ICI MAG - SEPTEMBRE 2019

Contes et légendes
des Landes
Des griffes dans la nuit
Partie 1
Entendez-vous ce bruit devenu familier maintenant,
c’est le grand livre des histoires qui vient de s’ouvrir.
Écoutons ce qu’il va nous raconter.
Il était un fois un pays fait de landes marécageuses
et de bois humides. Au fil des années et du labeur des
hommes, les pins se multipliaient. Au bout de quelques
générations, le nouveau venu fini par complètement
grignoter les paysages d’antan. Avec l’arrivée de cette
nouvelle forêt, beaucoup d’histoires singulières apparurent.
On parlait de sabbat le soir dans les bois, de sorcières,
de maléfices...
Seul Paul, un berger établi à la sortie du village, n’avait
pas peur ce soir là. Enfin, pas plus que la nuit précédente.
La veille, la bête était venue à sa porte. Elle l’avait grattée
pour y faire un trou, trop petit pour y passer mais
suffisant pour y jeter un œil ou humer son intérieur.
Il s’était réveillé et faufilé sans bruit près de la porte.
Armé d’une pique, il était prêt à accueillir son visiteur
nocturne. L’animal était là, juste derrière sa porte ! Il le
sentait. Il pouvait respirer son odeur fétide, entendre le
bruit lourd de ses pas, le claquement sec de ses dents, le
bois de la porte gémissant et criant sous l’assaut de ses
griffes. Mais la bête n’entra pas.
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Mais depuis quelques jours, c’est une autre histoire qui
préoccupait le village. La veille, tous l’avait entendu,
même ceux qui avaient le sommeil le plus lourd. Les
villageois s’étaient réveillés en sueur et en sursauts.
D’abord ces cris horribles longs et stridents, puis ce râle
sourd puissant et interminable et enfin ces hurlements
sauvages et féroces qui glaçent le sang et paralysent les
membres.
Certains disaient même avoir aperçu quelque chose
dans l’épaisse noirceur de la nuit. Une forme animale
gigantesque avec un regard de feu. Le lendemain matin,
on retrouva des brebis mortes et à moitié dévorées
un peu partout autour du bourg et certaines bergeries
avaient même été visitées. La panique était palpable
dans le village et sur les visages. La nuit suivante, tous
se barricadèrent dans leurs logis, certains posèrent des
pièges autour de leurs maisons, d’autres se saisirent de
leurs fusils, prêts à veiller jusqu’au petit matin. Tous les
autres se blottirent, effrayés, au plus profonds de leurs
draps.
Ce soir, il se tenait de nouveau à son poste, bien accroché
au bois de sa fourche. La lune était pleine et il était
serein et souriant. Après tout, n’avait-il pas élaboré un
plan ? N’avait-il pas trouvé la solution ? Tous ses espoirs
tenaient dans sa main gauche, qu’il serrait très fort afin
de ne surtout pas en lâcher le contenu. C’était un bien
précieux que lui avait transmis sa grand-mère. Il avait
passé toute la journée à le chercher désespérément et
maintenant il l’avait et il savait que ça allait marcher.
Il jeta un œil par la fenêtre. L’animal était là ! Armé
de dents longues comme des couteaux, le regard rougeoyant,
les muscles tendus, prêt à bondir...
A suivre...
D’après un texte de Sylvie PONTIER
Biscarrosse Plage