Tourang'L n°61
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l Plus belle la ville<br />
© Jean-Luc Péchinot<br />
© Jean-Luc Péchinot<br />
comme « le grenier de la France ». Dès lors, combien de<br />
meubles, tableaux et autres objets précieux se sont-ils retrouvés<br />
dans ce quartier des antiquaires, connu jusqu’à Paname.<br />
Des Dubreuil-Chambardel aux Quantin, certains d’entre eux se<br />
firent même un renom international.<br />
« Il y a un siècle déjà, on venait chiner la Touraine. Les acheteurs<br />
parisiens prenaient le train à vapeur du matin en gare<br />
d’Orsay et arrivés à Tours, un fiacre ou le tram les déposait rue<br />
de la Scellerie. Ils repartaient le même jour avec un ou deux<br />
tableaux sous le bras », raconte Richard Gabillet, le successeur<br />
des frères Quantin, lui aussi référencé par de grands collectionneurs,<br />
étant un enfant du quartier, où son grand-père Maurice<br />
fut taxidermiste et marchand de fourrures. Mais si la rue reste<br />
connue du milieu, en revanche le nombre d’antiquaires et brocanteurs<br />
s’est réduite comme une peau de chagrin : « On a<br />
trois fois moins de marchands qu’il y a trente ans. Même plus<br />
de brocanteurs. Du coup, les prix ont baissé. Une commode<br />
que vous achetiez 6000 €, vous l’emportez à 3000. »<br />
« C’est le moment de faire des affaires », confirme Philippe<br />
Bruneau, l’autre grand nom des antiquités, héritier d’une lignée<br />
lancée au 62 de la rue en 1922, par son grand-père Prosper,<br />
qui fit prospérer l’affaire au point d’exposer au Grand Palais.<br />
Référence tant pour le mobilier XVIII e que pour l’art<br />
décoratif, l’antiquaire tue le temps en espérant<br />
encore tenir quatre ans pour fêter<br />
le centenaire de la maison. Les<br />
temps sont durs pour le marché<br />
de l’antiquité, la boutique d’en<br />
face ayant ainsi failli devenir<br />
une pizzeria. « J’ai réussi à la<br />
racheter pour en faire mon<br />
dépôt. C’aurait été une<br />
fausse note et la porte ouverte vers une perte d’identité d’une<br />
rue qui se démarque des autres. Et qui a l’histoire et la culture<br />
dans son ADN. La Scellerie doit rester vouée à des commerces<br />
de qualité ou de niche, comme celui de ma voisine modiste,<br />
Virginie Poisson. Je lui dit chapeau ! », s’enthousiasme Amir<br />
Hossein, autre figure de la rue, cet affable Persan proposant<br />
du tapis d’Orient, « mais pas que : j’ai aussi des tapis français<br />
d’églises, des aubussons, des Compagnies des Indes de 8 m<br />
sur 5 et des tonnes d’autres ».<br />
D’Alain Windsor (plus souvent aux Puces qu’en boutique)<br />
et des Ronda (une affaire de famille) à Mehdi (quel capharnaüm<br />
!), la rue reste logée à bonnes enseignes,<br />
le passé s’y déclinant à tous les temps, versions bijoux,<br />
poupées, jouets, numismatique… Des boutiques de haut<br />
niveau, les trois bouquinistes de la rue faisant aussi référence,<br />
particulièrement la Librairie Ancienne, dite encore<br />
Denis, du nom de cette vieille demoiselle de patrimoine<br />
que fut Marie-Thérèse Denis, son père, Léon, ayant créé<br />
cet antre de vieux papiers en 1925. Se disant « une<br />
vieille sauvage, un peu autoritaire » et n’aimant pas<br />
Percée en 1876 et venant aboutir sur la façade du théâtre,<br />
la rue Corneille a conservé sur le mur ouest de ce dernier<br />
un vestige de l’ancienne chapelle des Cordeliers,<br />
à l’emplacement de laquelle venait d’être<br />
édifié ce premier « théâtre municipal »,<br />
dont il ne reste que la magistrale<br />
façade de Léon Rohard, ornée<br />
d’une sculpture monumentale<br />
signée par le Parisien Frédéric<br />
Combarieu, auquel on doit<br />
aussi les superbes femmes<br />
lampadophores de la loggia.<br />
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