Le diagnostic territorial : outil de l'action publique - Lara

.instrument est orienté vers des “ mise en scène ” efficace telle que le fait de créer le videentre deux hémisphères métalliques qui seront par la suite soumises à la traction dechevaux… incapables malgré leur force bien connue de tous les spectateurs de séparer cesdeux hémisphères que l’expérimentateur présentera de nouveaux désunies avec la plusgrande facilité… Cette technique de mise en scène qui de nos jours correspondrait à celled’un illusionniste (à cette grande différence que le démonstrateur veut que le “ truc ” soitcompris et pour tout dire qu’il soit cru) à ceci près qu’elle n’enlève rien à la nature de preuveexpérimentale des effets de la pompe à vide quant à l’existence des gaz et à la nature deslois les régissant.La controverse entre Pasteur et Pouchet sur les microbesUn autre exemple historique lui aussi illustre la spécificité de cette approche. Il s’agit dudébat ayant aboutit à l’émergence de la connaissance des microbes. Latour présente unacteur souvent méconnu du débat scientifique ayant précédé l’émergence des microbes. Ils’agit de Pouchet. La méconnaissance que nous avons en général de ce nom souligne unproblème classique dans l’analyse des sciences : ce sont souvent les vainqueurs ou leurstenants qui en font l’histoire. Pouchet développe une pratique expérimentale qui le conduit àobserver l’apparition de vie là où, suivant les connaissances scientifiques de l’époque, il nedevrait pas en émerger… Dans de la paille portée à ébullition et en situation quasianaérobiquedes traces de vie ré-émergent. L’explication qu’il fournit à ce phénomène estcelle de la génération spontanée : de la matière inerte peut surgir de la vie.Un petit ingénieur chimiste (Pasteur) conteste respectueusement ce point de vue et proposel’alternative théorique de la préexistence d’organismes vivants, invisibles et résistants à tousles outrages expérimentaux visant à les supprimer. Comment cette théorie, que nous aurionscomme de nombreux autres acteurs de l’époque qualifiés de fantaisiste, a-t-elle pu devenir lasource d’une vaste controverse scientifique au point qu’une dispute fut organisée alors quemême si l’on néglige la question des positions de prestige scientifique respectives deschampions des deux parties, la théorie des micro-organismes n’a aucun fondementempirique à cet instant de l’histoire ?Pour répondre à cette question, Latour mobilisera l’aversion stratégique de l’églisecatholique pour la théorie créationniste qui pour des raisons théologiques de l’époque, quenous ne développerons pas ici, fragilisait la papauté. Puis il l’articulera à la dépendancepolitique du second empire à l’institution cléricale gallicane. Enfin il rappellera la dépendanceinstitutionnelle de l’Académie des sciences à l’Empire. Les conditions pour que Pasteur entreen scène sont alors compréhensibles.Alors, les microbes, faits politico-religieux ? Les microbes, produits de l’intérêt catholicoimpérial? Pour ce segment de l’histoire : oui. Mais par la suite, Pasteur montrera des microorganismes; il vaccinera et nous continuerons de le faire. Si les microbes ne sont qu’un faitpolitico-religieux, il en aura rarement été d’aussi régulièrement et durablement médicalementefficaces et biologiquement vérifiés… Le fait d’avoir mêlé de façon incontestable auprocessus de production de la théorie des microbes des acteurs politiques et religieux n’a enrien enlevé tous les éléments scientifiques et techniques qui surviendront ultérieurement. Sipendant un temps les microbes ont été les alliés de l’Eglise l’on peut dire cette dernière futleur rampe de lancement ou plus simplement que c’est elle qui fut leur alliée. Une gamme dephénomènes est passé du domaine de la fatalité à celle de l’action technique, des mystèressont devenus explicables, une frontière s’est déplacée. La nouveauté de l’analyse de Latourest que cette frontière n’est pas un simple tissu de textes logiques et d’expériencesscientifiques mais que s’y intercalent, s’y lient, des acteurs sociaux et des institutions nonscientifiques.29