Tourang'L n°61
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l Plus belle la ville<br />
Lui aussi est un gars du quartier. « Quarante ans que j’y vis.<br />
Et que j’en aime son tracé pas vraiment rectiligne, ses belles<br />
façades du XIX e , son caractère culturel : ça fait du bien dans<br />
ce monde mercantile. Et puis, elle se termine sur ce square<br />
François-Sicard où l’on est encore en plein Balzac. Les rues<br />
du Cygne et des Cordeliers ont aussi beaucoup de cachet »,<br />
souligne l’humaniste urbaniste de cette rue de Lucé qui fait<br />
office de frontière entre la Scellerie élargie, côté rue Nationale,<br />
essentiellement faite de franchises (Marionnaud, IKKS,<br />
Valège, Cotélac, Encore des Filles…) et la rue historique, où<br />
ne s’alignent quasiment que des commerces indépendants.<br />
Aucun commerce de bouche, à l’exception de la fameuse<br />
Chocolatière et d’une bonne boulangerie, mais pas mal<br />
d’habillement et de bijoux, dans la partie d’avant le théâtre,<br />
autre frontière de la rue. Laquelle devient alors plus élitiste,<br />
avec ses antiquaires, bouquinistes, galeries d’art et<br />
boutiques de décoration, sa très sélect agence immobilière,<br />
son joaillier, ses coiffeurs, barbier, salon d’esthétisme et<br />
centre de bronzage, et depuis quelques années, ses boutiques<br />
tendance qui, telle Nomad, la rajeunissent un peu, en<br />
contribuant à en faire une rue bobo. Car si la rue Colbert est<br />
assurément une rue baba, celle de la Scellerie tient en effet<br />
de la rue bobo. Depuis toujours bourgeoise, la voilà aussi<br />
bohême. On y circule beaucoup à vélo, voire en trottinette.<br />
« Depuis deux trois ans, les loyers y sont plus chers qu’aux<br />
Prébendes. On est dans une rue chic et dans l’air du temps,<br />
un peu parisienne, genre Bastille, avec des commerces qui<br />
se démarquent. Vous vous souvenez de La Roulotte de Caroline,<br />
de Garnuchette, La Procure, La Stylothèque... On a aussi<br />
eu Yves Saint Laurent. C’est une rue où il y a de l’argent. On<br />
y roule écolo et on y mange bio. Il y a trente ans, on avait<br />
déjà là une boutique de La Vie Claire », souligne Violette<br />
Merlé, mémoire du quartier et vendeuse du magasin de<br />
chaussures Trouvé, où les marques vendues parlent d’ellesmêmes<br />
: Méphisto, Gabor, Giesswein et autres Berthe aux<br />
grands pieds.. pas pour petites bourses.<br />
Très chic aussi, le nouveau Club 57, l’ex-discothèque bien<br />
élevée d’en face le théâtre, un temps devenue club de<br />
streap-tease, étant depuis peu un superbe club privé de<br />
sports avec coaching. La rue n’en a pas moins gardé en fin<br />
de semaine son autre piste de danse, version samba : celle<br />
du restaurant-spectacle brésilien Fiesta Latina, connue pour<br />
son churrasco de viande. Pour du plus gastro et plus intime,<br />
ce sera forcément Le Rideau Rouge, ses menus Ouverture,<br />
Entracte, Comédie, Opéra et Symphonie jouant de la proximité<br />
du théâtre. Seul lieu de vie passé le couvre-feu de 20h,<br />
il est à l’image de sa rue, élégant et apaisant. Les deux seuls<br />
bars du quartier, Le Molière et L’Arlequin, ne dépassent en<br />
effet que rarement l’heure de l’apéro. Ni kebab ni burger,<br />
ni pub ni brasserie : la rue de la Scellerie reste une rue de<br />
jour, ne s’animant que les soirs de représentation, aux seuls<br />
moments de l’entrée et de la sortie des spectateurs. Une<br />
rue de culture et d’histoire par excellence, vouée à sublimer<br />
un passé que l’on espère plein d’avenir.<br />
Jean-Luc Pechinot<br />
Une rue calme mais néanmoins<br />
vivante, puisque riche<br />
de quelque 160 commerces,<br />
pour la plupart indépendants.<br />
Peu empruntée par les voitures,<br />
cette rue bobo l’est<br />
par contre par les vélos.<br />
© Jean-Luc Péchinot<br />
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