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Emile ou De l'ducation [Document lectronique] / Jean-Jacques ...

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112organes justes et bien exercés; t<strong>ou</strong>te la mécanique des arts lui est déjà connue. P<strong>ou</strong>r savoir travailler enmaître, il ne lui manque que de l'habitude, et l'habitude ne se gagne qu'avec le temps. Auquel desmétiers, dont le choix n<strong>ou</strong>s reste à faire, donnera-t-il donc assez de temps p<strong>ou</strong>r s'y rendre diligent? Cen'est plus que de cela qu'il s'agit.Donnez à l'homme un métier qui convienne à son sexe, et au jeune homme un métier qui convienne àson âge: t<strong>ou</strong>te profession sédentaire et casanière, qui effémine et ramollit le corps, ne lui plaît ni ne luiconvient. Jamais jeune garçon n'aspira de lui-même à être tailleur; il faut de l'art p<strong>ou</strong>r porter à ce métierde femmes le sexe p<strong>ou</strong>r lequel il n'est pas fait. L'aiguille et l'épée ne sauraient être maniées par lesmêmes mains. Si j'étais s<strong>ou</strong>verain, je ne permettrais la c<strong>ou</strong>ture et les métiers à l'aiguille qu'aux femmes etaux boiteux réduits à s'occuper comme elles. En supposant les eunuques nécessaires, je tr<strong>ou</strong>ve lesOrientaux bien f<strong>ou</strong>s d'en faire exprès. Que ne se contentent-ils de ceux qu'a faits la nature, de ces f<strong>ou</strong>lesd'hommes lâches dont elle a mutilé le coeur? ils en auraient de reste p<strong>ou</strong>r le besoin. T<strong>ou</strong>t homme faible,délicat, craintif, est condamné par elle à la vie sédentaire; il est fait p<strong>ou</strong>r vivre avec les femmes <strong>ou</strong> à leurmanière. Qu'il exerce quelqu'un des métiers qui leur sont propres, à la bonne heure; et, s'il fautabsolument de vrais eunuques, qu'on réduise à cet état les hommes qui déshonorent leur sexe enprenant des emplois qui ne lui conviennent pas. Leur choix annonce l'erreur de la nature: corrigez cetteerreur de manière <strong>ou</strong> d'autre, v<strong>ou</strong>s n'aurez fait que du bien.J'interdis à mon élève les métiers malsains, mais non pas les métiers pénibles, ni même les métierspérilleux. Ils exercent à la fois la force et le c<strong>ou</strong>rage; ils sont propres aux hommes seuls; les femmes n'yprétendent point: comment n'ont-ils pas honte d'empiéter sur ceux qu'elles font?Luctantur paucae, comedunt coliphia paucae.Vos lanam trahitis, calathisque peracta refertisVellera...En Italie on ne voit point de femmes dans les b<strong>ou</strong>tiques; et l'on ne peut rien imaginer de plus triste que lec<strong>ou</strong>p d'oeil des rues de ce pays-là p<strong>ou</strong>r ceux qui sont acc<strong>ou</strong>tumés à celles de France et d'Angleterre. Envoyant des marchands de modes vendre aux dames des rubans, des pompons, du réseau, de la chenille,je tr<strong>ou</strong>vais ces parures délicates bien ridicules dans de grosses mains, faites p<strong>ou</strong>r s<strong>ou</strong>ffler la forge etfrapper sur l'enclume. Je me disais: Dans ce pays les femmes devraient, par représailles, lever desb<strong>ou</strong>tiques de f<strong>ou</strong>rbisseurs et d'armuriers. Eh! que chacun fasse et vende les armes de son sexe. P<strong>ou</strong>r lesconnaître, il les faut employer.Jeune homme, imprime à tes travaux la main de l'homme. Apprends à manier d'un bras vig<strong>ou</strong>reux lahache et la scie, à équarrir une p<strong>ou</strong>tre, à monter sur un comble, à poser le faîte, à l'affermir de jambes deforce et d'entraits; puis crie à ta soeur de venir t'aider à ton <strong>ou</strong>vrage, comme elle te disait de travailler àson point croisé.J'en dis trop p<strong>ou</strong>r mes agréables contemporains, je le sens; mais je me laisse quelquefois entraîner à laforce des conséquences. Si quelque homme que ce soit a honte de travailler en public armé d'une doloireet ceint d'un tablier de peau, je ne vois plus en lui qu'un esclave de l'opinion, prêt à r<strong>ou</strong>gir de bien faire,sitôt qu'on se rira des honnêtes gens. T<strong>ou</strong>tefois cédons au préjugé des pères t<strong>ou</strong>t ce qui ne peut nuire aujugement des enfants. Il n'est pas nécessaire d'exercer t<strong>ou</strong>tes les professions utiles p<strong>ou</strong>r les honorert<strong>ou</strong>tes; il suffit de n'en estimer aucune au-dess<strong>ou</strong>s de soi. Quand on a le choix et que rien d'ailleurs nen<strong>ou</strong>s détermine, p<strong>ou</strong>rquoi ne consulterait-on pas l'agrément, l'inclination, la convenance entre lesprofessions de même rang? Les travaux des métaux sont utiles, et même les plus utiles de t<strong>ou</strong>s;cependant, à moins qu'une raison particulière ne m'y porte, je ne ferai point de votre fils un maréchal, unserrurier, un forgeron; je n'aimerais pas à lui voir dans sa forge la figure d'un cyclope. <strong>De</strong> même je n'enferai pas un maçon, encore moins un cordonnier. Il faut que t<strong>ou</strong>s les métiers se fassent; mais qui peutchoisir doit avoir égard à la propreté, car il n'y a point là d'opinion; sur ce point les sens n<strong>ou</strong>s décident.

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