Actes du colloque Éphémè res e t curios ité s : <strong>un</strong> patr i moine <strong>de</strong> circon stances .Cha mbér y, 2 3 <strong>et</strong> 24 s e pt e mbr e 200 4, da n s l e c adre du Mo is du pa tr imo in e écrit.Mais également <strong>un</strong> pot rempli <strong>de</strong> mousse bénite, <strong>de</strong>ux sous-verre avec <strong>de</strong>s plantes<strong>et</strong> fleurs séchées provenant <strong>de</strong> Domrémy <strong>et</strong> du Bois-Chenu, <strong>un</strong> fragment <strong>de</strong> poutreprovenant <strong>de</strong> la chambre <strong>de</strong> Jeanne d’Arc <strong>et</strong> <strong>un</strong> fragment <strong>de</strong> pieu <strong>de</strong> la place duThéâtre français à Rouen…Un ensemble qui se situe à mi-chemin entre le bric-à-brac <strong>de</strong>s souvenirs commerciaux <strong>et</strong> lesreliques.Destin tragique <strong>de</strong> la collection Vallery-RadotJusqu’à sa mort, Louis Pasteur Vallery-Radot, le frère <strong>de</strong> Camille, pour honorer sa mémoire,continue à s’intéresser régulièrement au <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> sa collection. En octobre 1941, ils’inquiète <strong>de</strong> savoir si elle a souffert <strong>de</strong>s bombar<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> 1940. La directrice, JeanneDupic, le rassure : le quartier <strong>de</strong> la bibliothèque n’a pas été touché par les bombes. Endécembre 1942, il envoie donc <strong>un</strong> complément <strong>de</strong> collection, obj<strong>et</strong>s divers, livres <strong>et</strong>gravures, r<strong>et</strong>rouvés dans les archives familiales (d’où peut-être les ouvrages dénommés« sans cote »).De nouveau, en 1945, Louis Pasteur Vallery-Radot <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si « la collection <strong>de</strong> souvenirs <strong>de</strong>Jeanne d’Arc *…+ est complète <strong>et</strong> dans quel état ». Réponse <strong>de</strong> Jeanne Dupic : « L’immeublebibliothèque-musée a gravement souffert au bombar<strong>de</strong>ment du 19 avril 1944.Heureusement, la partie bibliothèque n’en a eu que le contrecoup. La salle où est installée lacollection Jeanne d’arc a vu fenêtres <strong>et</strong> portes arrachées ; au-<strong>de</strong>ssus toiture anéantie. Elleest donc dans <strong>un</strong> triste état ; mais notre collection Jeanne d’Arc n’a souffert en rien. »Cependant, l’exposition permanente <strong>de</strong> la collection Vallery-Radot à la bibliothèque <strong>de</strong>Rouen, condition <strong>de</strong> son don, prend fin en 1952. Elle est victime d’<strong>un</strong>e première extensiondu musée <strong>de</strong>s Beaux-Arts. Un avis daté du 16 juin 1952 annonce : « Par suite <strong>de</strong> l’occupationpar le musée <strong>de</strong> Peinture <strong>de</strong> partie <strong>de</strong> l’intersection <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux galeries <strong>de</strong> la Bibliothèque,l’exposition <strong>de</strong> la collection Jeanne d’Arc doit être supprimée. »Louis Pasteur Vallery-Radot est-il au courant <strong>de</strong> ce r<strong>et</strong>rait ? En 1967, pour le 40 e anniversaire<strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> Camille, il écrit au nouveau directeur, Clau<strong>de</strong> Simonn<strong>et</strong>, pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r qu’àl’occasion <strong>de</strong> l’anniversaire <strong>de</strong> Jeanne d’Arc il soit rappelé aux visiteurs « qu’<strong>un</strong> musée a étéconsacré à Jeanne d’Arc dans les salles <strong>de</strong> votre bibliothèque (Fondation Vallery-Radot) ».En 1968, informé <strong>de</strong> l’exposition en cours sur le thème Jeanne d’Arc <strong>et</strong> l’imagerie populaire,il interroge pour « savoir où se trouvent maintenant les pièces <strong>de</strong> la collection <strong>de</strong> ma sœurCamille Vallery-Radot, que j’ai remises à la bibliothèque <strong>de</strong> Rouen il y a quelque quaranteans *…+ Ma sœur avait conservé avec <strong>un</strong> soin pieux c<strong>et</strong>te collection ».Il vient le constater en personne, le 18 octobre 1968, <strong>et</strong> se déclare « satisfait <strong>et</strong> ému <strong>de</strong> lafaçon dont vous avez organisé le don <strong>de</strong> ma sœur Camille Pasteur Vallery-Radot à la ville <strong>de</strong>Rouen». A-t-il raison ?La bibliothèque <strong>de</strong> Rouen est alors à peu près dans son état actuel, la salle originelle àcursives ayant été comblée par <strong>de</strong>s étages <strong>de</strong> magasin. La collection Jeanne d’Arc n’est plusregroupée, mais se trouve dispersée dans différentes parties du bâtiment. L’exposition n’enest plus alors que virtuelle, partielle <strong>et</strong> temporaire.
Actes du colloque Éphémè res e t curios ité s : <strong>un</strong> patr i moine <strong>de</strong> circon stances .Cha mbér y, 2 3 <strong>et</strong> 24 s e pt e mbr e 200 4, da n s l e c adre du Mo is du pa tr imo in e écrit.« À l’expression d’<strong>un</strong>e vive gratitu<strong>de</strong> pour Ma<strong>de</strong>moiselle Vallery-Radot qui a ré<strong>un</strong>i avec <strong>un</strong>einlassable <strong>et</strong> intelligente ténacité c<strong>et</strong> utile ensemble, à ses parents qui nous l’ont confié, àl’administration m<strong>un</strong>icipale qui n’a pas hésité à l’accepter <strong>et</strong> à consentir les fraisd’installation, il ne reste à ajouter qu’<strong>un</strong> vœu, celui d’<strong>un</strong> accroissement continu, grâce à <strong>de</strong>judicieuses acquisitions <strong>et</strong> à <strong>de</strong> nouvelles libéralités », concluait Henri Labrosse à la fin <strong>de</strong> saprésentation <strong>de</strong> la collection pour l’Illustration.La collection johannique <strong>de</strong> Camille Vallery-Radot ne connut jamais c<strong>et</strong> accroissementcontinu que M. Labrosse appelait <strong>de</strong> ses vœux. Si Jeanne est l’<strong>un</strong> <strong>de</strong>s personnagesincontournables <strong>de</strong> l’histoire rouennaise <strong>et</strong> du fonds local <strong>de</strong> sa bibliothèque, les achats quila concernent ne sont pas aussi systématiques que ceux <strong>de</strong> Camille <strong>et</strong> ils ne viennent pass’ajouter à la collection Vallery-Radot, qui restera pour toujours l’expression <strong>un</strong>ique <strong>de</strong> sacréatrice.Les souvenirs ré<strong>un</strong>is par Camille atten<strong>de</strong>nt <strong>un</strong> plan <strong>de</strong> n<strong>et</strong>toyage <strong>et</strong> <strong>de</strong> reconditionnement,que le déménagement dans <strong>un</strong>e nouvelle structure actuellement en proj<strong>et</strong> rend d’autantplus nécessaire. La réorganisation <strong>de</strong>s collections au sein <strong>de</strong> la nouvelle médiathèquepourrait être l’occasion <strong>de</strong> rem<strong>et</strong>tre en lumière quelques-<strong>un</strong>es <strong>de</strong>s pièces ré<strong>un</strong>ies parCamille, <strong>un</strong>e fois celles-ci restaurées.La collection johannique <strong>de</strong> Camille, la p<strong>et</strong>ite-fille <strong>de</strong> Pasteur, née d’<strong>un</strong>e passion liée à <strong>un</strong>souvenir d’enfance, très marquée par l’époque <strong>de</strong> sa constitution, intéressante par sarecherche d’exhaustivité dans les supports <strong>de</strong> l’iconographie <strong>de</strong> Jeanne, jusqu’auxreprésentations les plus ordinaires, mérite, en raison même du caractère éphémère <strong>de</strong>séléments qui la constituent, <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver la place <strong>et</strong> les conditions <strong>de</strong> conservation qui luisont dues dans les collections <strong>de</strong> la bibliothèque <strong>de</strong> Rouen, ville témoin <strong>de</strong> son martyre. Pouréviter que la collection elle-même ne connaisse <strong>un</strong>e existence éphémère.Mais la ville <strong>de</strong> Rouen, malgré les célébrations annuelles instituées tardivement, a-t-ellejamais dépassé la culpabilité d’avoir été, sans réagir, le lieu d’exécution <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te je<strong>un</strong>e fillehors pair dans l’histoire <strong>de</strong> France, seul moyen d’honorer enfin sa mémoire à sa justemesure, dans la sérénité ?Boyer d’Agen, Les Chevauchées <strong>de</strong> Jehanne, Rouen 1431 – Paris 1909,Paris, Ed. Henri Flaque.Bibliothèque m<strong>un</strong>icipale <strong>de</strong> Rouen