avais pas surmonté tous ces obstaclesEt avec la force que j’ai acquise,Ça me mènera sûrem<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> loin et me permettra <strong>de</strong> franchirDe nouvelles frontièresAudrey Doucet, Intégration socialeCFGA <strong>de</strong> Nicolet, CS <strong>de</strong> la RiveraineEnseignante : Nadia Juli<strong>en</strong>, Syndicat <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants <strong>de</strong> la Riveraine21.A. Je t’aimerai toujoursUn long sil<strong>en</strong>ce trouble s’abattit lour<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t dans la pièce au décor sinistre.Qu’avait-il dit ? Est-ce vrai ? Pourquoi cela nous arrive-t-il ? Je les regardais,passant mon regard, qui comm<strong>en</strong>çait à s’embrumer, <strong>de</strong> l’un à l’autre,comme désespérée que tout cela soit vrai. Trop vrai. Ne m’avait-il pas promisqu’il revi<strong>en</strong>drait, quoi qu’il arrive !Le temps se fige. Comme au ral<strong>en</strong>ti, je s<strong>en</strong>s ma tasse pleine <strong>de</strong> café brûlantglisser sous mes doigts. Le liqui<strong>de</strong> brunâtre se répand à mes pieds, tandisque les morceaux éclatai<strong>en</strong>t, comme mon cœur.Des larmes au goût amer fondir<strong>en</strong>t sur mon visage, mais je ne les s<strong>en</strong>tis àaucun mom<strong>en</strong>t. Trop accablée par cette douloureuse nouvelle. <strong>Ma</strong>is je merefuse d’y croire. Je me répète dans ma tête que tout ce qu’ils peuv<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>dire n’est que <strong>de</strong>s inepties et qu’il finirait par rev<strong>en</strong>ir. Je suis <strong>en</strong> crise.Et ces braves messieurs assis dans mon salon, visiblem<strong>en</strong>t mal à l’aise, t<strong>en</strong>t<strong>en</strong>tvainem<strong>en</strong>t d’apaiser ma souffrance. Il est mort <strong>en</strong> héros pour eux. Je suisdésormais une femme qui pleure son mari fraîchem<strong>en</strong>t parti <strong>en</strong> guerre etmort si prématurém<strong>en</strong>t. Je me souvi<strong>en</strong>s très bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> notre première r<strong>en</strong>contre.Tout <strong>de</strong> suite, j’ai su qu’il était l’homme dont j’ai toujours rêvé. Le son <strong>de</strong> savoix parvint clairem<strong>en</strong>t à mes oreilles comme s’il n’était jamais parti. Je me81


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>rappelle son sourire avant <strong>de</strong> monter à bord <strong>de</strong> cet avion. Il m’avait dit qu’ilm’aimerait toujours. Au moins, ça, il l’a emporté avec lui.Une partie <strong>de</strong> moi était morte <strong>en</strong> même temps que lui, partie comme son<strong>de</strong>rnier souffle dans cette infirmerie où ils avai<strong>en</strong>t vainem<strong>en</strong>t t<strong>en</strong>té <strong>de</strong> luiredonner une chance.La pièce tourne autour <strong>de</strong> moi. Un goût amer dans le fond <strong>de</strong> ma gorge etma vision se trouble. L’air <strong>en</strong>tre <strong>plus</strong> difficilem<strong>en</strong>t dans mes poumons... Il estmort...Jamais <strong>plus</strong> il ne revi<strong>en</strong>dra à la maison, fier d’avoir accompli quelque chose.Jamais <strong>plus</strong> il ne me pr<strong>en</strong>dra dans ses bras pour me surpr<strong>en</strong>dre. Jamais <strong>plus</strong>je ne l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>drai dire ses mots qui ne sont <strong>de</strong>stinés qu’à moi.Je perds la tête. J’essaye <strong>de</strong> m’accrocher à quelque chose, mais j’ai l’impressionque <strong>plus</strong> ri<strong>en</strong> n’est réel. J’ai cette puissante impression que le toit <strong>de</strong> mamaison s’est écroulé et que j’<strong>en</strong> porte le far<strong>de</strong>au.Je t<strong>en</strong>te <strong>de</strong> me lever afin <strong>de</strong> fuir cette impression, mais je ne réussis qu’àm’effondrer lam<strong>en</strong>tablem<strong>en</strong>t sur le sol dur du salon.Les messieurs se p<strong>en</strong>ch<strong>en</strong>t sur moi, ces porteurs <strong>de</strong> mauvaises nouvelles,mais je ne s<strong>en</strong>s pas leurs mains se voulant aidantes m’agripper afin <strong>de</strong> merelever. Je n’<strong>en</strong> veux pas. Je suis déboussolée. Je frappe le plancher d’injusticeaussi fort que je le peux. Et puis je recomm<strong>en</strong>ce, <strong>en</strong>core et <strong>en</strong>core, mefaisant incontrôlable. J’ai mal, mais je m’<strong>en</strong> fiche. Je hurle ma colère, mapeine et ma vulnérabilité. J’aimerais être forte, mais tout ce que j’arrive àfaire, c’est crier. Et ce cri, j’ai tant <strong>de</strong> difficulté à le reconnaître tant il est...douloureux.Je n’arrive <strong>plus</strong> à p<strong>en</strong>ser correctem<strong>en</strong>t. Je me calme un peu, assez pour qu’ilsparvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à me remettre sur mon divan. Je me laisse tranquillem<strong>en</strong>t bercerpar cette peine affreuse qui m’<strong>en</strong>gourdit. Je comm<strong>en</strong>ce à avoir sommeil.Doucem<strong>en</strong>t, je m’assoupis. Même dans mes rêves, je le vois. Il est toujourslà. <strong>Ma</strong>is il ne m’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d pas. Je l’appelle et il s’éloigne. Je t<strong>en</strong>te <strong>de</strong> le rattraper,mais je tombe subitem<strong>en</strong>t dans le vi<strong>de</strong>.Je me réveille <strong>en</strong> sursaut, souhaitant que tout ceci ne soit qu’un rêve, seulem<strong>en</strong>t,alors que je baisse mon regard, je vois son badge, ainsi qu’une lettre.Je s<strong>en</strong>s un vi<strong>de</strong> imm<strong>en</strong>se s’installer <strong>en</strong> moi. Je me laisse sombrer doucem<strong>en</strong>t82


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>dans les abysses noirs <strong>de</strong> la mélancolie et <strong>de</strong>s mauvais choix. Je me dis queje n’arriverai jamais à vivre sans lui. Je me lève donc pour trouver un moy<strong>en</strong>d’étouffer toutes les émotions <strong>de</strong> mon cœur.Je me r<strong>en</strong>ds dans ma salle <strong>de</strong> bain et me regar<strong>de</strong> dans la glace. Je n’ai l’air<strong>de</strong> ri<strong>en</strong>. Les yeux bouffis, les cheveux emmêlés et la peau si pâle. Puis soudain,j’éprouve l’irrésistible <strong>en</strong>vie d’aller le rejoindre. Sans pr<strong>en</strong>dre le temps<strong>de</strong> réfléchir, j’ouvre la pharmacie et pr<strong>en</strong>ds tous les médicam<strong>en</strong>ts qui s’ytrouvai<strong>en</strong>t.J’allais vraim<strong>en</strong>t le faire. J’allais sincèrem<strong>en</strong>t commettre l’irréparable pourlui. Je le voulais tellem<strong>en</strong>t...<strong>Ma</strong>is elle est arrivée et elle a tout changé !– <strong>Ma</strong>man !Mon <strong>de</strong>rnier souv<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> toi. Notre petite <strong>Ma</strong><strong>de</strong>line vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> perdre sonpapa. Et <strong>en</strong> la voyant, les larmes aux yeux, je me suis dit qu’elle ne pouvaitpas perdre sa maman. Elle est ma bouée, mon rivage et je m’accrocherai àelle... Pour toi... Parce que je t’aimerai toujours !Stéphanie Gagnon-Lafleur, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s <strong>Ma</strong>skoutains (Saint-Hyacinthe), CS <strong>de</strong> Saint-HyacintheEnseignant : Louis Rousseau, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t Val-<strong>Ma</strong>ska21.B. Elle sera toujours làOn m’a raconté une fois, lorsque j’étais petite, que tous ceux qui vivai<strong>en</strong>taujourd’hui allai<strong>en</strong>t mourir un jour. Que chaque mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> bonheur quipasse, il faut <strong>en</strong> savourer tous les instants. Une seule petite chose peut toutchambouler, et ce, sans avertissem<strong>en</strong>t, pour <strong>en</strong>suite tout changer <strong>en</strong> souv<strong>en</strong>irslointains.Devant mon miroir, je m’observe. J’ai grandi. Le temps passe si vite que j<strong>en</strong>’ai même pas <strong>en</strong>core réalisé tout à fait ce qui s’est passé.83


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Dire qu’elle était <strong>en</strong>core là hier. Je me souvi<strong>en</strong>s avoir plongé mon regarddans le si<strong>en</strong>. Perdue dans sa tête, elle semblait placi<strong>de</strong>. Comme si elle neress<strong>en</strong>tait <strong>plus</strong> ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> l’extérieur. Elle montrait <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> fatigue évi<strong>de</strong>nts.Ses yeux cernés comme jamais, la vieillesse assombrissait son visagequi, autrefois, était si beau à regar<strong>de</strong>r.Après toutes ces longues années, sa peau était si douce sous la caresse <strong>de</strong>mes doigts sur sa main. Le sil<strong>en</strong>ce s’abattit sur la petite pièce blanche quisemblait, elle aussi, compatir au combat intérieur qu’elle m<strong>en</strong>ait. Seul lebruit <strong>de</strong>s battem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> son cœur nous accompagnait, comme une paisiblelitanie.Elle ne bougeait pas. <strong>Ma</strong>lgré tout son courage, elle savait que ça ne servaità ri<strong>en</strong>. Elle qui s’était battue p<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>s années durant une guerre qu’elleseule pouvait m<strong>en</strong>er. Elle a cru pouvoir s’<strong>en</strong> sortir. <strong>Ma</strong>is hélas, c’est écrit quel’on n’obti<strong>en</strong>t que rarem<strong>en</strong>t ce que l’on désire si ar<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t. Le résultat futnégatif. Résignée, elle att<strong>en</strong>dait avec impati<strong>en</strong>ce le mom<strong>en</strong>t où elle iraitretrouver celui qui lui avait tant manqué.Une larme s’échappa. Elle v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> moi. Une seule chance <strong>de</strong> laisser allerma détresse. Trop fière, je laisse rarem<strong>en</strong>t tomber ce masque que je mets <strong>en</strong>perman<strong>en</strong>ce sur mon visage. <strong>Ma</strong>is pour elle, c’est si facile. Son regard azurtombait sur moi, une <strong>de</strong>rnière étincelle au fond <strong>de</strong>s yeux. Elle leva péniblem<strong>en</strong>tle bras, j’avais compris.Je la pris donc dans mes bras. Je pouvais s<strong>en</strong>tir tous les os <strong>de</strong> son corps tantil était maigre. J’avais peur <strong>de</strong> la briser, <strong>de</strong> lui faire <strong>en</strong>core <strong>plus</strong> mal. Elle quiavait tant vécu. Elle aimait la vie, je me souvi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> toutes ces fois où elleme parlait <strong>de</strong> sa jeunesse. J’aimais beaucoup l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre parler. <strong>Ma</strong>is, pointpositif, je pouvais toujours s<strong>en</strong>tir sa chaleur rassurante, apaisante.Je me rappelle lorsqu’elle nous a annoncé que le cancer lui rongeait lecorps. Elle qui était si pleine <strong>de</strong> vie, la voilà maint<strong>en</strong>ant qui dép<strong>en</strong>dait <strong>de</strong>nous. C’était si dur <strong>de</strong> se dire qu’une personne comme elle, qui avait tantdonné aux g<strong>en</strong>s, <strong>de</strong>vait s’<strong>en</strong> aller d’une manière aussi pénible.Durant <strong>de</strong>s mois, mon petit frère et moi avons fait la navette <strong>en</strong>tre l’école, letravail et la maison <strong>de</strong> ma mamie. <strong>Ma</strong> mère dut pr<strong>en</strong>dre un autre emploi afin<strong>de</strong> pouvoir payer tous ses soins, tandis que mon père nous sout<strong>en</strong>ait dumieux qu’il pouvait.84


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Ce fut une dure pério<strong>de</strong> pour nous. Sans elle pour rassembler la famille, jes<strong>en</strong>s que nous allons nous perdre. Elle représ<strong>en</strong>tait l’amour, maint<strong>en</strong>ant,c’est la souffrance qui marche à ses côtés. Nous l’avons vue dépérir au fil<strong>de</strong>s jours et ce fut très dur pour nous. Toute la famille passait pour lui fairetranquillem<strong>en</strong>t ses adieux. Il ne restait que nous.Je la serrai donc avec émotion, m’imprégnant <strong>de</strong> son o<strong>de</strong>ur. D’un mouvem<strong>en</strong>tt<strong>en</strong>dre, je lui caressai les cheveux tout <strong>en</strong> lui murmurant tout l’amourque j’éprouvais <strong>en</strong>vers elle.Mon frère pleurait à chau<strong>de</strong>s larmes dans le coin <strong>de</strong> la chambre.<strong>Ma</strong> mère priait pour que cesse <strong>en</strong>fin son supplice.Mon père finit par se p<strong>en</strong>cher vers moi et mit sa main sur mon épaule.Dans ces circonstances, que pouvons-nous faire ? Nous étions tous là à luifaire nos adieux. Nous voyions clairem<strong>en</strong>t que son corps n’<strong>en</strong> pouvait <strong>plus</strong>,mais peut-être est-ce égoïste <strong>de</strong> ma part <strong>de</strong> vouloir qu’elle reste auprès <strong>de</strong>moi. J’ai <strong>en</strong>core tant besoin <strong>de</strong> cette merveilleuse personne.<strong>Ma</strong>is alors que le soleil se couchait, je s<strong>en</strong>tis sa main faible quitter lami<strong>en</strong>ne. Son corps se relâcha et je la déposai l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t sur son lit. Ses yeux,à prés<strong>en</strong>t fermés, et son visage affichai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fin cet air serein qui lui manquait<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s mois.Tout comme cette boule <strong>de</strong> feu qui réchauffe et illumine la vie <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s,moi, cette nuit-là, je voyais partir mon rayon, ma lumière, ma grand-mère.Elle n’est peut-être <strong>plus</strong> là aujourd’hui, mais je sais que son courage, sa forceet son sourire me suivront et gui<strong>de</strong>ront ma course tout au long <strong>de</strong> ma vie.Stéphanie Gagnon-Lafleur, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s <strong>Ma</strong>skoutains (Saint-Hyacinthe), CS <strong>de</strong> Saint-HyacintheEnseignante : Lise Robert, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t Val-<strong>Ma</strong>ska85


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>22. Carpe diem…Selon Wikipédia – probablem<strong>en</strong>t la source la <strong>plus</strong> sûre d’Internet – carpediem signifie : « cueille le jour prés<strong>en</strong>t sans te soucier du l<strong>en</strong><strong>de</strong>main ». Voilàqui est plutôt simple comme concept ; pour moi, ce ne l’était pas. Selon moi,carpe diem voulait dire <strong>en</strong> couple, car bonheur partagé est multiplié.J’att<strong>en</strong>dais patiemm<strong>en</strong>t la bonne personne pour profiter du mom<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>t.J’avais fini par la trouver : elle s’appelait Alison. Je n’avais jamais cru au coup<strong>de</strong> foudre, mais je fus contraint d’<strong>en</strong> admettre l’exist<strong>en</strong>ce au mom<strong>en</strong>t où sesyeux croisèr<strong>en</strong>t les mi<strong>en</strong>s ; <strong>en</strong> un regard, nous étions fous amoureux.« Facebook » et « textos » étant ce qu’ils sont, nous nous sommes rapprochéstrès vite, trop vite… <strong>Ma</strong>is j’étais amoureux ou tout simplem<strong>en</strong>t stupi<strong>de</strong> pourne pas l’avoir remarqué.Après une semaine <strong>de</strong> discussions sur Internet et par messagerie texte, nousavions franchi le pas, nous étions un couple à la suite <strong>de</strong> mon baiser maladroitdans un parc, près <strong>de</strong> l’eau. Le mom<strong>en</strong>t était magique, nos c<strong>en</strong>tresd’intérêt et notre <strong>histoire</strong> <strong>de</strong> vie incroyablem<strong>en</strong>t semblables. Quand j’yp<strong>en</strong>se maint<strong>en</strong>ant, j’<strong>en</strong> ai <strong>de</strong>s frissons. À partir <strong>de</strong> ce jour, nous volions hautdans le ciel loin <strong>de</strong> tout problème, si près <strong>de</strong>s étoiles que nous pouvionspresque y toucher. Nous étions sur notre nuage, si bi<strong>en</strong> tous les <strong>de</strong>ux.Notre relation allait à toute vitesse. Nous avancions au rythme effréné <strong>de</strong> noscœurs battants à tout rompre dès l’instant où nous nous approchions l’un <strong>de</strong>l’autre. Nous avons multiplié les mom<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>semble et tout semblait si naturel.Puis, un après-midi, tranquilles, seuls à la maison tous les <strong>de</strong>ux, la porte<strong>de</strong> la chambre s’est fermée et verrouillée pour un mom<strong>en</strong>t unique <strong>en</strong>semble.Cet après-midi restera gravé à jamais dans nos cœurs <strong>de</strong> même que la nuitqui s’<strong>en</strong> suivit, <strong>en</strong>lacés tous les <strong>de</strong>ux. Tout allait tellem<strong>en</strong>t vite et mes étu<strong>de</strong>s<strong>en</strong> ont souffert, mais je m’<strong>en</strong> fichais éperdum<strong>en</strong>t. Seul son regard <strong>en</strong>ivrantm’importait. Nous étions jeunes et fous, nous étions si heureux <strong>en</strong>semble.Les mois passèr<strong>en</strong>t et notre bonheur ne semblait pas vouloir s’estomper.Pourtant, quelque chose dans son regard avait changé. Je faisais mon possiblepour l’ignorer, mais c’était évi<strong>de</strong>nt. Puis le temps passa, elle était <strong>de</strong>v<strong>en</strong>uefroi<strong>de</strong>. Je préférais ignorer plutôt que <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s questions. Notre relationse dégrada davantage et <strong>en</strong>core une fois, je fermai les yeux. Je me disais quec’était une mauvaise passe et que les choses s’arrangerai<strong>en</strong>t d’elles-mêmes… lour<strong>de</strong> erreur !86


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Quelques jours <strong>plus</strong> tard, elle m’adressa un message texte pour mettre fin ànotre relation. Elle n’étirait pas les détails, mais elle m’accusa, <strong>en</strong>tre autreschoses, <strong>de</strong> ne pas avoir été assez terre à terre, d’être trop dans les nuages et<strong>de</strong> ne pas me soucier assez <strong>de</strong> la réalité.Me voilà donc au l<strong>en</strong><strong>de</strong>main <strong>de</strong> carpe diem, qui disait : « cueille le jourprés<strong>en</strong>t sans te soucier du l<strong>en</strong><strong>de</strong>main ». C’est ce que j’ai fait et j’<strong>en</strong> souffreénormém<strong>en</strong>t. J’ai perdu celle que j’aimais. À force <strong>de</strong> cueillir le jour prés<strong>en</strong>t,j’ai négligé le jour suivant. Je ne me suis pas fait <strong>de</strong> récolte pour <strong>plus</strong> tard ettrop occupé à cueillir, j’ai négligé <strong>de</strong> planter les petits bonheurs <strong>de</strong> la vie quise transform<strong>en</strong>t à la longue <strong>en</strong> grands bonheurs… Et oui, quand on est unadolesc<strong>en</strong>t amoureux, on oublie <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre soin du reste. Alors me voiciseul, avec <strong>de</strong>s résultats scolaires pathétiques, résultat <strong>de</strong> ces six mois passésavec celle que j’appellerai dorénavant mon ex… Plante le jour <strong>de</strong> <strong>de</strong>main,cueille le jour prés<strong>en</strong>t et savoure la cueillette d’hier…Ludovic Paradis, 1 er cycleC<strong>en</strong>tre De La Jonquière, CS De La JonquièreEnseignantes : Isa<strong>belle</strong> Coulombe et Danyelle Devost,Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t De La Jonquière23. Le pouvoir <strong>de</strong>s motsLes mots, une inv<strong>en</strong>tion simple, voire banale, que l’homme a réalisée pourpouvoir s’exprimer. Pourtant, ce ne sont que <strong>de</strong>s lettres rassemblées quifiniss<strong>en</strong>t par former <strong>de</strong>s mots. Des sons. Pour diverses raisons, ils nous fontpasser par maints s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts. Je sais, parfois, tous les mots <strong>de</strong> la vie peuv<strong>en</strong>tnous sembler <strong>de</strong>s sanglots. En fait, <strong>de</strong>s mots, c’est quoi ? Des lettres ? Dessons ? <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, ce n’est pas que ça. C’est bi<strong>en</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong>core. À monavis, ils sont aussi une arme que tout le mon<strong>de</strong> peut utiliser. Parfois, nous n<strong>en</strong>ous r<strong>en</strong>dons aucunem<strong>en</strong>t compte <strong>de</strong> ce que nous pouvons faire avec cettearme, aussi ordinaire soit-elle.L’intimidation est sans doute le meilleur exemple <strong>de</strong> leur pouvoir <strong>de</strong>structeur.En fait, qu’est-ce que c’est l’intimidation ? Trop souv<strong>en</strong>t, ce sont <strong>de</strong>smots qu’on utilise pour blesser quelqu’un volontairem<strong>en</strong>t ou pas. À certainsmom<strong>en</strong>ts, par contre, on peut ne pas se r<strong>en</strong>dre compte du mal que l’on peutfaire avec <strong>de</strong> simples mots. Quand on <strong>en</strong> pr<strong>en</strong>d consci<strong>en</strong>ce, le mal est déjà87


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>fait. Il peut arriver qu’il soit déjà trop tard. <strong>Ma</strong>is les mots recèl<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t<strong>plus</strong>ieurs autres pouvoirs, si étrange qu’il <strong>en</strong> paraît. Ils peuv<strong>en</strong>t aussi être unepetite douceur. Un mince rayon <strong>de</strong> soleil dans une journée <strong>de</strong> cielnuageux.Qui ne se souvi<strong>en</strong>t pas du son d’un premier je t’aime <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du ou mêmeéchangé avec <strong>de</strong>s personnes qui nous sont précieuses ? Qui ne se souvi<strong>en</strong>tpas <strong>de</strong>s mots remplis <strong>de</strong> t<strong>en</strong>dresse <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s que l’on apprécie beaucoup ? Jecrois, <strong>en</strong>fin j’espère, que tout le mon<strong>de</strong> a cette chance. Je sais, dans certainessituations, un simple sourire vaut <strong>plus</strong> que tous les mots du mon<strong>de</strong>. Il peutéclipser mille et un mots. Toutefois, nous avons tout <strong>de</strong> même besoin d’euxpour nous exprimer.Il arrive que nous préférions le sil<strong>en</strong>ce à la parole libératrice. C’est la piresolution à adopter. Nous avons tous un jour ou l’autre besoin <strong>de</strong> nous exprimer,<strong>de</strong> pleurer, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> quand tout va mal, quand tout sembleténèbres. Oui, même pour nous, les garçons. Le sil<strong>en</strong>ce peut s’avérer souv<strong>en</strong>t<strong>de</strong>structeur. Trop <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s dis<strong>en</strong>t adieu à la vie, car ils sont restés sil<strong>en</strong>cieuxou incompris. C’est vraim<strong>en</strong>t, mais vraim<strong>en</strong>t trop triste. Parfois, nousp<strong>en</strong>sons gar<strong>de</strong>r le sil<strong>en</strong>ce sur un accablant far<strong>de</strong>au ou un lourd secret, maismalheureusem<strong>en</strong>t tout finit par se savoir et cela finit rarem<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>.Les m<strong>en</strong>songes ? Ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> pire que ces mots que nous utilisons pour dissimulerune vérité. Car, quand le voile se lève, exposant la vérité au grand jour, lesg<strong>en</strong>s à qui nous avons m<strong>en</strong>ti souffr<strong>en</strong>t. Quelquefois, nous p<strong>en</strong>sions m<strong>en</strong>tirpour le mieux, pour protéger une personne que l’on aime. Nous l’avons tousfait et nous avons tous fini par expérim<strong>en</strong>ter le goût amer <strong>de</strong> la conséqu<strong>en</strong>ce<strong>de</strong> nos m<strong>en</strong>songes, <strong>de</strong> leurs sons.Les promesses, étrangem<strong>en</strong>t, ce sont <strong>de</strong>s mots que nous partageons pourdonner <strong>de</strong> l’espoir. C’est aussi pour dire que nous allons nous donner à fondpour accomplir ce que nous nous sommes promis. Quand nous sommescapables <strong>de</strong> réussir. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, il y a les promesses incertaines, cellesque nous ne sommes pas toujours capables <strong>de</strong> t<strong>en</strong>ir. Il existe aussi les faussespromesses qui sont toujours tristes à <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre et qui ne font que nousdécevoir.Il y a aussi ces fois où nous nous servons <strong>de</strong>s mots pour écrire. Écrire, maispour quelle raison ? Tout simplem<strong>en</strong>t pour nous exprimer, déf<strong>en</strong>dre nosidées, chanter ou tout simplem<strong>en</strong>t vi<strong>de</strong>r notre coeur <strong>de</strong> ses sombres88


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts. Ainsi, nous pouvons concevoir <strong>de</strong> merveilleux poèmes, chansons,articles, scénarios, <strong>histoire</strong>s et même <strong>de</strong> touchantes missives.Ces précieux écrits faits à la main, il est dommage que, <strong>de</strong>puis l’arrivée <strong>de</strong>leurs rivaux, ces chers courriels, ils ai<strong>en</strong>t perdu leur pouvoir magique.Vraim<strong>en</strong>t dommage. Qui n’aime pas recevoir une <strong>belle</strong> lettre écrite avecminutie et att<strong>en</strong>tion ? Il y a aussi les <strong>histoire</strong>s, celles que nous avons lachance <strong>de</strong> raconter ou d’écouter. Ah ! Les <strong>histoire</strong>s ! Ces univers emplis <strong>de</strong>mots formant <strong>de</strong> merveilleux livres. Grâce à eux, nous avons la chance <strong>de</strong>voyager et <strong>de</strong> vivre <strong>de</strong> nombreuses av<strong>en</strong>tures aussi excitantes les unes queles autres. Ce peut être un bref conte <strong>de</strong> fées que nous pouvons lire à notre<strong>en</strong>fant et qui le fait rêver toute la nuit. Sans oublier les <strong>histoire</strong>s qui sont <strong>de</strong>courts fragm<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> notre vie, <strong>de</strong> nos rêves et <strong>de</strong> nos espoirs.Ah ! Les mots, ils ont tant <strong>de</strong> pouvoir comme, <strong>en</strong>core, celui qui nous permetd’appr<strong>en</strong>dre ou bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> travailler ! Ils nous transmett<strong>en</strong>t l’<strong>histoire</strong>, celle <strong>de</strong>nos ancêtres, mais aussi <strong>de</strong> ceux qui ont combattu pour nous. Les motspeuv<strong>en</strong>t voyager à travers le temps. Qui ne connaît pas les Molière, les Hugoou, <strong>plus</strong> près <strong>de</strong> nous, les Nelligan, les Vigneault ? Qui ne connaît pas lapuissance <strong>de</strong> leurs mots ?Les mots sont magiques. Ils mérit<strong>en</strong>t notre respect. Ils mérit<strong>en</strong>t notre amour.Ils ne mérit<strong>en</strong>t pas d’être banalisés ou mal utilisés. Constamm<strong>en</strong>t, <strong>de</strong>s motsmeur<strong>en</strong>t et d’autres naiss<strong>en</strong>t. C’est ce qui gar<strong>de</strong> notre langue vivante.J’imagine mal notre vie sans eux.Ils sont notre humanité.Pierre-Luc Audit, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre <strong>Ma</strong>rius-Ouellet (Disraeli), CS <strong>de</strong>s AppalachesEnseignante : Nathalie Fecteau, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Amiante89


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>24. La fourmi et la feuilleJe me suis réveillée et j’ai comm<strong>en</strong>cé à bouger chacune <strong>de</strong> mes six jambes.Une par une, elles ont comm<strong>en</strong>cé à participer, touchant délicatem<strong>en</strong>t un gazblanc qui m’<strong>en</strong>veloppait. C’était doux comme un oreiller, à chaque fois queje le touchais, il rebondissait vers moi délicatem<strong>en</strong>t et doucem<strong>en</strong>t.Les <strong>de</strong>ux parties <strong>de</strong> mon corps, dur comme une armure, étai<strong>en</strong>t très lour<strong>de</strong>scomme si j’avais bu une boisson <strong>de</strong> cim<strong>en</strong>t qui avait glissé dans mon corps.J’avais l’impression que mon v<strong>en</strong>tre était plein <strong>de</strong> cette ancre <strong>de</strong> cim<strong>en</strong>t etma tête était un bateau flottant sur l’eau, sans int<strong>en</strong>tion délibérée. Cettes<strong>en</strong>sation d’être collée sur place m’empêchait <strong>de</strong> bouger, harponnée parl’ancre <strong>de</strong> cim<strong>en</strong>t.<strong>Ma</strong> tête était brumeuse et mes p<strong>en</strong>sées étai<strong>en</strong>t cachées dans un imm<strong>en</strong>sebrouillard, jouant à cache-cache avec moi, mais je ne voulais pas jouer.J’étais consci<strong>en</strong>te <strong>de</strong> mes p<strong>en</strong>sées et je sondais les <strong>en</strong>droits sereins, maiscomme <strong>de</strong>s fragm<strong>en</strong>ts qui nag<strong>en</strong>t dans une mer <strong>de</strong> sil<strong>en</strong>ce, elles n’étai<strong>en</strong>tpas touchables.Tout à coup, comme une bombe qui avait explosé, tous mes objectifs, mesobligations, mes p<strong>en</strong>sées se précipitèr<strong>en</strong>t vers moi <strong>en</strong> même temps. Je mes<strong>en</strong>tais comme quelqu’un sur qui on avait jeté un seau d’eau froi<strong>de</strong>, presquecongelée, sur la tête. Une chute d’eau remplie <strong>de</strong> fourmillants souv<strong>en</strong>irs seversait sur mon corps, laissant un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>ouveau rafraîchissant.Mon bateau flottant coulait pour rejoindre mon corps. C’était extraordinairecomm<strong>en</strong>t le cim<strong>en</strong>t dans mon v<strong>en</strong>tre s’était brisé immédiatem<strong>en</strong>t, comme laglace qui se fissure sur un lac p<strong>en</strong>dant l’hiver pour trouver le chemin le <strong>plus</strong>rapi<strong>de</strong>. Dans une flaque <strong>de</strong> transition, j’étais libre.Je <strong>de</strong>vinais le grand ciel bleu, tellem<strong>en</strong>t loin, une <strong>de</strong>mi-sphère qui protègetout. Les arbres autour <strong>de</strong> moi donnai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’ombre aux <strong>en</strong>droits choisis parleurs amples branches. L’herbe était droite, comme au gar<strong>de</strong>-à-vous, avec unmilliard <strong>de</strong> ses camara<strong>de</strong>s au milieu <strong>de</strong> cette vaste florissante nature. J’aiprofondém<strong>en</strong>t accepté ma vulnérabilité dans ce champ émotionnel etdélicat.À cet instant, mes multiples yeux fur<strong>en</strong>t émerveillés par une feuille verte etbrillant d’une telle énergie. La petite feuille, cet aimant qui m’attirait, étaitcomme un oasis, un festin pour les yeux, au milieu du désert ; une pierre90


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>précieuse qui brille et illumine tout ce qui l’<strong>en</strong>toure. J’ai marché vers cetteinévitable attraction.Dans mes mandibules, j’ai pris mon trésor et, avec une conviction déterminée,j’ai comm<strong>en</strong>cé à marcher : nous ne faisions qu’un. J’étais hypnotisée,dans un état <strong>de</strong> méditation, obnubilée par son ess<strong>en</strong>ce sacrée et laissantrayonner son for intérieur. Mes jambes travaillai<strong>en</strong>t vigoureusem<strong>en</strong>t et moncorps les accompagnait. J’ai respiré l’air et j’ai remplacé la carcasse <strong>de</strong>cim<strong>en</strong>t par un ca<strong>de</strong>au d’amour. À chaque pas, je recevais une déchargeélectrique qui me remplissait <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>de</strong> volonté et <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>de</strong> passion.Nous marchions <strong>en</strong> harmonie dans un éclat sil<strong>en</strong>cieux quand j’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>duun coup <strong>de</strong> tonnerre. J’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du le bruit <strong>en</strong>core, mais cette fois c’était <strong>plus</strong>proche. Immédiatem<strong>en</strong>t, j’ai su que ce n’était pas le tonnerre, c’était pire :c’était un être humain qui marchait vers moi !En face <strong>de</strong> lui, j’étais paralysée et j’ai perdu toutes mes capacités et ma puissance.Mon pouvoir a complètem<strong>en</strong>t disparu, il était hors <strong>de</strong> mon contrôleet j’ai paniqué. J’étais congelée comme une sculpture <strong>de</strong> glace jugée pourun concours. Il s’est p<strong>en</strong>ché et, tout <strong>de</strong> suite, il a volé ma précieuse émerau<strong>de</strong>,ma gemme, ma <strong>belle</strong> feuille verte !Je me suis libérée <strong>de</strong> la terre congelée, mais c’était trop tard. Il avait pris monjoyau. Il est arrivé aussi vite qu’il était parti et j’étais dans le sillage <strong>de</strong> latempête. Comme une pati<strong>en</strong>te diagnostiquée d’amnésie, j’étais laissée àmoi-même pour recueillir les échar<strong>de</strong>s <strong>de</strong> verre.Sans ma perle verte, je ress<strong>en</strong>tais ma liberté <strong>en</strong> quarantaine. Je me suis s<strong>en</strong>tievidée. Mon âme, exposée à l’extérieur <strong>de</strong> mon corps nu, couvrait mes blessures.Mes yeux étai<strong>en</strong>t remplis <strong>de</strong> larmes et <strong>de</strong> tristesse.Je me consumais <strong>de</strong> l’intérieur et mes souffrances étai<strong>en</strong>t sans fin. Sansespoir et abattue, la tête basse, j’errais dans ces espaces abandonnés.Lyndsey N. Rosevear, FrancisationC<strong>en</strong>tre du Phénix (Québec), CS <strong>de</strong>s DécouvreursEnseignante : Hélène <strong>Ma</strong>rtel, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Deux Rives91


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>25. La nouvelle bicycletteMick était un <strong>en</strong>fant <strong>de</strong> dix ans qui <strong>de</strong>meurait avec son père, Éric. Depuis<strong>plus</strong>ieurs années, le père du jeune garçon avait un bon emploi et pouvaitgâter son fils. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, l’usine où travaillait Éric avait dû fermer sesportes et ce <strong>de</strong>rnier avait donc perdu son emploi. Pour subv<strong>en</strong>ir aux besoins<strong>de</strong> la petite famille, il avait dû accepter un travail au salaire minimum,comme commis dans un magasin <strong>de</strong> sport. Si son emploi lui permettait <strong>de</strong>payer son loyer et <strong>de</strong> remplir le réfrigérateur, il acceptait la situation.L’important, c’était que son fils ne manque <strong>de</strong> ri<strong>en</strong>. Bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du, étantmoins à l’aise financièrem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>puis quelque temps, Éric ne pouvait qu’offrirle minimum à son fils, pas <strong>de</strong> ca<strong>de</strong>aux, pas <strong>de</strong> surprises. Cela l’attristaitun peu…Par une <strong>belle</strong> journée d’été, Mick revint <strong>de</strong> l’école <strong>en</strong> pleurant.– Qu’est-ce qui se passe, Mick ?– Je suis tombé et j’ai brisé ma bicyclette.– Est-ce que tu t’es fait mal, fiston ?– Oui, au cou<strong>de</strong> et au g<strong>en</strong>ou droit.– OK. Vi<strong>en</strong>s avec moi, on va d’abord désinfecter tes blessures.Cinq minutes après, Éric alla récupérer la bicyclette <strong>de</strong> son fils et constataqu’elle était vraim<strong>en</strong>t amochée. « Je <strong>de</strong>vrai lui <strong>en</strong> acheter une nouvelle, maisavec quel arg<strong>en</strong>t ? » p<strong>en</strong>sa Éric.– Alors papa, est-ce qu’elle est réparable ?– Je ne sais pas, fiston. Demain, je vais appeler Jean et on verra si ellel’est…Le soir v<strong>en</strong>u, après que Mick se soit <strong>en</strong>dormi, Éric p<strong>en</strong>sait à ce qu’il allaitfaire. Où allait-il trouver l’arg<strong>en</strong>t pour acheter une nouvelle bicyclette ? Lepire, c’était qu’il l’avait déjà fait réparer au début <strong>de</strong> l’été. Une nouvellebicyclette n’était vraim<strong>en</strong>t pas un luxe pour le gamin et, <strong>de</strong> surcroît, c’étaitson anniversaire dans quatre jours. Soudain, une annonce attira son att<strong>en</strong>tiondans le journal : une usine ouvrait ses portes et on recherchait <strong>de</strong>semployés pour assurer le fonctionnem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> soir. « Une chance tombée duciel ! » se dit Éric.Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main, après sa journée <strong>de</strong> travail, Éric se r<strong>en</strong>dit à l’usine pour ydéposer sa candidature. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, le <strong>de</strong>rnier poste avait été comblé92


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>il y avait tout juste dix minutes. Quand il revint chez lui, il appela une amieet voisine, qui gardait Mick cet après-midi-là, lui expliqua rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t ce quilui arrivait et lui dit <strong>de</strong> faire traverser l’<strong>en</strong>fant. Il <strong>de</strong>vait trouver un moy<strong>en</strong> <strong>de</strong>régler la situation. Puis, Éric téléphona à Jean qui lui confirma, suite à la<strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s dommages, que la bicyclette était irréparable. Mick <strong>en</strong>traitcomme il raccrochait le téléphone.– Alors, papa, ma bicyclette, Jean pourra la réparer ?– Non, fiston. Je suis désolé…– D’accord. Est-ce que je pourrai <strong>en</strong> avoir une autre ?– Je te promets que je vais faire tout ce qui est <strong>en</strong> mon pouvoir pour quetu puisses <strong>en</strong> avoir une pour ta fête.– Génial ! Merci papa !<strong>Ma</strong>lgré lui, Éric v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> promettre quelque chose qu’il n’était pas sûr <strong>de</strong>pouvoir offrir. Il <strong>de</strong>meurait quand même confiant. C’était comme si, intérieurem<strong>en</strong>t,il avait la certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> réussir à trouver l’arg<strong>en</strong>t pour acheter cettefameuse bicyclette à son fils.Plus tard, dans la soirée, il téléphona donc à quelques amis pour vérifier sil’un d’eux ne connaîtrait pas quelqu’un qui aurait besoin d’un bon travaillantquelques heures par semaine, ce qui lui permettrait <strong>de</strong> gagner unsalaire d’appoint. Aucun d’eux ne pouvait lui v<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> ai<strong>de</strong>. Il ouvrit donc lejournal, se mit à chercher dans les petites annonces, mais ri<strong>en</strong> là non <strong>plus</strong>…Découragé comme il ne l’avait pas été <strong>de</strong>puis longtemps, Éric s’ouvrit unebouteille <strong>de</strong> bière. C’est à ce mom<strong>en</strong>t que le téléphone sonna. C’était Pierre,l’ami d’un ami, qui avait eu v<strong>en</strong>t qu’Éric cherchait du travail, qu’il étaitmanuel et très débrouillard. Quelle coïnci<strong>de</strong>nce ! Pierre avait justem<strong>en</strong>tbesoin d’ai<strong>de</strong> p<strong>en</strong>dant la fin <strong>de</strong> semaine pour faire avancer la construction<strong>de</strong> son chalet. Éric accepta sans hésitation les <strong>de</strong>ux jours <strong>de</strong> travail quel’homme lui offrait. Il alla <strong>en</strong>suite se coucher l’esprit <strong>en</strong> paix étant soulagé<strong>de</strong> voir une partie <strong>de</strong> son problème <strong>de</strong>rrière lui. Il serait <strong>en</strong> pleine forme lel<strong>en</strong><strong>de</strong>main matin…Puis, ce fut lundi, l’anniversaire <strong>de</strong> Mick. Grâce à l’arg<strong>en</strong>t qu’il avait amassép<strong>en</strong>dant la fin <strong>de</strong> semaine, Éric était fou <strong>de</strong> joie <strong>de</strong> pouvoir offrir une bicyclettetoute neuve à son fils. Il décida <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>voyer chez la voisine <strong>en</strong> fin <strong>de</strong>journée, après son travail à la boutique <strong>de</strong> sport, pour aller acheter sonca<strong>de</strong>au. Lorsque Mick vit son père rev<strong>en</strong>ir à la maison et <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dre unesuperbe bicyclette rouge <strong>de</strong> la boîte <strong>de</strong> son camion, il se précipita à l’extérieurpour aller le retrouver. C’est <strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dant une porte claquer et <strong>de</strong>s cris93


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>de</strong> joie qu’Éric se retourna et vit une voiture foncer droit sur son fils. « MICK !FAIS ATTENTION !!! » Trop tard, le jeune homme se fit r<strong>en</strong>verser par la voitureet mourut sur le coup. À cet instant, Éric maudit la bicyclette ; le rêve <strong>de</strong>Mick <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait son pire cauchemar.Richard Carrière, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Notre-Dame-du-Désert (<strong>Ma</strong>niwaki), CS <strong>de</strong>s Hauts-Bois-<strong>de</strong>-l’OutaouaisEnseignante : Hélène Picard, Syndicat du personnel<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Hautes-Rivières26. Je rêve à toi qui es loin <strong>de</strong> moi...L’amour, c’est comme un grand rêve. Au début, c’est flou ; on ne sait jamaisà quoi cela va ressembler. Parfois, c’est comme un cauchemar tant le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>tfait mal, écorche. <strong>Ma</strong>is dans le rêve que je vis avec toi, je sais quejamais je ne me réveillerai. Nous resterons dans les nuages pour l’éternité àregar<strong>de</strong>r tous ceux qui sont malheureux et nous nous r<strong>en</strong>drons compte àquel point, <strong>en</strong>semble, nous sommes heureux, car dans mon rêve on est tousles <strong>de</strong>ux.Dans mon rêve, tu es ma dulcinée. Jamais je ne voudrai me séparer. Tout<strong>en</strong>otre vie, nous marcherons côte à côte, traversant les épreuves du temps, etla joie qui vi<strong>en</strong>dra nous <strong>en</strong>vahira toujours <strong>plus</strong> chaque jour. Nous seronsheureux et nous rêverons à <strong>de</strong>ux. Je t’aime comme personne ne t’a jamaisaimée, car dans mon rêve, on est tous les <strong>de</strong>ux. Lorsque tu as <strong>de</strong> la peine,la pluie tombe du ciel et mon âme tout <strong>en</strong>tière s’<strong>en</strong> ress<strong>en</strong>t, blessée. <strong>Ma</strong>ispar la suite, le soleil repr<strong>en</strong>d tranquillem<strong>en</strong>t sa place <strong>en</strong> haut dans les nuages.Et c’est là, dans cet arc-<strong>en</strong>-ciel, que j’aperçois <strong>en</strong>fin ta beauté qui jaillit <strong>de</strong>la lumière. Dans le ciel, j’aimerais t’am<strong>en</strong>er toucher aux étoiles pourqu’<strong>en</strong>suite je puisse y remettre toutes celles que j’ai prises dans tes yeux, cardans mon rêve, on est tous les <strong>de</strong>ux.Un jour, je t’emmènerai sur mon île aux trésors, toi, ma merveilleuse pièce<strong>en</strong> or, afin <strong>de</strong> te conserver près <strong>de</strong> moi, à l’abri <strong>de</strong> tous ces voleurs <strong>de</strong> cœurs.Si par malheur je te perdais, je sais que jamais je ne pourrais retrouver untrésor qui a autant <strong>de</strong> valeur à mes yeux. Pour te ravoir, je partirais nager94


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>dans l’océan où j’irais à ton secours affronter tous ceux qui t’ont blessée. Jesuis prêt à m’<strong>en</strong>gager à ne jamais te faire du mal, car dans mon rêve, on esttous les <strong>de</strong>ux.Chaque fois que je te vois, tous les paysages ternes disparaiss<strong>en</strong>t pour laisserla place à ton incroyable beauté. Tu es celle qui m’a aveuglé. Il n’y a que toique je puisse côtoyer toute ma vie durant. Je te regar<strong>de</strong> comme un hommepassionné et je te le promets, je me montrerai à la hauteur <strong>de</strong> ta valeur. Cematin, le soleil n’est pas <strong>en</strong>core levé, mais tu as déjà éclairé ma journée d’unamour dévoué. Cette journée sera passionnée, car dans mon rêve, on esttous les <strong>de</strong>ux.Excité <strong>de</strong> te r<strong>en</strong>contrer, mes p<strong>en</strong>sées te sont accordées. Dès que l’aube selèvera, je sais que tu ne me quitteras pas. Oui, oui ! Accro <strong>de</strong> toi, je suisdéjà... à tel point que, chaque soir où tu n’es pas prés<strong>en</strong>te à mes côtés, jeme s<strong>en</strong>s seul. Je cherche à ress<strong>en</strong>tir ta prés<strong>en</strong>ce à mes côtés pour finalem<strong>en</strong>tme r<strong>en</strong>dormir dans la nuit triste et sombre. Et tout <strong>en</strong> sombrant dans unsommeil profond, mes p<strong>en</strong>sées sont dirigées vers toi, tout <strong>en</strong> douceur, cardans mon rêve, on est tous les <strong>de</strong>ux.Pour toi à qui je ferais la cour jour après jour sans jamais m’<strong>en</strong> lasser, jeveillerai à ne pas manquer une seule fois <strong>de</strong> te donner tout le soleil que tumérites et tout l’amour auquel tu as droit. Telle une fleur magnifique, jepr<strong>en</strong>drai soin <strong>de</strong> toi. Crois-moi, jusqu’à mon <strong>de</strong>rnier souffle, je serai là, cardans mon rêve, on est tous les <strong>de</strong>ux.La passion que j’ai <strong>en</strong>vers toi n’est égale à ri<strong>en</strong> qui existe. Le mot amour aété créé pour décrire le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t profond que j’ai pour toi. Personne d’autr<strong>en</strong>’a le droit <strong>de</strong> vivre cette émotion avec la même int<strong>en</strong>sité que je la vis prés<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>tet c’est pourquoi je t’accepterai avec tes qualités et tes défauts,sans jamais te juger. Personne ne me fera changer d’idée, car dans mon rêve,on est tous les <strong>de</strong>ux.Depuis si longtemps, je rêve à toi. Un jour, je me réveillerai et je m’apercevraique mon rêve est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u réalité. Enfin, chaque soir, tu t’<strong>en</strong>dormiras àmes côtés. Jamais je n’oublierai ton anniversaire, jamais je ne vais trahir taconfiance. Pour toujours, je te promets <strong>de</strong> te chérir et <strong>de</strong> t’aimer, car dansmon rêve, on est tous les <strong>de</strong>ux. Par cette lettre que j’ai écrite pour toi,Nathee, je souhaite briser le mur qui nous sépare. Je veux <strong>plus</strong> que jamais95


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>nous rapprocher l’un <strong>de</strong> l’autre, nous réunir éternellem<strong>en</strong>t. Toi qui portesmon <strong>en</strong>fant, celui que j’aimerai autant que toi, sache que je serai toujours àtes côtés pour m’occuper <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>ux... car dans mon rêve, on est tous lestrois.Alexandre Ménard, AlphabétisationC<strong>en</strong>tre <strong>Ma</strong>rius-Ouellet (Disraeli), CS <strong>de</strong>s AppalachesEnseignante : Caroline Leblond, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Amiante27. Logan, mon amourEt si quelque chose lui arrivait, et si quelque chose m’arrivait à moi.La grossesse nous amène à nous poser <strong>de</strong>s questions autant raisonnéesqu’irraisonnées. On passe par toutes les émotions et bi<strong>en</strong> souv<strong>en</strong>t on seremet <strong>en</strong> question. Va-t-on y arriver ? Notre couple est-il assez soli<strong>de</strong> ? Nosneurones surchauff<strong>en</strong>t et ce n’est qu’un début.C’était un 13 décembre 2010 lorsque j’ai su que nous étions maint<strong>en</strong>ant<strong>de</strong>ux dans ce même corps. À partir <strong>de</strong> ce jour, tout allait changer. Les gran<strong>de</strong>sdécisions <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>tôt pr<strong>en</strong>dre place. Je n’avais que 17 ans. Je n’avaisquasim<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> vu, ri<strong>en</strong> vécu. J’avais toute la vie <strong>de</strong>vant moi. Les g<strong>en</strong>s jug<strong>en</strong>ténormém<strong>en</strong>t ce g<strong>en</strong>re <strong>de</strong> situation. Le regard que portai<strong>en</strong>t les g<strong>en</strong>s sur moiétait important. Je n’avais pas terminé l’école et je n’avais pas planifié quelquechose, ce « si jamais » qui m’arrivait. On se p<strong>en</strong>se invincible, on croit quetout arrive aux autres, mais pas à nous jusqu’au jour où la réalité nous« frappe au nez ».Février 2011, j’ai <strong>de</strong>ux mois <strong>de</strong> grossesse. Je me s<strong>en</strong>s prête. Je suis prête ! J’aidécidé <strong>de</strong> te gar<strong>de</strong>r. Ton père était si cont<strong>en</strong>t. Il était toujours à mes côtéspour me rassurer. Lui, il était déjà prêt. Son <strong>en</strong>thousiasme me faisait peurparfois. On voyait qu’il allait <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un très bon père. Il avait <strong>de</strong>s tas <strong>de</strong>questions, il <strong>en</strong> était beau à voir ! Tandis que moi, je courais à la recherche<strong>de</strong> moi-même. La réalité faisait partie <strong>de</strong> mon lot d’interrogations. Tu étais sipetit, mais dorénavant si important.Plus les jours avançai<strong>en</strong>t, <strong>plus</strong> mon corps changeait. Mon petit corps <strong>de</strong>jeune femme <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait gros et lourd. J’avais faim, toujours faim. Mes hormones96


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>ne m’ont pas m<strong>en</strong>é la vie facile. Je complexais avant même d’être <strong>en</strong>ceinteavec mes 115 livres « toute mouillée », ça n’avait <strong>plus</strong> ri<strong>en</strong> à voir avec mes170 livres. J’avais peur, peur <strong>de</strong> ne <strong>plus</strong> être <strong>belle</strong>, peur que mon amoureuxne me trouve <strong>plus</strong> attirante et que ça me pr<strong>en</strong>ne <strong>de</strong>s années à m’<strong>en</strong> remettre.Une chose était sûre, c’était toi qui allais m’ai<strong>de</strong>r à m’<strong>en</strong> sortir, c’était toi quiallais <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir ma fierté quotidi<strong>en</strong>ne et pour le reste, je me battrais chaquejour pour y arriver.À sept mois <strong>de</strong> grossesse, ta chambre était déjà prête, tes vêtem<strong>en</strong>ts étai<strong>en</strong>tachetés et nos cœurs <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t impati<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> te voir. C’est à 37 semainesque le grand jour arriva. Si tu savais à quel point j’étais heureuse. Le s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>tqui m’habitait était in<strong>de</strong>scriptible. Tu pesais 7,3 minuscules livres. Tuétais si mignon. Je débordais tellem<strong>en</strong>t d’amour. C’était le jour le <strong>plus</strong> merveilleux<strong>de</strong> toute ma vie.Oui, c’était une naissance comme les autres. Il ne s’est ri<strong>en</strong> passé <strong>de</strong> réellem<strong>en</strong>tdangereux, ri<strong>en</strong> qui a marqué l’<strong>histoire</strong>. À cette pério<strong>de</strong> nous étions le28 octobre 2011. Toutefois, la première neige s’est installée avec ta v<strong>en</strong>ue.C’était beau ! La neige virevoltait dans un scintillem<strong>en</strong>t bercé par le v<strong>en</strong>t,comme si elle att<strong>en</strong>dait ta v<strong>en</strong>ue. C’est ce soir-là que tu es sorti dans mesbras.Kim Dufour-Breton, Préparation à la formation professionnelleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> la Baie-James (Chibougamau), CS <strong>de</strong> la Baie-JamesEnseignante : Chantale Jean, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> l’Ungava et <strong>de</strong> l’Abitibi-Témiscamingue28. Le baluchon du VagabondIl est assis là, 500 $ <strong>de</strong> petits sacs vi<strong>de</strong>s dans ses mains, il se r<strong>en</strong>d bi<strong>en</strong>compte que sa vie n’a <strong>plus</strong> <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s, il est r<strong>en</strong>du qu’il pèse 110 livres, il a lesbras couverts <strong>de</strong> bleus, la paranoïa se fait s<strong>en</strong>tir. Il se lève les yeux pleinsd’eau, se r<strong>en</strong>d <strong>de</strong>vant le miroir et il se dit que cela fera, il <strong>en</strong> a marre. La viequ’il voulait n’est pas celle-là. Il est 7 heures du matin, il déci<strong>de</strong> d’<strong>en</strong> finir.D’une façon ou d’une autre, c’est terminé. Après 2 ans, cette vie n’est <strong>plus</strong>pour lui, il lui reste 120 $ dans ses poches et il sait que s’il reste là où il est,il va dép<strong>en</strong>ser ce qui lui reste. Il ramasse sa guitare, embrasse sa fille, luimurmure quelque chose à l’oreille et quitte l’appartem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> sa97


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>progéniture. Nous sommes le 5 septembre 2008 et sans le savoir, CharlesVagabond vi<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>aître. Tranquillem<strong>en</strong>t, il marche sur le quai qui longele canal, il se r<strong>en</strong>d au terminus d’autobus et pr<strong>en</strong>d le premier autobus direction,sa ville natale, Drummondville. Sans savoir que toute une av<strong>en</strong>turel’att<strong>en</strong>d.R<strong>en</strong>du dans la ville du Mondial <strong>de</strong>s Cultures, la première chose qu’il fait,c’est décrocher un téléphone public pour appeler une amie qu’il n’a pas vue<strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s lunes. Il avait repris contact avec quand il était <strong>en</strong>core àSalaberry-<strong>de</strong>-Valleyfield, via le chat, sur l’ordinateur. Elle lui avait laissé sonnuméro et lui avait dit <strong>de</strong> l’appeler si jamais il y avait quoi que ce soit. Lasonnerie se fait <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre, Sabrina décroche.– Oui allo ? dit-elle.– Salut Sab, c’est Charles, je suis à Drummondville, tu as toujours <strong>en</strong>vie<strong>de</strong> me voir ?– Certainem<strong>en</strong>t, tu n’as qu’à t’<strong>en</strong> v<strong>en</strong>ir, répond-elle.Alors, c’est armé d’une guitare et d’un sac <strong>de</strong> linge qu’il se dirige vers chezson amie <strong>de</strong> longue date. Il est 18 h 30 quand il arrive <strong>de</strong>vant la porte du753, St-Georges. Il cogne, c’est une petite fille pas <strong>plus</strong> haute que troispommes qui répond à la porte.– Bonjour, je m’appelle Nellie, tu es l’ami <strong>de</strong> ma maman ?– Bonjour, je m’appelle Charles et oui je suis l’ami <strong>de</strong> ta maman, je suis<strong>en</strong>chanté <strong>de</strong> faire ta connaissance, lui dit-il, souriant.Du coup, elle l’invite à <strong>en</strong>trer, il passe le seuil <strong>de</strong> la porte et <strong>en</strong> l’apercevant,Sabrina se précipite sur lui et lui saute dans les bras. Il y a au moins 4 ansqu’ils ne se sont pas vus.– Tu n’as pas l’air <strong>en</strong> forme, affirme-t-elle.– Oh ! Si tu savais, <strong>plus</strong> tard je te raconterai, qu’il lui dit pour ne pasraconter cette <strong>histoire</strong> <strong>de</strong>vant la petite.Plus tard, après quelques coupes <strong>de</strong> vin et s’être respectivem<strong>en</strong>t raconté leurvie <strong>de</strong>puis qu’ils ne se sont pas vus, ils déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> se coucher. L’hôte luioffre une couverture et un oreiller pour qu’il puisse dormir sur le divan.Endroit où il ne dormira jamais finalem<strong>en</strong>t... <strong>Ma</strong>is ça, c’est une autre <strong>histoire</strong>.Elle lui dit qu’il peut rester chez elle autant qu’il veut. Trois jours aprèsson arrivée dans sa ville natale, il va voir sa sœur, elle est <strong>plus</strong> jeune que lui98


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>et lui fait une offre qui changera sa vie. Elle lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> s’il veut être payépour appr<strong>en</strong>dre à jouer <strong>de</strong> la musique. Que si le projet lui t<strong>en</strong>te, il n’a qu’àse r<strong>en</strong>dre à telle place et signer tel papier. Chose qu’il fait. Durant 6 mois,p<strong>en</strong>dant son sevrage <strong>de</strong> cocaïne, il appr<strong>en</strong>d à jouer <strong>de</strong> la guitare, les notes,les accords, tout. Il est <strong>plus</strong> motivé que jamais et <strong>en</strong> <strong>plus</strong> la musique lui faitoublier le manque. C’est dans un projet <strong>de</strong> réinsertion sociale qu’il pr<strong>en</strong>d sescours. Bi<strong>en</strong> qu’il soit contre l’aspect social du truc, il se donne à 110 % pourla musique. Le projet consiste à appr<strong>en</strong>dre à jouer, monter un spectacle et<strong>en</strong>registrer un album avec les autres participants. Chose qu’il fera, bi<strong>en</strong> qu’àla fin, il ne soit pas trop fier du résultat final. Le sevrage terminé, il repr<strong>en</strong>ddu poids, il mange bi<strong>en</strong> et ne consomme <strong>plus</strong>. Suite au projet et à sa détermination<strong>de</strong> vivre <strong>de</strong> sa musique, notre guitariste débutant se fait offrir17 000 $ pour un an, pour faire un album musical. Un peu trop tôt vousdirez et vous aurez raison... <strong>Ma</strong>is le 11 novembre 2011, Charles Vagabondsort l’album Baluchon Accoustique. Et à l’été 2012, il fera une tournée danssa région afin <strong>de</strong> le v<strong>en</strong>dre. Bi<strong>en</strong> qu’il t<strong>en</strong>te toujours <strong>de</strong> décrocher un autrecontrat <strong>de</strong> disque, le musici<strong>en</strong> a réalisé son rêve. Il a immortalisé ses chansonssur un album et a fait une tournée promotionnelle pour ce <strong>de</strong>rnier.Aujourd’hui, Charles est à l’école et participe à <strong>de</strong>s concours d’écriture,mais ne cesse jamais <strong>de</strong> rêver qu’un jour, il vivra <strong>de</strong> sa musique.Nos succès, nous les choisissons, nos rêves peuv<strong>en</strong>t se réaliser si on y croitvraim<strong>en</strong>t et qu’on travaille fort pour y arriver. Ce que Charles avait chuchotéà l’oreille <strong>de</strong> sa fille avant <strong>de</strong> partir :– Au revoir, mon ange, papa s’<strong>en</strong> va <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir une rock star, tu vi<strong>en</strong>dras àla nouvelle maison <strong>de</strong> papa, je vi<strong>en</strong>drai te chercher, je t’aime.La petite fille <strong>de</strong> 1 an et <strong>de</strong>mi lui a répondu avec le <strong>plus</strong> beau sourire dumon<strong>de</strong> :– Bye bye papa.Charles-Phillip <strong>Ma</strong>cIntyre Godue (alias Charles Vagabond), 1 er cycleC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse, CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignant : Pierre Lavigne, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville99


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>29. Les <strong>de</strong>ux papillons extraordinairesTout d’abord, il y avait <strong>de</strong>ux cocons qui étai<strong>en</strong>t accrochés à un arbre. Ils sedorai<strong>en</strong>t sous le soleil dans un sous-bois. Ils étai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> gros que la normale.En <strong>plus</strong>, ces <strong>de</strong>ux cocons étai<strong>en</strong>t reliés l’un à l’autre par une sorte <strong>de</strong> soiespéciale. Tous les animaux étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> admiration <strong>de</strong>vant ce phénomène <strong>de</strong>la nature. Ils n’att<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t qu’une chose, voir ce qu’il y avait à l’intérieur, carils étai<strong>en</strong>t tous curieux. Les jours passèr<strong>en</strong>t et toujours ri<strong>en</strong>, sauf qu’ilsvoyai<strong>en</strong>t les <strong>de</strong>ux cocons <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> proches <strong>de</strong> l’éclosion, car leursilhouette se mit à se déformer sous les battem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> leur cœur.Et le jour critique arriva. Tous les animaux s’étai<strong>en</strong>t rassemblés autour <strong>de</strong>cette force <strong>de</strong> la nature. Ils étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> train <strong>de</strong> faire la fête, les oiseauxsifflai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s refrains d’une rare beauté. Les animaux étai<strong>en</strong>t tout ouïe. Ilsbaignai<strong>en</strong>t dans un mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> paix…Puis, le premier cocon comm<strong>en</strong>ça par s’effriter pour <strong>en</strong>suite se briser <strong>en</strong><strong>de</strong>ux afin <strong>de</strong> laisser place au <strong>plus</strong> beau papillon du mon<strong>de</strong>. Celui-ci s’étira,s’étira tellem<strong>en</strong>t que ses ailes comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t à pr<strong>en</strong>dre place. Tous les animauxse tur<strong>en</strong>t. Ils étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> admiration <strong>de</strong>vant ce spectacle grandiose. Unefois que le premier papillon fût sorti, il y avait un petit problème. Il étaittoujours attaché à l’autre par ce fil spécial.Ensuite, comme la nature faisait bi<strong>en</strong> les choses, ce fut au tour du <strong>de</strong>uxièmecocon d’éclore. La procédure était la même que pour le premier. <strong>Ma</strong>is cettefois-ci, les <strong>de</strong>ux papillons pur<strong>en</strong>t s’<strong>en</strong>voler <strong>en</strong>semble. Ils remarquèr<strong>en</strong>t qu’ilsne se quitterai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> jamais. Ils étai<strong>en</strong>t comme <strong>de</strong>s frères siamois.Les animaux ne bougeai<strong>en</strong>t toujours pas. Ils p<strong>en</strong>sai<strong>en</strong>t tous que cela était unsigne du <strong>de</strong>stin. <strong>Ma</strong>is dans leur tête, ils remercièr<strong>en</strong>t le créateur <strong>de</strong> la terre,car ces <strong>de</strong>ux papillons avai<strong>en</strong>t sûrem<strong>en</strong>t une mission. Ceux-ci prir<strong>en</strong>t leurpremier baptême <strong>de</strong> l’air <strong>en</strong> faisant face aux animaux. <strong>Ma</strong>is quand ils atterrir<strong>en</strong>t,ils étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> dos. Les animaux comm<strong>en</strong>cèr<strong>en</strong>t à les applaudir, lesapplaudir <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> fort, puis ils poussèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s cris <strong>de</strong> joie. Les <strong>de</strong>uxpapillons déposèr<strong>en</strong>t leurs pattes sur <strong>de</strong>s branches et ils retournèr<strong>en</strong>t leurtête.Sur les ailes du premier papillon étai<strong>en</strong>t écrites <strong>de</strong>ux lettres, « pa », et sur le<strong>de</strong>uxième, « ix », et vu qu’ils étai<strong>en</strong>t reliés <strong>en</strong>semble par ce fil <strong>de</strong> soie, le mot« paix » apparut. Les <strong>de</strong>ux papillons mesurai<strong>en</strong>t un pied <strong>de</strong> hauteur chacun.Et quand ils écartai<strong>en</strong>t leurs ailes, au total, cela pouvait faire quatre pieds.100


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>Ma</strong>is, ils ne compr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t pas <strong>en</strong>core leur importance sur terre. Puis, ilseur<strong>en</strong>t une réponse dans la secon<strong>de</strong> même : une lumière scintillante étaitv<strong>en</strong>ue les éclairer tous les <strong>de</strong>ux. Une voix douce surgit <strong>de</strong> nulle part pourleur indiquer le chemin qu’ils <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t pr<strong>en</strong>dre. C’était <strong>de</strong> se bala<strong>de</strong>r chezles hommes qui dét<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s armes à feu afin qu’ils arrêt<strong>en</strong>t <strong>de</strong> faire laguerre, la guerre aux animaux et à ceux <strong>de</strong> leur propre race.Ils comprir<strong>en</strong>t, après avoir reçu ce message, la signification du mot écrit surleurs ailes. Tous les autres animaux disai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fin que la prophétie <strong>de</strong> la paixsur terre pouvait se réaliser. Ils saluèr<strong>en</strong>t les <strong>de</strong>ux papillons et ils leur souhaitèr<strong>en</strong>tbon courage pour cette mission. Ils s’<strong>en</strong>volèr<strong>en</strong>t sans tar<strong>de</strong>r.Les <strong>de</strong>ux papillons aperçur<strong>en</strong>t du haut du ciel un chasseur qui voulait tuerun animal. Ils <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dir<strong>en</strong>t tout <strong>de</strong> suite et se mir<strong>en</strong>t dos au chasseur. Lechasseur n’<strong>en</strong> crut pas ses yeux. Il les frotta <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> fort. Il lisait bi<strong>en</strong>le mot « paix » sur les ailes, alors il décida dès l’instant <strong>de</strong> ne <strong>plus</strong> faire <strong>de</strong>mal aux animaux. Il laissa tomber son arme à ses pieds, puis il r<strong>en</strong>tra. Pourles <strong>de</strong>ux papillons, leur première mission fut un imm<strong>en</strong>se succès. Les animaux<strong>de</strong> la forêt allai<strong>en</strong>t être cont<strong>en</strong>ts.Or, les <strong>de</strong>ux papillons <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t s’occuper du <strong>plus</strong> grand morceau, celui <strong>de</strong>la guerre sur la terre. « <strong>Ma</strong>is comm<strong>en</strong>t faire ? » se <strong>de</strong>mandai<strong>en</strong>t-ils. Soudain,l’apparition <strong>de</strong> la lumière scintillante était rev<strong>en</strong>ue. La douce voix leur dit :« Ne vous inquiétez pas, car pour ce qui est du chasseur, le mot sur vos ailesest <strong>en</strong>tré dans sa mémoire et indirectem<strong>en</strong>t, sans le savoir, il a communiquéavec tous les chasseurs <strong>de</strong> la terre <strong>en</strong> ce mom<strong>en</strong>t même. Tous les animauxsont saufs. Trouvez une solution au <strong>plus</strong> vite, car votre durée <strong>de</strong> vie n’est que<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux à trois jours… »Finalem<strong>en</strong>t, les <strong>de</strong>ux papillons cherchèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s solutions, mais <strong>en</strong> vain, il neleur restait pas beaucoup <strong>de</strong> temps. Le fil <strong>de</strong> soie qui les attachait comm<strong>en</strong>çaità s’émietter. Après <strong>plus</strong>ieurs minutes <strong>de</strong> vol, ils arrivèr<strong>en</strong>t dans une ville.Ils atterrir<strong>en</strong>t <strong>de</strong>vant un magasin <strong>de</strong> photographie. Un petit garçon sortit dumagasin et il les vit à terre. Il lut les ailes puis soudainem<strong>en</strong>t, il prit les <strong>de</strong>uxpapillons pour les soigner à l’intérieur. Il les déposa sur une photocopieuse<strong>de</strong> grand format qui était reliée à un ordinateur. Il courut pour aller chercher<strong>de</strong> l’eau. P<strong>en</strong>dant ce temps, les <strong>de</strong>ux papillons, dans leur <strong>de</strong>rnier souffle, setournèr<strong>en</strong>t sur le dos et appuyèr<strong>en</strong>t sans le savoir sur le bouton « marche ».La lumière <strong>de</strong> la photocopieuse grilla complètem<strong>en</strong>t le fil <strong>de</strong> soie, mais l’originalalla directem<strong>en</strong>t dans l’ordinateur. Le petit garçon arriva, mais il était101


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>trop tard. Les <strong>de</strong>ux papillons ne battai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> du cœur. Il arriva <strong>de</strong>vantl’ordinateur et appuya sur « <strong>en</strong>trer » et dit à son papa que la magie <strong>de</strong> la paixcomm<strong>en</strong>çait par Internet pour que l’homme cesse les guerres…Nicolas Schaller, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Saint-Michel (Sherbrooke), CS <strong>de</strong> la Région-<strong>de</strong>-SherbrookeEnseignant : François Faucher, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Estrie30. Le courage d’une vieLes yeux levés vers le ciel <strong>en</strong> criant <strong>de</strong> tout mon cœur « ai<strong>de</strong>z-moi, je vous<strong>en</strong> prie ».J’étais prisonnière <strong>de</strong> mon passé, anéantie par la douleur et le désespoir. J<strong>en</strong>’étais <strong>plus</strong> moi-même.J’étais incapable <strong>de</strong> me regar<strong>de</strong>r dans la glace, tout ce que je voyais, c’étaitune étrangère au cœur noirci par la haine.Je me détruisais à petit feu <strong>en</strong> p<strong>en</strong>sant que je ne méritais pas d’êtreheureuse.Aveuglée par mon mal d’âme, je ne voyais pas les anges qui m’<strong>en</strong>tourai<strong>en</strong>tavec leurs ailes <strong>de</strong> lumière.Les yeux levés vers le ciel <strong>en</strong> criant « ai<strong>de</strong>z-moi, je vous <strong>en</strong> prie ».Encore une fois, je n’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais pas la petite voix qui me disait d’arrêter <strong>de</strong>me détruire.Je croyais que j’étais seule, mais j’avais <strong>de</strong>s êtres extraordinaires près <strong>de</strong> moi.Je les ignorais <strong>en</strong> m’<strong>en</strong>fonçant <strong>plus</strong> <strong>en</strong>core.Toute ma jeunesse perdue, je me s<strong>en</strong>tais morte à l’intérieur et je me disaisque c’était ma faute et que j’étais une mauvaise personne.Je vivais pour survivre et non pour vivre ma vie.102


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>J’avais <strong>de</strong>s craintes qui m’empêchai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> voir la beauté <strong>de</strong> la vie.Puisque j’étais prise dans ce nuage d’orages viol<strong>en</strong>ts, je ne voyais ri<strong>en</strong> <strong>de</strong>bi<strong>en</strong>, pas même la voix <strong>de</strong> mon <strong>en</strong>tourage qui voulait m’ai<strong>de</strong>r et quim’aimait comme j’étais à ce mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ma vie.Les yeux levés vers le ciel <strong>en</strong> criant « ai<strong>de</strong>z-moi, je vous <strong>en</strong> prie ». Alors, c’estlà que j’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du crier mon nom. La voix me disait <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre ma vie <strong>en</strong>main et que j’étais une personne unique et formidable.<strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant, je sais que je ne suis <strong>plus</strong> seule.Je me lève le matin <strong>en</strong> disant merci à la vie, merci d’être sur la Terre.Je ne me laisserai <strong>plus</strong> faire par personne et c’est moi qui ferai mes choixpour être bi<strong>en</strong>, malgré tous les obstacles <strong>plus</strong> difficiles que j’aurai à r<strong>en</strong>contrersur mon chemin.Enfin libérée <strong>de</strong> cette douleur qui me détruisait <strong>de</strong> l’intérieur.Je peux vous dire que c’est à nous <strong>de</strong> déci<strong>de</strong>r que c’est assez d’être mal dansnotre peau, même si on vit <strong>de</strong>s choses qui vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t détruire une partie <strong>de</strong>nous. Je sais qu’on peut tout reconstruire si on y croit <strong>de</strong> tout notre cœur.On doit s’<strong>en</strong>trai<strong>de</strong>r et chercher l’ai<strong>de</strong> dont on a besoin pour s’<strong>en</strong> sortir parceque vivre dans la haine et la douleur, ce n’est pas une vie. Comme je mesuis dit, un jour je vais arriver au paradis et je ne veux pas regretter <strong>de</strong> nepas avoir su trouver la force qu’il me fallait pour continuer d’avancer.J’ai écrit ce texte pour donner <strong>de</strong> l’espoir à tous ceux qui viv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>tsdifficiles et leur montrer qu’on peut s’<strong>en</strong> sortir.On a tout pour être heureux.On mérite d’être bi<strong>en</strong> et <strong>de</strong> profiter <strong>de</strong> chaque secon<strong>de</strong> <strong>de</strong> notre courte vie.Foncez, allez, on est capable, on doit y croire jusqu’au bout et se dire qu’onest <strong>de</strong>s vainqueurs.Patricia Gagné, PrésecondaireC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s <strong>Ma</strong>skoutains, CS <strong>de</strong> Saint-HyacintheEnseignante : Audrey Poirier, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t Val-<strong>Ma</strong>ska103


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>10431. Toi, petite filleToi, petite filleOuvre les yeux, sors <strong>de</strong> ta coquilleFais-moi face, dis-moi qui tu esToi petite fille qui ne sais <strong>plus</strong> où tu <strong>en</strong> esMoi, je vais te le dire ce qui te fait peur<strong>Ma</strong> chère, toi seule as vécu ces horreursDevant sa porte, il t’a laisséeLe cœur <strong>en</strong> miette et délaisséeAvec ce far<strong>de</strong>au que tu as portéP<strong>en</strong>dant ce qui te semble l’éternitéCet homme qui avait ton cœurAvec ses mains a brisé ton bonheurTu es tombée sous ce poids que tu portesEh bi<strong>en</strong>, relève-toi, ti<strong>en</strong>s-toi droite, il faut que tu sois forteQuand ton secret, tu as révéléPlusieurs g<strong>en</strong>s t’ont prise <strong>en</strong> pitié<strong>Ma</strong>is toi, tu as relevé la têteAvec ta force d’âme, tu les as tous <strong>en</strong>voyés paîtreAujourd’hui, tu es forte, tu le criesViolée et brisée, tu as étéBi<strong>en</strong> sûr mon <strong>en</strong>fant tu <strong>en</strong> as payé le prixD’avoir été ainsi abandonnée dans ta maison bi<strong>en</strong>-aiméeTu voudrais tant qu’il répare les pots cassésLa prison est le seul <strong>en</strong>droit où il peut se retrouverAprès ce qu’il t’a fait, il mérite la mortToi aussi tu aimerais lui faire du tortAucun <strong>en</strong>fant ne <strong>de</strong>vrait vivre cette expéri<strong>en</strong>ce avant le temps<strong>Ma</strong>is toi, petite fille tu l’as vécue à quatre ansTa famille le regrette, tes par<strong>en</strong>ts s’<strong>en</strong> veul<strong>en</strong>tPourquoi t’as pas ouvert ta gueule ?Tu n’<strong>en</strong> as parlé que dix ans <strong>plus</strong> tardIl était parti, c’était trop tardEncore une fois, tu es tombéeDans ta peine, tu t’es noyée<strong>Ma</strong> jolie, sors <strong>de</strong> l’eau, vi<strong>en</strong>s à moiMontre-lui la fermeté <strong>de</strong> ta foi !


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Depuis le jour où tu es <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue une <strong>en</strong>fant femmeTu dérives puisque tu as perdu tes ramesAlors, ouvre ce ri<strong>de</strong>au <strong>de</strong> brouillardEt vis ta vie avant <strong>de</strong> rejoindre les vieillardsMontre ta gran<strong>de</strong>ur et fais-moi honneurJe t’amènerai dans ce paradis sans pleursToi, petite fille qui a vécu ces horreursLaisse le noir et délecte-toi <strong>de</strong> ces couleursÀ jamais, ton cœur sera brisé<strong>Ma</strong>is pour toujours, tu feras partie <strong>de</strong>s courageux guerriersMon <strong>en</strong>fant, je t’<strong>en</strong> fais le serm<strong>en</strong>tIl ne pourra pas <strong>en</strong> être autrem<strong>en</strong>tVa au loin <strong>en</strong> mettant un pied <strong>de</strong>vant l’autreSois fière et ne te laisse pas <strong>de</strong>vancer par les autresBeaucoup d’embûches ont été mises sur ton cheminDans ce cas, tu chanteras ce refrainLève-toi, ti<strong>en</strong>s-toi droite, il faut que tu sois forteNe tombe pas <strong>en</strong>core sous ce far<strong>de</strong>au que tu portesToi, petite fille qui n’étais qu’une <strong>en</strong>fantTu es aujourd’hui âgée <strong>de</strong> 16 ansTu écris ce poème pour raconter ton <strong>histoire</strong>Afin <strong>de</strong> donner aux autres petites filles un peu d’espoirEt c’est sur cette <strong>de</strong>rnière ligne que tu t’<strong>en</strong> vasContinuer ta vie à petits pasNe t’inquiète pas, je t’att<strong>en</strong>drai au bout <strong>de</strong> la viePour t’am<strong>en</strong>er dans le paradis que je t’ai promis.Suzie Leroux, 2 e cycleCÉA <strong>de</strong> <strong>Ma</strong>gog, CS <strong>de</strong>s SommetsEnseignante : Sylvie Routhier, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Estrie105


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>32. Amour astralCette <strong>histoire</strong> se déroule dans une galaxie appelée le Ciel. C’est l’<strong>histoire</strong>d’une petite lune et lui, l’étoile la <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>.La lune était très distraite, elle semblait toujours occupée, la marée, lesv<strong>en</strong>ts, les actes sismiques, tout dép<strong>en</strong>dait d’elle. Elle v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> déménagersur cette nouvelle galaxie qu’elle ne connaissait pas très bi<strong>en</strong>. Tous les autresastres l’appelai<strong>en</strong>t la Petite lune du ciel.L’étoile était très charmante, il s’appelait David. Dans la galaxie, tout lemon<strong>de</strong> le connaissait, toutes les filles <strong>de</strong> son amas voulai<strong>en</strong>t graviter à côté<strong>de</strong> lui. <strong>Ma</strong>lgré sa courte exist<strong>en</strong>ce, il était très sage et fort. Les autres astresdisai<strong>en</strong>t : « C’est à cause du lait. » C’était sa boisson préférée, dont il nes’<strong>en</strong>nuyait jamais.La lune et David avai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong>ieurs choses <strong>en</strong> commun. Tous les <strong>de</strong>ux étai<strong>en</strong>tpleins <strong>de</strong> grâce, <strong>de</strong> vie, <strong>de</strong> joie, mais il y avait quelque chose qui leur manquait.Parcourir <strong>plus</strong>ieurs galaxies les avait faits différ<strong>en</strong>ts, <strong>de</strong>s corps célestes<strong>plus</strong> vertueux pleins d’amour et d’espoir, mais comme l’exist<strong>en</strong>ce n’est pastoujours facile, ils avai<strong>en</strong>t aussi un peu trop <strong>de</strong> chagrin.C’était une soirée magique, vers le début <strong>de</strong> l’été, quand une marée galactiqueles a fait se r<strong>en</strong>contrer dans un bal céleste qui s’était déroulé sur unchamp magnétique bi<strong>en</strong> connu dans le Ciel.La lune était trop distraite. Elle n’avait pas remarqué cette étoile étincelante,presque comme le soleil, et la soirée semblait si longue disons comme unesoirée d’hiver. La pauvre lune s’<strong>en</strong>nuyait et elle ne savait pas quoi faire.David était <strong>en</strong>tre anxieux et nerveux, bi<strong>en</strong> qu’il pouvait très bi<strong>en</strong> danser, iln’osait pas le faire. Soudainem<strong>en</strong>t, la petite lune a orbité proche <strong>de</strong> lui etsans trop p<strong>en</strong>ser, elle l’a invité à danser. On dit que ce couple <strong>de</strong> corpscélestes dansants a provoqué une éclipse merveilleuse jamais vue dans toutl’univers.<strong>Ma</strong>lgré sa surpr<strong>en</strong>ante brillance, David a été ébloui par cette petite lune quireflétait le soleil, Il connaissait d’autres galaxies, d’autres lunes, <strong>de</strong>s milliardsd’étoiles, mais c’est <strong>de</strong> cette petite lune dont il voulait s’approcher.106


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Et comme dans les <strong>histoire</strong>s <strong>de</strong> princesses, le bal étant terminé, la lune acontinué ses phases, et David, à p<strong>en</strong>ser à elle...Une étoile avec une lune ? « Ce n’est pas le couple parfait », p<strong>en</strong>sait la petitelune ; mais pour l’étoile, il n’avait ri<strong>en</strong> d’impossible.C’est comme ça qu’il a comm<strong>en</strong>cé à s’approcher <strong>de</strong> la lune, même si elletrouvait que ce n’était pas une bonne idée... Il lui a montré la galaxie, lesnébuleuses, les satellites, les météores, les astéroï<strong>de</strong>s, les comètes, tout cequ’elle n’avait jamais imaginé.Puis, « quand on veut, on peut » et David était très persévérant, contre touteprédiction astronomique, la lune et David sont tombés <strong>en</strong> amour. Un amoursans précé<strong>de</strong>nt, un amour infini... <strong>Ma</strong>is cette <strong>histoire</strong> stellaire ne se terminepas ici.Un jour, le pauvre David ne se s<strong>en</strong>tait pas très bi<strong>en</strong>, il était heureux avec lalune, mais à cause <strong>de</strong> sa santé, il semblait avoir épuisé tout son combustibl<strong>en</strong>ucléaire. La lune lui donnait beaucoup <strong>de</strong> lait, mais ça ne semblait pasfonctionner. Cette maladie bizarre a fait éclater David, dans un phénomènecéleste connu sous le nom <strong>de</strong> « supernova lumineuse ».Tout le mon<strong>de</strong> était inquiet à cause <strong>de</strong> cette explosion flamboyante. Ils nevoyai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> David, mais loin d’une tragédie, c’était un miracle qui allait seproduire...Petit à petit, cette spl<strong>en</strong><strong>de</strong>ur aveuglante a comm<strong>en</strong>cé à pr<strong>en</strong>dre une forme :une silhouette circulaire. C’est comme ça qu’on a découvert que Davidn’était pas mala<strong>de</strong> ; il était <strong>en</strong> train <strong>de</strong> <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un soleil extraordinaire ! Lesoleil dont la lune avait toujours rêvé.Un soleil et une lune ? Cela avait <strong>plus</strong> <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s et même si ce n’était pas possible,l’amour allait <strong>de</strong> toute façon gagner. On dit que la lune et le nouveausoleil ont déménagé pas trop loin du Ciel pour créer une nouvelle galaxie...Une <strong>belle</strong> galaxie pleine d’étoiles, <strong>de</strong> planètes et d’astres baptisée comme laboisson favorite <strong>de</strong> David... la Voie lactée.Francy Ramirez, FrancisationC<strong>en</strong>tre du Phénix (Québec), CS <strong>de</strong>s DécouvreursEnseignante : Hélène <strong>Ma</strong>rtel, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Deux Rives107


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>33. Plongé dans l’obscuritéJe me nomme Juli<strong>en</strong> Laplante. Cela fait dix ans aujourd’hui. Dix longuesannées vécues dans l’obscurité, à la suite <strong>de</strong> cette tragique nouvelle. Voussavez, la gran<strong>de</strong> faucheuse n’a aucune préfér<strong>en</strong>ce et <strong>en</strong>core moins <strong>de</strong>compassion <strong>en</strong>vers l’<strong>en</strong>tourage <strong>de</strong> ses victimes. Il y a dix ans, la mort estapparue sans prév<strong>en</strong>ir. Un camionneur ivre a démoli la voiture. Ce jour-là,j’ai tout perdu. J’ai vu le corps mutilé <strong>de</strong> mes propres yeux. Des débris <strong>de</strong>verre et <strong>de</strong> métaux, <strong>en</strong> quantité industrielle, fur<strong>en</strong>t retirés du corps lors <strong>de</strong>l’autopsie. Il ne m’était, <strong>en</strong> aucun cas, possible d’accepter cette tragédie. Àla suite <strong>de</strong> cela, tout <strong>de</strong>vint noir. J’ai dû couper tous contacts avec mafamille, mes amis et mes proches. Je me s<strong>en</strong>tais si seul.P<strong>en</strong>dant ce temps, j’ai vu <strong>de</strong> terribles choses. Des choses qui m’avai<strong>en</strong>téchappé autrefois, mais qui aujourd’hui, m’apparaissai<strong>en</strong>t aussi clairem<strong>en</strong>tque le soleil. Il y a tant d’indiffér<strong>en</strong>ce dans le mon<strong>de</strong>. Des dizaines <strong>de</strong> millions<strong>de</strong> g<strong>en</strong>s meur<strong>en</strong>t chaque année et seulem<strong>en</strong>t quelques personnes <strong>de</strong>leur <strong>en</strong>tourage se souvi<strong>en</strong>dront d’eux. Les médias parl<strong>en</strong>t parfois <strong>de</strong> secoussessismiques qui ont fait <strong>plus</strong>ieurs victimes. Un mois <strong>plus</strong> tard, lorsqu’ilsreparleront <strong>de</strong> cet événem<strong>en</strong>t, ils ne se rappelleront que du tremblem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>terre. J’ai vu <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s se bagarrer pour absolum<strong>en</strong>t aucune raison, <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>squi se blessai<strong>en</strong>t verbalem<strong>en</strong>t et psychologiquem<strong>en</strong>t.Des g<strong>en</strong>s <strong>de</strong> <strong>plus</strong>ieurs pays se font exploiter. Ils travaill<strong>en</strong>t une douzained’heures par jour pour ne repartir à la fin qu’avec une paye merdique, insuffisantepour vivre. Selon <strong>de</strong>s statistiques, un <strong>en</strong>fant meurt <strong>de</strong> faim toutes les6 secon<strong>de</strong>s dans le mon<strong>de</strong>. Cela représ<strong>en</strong>te <strong>plus</strong> <strong>de</strong> 5 millions d’<strong>en</strong>fantsmorts chaque année. <strong>Ma</strong>is nous le savons. Nous choisissons <strong>de</strong> l’ignorerpour ne pas nous s<strong>en</strong>tir mal. Si tous les êtres humains décidai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> réagir,le mon<strong>de</strong> serait meilleur. <strong>Ma</strong>is nous ne faisons toujours ri<strong>en</strong>. L’humanitéexiste-t-elle uniquem<strong>en</strong>t pour créer la haine, la souffrance et l’indiffér<strong>en</strong>ce<strong>en</strong>vers tout cela ?Quelques années <strong>plus</strong> tard, j’ai essayé <strong>de</strong> tout mon être <strong>de</strong> contacter mesproches, mais <strong>en</strong> vain. Cela m’était impossible, car il était trop tard. Cesg<strong>en</strong>s, que j’appelais autrefois « famille » et « amis », avai<strong>en</strong>t tous passé à autrechose. Je me s<strong>en</strong>tais tellem<strong>en</strong>t seul et tellem<strong>en</strong>t… <strong>en</strong> colère. Comm<strong>en</strong>tavai<strong>en</strong>t-ils pu tourner la page ? Comm<strong>en</strong>t avai<strong>en</strong>t-ils osé oublier ? Je n’<strong>en</strong>pouvais <strong>plus</strong>. J’ai songé à <strong>plus</strong>ieurs reprises à appeler la mort pour qu’ellevi<strong>en</strong>ne me chercher. <strong>Ma</strong>is je n’<strong>en</strong> étais point capable. Au <strong>plus</strong> profond <strong>de</strong>moi, je savais que je <strong>de</strong>vais rester. Une voix intérieure me disait que je108


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>de</strong>vais découvrir quelque chose avant <strong>de</strong> partir. Je me suis mis à chercher,chercher et <strong>en</strong>core chercher durant <strong>de</strong>s années… mais je ne trouvais ri<strong>en</strong>. Jevoyais toujours tous ces g<strong>en</strong>s se faire du mal, ce qui ne faisait qu’accroîtrel’obscurité. J’<strong>en</strong> avais assez <strong>de</strong> rester dans ce mon<strong>de</strong> qui ne connaissait quehaine et cruauté. Je <strong>de</strong>vais absolum<strong>en</strong>t quitter ce mon<strong>de</strong>. <strong>Ma</strong>is avant tout, je<strong>de</strong>vais faire une <strong>de</strong>rnière chose.Nous étions samedi après-midi. Une légère brise automnale me caressait levisage. Je me prom<strong>en</strong>ais dans ce cimetière où dormai<strong>en</strong>t tant <strong>de</strong> g<strong>en</strong>soubliés. Je m’arrêtai à l’arrière d’une pierre tombale. Ce que je voyais meparut impossible. Une femme se t<strong>en</strong>ait <strong>de</strong>bout <strong>de</strong> l’autre côté <strong>de</strong> cette pierre.Cette femme me regardait avec tant <strong>de</strong> joie et <strong>de</strong> tristesse. Je ne croyaisjamais revoir le merveilleux visage <strong>de</strong> ma femme une <strong>de</strong>rnière fois. Noussommes restés ainsi un long mom<strong>en</strong>t à nous fixer dans les yeux. Elle ditfinalem<strong>en</strong>t qu’elle m’aimait, me fit un sourire respl<strong>en</strong>dissant et partit. Jecontournai la pierre tombale et lus, pour la première fois, ces quelques motsgravés juste au-<strong>de</strong>ssus d’une couronne <strong>de</strong> fleurs fraîchem<strong>en</strong>t déposée.« Ici repose Juli<strong>en</strong> LaplanteÉpoux <strong>de</strong> Karine Laplante1972-2002Tu resteras toujours dans nos cœurs »Je réalisai à ce mom<strong>en</strong>t que ma femme ne m’avait pas oublié. Elle ne faisaitque vivre sa vie <strong>en</strong> acceptant ma mort. Mon âme <strong>de</strong>vint à prés<strong>en</strong>t <strong>en</strong> paix.Plus ri<strong>en</strong> ne me ret<strong>en</strong>ait dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s vivants.Cela fait dix ans aujourd’hui. Dix longues années vécues dans l’obscurité, àla suite <strong>de</strong> ma mort. J’appelai la gran<strong>de</strong> faucheuse pour qu’elle vi<strong>en</strong>nechercher mon âme errante et, <strong>en</strong> la voyant, je lui ai simplem<strong>en</strong>t dit : « J’aicompris ». Je ne fus, après cela, <strong>plus</strong> <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>.Frédéric Fiore, 2 e cycleCÉA <strong>de</strong> La Pocatière, CS <strong>de</strong> Kamouraska - Rivière-du-LoupEnseignante : Mireille Caron, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Grand-Portage109


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>34. ElleElle avait 64 ans, elle rêvait <strong>de</strong>puis longtemps du jour où elle aurait 65 ans.Sa p<strong>en</strong>sion <strong>de</strong> vieillesse, elle l’aura, personne ne s’est aperçu que tu te dirigeaisdans sa direction.Sournoisem<strong>en</strong>t, tu t’es approchée sans qu’on se r<strong>en</strong><strong>de</strong> compte <strong>de</strong> ta prés<strong>en</strong>ce.Tranquillem<strong>en</strong>t, tu t’es glissée à ses côtés, tellem<strong>en</strong>t doucem<strong>en</strong>t quemême après <strong>de</strong>s jours, je dirais <strong>plus</strong> <strong>de</strong>s semaines, tu es passée inaperçue,tu as donc comm<strong>en</strong>cé à t’installer confortablem<strong>en</strong>t à l’insu <strong>de</strong> tous et ainsitu étais sur le point <strong>de</strong> débuter ton œuvre <strong>en</strong> toute discrétion.Tu t’es établie, mais comme je ne passais pas souv<strong>en</strong>t la voir, je ne me suispas r<strong>en</strong>du compte <strong>de</strong> ta prés<strong>en</strong>ce, comm<strong>en</strong>t aurais-je pu ? Même les g<strong>en</strong>s <strong>de</strong>son <strong>en</strong>tourage proche ne savai<strong>en</strong>t pas que tu y étais. Je ne sais pas pourquoi,mais la vie avait fait <strong>en</strong> sorte que je me rapproche d’elle un peu <strong>plus</strong>. Je doisvous avouer qu’à une époque, nous étions très très proches elle et moi. Ence temps-là, tu n’aurais pas pu approcher ! Je t’aurais vue tout <strong>de</strong> suite !Comme je l’ai m<strong>en</strong>tionné, la vie avait mis <strong>de</strong>s distances <strong>en</strong>tre nous. Pour j<strong>en</strong>e sais quelle raison, je s<strong>en</strong>tis le besoin <strong>de</strong> rev<strong>en</strong>ir dans sa direction et c’estce que je fis, tout doucem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> essayant <strong>de</strong> rétablir ces li<strong>en</strong>s que nous avionsautrefois.Je n’ai pas vu tout <strong>de</strong> suite ta prés<strong>en</strong>ce, trop préoccupée par ma relation avecelle. Sans vouloir l’avouer, elle m’avait terriblem<strong>en</strong>t manqué.Après quelques semaines, je me r<strong>en</strong>dis bi<strong>en</strong> compte qu’elle avait changé,mais jamais je n’aurais pu m’imaginer que toi, tu y étais pour quelque chose,car je ne me doutais pas que tu te serais approchée d’elle. J’avais déjà<strong>en</strong>t<strong>en</strong>du parler <strong>de</strong> toi, sans vraim<strong>en</strong>t te connaître. Les mois passèr<strong>en</strong>t et ilétait évi<strong>de</strong>nt que quelque chose se passait, car elle changeait <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong><strong>plus</strong>. Au début, ce changem<strong>en</strong>t me plaisait, elle était douce <strong>de</strong> temps à autre,elle me donnait <strong>de</strong> petits noms affectueux. Cela faisait drôle, car ce n’étaitpas dans ses habitu<strong>de</strong>s. En temps normal, elle était <strong>de</strong> nature assez ferme etrigi<strong>de</strong>. Alors, comme tout ceci me plut, je ne cherchais pas <strong>plus</strong> loin et profitais<strong>de</strong> ce changem<strong>en</strong>t pour me rapprocher aussi.Vint un temps où les différ<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> comportem<strong>en</strong>t fur<strong>en</strong>t évi<strong>de</strong>ntes à un telpoint que je me mis à chercher le pourquoi, qui, à mes yeux, semblait sisoudain. Bi<strong>en</strong> sûr, tu étais responsable, tu t’amusais avec elle, laissant <strong>de</strong>110


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>petits trous un peu partout au début. <strong>Ma</strong>is tu te manifestais <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong>souv<strong>en</strong>t. On se mit à redouter quelque chose.Dieu seul sait que jamais je n’aurais pu te trouver seule, malgré les ravagesque tu étais <strong>en</strong> train <strong>de</strong> faire. Elle-même n’avait pas réalisé que tu étais là. Àforce <strong>de</strong> douter, je me suis décidée à aller chercher <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> extérieure, pourvoir si quelqu’un d’autre s’était r<strong>en</strong>du compte <strong>de</strong> quelque chose. C’est sûrque la famille et les proches voyai<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong> que, <strong>de</strong>puis un bout <strong>de</strong> temps,elle n’était <strong>plus</strong> du tout la même femme. <strong>Ma</strong>is personne <strong>en</strong>core ne savait quetu étais responsable. Je finis par l’am<strong>en</strong>er voir mon mé<strong>de</strong>cin, Dr Jean-<strong>Ma</strong>rcDesaul. Lui se r<strong>en</strong>dit tout <strong>de</strong> suite compte que c’était toi la cause <strong>de</strong> tous ceschangem<strong>en</strong>ts. Alors, il me regarda et me dit d’un ton sûr <strong>de</strong> lui : « elle estatteinte <strong>de</strong> la maladie d’Alzheimer, et ce, <strong>de</strong>puis quelques années déjà. Il n’ya <strong>plus</strong> grand-chose à faire, elle va oublier <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> vite. »C’est ce qui arriva. En seulem<strong>en</strong>t cinq ans, tu es parv<strong>en</strong>ue à tes fins. <strong>Ma</strong>uditAlzheimer ! Par le temps que j’accepte que tu étais là, elle ne me reconnaissait<strong>plus</strong>, elle ne parlait <strong>plus</strong>. J’aurais eu <strong>en</strong>core tant <strong>de</strong> choses à lui dire,mais il est trop tard, car tu es partie avec son âme, ne laissant que ce corps.Je la regardais, elle était assise là, le néant au fond <strong>de</strong>s yeux. Comme j’auraisaimé savoir au début que tu étais <strong>en</strong> train <strong>de</strong> t’emparer d’elle, j’aurais <strong>en</strong>registrésa voix pour ne pas l’oublier, son sourire pour me le rappeler, mais tuas vidé sa tête, nous laissant impuissants.La seule chose que je puisse dire aujourd’hui, c’est que malgré tout… jet’aime et tu resteras toujours ma petite maman.Josée H<strong>en</strong>ri, 1 er cycleC<strong>en</strong>tre St-Joseph (Gracefield), CS <strong>de</strong>s Hauts-Bois-<strong>de</strong>-l’OutaouaisEnseignant : Jean-François Chabot, Syndicat du personnel<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Hautes-Rivières111


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>35. Souv<strong>en</strong>irsLe crépuscule était magnifique. De <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> bas, atteignant l’horizon, lesoleil r<strong>en</strong>voyait sur l’eau ses <strong>de</strong>rniers rayons <strong>de</strong> douceur, telle une caresseemportée par le v<strong>en</strong>t. Dans le ciel, les nombreuses couleurs éclatantes dusoleil couchant se reflétai<strong>en</strong>t sur les vagues miroitantes <strong>de</strong> la mer. Tout étaitcalme : la plage déserte, les vagues <strong>de</strong> l’océan, même le souffle du v<strong>en</strong>t. Cesrivages paisibles, qui s’ét<strong>en</strong>dai<strong>en</strong>t à perte <strong>de</strong> vue, étai<strong>en</strong>t très rarem<strong>en</strong>t fréqu<strong>en</strong>tés,cet <strong>en</strong>droit étant trop loin <strong>de</strong> la civilisation. Nul ne dérangeait laquiétu<strong>de</strong>, la paix <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>droit unique. Nul ne v<strong>en</strong>ait ici. Nul, sauf moi.Seule, assise sur les rives <strong>de</strong> la mer, je p<strong>en</strong>se. Aux nombreux printemps quisont nés, aux étés qui ont fleuri, à ces automnes qui ont fané et aux maintshivers qui ont trépassé. Ces souv<strong>en</strong>irs, ces instants <strong>de</strong> joie, <strong>de</strong> bonheur, maisaussi ces instants <strong>de</strong> tristesse, <strong>de</strong> solitu<strong>de</strong>. Tant <strong>de</strong> choses sont <strong>en</strong>core <strong>en</strong> moi,<strong>de</strong>s souv<strong>en</strong>irs si profondém<strong>en</strong>t <strong>en</strong>fouis, qui tourn<strong>en</strong>t toujours et <strong>en</strong>core dansma tête. Si souv<strong>en</strong>t, je les ai chassés pour essayer <strong>de</strong> les oublier. <strong>Ma</strong>is celaétait <strong>en</strong> vain. Au fond <strong>de</strong> moi, je savais que jamais je ne réussirais à les fairedisparaître. Du <strong>plus</strong> heureux au <strong>plus</strong> douloureux souv<strong>en</strong>ir, ils font tous partie<strong>de</strong> moi.Il y a si longtemps que j’ai mis ces souv<strong>en</strong>irs <strong>de</strong> côté, pour essayer <strong>de</strong> ne <strong>plus</strong>y rev<strong>en</strong>ir. Voyant ce paysage si familier, je vois ressurgir <strong>de</strong> nombreusesimages que je croyais disparues. Ces nombreuses fêtes que l’on v<strong>en</strong>ait célébrerici, et principalem<strong>en</strong>t l’une d’elles dont je me rappelle, qui a emportémon meilleur ami. Personne n’avait pu le sauver <strong>de</strong> ces vagues qui sedéchaînai<strong>en</strong>t sur lui. Personne, y compris moi. P<strong>en</strong>dant d’innombrablesannées, je m’<strong>en</strong> suis voulu <strong>de</strong> n’avoir pu veiller sur lui. Je m’<strong>en</strong> suis voulu<strong>de</strong> l’avoir abandonné. Et je suis rev<strong>en</strong>ue ici tant <strong>de</strong> fois, pour essayer <strong>de</strong>compr<strong>en</strong>dre, pour essayer <strong>de</strong> me pardonner. Et maint<strong>en</strong>ant <strong>en</strong>fin, jecompr<strong>en</strong>ds. Nul ne peut aller contre le <strong>de</strong>stin. Et nul ne peut prévoir ce quela vie réserve à chaque être. Nul, y compris moi.Je dois cep<strong>en</strong>dant avouer que maintes fois, j’y ai eu <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>ts heureux.Je me vois <strong>en</strong>core là, sur cette plage, à courir et à rire avec ceux que j’aime.J’étais là, les <strong>de</strong>ux pieds dans l’eau, avec maman à mes côtés me t<strong>en</strong>ant parla main, me disant <strong>de</strong> ne pas aller trop loin dans la mer. Sachant que celal’inquiétait <strong>de</strong> me voir seule dans l’eau, je retournais vers elle et me couchaisdans le sable doux à ses côtés. Alors je voyais son visage s’emplir <strong>de</strong> joie et<strong>de</strong> lumière. Je lui souriais, elle me caressait les cheveux, et à chaque fois,112


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>elle me chuchotait doucem<strong>en</strong>t ces mots remplis <strong>de</strong> t<strong>en</strong>dresse à l’oreille : « Jet’aime. »Tandis que l’astre du jour disparaît <strong>de</strong>rrière l’horizon pour faire place à lanuit, je suis là, assise toute seule, <strong>de</strong>vant la plage qui m’a vue grandir. J’y aivécu une <strong>en</strong>fance paisible, <strong>en</strong>richissante, et pleine d’affection. Cep<strong>en</strong>dant,j’y ai égalem<strong>en</strong>t vécu <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>ts très douloureux, très éprouvants. <strong>Ma</strong>isaujourd’hui, je rep<strong>en</strong>se <strong>en</strong>fin à tout ce qui s’y est passé, au temps <strong>de</strong>s rires,au temps <strong>de</strong>s larmes. Peu <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s, je p<strong>en</strong>se, peuv<strong>en</strong>t trouver <strong>en</strong> eux lechemin qui mène à la paix, <strong>en</strong> soi. Je ne regrette ri<strong>en</strong> à prés<strong>en</strong>t, car je saisque toutes ces choses, bonnes et mauvaises, m’ont permis d’être celle queje suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue. J’ai <strong>en</strong>fin réussi à faire la paix avec mes souv<strong>en</strong>irs…Trycia Lebel, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> St-Prosper (St-Proper), CS <strong>de</strong> la Beauce-EtcheminEnseignante : Diane Pouliot, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la Chaudière36. RésisterJ’avais <strong>de</strong>ux mois, mes mains et mes lèvres étai<strong>en</strong>t bleues : je ne respirais<strong>plus</strong>. On ne parlait pas <strong>de</strong> respiration artificielle <strong>en</strong> 1957, alors mon pèreavait tout t<strong>en</strong>té : il m’avait pris les pieds dans une main, l’autre t<strong>en</strong>ant mondos, il a imprimé à mon petit corps <strong>de</strong>s mouvem<strong>en</strong>ts rapi<strong>de</strong>s vers le haut,afin <strong>de</strong> forcer l’air à <strong>en</strong>trer dans mes poumons. <strong>Ma</strong> mère m’a dit que j’avaisrecomm<strong>en</strong>cé à respirer à la troisième reprise. J’avais <strong>en</strong>suite dormi sur lapoitrine <strong>de</strong> ma mère, p<strong>en</strong>dant un mois <strong>en</strong>tier, au cas où : j’avais contracté lacoqueluche.J’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du cette <strong>histoire</strong> <strong>de</strong>s tas <strong>de</strong> fois, mais aujourd’hui cet épiso<strong>de</strong> medonne <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> pleurer, comme si je ress<strong>en</strong>tais toute la panique qui avaitgagné mes par<strong>en</strong>ts. Mon père m’a sauvé la vie, ma mère a fait <strong>en</strong> sorte <strong>de</strong> laconserver…Aujourd’hui, bi<strong>en</strong> que je ne compr<strong>en</strong>ne pas toujours le comm<strong>en</strong>t ni le pourquoi,je suis persuadée que le cours <strong>de</strong> ma vie s’est décidé à partir <strong>de</strong> cemom<strong>en</strong>t-là.113


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>l’o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>fance…tes yeux sur moi me bor<strong>de</strong>ntd’amour anxieuxgris-bleu <strong>de</strong> ciel nébuleuxsouv<strong>en</strong>irs d’avant l’âgerésister à la mortses yeux marronqui cherch<strong>en</strong>t l’air pour moiinspirer, expireravant l’âge <strong>de</strong> se souv<strong>en</strong>irQu’aurais-je à dire <strong>de</strong> moi-même ? Ri<strong>en</strong>, sinon que je suis, comme bi<strong>en</strong>d’autres, « une survivante », tout, puisque je dois toujours fournir un effortgargantuesque pour m’exprimer. Ri<strong>en</strong>, sinon qu’il me semble que ce mur<strong>en</strong>tre moi et les autres est toujours aussi difficile à traverser, tout, car « jamais<strong>de</strong>ux sans trois », c’est ce qu’avait dû se dire mon père après m’avoir arrachéeà la mort à la troisième t<strong>en</strong>tative.Ri<strong>en</strong>, sinon que le troisième acci<strong>de</strong>nt vasculaire cérébral (AVC) s’est souv<strong>en</strong>u<strong>de</strong> cette expression…!La première fois que j’ai été touchée, j’étais si étourdie que je me t<strong>en</strong>ais lelong <strong>de</strong>s murs pour me déplacer et je ne dormais qu’avec un bras ou unejambe qui p<strong>en</strong>dait du lit. Toutefois, bi<strong>en</strong>tôt on n’<strong>en</strong> parla <strong>plus</strong>, car quelquesmois <strong>plus</strong> tard, je semblais remise. Acci<strong>de</strong>nt mineur, tellem<strong>en</strong>t qu’il est passéinaperçu dans mon <strong>histoire</strong> médicale. J’avais alors 29 ans, c’était mon premieravertissem<strong>en</strong>t…Après quelque temps, p<strong>en</strong>dant lequel il se passa beaucoup <strong>de</strong> choses (undivorce déchirant, <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, r<strong>en</strong>contres avec un psy, travail, ai<strong>de</strong> sociale,etc.), j’<strong>en</strong>trai à l’Université du Québec à Chicoutimi. En 1996, je terminaimon baccalauréat <strong>en</strong> <strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du français. C’est à ce mom<strong>en</strong>t que j’eusmon second AVC : le 27 décembre, quatorze jours après avoir terminé monbac.Cette fois, j’ai perdu tous mes repères et mes efforts fur<strong>en</strong>t vains pour merelever après ma chute. Le TACO a révélé une lésion aiguë à gauche, accompagnée<strong>de</strong> la cicatrice qu’avait laissée mon « anci<strong>en</strong> AVC » au cervelet gauche.Dire que j’ai eu longtemps <strong>de</strong>s problèmes d’équilibre ne me semble pasexagéré. Avertissem<strong>en</strong>t numéro <strong>de</strong>ux.114


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Cep<strong>en</strong>dant, c’est ma psychose, effet secondaire <strong>de</strong> l’AVC, pour laquelle j’ai<strong>en</strong>core été hospitalisée <strong>de</strong>ux mois <strong>de</strong> <strong>plus</strong>, qui a laissé une blessure indélébileà ma fille et bi<strong>en</strong> sûr à moi-même…La télé me regar<strong>de</strong>je dois être sag<strong>en</strong>e pas parlerne pas bouger inutilem<strong>en</strong>tje dois sortir d’icisans qu’elle ne s’<strong>en</strong> aperçoivesans qu’ils ne s’<strong>en</strong> aperçoiv<strong>en</strong>til y a une porte secrète dans l’autre piècemais je ne l’ai pas <strong>en</strong>core trouvéeil y a plein <strong>de</strong> passages secrets icije le sais, ils n’ont pas <strong>en</strong>core compris que je saismais je sais partir sans que l’œil <strong>de</strong> la télé ne me voieil suffit que je sois abs<strong>en</strong>te quelque tempsà sa droitepour qu’elle m’oubliemais je dois ramper sous son œil pour m’<strong>en</strong>fuirne ri<strong>en</strong> laisser dépasser, pas même un cheveurev<strong>en</strong>ir pour vérifier si la porte secrète est réapparu<strong>en</strong>on, toujours ri<strong>en</strong>je l’ai vue une fois, pourtantil me reste la salle <strong>de</strong> bainle commutateur me fait changer d’étagec’est un asc<strong>en</strong>seurpour la libertépourtant,je ne sais où je me trouve <strong>en</strong>suiteje marche et je marche <strong>de</strong>s heures durant sans trouver ma chambrec’est vrai ! j’ai changé d’étagemais pourquoi y a-t-il <strong>en</strong>core une baie vitréepourquoi n’y a-t-il pas <strong>de</strong> porte <strong>de</strong> sortie ?115


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>il y a un chemin assez complexe, <strong>de</strong> la pièce du fumoir à la salle <strong>de</strong> bain,à une <strong>de</strong>s chambres du bout, pour rev<strong>en</strong>ir vers le fumoirmais je manque <strong>de</strong> vitessesi j’étais <strong>plus</strong> rapi<strong>de</strong>on ne me verrait paset je pourrais passer <strong>de</strong> l’autre côté…je pourrais m’<strong>en</strong>fuir…mais je marche, je marche <strong>de</strong>s heures durant sans trouver ma chambre.Je ne parlerai pas beaucoup <strong>de</strong> ma troisième expéri<strong>en</strong>ce (2006-2007), sansdoute parce que les mots étai<strong>en</strong>t alors rares : physiothérapie, ergothérapie,psychoneurologie et orthophonie étai<strong>en</strong>t au r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous pour me sout<strong>en</strong>ir.À dix ans d’intervalle, 1986, 1996 et 2006 fur<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s années charnières<strong>en</strong>tre le début et la fin d’une étape. C’est ainsi que j’ai comm<strong>en</strong>cé une<strong>de</strong>uxième vie, le premier janvier 2007, après que mon hémorragie cérébraleimpossible à opérer m’ait laissé beaucoup moins <strong>de</strong> mots…Laissez-moi me cacher <strong>de</strong>rrière ces mots imprononçablescette gêne audible qui déchire vos tympansle fond <strong>de</strong> ma peine ne trouve pas mes larmesne me parlez pas !je serais t<strong>en</strong>tée <strong>de</strong> vous répondreet vous seriez obligés d’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>drece ne sera pas moiaujourd’hui, je ne suis ri<strong>en</strong>ri<strong>en</strong> qu’un effort gargantuesquepour prononcer ces mots que je ne dis pasne m’écoutez pasvous pourriez avoir pitiéoubliez-moi, parlez que je vous écouteque j’<strong>en</strong>t<strong>en</strong><strong>de</strong> cette musiquechaque mot, un mouvem<strong>en</strong>tchaque phrase, une symphonieque je ne jouerai <strong>plus</strong>je suis discordante.116


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Aujourd’hui, après avoir <strong>en</strong>seigné à Québec à l’éducation <strong>de</strong>s adultes auxc<strong>en</strong>tres Saint-Louis et Louis-Jolliet, il me reste <strong>en</strong>core le goût <strong>de</strong> vivre, celui<strong>de</strong> communiquer ce que je p<strong>en</strong>se, ce que je suis. Je me suis remise à l’écriture,malgré ma « légère aphasie », et c’est elle qui m’ai<strong>de</strong> <strong>en</strong>core chaquejour à « Résister »…Chantal Racine, Intégration socialeC<strong>en</strong>tre Louis-Jolliet (Québec), CS <strong>de</strong> la CapitaleEnseignante : Diane Demers, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Québec37. Mon <strong>plus</strong> beau souv<strong>en</strong>ir !Je me souvi<strong>en</strong>s quand je l’ai r<strong>en</strong>contrée. <strong>Ma</strong> vie était remplie <strong>de</strong> tourm<strong>en</strong>ts,j’étais écrasé sous le poids <strong>de</strong> ma survie. Mon âme déchirée, <strong>en</strong> recherche<strong>de</strong> moi, mon être sanguinol<strong>en</strong>t du combat que j’avais m<strong>en</strong>é pour vivre.J’étais jeune, j’étais frustré, je trouvais la vie morne et sombre, j’étais commeune ombre, je voulais passer inaperçu.Je l’ai vue ; je l’ai remarquée ; elle était <strong>belle</strong> !Elle dégageait… C’était trop… C’était inaccessible !Elle a t<strong>en</strong>té <strong>de</strong> m’approcher, je l’ai ignorée, je me suis donné <strong>de</strong> grands airs,j’étais intouchable. Elle s’est cont<strong>en</strong>tée <strong>de</strong> m’observer, me glissant un mot <strong>de</strong>temps à autre.J’écrivais beaucoup <strong>en</strong> ces temps-là, je lançais mes émotions sur le papier,j’écrivais tout ce que je p<strong>en</strong>sais ; je ress<strong>en</strong>tais. Elle, elle voulait me lire ; audébut, j’ai refusé, c’était mon intimité. Tranquillem<strong>en</strong>t, doucem<strong>en</strong>t, elle acomm<strong>en</strong>cé à m’apprivoiser.Je l’observais, cette petite madame.Belle, trop <strong>belle</strong> !J’ai <strong>en</strong>core ton image imprégnée dans mon être ; comme au fer, je suis marqué<strong>de</strong> toi !Je la regardais, je la caressais du regard, je remarquais tout <strong>de</strong> sa personne.Elle s’assoyait <strong>de</strong>vant moi, me parlant, je l’écoutais, je buvais ses paroles,elle avait toute mon att<strong>en</strong>tion.Elle passait près <strong>de</strong> moi, elle me frôlait, je la s<strong>en</strong>tais ; toutes ces petites att<strong>en</strong>tionsont comm<strong>en</strong>cé à ouvrir une brèche <strong>en</strong> moi.Cette petite dame <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ait gran<strong>de</strong> dans mon cœur.117


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>La regar<strong>de</strong>r me remplissait <strong>de</strong> ravissem<strong>en</strong>t.Elle était <strong>belle</strong>… trop <strong>belle</strong>… elle était trop bi<strong>en</strong> pour moi.Son âme était scintillante ; son cœur plein d’amour voulait être partagé.Et moi, j’étais farouche, indomptable.Elle disait qu’elle recherchait quelque chose dans mes yeux noirs comme <strong>de</strong>l’<strong>en</strong>cre, qu’elle savait que quelque chose était là, qu’elle allait le trouver.J’étais piégé, désarçonné ; elle me t<strong>en</strong>ait.J’étais sous son emprise ; j’étais épris.L’amour m’a frappé, m’a bouleversé, m’a déstabilisé.J’ai voulu me r<strong>en</strong>fermer, m’isoler.J’avais peur.Aimer ? Être aimé ?Non ! Personne ne me toucherait.Personne ne ti<strong>en</strong>drait une parcelle <strong>de</strong> moi.Je me souvi<strong>en</strong>s, un jour, je voulais lui dire l’ét<strong>en</strong>due <strong>de</strong> mes émotions…Elle m’a regardé.Elle était craintive.Elle craignait que je la veuille ;Elle craignait que je ne la veuille pas ;J’ai <strong>en</strong>core son visage <strong>en</strong> mémoire, je voulais tellem<strong>en</strong>t la toucher, l’approcher,la caresser, l’embrasser ; et elle, elle me regardait <strong>de</strong> ses yeuxsuppliants.Je suis parti.Elle, elle n’a pas lâché ; elle est v<strong>en</strong>ue jusqu’à moi.Elle m’a visité dans ma vie, dans mes rêves !Nous nous sommes apprivoisés au téléphone, j’aimais l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre, j’adoraisl’écouter, j’avais grand besoin <strong>de</strong> sa prés<strong>en</strong>ce.Un jour, je me suis risqué : je l’ai appelée pour lui dire que « je l’aimais »…son sil<strong>en</strong>ce m’a torturé ; elle m’a dit qu’elle aussi m’aimait.J’étais bouleversé, mon âme à nu, mon cœur débordant…J’étais perdu, je ne savais pas… Comm<strong>en</strong>t faire ?.. Quoi faire ?..J’étais déstabilisé par cette dame m<strong>en</strong>ue qui avait pris grand’ place dans moncœur.118


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> passion !Ivresse émotionnelle !Souv<strong>en</strong>irs merveilleux !Voilà comm<strong>en</strong>t je me souvi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> toi, ma petite Ève.Je p<strong>en</strong>se <strong>en</strong>core à toi.Tu es mon <strong>plus</strong> beau souv<strong>en</strong>ir !!!Joël Flageole, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse (Drummondville), CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignant : Eric Boucher, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville38. L’élueSur une terre lointaine, aux confins d’un mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis longtemps oublié<strong>de</strong>s humains que nous sommes, une vieille femme traînait ses pas vers unsite mystique et sacré.Elle v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> loin et doutait <strong>de</strong> pouvoir se r<strong>en</strong>dre à <strong>de</strong>stination. Cettefemme, qui était née sorcière, <strong>de</strong>vait braver le froid et l’épaisse couche <strong>de</strong>neige qui couvrait le dos <strong>de</strong> la montagne pour atteindre le site, malgré sonâge avancé <strong>de</strong> tric<strong>en</strong>t<strong>en</strong>aire.Elle avait quitté son refuge sur l’un <strong>de</strong>s monts <strong>en</strong>sorcelés pour faire cevoyage. <strong>Ma</strong>is elle savait qu’elle ne revi<strong>en</strong>drait pas dans ce lieu où elle avaitvécu tant <strong>de</strong> choses. La sorcière qui se nommait Sireina était consci<strong>en</strong>te quec’était son <strong>de</strong>rnier voyage.Elle avait apporté, dans un sac <strong>en</strong> bandoulière, les objets qu’elle souhaitaitemporter vers l’autre mon<strong>de</strong> pour que seule une élue puisse y accé<strong>de</strong>r si elleétait découverte. Sireina ne croyait pas que cela fût probable, elle ne croyaitmême pas qu’il puisse rester une élue disponible dans ce mon<strong>de</strong> oublié.Sireina l’aurait s<strong>en</strong>ti <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s lunes grâce à ses pouvoirs, à moins que cetteélue ne provi<strong>en</strong>ne <strong>de</strong> la lignée maudite, ce qui changerait tout. Sireinan’aimait pas trop cette idée avec tout ce qu’elle impliquait.Les nuages s’amoncelai<strong>en</strong>t au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> sa tête laissant présager une nouvelletempête qui l’empêcherait <strong>de</strong> réussir. Elle t<strong>en</strong>ta <strong>de</strong> continuer malgré la120


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>fatigue, mais était bi<strong>en</strong> incapable d’accélérer vu son âge avancé. Elle s<strong>en</strong>taitbi<strong>en</strong> que même sa magie semblait la quitter. <strong>Ma</strong>is Sireina ne lâchait pas, ellecontinua malgré les repères d’autrefois qui avai<strong>en</strong>t disparu. Cette femme<strong>de</strong>vait rejoindre le site où elle avait laissé une amulette dans sa jeunesse.Celle-ci l’attirait et la poussait sur ses jambes malgré la neige.<strong>Ma</strong>is la tempête approcha rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t, Sireina vit <strong>de</strong>s flocons qui se mir<strong>en</strong>tà tomber doucem<strong>en</strong>t. Ils ne tardèr<strong>en</strong>t pas à se faire <strong>plus</strong> <strong>de</strong>nses, brouillantsa vision ! Sireina maudit intérieurem<strong>en</strong>t les élém<strong>en</strong>ts qui semblai<strong>en</strong>t l’empêcher<strong>de</strong> réussir son périple, elle se disait que jamais les dieux <strong>de</strong> ses ancêtresne lui refuserai<strong>en</strong>t la possibilité d’au moins prés<strong>en</strong>ter sa requête ausanctuaire.Après une longue vie passée à déf<strong>en</strong>dre un mon<strong>de</strong> auquel presque personn<strong>en</strong>e croyait, Sireina croyait à l’immortalité du savoir <strong>de</strong>s ancêtres, mais pourcontinuer cette connaissance, il fallait une <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dante à ses côtés.<strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, Sireina était stérile, les dieux ne pouvai<strong>en</strong>t ignorer cela.Elle se força à chasser ces p<strong>en</strong>sées le temps <strong>de</strong> se repérer. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t,Sireina ne voyait ri<strong>en</strong> à <strong>de</strong>s mètres et <strong>de</strong>s mètres à la ron<strong>de</strong>, elle savait qu’ellepouvait se fier à son instinct et à son s<strong>en</strong>s inné <strong>de</strong> l’ori<strong>en</strong>tation. C’était undon qu’elle avait reçu <strong>en</strong> même temps que les autres pouvoirs qui avai<strong>en</strong>tfait d’elle une sorcière.Sireina s’<strong>en</strong>fonça <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> dans la noirceur <strong>de</strong> la nuit. Espérant ser<strong>en</strong>dre à la grotte, elle continua <strong>de</strong> braver la neige et le v<strong>en</strong>t qui la frappai<strong>en</strong>t<strong>en</strong> s<strong>en</strong>s contraire.Au loin, Sireina vit la grotte qui lui paraissait comme une ombre, elle fournitun effort ultime pour atteindre l’<strong>en</strong>trée <strong>de</strong> celle-ci, y <strong>en</strong>tra et tomba à g<strong>en</strong>oux<strong>en</strong> s’avouant vaincue par la fatigue et le froid.Incapable d’allumer un feu, elle tomba sur le côté et s’<strong>en</strong>dormit. Sans feupour la réchauffer, Sireina n’avait aucune chance <strong>de</strong> passer la nuit malgrétous ses efforts.La tempête fit rage toute la nuit bloquant ainsi l’<strong>en</strong>trée <strong>de</strong> la grotte. À l’aube,Sireina se réveilla grâce aux lueurs du soleil qui transpercèr<strong>en</strong>t la finecouche <strong>de</strong> neige <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>trée.Elle ouvrit les yeux et aperçut une ombre qui se t<strong>en</strong>ait <strong>de</strong>bout auprès d’elle.121


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>L’ombre qui la regardait était, bi<strong>en</strong> sûr, celle d’un anci<strong>en</strong>. Sireina était tropfaible pour se lever, alors l’ombre la regarda et se p<strong>en</strong>cha vers elle. Il sortitl’amulette que Sireina avait laissée <strong>plus</strong>ieurs années auparavant. Sireina pritl’amulette dans sa main et s<strong>en</strong>tit l’énergie qui v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> celle-ci. Elle se levaet p<strong>en</strong>cha la tête <strong>en</strong> remerciant l’ombre <strong>de</strong> l’avoir sauvée. L’ombre disparutaussi vite qu’elle était v<strong>en</strong>ue.Sireina alluma un feu et vit l’<strong>en</strong>trée au fond <strong>de</strong> la grotte qui m<strong>en</strong>ait au sanctuairepour faire le rituel. Elle <strong>en</strong>tra, émerveillée <strong>de</strong> voir comme tout étaitmajestueux, il y avait un ruisseau qui coulait, l’eau était tellem<strong>en</strong>t pure.Sireina comm<strong>en</strong>ça à se préparer pour le rituel, elle se dévêtit <strong>de</strong> ses loqueset sortit d’une escarcelle une soutane d’un rouge étincelant qu’elle mit.Elle avança vers la vasque sacrée posée sur un socle. Elle prit <strong>en</strong>suite le seauqui était près <strong>de</strong> celle-ci et le remplit avec l’eau du ruisseau.Sireina versa l’eau dans la vasque, ouvrit le livre <strong>de</strong>s sacrifices et comm<strong>en</strong>çaà murmurer l’incantation. Après avoir lu la première partie, Sireina aperçutla déesse <strong>de</strong>s dieux dans l’eau du bassin, elle joignit les mains et fit sa<strong>de</strong>man<strong>de</strong>, Sireina souhaitait qu’il y ait une élue pour elle.La déesse répondit :« Sireina, il reste une élue, mais celle-ci fait partie <strong>de</strong> la lignée maudite. Parcontre cette élue est très différ<strong>en</strong>te, même si elle fait partie <strong>de</strong> cette lignée. »Sireina fut soulagée, alors la déesse fit apparaître le visage <strong>de</strong> l’élue dansl’eau <strong>de</strong> la vasque sacrée, elle lui dit alors :« Seule cette élue pourra poursuivre ton parcours et se servir <strong>de</strong> tespouvoirs. »<strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, pour que l’élue puisse poursuivre le chemin <strong>de</strong> Sireina,celle-ci <strong>de</strong>vait se sacrifier. Alors, elle sortit la dague qu’elle avait si bi<strong>en</strong>protégée durant toutes ces années et la déposa sur la vasque sacrée.Elle dit les paroles du livre à haute voix, elle prit la dague, la mit sur sapoitrine.En disant les <strong>de</strong>rnières paroles, elle <strong>en</strong>fonça soli<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t la dague qui luitransperça le coeur.Sireina tomba sur le signe qui avait été gravé sous ses pieds. Son sang remplitle signe qui permit le transfert à l’élue. La déesse apparut dans le sanctuaireet <strong>en</strong>veloppa le corps <strong>de</strong> Sireina dans d’imm<strong>en</strong>ses feuilles sacrées <strong>de</strong> couleurverdâtre. Elle prit la dague qui était pour l’élue et disparut avec Sireina dansun petit nuage blanc.122


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>La déesse tint parole et donna les pouvoirs <strong>de</strong> Sireina à l’élue ainsi que ladague, pour qu’à son tour, le jour v<strong>en</strong>u, elle puisse aussi continuer la lignéesi convoitée...Michel Allard, PrésecondaireC<strong>en</strong>tre Ste-Thérèse (Drummondville), CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignante : Christiane Beaulieu, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville39.A. InébranlableIl y a 3 ans, alors que j’étais confortablem<strong>en</strong>t assise sur mon sofa à relaxerd’une journée très chargée, le téléphone se mit à sonner. Vous savez, cesmom<strong>en</strong>ts où l’on se s<strong>en</strong>t si paisible et <strong>en</strong> parfaite harmonie avec soi-même.Café à la main, o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> printemps et <strong>belle</strong> vue sur la rivière, <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>tsqui, selon moi, ne sont jamais assez longs. Et bi<strong>en</strong> cette fois, j’aurais aiméqu’il soit le <strong>de</strong>rnier, un repos éternel.Avoir <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants, c’est le bonheur qu’un par<strong>en</strong>t ne peut décrire tellem<strong>en</strong>t les<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t est beau, magique et facile. Seulem<strong>en</strong>t, avoir <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants impliqueaussi inquiétu<strong>de</strong>, peur et parfois, souffrance. Je pourrais facilem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> vouloirà ce chauffard qui a frappé <strong>de</strong> plein fouet mon bébé <strong>de</strong> 8 ans. Et si j’étaisfolle, j’<strong>en</strong> voudrais même à ce téléphone qui est l’intermédiaire <strong>de</strong> cettetriste et déchirante nouvelle. Ce soir-là, aucune rage ne s’est manifestée <strong>en</strong>moi après avoir raccroché le combiné. De la tristesse, énormém<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tristesseet une peur qui me semblait insurmontable. Je <strong>de</strong>vais me r<strong>en</strong>dre àl’hôpital Sainte-Croix <strong>de</strong> Drummondville, mais je m’<strong>en</strong> s<strong>en</strong>tais incapable.Cette difficulté à respirer et ces frissons <strong>de</strong> crainte m’avai<strong>en</strong>t tellem<strong>en</strong>t déstabiliséequ’une <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> mourir effleura mon esprit. J’étais quand mêmeconsci<strong>en</strong>te que cette idée était inconcevable et je repris tranquillem<strong>en</strong>t lecontrôle. Je me regardai dans le miroir et fis disparaître cette peur <strong>de</strong>rrièrequelques couches <strong>de</strong> maquillage. Émotionnellem<strong>en</strong>t, j’étais totalem<strong>en</strong>tdémolie, mais physiquem<strong>en</strong>t, tout semblait bi<strong>en</strong> aller, alors je me dirigeaivers l’hôpital.Dans la voiture, <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>ux lieux, on ne peut ri<strong>en</strong> faire, sinon p<strong>en</strong>ser.J’avançai vers l’hôpital et <strong>plus</strong> j’avançais, <strong>plus</strong> je me s<strong>en</strong>tais reculer. J’avaispeur <strong>de</strong> l’av<strong>en</strong>ir et les gros sanglots refir<strong>en</strong>t surface. En me regardant dans le123


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>miroir, je vis bi<strong>en</strong> que cette grosse bouffonnerie n’avait aucun s<strong>en</strong>s. Je nepouvais cacher cette peur qui me terrorisait et j’étais <strong>en</strong>core pire à voirdémaquillée. Je replaçai le miroir vite fait, sans m’assurer qu’il puisse meservir à regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>rrière. De toute façon, <strong>en</strong> constatant mon état, j’ai eul’idée <strong>de</strong> ne <strong>plus</strong> jamais regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong>rrière, d’affronter mon <strong>de</strong>stin et celui <strong>de</strong>ma fille.À l’arrivée, quand je mis le pied à l’intérieur, cette o<strong>de</strong>ur que je déteste medonna <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> vomir. Cette peur refit surface et tous les regards que les g<strong>en</strong>sme lancèr<strong>en</strong>t me fir<strong>en</strong>t compr<strong>en</strong>dre que je n’étais pas <strong>belle</strong> à voir. Quandj’<strong>en</strong>trai dans la chambre <strong>de</strong>s soins int<strong>en</strong>sifs où ma petite Mylène se trouvait,j’eus une énorme boule dans la gorge. Elle était dans son lit. Petite, inoff<strong>en</strong>siveet intubée <strong>de</strong> partout. Je versai une larme quand je lui serrai une <strong>de</strong> sestoutes petites mains. À ce mom<strong>en</strong>t, j’aurais eu <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre me direque tout allait bi<strong>en</strong>, mais elle était dans un coma profond, <strong>en</strong>tre la vie et lamort. Dans cette situation, mon cœur <strong>de</strong> maman n’était <strong>plus</strong> triste, maisprofondém<strong>en</strong>t perdu. Cette <strong>en</strong>fant, c’était ma raison <strong>de</strong> vivre et mon uniquebonheur. Une école <strong>de</strong> sagesse à elle seule, où j’étais sa seule élève. Je meremémorai tous ces beaux instants où nous nous étions chicanées, où nousavions pleuré et ri <strong>en</strong>semble. J’avais <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> revivre ces instants au moinsune seule fois et même pour une dispute, j’aurais tout donné.Au bout <strong>de</strong> 2 semaines, mon bébé sortit <strong>de</strong> son coma. J’ai eu une impressionqu’un cauchemar se continuait, quand le mé<strong>de</strong>cin nous annonça queMylène serait paraplégique. J’étais dévastée pour elle qui était calme face àcette triste nouvelle. Il lui expliqua comm<strong>en</strong>t sa nouvelle vie allait se dérouler,mais pour moi, qui étais incompréh<strong>en</strong>sive face à cette situation, le bourdonnem<strong>en</strong>tdans mes oreilles m’empêcha d’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre son discours. Je ne fisque regar<strong>de</strong>r les yeux courageux <strong>de</strong> ma fille qui l’écoutait att<strong>en</strong>tivem<strong>en</strong>t. Ellevit bi<strong>en</strong> la détresse dans mes sanglots et m’<strong>en</strong>voya <strong>de</strong>s sourires et <strong>de</strong>s clinsd’œil pour me rassurer. Elle finit par <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong> nous laisserseules et, avec le courage d’une lionne, elle me dit dans ses mots : « Tu sais,maman, la vie est fragile et je suis pour toi une preuve vivante. Je ne suis pasmorte à ce que je sache ! Et ces jambes... je n’<strong>en</strong> avais pas vraim<strong>en</strong>t <strong>de</strong>besoin ». Avec ce petit sourire qui m’étonnera toujours, elle ne put s’empêcher<strong>de</strong> rire <strong>de</strong>vant la tragédie. J’<strong>en</strong>vie cette façon qu’elle a <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre toutavec un grain <strong>de</strong> sel. Et, toujours avec ce petit sourire, elle me dit : « Net’inquiète pas maman, on va continuer à se chicaner ! ». Comme si elle avait<strong>en</strong>t<strong>en</strong>du mes confessions durant son coma.124


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Depuis, ma fille est toujours une petite étoile <strong>de</strong> bonheur. Elle fait énormém<strong>en</strong>td’efforts <strong>en</strong> physiothérapie et tous les mé<strong>de</strong>cins qui la suiv<strong>en</strong>t sontstupéfaits <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong> son état <strong>de</strong> santé. Elle me fait tellem<strong>en</strong>t grandiret son positivisme m’impressionne <strong>de</strong> jour <strong>en</strong> jour. Elle est pour moi unexemple <strong>de</strong> courage et <strong>de</strong> persévérance. Mylène, ma seule et unique fille,l’amour <strong>de</strong> ma vie, je serai toujours ta <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong> admiratrice.Ta mère qui t’adore<strong>Ma</strong>thieu Desjardins, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse (Drummondville), CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignant : Pierre Lavigne, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville39.B. Parmi tant d’<strong>histoire</strong>s, il y a moiParfois, on me juge trop vite, avant même <strong>de</strong> me connaître vraim<strong>en</strong>t. Quandça se produit, je reste muet, comme toujours, sans cacher ma déception.Imaginez-vous faisant tout pour plaire à quelqu’un et que cette personne nedaigne vous remarquer, vous seriez probablem<strong>en</strong>t triste. <strong>Ma</strong>man, elle, p<strong>en</strong>seque dans la vie, il faut laisser au temps le temps <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> faire les choses. Cequ’elle veut dire par là, c’est que je suis trop pressé et que les g<strong>en</strong>s vont euxmêmesappr<strong>en</strong>dre à me connaître et naturellem<strong>en</strong>t m’aimer, comme tout lemon<strong>de</strong> <strong>en</strong> général. Je suis comme je suis et par conséqu<strong>en</strong>t, je ne pourraischanger.OK ! Bi<strong>en</strong> sûr, je pourrais peut-être changer, mais il est clair que j’auraisbesoin <strong>de</strong> quelqu’un et que cette personne ne serait certainem<strong>en</strong>t pas cellequi m’a mis au mon<strong>de</strong>. Elle dirait plutôt : « Tu dois rester fidèle à toi-même ».De toute façon, je lui dois la vie, donc toutes mes qualités et tous mesdéfauts. Cette femme qui m’a mis au mon<strong>de</strong>, Mélanie, est très fière <strong>de</strong> moi.Bi<strong>en</strong> sûr, je suis son premier, alors je crois que je suis aussi son préféré.Chère Mélanie, je suis consci<strong>en</strong>t que je te dois la vie, mais aussi ce tal<strong>en</strong>tque j’ai d’émouvoir et <strong>de</strong> faire rire les g<strong>en</strong>s. Tous ceux qui me connaiss<strong>en</strong>tvraim<strong>en</strong>t sav<strong>en</strong>t que je suis touchant et drôle. Certains ont même versé unelarme par ma faute, mais ce n’est pas parce que je suis cruel, c’est plutôt lecontraire, du moins je l’espère. Selon moi, je suis v<strong>en</strong>u au mon<strong>de</strong> pour <strong>de</strong>uxraisons bi<strong>en</strong> simples : provoquer les g<strong>en</strong>s pour qu’ils réagiss<strong>en</strong>t et pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t125


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>consci<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> leur vie, aussi, pouvoir <strong>en</strong> toucher une <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong> majoritépossible. Je veux vraim<strong>en</strong>t <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir populaire, pour que tous les êtres <strong>de</strong> laterre et au-<strong>de</strong>là, se souvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> moi dans <strong>de</strong>s milliers d’années. Qui saitsi nous sommes seuls dans l’univers ? À la base, tout ça n’était qu’un rêveque je caressais <strong>de</strong>puis ma naissance. Ah ! <strong>Ma</strong> naissance, c’est fou commele temps passe vite. De prime abord, c’était la suggestion <strong>de</strong> mon père. Il <strong>en</strong>avait parlé à ma mère qui était un peu rétic<strong>en</strong>te à l’idée, mais après quelquesjours, elle avait vite changé d’opinion. Elle s’était rappelé ce rêve qu’elleavait toujours voulu réaliser et avait décidé <strong>de</strong> foncer. Tout avait été mis <strong>en</strong>marche et je vis le jour quelques mois <strong>plus</strong> tard. Même si c’était son idée,papa était parti avant même que je voie le jour. Je ne pourrais dire si je compr<strong>en</strong>ds,mais maman était tellem<strong>en</strong>t préoccupée qu’elle a mis <strong>de</strong> côté sa vie<strong>de</strong> couple pour moi.Elle est comme ça Mélanie, extrémiste à ses heures. La preuve, elle passeson temps à me vanter à qui veut bi<strong>en</strong> l’écouter, car ses amis eux, sont las<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre. Moi, ça ne me gêne pas du tout et, même si ça pourrait, jeserais trop imbu pour que ça effleure mon esprit. Si je suis un peu commeelle ? Non ! Je suis carrém<strong>en</strong>t son sosie ! Mélanie m’a tricoté à son image <strong>en</strong>me léguant un <strong>de</strong> ses pires défauts, son côté imbu. Cette partie <strong>de</strong> moi esttrès prés<strong>en</strong>te, car selon moi, je suis Dieu à une seule exception, je ne suispas partout. En fait, je suis son préféré, parmi tous ses romans, je suis lepremier.<strong>Ma</strong>thieu Desjardins, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse(Drummondville), CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignante : Carole Par<strong>en</strong>teau, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t<strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville40. Si j’avais <strong>de</strong>s ailes, je pourrais volerDans la vie, s’il faut avoir <strong>de</strong>s rêves, il faut quand même que ceux-ci soi<strong>en</strong>tréalistes et réalisables. Je ne suis pas superstitieux, mais je crois que ri<strong>en</strong>n’arrive pour ri<strong>en</strong>. Chaque personne qui <strong>en</strong>tre ou sort <strong>de</strong> ta vie n’est pas lefruit du hasard. Que ce soit une bonne ou une mauvaise fréqu<strong>en</strong>tation, on<strong>en</strong> sort toujours grandi. Si cette fréqu<strong>en</strong>tation nous a fait du mal <strong>de</strong> quelquemanière que ce soit, on grandit, car, à l’av<strong>en</strong>ir, on ne laissera <strong>plus</strong> <strong>de</strong>s personnesdu même g<strong>en</strong>re nous affecter. Att<strong>en</strong>tion, à nous <strong>de</strong> nous arranger126


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>pour que la même chose ne se produise pas <strong>de</strong>ux fois. Nous ne sommes pasresponsables <strong>de</strong>s personnes qu’on r<strong>en</strong>contre, mais à nous <strong>de</strong> choisir si on leslaisse <strong>en</strong>trer dans notre vie.On récolte ce qu’on a semé, <strong>plus</strong>ieurs personnes dis<strong>en</strong>t cette phrase, moi jep<strong>en</strong>se plutôt qu’on peut changer les sem<strong>en</strong>ces à tout mom<strong>en</strong>t. Le passé necompte pas, c’est le mom<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>t qui compte et qui déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> qui on est.Pourquoi déprimer sur les erreurs du passé ? Agis pour que le mom<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tchange la minute qui vi<strong>en</strong>t. Beaucoup <strong>de</strong> g<strong>en</strong>s se dis<strong>en</strong>t : « Si j’avais agidifféremm<strong>en</strong>t, sûrem<strong>en</strong>t aujourd’hui serait différ<strong>en</strong>t ». Arrête <strong>de</strong> rêver que tuas <strong>de</strong>s ailes, ce sont <strong>de</strong>s p<strong>en</strong>sées antérieures qui se transform<strong>en</strong>t <strong>en</strong> rêves etqui vous dis<strong>en</strong>t que votre vie serait différ<strong>en</strong>te aujourd’hui.J’ai lâché l’école à l’âge <strong>de</strong> 16 ans, je suis parti <strong>de</strong> la Gaspésie à l’âge <strong>de</strong>17 ans et je suis parti pour Montréal, j’ai comm<strong>en</strong>cé à travailler et à me faireune place dans la société. Avril 2012, alors que mon âge avait doublé, jefaisais comme la plupart <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s, je rêvais à ce qu’aurait été ma vie sij’avais continué l’école <strong>plus</strong> longtemps et que j’avais appris un métier.Considéré comme un bon travaillant par mes anci<strong>en</strong>s employeurs et commeune personne qui appr<strong>en</strong>d vite, je me disais que j’aurais sûrem<strong>en</strong>t étéquelqu’un <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>. Je crois que je suis quelqu’un <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>, <strong>en</strong> tout cas pourcertaines personnes. Pour les autres, elles n’ont pas <strong>de</strong> place dans ma vie.J’ai une blon<strong>de</strong> que j’aime <strong>de</strong>puis 12 ans, j’ai <strong>de</strong>ux magnifiques petites fillesque j’adore et qui ne manqu<strong>en</strong>t <strong>de</strong> ri<strong>en</strong>. Je trouvais quand même le moy<strong>en</strong><strong>de</strong> me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comm<strong>en</strong>t je serais si je n’avais pas lâché l’école. Je me suisdit peut-être que je n’aurais pas r<strong>en</strong>contré ma blon<strong>de</strong> ou peut-être que j<strong>en</strong>’aurais pas d’<strong>en</strong>fants, mais ce sont toutes <strong>de</strong>s possibilités. La seule chosequi soit sûre, c’est que j’ai r<strong>en</strong>contré ma blon<strong>de</strong> pour avoir <strong>de</strong>ux merveilleusespetites filles et que, toutes les trois, elles sont la prunelle <strong>de</strong> mes yeux. Alors,j’ai décidé <strong>de</strong> retourner aux étu<strong>de</strong>s pour elles, mais aussi pour moi et pourque, <strong>plus</strong> tard, elles se dis<strong>en</strong>t peut-être : « Mon papa est quelqu’un <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>. »Au lieu <strong>de</strong> rester assis, à rêver <strong>de</strong> la vie que j’aurais maint<strong>en</strong>ant, je me suisdit : « Agis ». Étrangem<strong>en</strong>t, si j’ai agi ainsi, c’est grâce aux oiseaux, ils ne secont<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comm<strong>en</strong>t aurait été leur vie s’ils avai<strong>en</strong>t réagi<strong>plus</strong> vite. Si tu les approches trop, ils écout<strong>en</strong>t leur instinct et s’<strong>en</strong>vol<strong>en</strong>t.Pourquoi toujours trop se questionner pour ri<strong>en</strong> ? Après, on regrette, ontombe dans nos p<strong>en</strong>sées et on rêve que ça aurait été sûrem<strong>en</strong>t mieux si onl’avait fait. Si vous avez <strong>de</strong>s projets, faites-les, écoutez votre instinct, ne vous127


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>cont<strong>en</strong>tez pas <strong>de</strong> rêver. Faites comme moi, agissez. Aujourd’hui, j’aimemieux regar<strong>de</strong>r les oiseaux voler que <strong>de</strong> rêver qu’un jour, j’aurais <strong>de</strong>s ailes.Paolo Quirion, 1 er cycleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> Cabano, CS du Fleuve-et-<strong>de</strong>s-LacsEnseignante : Charline Dubé, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Grand-Portage41. La bête <strong>en</strong> moiJamais <strong>de</strong> toute ma vie je n’aurais imaginé me r<strong>en</strong>dre jusque-là. Moi, Faolan,guerrier redoutable, chef <strong>de</strong> guerre <strong>de</strong> mon village, comm<strong>en</strong>t suis-je <strong>de</strong>v<strong>en</strong>usi faible <strong>de</strong> cœur et d’esprit ? Pourtant, j’<strong>en</strong> étais là, à marcher la tête basse,l’âme <strong>en</strong> souffrance et mon corps ne valant pas mieux. De terribles imagesme tourm<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t jours et nuits, Morphée ne m’emportait <strong>plus</strong> avec lui et lafatigue accumulée m’affaiblissait davantage. Dans le nord <strong>de</strong> l’Irlan<strong>de</strong>, laguerre faisait rage <strong>de</strong>puis quelque temps contre une tribu <strong>en</strong>nemie. Meshommes et moi avions réussi à décimer une bonne partie <strong>de</strong>s troupes adverses.<strong>Ma</strong>is une nuit, nous n’avons pas su être assez vigilants et le <strong>de</strong>stin nousdonna une leçon que ceux qui sont <strong>en</strong>core vivants aujourd’hui ne sont pasprêts d’oublier. Mon village s’est fait attaquer <strong>en</strong> un ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> temps, trop surpris,mes soldats n’ont pas eu le temps <strong>de</strong> réagir comme ils le <strong>de</strong>vai<strong>en</strong>t.<strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, j’<strong>en</strong> ai payé le prix moi aussi.Un soldat est <strong>en</strong>tré chez moi, où ma femme était cachée à l’abri <strong>de</strong> l’invasion.C’est ce que je croyais jusqu’au mom<strong>en</strong>t où je suis arrivé <strong>en</strong> trombedans ma maison et qu’un spectacle d’horreur s’offrit à mes yeux. Elle étaitlà, allongée par terre, peut-être s’était-elle évanouie, me suis-je dit. <strong>Ma</strong>is<strong>plus</strong> j’approchais et <strong>plus</strong> mon cœur savait la triste vérité qui frappait si durem<strong>en</strong>tà ma porte. Le l<strong>en</strong><strong>de</strong>main, les survivants <strong>en</strong>terrèr<strong>en</strong>t leurs <strong>en</strong>fants,par<strong>en</strong>ts et amis puis <strong>en</strong>semble remir<strong>en</strong>t le village sur pied. Par contre, j<strong>en</strong>’avais <strong>plus</strong> aucune raison d’être, <strong>plus</strong> aucun but n’avait d’importance sansle trésor <strong>de</strong> ma vie à mes côtés. Comm<strong>en</strong>t pourrais-je continuer sachant queje n’avais pas su protéger la femme que j’aimais ? Alors, voilà pourquoi j’erre<strong>en</strong> pleine nuit là où seule la pleine lune m’éclaire. Il faut tout d’abordcompr<strong>en</strong>dre que <strong>de</strong>puis ma t<strong>en</strong>dre <strong>en</strong>fance j’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais parler d’une malédictionsur une clairière non loin <strong>de</strong> mon village. Elle racontait que touthomme qui oserait s’av<strong>en</strong>turer ici <strong>en</strong> paierait le prix <strong>de</strong> sa vie. Donc, <strong>de</strong>puis<strong>de</strong>s siècles, <strong>de</strong>s âmes sont damnées à rester là où elles ont voulu t<strong>en</strong>ter lamort.128


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Vous me croirez peut-être fou, mais c’est exactem<strong>en</strong>t vers cet <strong>en</strong>droit que jeme dirige. La mort, c’est elle que je cherche et je la trouverai. Je n’avais pasvraim<strong>en</strong>t idée du lieu précis <strong>de</strong> la clairière, mais quand mes yeux se posèr<strong>en</strong>tsur une muraille délabrée où <strong>de</strong>s briques manquai<strong>en</strong>t avec une gran<strong>de</strong> porte<strong>en</strong> fer forgé rouillée, je sus que c’était ma <strong>de</strong>stination. L’<strong>en</strong>droit me paraissait<strong>en</strong>core <strong>plus</strong> sinistre que dans les contes <strong>de</strong>s vieux séniles du village. Unes<strong>en</strong>sation <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> froid y régnait. Mon seul réflexe fut <strong>de</strong> tirer monépée <strong>de</strong> son fourreau, mais à quoi cela allait-il me servir, à me battre contre<strong>de</strong>s fantômes ?J’<strong>en</strong>trai finalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre les quelques murs qui t<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>en</strong>core <strong>de</strong>bout. Pourle peu que la lune me montrait, on aurait dit que la terre avait été brûlée etqu’elle n’avait jamais repris vie. Le sil<strong>en</strong>ce me donnait froid dans le dos,aucune bête n’osait, elle non <strong>plus</strong>, s’approcher <strong>de</strong> ce lieu maudit. J’att<strong>en</strong>daisque quelque chose se produise, mais <strong>plus</strong> le temps avançait et <strong>plus</strong> mondésespoir grandissait. Je me traitais moi-même <strong>de</strong> pauvre idiot pour avoir cruà <strong>de</strong>s sottises <strong>de</strong> la sorte. Pris d’une colère, je hurlai dans la nuit étoilée.– Par tous les diables, vous qui avez damné cet <strong>en</strong>droit, montrez-vous,pauvre bougre !!La t<strong>en</strong>sion a ses bornes, j’éclatai <strong>en</strong> sanglots.– V<strong>en</strong>ez me chercher...C’est à ce mom<strong>en</strong>t que la pression <strong>de</strong> l’air autour <strong>de</strong> moi s’affaissa et jes<strong>en</strong>tis mes poumons se serrer. Quand je levai les yeux du sol ce fut pourapercevoir <strong>de</strong>s masses informes et opaques tourbillonner al<strong>en</strong>tour <strong>de</strong> moi.Certaines montrai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s visages immon<strong>de</strong>s, sans yeux, qui me fir<strong>en</strong>t,apeuré, perdre pied chaque fois que celles-ci t<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> s’approcher <strong>de</strong>moi. Avec mon épée, je t<strong>en</strong>tai <strong>en</strong> vain <strong>de</strong> les faire partir, mais cela les fâcha.Elles se mir<strong>en</strong>t à passer à travers mon corps me causant <strong>de</strong>s spasmes <strong>de</strong>douleur. En arrivant ici, j’avais un but bi<strong>en</strong> défini : celui <strong>de</strong> mourir, retrouverla femme que j’aime. <strong>Ma</strong>is maint<strong>en</strong>ant que j’affrontais la mort <strong>en</strong> pleineface, toutes mes peurs ressortai<strong>en</strong>t, mes pires craintes, mes pires phobies sedévoilai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>vant mes yeux. Que m’arrivait-il, moi qui n’avais pourtantpeur <strong>de</strong> ri<strong>en</strong> ?Quand je p<strong>en</strong>sais subir les <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong>s souffrances <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> et que toutceci ne se terminerait jamais, une lueur éclatante <strong>en</strong>veloppa mon corps. Mespoumons trouvèr<strong>en</strong>t l’air qui leur manquait et mes muscles cessèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>129


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>convulser. Avec le peu <strong>de</strong> courage qu’il me restait, je me mis à g<strong>en</strong>oux.Devant moi, se t<strong>en</strong>ait la silhouette d’une femme qui avançait vers moi.Était-ce ça la mort ? Non, car <strong>plus</strong> elle approchait, <strong>plus</strong> je la reconnaissais.Eire<strong>en</strong>, mon épouse, ses longs cheveux noirs flottant même sans v<strong>en</strong>t et, <strong>de</strong>son visage paisible, elle me sourit.– Faolan... qui es-tu pour te croire permis <strong>de</strong> choisir le mom<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>u oùtu quitteras ce mon<strong>de</strong> ? Je t’ai connu beaucoup <strong>plus</strong> fort qu’aujourd’hui. Tume déçois, mon amour, mais je compatis à ta peine. Ton nom représ<strong>en</strong>tepourtant le loup, bête féroce qui ne recule <strong>de</strong>vant aucune épreuve. Alors,soit ! Sors la bête qui est <strong>en</strong> toi et vis pour nous <strong>de</strong>ux ! Tout un chacun avonscette force <strong>en</strong> nous, cette bête qui veut combattre corps et âme malgré lesdéfis sur notre route. Personne n’a le droit <strong>de</strong> baisser les bras <strong>de</strong>vant unemontagne qui n’est <strong>en</strong> fait qu’une simple petite butte <strong>de</strong> terre. Bats-toiFaolan, vis, je t’<strong>en</strong> prie !Des larmes faisai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> petits cristaux aux coins <strong>de</strong> ses yeux et d’une maint<strong>en</strong>dre elle caressa ma joue. De peine et <strong>de</strong> misère, <strong>en</strong>core bouleversé partout ce qui v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> se produire, je sortis <strong>de</strong> la forêt et retournai d’où jev<strong>en</strong>ais avec <strong>en</strong> moi une nouvelle force pour affronter mes futurs obstacles.Vanessa Leduc, Préparation aux étu<strong>de</strong>s postsecondairesC<strong>en</strong>tre Christ-Roi (Mont-Laurier), CS Pierre-NeveuEnseignante : Sandra Paoli, Syndicat du personnel<strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Hautes-Rivières42. Revivre !<strong>Ma</strong>rs 2007, j’arrive chez mes par<strong>en</strong>ts, <strong>en</strong> pleurs, pour une <strong>de</strong>uxième fois. Jedéci<strong>de</strong> <strong>de</strong> me remettre dans le droit chemin, car les années qui ont précédén’étai<strong>en</strong>t vraim<strong>en</strong>t pas faciles à vivre. J’étais tellem<strong>en</strong>t au bout du rouleauque la convalesc<strong>en</strong>ce a duré <strong>plus</strong>ieurs jours. J’<strong>en</strong> avais gran<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t besoin.Peu à peu, je pr<strong>en</strong>ais goût à ce nouveau p’tit train-train quotidi<strong>en</strong>. Je p<strong>en</strong>saismoins aux années que je v<strong>en</strong>ais d’<strong>en</strong>durer, j’étais même surprise d’<strong>en</strong> sortirvivante. Ce fut la première fois, <strong>de</strong>puis <strong>plus</strong>ieurs années, que je s<strong>en</strong>tais matête hors <strong>de</strong> l’eau. Alors voici, je vous raconte cette pénible pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> mavie.130


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>À la fin <strong>de</strong> l’année 2000, j’ai rejoint mes par<strong>en</strong>ts à Québec, pour une premièrefois, laissant mon passé <strong>de</strong>rrière moi. Je me disais qu’une nouvelle viecomm<strong>en</strong>çait. Depuis <strong>plus</strong>ieurs années, j’étais victime d’intimidation et <strong>de</strong>manipulation. Je me suis dit que j’avais une chance <strong>de</strong> tout repr<strong>en</strong>dre à zéro.J’avais <strong>de</strong>s échecs scolaires à répétition et, quand j’essayais <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r untravail, je n’y arrivais pas et j’étais incapable d’expliquer cela à mes par<strong>en</strong>ts.Puis un jour, j’ai r<strong>en</strong>contré un gars séduisant et att<strong>en</strong>tionné et j’ai décidé <strong>de</strong>le fréqu<strong>en</strong>ter. Ça ne m’était jamais arrivé avant qu’une personne soit aussig<strong>en</strong>tille avec moi, mais ce n’était qu’une appar<strong>en</strong>ce. C’était un piège etj’étais prise <strong>de</strong>dans.2001 fut le début d’un calvaire. J’étais forcée <strong>de</strong> vivre dans un mon<strong>de</strong> où lediable <strong>en</strong> personne régnait et m’obligeait à y rester. Drogues, alcool, tout yétait. Cette mauvaise fréqu<strong>en</strong>tation m’a poussée à consommer pour m’éva<strong>de</strong>ret aussi pour m’imaginer dans un mon<strong>de</strong> meilleur. Je travaillais 7 jourssur 7, 15 heures par jour et l’arg<strong>en</strong>t que je gagnais, je ne pouvais pas legar<strong>de</strong>r. Si je le gardais ou si j’<strong>en</strong> cachais, je recevais <strong>de</strong>s m<strong>en</strong>aces. Je travaillaistellem<strong>en</strong>t que je m’épuisais physiquem<strong>en</strong>t et moralem<strong>en</strong>t. Après cinqans, un beau jour, je me suis dit : « Cela suffit <strong>de</strong> vivre ainsi ! », et j’ai réussià m’<strong>en</strong>fuir <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>fer qui me gardait prisonnière et me détruisait tant.En 2007, j’arrive <strong>en</strong> sanglots chez mes par<strong>en</strong>ts. Je suis v<strong>en</strong>ue pour une bonneraison, me remettre sur le droit chemin. Après <strong>plus</strong>ieurs années d’abs<strong>en</strong>ce<strong>de</strong>s bancs d’école, je déci<strong>de</strong> donc d’y rev<strong>en</strong>ir. J’ai été référée à un organismeoù il n’y a que <strong>de</strong>s petits groupes, car à l’école <strong>de</strong>s adultes, il y avait trop <strong>de</strong>mon<strong>de</strong> et j’ai fait une crise d’angoisse. Dans cet organisme, j’ai comm<strong>en</strong>céà suivre <strong>de</strong>ux cours par semaine. Par la suite, comme je continuais d’êtreanxieuse et <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s cauchemars, mes par<strong>en</strong>ts et moi, nous sommes alléschercher <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>. La démarche a été longue, mais finalem<strong>en</strong>t j’ai pu avoirun r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous avec une psychiatre. Elle nous a donné le diagnostic suivant: agoraphobie, phobie sociale, syndrome d’alcoolisme fœtal et trouble<strong>de</strong> déficit <strong>de</strong> l’att<strong>en</strong>tion/hyperactivité (TDAH). Pour m’ai<strong>de</strong>r, elle m’aconseillé <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s médicam<strong>en</strong>ts au quotidi<strong>en</strong> et <strong>de</strong> la voir <strong>de</strong>ux foispar mois, pour comm<strong>en</strong>cer. Avant la prise <strong>de</strong>s médicam<strong>en</strong>ts, je n’osais passortir <strong>de</strong> chez moi ni abor<strong>de</strong>r les g<strong>en</strong>s, car je faisais <strong>de</strong>s crises d’anxiété. J<strong>en</strong>’avais aucune vie sociale.De 2009 à aujourd’hui, ma vie a beaucoup changé : je me suis fait un nouveaugroupe d’amis et ma confiance <strong>en</strong> moi a énormém<strong>en</strong>t augm<strong>en</strong>té. Enjuin 2009, j’ai déménagé dans une maison avec trois <strong>de</strong> mes amis. Deux ans<strong>plus</strong> tard, j’étais prête à vivre seule dans un petit appartem<strong>en</strong>t avec Inouk,131


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>mon chat. Par la suite, j’ai fait partie du conseil d’administration <strong>de</strong> l’organismep<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>ux ans. Chaque année, je suis bénévole au Salon du livreet je collabore actuellem<strong>en</strong>t à un projet <strong>de</strong> spectacles pour les g<strong>en</strong>s <strong>en</strong> santém<strong>en</strong>tale. Grâce au programme FAIT, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux étés, je travaille bénévolem<strong>en</strong>tdans une serre, car j’aime bi<strong>en</strong> le parfum <strong>de</strong>s fleurs et j’aime égalem<strong>en</strong>tjouer dans la terre. <strong>Ma</strong> patronne et mon équipe <strong>de</strong> travail sont très compréh<strong>en</strong>siveset l’ambiance y est familiale. P<strong>en</strong>dant l’année scolaire, je vais àl’école quatre jours par semaine. Yoga-dét<strong>en</strong>te et escala<strong>de</strong> font partie <strong>de</strong> mesloisirs. Le yoga me fait du bi<strong>en</strong>, car il <strong>en</strong>lève mes t<strong>en</strong>sions et l’escala<strong>de</strong> mepermet <strong>de</strong> me défouler. Aujourd’hui, je connais mes limites. Si j’<strong>en</strong> fais trop,ce qui arrive parfois, je <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>s épuisée et je peux dormir une journée complètela fin <strong>de</strong> semaine.Ainsi, c’était mon <strong>histoire</strong>. J’ai eu la chance d’avoir mes par<strong>en</strong>ts et mes amisces <strong>de</strong>rnières années, car je n’aurais pu passer au travers <strong>de</strong> tout cela sanseux. Ils m’ont énormém<strong>en</strong>t aidée et m’ont <strong>en</strong>couragée à poursuivre mesdémarches. Égalem<strong>en</strong>t, ils m’ont am<strong>en</strong>ée à me préserver <strong>de</strong>s cauchemarsquand nous avons appris, à <strong>de</strong>ux reprises, que le mauvais ange était <strong>en</strong>cavale. Finalem<strong>en</strong>t, tout s’est arrangé et il a été remis <strong>en</strong> prison. Je suis tellem<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>due fière <strong>de</strong> ce que j’ai accompli et <strong>de</strong> ce que je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue.Alors, maint<strong>en</strong>ant je comm<strong>en</strong>ce à revivre !Laura Sivuarapik, AlphabétisationFormation Clef Mitis/Neigette (Rimouski), CS <strong>de</strong>s PharesEnseignantes : Janine Gagnon et Sylvaine Gesseaume,Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> la Mitis43. <strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>antEst-ce que je peux vous parler quelques minutes ? Votre temps est-il précieux? Allez-vous p<strong>en</strong>ser qu’<strong>en</strong> écrivant ce texte j’ai perdu mon temps etqu’<strong>en</strong> le lisant vous gaspillez le vôtre ? Peut-être voulez-vous, au contraire,qu’un peu <strong>de</strong> temps passe ? Certains, peut-être <strong>plus</strong> agressifs, parlerontmême <strong>de</strong> tuer le temps ! Je n’ai pas l’arrogance d’affirmer pouvoir vous expliquerquoi que ce soit sur le temps, mais nous pourrions quand même <strong>en</strong>parler un bref mom<strong>en</strong>t, si vous voulez bi<strong>en</strong> me donner quelques instants.132


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>On pourrait p<strong>en</strong>ser que le temps est fixe. Après tout, il y a 60 secon<strong>de</strong>s dansune minute, 60 minutes dans une heure et 24 heures par jour, non ? Unsystème <strong>de</strong> temps très précis est établi. Le travail à la chaîne m’a pourtantappris que certaines heures sont beaucoup <strong>plus</strong> longues que d’autres. Jepeux vous garantir que le temps fonctionne très différemm<strong>en</strong>t d’un samedi<strong>de</strong> congé <strong>en</strong>soleillé à un jeudi <strong>de</strong> travail pluvieux. Un ultimatum d’une journéepeut être très court, mais <strong>de</strong>ux minutes d’att<strong>en</strong>te peuv<strong>en</strong>t être trèslongues. Certains mom<strong>en</strong>ts sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>us immortels et resteront gravés dansnos mémoires à jamais, mais d’autres, oubliés, n’ont jamais existé.Nous possédons tous du temps. Si l’on se fie à l’offre et à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>,quelque chose que tout le mon<strong>de</strong> possè<strong>de</strong> ne doit pas valoir très cher, non ?Pourtant, à la fin <strong>de</strong> sa vie, un homme échangerait toutes les richesses dumon<strong>de</strong> pour avoir une secon<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>plus</strong> avec la femme qu’il aime. Comm<strong>en</strong>tquelque chose <strong>de</strong> gratuit peut-il, si vite, <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir hors <strong>de</strong> prix ? Nous avonstous, <strong>plus</strong> jeunes, rêvé d’être <strong>plus</strong> vieux. Nous avions tous hâte d’être <strong>plus</strong>indép<strong>en</strong>dants, d’être maîtres <strong>de</strong> notre <strong>de</strong>stin, d’être libres. Pourtant, à 28 ans,lorsque je p<strong>en</strong>se à la liberté, je me revois à 16 ans ; libre <strong>de</strong> comptes, libre<strong>de</strong> responsabilités, libre. D’une manière plutôt étrange, j’avais hâte <strong>de</strong> pouvoirme rappeler le bon vieux temps.Le temps ne fait que passer. Il contrôle <strong>plus</strong>ieurs aspects <strong>de</strong> notre vie, maisil y reste indiffér<strong>en</strong>t. Exempt d’objectifs, <strong>de</strong> causes, d’ambitions et <strong>de</strong> buts.On ne peut l’arrêter ni même le ral<strong>en</strong>tir. L’amour et la haine ne gui<strong>de</strong>nt passon chemin. Lorsque notre heure sera v<strong>en</strong>ue, il ne pardonnera à personne,ne jugera personne et ne fera ni gagnant ni perdant. Il n’a jamais comm<strong>en</strong>céet ne finira jamais. Il n’a jamais été vénéré, prié, idolâtré. La disparition <strong>de</strong>l’univers n’ébranlerait <strong>en</strong> ri<strong>en</strong> sa routine. 60 secon<strong>de</strong>s dans une minute,60 minutes dans une heure et 24 heures par jour. Ni <strong>plus</strong> rapi<strong>de</strong> ni <strong>plus</strong> l<strong>en</strong>t,comme d’habitu<strong>de</strong>, il ne fera que passer.Je me s<strong>en</strong>s vi<strong>de</strong>. Voire incompét<strong>en</strong>t. Je n’ai aucune remarque, observation ouopinion pour vous, chers lecteurs. Je n’ai fait qu’épaissir le mystère. Pour madéf<strong>en</strong>se, comm<strong>en</strong>t aurais-je pu avoir réponse à cette question qui est littéralem<strong>en</strong>t<strong>plus</strong> vieille que le mon<strong>de</strong> lui-même ? Je ne compr<strong>en</strong>ds pas le temps.Je le chevauche et le fuis. Je l’adore et le déteste. Je le gagne et le perds, maisvous étiez avertis, je n’ai pas l’arrogance <strong>de</strong> vous l’expliquer. Peut-êtrepourrais-je par contre vous donner un conseil. Profitez du temps. Il nous esttous compté et nous le gaspillons <strong>en</strong> inquiétu<strong>de</strong>s, <strong>en</strong> préjugés et <strong>en</strong> querelles133


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>qui n’<strong>en</strong> val<strong>en</strong>t pas la peine. Aujourd’hui, dites à quelqu’un que vousl’aimez. Que vous appréciez le temps passé avec lui. Allez ! Faites-le !<strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant. Sans perdre <strong>de</strong> temps.Réjean Côté, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Louis-Jolliet (Québec), CS <strong>de</strong> la CapitaleEnseignante : <strong>Ma</strong>u<strong>de</strong> Proulx, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Québec44. Aujourd’hui toi, ma <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> ce n’est pas le hier,ni beaucoup moins le <strong>de</strong>main loin <strong>de</strong> toi.J’aimerais que ce soit aujourd’hui à côté <strong>de</strong> toisans la compagnie ins<strong>en</strong>sée <strong>de</strong> mes souv<strong>en</strong>irs.Laisse-moi écrire sur ces pages blanches,avec l’<strong>en</strong>cre illisible <strong>de</strong> ma plumeles p<strong>en</strong>sées les <strong>plus</strong> extrêmes <strong>de</strong> mes rêveset les s<strong>en</strong>sations inusitées <strong>de</strong> mon âme.Permets-moi aujourd’hui <strong>de</strong> les remplir avec la poésiequi transc<strong>en</strong><strong>de</strong> <strong>de</strong> la mort à la viejusqu’à la <strong>plus</strong> éthérée mélodie.Donne-moi l’opportunité<strong>de</strong> contaminer d’illusions et <strong>de</strong> parolesta fontaine inépuisable d’espoirsta fontaine inépuisable <strong>de</strong> désirs.Cet amour sans aucune permissions’est perdu dans le dédale <strong>de</strong> ta passions’est prom<strong>en</strong>é dans les <strong>en</strong>droits <strong>de</strong> ton intérieurm’a fait oublier que je suis un simple marcheur.Attrape ce voyageur inespéré<strong>en</strong>tre les paisibles eaux <strong>de</strong> tes yeuxoù je serai disposé à marcher <strong>en</strong> t<strong>en</strong>ant tes mainspour voir le chemin invisible du <strong>de</strong>main.134


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Autorise-moi à tâtonner l’impalpableà parler au sil<strong>en</strong>ce indomptableà m’équilibrer dans le temps indéchiffrableoù je pourrai gagner ce qui est <strong>en</strong>core incroyable.Octroie-moi les triomphes auxquels j’ai aspiré,la sagesse que tu as cultivéela victoire dans tes terrainsla magnific<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> tes prouessesla beauté <strong>de</strong> ton <strong>histoire</strong>et la richesse <strong>de</strong> ta langue.Pour un instant, laisse-moi être l’humainqui s’approprie tes vertes valléess’<strong>en</strong>racine dans tes forêtset découvre ton corps au goût <strong>de</strong> miel.Cè<strong>de</strong>-moi la douceur <strong>de</strong> tes érablespour me laisser habiter dans la spl<strong>en</strong><strong>de</strong>ur <strong>de</strong> tes châteaux formidablestouche-moi avec l’omniprés<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> ton arôme ineffaçablecette fragrance que dégage ta chevelure adorable.J’aimerais s<strong>en</strong>tir la caresse froi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la neige débordanteliée à ton innoc<strong>en</strong>ce réjouissantetu as la joie et la force d’une fille incontrôlable<strong>en</strong> étant à la fois une femme tellem<strong>en</strong>t admirable.Je voudrais que mes <strong>en</strong>fants soi<strong>en</strong>t les ti<strong>en</strong>s sans douterqu’ils puiss<strong>en</strong>t t’appeler avec orgueil leur mèreils t’aimeront autant que je t’aimechaque matin et chaque soir sans arrêter.<strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant, j’ai101 lois pour te parlerquarante-neuf pour c<strong>en</strong>t <strong>de</strong> chances <strong>de</strong> te trouveret 21 jeux pour te montrerque je suis la personne que tu ne pourras jamais oublier.135


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Aujourd’hui avec toi je formeraila <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>puisant six lettres <strong>de</strong> l’abécédaireet disant trois fois comm<strong>en</strong>t tu t’appelles« Québec - Québec - Québec ».Augusto Aldana, FrancisationC<strong>en</strong>tre Camille-Laurin, CS <strong>Ma</strong>rie-VictorinEnseignante : Sylvie Barthez, Syndicat <strong>de</strong> Champlain45. Précieux sortilègeTout au fin fond, tréfonds d’un corps <strong>en</strong> éruption, ma v<strong>en</strong>ue sur la terreprévue sans un soupçon, seule je glissai sous l’ère d’une vile malédiction ety fut propulsée comme le feu d’un dragon. Inhalant bi<strong>en</strong> durem<strong>en</strong>t l’imposantoxygène, qui, <strong>en</strong> mes poumons, fit naître ma première peine, je s<strong>en</strong>tisprompt et vif son passage dans mes veines, mais perçus sans malice qu<strong>en</strong>otre union fût saine.Accueillie et bercée par mon volcan éteint dont le cœur immature limitaitmes besoins, j’appris tôt à ne compter que sur mes <strong>de</strong>ux mains et à ne pasespérer mieux <strong>de</strong> mes l<strong>en</strong><strong>de</strong>mains.Alors que peu <strong>de</strong> mois avai<strong>en</strong>t rempli mes jours, sur la côte d’un azur oùtout semblait trop lourd, un train nous avala jusqu’à la fameuse Tour promettantcapitales <strong>de</strong> nouveaux al<strong>en</strong>tours.Installée <strong>en</strong> un lieu différ<strong>en</strong>t et curieux, où <strong>de</strong>s cris familiers <strong>de</strong>vinr<strong>en</strong>t bi<strong>en</strong>sil<strong>en</strong>cieux, le volcan <strong>de</strong> tristesse s’inonda sous mes yeux, et mon décorsombra sous l’<strong>en</strong>nui du milieu.Alors que la jeunesse nous veut pleins d’innoc<strong>en</strong>ce, je partageais mon temps<strong>en</strong>tre vi<strong>de</strong> et abs<strong>en</strong>ce, mais <strong>plus</strong> ce qu’on m’offrait dénudait mon <strong>en</strong>fance et<strong>plus</strong> j’y <strong>de</strong>ssinais un trésor d’élégance. Si bi<strong>en</strong> que dans la vie <strong>de</strong>s <strong>en</strong>fants<strong>de</strong> mon âge, je ne percevais jamais le relief <strong>de</strong>s orages, qui avai<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>duriche le précieux paysage qui, <strong>en</strong>tière, m’habitait et me révélait sage.136


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>46. Le barrage numéro unToute la population écoutait la nouvelle qui disait que l’aéroport <strong>de</strong> Havre-Saint-Pierre et la route 138 ont été inondés par l’eau d’un barrage détruit <strong>de</strong>la rivière La Romaine.L’annonce faite par Radio-Canada a scandalisé tout le pays, personne nepouvait croire qu’un barrage pouvait briser dans notre province.Dans les nouvelles <strong>de</strong> midi, nous constatons l’inévitable désolation et lamort <strong>de</strong>s innoc<strong>en</strong>ts. 9 h 10 serait l’heure <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> catastrophe.Le superint<strong>en</strong>dant disait dans l’<strong>en</strong>trevue qu’une erreur à l’intérieur <strong>de</strong> lapièce c<strong>en</strong>trale <strong>de</strong> la turbine-alternateur, « 2 Francis », a provoqué un feu quia fait exploser le gaz <strong>en</strong>fermé dans le canal <strong>de</strong> fuite.Le nombre <strong>de</strong> morts sur place est <strong>de</strong> 20 employés. Plus tard, l’eau qui étaitsupportée par ce barrage <strong>de</strong> 37,6 mètres est sortie avec une rapidité extraordinaire.Sa superficie <strong>de</strong> 12,6 kilomètres était complètem<strong>en</strong>t remplie par les<strong>de</strong>rniers jours <strong>de</strong> l’incessante pluie.Les premiers touchés par le débor<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t d’eau étai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> l’écoleprimaire <strong>de</strong> Natashquan qui faisai<strong>en</strong>t une activité dans la forêt à proximitédu barrage. Les <strong>en</strong>fants <strong>de</strong> sixième année fêtai<strong>en</strong>t leur prochaine graduationdu primaire. C’était l’heure <strong>de</strong> la pause et les <strong>en</strong>fants comm<strong>en</strong>çai<strong>en</strong>t à ouvrirleur boîte à lunch. Le groupe <strong>de</strong> madame Annette avait joué à « cherche ettrouve » et avait chanté <strong>de</strong>s chansons. Tous sont disparus ; 43 <strong>en</strong>fants, quatreprofesseurs et <strong>de</strong>ux chauffeurs.Les voyageurs <strong>de</strong> la route 138 ont été touchés <strong>plus</strong> tard. Il y avait <strong>plus</strong>ieurscamions avec <strong>de</strong>s alim<strong>en</strong>ts, il fallait que la vian<strong>de</strong> arrive bi<strong>en</strong>tôt parce quela famille Boudin avait le mariage <strong>de</strong> sa première fille pour samedi prochainà Natashquan. Dans <strong>de</strong>ux jours ! Tous les membres <strong>de</strong> la famille étai<strong>en</strong>tinvités. Plusieurs invités étai<strong>en</strong>t déjà arrivés à Havre-Saint-Pierre, les autresétai<strong>en</strong>t déjà à Natashquan. Quelques amis et membres <strong>de</strong> la famille ontdécidé <strong>de</strong> partir <strong>en</strong> caravane à travers la route, parce que ce jeudi soir étaitorganisée une fête pour le futur mari. Et <strong>en</strong> même temps, les filles jouerai<strong>en</strong>tau bingo à la maison <strong>de</strong> la tante Juliette p<strong>en</strong>dant la cuisson <strong>de</strong>s biscuits pourle mariage. Plusieurs d’<strong>en</strong>tre eux sont partis avec le courant, une gran<strong>de</strong>tristesse pour la famille Boudin.138


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>L’auto qui les suivait est partie avec le courant immédiatem<strong>en</strong>t, c’était unejeune mère qui essayait d’ouvrir sa porte d’auto quand l’eau est arrivée.<strong>Ma</strong>is, c’était impossible. L’auto a continué jusqu’à se coincer <strong>en</strong>tre lesarbres, la pauvre Sophie est morte, mais son bébé est sorti par la f<strong>en</strong>êtredirectem<strong>en</strong>t dans le coin d’un arbre qui lui a sauvé miraculeusem<strong>en</strong>t la vie,oui la vie !!!Deux conducteurs d’un camion <strong>de</strong> diesel ont été les prochaines victimes. Ilsv<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> déjeuner dans un petit restaurant <strong>de</strong> Havre-Saint-Pierre, où tousles cli<strong>en</strong>ts étai<strong>en</strong>t cont<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> presque comm<strong>en</strong>cer la fin <strong>de</strong> semaine. Leschauffeurs Roland et <strong>Ma</strong>rtin ont mangé <strong>de</strong>s œufs, <strong>de</strong>s tranches <strong>de</strong> jambon,du pain maison avec une délicieuse confiture aux framboises ; leur <strong>de</strong>rnierrepas.Le courant a continué jusqu’à un côté <strong>de</strong> l’aéroport <strong>de</strong> Havre-Saint-Pierre,l’aéroport est loin, mais un stationnem<strong>en</strong>t d’avions-cargos a été touché parl’eau du barrage numéro un. Une partie <strong>de</strong> la piste qui avait été repeinte<strong>de</strong>rnièrem<strong>en</strong>t est partie aussi avec le nouveau pilote qui v<strong>en</strong>ait juste d’atterrirce matin. Il était cont<strong>en</strong>t <strong>de</strong> recevoir la nouvelle d’am<strong>en</strong>er sa petite famillevivre sur la Côte-Nord avec lui. Le pilote a essayé <strong>de</strong> r<strong>en</strong>trer dans un avionet <strong>de</strong> décoller pour sauver sa vie, mais il était trop tard, le courant est arrivéle premier.Plusieurs vies se sont perdues ce jeudi matin, la tristesse et la désolation sontdans les visages <strong>de</strong> tous les citoy<strong>en</strong>s <strong>de</strong> la région.Une catastrophe <strong>de</strong> <strong>plus</strong> que nous pouvions arrêter.Tous se questionn<strong>en</strong>t c’est la faute <strong>de</strong> qui ? Une cause naturelle, le gouvernem<strong>en</strong>t,les ingénieurs qui ont construit les barrages, Hydro-Québec, c’est àqui la faute ? Pourquoi ont-ils construit quatre barrages si c’était la façon la<strong>plus</strong> chère <strong>de</strong> produire l’énergie. Pourquoi ne pas utiliser l’énergie solaire,éoli<strong>en</strong>ne, géothermique, biogaz et marémotrice ?139


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Il est très tard, les nouvelles sont terminées et moi, il faut que je partetravailler...http ://tpefusion.e-monsite.com/pages/sources-d-<strong>en</strong>ergies-existantes.htmlhttp ://www/hydroQuebec.com/romaine/projet/cartes.htmlhttp ://fr.wikipedia.org/wiki/BarrageHerlinda Urteaga Valdés, PrésecondaireC<strong>en</strong>tre A.W. Gagné (Sept-îles), CS du FerEnseignante : Michèle Reid, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région du FerRavissem<strong>en</strong>t !47. Chants <strong>de</strong> mes quatre saisonsCraquem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> neige sous ma chaussureExtirpant ma torpeur <strong>de</strong> sa froidure,<strong>Ma</strong>rchant calmem<strong>en</strong>t le zéphyr au visageAspirant à pleins poumons le frais herbage.Écoutant le ruissellem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la rivièreEmportant avec elle le dégel au loin,Miroitant clairem<strong>en</strong>t pierres et bruyèresAttirant migrateurs, libellules et milouins.Pépiem<strong>en</strong>ts, séréna<strong>de</strong>s, harmonies <strong>de</strong> saisonNichant, <strong>de</strong> part et d’autre dans la feuillaisonTrépignant, sautillant une danse nuptialeEnvoûtant <strong>de</strong> son tal<strong>en</strong>t la part<strong>en</strong>aire idéale.R<strong>en</strong>aissant à la vie toutes bêtes <strong>de</strong> la forêt,Bondissant, trottant les jeunes freluquetsÉmerveillem<strong>en</strong>t sans réserve <strong>en</strong> ce céans,Ravissem<strong>en</strong>t éternel au retour du printemps.140


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Nuit d’été !Plongeant mon regard sur l’imm<strong>en</strong>sité océaneC<strong>en</strong>taure, Bouvier, Gran<strong>de</strong> Ourse et CocherG<strong>en</strong>èse mystérieuse <strong>de</strong>s antiques divinitésLouangée <strong>de</strong>s initiés autant que <strong>de</strong>s profanes.Bételgeuse, Sinus, Pollux et autres corps étoilés,<strong>Ma</strong>rs orangé et Vénus flamboyanteAccrochés au croissant <strong>de</strong> lune <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dante,Traînée laiteuse <strong>de</strong>s galaxies éloignées,Écarts d’espace ténébreux qui me donn<strong>en</strong>t à songerAux images spectaculaires que Hubble nous a r<strong>en</strong>voyéesDe pouponnières d’étoiles, d’un naissant système solaire,Nébuleuses aux tons <strong>de</strong> rose, mauve, bleu et vert.Voilà que je pr<strong>en</strong>ds consci<strong>en</strong>ce, je saisis toute la chanceD’être un esprit capable <strong>de</strong> sublimation, d’intellig<strong>en</strong>ceEt que la petite mortelle que je suis avec ses <strong>en</strong>nuisEst <strong>en</strong> fait une particule d’étoile <strong>de</strong> cet univers infini.C’est à ce mom<strong>en</strong>t que mes angoisses me délaiss<strong>en</strong>tJe me relève <strong>de</strong> ma couche, <strong>de</strong> sa roséeOù l’herbe a rafraîchi ma chau<strong>de</strong> journéeEt je retourne chez moi, le coeur <strong>en</strong> liesse.Pittoresque !Apparition <strong>de</strong> la montagne mythiqueDéployant à tout v<strong>en</strong>t, secrets et mosaïques,Invitant à une pause, esthètes, prom<strong>en</strong>eurs,À tant s’émerveiller <strong>de</strong>vant cette spl<strong>en</strong><strong>de</strong>ur.Frondaisons, ramures aux coloris rutilantsComme un étal d’épices, d’aromates indi<strong>en</strong>sTuméfie, cardamome, cannelle et safran,Un embrasem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> tons épicuri<strong>en</strong>s.<strong>Ma</strong>gnific<strong>en</strong>ce et faste <strong>de</strong> tableau vivant,Étu<strong>de</strong> expressionniste du mom<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tGauguin, Cézanne, Van Gogh ne pas comparerÀ l’art <strong>de</strong> Dame Nature, perfectionné.141


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Verglas !Sous les yeux, quel délicieux effet !Vallons <strong>de</strong> neige durcis <strong>en</strong> sorbet,Saupoudrés d’esquilles diamantines,En un Nouveau Mon<strong>de</strong>, le paysage se <strong>de</strong>ssine.Courbé sous le poids <strong>de</strong>s cristaux,Le sylvestre aux branches écarteléesRésiste tant bi<strong>en</strong> que mal au fléauSous le soleil émergeant <strong>de</strong> sa timidité.Gestation <strong>de</strong> l’oeuvre <strong>de</strong> la nature,Inv<strong>en</strong>tant <strong>de</strong> nouvelles <strong>en</strong>jolivures,Enfantant d’insolites universRecréant tout à fait l’hiver.Christine Lepage, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre multiservice <strong>de</strong>s Samares, Pavillon l’Envol (Joliette), CS <strong>de</strong>s SamaresEnseignante : Sybile Godard, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Lanaudière48. Le jour où ma vie a été chamboulée11 février 2012Il est 19 heures, c’est l’hiver, il fait froid. Je comm<strong>en</strong>ce à ress<strong>en</strong>tir <strong>de</strong>s contractionset j’ai <strong>en</strong>core ces fameuses pertes… mais maint<strong>en</strong>ant il y a du sang. J’airappelé l’hôpital cet après-midi quand j’ai remarqué que je perdais du sang.On m’a <strong>en</strong>core dit que tout était normal. Je les rappelle et leur fais savoir quej’ai <strong>de</strong>s contractions. L’infirmière me dit <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre un bain chaud que c’estpeut-être un faux travail. Je me fais couler un bain, mais mes contractions serapproch<strong>en</strong>t, elles sont r<strong>en</strong>dues aux <strong>de</strong>ux minutes et <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong><strong>plus</strong> fortes. Une fois <strong>de</strong> <strong>plus</strong> je contacte l’infirmière, mais <strong>en</strong>fin on me pr<strong>en</strong>dau sérieux. Vivem<strong>en</strong>t, je dois me r<strong>en</strong>dre à l’hôpital. J’appelle aussitôt mamère pour qu’elle vi<strong>en</strong>ne gar<strong>de</strong>r les <strong>en</strong>fants. J’ai peur, il est trop tôt pour quemon bébé vi<strong>en</strong>ne au mon<strong>de</strong>. J’ai juste vingt-quatre semaines <strong>de</strong> grossesse.<strong>Ma</strong> mère est là donc je pars sans crainte pour l’hôpital, elle veillera sur mes142


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>de</strong>ux autres <strong>en</strong>fants. Mes contractions sont <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> fortes. Mon Dieu,faites que je n’accouche pas aujourd’hui.À mon arrivée à l’hôpital, il est <strong>en</strong>viron 21 h 15. Je me dirige droit vers lecinquième étage, aux salles d’accouchem<strong>en</strong>t. Le gynécologue arrive, il mefait une échographie et regar<strong>de</strong> la dilatation <strong>de</strong> mon col. <strong>Ma</strong>uvaise nouvelle,je suis dilatée à trois. Il appelle Sainte-Justine et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> mon transfert.Durant l’att<strong>en</strong>te, les infirmières me donn<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s injections afin <strong>de</strong> ral<strong>en</strong>tir letravail. Ri<strong>en</strong> ne fonctionne. On confirme mon transfert, mais il est trop tard,les médicam<strong>en</strong>ts ne font pas effet et il faut m’accoucher. J’ai tellem<strong>en</strong>t peurpour mon bébé que j’éclate <strong>en</strong> sanglots. Je suis inconsolable. Le personnelinfirmier essaie <strong>de</strong> retar<strong>de</strong>r l’accouchem<strong>en</strong>t jusqu’à ce que les spécialistes<strong>de</strong> Sainte-Justine arriv<strong>en</strong>t. Dans ma chambre, il y a le gynécologue, les <strong>de</strong>uxinfirmières, un pédiatre et un cardiologue. Mon conjoint est à mes côtés,aussi effrayé que moi. Le gynécologue déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> crever mes eaux. Non, j<strong>en</strong>e veux pas, mais voilà, c’est fait… Je ne peux <strong>plus</strong> reculer. Je dois pousserune fois, <strong>de</strong>ux fois et voilà mon petit homme sort <strong>de</strong> moi, si petit, si fragile ;une livre et <strong>de</strong>mie. On me le pr<strong>en</strong>d, le dépose sur une table chauffante afin<strong>de</strong> l’intuber et qu’on puisse oxygéner ses petits poumons. Peine perdue, letube ne convi<strong>en</strong>t pas et est mal placé. Son petit coeur cesse <strong>de</strong> battre. Seule,allongée sur le lit, je suis désemparée. Mon conjoint a quitté la chambre etje vois le personnel effectuer <strong>de</strong>s manœuvres cardiaques. Au même instantoù mon conjoint revi<strong>en</strong>t, les technici<strong>en</strong>s <strong>de</strong> Sainte-Justine arriv<strong>en</strong>t, cela merassure. Les manoeuvres effectuées fonctionn<strong>en</strong>t, mon bébé repr<strong>en</strong>d vie etmoi, je repr<strong>en</strong>ds espoir. Toutefois, les technici<strong>en</strong>s m’expliqu<strong>en</strong>t qu’il peut<strong>en</strong>core exister certains risques durant le transport d’un bébé prématuré.J’appr<strong>en</strong>ds alors que mon bébé sera séparé <strong>de</strong> moi. Il doit partir pour Sainte-Justine et moi, rester ici, à Valleyfield.12 février 2012Je n’ai pas dormi <strong>de</strong> la nuit. Comm<strong>en</strong>t peut-on dormir loin <strong>de</strong> son bébé <strong>en</strong>sachant que tout peut arriver à tout instant ? J’obti<strong>en</strong>s mon congé <strong>de</strong> l’hôpitalet vivem<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> compagnie <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong> mon conjoint, jepars pour Sainte-Justine. À mon arrivée, j’appr<strong>en</strong>ds que mon petit garçonsouffre d’hémorragie cérébrale sta<strong>de</strong> 2. Je peux <strong>en</strong>fin aller le toucher et jeress<strong>en</strong>s toute la fébrilité qui se dégage <strong>de</strong> son petit corps. Il bouge les jambeset les bras. Il a l’air plein <strong>de</strong> santé. <strong>Ma</strong>lheureusem<strong>en</strong>t, Noa, tu es passé dusta<strong>de</strong> 2 au sta<strong>de</strong> 4 et là où nous avions le <strong>plus</strong> d’espoir, tout s’est évanoui,car on a compris ce que cela signifiait, que bi<strong>en</strong>tôt tu partirais loin <strong>de</strong> nouset c’est ainsi que, tous réunis à tes côtés, <strong>en</strong> ce 14 février 2012, nous t’avons143


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>fait baptiser <strong>en</strong> ce jour <strong>de</strong> Saint-Val<strong>en</strong>tin. Ton papa et moi avons pu te serrerdans nos bras, te donner <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> petits baisers, le <strong>plus</strong> d’amour possibleet ton premier et <strong>de</strong>rnier bain, avant ton repos éternel.Noa, je t’aime et t’aimerai à jamais.<strong>Ma</strong>man XXXN.B. Noa Carrier Haineault est décédé le 15 février 2012 à 2 h 5 du matin.Claudine Carrier, 1 er cycleC<strong>en</strong>tre Jean-XXIII (Ormstown), CS <strong>de</strong> la Vallée-<strong>de</strong>s-TisserandsEnseignante : <strong>Ma</strong>rie Leduc, Syndicat <strong>de</strong> Champlain49. Retour à la réalitéAu cœur <strong>de</strong>s ténèbres, à la tombée <strong>de</strong> la nuit alors que tous sont profondém<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dormis, un petit garçon au beau milieu <strong>de</strong> la cuisine se ti<strong>en</strong>t droitcomme un « I ». Il fixe int<strong>en</strong>sém<strong>en</strong>t l’extrémité d’un bocal au-<strong>de</strong>ssus du frigo.C’est Toya, tout juste âgé <strong>de</strong> huit ans. Il câline son ours <strong>en</strong> peluche au point<strong>de</strong> l’étrangler et il mâchouille le coin <strong>de</strong> son doudou qui traîne par terre<strong>de</strong>rrière lui. Évi<strong>de</strong>mm<strong>en</strong>t, il désire <strong>plus</strong> que tout s’approprier les biscuits auchocolat que conti<strong>en</strong>t le bocal. <strong>Ma</strong>is le frigo, gigantesque, démesuré commeun Goliath, touchant presque les nuages telle la tige d’un haricot magique,r<strong>en</strong>d la tâche impossible. Toya ne perd pas espoir, il est déterminé. Il s’élanceet bondit. Il s’agrippe, il glisse et recomm<strong>en</strong>ce. Ri<strong>en</strong> à faire. Il déci<strong>de</strong> donc<strong>de</strong> concevoir un plan et il accourt pour empiler toutes sortes d’objets luipassant par la main. Son échelle improvisée chambranle <strong>de</strong> gauche à droite,mais Toya est satisfait. Il grimpe au sommet, sa construction ti<strong>en</strong>t le coup. Ils’étire et jette un œil <strong>en</strong>vieux au bocal.<strong>Ma</strong>lheur, il est vi<strong>de</strong> !Notre pauvre petit est indigné, il doit regagner le lit bredouille. Il re<strong>de</strong>sc<strong>en</strong>davec mauvaise humeur, maudissant l’infâme Gobelin glouton. Il s’empressed’effacer les traces, tout ranger, tout replacer. C’est une scène <strong>de</strong> crimemême si le petit voleur n’a pas eu <strong>de</strong> butin et finalem<strong>en</strong>t, il rebroussechemin vers sa chambre. Soudain, <strong>en</strong> passant <strong>de</strong>vant la chambre <strong>de</strong>s144


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>par<strong>en</strong>ts, il s’arrête et t<strong>en</strong>d l’oreille. Cela avait été bref, mais il avait <strong>en</strong>t<strong>en</strong>duun bruit familier. Un bruit qu’il reconnaîtrait <strong>en</strong>tre mille. C’était le « Crunch-Crunch » <strong>de</strong> biscuit que l’on croque. Il ouvrit la porte à la volée pour ydécouvrir son père <strong>en</strong> flagrant délit.« <strong>Ma</strong>is… qu’est-ce que tu fais papa ? »Le visage <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>fant s’empourpre. Il passe <strong>de</strong> béat à colère rouge. Son pèr<strong>en</strong>’a pas le temps d’avaler sa bouchée pour placer un mot que le petit éclate.On lui avait toujours dit que les pâtisseries disparaissai<strong>en</strong>t par magie, àcause du fameux Gobelin glouton, mais c’était un m<strong>en</strong>songe. C’était sonpère le Gobelin glouton, pas étonnant qu’il ait un si gros v<strong>en</strong>tre ! Et le Père-Noël dans tout ça ? C’était lui aussi ? Si c’était le cas, ça voudrait dire que laFée <strong>de</strong>s <strong>de</strong>nts n’existe pas non <strong>plus</strong> et que dire du Bonhomme Sept-Heures ?Toya avait <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> crier à l’injustice, la trahison était trop gran<strong>de</strong>, impardonnable.Il avait l’impression que c’était tout son mon<strong>de</strong> qui tombait <strong>en</strong> morceaux.Il n’arrivait <strong>plus</strong> à réfléchir comme il faut, alors il s’<strong>en</strong>fuit.En moins <strong>de</strong> temps qu’il faut pour dire « Biscuit », il se trouvait déjà <strong>de</strong>uxrues <strong>plus</strong> loin. Très vite, les lumières <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t embrouillées parles larmes qui coul<strong>en</strong>t à flots le long <strong>de</strong> ses joues. L’<strong>en</strong>fant court <strong>en</strong>core et<strong>en</strong>core, indéfinim<strong>en</strong>t. Ses poumons s’<strong>en</strong>flamm<strong>en</strong>t, mais il ne s’arrête pas. Aucontraire, il pousse <strong>plus</strong> fort après chaque <strong>en</strong>jambée, pour aller <strong>plus</strong> vite,pour oublier. Il plisse les yeux et serre les <strong>de</strong>nts. Sans réfléchir, il file toutdroit. Puis tout s’arrête. D’abord, il y a un flash aveuglant et survi<strong>en</strong>t uncrissem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> pneus. Le choc fut brutal, la douleur, mordante. Toya n’arrivait<strong>plus</strong> à compr<strong>en</strong>dre ce qui se passait, c’était le chaos total dans sa tête. Çabourdonnait. Quand il réussit à ouvrir les yeux, il vit qu’une jolie fille blon<strong>de</strong>le regardait. P<strong>en</strong>chée au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> lui, elle semblait inquiète. Le garçonnetl’observe, couché <strong>de</strong> tout son long sur le trottoir. Il est hypnotisé par ses yeuxbleu électrique et ses lèvres qui boug<strong>en</strong>t, mais d’où ne sort aucun son. C’estle sil<strong>en</strong>ce, comme le mom<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre le rêve et l’éveil, l’<strong>en</strong>droit neutre etimpassible d’une semi-dominance du subconsci<strong>en</strong>t où le temps n’a <strong>plus</strong> savaleur et où un brouillard consistant gâche toute clarté.Le mom<strong>en</strong>t magique s’<strong>en</strong>vole, remplacé par une souffrance palpable. Unevive douleur au bassin et aux tempes lui tire un gémissem<strong>en</strong>t et ses idées seremett<strong>en</strong>t <strong>en</strong> place <strong>en</strong> un clin d’œil. Il se souvi<strong>en</strong>t, il avait été plaqué au solet il s’<strong>en</strong> était fallu <strong>de</strong> peu pour qu’il soit réduit <strong>en</strong> bouillie au milieu <strong>de</strong> laroute par un gros camion. Les mots assourdis <strong>de</strong> la fille lui parvi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t peuà peu avec <strong>plus</strong> <strong>de</strong> précision, <strong>plus</strong> <strong>de</strong> s<strong>en</strong>s. Il décrypte une question : est-ce145


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>que tu vas bi<strong>en</strong> ? Il allait bi<strong>en</strong> ? Il ne savait <strong>plus</strong>. Autant physiquem<strong>en</strong>t quem<strong>en</strong>talem<strong>en</strong>t, tout allait mal. Dans un ultime désespoir, il lui dit tout, luicrachant ce qu’il avait sur le cœur comme s’il ne parlait pas à une étrangère,mais à sa meilleure amie. Il expliquait combi<strong>en</strong> il avait détesté qu’on luim<strong>en</strong>te et donc qu’il détestait maint<strong>en</strong>ant son père. La fille l’écoutait avec unrespect qu’elle aurait dédié au <strong>plus</strong> sage <strong>de</strong> ses aînés. Elle s’ag<strong>en</strong>ouille<strong>en</strong>suite <strong>en</strong> souriant.« Tu sais, l’exist<strong>en</strong>ce est un subalterne du choix. Tu peux déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong> croireou non à tout ce que tu veux. C’est cette croyance qui donne vie à ton imaginaire,qui te permet <strong>de</strong> trouver une solution à presque tout et qui te donnedu réconfort dans les mom<strong>en</strong>ts les <strong>plus</strong> difficiles comme celui-ci. »Toya ne compr<strong>en</strong>ait pas tout, mais le calme était rev<strong>en</strong>u, il était maint<strong>en</strong>antmû d’une paix intérieure quasi in<strong>de</strong>structible. Finalem<strong>en</strong>t, les adultes neracont<strong>en</strong>t pas <strong>de</strong> m<strong>en</strong>songe, ils cré<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>histoire</strong>s pour nourrir le rêve, avecl’int<strong>en</strong>tion <strong>de</strong> r<strong>en</strong>dre la vie <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>.Sarah Clermont, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Saint-Laur<strong>en</strong>t (Sainte-<strong>Ma</strong>rie-<strong>de</strong>-Blandford), CS <strong>de</strong> la RiveraineEnseignant : Christian Roy, Syndicat <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants <strong>de</strong> la Riveraine50. Lettre à mon idoleSalut <strong>Ma</strong>rtin,Aujourd’hui, j’ai choisi <strong>de</strong> t’écrire cette lettre parce que tu es un modèlepour moi. On a quelque chose <strong>en</strong> commun, on a chacun une différ<strong>en</strong>ce et<strong>de</strong>puis toujours, tu es ma source d’inspiration.Avant d’être chanteur, tu as travaillé pour Bell Canada comme graphistep<strong>en</strong>dant près <strong>de</strong> 3 ans. Tu avais fait <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>en</strong> graphisme au CollègeAhuntsic. Tu as eu le courage <strong>de</strong> quitter Bell Canada pour gagner ta vie <strong>en</strong>musique et vivre ta passion. La chanson t’a fait changer <strong>de</strong> voie et sortir <strong>de</strong>ta coquille.<strong>Ma</strong>rtin, <strong>de</strong>puis que je te connais, tu es mon chanteur préféré. Tu m’as inspiréegrâce à la façon avec laquelle tu as surmonté ton handicap. Tu es un bonexemple <strong>de</strong> confiance <strong>en</strong> soi. Tu n’as pas reculé, tu as surmonté <strong>plus</strong>ieursdéfis. Tu as eu le courage d’affronter les regards <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s. Wow !!!146


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Tu m’as confié récemm<strong>en</strong>t que c’est avec le support <strong>de</strong> tes par<strong>en</strong>ts et amisque tu as surmonté les difficultés. Je suis vraim<strong>en</strong>t d’accord avec toi, car jesuis passée par le même chemin.Lorsque tu as agi comme porte-parole <strong>de</strong> la Semaine québécoise <strong>de</strong>s personneshandicapées, qui a lieu au début juin, je suis allée voir ton spectacle« Le piano et la voix ». Ce spectacle a connu un imm<strong>en</strong>se succès. Je p<strong>en</strong>seque cette semaine ne pourrait pas avoir un meilleur modèle que toi. Tu estrès humain, ton sourire est contagieux et ta g<strong>en</strong>tillesse est remarquable.J’étais alors allée te r<strong>en</strong>contrer. J’étais énervée <strong>de</strong> te parler.Tu as été généreux <strong>de</strong> consacrer autant <strong>de</strong> temps à chaque personne, <strong>de</strong>signer <strong>de</strong>s autographes et <strong>de</strong> nous laisser pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s photos. Ton autographe,je le gar<strong>de</strong> précieusem<strong>en</strong>t, il est très significatif pour moi.Quand tu as été sélectionné pour participer à la cérémonie d’ouverture <strong>de</strong>sJeux paralympiques <strong>en</strong> 2010, j’étais très émue qu’on reconnaisse mondialem<strong>en</strong>tton courage et ta persévérance.Ta chanson <strong>Ma</strong> petite douceur est très touchante et elle m’a fait monter leslarmes aux yeux. Ta fille, je la trouve chanceuse d’avoir un père aussi s<strong>en</strong>sibleque toi. En <strong>plus</strong> <strong>de</strong> ta s<strong>en</strong>sibilité, j’adore la force <strong>de</strong> ta voix (surtout quandtu chantes ma chanson préférée Quand) ainsi que ta joie <strong>de</strong> vivre (très prés<strong>en</strong>telorsque tu interprètes la chanson Casanova).Tu es un homme exemplaire qui joue <strong>de</strong> la guitare basse et fait <strong>de</strong> la motomalgré ta situation. Je suis certaine que <strong>plus</strong>ieurs personnes n’aurai<strong>en</strong>t pasp<strong>en</strong>sé que ça serait possible pour toi, mais tu les as fait m<strong>en</strong>tir. Bravo !!! C’estune leçon <strong>de</strong> vie, peu importe notre différ<strong>en</strong>ce, nos forces et nos faiblesses.On peut continuer, même s’il arrive <strong>de</strong>s obstacles dans notre vie, on peuttoujours atteindre nos buts. Quand on veut, on peut !Félicitations <strong>Ma</strong>rtin pour tout ton courage !!!D’une <strong>de</strong> tes fans, inspirée à jamais,Eve PoirierEve Poirier, Intégration socialeCFGA <strong>de</strong> Nicolet, CS <strong>de</strong> la RiveraineEnseignante : Nadia Juli<strong>en</strong>, Syndicat <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants <strong>de</strong> la Riveraine147


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>51. Une poupée <strong>de</strong> porcelaineD’un pas sûr, je l’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais franchir le corridorJe me recroquevillais comme un petit castorDans mes couvertures multicoloresJe n’avais que trois ans, papa s’amusait avec mon corpsSon regard mesquin m’annonçait l’instant <strong>de</strong> frayeurMon corps angoissait et j’avais très peurQuand la lueur arrivait, je savais que c’était l’heureJe me préparais à ne pas s<strong>en</strong>tir ses ar<strong>de</strong>ursIl baladait ses mains sur mon petit jardinSes gros doigts, je les s<strong>en</strong>tais malsainsPapa ! Tu me fais beaucoup <strong>de</strong> chagrinNe suis-je pas ton petit poussin ?Plusieurs nuits, ma chair gémissait dans mon nid douilletElle savait que quelque chose arriverait d’un être si prèsHeureusem<strong>en</strong>t, mon âme s’<strong>en</strong>fuyaitPour résister aux caresses qui me bouleversai<strong>en</strong>tJe n’avais d’autres choix que <strong>de</strong> subirTrès souv<strong>en</strong>t, j’avais <strong>en</strong>vie <strong>de</strong> vomirCar mon géniteur v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> jouirÀ cet instant, je voulais mourirSon liqui<strong>de</strong> séminal éclaboussait mon petit visageEt s’imprégnait jusque dans mes fosses nasalesJe reconnaissais cette o<strong>de</strong>ur très désagréableJe me s<strong>en</strong>tais comme un oiseau dans une cageEst-ce que quelqu’un pouvait m’ai<strong>de</strong>r ?<strong>Ma</strong> petite bouche n’arrivait pas à hurlerSeules mes mains <strong>de</strong>meurai<strong>en</strong>t croiséesAfin <strong>de</strong> pouvoir me protégerÉtais-je si mauvaise pour mériter qu’il m’<strong>en</strong>sorcelle ?Ou trop g<strong>en</strong>tille ! Ou trop <strong>belle</strong> !Tant <strong>de</strong> questions pour une si petite <strong>de</strong>moiselleDont les yeux ne pouvai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> voir le ciel148


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Pourrais-je vivre ma vie ?Dans un mon<strong>de</strong> autre que celui-ci ?Où mon corps a été saliPar un être mauditJe n’avais aucun moy<strong>en</strong> d’arrêter ces émoisQui me plongeai<strong>en</strong>t continuellem<strong>en</strong>t dans un mon<strong>de</strong> sournoisOù trop d’années, je n’étais qu’une proieC’est sans doute pour ça que ce secret est resté longtemps au fond <strong>de</strong> moi<strong>Ma</strong> vie n’était <strong>plus</strong> que confusionJe consommais toutes sortes <strong>de</strong> stupéfiantsEt je me consumais dans ce mon<strong>de</strong> <strong>en</strong> errantNe vivant <strong>plus</strong> que dans l’illusionÀ l’intérieur <strong>de</strong> moi, tout était pénibleDécouragée, j’étais très s<strong>en</strong>sibleEt je n’avais <strong>en</strong>vie que <strong>de</strong> faire le vi<strong>de</strong>Jour après jour, je songeais au suici<strong>de</strong>Je nourrissais <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> mes souffrancesTout <strong>en</strong> sachant que je me faisais viol<strong>en</strong>ceJe <strong>de</strong>vais définitivem<strong>en</strong>t gar<strong>de</strong>r contact avec ma consci<strong>en</strong>ceElle seule me gui<strong>de</strong>rait vers l’abstin<strong>en</strong>ceJe ne pouvais <strong>plus</strong> cultiver toutes ces blessuresJe me <strong>de</strong>vais <strong>de</strong> faire confiance à un être pour qu’il me rassurePour <strong>en</strong>fin briser mon armureEt sortir une fois pour toutes <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> obscurJour après jour, semaine après semaine, p<strong>en</strong>dant vingt ansJe r<strong>en</strong>contrais le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la thérapie <strong>en</strong> me disantQu’<strong>en</strong>fin j’étais avec <strong>de</strong>s êtres très aimantsAvec qui je parvi<strong>en</strong>drais à me libérer au bon mom<strong>en</strong>tSortie <strong>de</strong> cette vie d’horreur, je comm<strong>en</strong>çais à vivre mon exist<strong>en</strong>ceJe remerciais tous ceux et celles qui m’avai<strong>en</strong>t fait confianceEnfin, je pouvais vivre sainem<strong>en</strong>t et avec l’éléganceD’une femme qui aimerait, un jour, être une heureuse interv<strong>en</strong>anteSylvie Bernard, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre l’Accore, CS <strong>de</strong>s Gran<strong>de</strong>s-SeigneuriesEnseignante : Claudine Gr<strong>en</strong>ier, Association <strong>de</strong>s professeurs <strong>de</strong> Lignery149


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>52. <strong>Ma</strong> preuve <strong>de</strong> courageDans la vie, il y a <strong>de</strong> bons et <strong>de</strong> mauvais jours. Nous sommes parfois mis audéfi, mais il faut savoir se relever, se retrousser les manches pour aller <strong>plus</strong>loin. J’ai vécu une situation difficile dans le passé. J’ai affronté les obstacleset je suis maint<strong>en</strong>ant <strong>plus</strong> fort. Je suis fier <strong>de</strong> ce que je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u. Voici lerécit <strong>de</strong> ma <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>.J’ai toujours eu une maladie ; cette maladie s’appelle l’hypotonie. Cela mer<strong>en</strong>d moins fort et <strong>plus</strong> s<strong>en</strong>sible au froid. Donc, puisque j’étais différ<strong>en</strong>t <strong>de</strong>sautres, j’ai comm<strong>en</strong>cé à me faire intimi<strong>de</strong>r <strong>en</strong> première secondaire. Personn<strong>en</strong>e rêve d’avoir ce g<strong>en</strong>re <strong>de</strong> situation dans sa vie. Mon intimidateur m’a faitplein <strong>de</strong> choses désagréables et humiliantes comme me mettre <strong>de</strong>s brillantsdans les cheveux, monter mes amis contre moi, faire <strong>de</strong>s mauvais coups puismettre ça sur mon dos et partir <strong>de</strong>s rumeurs sur moi. Tout cela a fait <strong>de</strong> moiune personne extrêmem<strong>en</strong>t gênée. J’avais <strong>de</strong> la difficulté à parler <strong>de</strong>vant lesg<strong>en</strong>s <strong>de</strong> ma classe parce que je ne voulais pas faire rire <strong>de</strong> moi.En janvier 2010, mes par<strong>en</strong>ts étai<strong>en</strong>t exaspérés. Ils m’ont laissé finir monannée scolaire et nous avons déménagé à Beaulac-Garthby. J’ai été <strong>de</strong>ux ansà la polyval<strong>en</strong>te <strong>de</strong> Disraeli avec la crainte <strong>de</strong> me faire une fois <strong>de</strong> <strong>plus</strong> intimi<strong>de</strong>rou <strong>de</strong> me faire ridiculiser <strong>en</strong>core et <strong>en</strong>core. Mes amis d’école metrouvai<strong>en</strong>t bizarre parce que j’étais trop réservé.Le 25 septembre 2011, il y a eu un drame. Un <strong>de</strong> mes amis d’<strong>en</strong>fance estmort dans un acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> VTT. J’ai eu beaucoup <strong>de</strong> peine. De sa mort, j’airet<strong>en</strong>u d’être <strong>plus</strong> fort et <strong>de</strong> moins me laisser marcher sur les pieds. J’ai prisma vie et mon av<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> main. Avec l’école, je me suis trouvé un stage <strong>de</strong>pâtissier chez IGA à Disraeli. J’avais tellem<strong>en</strong>t hâte <strong>de</strong> comm<strong>en</strong>cer à travaillerlà. Par contre, j’ai <strong>en</strong>core eu à surmonter un obstacle alors qu’à monpremier jour dans cette épicerie, le pire <strong>de</strong>s scénarios est arrivé. Je me suisfait r<strong>en</strong>voyer. Je n’ai jamais su pourquoi j’ai été congédié. On ne m’a jamaisdonné la chance d’appr<strong>en</strong>dre. Cep<strong>en</strong>dant, à mon <strong>de</strong>uxième stage qui s’estdéroulé chez Tim Hortons, j’ai bi<strong>en</strong> écouté les consignes que me donnai<strong>en</strong>tles autres employés et j’ai fait att<strong>en</strong>tion à tout ce que je disais. Dans ce restaurant,tout s’est très bi<strong>en</strong> passé. J’étais avec un groupe extraordinaire etj’appréciais toutes les personnes avec qui je travaillais.Au même mom<strong>en</strong>t, à l’école secondaire <strong>de</strong> Disraeli, j’étais <strong>en</strong> formationpréparatoire au marché du travail. Au cours <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>, j’ai eu <strong>de</strong>ux150


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Méritas, l’un pour mes performances académiques et l’autre pour monimplication à l’école et ma joie <strong>de</strong> vivre. Celui pour mes performances académiques,j’<strong>en</strong> suis extrêmem<strong>en</strong>t fier. Aussi, une autre <strong>de</strong> mes gran<strong>de</strong>sfiertés, c’est d’avoir été le premier <strong>de</strong> cette classe à participer au voyage àNew York avec les élèves <strong>de</strong> cinquième secondaire. J’ai d’ailleurs été félicitépour cela par mes <strong>en</strong>seignants lors du Gala Méritas.Cette année, j’étudie à l’éducation <strong>de</strong>s adultes, au c<strong>en</strong>tre <strong>Ma</strong>rius-Ouellet. Jeme suis donné comme défi d’être dans le conseil étudiant et <strong>de</strong> me prés<strong>en</strong>terpour être le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> mon école. J’ai réussi ce défi avec succès : j’aivaincu ma peur <strong>de</strong> parler <strong>de</strong>vant les g<strong>en</strong>s. <strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>ant, je le fais pour leurannoncer les activités à v<strong>en</strong>ir et je vais aussi animer une partie du GalaMéritas du c<strong>en</strong>tre. Je n’aurais jamais imaginé faire cela un jour !Mon texte prouve que, avec un peu <strong>de</strong> volonté, c’est facile <strong>de</strong> tout faire.<strong>Ma</strong>is il faut beaucoup <strong>de</strong> courage et <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s qui nous souti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t, quicroi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> nous et qui nous ai<strong>de</strong>nt à réaliser les buts que nous nous sommesfixés. À tous ceux qui me lis<strong>en</strong>t, j’espère que mon texte leur aura donné unpeu <strong>de</strong> confiance et qu’il les ai<strong>de</strong>ra à se dépasser dans la vie. Tout le mon<strong>de</strong>est capable <strong>de</strong> réaliser les choses qu’il p<strong>en</strong>se être incapable <strong>de</strong> faire. Il fautcroire <strong>en</strong> soi ! Je souhaite à tous d’avoir la force d’avancer dans la vie.Joey Beaulieu, AlphabétisationC<strong>en</strong>tre <strong>Ma</strong>rius-Ouellet (Disraeli), CS <strong>de</strong>s AppalachesEnseignante : Caroline Leblond, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’Amiante53. Jusqu’à ce que la mort nous sépare ?Te rappelles-tu <strong>de</strong> notre première r<strong>en</strong>contre ? Ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> spécial, mais jeme souvi<strong>en</strong>s <strong>de</strong> chaque détail, aussi inutile qu’il puisse paraître : appuyécontre le mur à l’extérieur <strong>de</strong> l’école, je lisais « Dieu est mort » <strong>de</strong> Nietzsche<strong>en</strong> fumant une cigarette, lorsque toi et tes amies êtes v<strong>en</strong>ues m’abor<strong>de</strong>r pourun briquet. Les yeux et l’esprit absorbés par ma lecture, je pus flairer unarôme unique, <strong>en</strong>ivrant. C’était ton parfum que la douce brise d’automnesoufflait vers mon nez. Je levai la tête et mon regard r<strong>en</strong>contra le ti<strong>en</strong>, puiss’y accrocha. Des yeux bleu-gris comme un ciel <strong>de</strong> janvier, <strong>de</strong> longs cheveuxroux et frisés, le teint pâle, mais naturel et un visage si doux à l’œil, si magnifique.Jamais je n’avais vu une fille dotée d’une beauté pareille. N’étant pas151


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>une personne très volubile, je restai là à sourire bêtem<strong>en</strong>t, sans pouvoir fairesortir un son. Tes amies trouvai<strong>en</strong>t cela bi<strong>en</strong> drôle <strong>de</strong> voir une telle réactionv<strong>en</strong>ant du freak <strong>de</strong> l’école… Moi-même, j’étais étonné par ma façon d’agir.Après avoir donné le briquet à ta copine, j’eus finalem<strong>en</strong>t le courage <strong>de</strong>t’adresser la parole :« Salut… T’es nouvelle ?– Oui, ma famille a emménagé à Alma la semaine <strong>de</strong>rnière. Je suis originaire<strong>de</strong> Québec, mais Rachel et Annie sont mes cousines. Elles m’ontaccueillie dans leur gang pour pas que je me s<strong>en</strong>te trop seule... »Une voix douce et timi<strong>de</strong> traversait tes lèvres. Tu semblais être tout lecontraire <strong>de</strong> tes <strong>de</strong>ux chipies <strong>de</strong> cousines, dois-je avouer. Quelques secon<strong>de</strong>saprès cette discussion éclair, tes quatre gui<strong>de</strong>s touristiques étai<strong>en</strong>t déjàprêtes à partir. J’aurais bi<strong>en</strong> voulu te parler <strong>plus</strong> longtemps ou du moins tesouhaiter une bonne fin <strong>de</strong> journée, mais elles t’avai<strong>en</strong>t déjà emm<strong>en</strong>ée loin<strong>de</strong> moi… De retour à ma lecture.Les semaines passèr<strong>en</strong>t et nous comm<strong>en</strong>çâmes à nous parler <strong>de</strong> <strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong>.Nous avions <strong>plus</strong>ieurs opinions et goûts <strong>en</strong> commun ; quelque chose que jeretrouvais peu fréquemm<strong>en</strong>t lors <strong>de</strong> mes autres interactions sociales. Peu àpeu, je tombais <strong>en</strong> amour avec ton cynisme et ton intellectualité. Comm<strong>en</strong>tavais-je pu passer dix-neuf ans sans ress<strong>en</strong>tir ce s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t si fou, à un telpoint qu’il me faisait planer ? Bi<strong>en</strong> sûr, j’avais déjà eu le béguin pour une ou<strong>de</strong>ux filles dans le passé, mais je n’avais jamais souffert <strong>de</strong> la maladie <strong>de</strong>Cupidon. Pour la première fois <strong>de</strong> mon exist<strong>en</strong>ce, je faisais <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>tconfiance à quelqu’un… Pourtant, je n’aurais pu être moins inquiet...Plus le temps avançait, <strong>plus</strong> nos li<strong>en</strong>s se r<strong>en</strong>forçai<strong>en</strong>t. Finalem<strong>en</strong>t décidé àt’avouer mes s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts, je pris le taureau par les cornes et te dévoilai letout. Je m’att<strong>en</strong>dais au pire, comme à l’habitu<strong>de</strong> ; tu me révélas pourtant quecet amour était réciproque et que tu att<strong>en</strong>dais seulem<strong>en</strong>t le bon mom<strong>en</strong>tpour me l’avouer… Je croyais bi<strong>en</strong> avoir perdu trois <strong>de</strong>nts tellem<strong>en</strong>t mamâchoire frappa le sol avec int<strong>en</strong>sité ! J’aurais dansé <strong>de</strong> joie si ce n’était dufait que je déteste la danse. Voulant célébrer notre couple fraîchem<strong>en</strong>t né, jet’invitai à délaisser les cours <strong>de</strong> l’après-midi pour aller pr<strong>en</strong>dre un café etnous diriger <strong>en</strong>suite chez moi pour regar<strong>de</strong>r un film sur la vie <strong>de</strong> JeffreyDahmer ; quoi <strong>de</strong> <strong>plus</strong> romantique qu’un long métrage à propos d’un tueur<strong>en</strong> série nécrophile-cannibale !152


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Deux ans <strong>plus</strong> tard, nous étions toujours inséparables. Toutefois, nos choix<strong>de</strong> carrière nous poussèr<strong>en</strong>t à quitter le Lac-Saint-Jean. Je savais bi<strong>en</strong> qu<strong>en</strong>ous n’aboutirions à ri<strong>en</strong> dans la région : nous voulions tous les <strong>de</strong>ux êtrejournalistes. La faim pousse le loup hors du bois, c’est bi<strong>en</strong> vrai ! Bagages àla main, l’optimisme au maximum, nous avions comme <strong>de</strong>stinationMontréal. Personnellem<strong>en</strong>t, j’aurais préféré Vi<strong>en</strong>ne pour son <strong>histoire</strong> et saculture <strong>plus</strong> que riches, mais il faut monter une marche à la fois pour ser<strong>en</strong>dre à ses rêves ! <strong>Ma</strong>is je m’écarte du sujet… Arrivés dans la métropole,nous avons hélé un taxi pour nous r<strong>en</strong>dre à l’appartem<strong>en</strong>t que nous avionschoisi et visité quelques mois auparavant. C’était petit et on se serait crudans un A&W : les murs et la moquette étai<strong>en</strong>t marron et orange. Toutefois,la somme modique que nous <strong>de</strong>vions débourser chaque mois comp<strong>en</strong>saitpour la décoration digne d’un daltoni<strong>en</strong>.La vie <strong>en</strong> ville n’était pas aussi facile que tu l’aurais espéré. Je pus facilem<strong>en</strong>tme trouver un emploi dans un journal, mais la chance n’était pas <strong>de</strong> toncôté. Après <strong>plus</strong>ieurs mois <strong>de</strong> recherches infructueuses, la dépression tefrappa <strong>de</strong> plein fouet. Thérapie, changem<strong>en</strong>ts dans notre routine, t<strong>en</strong>tatives<strong>de</strong> réaliser ton rêve d’avoir une famille : ri<strong>en</strong>. Un soir, <strong>en</strong> arrivant à l’appartem<strong>en</strong>t,je te trouvai p<strong>en</strong>due au milieu du salon… Cette tragédie s’est passéeil y a six mois. Aujourd’hui aurait été le sixième anniversaire <strong>de</strong> notrecouple. Comme ca<strong>de</strong>au, j’ai décidé d’acheter ce fameux parfum qui m’avaitséduit il y a cinq ans <strong>de</strong> cela... Il joindra l’utile à l’agréable, car les voisinscomm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t à se plaindre <strong>de</strong> l’o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> « vian<strong>de</strong> pourrie »...François Pedneault-Bilo<strong>de</strong>au, 2 e cyclePavillon Damase-Boulanger (Alma), CS du Lac-Saint-JeanEnseignante : Christine Turgeon, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Lac-Saint-Jean153


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Adieu à la jeunesse54. L’automne <strong>de</strong> la vieIndubitablem<strong>en</strong>t, je p<strong>en</strong>se que la jeunesse est une époque dorée et que jeme rappelle avec nostalgie. C’est une époque brève, inoubliable, romantique,vibrante, émotive et heureuse. La jeunesse est l’étape <strong>de</strong> la vie la <strong>plus</strong>créative et vigoureuse où tout est frais et nouveau comme un nuage vaporeuxdans le ciel avec <strong>de</strong>s éclairs <strong>de</strong> couleur rose, mais <strong>en</strong> se rappelant quecette même jeunesse très appréciée et désirée a connu <strong>de</strong>s mom<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> luttes,<strong>de</strong> soucis, <strong>de</strong> privations et n’a jamais été libre d’incertitu<strong>de</strong>s, d’angoisses, <strong>de</strong>compét<strong>en</strong>ces, <strong>de</strong> rivalités et d’anxiété.<strong>Ma</strong>is la jeunesse n’est pas éternelle. Après la gran<strong>de</strong> tempête arrive la tranquillité.C’est le grand échange. Heureusem<strong>en</strong>t, la nature comme les êtreshumains chang<strong>en</strong>t pour que la vie continue son processus <strong>de</strong> transformation.<strong>Ma</strong>is la jeunesse passe, et ça, c’est une réalité <strong>de</strong> la vie. La vérité, c’estque, sans savoir quand exactem<strong>en</strong>t ou sans pouvoir définir un âge précis,pour certains <strong>plus</strong> tôt et pour d’autres <strong>plus</strong> tard, vi<strong>en</strong>t une pério<strong>de</strong> où toutral<strong>en</strong>tit et s’arrête. Le support pour la vie se transforme <strong>en</strong> un flux <strong>de</strong> paixqui avance l<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t, presque sans qu’on ress<strong>en</strong>te quelque chose <strong>de</strong> grandiose,<strong>de</strong> profond et d’incomm<strong>en</strong>surable qui est la fin <strong>de</strong> tous les voyages.Alors, nous arrivons à la maturité : donc, bi<strong>en</strong>v<strong>en</strong>ue soit la maturité !La maturité n’est pas la <strong>de</strong>mi-journée <strong>de</strong> la vie ni le soir ni la nuit, non, c’estun mom<strong>en</strong>t imprécis qui arrive discrètem<strong>en</strong>t, mais c’est quelque chosed’extraordinaire, car je suis à un mom<strong>en</strong>t où nous ne sommes <strong>plus</strong> préoccupéspar les changem<strong>en</strong>ts que connaiss<strong>en</strong>t les nouvelles générations, ni mortifiéset affectés par les nouvelles t<strong>en</strong>dances ou habitu<strong>de</strong>s parce que nous nesommes <strong>plus</strong> obligés <strong>de</strong> changer ou <strong>de</strong> comm<strong>en</strong>cer <strong>de</strong> nouvelles formes.Notre âge est déjà une justification suffisante pour nous maint<strong>en</strong>ir <strong>en</strong> marge,mais sans faire la sour<strong>de</strong> oreille aux choses <strong>de</strong> l’ess<strong>en</strong>tiel. Reconnaître ceque nous avons réalisé et ne pas poursuivre ce que nous n’avons pas fait. Àce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> la vie, il ne fait aucun doute. Alors, pourquoi nous inquiéter ?Aujourd’hui, c’est l’av<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> quelqu’un qui ne s<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> la peur comme toutêtre humain dans sa jeunesse. Après tout, je suis <strong>en</strong>core ici. J’ai vécu pleinem<strong>en</strong>tma jeunesse et je suis arrivé à la maturité. Ce n’est <strong>plus</strong> nécessaire pourmoi <strong>de</strong> faire <strong>plus</strong> <strong>de</strong> choses ni <strong>de</strong> projets inaccessibles pour l’av<strong>en</strong>ir, parceque pour moi l’av<strong>en</strong>ir est maint<strong>en</strong>ant, et le temps passe rapi<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t. Je nedirai jamais : il est trop tard pour le faire. C’est que le temps est court, et nous154


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>ne nous r<strong>en</strong>dons pas compte du comm<strong>en</strong>t et du quand il passe. Nous reconnaissonsseulem<strong>en</strong>t ce qui va être laissé <strong>en</strong> arrière <strong>de</strong> nous : les cheveuxblancs et les ri<strong>de</strong>s sur la peau indiquant ainsi qu’ils sont le fruit <strong>de</strong> l’expéri<strong>en</strong>ced’heures amères et d’heures <strong>de</strong> miel.Hier, quelqu’un m’a dit : Mon vieux ! Pour moi c’était effrayant, et pour unmom<strong>en</strong>t, j’ai été bouleversé, mais, malgré l’impression causée par cetteparole, je me suis dépêché <strong>de</strong> me regar<strong>de</strong>r dans le miroir et j’ai pu vraim<strong>en</strong>tme r<strong>en</strong>dre compte <strong>de</strong> combi<strong>en</strong> j’avais vieilli. À mon âge, c’est alors que jeme r<strong>en</strong>ds compte que je suis arrivé à l’automne <strong>de</strong> ma vie. Mon âge ? Monâge n’est pas dans les années que j’ai, mais dans la manière dont j’ai vécu.J’ai l’expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la vie et <strong>de</strong>s rêves <strong>en</strong>core à être remplis. Pas d’âge physiquelorsqu’ils viv<strong>en</strong>t au coeur <strong>de</strong> vivre, <strong>de</strong> jouer et d’être heureux.Me s<strong>en</strong>tir <strong>en</strong> paix avec tout le mon<strong>de</strong> et avec moi-même, c’est le <strong>plus</strong> important<strong>en</strong> ce mom<strong>en</strong>t. J’espère que, chaque jour, je pourrai <strong>en</strong>core célébrer lesoleil chaque matin et sourire au mon<strong>de</strong>. Que, lorsque j’irai quitter le port,je le ferai avec dignité. Avant <strong>de</strong> fermer la <strong>de</strong>rnière porte <strong>de</strong> ma vie et queles g<strong>en</strong>s qui m’aimai<strong>en</strong>t me pleur<strong>en</strong>t, que ce soit parce que j’ai touché leursvies tout simplem<strong>en</strong>t. Ne dites pas que la vie était bonne pour moi, mais quej’étais bon dans la vie.Quel âge dois-je avoir ? Qui s’<strong>en</strong> soucie. J’ai l’âge que je veux. J’ai l’âge oùje peux crier sans crainte tout ce que je p<strong>en</strong>se, ce que je veux sans crainte<strong>de</strong> l’échec et <strong>de</strong> ce que les g<strong>en</strong>s dis<strong>en</strong>t. J’ai l’âge <strong>de</strong> l’amour, parce quel’homme ne s’arrête pas d’aimer. Tout cela parce que j’ai l’expéri<strong>en</strong>ce <strong>de</strong>sannées vécues et la force <strong>de</strong> conviction <strong>de</strong> mes désirs.Aujourd’hui, c’est l’av<strong>en</strong>ir que nous craignions hier. Et voyez-vous, tout s’estbi<strong>en</strong> passé. Nous y voilà. Je n’ai <strong>plus</strong> à continuer à mettre <strong>plus</strong> <strong>de</strong> choses età faire <strong>de</strong>s plans pour l’av<strong>en</strong>ir <strong>de</strong> l’inatteignable, parce que, pour nous, l’av<strong>en</strong>irest ici et le temps est court. Nous n’avons pas besoin <strong>de</strong> dire <strong>plus</strong> tard :« ce que nous avons obt<strong>en</strong>u finit au début ».J’ai consci<strong>en</strong>ce que, malgré l’arrivée <strong>de</strong> l’automne, ma vie continue ; à l’intérieuravec tout ce qu’on a <strong>de</strong> p<strong>en</strong>sées, d’émotions et <strong>de</strong> s<strong>en</strong>sations et àl’extérieur avec toutes mes expéri<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> vie quotidi<strong>en</strong>ne. Sauf que, désormais,après tout ce travail intérieur, on a acquis une <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong> confiance<strong>en</strong> soi, un calme intérieur, une harmonie <strong>en</strong>tre la vie intérieure et les événem<strong>en</strong>tsextérieurs. Un s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>t <strong>de</strong> plénitu<strong>de</strong> peut pr<strong>en</strong>dre place et noushabiter. Juste être moi-même.155


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Mon <strong>histoire</strong> préférée sera toujours là, prête à ressurgir <strong>en</strong> tout temps pouroccuper toute la place, sauf qu’elle est désormais démasquée et qu’on <strong>en</strong>connaît maint<strong>en</strong>ant l’impact sur la façon d’être et d’agir.Rester <strong>en</strong> éveil, être à l’écoute <strong>de</strong> soi, <strong>de</strong>s autres et <strong>de</strong> la vie pour mieux vivreet être <strong>en</strong> paix. <strong>Ma</strong>lgré les soubresauts <strong>de</strong> la vie.Quand l’automne arrive dans la vie <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s, c’est très important <strong>de</strong> le vivreavec bonheur pour continuer à vivre p<strong>en</strong>dant une longue pério<strong>de</strong>. Vous<strong>de</strong>vez toujours sourire. Un sourire vous fera gagner dix ans <strong>de</strong> vie <strong>en</strong> <strong>plus</strong>.Celui qui rit vivra longtemps.Certainem<strong>en</strong>t, ce que nous allions être déjà, ce que nous sommes et ce qu<strong>en</strong>ous n’allions pas être parce que nous n’avons pas été ni ne serons. Pas à cepoint, il ne fait aucun doute. Donc, pour être concernés ?Victor Hugo, le grand écrivain français, disait : « Selon que vous serez fou ousage, vous composerez les rêves <strong>de</strong> votre vieillesse, <strong>de</strong>s regrets <strong>de</strong> votrejeunesse ou <strong>de</strong>s espérances <strong>de</strong> l’éternité. »Adieu à la jeunesse. Bi<strong>en</strong>v<strong>en</strong>ue à l’automne <strong>de</strong> la vie.Hector Quintero, FrancisationC<strong>en</strong>tre du Phénix (Québec), CS <strong>de</strong>s DécouvreursEnseignant : <strong>Ma</strong>rc Lavertu, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s Deux Rives55. Jardinier malgré moiJe me prés<strong>en</strong>te : Gilles Gagné, jardinier bi<strong>en</strong> malgré moi !Quand j’étais petit, on m’a donné une petite truelle et on m’a mis <strong>de</strong>vant unjardin énorme. On m’a murmuré à l’oreille « Ce jardin t’apparti<strong>en</strong>t, trouve etcultives-y ce que tu veux. »Je ne connaissais absolum<strong>en</strong>t ri<strong>en</strong> au jardinage, mais je me suis lancé dansce beau jardin aux fleurs magnifiques, pleines <strong>de</strong> couleurs, d’o<strong>de</strong>urs et <strong>de</strong>formes différ<strong>en</strong>tes.156


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Pour certaines, je me suis dit « Hmmm… non, pas <strong>de</strong> ça dans mon jardin »et je les ai arrachées sans même y p<strong>en</strong>ser.D’autres, je les ai regardées grandir, les trouvant très <strong>belle</strong>s, mais <strong>en</strong> passantprès d’elles, l’o<strong>de</strong>ur ne me plaisait pas. Elles aussi, je les ai retirées <strong>de</strong> monjardin.Jusqu’à maint<strong>en</strong>ant, je n’avais toujours pas d’expéri<strong>en</strong>ce <strong>en</strong> jardinage ; toutce que j’avais fait était <strong>de</strong> retirer <strong>de</strong>s fleurs !!En avançant dans mon jardin, j’avais cru remarquer une fleur rare et <strong>belle</strong>qui poussait <strong>plus</strong> haute que toutes les autres. J’ai t<strong>en</strong>té <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir, <strong>de</strong> luifaire <strong>de</strong> la place, arrachant même au passage quelques autres fleurs pour luipermettre d’avoir une place <strong>de</strong> choix. Quelle ne fut pas ma déceptiond’appr<strong>en</strong>dre que j’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ais <strong>de</strong> la mauvaise herbe !J’avais fait <strong>de</strong> mon jardin un <strong>en</strong>droit lugubre : plein d’espaces vi<strong>de</strong>s à forced’arracher <strong>de</strong>s fleurs, une mauvaise herbe qui pr<strong>en</strong>ait trop <strong>de</strong> place et moiqui n’avais toujours aucun tal<strong>en</strong>t pour le jardinage !<strong>Ma</strong>is un beau jour, alors que je m’asseyais à l’ombre <strong>de</strong> mon arbre préféré,j’ai remarqué une plante qui m’avait échappé parmi la multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> couleurset <strong>de</strong> formes <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>droit. Elle était cachée <strong>de</strong>rrière l’arbre et n’avait pasvraim<strong>en</strong>t grandi parce qu’elle manquait <strong>de</strong> soleil.Ne connaissant pas ladite plante, je me suis approché pour voir ce quec’était : <strong>de</strong>s branches ru<strong>de</strong>s et dures pleines d’épines poussai<strong>en</strong>t drues <strong>de</strong>rrièremon arbre et me faisai<strong>en</strong>t p<strong>en</strong>ser à un plant que j’aurais dû arracher surle champ. <strong>Ma</strong>is j’<strong>en</strong> avais assez <strong>de</strong> ne ri<strong>en</strong> connaître sur mon propre jardin.Je me suis donc équipé.Je suis, <strong>en</strong> premier lieu, allé m’acheter <strong>de</strong> meilleurs outils : un homme nepeut pas faire un bon travail sans les bons outils ! Pioche, bêche, <strong>en</strong>grais etnouveau terreau ne fur<strong>en</strong>t que mes premiers articles sur ma liste pour merefaire un beau jardin. <strong>Ma</strong>is je n’<strong>en</strong> connaissais pas <strong>plus</strong> sur l’art qui mepermettrait <strong>de</strong> refaire ce que j’avais moi-même détruit ! Je suis donc allé mechercher un livre sur comm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir un jardin. Les quelques premièrespages expliquai<strong>en</strong>t qu’une plante a besoin <strong>de</strong> trois choses primordiales : unbon sol, <strong>de</strong> l’eau et du soleil. P<strong>en</strong>sant <strong>en</strong> savoir long sur le sujet, maint<strong>en</strong>antéquipé <strong>de</strong> tous les outils nécessaires, je me r<strong>en</strong>dis dans mon jardin pour157


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>transplanter cette mystérieuse plante qui poussait toujours à l’ombre <strong>de</strong> monarbre préféré.Ouch ! Les épines m’égratignai<strong>en</strong>t et la plante ne voulait pas suivre. Lesracines étai<strong>en</strong>t profon<strong>de</strong>s et j’ai dû travailler fort juste pour la retirer <strong>de</strong> cet<strong>en</strong>droit qui ne lui conv<strong>en</strong>ait pas. Après avoir réussi à la sortir <strong>de</strong> sa pénombre,je suis allé me chercher quelque chose qui n’était pas sur ma liste, mais queje comm<strong>en</strong>çais à trouver nécessaire… <strong>de</strong>s gants !J’avais tellem<strong>en</strong>t d’espace dans mon jardin que je l’ai mise <strong>en</strong> évi<strong>de</strong>nce, aubeau milieu <strong>de</strong> la place ! J’ai arrosé, <strong>en</strong>graissé et <strong>en</strong>tret<strong>en</strong>u cette drôle <strong>de</strong>plante épineuse qui jusqu’à prés<strong>en</strong>t ne donnait aucun signe <strong>de</strong> beauté. Jouraprès jour, je t<strong>en</strong>tais <strong>de</strong> la faire grandir, <strong>de</strong> la faire fleurir, mais <strong>en</strong> vain.Qu’est-ce que je faisais <strong>de</strong> mal ?? J’avais pourtant suivi les instructions dulivre !? Je perdais espoir <strong>de</strong> voir cette plante me donner autre chose que <strong>de</strong>splaies sur les mains et les bras, et le pire c’est qu’elle pr<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> l’ampleur !OH NON ! Pas une autre mauvaise herbe !J’étais prêt à jeter l’éponge et à abandonner le jardin qui m’avait été donnéquand j’ai décidé <strong>de</strong> finir la lecture <strong>de</strong> mon livre <strong>de</strong> jardinage. Je n’avais ri<strong>en</strong>à perdre, sinon mon temps qui, <strong>de</strong> toute façon, avait été passé <strong>en</strong> vain surcette plante qu’il me faisait mal d’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir.Eh bi<strong>en</strong>, savez-vous quoi ? J’ai bi<strong>en</strong> fait <strong>de</strong> lire. Oui, une plante a besoind’aspects matériels, mais j’ai appris qu’elle avait aussi besoin <strong>de</strong> temps etd’amour. Et <strong>en</strong> regardant les images comme il faut, cette plante que je t<strong>en</strong>aistant à faire pousser, celle qui m’avait causé ces blessures un peu partout, etbi<strong>en</strong> c’était un rosier ! L’une <strong>de</strong>s <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>s fleurs au mon<strong>de</strong>, symbole pourtous d’un amour fort !!J’ai doublé mes efforts arrachant les mauvaises herbes qui t<strong>en</strong>tai<strong>en</strong>t d’<strong>en</strong>vahirmon beau rosier, j’ai bêché le sol, je l’ai nourri d’<strong>en</strong>grais, j’ai pris montemps et je l’ai aimé comme personne ne l’avait aimé avant.Quelle surprise un beau matin, <strong>de</strong> sortir et <strong>de</strong> voir mon rosier <strong>en</strong> fleurs !! DESROSES NOIRES !! Les <strong>plus</strong> rares <strong>de</strong> toutes ! <strong>Ma</strong>is att<strong>en</strong><strong>de</strong>z… Le plant s’étaitét<strong>en</strong>du ! Mon jardin se remplissait <strong>de</strong> rosiers !!! Et <strong>plus</strong> tard, <strong>en</strong> continuantmon <strong>en</strong>treti<strong>en</strong>, je pouvais voir les fleurs <strong>de</strong>s autres s’épanouir au soleil :rouges, blanches, roses… Autant <strong>de</strong> couleurs que l’arc-<strong>en</strong>-ciel… Dans MONjardin !158


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Je ne suis toujours pas un expert <strong>en</strong> jardinage. J’ai <strong>en</strong>core <strong>de</strong> la misèrequelques fois. <strong>Ma</strong>is une chose est sûre… Après tant d’années à l’<strong>en</strong>tret<strong>en</strong>ir,je suis fier <strong>de</strong> mon jardin !Ce que j’ai écrit sur ces feuilles, j’y ai p<strong>en</strong>sé très longtemps. Je sais que je nepourrai jamais le dire comme il se doit… mais je t’écris pour que tu puissessavoir à quel point je t’aime. Toi, les <strong>en</strong>fants et les petits-<strong>en</strong>fants êtes lesrosiers <strong>de</strong> ma vie et je suis heureux <strong>de</strong> vous avoir fait cette place dans monjardin.Je t’aime mon amour… pour toujours.Gilles Gagné, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s <strong>Ma</strong>skoutains (Saint-Hyacinthe), CS <strong>de</strong> Saint-HyacintheEnseignante : <strong>Ma</strong>ryse Sylvestre, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t Val-<strong>Ma</strong>ska56. Frédérique - Nostalgie d’<strong>en</strong>fanceJadis, au Moy<strong>en</strong> Âge, les fêtes médiévales et la courtoisie étai<strong>en</strong>t monnaiecourante. Les chevaliers, les princesses, les princes et les troubadours nousont tous fait rêver un jour. Je vous convie donc dans mes rêves <strong>de</strong> jeune filleet ma nostalgie princière, il y a <strong>de</strong> cela quarante ans…À la campagne, il faisait beau, c’était la fin du printemps. Déjà, les graines<strong>de</strong> blé et d’avoine semées <strong>plus</strong> tôt perçai<strong>en</strong>t le sol <strong>de</strong>s champs voisins duvillage. Ce jour-là, une gran<strong>de</strong> foire s’animait dans la ville d’Arles. Tous lesvillageois et les villageoises faisai<strong>en</strong>t la fête, flûtistes, magici<strong>en</strong>s et jongleursdéambulai<strong>en</strong>t dans les ruelles, affolant les poules, les chèvres et les porcelets<strong>de</strong>s marchands. Les marmots, eux, jouai<strong>en</strong>t à la balle et au bilboquet. Parmitoutes ces festivités, les hommes, le cœur à la fête et chancelant déjà,buvai<strong>en</strong>t à même la chantepleure du vin mis <strong>en</strong> futailles. Les vivres foisonnai<strong>en</strong>t.Les artisans, quant à eux, s’affairai<strong>en</strong>t à leur besogne pour fabriquer<strong>de</strong>s chaussures ou <strong>de</strong>s selles pour les chevaux, et cela, à même le cuir <strong>de</strong>leurs bêtes. Les charmantes épouses filai<strong>en</strong>t la laine pour <strong>en</strong> faire <strong>de</strong>s vêtem<strong>en</strong>tschauds au temps <strong>de</strong>s froi<strong>de</strong>s saisons. Elles cuisinai<strong>en</strong>t les plats, et<strong>en</strong>fournai<strong>en</strong>t les pains. Ces chancelières hors pair accumulai<strong>en</strong>t au fond <strong>de</strong>159


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>leur sac à bandoulière, les écus amassés aux <strong>en</strong>chères du jour. La fête allaitbon train…Tout à coup, un chevalier et sa troupe arrivèr<strong>en</strong>t au galop. C’était le prince,fils <strong>de</strong> la châtelaine, rev<strong>en</strong>ant d’une longue et périlleuse croisa<strong>de</strong>. Le seigneur,accompagné <strong>de</strong> ses valeureux combattants, s’arrêta et <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dit <strong>de</strong> samonture. La main posée sur son épée damasquinée, vêtu ainsi <strong>de</strong> sonarmure, tous se retournèr<strong>en</strong>t <strong>de</strong>vant cette noblesse. Même son cheval auxallures puissantes, la crinière nattée, couleur d’ébène, fit l’<strong>en</strong>vie <strong>de</strong> bi<strong>en</strong> <strong>de</strong>shommes. Les femmes et les <strong>en</strong>fants courai<strong>en</strong>t accueillir leur mari, leur père,leur héros. Tous étai<strong>en</strong>t heureux <strong>de</strong> les retrouver sains et saufs. Pr<strong>en</strong>ant placeau milieu <strong>de</strong> la foule, le prince s’écria :– Oyé ! Oyé ! G<strong>en</strong>tes dames et g<strong>en</strong>tilshommes, je vous annonce que moi,Frédérique <strong>de</strong> Loire, épouserai ma t<strong>en</strong>dre et bi<strong>en</strong>-aimée Lucille. Sa g<strong>en</strong>tillesse,sa bonté et sa joliesse ont r<strong>en</strong>du mon cœur folichon !S’avançant doucem<strong>en</strong>t, elle était là, au milieu <strong>de</strong> la place, <strong>de</strong>s larmes <strong>de</strong>bonheur coulai<strong>en</strong>t sur ses <strong>belle</strong>s joues roses.– Ô mon bi<strong>en</strong>-aimé ! dit-elle. Je ne suis qu’une pauvre paysanne, mais jevous aimerai comme il se doit et nous aurons <strong>de</strong> beaux <strong>en</strong>fants. J’appr<strong>en</strong>draitout <strong>de</strong> vos nobles manières !Tout <strong>en</strong> la regardant dans les yeux, il lui dit :– Tout au long <strong>de</strong> mes combats, mon cœur ne battait que pour toi, terevoir et te dire combi<strong>en</strong> je t’aime est tout ce qui m’importe !– Vive les amoureux ! criait la foule <strong>en</strong>tassée, v<strong>en</strong>ue pour écouter ce beaudiscours. Le prince se retourna <strong>en</strong> s’adressant à ses fidèles et leur dit :– Je vous convie tous à nos épousailles qui auront lieu dès la fin <strong>de</strong> lamoisson. Le bal nuptial se déroulera au château !– Hourra ! Quel bonheur pour notre futur roi ! criai<strong>en</strong>t les villageois et lesvillageoises.Regardant Lucille, le prince dit :160


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>– Si petite soit-elle, <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong> sera-t-elle à mes côtés !– Vive la future reine ! criai<strong>en</strong>t-ils à nouveau.– De toute ma vie, je n’ai point connu une femme aussi merveilleuse quema douce et t<strong>en</strong>dre fiancée ! Enfilez vos <strong>plus</strong> beaux habits et vos <strong>plus</strong> <strong>belle</strong>srobes, la fête sera grandiose, dit le seigneur.Il prit Lucille dans ses bras et la déposa sur sa selle. Derrière elle, telle uneétreinte, il repartit à toute allure. Son cheval battant la poussière, un tambourinà la place du cœur, le valeureux Frédérique emporta avec lui celle quifrappait sur son petit tambour.<strong>Ma</strong>rlène Bourdages, 1 er cycleC<strong>en</strong>tre Saint-François, CS <strong>de</strong> la RiveraineEnseignant : Sylvain Jutras, Syndicat <strong>de</strong>s <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants <strong>de</strong> la Riveraine57. Alyssa, une fille au passépas comme les autresJ’adorais ma vie, elle était tout simplem<strong>en</strong>t parfaite. À l’époque, je n’avaisque six ans. Six ans, l’âge où nos petits yeux d’<strong>en</strong>fant n’arriv<strong>en</strong>t pas à compr<strong>en</strong>drece qui se passe dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s grands. On est dans la pério<strong>de</strong><strong>de</strong> notre vie où le noir fait <strong>en</strong>core peur. L’âge où l’on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>en</strong>core à nospar<strong>en</strong>ts, nos sauveurs, <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r sous le lit si le monstre est réellem<strong>en</strong>tparti et que nos cauchemars, qui sembl<strong>en</strong>t si concrets, hant<strong>en</strong>t notre vie <strong>de</strong>gamin. Dans mon cas, c’était différ<strong>en</strong>t, mon mon<strong>de</strong> était sur le point <strong>de</strong>basculer, mais j’étais <strong>en</strong>core trop jeune pour le savoir.Mes par<strong>en</strong>ts me t<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t toujours à l’écart, situation normale pour <strong>de</strong>spar<strong>en</strong>ts qui veul<strong>en</strong>t protéger ceux qu’ils aim<strong>en</strong>t. <strong>Ma</strong>is je n’étais pas dupe. Lesoir, je les <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais parler. Je savais que quelque chose n’allait pas, dumoins, pas comme il se <strong>de</strong>vait d’aller. Le 2 octobre 2001, mon petit mon<strong>de</strong>rempli <strong>de</strong> fantastique s’écroulait tout autour <strong>de</strong> moi. Mes par<strong>en</strong>ts, inquiets<strong>de</strong> notre sort, ne savai<strong>en</strong>t que faire. Mon frère, <strong>Ma</strong>rtin, qui avait neuf ans,était au sta<strong>de</strong> où tout lui paraissait simple, où ses amis pr<strong>en</strong>ai<strong>en</strong>t beaucoup<strong>de</strong> place. Il ne cherchait pas à compr<strong>en</strong>dre ce qui nous arrivait. Je voyaisnotre petite famille se distancer. Mon père se tuait au travail afin <strong>de</strong> ne pas161


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>perdre le fruit <strong>de</strong> son labeur ; son garage. <strong>Ma</strong> mère passait beaucoup <strong>de</strong>temps à faire <strong>de</strong> la comptabilité afin <strong>de</strong> trouver le problème. Voyant mesidoles se dém<strong>en</strong>er pour nous gar<strong>de</strong>r un toit sur la tête, j’étais tout simplem<strong>en</strong>teffrayée. Pour un <strong>en</strong>fant, le mon<strong>de</strong> semble tellem<strong>en</strong>t grand, rempli <strong>de</strong>péripéties, les g<strong>en</strong>s nous ti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à l’écart pour nous protéger, ils dis<strong>en</strong>tque nous sommes trop jeunes pour compr<strong>en</strong>dre, mais c’est eux qui necompr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t pas. Sous l’<strong>en</strong>veloppe charnelle du petit être que nous sommesse cache une consci<strong>en</strong>ce qui compr<strong>en</strong>d tout.Je me souvi<strong>en</strong>s. C’était le premier novembre 1999, le temps <strong>de</strong> l’année oùla neige ne tar<strong>de</strong> pas à tomber, la fumée dans les cheminées se faisait déjàs<strong>en</strong>tir. Un mom<strong>en</strong>t que j’adorais, Noël arrivait bi<strong>en</strong>tôt. Mes par<strong>en</strong>ts étai<strong>en</strong>theureux, ils avai<strong>en</strong>t hâte <strong>de</strong> nous montrer quelque chose. Je ne savais pas ceque c’était, mais j’étais aussi heureuse qu’eux. Ils nous ont emm<strong>en</strong>é <strong>de</strong>vantcette imm<strong>en</strong>se bâtisse, la pluie tombait à petites gouttes sur mon visage,j’adorais cette s<strong>en</strong>sation. Un v<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>ouveau soufflait. C’était grand,l’o<strong>de</strong>ur d’huile et d’ess<strong>en</strong>ce emplissait mon nez, cette o<strong>de</strong>ur que je s<strong>en</strong>taissouv<strong>en</strong>t sur les chemises <strong>de</strong> mon père à son retour le soir. J’avais toutcompris ! Il s’agissait d’un garage. Mon père v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> réaliser un <strong>de</strong> sesrêves, le mi<strong>en</strong> <strong>en</strong> même temps, car tous les rêves <strong>de</strong> mes par<strong>en</strong>ts étai<strong>en</strong>t<strong>de</strong>v<strong>en</strong>us les mi<strong>en</strong>s. Ce garage était celui <strong>de</strong> la municipalité <strong>de</strong> mon petitvillage natal. Tout allait pour le mieux, nous étions heureux ! <strong>Ma</strong>is il sembleque la vie n’est pas un conte <strong>de</strong> fées…Au fil <strong>de</strong>s ans, mes yeux d’<strong>en</strong>fant grandissai<strong>en</strong>t, mes par<strong>en</strong>ts adorés travaillai<strong>en</strong>tavec ar<strong>de</strong>ur, je me s<strong>en</strong>tais seule, très seule. Il m’arrivait souv<strong>en</strong>t <strong>de</strong>surpr<strong>en</strong>dre leurs conversations, qui malheureusem<strong>en</strong>t, n’étai<strong>en</strong>t <strong>plus</strong> aussimagiques qu’elles l’étai<strong>en</strong>t auparavant. Ils parlai<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t qu’ils p<strong>en</strong>sai<strong>en</strong>tse faire flouer, un employé du garage les volait. Je ne compr<strong>en</strong>ais pas, c’étaittrop compliqué pour moi… Il m’était alors impossible d’<strong>en</strong>visager ce quiallait se produire, la peur <strong>en</strong>vahissait ma tête et les larmes remplissai<strong>en</strong>t mesyeux. Mes par<strong>en</strong>ts ne perdai<strong>en</strong>t pas espoir, mais je pouvais tout <strong>de</strong> mêmepercevoir la douleur dans les yeux <strong>de</strong> ma douce maman.Le 2 octobre 2001, la vie <strong>de</strong> rêve tirait à sa fin. Nous étions <strong>en</strong> train <strong>de</strong> toutperdre, nos voitures, notre maison, notre fierté. J’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais les autres <strong>en</strong>fantsrire <strong>de</strong> moi, ils ne pouvai<strong>en</strong>t pas compr<strong>en</strong>dre, eux. J’avais le désir <strong>de</strong>m’<strong>en</strong>fuir, fuir cette petite vie <strong>de</strong> misère que <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s sans cœur et jalouxnous avai<strong>en</strong>t donnée. Nous avons finalem<strong>en</strong>t déménagé. J’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais mespar<strong>en</strong>ts pleurer, ils ne pleurai<strong>en</strong>t pas pour la perte matérielle, mais plutôtpour le mal que cette faillite avait fait à notre petite famille. À partir <strong>de</strong> ce162


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>mom<strong>en</strong>t, tout défilait. Les années passai<strong>en</strong>t et les expéri<strong>en</strong>ces <strong>de</strong> vie mepoussai<strong>en</strong>t à compr<strong>en</strong>dre que tout n’était pas facile. Mon père travaillait sansrelâche pour payer ce que les institutions bancaires ne voulai<strong>en</strong>t désormais<strong>plus</strong> donner.Comme si le sort s’acharnait, le 23 août 2006, mon père a été victime d’untrès grave acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> moto. C’est à partir <strong>de</strong> ce mom<strong>en</strong>t que l’homme quej’aimais tellem<strong>en</strong>t a changé. Il n’était <strong>plus</strong> le même. Je le voyais se lever lematin, courbaturé et extrêmem<strong>en</strong>t brisé. Son nez tracé d’une grosse cicatrice,ses mains <strong>en</strong>fermées <strong>en</strong>tre <strong>de</strong>s plâtres, ça me brisait le cœur. Son cou,cassé à cause <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong> sa chute, était ret<strong>en</strong>u par un carcan. Les nombreuseslacérations sur son visage me coupai<strong>en</strong>t le souffle, m’effrayai<strong>en</strong>t. J<strong>en</strong>e le voyais <strong>plus</strong> <strong>de</strong> la même façon. À mesure qu’il guérissait, sa douleuraugm<strong>en</strong>tait. Cette moto qu’il avait tant chérie avait presque causé sa mort.Déclaré invali<strong>de</strong> par la SAAQ, mon père ne pouvait <strong>plus</strong> travailler, son corpsne lui permettait <strong>plus</strong> <strong>de</strong> le faire. Je le s<strong>en</strong>tais mourir <strong>de</strong> l’intérieur. À 11 ans,je voyais mes par<strong>en</strong>ts terrassés par toutes leurs hantises, mais jamais ils n’ontcessé <strong>de</strong> nous rassurer. Cela m’a démontré que toutes les souffrances dumon<strong>de</strong> ne peuv<strong>en</strong>t nous éloigner les uns <strong>de</strong>s autres ni détruire les li<strong>en</strong>s quinous uniss<strong>en</strong>t. J’ai vécu et ress<strong>en</strong>ti la douleur, subi le jugem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s autres,mais jamais je n’ai cessé <strong>de</strong> me battre…J’ai maint<strong>en</strong>ant 18 ans. <strong>Ma</strong> famille n’a <strong>plus</strong> la même place dans mon cœur,mais toutes ces épreuves nous ont seulem<strong>en</strong>t r<strong>en</strong>dus <strong>plus</strong> forts, <strong>plus</strong> unis. Jesuis heureuse que mon père soit toujours parmi nous et fière <strong>de</strong> dire auxg<strong>en</strong>s que ce qui ne nous tue pas nous r<strong>en</strong>d <strong>plus</strong> forts, car ma famille estsurvivante.Mélissa Gauvin, 2 e cycleC<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> St-Pascal, CS <strong>de</strong> Kamouraska – Rivière-du-LoupEnseignante : Mélanie Chénard, Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Grand-Portage163


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>58. La fleur fragileElle est démunie <strong>de</strong> l’avoir blessé. Comme ces g<strong>en</strong>s si rares, elle est miraculée.Elle cherche le mystère <strong>de</strong> sa vie jour après jour, tout cela avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’amour. Son futur, elle le désire, autant qu’elle poursuit la marche avecplaisir. Même dans les <strong>plus</strong> gran<strong>de</strong>s malchances, elle fait la <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>de</strong>sdanses : la danse <strong>de</strong> la vie, <strong>de</strong> midi à minuit.Sa vie est si fragile, mais elle est très agile. C’est une petite fleur qui réanimele cœur <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s avec ses pleurs. Elle peut avoir très peur, mais les miracleslui donneront <strong>de</strong> l’ampleur. Comme une sauterelle ou une gazelle, elle peutêtre d’humeur très joyeuse, mais sa beauté peut retourner beaucoup <strong>de</strong>femmes contre elle.Un petit côté princesse, avec un grand brin <strong>de</strong> sagesse. Elle est mala<strong>de</strong>,douce comme <strong>de</strong> la marmela<strong>de</strong>. C’est un ourson, un petit « fillon ». Une foisadulte, elle ai<strong>de</strong>ra les g<strong>en</strong>s <strong>en</strong> détresse et sur les cheveux soyeux <strong>de</strong> ses<strong>en</strong>fants, elle tissera <strong>de</strong> jolies tresses. Un jour, elle se mariera avec l’hommesi merveilleux qu’elle chérira. Elle aura une <strong>belle</strong> fin et elle vieillira telle unefleur fanée. Son <strong>de</strong>stin l’aura emm<strong>en</strong>ée loin. C’est l’<strong>histoire</strong> <strong>de</strong> la fleur fragile<strong>de</strong> la maison, celle qui rêve aux papillons.Si je vous dis qui est cette fleur si fragile, vous saurez combi<strong>en</strong> elle est utile.Elle vous montrera comm<strong>en</strong>t supporter <strong>plus</strong>ieurs far<strong>de</strong>aux, surtout s’ils sont<strong>en</strong> place, très lourds sur son dos. Elle vous récitera <strong>de</strong>s tonnes <strong>de</strong> rimes, sansêtre trop intime. Elle poussera <strong>de</strong> jolies mélodies et vous serez éblouis.Elle n’est pas très sage, mais c’est parce qu’on l’a trop mise <strong>en</strong> cage. Soncœur était brisé, mais il a maint<strong>en</strong>ant été recollé. Elle est un peu solitaire,mais c’est parce que la terre <strong>en</strong>tière se l’est mise à dos il y a une éternité <strong>de</strong>cela. La musique et l’écriture sont dans son sang, elle ne vit que pour sespassions et son amour pur <strong>en</strong>vers certaines personnes qui lui sont chères.C’est une petite perle <strong>de</strong> juin. Avec un peu <strong>de</strong> chance, si on l’acceptecomme elle est, elle sera beaucoup <strong>plus</strong> heureuse. Un petit peu re<strong>belle</strong>, elleest pleine <strong>de</strong> couleurs. Un peu peureuse, mais chaleureuse, elle s’appliquedans ses tâches comme une perfectionniste. Ses yeux ont la couleur <strong>de</strong>socéans et ses cheveux ont mille nuances. Son indép<strong>en</strong>dance est si forte,qu’elle songe à parcourir seule le mon<strong>de</strong> <strong>en</strong>tier.164


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Sa muse est la meilleure, la <strong>plus</strong> inspirante. Elle écrit avec ses émotions, sansfaire att<strong>en</strong>tion et sans être méchante non <strong>plus</strong>. Si vous jugez ses poèmes, ellecompr<strong>en</strong>dra. C’est une femme un peu bohème, qui aime tout le mon<strong>de</strong>. Sonaura est bénéfique, elle est si magnifique aux yeux <strong>de</strong> ses proches. Son angeet son démon la persécut<strong>en</strong>t intérieurem<strong>en</strong>t, elle veut se débarrasser d’eux,car elle veut simplem<strong>en</strong>t s’écouter elle-même. Elle a <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> projets<strong>en</strong> tête, dont celui <strong>de</strong> peut-être se faire connaître par tous les g<strong>en</strong>s <strong>de</strong> sonpays. Comm<strong>en</strong>t le réaliser ? Ça, elle ne le sait pas, mais elle trouvera. Alorsmaint<strong>en</strong>ant je vous le dis, cette fleur fragile, sachez que c’est moi.Elodie Leclerc-Lechasseur, PrésecondaireC<strong>en</strong>tre Le Moyne-D’Iberville, CS <strong>Ma</strong>rie-VictorinEnseignante : Cindy Jutras, Syndicat <strong>de</strong> Champlain59. L’hymne à l’espoirVous savez, je n’ai pas grand-chose à direSur ma vie ni sur ce qui m’a fait grandir.J’ai souv<strong>en</strong>t rêvé d’un clair <strong>de</strong> luneCaché par un esprit couvert <strong>de</strong> brume.Si vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z <strong>de</strong> quoi je suis fait,Je vous répondrai que je ne suis pas parfait.J’ai souv<strong>en</strong>t dévié <strong>de</strong> ma trajectoire,J’ai souv<strong>en</strong>t eu soif <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s victoires.Je ne sais pas épeler le mot « AIMER »,Car je me suis souv<strong>en</strong>t fait détesterAutant par <strong>de</strong>s géants <strong>de</strong> grands tal<strong>en</strong>tsQue par <strong>de</strong>s m<strong>en</strong>teurs <strong>de</strong> bonne humeur.Vous me diriez : « Mon vieux, crois donc <strong>en</strong> Dieu ! »Je vous répondrais que je suis r<strong>en</strong>du trop vieux.Même <strong>de</strong> mon plein gré, je ne crois <strong>plus</strong> au Père-Noël,Et j’aspire <strong>en</strong>core moins à un prix Nobel.165


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Je me s<strong>en</strong>s abandonné comme un chi<strong>en</strong> errant,Je me s<strong>en</strong>s coupable <strong>de</strong> ne pas avoir pris le tempsDe vous écouter au lieu <strong>de</strong> p<strong>en</strong>ser à jouerAu jeu du hasard qui m’a fait <strong>en</strong>fermer.Dans cette tour infernale où l’on se fait oublier,Où il n’y a <strong>plus</strong> personne qui p<strong>en</strong>se à moi,Je voudrais mourir ou bi<strong>en</strong> partirVers un jardin d’é<strong>de</strong>n pour ne <strong>plus</strong> souffrir.<strong>Ma</strong>lgré mon passé, je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u célèbre,Pauvre petit acteur d’un film d’horreur.Je n’ai jamais voulu <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir un mal-aiméPour avoir sur le cœur l’écorce <strong>de</strong> mes peurs.Avec un sourire, je rep<strong>en</strong>se à ce que j’ai fait,Pr<strong>en</strong>ant un café sur le boulevard <strong>de</strong>s erreurs.Après un long soupir, existe-t-il un succèsPour un gars comme moi, rempli <strong>de</strong> bonnes valeurs ?Sans doute que oui, par un signe <strong>de</strong> la vie,Une lueur d’espoir : je dois <strong>en</strong>core y croire.Je ne dois pas fermer le tiroir <strong>de</strong> mes p<strong>en</strong>sées,Je ne dois pas oublier qui je suis pour continuer à rêver.Les saisons pass<strong>en</strong>t et les couleurs chang<strong>en</strong>t.J’ai retrouvé le goût d’exister, une raison d’avancer.Je croyais que l’amour avait fait ses bagages,Me laissant seul, sur une île, près du rivage.<strong>Ma</strong>is un jour comme ça, sans me douter <strong>de</strong> quoi que ce soit,Un ange est <strong>en</strong>tré dans ma vie tel un rayon <strong>de</strong> soleil après la pluie.Aussi rarissime et <strong>belle</strong> qu’une fleur <strong>en</strong> automne,Elle est celle pour qui je pourrais désormais donner ma vie.À ses côtés, je ne vois <strong>plus</strong> le temps passer.L’<strong>en</strong>fer que j’ai connu est <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u le paradis tant recherché.J’ai maint<strong>en</strong>ant une raison <strong>de</strong> sourire à la vie,J’ai maint<strong>en</strong>ant une muse pour <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ir qui je suis.166


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Un jour, mon calvaire pr<strong>en</strong>dra fin et m’emmèneraSur le chemin <strong>de</strong> la liberté tant convoitée.Je vais pouvoir <strong>en</strong>fin pr<strong>en</strong>dre ma vie <strong>en</strong> main,Je vais pouvoir pr<strong>en</strong>dre soin d’elle sans peur du l<strong>en</strong><strong>de</strong>main.Alors, aujourd’hui, vous me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>riez :Si je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>u trop vieux pour comm<strong>en</strong>cer à prier,Je vous répondrais que non et qu’après tout ce que j’ai fait,Seul Dieu ne m’a jamais oublié et a su me pardonner.Je dois maint<strong>en</strong>ant écouter mon cœur et suivre le v<strong>en</strong>tLà où il y aura <strong>de</strong>s rêves, <strong>de</strong> l’amour et <strong>de</strong> beaux mom<strong>en</strong>ts.Je dois maint<strong>en</strong>ant suivre le son <strong>de</strong> sa voixPour être <strong>en</strong>fin heureux tel un <strong>en</strong>fant dans ses bras.<strong>Ma</strong>rtin Tétreault, 2 e cycleÉtablissem<strong>en</strong>t Drummond (Drummondville), CS <strong>de</strong>s ChênesEnseignants : Nancy Faucher et Jacques Lambert,Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville167


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Nous ne pourrions clore le recueil, après 10 ans d’av<strong>en</strong>tures, sans vous permettre<strong>de</strong> lire d’autres témoignages très inspirants qui nous sont parv<strong>en</strong>usd’élèves et d’<strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants ayant participé au concours dansle passé. Vous le verrez, ils donn<strong>en</strong>t un aperçu signifiant <strong>de</strong> ce que leur apermis <strong>de</strong> vivre leur expéri<strong>en</strong>ce d’écriture, <strong>de</strong> partage et <strong>de</strong> complicité, et <strong>de</strong>toutes les <strong>histoire</strong>s qu’on nous a contées sur l’effet du concours dans leur vie.Bonjour,Mon nom est Michèle Courchesne-Théberge. J’ai été gagnante p<strong>en</strong>dant troisans d’affilée au concours MPBH.Je vous écris pour vous faire part <strong>de</strong>s s<strong>en</strong>tim<strong>en</strong>ts que ce concours a apportésdans ma vie courante.Au tout début, ça m’importait peu <strong>de</strong> participer, mais grâce à mon prof(Christiane Beaulieu) et à son <strong>en</strong>couragem<strong>en</strong>t, je l’ai essayé. Dans ce tempslà,j’étais dans une phase dépressive. Alors, j’avais peur d’échouer à nouveauet <strong>de</strong> ne pas accepter la nouvelle si elle était négative. <strong>Ma</strong>is, surprise !La bonne nouvelle, j’avais gagné.Ça m’a tellem<strong>en</strong>t valorisée que les années d’<strong>en</strong>suite, je me suis réinscrite.Avec ce concours, j’ai découvert que j’aimais l’écriture et que ça <strong>de</strong>v<strong>en</strong>aitune passion. Je pouvais m’exprimer comme je le voulais tout <strong>en</strong> me défoulant<strong>de</strong>s émotions fortes que je vivais dans ces pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> ma vie.Aujourd’hui, après quelques années <strong>de</strong> recul, j’y rep<strong>en</strong>se avec plaisircomme la journée où on m’a remis mon prix avec mon certificat <strong>de</strong>gagnante. Je ne regrette ri<strong>en</strong>, car on est très ému lors <strong>de</strong> cette journée spl<strong>en</strong>di<strong>de</strong>.On revi<strong>en</strong>t chez nous avec une force incroyable <strong>en</strong> nous. Ça nous faitgrandir positivem<strong>en</strong>t et, pour moi, cette journée restera inoubliable jusqu’àla fin <strong>de</strong> ma vie ainsi que les <strong>de</strong>ux autres fois où j’ai gagné.Avec ce concours qui nous fait comm<strong>en</strong>cer <strong>en</strong> bas <strong>de</strong> l’échelle, ça nouspermet <strong>de</strong> voir si on veut persévérer dans le domaine <strong>de</strong> l’écriture. Moi,Michèle Courchesne-Théberge, je veux persévérer pour pouvoir un jourécrire un livre. Je n’aurais jamais p<strong>en</strong>sé participer à un concours comme <strong>Ma</strong><strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> et <strong>en</strong> ressortir aussi fière.Je pousse les g<strong>en</strong>s à ne pas hésiter à écrire, car c’est une <strong>belle</strong> façon d’êtrebi<strong>en</strong> dans sa peau. Ce qui est incroyable aussi, c’est que l’écriture nouspermet <strong>de</strong> faire le point sur notre vie quotidi<strong>en</strong>ne. Ça nous donne du168


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>pouvoir pour avancer à nouveau et avoir la force <strong>de</strong> passer à travers d’autresévénem<strong>en</strong>ts <strong>de</strong> notre vie.J’espère que ce témoignage permettra aux g<strong>en</strong>s <strong>de</strong> participer au concours et<strong>de</strong> ne jamais lâcher, même s’ils ne gagn<strong>en</strong>t pas la première fois. Il faut persévérerpour pouvoir <strong>en</strong> sortir aussi fière que moi.Michèle Courchesne-ThébergeC<strong>en</strong>tre Saint-Louis-<strong>de</strong>-Gonzague, CS <strong>de</strong>s ChênesSyndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> DrummondvilleDrummondville, 15 janvier 2013Cela faisait seulem<strong>en</strong>t quelques mois que j’avais effectué mon retour auxétu<strong>de</strong>s au c<strong>en</strong>tre <strong>de</strong> FGA lorsque j’ai <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du parler <strong>de</strong> <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>.<strong>Ma</strong> première réaction fut plutôt catégorique : « Ce concours-là n’estpas pour moi ! » Je n’ai jamais été attiré par la lecture et, par conséqu<strong>en</strong>t, pas<strong>plus</strong> par l’écriture. Âgé <strong>de</strong> 30 ans, je croyais bi<strong>en</strong> que cela ne changeraitjamais.À la suite <strong>de</strong> la composition <strong>de</strong> quelques productions écrites dont j’étaisparticulièrem<strong>en</strong>t fier et après avoir reçu <strong>plus</strong>ieurs comm<strong>en</strong>taires positifs surcelles-ci, ma perception à l’égard <strong>de</strong> ma participation a littéralem<strong>en</strong>t changéet j’ai donc décidé <strong>de</strong> participer.Pour moi, <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> a gran<strong>de</strong>m<strong>en</strong>t contribué à augm<strong>en</strong>ter monestime personnelle ainsi qu’à me découvrir un nouveau tal<strong>en</strong>t, si bi<strong>en</strong> que<strong>de</strong>puis quelques semaines, j’ai <strong>en</strong>trepris l’écriture <strong>de</strong> mon propre roman.Je ti<strong>en</strong>s à remercier, pour leur bon travail et surtout, pour leurs <strong>en</strong>cou ra ge m<strong>en</strong>ts :M me Christiane Beaulieu ainsi que M me Cécile Pelchat, <strong>en</strong>seignantes <strong>de</strong> françaisdu c<strong>en</strong>tre FGA Sainte-Thérèse à Drummondville.Éric Blanchette, étudiant au 2 e cycleC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse, CS <strong>de</strong>s ChênesSyndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville169


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Bonjour,On m’a <strong>de</strong>mandé d’écrire quelques mots pour dire ce que <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong><strong>histoire</strong> a changé dans ma vie.Cela m’a permis <strong>de</strong> réaliser que je pouvais écrire facilem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s <strong>histoire</strong>s,autant inv<strong>en</strong>tées que tirées <strong>de</strong> mes expéri<strong>en</strong>ces personnelles, que je pouvaisécrire <strong>plus</strong> <strong>de</strong> dix lignes sans me forcer.Ça m’a permis <strong>de</strong> faire la paix avec le français. Je m’explique. J’ai toujourseu <strong>de</strong> la difficulté avec le français écrit, ce qui a fait que j’ai lâché l’écolejeune. J’y suis retourné à reculons pour me permettre d’avoir une meilleurejob, mais la tonne <strong>de</strong> textes à écrire me faisait peur. Votre concours est arrivéet je me suis mis à écrire et j’ai vite réalisé que je pouvais écrire 400 motsfacilem<strong>en</strong>t.Pour terminer, merci aux organisateurs. Si je suis aussi déterminé à pouvoirfaire ce que je fais, c’est un peu grâce à vous et à une merveilleuse professeurequi m’a aidé à voir que je pouvais avancer <strong>en</strong> français malgré madyslexie. Merci Christiane Beaulieu pour le regain <strong>de</strong> courage que tu m’astransmis grâce à ce concours que tu m’as forcé à faire (je sais que maconclusion est trop longue par rapport à mon texte).Christian Beaulne-CoutuAnci<strong>en</strong> élève du C<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse, CS <strong>de</strong>s ChênesSyndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> DrummondvilleCe concours a été très bénéfique pour moi ! Le français ayant été ma bêt<strong>en</strong>oire toute ma vie, participer à un concours comme celui-là semblaitimp<strong>en</strong>sable pour moi… J’aimais écrire, mais me croyais incapable <strong>de</strong> fournirun texte d’une assez gran<strong>de</strong> qualité pour gagner un prix.La poursuite <strong>de</strong> mon rêve (être infirmière) <strong>en</strong> était même m<strong>en</strong>acée, puisqu’ilfaut avoir un bon français pour être admis à cette formation. Cep<strong>en</strong>dant, <strong>en</strong>faisant mon français à la formation <strong>de</strong>s adultes, les professeurs ont constatéque, malgré quelques problèmes <strong>de</strong> conjugaison, mes productions étai<strong>en</strong>ttrès <strong>belle</strong>s. Ils m’ont alors proposé <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>. C’est sans trop <strong>de</strong>conviction, mais avec beaucoup d’inspiration que mon texte fut écrit (<strong>en</strong>170


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong><strong>de</strong>ux jours il était terminé et prêt à l’<strong>en</strong>voi). Mes <strong>en</strong>seignants fur<strong>en</strong>t trèstouchés par mes écrits et avai<strong>en</strong>t une gran<strong>de</strong> foi <strong>en</strong> mes chances…Quelques semaines <strong>plus</strong> tard, c’est avec surprise, mais surtout avec unegran<strong>de</strong> joie, que la vie m’apprit que ri<strong>en</strong> n’est impossible à qui veut vraim<strong>en</strong>t! J’avais gagné un prix pour mon texte. Ce prix était <strong>en</strong> fait le gaged’une toute nouvelle assurance, d’une nouvelle estime <strong>de</strong> moi.Aujourd’hui, je suis dans ma <strong>de</strong>rnière année <strong>de</strong> formation pour l’obt<strong>en</strong>tiond’un diplôme, <strong>de</strong>vinez lequel… Eh oui ! Celui d’infirmière auxiliaire !!Mélissa PortolèsePavillon Damase-Boulanger (Alma), CS du Lac-Saint-JeanSyndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t du Lac-Saint-JeanLe pouvoir <strong>de</strong>s mots<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>, c’est l’av<strong>en</strong>ture <strong>de</strong>s mots qui permet aux adultesappr<strong>en</strong>ants <strong>de</strong> participer à un concours d’écriture juste pour eux.Comme <strong>en</strong>seignante, je suis très cont<strong>en</strong>te que mes élèves t<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t l’expéri<strong>en</strong>ce<strong>de</strong> l’écriture <strong>en</strong> <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s cahiers d’exercices. Ce concours permetà <strong>plus</strong>ieurs <strong>de</strong> découvrir qu’ils ont <strong>de</strong>s ressources insoupçonnées. En effet,pour certains élèves, c’est l’expression d’une partie <strong>de</strong> leur vie et pourd’autres, c’est la magie <strong>de</strong>s mots qui les <strong>en</strong>traîne dans la fantaisie, le comique,le drame...Dans notre c<strong>en</strong>tre, le concours a pris <strong>de</strong> l’ampleur au fil <strong>de</strong>s années avec <strong>de</strong><strong>plus</strong> <strong>en</strong> <strong>plus</strong> <strong>de</strong> participants. L’équipe-école met tout <strong>en</strong> œuvre pour inciterles étudiants à se lancer dans l’av<strong>en</strong>ture. Pour moi, ce concours est uneexpéri<strong>en</strong>ce à vivre et j’incite fortem<strong>en</strong>t mes élèves à y participer.À ce sujet, on me taquine souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> me disant que je fais du « harcèlem<strong>en</strong>tlittéraire ». Pourquoi pas ! Quand je vois la fierté dans les yeux <strong>de</strong>s participantset <strong>de</strong>s gagnants, je crois que ça vaut la peine <strong>de</strong> les <strong>en</strong>courager, <strong>de</strong> leurpermettre <strong>de</strong> se dépasser... Les adultes appr<strong>en</strong>ants ont du tal<strong>en</strong>t et <strong>Ma</strong> <strong>plus</strong><strong>belle</strong> <strong>histoire</strong> <strong>en</strong> est la preuve.171


<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>Comme on veut souligner la gran<strong>de</strong> participation, lors <strong>de</strong> la Semaine <strong>de</strong>sadultes <strong>en</strong> formation, une activité spéciale permet <strong>de</strong> prés<strong>en</strong>ter à l’<strong>en</strong>semble<strong>de</strong>s élèves et du personnel, tous les participants au concours et les gagnants.Bi<strong>en</strong> sûr, tout cela avec la remise <strong>de</strong> certificats et <strong>de</strong> nombreux prix. Nousavons aussi notre « mur <strong>de</strong>s célébrités » qui met à l’honneur les gagnants <strong>de</strong>shuit <strong>de</strong>rnières années ainsi que les quatre prix Coup <strong>de</strong> pouce remis àl’équipe <strong>de</strong>s professeurs. Un site Internet permet aussi <strong>de</strong> découvrir les textes<strong>de</strong>s gagnants et <strong>de</strong>s participants ainsi qu’une édition spéciale du journalétudiant (http://projets.csdc.qc.ca/ma<strong>plus</strong><strong>belle</strong><strong>histoire</strong>).Les écrits rest<strong>en</strong>t, mais les paroles s’<strong>en</strong>vol<strong>en</strong>t... alors longue vie à MA PLUSBELLE HISTOIRE.Christiane BeaulieuEnseignante <strong>en</strong> français et responsable du concoursC<strong>en</strong>tre Sainte-Thérèse, Formation générale aux adultes, CS <strong>de</strong>s ChênesSyndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Drummondville172


La seule chose qui soit sûre, c’est que j’ai r<strong>en</strong>contré ma blon<strong>de</strong> pour avoir <strong>de</strong>ux merveilleuses petites filles etque, toutes les trois, elles sont la prunelle <strong>de</strong> mes yeux. Alors, j’ai décidé <strong>de</strong> retourner aux étu<strong>de</strong>s pour elles,mais aussi pour moi et pour que, <strong>plus</strong> tard, elles se dis<strong>en</strong>t peut-être : « Mon papa est quelqu’un <strong>de</strong> bi<strong>en</strong>. » Aulieu <strong>de</strong> rester assis, à rêver <strong>de</strong> la vie que j’aurais maint<strong>en</strong>ant, je me suis dit : « Agis ». – Paolo QuirionLe travail à la chaîne m’a pourtant appris que certaines heures sont beaucoup <strong>plus</strong> longues que d’autres. Jepeux vous garantir que le temps fonctionne très différemm<strong>en</strong>t d’un samedi <strong>de</strong> congé <strong>en</strong>soleillé à un jeudi <strong>de</strong>travail pluvieux. Un ultimatum d’une journée peut être très court, mais <strong>de</strong>ux minutes d’att<strong>en</strong>te peuv<strong>en</strong>t êtretrès longues. Certains mom<strong>en</strong>ts sont <strong>de</strong>v<strong>en</strong>us immortels et resteront gravés dans nos mémoires à jamais, maisd’autres, oubliés, n’ont jamais existé. – Réjean Côtéil y a une porte secrète dans l’autre piècemais je ne l’ai pas <strong>en</strong>core trouvéeil y a plein <strong>de</strong> passages secrets icije le sais, ils n’ont pas <strong>en</strong>core compris que je saismais je sais partir sans que l’œil <strong>de</strong> la télé ne me voieil suffit que je sois abs<strong>en</strong>te quelque tempsà sa droitepour qu’elle m’oubliemais je dois ramper sous son œil pour m’<strong>en</strong>fuirne ri<strong>en</strong> laisser dépasser, pas même un cheveu– Chantal RacineBételgeuse, Sinus, Pollux et autres corps étoilés,<strong>Ma</strong>rs orangé et Vénus flamboyanteAccrochés au croissant <strong>de</strong> lune <strong>de</strong>sc<strong>en</strong>dante,Traînée laiteuse <strong>de</strong>s galaxies éloignées,Écarts d’espace ténébreux qui me donn<strong>en</strong>t à songerAux images spectaculaires que Hubble nous a r<strong>en</strong>voyéesDe pouponnières d’étoiles, d’un naissant système solaire,Nébuleuses aux tons <strong>de</strong> rose, mauve, bleu et vert.– Christine LepageLes m<strong>en</strong>songes ? Ri<strong>en</strong> <strong>de</strong> pire que ces mots que nous utilisons pour dissimuler une vérité. Car, quand le voile selève, exposant la vérité au grand jour, les g<strong>en</strong>s à qui nous avons m<strong>en</strong>ti souffr<strong>en</strong>t. Quelquefois, nous p<strong>en</strong>sionsm<strong>en</strong>tir pour le mieux, pour protéger une personne que l’on aime. Nous l’avons tous fait et nous avons tous finipar expérim<strong>en</strong>ter le goût amer <strong>de</strong> la conséqu<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> nos m<strong>en</strong>songes, <strong>de</strong> leurs sons. – Pierre-Luc AuditUn v<strong>en</strong>t <strong>de</strong> r<strong>en</strong>ouveau soufflait. C’était grand, l’o<strong>de</strong>ur d’huile et d’ess<strong>en</strong>ce emplissait mon nez, cette o<strong>de</strong>ur queje s<strong>en</strong>tais souv<strong>en</strong>t sur les chemises <strong>de</strong> mon père, à son retour le soir. J’avais tout compris ! Il s’agissait d’ungarage. Mon père v<strong>en</strong>ait <strong>de</strong> réaliser un <strong>de</strong> ses rêves, le mi<strong>en</strong> <strong>en</strong> même temps, car tous les rêves <strong>de</strong> mes par<strong>en</strong>tsétai<strong>en</strong>t <strong>de</strong>v<strong>en</strong>us les mi<strong>en</strong>s. – Mélissa GauvinOn se retrouvait parfois dans les déserts <strong>de</strong> la route, sous un ciel ancestral, au creux d’une ville, dans l’ombre <strong>de</strong>l’après-midi. Chacun poursuivant une quête sacrée, la réminisc<strong>en</strong>ce du murmure d’un écho lointain, un paradisperdu… Montréal, <strong>en</strong>core une fois, me promettait ce qu’il ne m’avait jamais donné, mais j’aimais croire <strong>en</strong> cesmatins pleins d’espoir, toute la ville ressemblait alors à une jolie bête qui sommeillait. J’y connaissais les paumés<strong>de</strong> toutes les races, <strong>de</strong>s types bâtis à même la terre brute, expulsés tout droit <strong>de</strong> ses <strong>en</strong>trailles. – Mélanie SéguinVoici quelques extraits <strong>de</strong> textes que vous pourrez lire à l’intérieur <strong>de</strong> ce recueil lancé dans le cadre <strong>de</strong> laSemaine québécoise <strong>de</strong>s adultes <strong>en</strong> formation, par la Fédération <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t (FSE-CSQ) <strong>de</strong>concert avec la C<strong>en</strong>trale <strong>de</strong>s syndicats du Québec (CSQ). Il se veut une façon <strong>de</strong> saluer la détermination <strong>de</strong>sadultes qui ont décidé d’y participer ainsi que <strong>de</strong> tous ceux et celles qui ont <strong>en</strong>trepris une démarche <strong>de</strong> formation.C’est égalem<strong>en</strong>t l’occasion <strong>de</strong> souligner le travail exceptionnel accompli par les <strong>en</strong>seignantes et <strong>en</strong>seignants quiœuvr<strong>en</strong>t quotidi<strong>en</strong>nem<strong>en</strong>t à l’éducation <strong>de</strong>s adultes et y suscit<strong>en</strong>t le goût d’appr<strong>en</strong>dre.1213-104 2013- D-12416

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!