FRANCE
MARS 2021
HORS DU COMMUN
Votre magazine
offert chaque
mois avec
MYRIAM
NICOLE
HEAVY MENTAL
Dans la tête de deux icônes du VTT descente à la
reconquête de leurs titres mondiaux…
Quand la force de l'esprit peut faire la différence
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Éditorial
SOUS LEURS
CASQUES
Derrière les masques de protection, sous les deux
casques en « fusion » sur notre couverture, il y a
un gars et une fille parmi les plus abordables que
vous pourriez rencontrer.
Deux icônes bon esprit d’un sport, le VTT de
descente, où ils ont atteint les plus hautes sphères
mondiales. Après une saison « très particulière »,
ils sont plus que jamais convaincus que leur force
d’esprit pourra leur permettre de faire la différence
sur des pilotes tous aussi bien préparés,
équipés et motivés qu’eux.
Rassembler Loïc Bruni et Myriam Nicole entre
Noël et le jour de l’An n’était pas seulement une
occasion pour eux de se retrouver entre amis,
mais surtout l’opportunité de connaître leurs
convictions sur une arme invisible, qu’ils nous
recommandent à tous d’optimiser : notre mental.
CONTRIBUTEURS
NOS ÉQUIPIERS
GAVIN BOND
Le photographe britannique
est abonné aux shootings
de mode plutôt qu’à des missions
dans le milieu des
sports mécaniques, mais il
s’est retrouvé sur la course
Mint 400 dans le désert du
Nevada. « Ce fut mon dernier
shooting avant que la pandémie
ne frappe, se souvient-il.
Mais esquiver les camions et
porter un masque contre la
poussière ne m’a finalement
pas préparé à ce qui allait
suivre en 2020. » P. 20
Belle lecture !
Votre Rédaction
JEREMY BERNARD (COUVERTURE)
50 % de notre couverture : la championne de VTT de
descente française Myriam Nicole. Une forte tête.
JÉRÉMY BERNARD
Photographe de ski freeride
et de sport depuis dix ans,
Jérémy s’épanouit à présent
dans le photojournalisme.
« Pour ce shooting de
couverture, c’était drôle de se
retrouver un 29 décembre à
La Grand-Combe pour shooter
du vélo DH, dit le co-fondateur
du site neufdixieme.com, car
à cette époque, je suis sur mes
skis. Et pas facile de canaliser
les deux phénomènes, Myriam
et Loïc, peu avares en facéties
pour nous faire marrer. » P. 42
THE RED BULLETIN 3
32
Changer le game : Fif donne de
la force aux femmes du rap et
présente dix talents à suivre.
42
Rencontre avec Loïc Bruni (photo) et Myriam
Nicole, pour savoir ce qu’ils ont dans la tête.
6 Galerie : ces photos ont de quoi
déconfiner vos rétines
12 Comment un skieur pro
aujourd’hui en fauteuil roulant
peut vous motiver à courir
14 Le bleu de travail du futur ne
passera pas à la machine
15 À quoi pourraient ressembler les
cinémas de demain
16 Faire d’une fin un début, avec le
créateur des skis Black Crows
18 Playlist : le son de la révolution
selon le rappeur Common
FELIPE BARBOSA, JEREMY BERNARD, EVA BERTEN
4 THE RED BULLETIN
CONTENUS
mars 2021
70
Quand B-Girl Jilou se bouge
pour les autres ladies.
20 Tempête du désert
Le photographe anglais
Gavin Bond dans la fureur du
MINT 400, une course folle
et motorisée dans le désert
du Nevada.
32 Elles font le rap
Fif a interviewé l’essentiel de
la scène rap française, et
nous présente certains de
ses talents féminins parmi
les plus bouillants.
42 Deux fortes têtes
Deux des meilleurs descendeurs
VTT de tous les temps
réunis pour une mise au point
sur leur détermination
mentale.
52 La vague afro
Un livre nécessaire apporte
un courant contraire sur le
cliché du surfeur blond aux
yeux bleus.
64 Non-stop
Le profil rare de Monki,
à la fois joueuse de foot,
DJ, et activiste sociétale
et culturelle.
70 La force en
elle(s)
L’Allemande Jilou ne danse
pas que pour assouvir sa
passion : elle espère aussi
motiver sa communauté
au changement.
79 À faire : le VTT sauce viking
84 Fitness : une séance de l’espace
86 Rétro : Game & Watch is back !
87 Gaming : infiltrez-vous
88 Avec l’élite du babyfoot…
89 À voir : sur Red Bull TV
90 Matos : un vélo vous attend
96 Ils et elles font The Red Bulletin
98 Image de fin : délire omnisport
THE RED BULLETIN 5
ARROYOMOLINOS,
ESPAGNE
La France
met le feu
En motocross quand vous gagnez une
course, il est de bon ton d’envoyer une
signature aérienne pour célébrer votre
performance et régaler le public. C’est
ce qu’exécute le pilote français de
20 ans, Tom Vialle (Red Bull KTM Factory
Racing), quand il passe la ligne d’arrivée
de la douzième étape du championnat
du monde de MX2, le 11 octobre 2020,
sur la piste d’Intu Xanadù. L’Avignonnais
sera finalement sacré Champion du
monde MX2 2020 pour sa seconde
saison dans cette discipline.
Instagram : @tomvialle28
SAMO VIDIC/RED BULL CONTENT POOL
7
TURDA, ROUMANIE
Passion
sous-sol
Ancienne mine de sel devenue
attraction touristique, la Salina
Turda est une merveille souterraine
dont les structures brillent
comme des anémones de mer dans
la pénombre. La reine du Red Bull
Cliff Diving, Rhiannan Iffland,
n’avait d’yeux que pour le lac, à
112 m sous terre. « C’est la toute
première plongée souterraine dans
une mine de sel, raconte l’Australienne
à propos de son plongeon
en octobre 2020. Avec une densité
17 % supérieure à celle de l’eau
de mer, l’impact y est différent.
On est repoussé à la surface. »
@rhiannan_iffland ; joergmitter.com
JOERG MITTER/RED BULL CONTENT POOL
9
YAKUTAT, ALASKA
Top secret
Le photographe de sports d’action Dom
Daher était sur le Freeride World Tour
à Haines, en Alaska, lorsqu’il a reçu un
message de l’ex-freerideuse Anne-Flore
Marxer. « Elle a dit qu’il y avait du vent
dans le Yakutat et que nous devrions y
aller juste après l’événement, se souvient
le Français. Alors, le lendemain, nous
sommes allés là-bas - dans un tout petit
avion. » Yukutat, dans le sud-est de
l’Alaska, compte 600 habitants (« le flic
de la ville connaît tous les numéros de
téléphone par cœur »), et un secret bien
gardé : une vague, que les locaux, comme
Andrew (photo) viennent surfer à loisir.
domdaher.com
DOM DAHER
11
MIKE SHAW
« C’est la gratitude
qui m’a sauvé »
Condamné au fauteuil roulant, l’ex-skieur pro freestyle Mike Shaw réussit
à courir dix kilomètres. Il veut traverser le Canada avec un millier d’amis.
Un an, quatre mois et 17 jours, c’est
le temps qui s’est écoulé entre le jour
où Mike Shaw apprend qu’il ne marcherait
plus jamais et sa participation
à une course à pied. En décembre
2013, l’entraîneur canadien de ski
acrobatique fait une grave chute qui
provoquera une paralysie de ses
quatre membres. Le diagnostic (quadriplégie
incomplète) est rude, mais
n’entame en rien sa détermination.
À peine opéré, Mike entame un entraînement
intensif. Trois mois plus
tard, il quitte l’hôpital. Seize mois
après, il participe à la course Wings
for Life World Run. Il parcourt dix
kilomètres avant d’être rejoint par la
voiture-balai. Une performance incroyable.
De plus, cette compétition
lui tient à cœur car tous les frais
d’inscription vont à la recherche sur
la moelle épinière. « Le remède
n’existe pas encore, précise l’athlète
de 34 ans. J’ai eu de la chance, mais
la blessure fait toujours partie de
mon quotidien. Mes bras et mes
jambes restent en partie insensibles
et je perds l’équilibre une cinquantaine
de fois par jour. » Il évoque ici,
le rôle essentiel de l’entourage et les
raisons qui font de la gratitude un
remède efficace contre la détresse.
the red bulletin : Après votre
opération, le médecin vous a annoncé
que vous ne marcheriez
plus jamais. Mais vous avez refusé
son diagnostic. Pourquoi ?
mike shaw : Je suis un optimiste
invétéré. Quand quelque chose ne
marche pas, je me dis toujours que
ce n’est qu’une question de temps.
Le freeski m’a appris à me relever.
La chute fait partie de la progression.
Il faut savoir se relever, remonter
la pente et tenter le saut à nouveau.
Avec le temps, cette attitude a
fini par devenir une seconde nature.
Dans votre livre Never Part of
the Plan (ndlr : Cela n’a jamais
fait partie du plan), vous écrivez
que la gratitude vous a permis de
traverser les moments les plus
difficiles. Pouvez-vous nous en
dire plus ?
Quelques semaines après l’accident,
j’étais au fond du trou. D’horribles
crampes m’accablaient, je souffrais
le martyre. J’ai failli renoncer à
maintes reprises. Puis, j’ai découvert
dans la gratitude un outil. Une
révélation. Lorsqu’on traverse une
période difficile, la gratitude est
rarement le premier réflexe. C’est
pourtant dans ces moments-là
qu’elle s’avère le plus efficace. À
l’hôpital, je n’ai pas eu à chercher
bien loin pour trouver cas plus désespéré
que le mien. Le but était de
changer de perspective, se dire que
lorsqu’une porte se ferme, quatre
autres s’ouvrent. Elles s’ouvrent de
surcroît sur une terrasse surplombant
l’océan !
En 2017, vous avez lancé #Team-
Coast2Coast, une communauté
de coureurs Wings for Life avec
de grandes ambitions. Pouvezvous
nous en dire davantage ?
J’ai parlé de Wings for Life à mon
ami Jim Mullan. Il vit à Halifax et
est paraplégique comme moi. Il me
dit : « Pourquoi ne pas rassembler
suffisamment de personnes pour
traverser virtuellement le Canada
de Vancouver à Halifax, d’une côte
à l’autre, soit 5500 kilomètres ? »
Nous étions alors à un mois de la
course. Nous avons mis #Team-
Coast2Coast en ligne et avons réussi
à inscrire 100 personnes. En 2019,
nous avions plus de 900 inscrits qui
couraient pour nous dans tout le pays
via l’application. Il nous a manqué
150 km pour atteindre notre objectif.
Cette année, nous visons un renfort
de 1000 coureurs afin d’aller au bout.
Souhaitez-vous encourager les
gens à reproduire l’exemple de
#TeamCoast2Coast ?
Absolument ! Former une équipe
et se fixer un objectif commun est
extrêmement motivant, mais les
gens ne nous ont pas attendus pour
se lancer. Faire partie de cette communauté
mondiale est une force.
Wings for Life
World Run
Une course à laquelle participent des
milliers de coureurs à travers le monde
simultanément. Votre course prend fin
dès que la voiture-balai (virtuelle) vous
dépasse. Coup d’envoi le 9 mai 2021.
Vous pouvez participer via l’appli —
en solo, avec des amis ou au sein d’une
course organisée, mais aussi dans l’un
des douze grands Flagship Runs, si les
circonstances le permettent.
Inscriptions et formation de votre
équipe : wingsforlifeworldrun.com
ROYCE SIHLIS FLORIAN OBKIRCHER
12 THE RED BULLETIN
« Le but était
de changer de
perspective. »
THE RED BULLETIN 13
GUARDIAN XO
L’homme
amélioré
Mi-homme, mi-machine, cet
exosquelette pourrait devenir
le bleu de travail du futur.
Chaud devant :
le Guardian XO ne
pèse que 68 kg,
s’enfile et se retire
en seulement
30 secondes,
idéal pour un robot
à la demande.
Si l’on en croit la sciencefiction,
l’exosquelette robotique
fera bientôt partie de
notre garde-robe. Le Guardian
XO, premier exosquelette au
monde à propulsion intégrale,
créé par la société américaine
Sarcos Robotics en partenariat
avec l’armée américaine, nous
rapproche un peu plus de ce
futur. Mais, contrairement
à l’Iron Man de Marvel ou à
l’armure de Tom Cruise dans
Edge of Tomorrow en 2014,
cette combinaison n’est pas
destinée au combat. Elle permet
d’accomplir des tâches
manuelles et de changer ainsi
notre quotidien de manière
considérable.
La quête d’un exosquelette
motorisé fonctionnel n’est pas
nouvelle. Dès 1965, General
Electric lançait son Hardiman,
mais son poids excessif
(680 kg), sa mobilité limitée et
brutale le rendaient inapte à
une utilisation humaine. Depuis,
de nombreux prototypes ont
vu le jour, essentiellement des
exosquelettes partiels destinés
aux personnes handicapées
des membres inférieurs.
Ben Wolff PDG de Sarcos,
tient toutefois à préciser que
le Guardian XO est « un robot
humanoïde portable, complet
et fonctionnel » capable de
soulever aisément 90 kg (45 kg
par bras), doté de 24 degrés
de liberté, assurant à son opérateur
un déplacement sans
encombre. « L’exosquelette
convient à toute personne dont
le métier comporte le maniement
d’objets lourds, ou des
tâches pénibles, en réduisant
la contrainte physique »,
explique Wolff. Un aspect qui
n’a pas manqué d’éveiller l’intérêt
des forces armées.
Les activités logistiques de
l’armée américaine, l’une des
plus importantes au monde,
perdent selon les estimations
de Wolff, environ 27 millions
de jours de travail par an. Cette
perte n’est pas liée aux combats,
mais à la construction,
au transport et à la production.
« La pénibilité du travail est
telle que nos collaborateurs ne
peuvent exercer ce métier plus
de cinq à sept ans. Le Guardian
XO leur permet de poursuivre
leur activité professionnelle
aussi longtemps qu’ils le souhaitent.
»
La combinaison pourrait
convenir à d’autres domaines
d’activité humaine physiquement
exigeante, tels que les
services d’urgence et les
secours en cas de catastrophe.
Mais, alors que certains spécialistes
étudient des solutions
entièrement automatisées,
comme les drones ou les robots
à IA, Wolff pense que l’intuition
et l’intelligence humaines
restent la clé : « Contrairement
aux alarmistes, nous pensons
que l’IA est loin d’être au point
et que le Terminator qui remplacera
l’homme n’est pas
encore né. Le travail humain a
encore un bel avenir, par conséquent,
la meilleure option est
d’augmenter l’homme pas de
le remplacer. »
sarcos.com
DAN ESCOBAR LOU BOYD
14 THE RED BULLETIN
Votre future salle de
cinéma ressemblera
peut-être à cela.
OMA CINEMA LOU BOYD
OMA CINEMA
Ça va flotter
La menace qui pèse sur les salles de cinéma pousse
deux Parisiens à s’inspirer du passé pour les sauver.
« Aller au cinéma pourrait bientôt
devenir chose du passé »,
déclarait Patty Jenkins, réalisatrice
de Wonder Woman 1984,
en octobre dernier, après que
la sortie de son blockbuster ait
été reportée pour la troisième
fois. En 2020, l’effet dévastateur
de la COVID-19 sur le
calendrier des sorties en salle
frappe également le dernier
James Bond repoussé à 2021.
Même un réalisateur de renom
comme Christopher Nolan ne
parvient pas avec son Tenet à
ramener les spectateurs
devant le grand écran.
Le mode de socialisation
change, et l’expérience de la
salle de cinéma telle que nous
la connaissons, assis côte à
côte, rangée après rangée,
risque de disparaître à jamais.
Mais survivre, c’est évoluer,
comme le prouvent les
architectes parisiens Pierre et
Nicolas Chican et leur « cinéma
vertical ». Oma Cinema remplace
la configuration des
salles de cinéma traditionnelles
par des alvéoles accueillant de
petits groupes.
Accrochés verticalement
face à l’écran, les sièges posés
sur cet « écrin » procurent le
réconfort social dont les spectateurs
ont besoin, même si à
l’origine l’idée répondait moins
à un besoin de sécurité qu’au
désir de créer une expérience
plus immersive. « Nous voulions
exploiter toute la hauteur
de l’écran et en rapprocher les
spectateurs », explique Nicolas
Spectaculaire : l’espace d’accueil de l’Oma Cinema.
à propos d’une structure qui
superpose le public sur une
pente de 50 %, au lieu des 25 %
d’une salle classique.
« Les spectateurs auront la
sensation de flotter devant
l’écran. » Cela évitera aussi
qu’une personne de grande
taille gêne la vue de celle assise
derrière. La conception impressionne
par son style futuriste
et sa ressemblance avec le
Sénat galactique de Star Wars,
une comparaison qui a surpris
les frères. « Cela nous évoque
plus des loges d’opéras ou de
théâtres, explique Nicolas.
Chaque balcon peut être agrémenté
de canapés, de fauteuils,
ou d’un nombre réduit
de sièges de cinéma. »
Le premier Oma Cinema
doit ouvrir à Paris cette année.
« C’est dur pour les cinémas,
l’innovation est un moyen de
trouver de nouvelles façons
de ramener le public dans les
salles pour y voir des films en
compagnie. Rien de tel que
de se retrouver entourer de
proches et regarder un film sur
un écran immense avec un son
surround. Le streaming ne
pourra jamais égaler cela. »
omacinema.com
THE RED BULLETIN 15
CAMILLE JACCOUX
Planches de salut
En 2020, le skieur et cofondateur des skis Black Crows, Camille Jaccoux,
découvre la station de ski fantôme de Rio (Nouveau-Mexique). Et lance une
série sur ces lieux d’altitude abandonnés. Quand une fin devient un début.
Des lieux quittés en urgence, laissés
dans un abandon soudain. En survolant
le domaine skiable de Rio au
Nouveau-Mexique (États-Unis),
déserté depuis vingt ans, le photographe
Chris Dahl-Bredine, recruté
pour les besoins du tournage par
Camille Jaccoux, raconte ces rivières
qui se créent là où la neige se met à
fondre, tous ces endroits aimés qui
finissent par se rejoindre. Pour le
cofondateur de la marque de ski
Black Crows, Rio est un spot unique,
mystique. Joe Musich, le gardien
de la station fantôme depuis 2009
dit, lui, qu’il s’y passe des choses
étranges, à 2 895 m d’altitude. « Tout
a été laissé en plan, de la caisse enregistreuse
au matériel de ski et de
snowboard. Même les pistes sont
restées plus ou moins en l’état »,
confirme Camille Jaccoux qui a produit
avec le freeskieur Julien Régnier
le premier épisode The Ghost Ski
Resorts, appelé à devenir une série.
« L’idée nous est venue il y a deux
ans, lors d’un trip ski en Oregon. On
nous a parlé de ces stations fantômes
dans l’Est des États-Unis. Souvent
des micro-domaines qui ont
poussé comme des champignons
dans les années 50 et 60 et qui ont
disparu au fil du temps, pour des
raisons économiques et/ou à cause
du réchauffement climatique. »
Camille Jaccoux se documente, et
découvre que ces stations de ski fantômes
existent dans le monde entier.
Il s’intéresse surtout aux sites à
l’architecture très présente, témoins
d’un passé et d’une vie riches. « Avec
Julien, nous avons eu envie de nous
réapproprier un domaine mécanisé
via le ski de randonnée. De rencontrer
des gens qui ont vécu là, leur
faire raconter leur histoire. En tant
que skieur, vivant à Chamonix, ça
me parle, je vois tous les jours des
changements, des choses qui disparaissent,
à cause du réchauffement
climatique. Les éboulements se
multiplient, la limite pluie-neige remonte,
les glaciers reculent. En plaisantant,
et de façon un peu cynique,
je dis souvent que le ski, ce n’est pas
un métier d’avenir… » Pourtant, son
film dit clairement le contraire.
Se réinventer. Créer. Ne pas écouter
les empêcheurs de rider en rond.
Rio : station fantôme
Lodges, hôtels et condominiums désertés,
remontées mécaniques rouillées :
peu à peu, les chutes de neige qui atteignaient
en moyenne 6,60 m chaque
hiver sont devenues irrégulières à Rio,
dont l’éloignement des principales
grandes villes a précipité la faillite. La
station de ski a fonctionné entre 1982 et
1990, puis entre 1995 et 2000. Le 9 janvier
2000, la vie de ce domaine familial,
seul vivier d’emploi dans la région, s’est
brutalement arrêtée. Les repas préparés
ont pourri sur place, les lits faits l’ont été
pour rien… The Ghost Ski Resorts,
Chapter 1 à voir sur la chaîne YouTube
de la marque de skis Black Crows.
Dans le cas qui nous occupe, trouver
spatule à son pied. Quand il lance
Black Crows autour d’une table en
2006 avec le freeskieur Bruno
Compagnet, de manière instinctive,
l’industrie est ancienne et globalement
assez conservatrice. « Black
Crows, c’est un projet fait à la maison,
par un petit groupe créatif. Ça
a toujours été dur, intense, un truc
de passionnés. Bien sûr, au début,
on nous a dit que le ski, c’était mort,
mais on avait envie de s’infiltrer dans
une niche, avec comme seul plan
marketing d’avoir des produits qui
nous ressemblent, de bons skis qui
collent à un besoin ressenti sur le
terrain, qui font sens, qui parlent
aux skieurs de la première benne,
mais aussi à nos familles. À l’époque,
aucun ski ne nous faisait vraiment
rêver. On a eu plutôt raison de se
lancer et d’y croire, car on est devenus
la marque indépendante numéro
un sur le marché du ski aujourd’hui.
Il y a toujours des choses à faire C’est
un peu à l’image de The Ghost Ski
Resorts : tant que la neige sera là,
les gens auront envie de skier. »
Dans la vidéo, le photographe
Chris Dahl-Bredine évoque ainsi le
renouveau du ski de rando dans la
région du Nouveau-Mexique. Cette
idée de pouvoir malgré tout profiter
de cette nature redevenue pure,
intacte. Camille Jaccoux que l’on
voit skier dans le film entre les plus
grands trembles de la planète,
constate cet appétit vers un retour
au mouvement autonome, éloge de
la lenteur. « Aujourd’hui, le ski de
randonnée représente entre 30 et
35 % de nos ventes. Et ce phénomène
monte en puissance partout…
» Planches de salut ? Camille
Jaccoux et ses stations fantômes
prouvent en tous cas qu’il est possible
de donner une seconde vie à
ce qui semblait perdu.
JULIEN REGNIER PATRICIA OUDIT
16 THE RED BULLETIN
« Tant que la
neige sera là,
les gens
auront envie
de skier. »
THE RED BULLETIN 17
COMMON
Lumière
sonore
Le rappeur, acteur et activiste
américain livre quatre
morceaux qui incarnent le
son de la révolution.
Le militantisme social et l’apologie
de la positivité sont depuis
longtemps les marques de
fabrique de Lonnie Rashid Lynn
Jr, alias Common. En 2020, le
natif de Chicago est de toutes
les manifestations. Auteur de
deux livres à succès, il est aussi
au casting de plusieurs films
dont Selma (2014) pour lequel il
cosigne la chanson Glory, il
incarne le rôle du leader des
droits civils James Bevel et a
signé treize albums. Avec son
dernier opus, A Beautiful Revolution
Pt.1, l’artiste de 48 ans
récipiendaire d’un Oscar, d’un
Emmy et d’un Grammy, entend
guérir et inspirer les victimes
d’injustice raciale et sociale.
Les quatre titres classiques
qu’il nous livre ici, ont selon lui,
le pouvoir de changer le monde.
thinkcommon.com
John Lennon
Imagine (1971)
« Comment ne pas être sensible
à cette chanson quand on est
soi-même un rêveur qui croit à
un monde meilleur d’amour, de
compassion et de joie ? L’imagination
est un formidable moteur.
Nos créations naissent
souvent d’une idée ou d’un sentiment
d’espoir. Les paroles stimulantes
nourrissent ma foi en
un changement possible. J’y
vois le germe de la révolution. »
Queen Latifah
UNITY (1993)
« L’unité doit être le but d’une
révolution. Tout au long de l’Histoire,
l’énergie et la domination
masculines ont été nocives
pour le monde. Queen Latifah
autonomise les femmes, leur dit
qu’elles sont des reines et
qu’elles doivent exiger le respect.
La révolution n’a pas de
sens sans des femmes au pouvoir,
sans meneuses respectées
et honorées. »
Yasiin Bey (fka Mos Def)
Umi Says (1999)
« Mos m’a fait écouter l’album
avant sa sortie et je me souviens
lui avoir dit : “C’est l’un
des meilleurs disques que je
n’ai jamais écoutés.” C’était
émouvant et exaltant. Je vois
en cette chanson, en particulier
les paroles “My Umi [mère
en arabe] m’a dit illumine le
monde de ta lumière”, un acte
révolutionnaire. Éclairer le
monde en fait partie. »
Gil Scott-Heron
The Revolution Will not Be
Televised (1971)
« J’étais très jeune quand j’ai
découvert ce morceau. C’était
spécial parce que je n’avais
jamais entendu quelqu’un parler
sur de la musique auparavant.
En grandissant, j’ai prêté
attention à ce qu’il disait.
Gil Scott-Heron représente la
quintessence de la révolution :
le courage, l’intelligence, et
des mots forts. »
MARK LEIBOWITZ FLORIAN OBKIRCHER
18 THE RED BULLETIN
ULTIMATE
PUSHING THE LIMITS *
- © Focal 77 - *Repousser les limites.
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Tempête
du désert
C’était l’un des derniers
rendez-vous majeurs dans
les sports mécaniques
avant le confinement
mondial l’an dernier.
En mars, THE MINT 400
donne un nouveau coup
d’accélérateur. Le plus
ancien rallye du désert
américain a subi de nombreux
bouleversements,
mais il se montre toujours
aussi sauvage…
Texte TOM GUISE
Photos GAVIN BOND
2020 : le double vainqueur
(2013 et 2018) Bryce Menzies
s’élance sur le Mint 400 à
bord de son pick-up capable
de sauter sur plus de 45 m.
« Vous devez boucler quatre
tours de 100 miles [160 km],
explique l’Américain. Cette
course est mythique. »
21
Des moteurs qui rugissent sur 688 km à
travers le désert de Mojave… The Mint
400 naît en 1968 d’un coup publicitaire
visant à attirer les foules pour la chasse
au cerf annuelle de The Mint, un hôtelcasino
situé à Las Vegas. Mais la course, qui
démarre et se termine juste devant les lumières
du Las Vegas Strip, devient très vite la « plus
grande course tout-terrain des États-Unis ». « J’y
suis allé pour la première fois en 2018, raconte le
photographe britannique Gavin Bond. C’était le
50 e anniversaire de la course et je n’y connaissais
rien. Mon producteur à L.A., un fan de mécanique,
s’était inscrit avec son propre pick-up de course et
je l’ai accompagné. J’ai adoré… Je devais absolument
revenir pour prendre des photos. » Et c’est ce
qu’il a fait en mars 2020. Mais Gavin Bond ignorait
à l’époque que ses clichés figureraient parmi les
derniers avant un véritable cataclysme : 12 jours
plus tard, le monde entier entrait en confinement.
Une année s’est écoulée. Beaucoup de choses ont
changé mais, contre toute attente, The Mint 400 est
de retour. Ce n’est pas la première fois que l’événement
se trouve menacé : il a même disparu pendant
vingt ans. En effet, lorsque Jack Binion a acheté l’hôtel-casino
The Mint en 1988, il a supprimé la course,
craignant que cela ne nuise à ses affaires. Il a fallu
attendre 2008 pour que Matt et Joshua Martelli, réalisateurs
de la célèbre série sur les sports mécaniques
Ken Block’s Gymkhana, en achètent les droits. Aujourd’hui,
The Mint et beaucoup d’autres casinos des
environs ont fermé leurs portes depuis longtemps,
remplacés par des complexes de loisirs. Mais la course
est toujours là, comme à l’époque de Steve McQueen
et consorts – et de la naissance du journalisme gonzo.
C’est d’ailleurs en couvrant The Mint 400 pour Sports
Illustrated que Hunter S. Thompson a trouvé l’inspiration
et écrit son Las Vegas Parano. « Vous ne pourriez
pas faire plus américain », ajoute Gavin Bond à propos
de cette course.
22 THE RED BULLETIN
Les motos au départ la
veille de la grande
course. « À l’origine,
elles partaient en même
temps que les voitures,
et c’était dingue, dit
Matt Martelli, coorganisateur
de l’événement.
Mais cela a pris fin en
1976 pour des raisons
d’assurance. Les motos
ont finalement réapparu
en 2018. » Deux catégories
classiques (1980-
1990 et Avant 1980) se
mêlent aux concurrents
professionnels et amateurs,
à une catégorie
réservée aux femmes, et
aux équipes père/fils.
« C’est avant tout une histoire de famille.
Un gars conduit un pick-up, son fils est au volant
d’un autre pick-up, et sa fille est sur la moto. »
Gavin Bond, photographe
À gauche : le pilote
Red Bull américain
Seth Quintero près
de son UTV Pro NA
(un véhicule utilitaire
tout-terrain doté d’un
moteur à aspiration
naturelle, soit sans
compresseur ni turbocompresseur).
En 2019, ce talent
originaire d’Alabama
et tout juste âgé de
16 ans est entré dans
l’Histoire en devenant
le plus jeune vainqueur
de la catégorie
UTV Pro Turbo de
The Mint 400. En
2020, Seth Quintero
n’a malheureusement
pas pu terminer sa
course à cause d’un
accident.
En face : pick-up et
UTV en action.
24 THE RED BULLETIN
THE RED BULLETIN 25
En haut : Matt Martelli
décrit le début de la
course : « Le calme
avant la tempête :
pendant les prochaines
six à douze
heures, le désert de
Mojave sera le théâtre
d’une lutte sans merci
sur une distance de
400 miles ». « Des hélicoptères
gravitent
tout autour des pilotes
pour leur donner
des informations sur
les concurrents qui
les précèdent », explique
Gavin Bond.
À gauche : « Il y a trois
stands : deux dans le
désert et un au départ
de la course, dévoile
Gavin Bond. J’ai su
par la radio que Bryce
Menzies, en photo sur
cette page, tout à
droite, allait se ravitailler,
alors je me
suis dépêché de regagner
le stand et j’ai
pris une belle photo
de son team prêt à
intervenir. »
À droite : « Je n’ai pas
remarqué le sticker
Trump/Pence lorsque
j’ai pris cette photo. »
Sur les concurrents
qui affichent leurs
opinions politiques,
Martelli reste neutre :
« Chacun son favori. »
26 THE RED BULLETIN
« Lorsqu’ils arrivent, les véhicules
sont en sale état, raconte Gavin
Bond. Le mécano en dessous répare
une pièce tombée pendant la course.
Les couleurs sur la tôle proviennent
des lumières de la scène où a lieu la
remise des prix. Même le dernier des
derniers reçoit une petite médaille. »
THE RED BULLETIN 27
Joseph Jepsen de
l’équipe Diamond
J Racing dans son
buggy à roues ouvertes
Alumi Craft.
« Il roule dans la catégorie
Class 10, qui
regroupe des véhicules
de course équivalents
et où règne
une concurrence
féroce », précise Matt
Martelli. « J’utilise
un objectif à longue
focale, mais je suis
sans doute trop
proche, reconnaît
Gavin Bond. Vous
êtes là, au beau milieu
de nulle part en compagnie
de cinq ou six
autres photographes
qui essaient tous
d’obtenir le meilleur
cliché, et parfois
vous vous laissez
distraire. »
« Il n’y a pas de dispositifs de délimitation en plein désert, juste
quelques drapeaux, indique Gavin Bond à propos de la sécurité des
photographes sur The Mint 400. Une voiture peut soudain perdre
le contrôle et vous foncer dessus. Dans ce cas-là, barrez-vous ! »
29
« C’est le début de
la course, explique
Gavin Bond. Derrière
le véhicule
orange en haut,
à droite, on voit
la scène où s’est
produit le groupe
Eagles of Death
Metal la veille. Ici,
la lutte fait rage.
Les véhicules descendent
de la colline
pour s’engouffrer
dans le désert,
pour échapper à
leurs adversaires. »
30 THE RED BULLETIN
À gauche : les véhicules
sur la grille de
départ après les qualifications.
« Sur ma
gauche, je pouvais
voir le grand huit du
Buffalo Bill’s Resort &
Casino, raconte Gavin
Bond. C’est là que les
participants séjournent,
à environ
40 minutes du Strip.
La nuit est à 18 $ et
le lieu laisse à désirer.
Le genre d’endroit où
s’arrêtent les gens
qui ne vont même pas
jusqu’à Vegas. »
En haut : l’ancien
vainqueur Travis
Chase (à droite) et
son copilote Jacob
Lauxen arborent la
médaille qu’ils ont
reçue pour avoir terminé
la course. Ils ont
notamment affronté
Donald Cerrone, combattant
de l’UFC 246
qui s’était incliné face
à Conor McGregor
deux mois avant la
course. L’événement
attire un certain type
de personnages du
genre sensationnel.
The Mint 400 à Las Vegas du 3 au 7 mars ;
themint400.com
THE RED BULLETIN 31
« Il n’y a pas de
misogynie
institutionnelle
dans le rap »
FIF TOBOSSI, cofondateur du média
hip-hop Booska-P et animateur du Mouv’ Rap
Club, présente 10 femmes (artistes, directrice
artistique, réalisatrice, curatrice, journaliste,
consultante en image…), qui font évoluer
l’industrie du rap, pour le meilleur.
Texte SMAËL BOUAICI
Photos FELIPE BARBOSA
& CHRIS SAUNDERS
FELIPE BARBOSA
32 THE RED BULLETIN
THE RED BULLETIN 33
« Plus on mettra
les femmes en
avant, plus il y
en aura qui
réussiront. »
FELIPE BARBOSA
Un homme pour parler de
femmes ? Oui mais pas
n’importe lequel. Depuis
presque vingt ans, le journaliste
Fif Tobossi, qui a
cofondé le média de référence
Booska-P, traîne
dans les coulisses du rap français. En
2019, il a lancé une série de cinq portraits
vidéo, Les Femmes du rap, pour
mettre en avant les businesswomen
qui comptent dans l’industrie, et au
passage balayer certains clichés sur les
cultures urbaines. Pour The Red Bulletin,
Fif nous raconte les motivations
qui l’ont poussé à se mobiliser pour
ses collègues féminines, avant de nous
présenter dix figures qui sont en train
de changer le rap français, dans
l’ombre ou sous les feux de la rampe.
the red bulletin : Qu’est-ce qui vous a poussé à
lancer cette série consacrée aux femmes du rap ?
fif tobossi : Ça a commencé il y a quelques
années : dans une soirée, je me suis retrouvé entouré
d’amies qui travaillent dans l’industrie et qui m’ont
demandé de faire plus de sujets sur les filles. L’idée
a mûri, et en 2019, après l’épisode Booba vs Kaaris
à Orly, j’ai entendu les grands médias évoquer l’histoire
du rap, en disant que c’était un milieu misogyne,
en sortant des textes de leur contexte. C’est
à ce moment que j’ai décidé de faire mon enquête,
d’aller voir les filles du rap et leur demander leur
avis sur leur place et le sexisme dans cette industrie.
On parle souvent à la place des femmes, donc j’ai
décidé de leur donner la parole. Et d’après elles,
si, dans le rap, il peut y avoir des mauvais comportements
individuels, il n’y a pas de misogynie institutionnelle,
comme on peut le voir dans d’autres
milieux comme le cinéma ou la musique classique.
« On voit de
plus en plus
de femmes,
et surtout
des femmes
qui font du
bruit. »
C’est aussi un sujet qui vous concerne personnellement.
?
Oui, j’ai été élevé par ma mère, seule, j’ai une fille
de dix ans, et j’ai envie qu’elle soit fière de moi.
Peut-être que ma fille aura envie de travailler dans
le milieu du rap, mais pour cela, il faut qu’elle ait
des modèles, et c’est ce qui m’a fait prendre
conscience de la nécessité de mettre les femmes
en avant. Je sais que ça peut paraître discriminant
de présenter uniquement des femmes, mais c’est
nécessaire pour faire évoluer la situation. Il faut
le faire jusqu’à ce que ça devienne normal.
En plus de la série Les Femmes du rap avec Mouv’
(dont la saison 2 arrive en février), vous travaillez
sur un documentaire sur le même sujet.
Oui, ce sera un plus long format, probablement
un 90 minutes, avec des artistes, des managers,
etc., des filles et des garçons qui évoquent la relation
entre le rap et les femmes. Avec ce documentaire,
je veux montrer qu’il y a plein de femmes qui entreprennent
des projets et que le public ne connaît pas.
J’espère que ça va débloquer les choses.
Qu’est-ce qui manque pour qu’il y ait plus de
femmes artistes dans le rap ?
C’est compliqué pour un être humain de se lancer
dans un projet artistique, on a peur d’être jugé, et
j’ai l’impression que les filles se posent plus de questions
que les garçons avant de se lancer. Pourquoi ?
Parce qu’elles vont peut-être se faire attaquer sur
leur physique, alors que ça n’arrivera jamais pour
un homme. Aya Nakamura a fait avancer les choses,
c’est la première femme noire qui a un tel succès.
Et quand on voit les critiques parfois racistes qu’elle
reçoit… Mais la situation a changé pour les femmes
dans les musiques urbaines. Avant, on avait une
tête d’affiche et des artistes plus underground.
Aujourd’hui, il y a Aya Nakamura, Wejdene, Le
Juiice, Meryl, Chilla, Doria, Lous and the Yakuza…
On voit de plus en plus de femmes et surtout des
femmes qui font du bruit. Et ça motive les jeunes
qui veulent se lancer. Plus on mettra les femmes
en avant, plus il y en aura qui réussiront.
THE RED BULLETIN 35
Leïla Sy
Le futur des réalisateurs français
« Leïla s’occupe de tous les clips de Kery James, mais aussi d’autres rappeurs,
et c’est avec lui qu’elle a réalisé le film Banlieusards (2019) pour Netflix. Elle
fait partie des gens qui comptent dans l’industrie du rap. Elle a bouclé un
gros film avec peu de budget, dans un temps réduit, et aujourd’hui, elle a
l’embarras du choix pour ses prochains projets. Ce n’était pas facile au début,
parce que c’est une femme noire, mais elle a fait ses preuves. Aujourd’hui,
c’est la femme que tout le monde s’arrache pour réaliser des films. Elle devait
également s’occuper de la scénographie du concert de Jul au Vélodrome de
Marseille, qui a été reporté à 2021. Leïla figurait aussi dans la saison 1 de la
série Les Femmes du rap, j’avais été la voir sur le tournage du clip Khapta de
Heuss L’Enfoiré et Sofiane. Sur un plateau, elle tient tout le monde, qu’il y ait
10 ou 100 personnes. Cette fille, c’est le futur des réalisateurs français. »
CHRIS SAUNDERS
36 THE RED BULLETIN
Ouafa Mameche
Rap et littérature
« Ouafa est journaliste, notamment sur Mouv’ dans l’émission
After Rap, pour le site Abcdr du Son, et elle est passée par OKLM,
la radio de Booba. Elle est responsable éditoriale musique pour
Red Bull France, et a monté il y a cinq ans sa propre maison
d’édition, Faces Cachées, qui a sorti le livre du rappeur Manu
Key, Les Liens sacrés, en novembre 2020. Depuis cette saison,
elle anime des conférences à La Place, un centre culturel dédié
au hip-hop, où elle fait intervenir différents profils, des artistes
comme Lous and the Yakuza, des écrivaines comme Faïza
Guène… Tout ce monde des cultures urbaines qui n’est pas
considéré à sa juste valeur dans les médias traditionnels. En
créant et en animant ces espaces d’expression, Ouafa, qui figure
dans la saison 2 de la série Les Femmes du rap, raconte nos histoires,
les histoires du hip-hop, des quartiers, des gens qui nous
ressemblent. C’est important, de belles histoires, on en a plein. »
« Ouafa raconte
les histoires des
gens qui nous
ressemblent. »
THE RED BULLETIN 37
Neefa
Le rap sans
complexe
Le Juiice
La trap mama
« Le Juiice est arrivée dans
le rap depuis seulement deux
ans, et elle a rapidement lancé
son propre label Trap House,
fin 2019, avec l’idée de mettre
en avant des artistes féminines.
Son premier projet sorti
en novembre 2020 s’intitule
Jeune CEO et elle affirme
d’emblée ses ambitions.
Elle est très forte techniquement,
j’aime son attitude et
ce qu’elle dégage. Je l’avais
reçue à la radio sur Mouv’
dernièrement et elle est vraiment
parfaite dans son style,
sans tomber dans des
extrêmes comme une Cardi B
ou Lil’ Kim à l’époque. C’est
une des rares artistes de trap
en France, un genre de rap
très influencé par les États-
Unis, et elle a tout ce qu’il faut
pour le porter. Et elle n’en est
qu’au début, elle a une marge
de progression incroyable. »
Mariama Barry
Entre rap et mode
« Mariama est consultante business
lié à l’image, elle travaille sur le rapprochement
entre la mode et la musique
urbaine en France. Elle est l’une des premiers
agents image à s’être lancée en
indépendante et reste la seule femme
noire réputée dans le milieu. Elle s’occupe
notamment de l’image du rappeur
S.Pri Noir depuis plus de deux ans. Leur
collaboration a permis d’élever ses relations
avec des marques comme Moncler,
Maison Margiela, Amiri ou encore
Balmain. Aujourd’hui, grâce à ce travail,
il est devenu une référence car il est le
seul rappeur français avec à son actif différentes
campagnes digitales pour Boss
Sports, Cartier Eyewear et Dior Parfums.
Elle travaille aussi avec d’autres rappeurs
depuis peu et elle aimerait un jour signer
Aya Nakamura ! Son job, c’est d’aller au
contact des marques pour leur proposer
des opportunités de partenariats image
pour les artistes qu’elle accompagne.
Avec ce travail, elle permet d’élargir
encore plus les possibilités pour le rap
français en le connectant à ce monde
très fermé de la mode et du luxe. »
« Neefa a un profil
intéressant, parce
qu’elle fait son truc
toute seule. Elle
n’est pas encore très
identifiée (elle a
travaillé chez OKLM
en tant que journaliste
et chroniqueuse
dans l’émission
La Sauce), et
elle parle de rap
sur sa chaîne You-
Tube, Mec C’est
l’heure, et sur son
compte Instagram
@neefneef. Elle
n’est pas affiliée à
un média, c’est juste
une fille qui aime le
rap et qui en parle
bien. C’est une vraie
passionnée avec
une grosse culture,
et dans quelques
années, son profil
va grimper. Elle a
d’ailleurs démarré
le podcast Tier List
avec Mehdi Maïzi,
Sandra Gomes et
Yérim Sar, une
émission qui classe
les albums classiques
du rap français
et qui devrait
lui apporter plus
d’exposition. C’est
une voix fraîche
dans ce marché.
Elle montre qu’on
peut être une fille
passionnée de rap
et en parler sans
complexe. »
SCOPITONE MEDIA, CHRIS SAUNDERS
38 THE RED BULLETIN
« Neefa est une voix
fraîche dans le rap. »
Magali
Renner
La connexion
marques et rap
« Magali fut l’une des premières,
il y a dix ans, à
connecter les marques avec
les rappeurs. Elle a d’abord
travaillé chez Nike, et si tu
voyais un artiste porter la dernière
paire, c’était grâce à
elle… À l’époque, les marques
s’associaient ponctuellement
avec de gros artistes comme
Diam’s ou Sinik, mais pour
elle, il fallait avant tout miser
sur les artistes de demain et
leur donner de la force grâce
à cette opportunité. Et elle a
réussi à imposer des rappeurs
qui n’étaient pas spécialement
des gros vendeurs et pas les
plus évidents à pousser en
interne. Elle a ensuite monté
sa boîte et a collaboré avec
le label SPKTAQLR créé par
Oumar Samaké et avec Beats
by Dre. Aujourd’hui chez
Adidas, elle dirige le département
en charge des relations
artistes depuis deux ans. Elle
est notamment responsable
des partenariats avec Dinos,
Vald, Dosseh, Meryl, Oboy
ou encore 13 Block… Et de
la collaboration avec la série
Validé de Franck Gastambide
diffusée sur Canal+.
Aujourd’hui, toutes les
marques veulent des rappeurs,
mais quand elle a commencé,
elle a été une des rares
à œuvrer pour ça. Elle a
contribué à changer
l’industrie de l’intérieur. »
Narjes Bahhar
La papesse du streaming
français
« Narjes, c’est une femme de terrain, elle
a couvert l’Afrique en long et en large
pour Trace TV et d’autres médias pendant
longtemps, elle est passée par Radio
France et en septembre 2019, elle a été
recrutée comme Global & French Rap
Editor chez Deezer. Aujourd’hui, elle est
la figure du rap sur la première plateforme
de streaming française, elle est
aussi à Mouv’ dans l’émission After Rap
et présente les artistes de demain dans
New Comers sur la chaîne YouTube de
Mouv’. C’est un vrai 4×4 cette fille, elle
est passionnée, et même si elle n’est pas
connue du grand public, en ayant la
main sur les playlists rap de Deezer, elle
a l’équivalent du pouvoir d’un Laurent
Bouneau chez Skyrock, et c’est important
d’avoir une femme à ce type de poste
à responsabilités. C’est ce genre de personnes
que j’ai envie de mettre en avant
et on pourra découvrir son portrait dans
Les Femmes du rap saison 2. Au départ,
elle était réticente mais finalement,
elle a accepté parce que si ces femmes
ne sont pas mises en avant, rien ne
va jamais changer. »
Davinhor
Thug & sexy
« Davinhor, elle kicke ! Il y a
très peu d’artistes comme elle
en France, elle assume complètement
son côté sexy et
son côté thug. Elle a une
fougue, une attitude, un charisme
incroyables. Elle dégage
vraiment un truc. On a besoin
de rappeuses qui assument
et qui s’assument. Avant, on
avait des profils de petite
sœur, à la Kenza Farah, puis
il y a eu Shay, qui était la première
rappeuse francophone
qui assumait sa sexualité. Elle
a été énormément critiquée
dans les commentaires sur ses
vidéos, mais elle a ouvert la
voie pour des filles comme
Aya Nakamura, Le Juiice ou
Davinhor. Les filles ont le droit
de faire ce qu’elles veulent !
Il faut arrêter l’hypocrisie :
quand c’est au Lido, c’est
élégant, et quand c’est dans
le rap, c’est vulgaire ? Il faut
plus de rappeuses comme
Davinhor. Plus on en verra,
plus vite ça deviendra
normal. »
CHRIS SAUNDERS, FIFOU, CAPITOL RECORDS, ALEXANDRE CAREL
40 THE RED BULLETIN
Pauline Duarte
Première femme noire à la tête d’un
label de rap
« Ancienne directrice de Def Jam France,
elle est devenue directrice du label Epic
Records (Sony) en juin 2020. C’est la
première femme noire à être directrice
d’un label en France, et c’est toujours
la seule d’ailleurs. C’est aussi la sœur
de Stomy Bugsy, un rappeur dont j’ai
toujours été fan. Pauline est une femme
déterminée, elle a toujours su ce qu’elle
voulait et c’est pour ça qu’elle en est là.
C’est une professionnelle qui a des
convictions et du flair. Par le passé,
elle a réalisé de beaux coups chez Def
Jam, en rassemblant des artistes comme
Lacrim, SCH, Alonzo, Kalash Criminel,
Kaaris ou Koba LaD et elle est en train
de constituer une écurie chez Epic, avec
sa première signature Gazo cet été et
le rappeur belge Frenetik à l’automne.
C’est une bosseuse qui a une vision,
et c’est bien d’avoir ce genre de modèles.
Elle fait partie des premières figures
féminines de l’industrie du rap, et
elle a motivé plein de filles. »
« Pauline
est une
bosseuse
qui a une
vision. »
Doria
La nouvelle génération
qui s’assume
« Doria, j’aime beaucoup. Elle
dégage un truc, je la trouve
très forte, elle est signée chez
AWA, le label du producteur
à succès Kore. J’aime bien son
grain de voix, il te marque
direct, et elle a ce côté mélancolique,
kickeuse… Elle sait
tout faire, en fait. Elle a son
propre style et ne ressemble
à aucune rappeuse. Comme
les autres artistes que je présente
ici, elle a son univers,
et c’est une femme libérée,
qui s’assume. Aujourd’hui,
les femmes qui rappent ne se
cachent plus, il n’y a plus ces
ressemblances avec Diam’s.
À une époque, il y avait peutêtre
ce mot d’ordre qui circulait
en maisons de disques :
“Il nous faut la nouvelle
Diam’s.” Mais aujourd’hui,
les filles ne veulent pas être
Diam’s, elles respectent,
elles connaissent, mais elles
veulent être elles-mêmes. Et
Doria représente parfaitement
cette nouvelle génération. »
THE RED BULLETIN 41
Deux
fortes
têtes
La saison qui s’annonce pour LOÏC BRUNI
et MYRIAM NICOLE – deux Français
parmi les pilotes de VTT descente les
plus doués et appréciés au monde –
sera celle de la reconquête. Il faudra aller
vite, bien sûr – plus que les autres –
et surtout, avoir du mental pour aborder
à la perfection les rares minutes qui vous
élèvent au sommet de la DH mondiale.
Texte PH CAMY
Photos JEREMY BERNARD
Patrouille de France :
deux talents supersoniques
du VTT descente
à l’œuvre dans
les sous-bois de
La Grand-Combe.
Ojectif commun :
le monde ou rien.
43
« Tout le monde s’entraîne
au même niveau, et il
n’y a plus grand chose
à cacher aux autres, que
ce soit du côté physique
ou technique. Les derniers
petits détails se jouent
vraiment sur le mental. »
Myriam Nicole
Descendre, à une vitesse folle, et à VTT,
des pistes sur lesquelles vous n’oseriez
même pas poser vos souliers de rando
Quechua : c’est l’expertise de Loïc Bruni,
26 ans, et Myriam Nicole, 31. En 2019,
le natif de Nice a été vainqueur de la
Coupe du monde et champion du monde
de VTT DH (pour Downhill), et la kinésithérapeute
héraultaise s’est également
octroyé le titre de championne du monde
de VTT DH. En 2020, ces trophées leur
ont échappé. Plutôt que de leur demander
pourquoi, nous les avons rencontrés
pour une interview en marche avant,
afin de connaître leur soif de reconquête,
les dynamiques mentales dont
ils seront armés pour les six étapes de
la Coupe du monde, et l’étape unique
du Championnat du monde à venir.
Comment maîtriser des challenges
fulgurants, quand la domination au
classement ou le titre mondial se joue
en à peine trois minutes, lors d’un run
où tout peut arriver ? Car pour les deux
Français habitués des sommets de la
descente (Loïc affiche six titres mondiaux,
et Myriam deux), les phases
finales d’une saison de DH se jouent
sur moins de trente minutes, soit moins
qu’une mi-temps de football ! Au-delà
des défis physiques et de pilotage qui
se présenteront à eux, l’aspect mental
des courses sera d’une importance
extrême. Entretien bicéphale avec la
paire la plus conviviale du circuit.
the red bulletin : Myriam, vous qui
connaissez bien Loïc Bruni, pourquoi
est-ce un pilote à part ?
myriam nicole : Loïc est impressionnant
de sérénité, de consistance, à
mesure que l’on avance dans le calendrier
de la saison ou sur un jour de
compétition, il reste posé, tranquille, et
quand ça devient décisif, tu ne le vois pas
venir, et il remet le couvert avec une nouvelle
victoire ! Je pense que c’est sa force,
sa capacité à monter en puissance, sereinement,
jusqu’aux derniers runs. Sans
parler de son style, impressionnant, toujours
clean, magnifique. Il est unique.
Quel va être son moteur pour cette
nouvelle saison, après une année
2020 sans aucun titre ?
myriam nicole : Sa première motivation
pourrait être le fait qu’il n’a pas
gagné les championnats du monde en
2020. Je me dis qu’il y a forcément un
peu de frustration.
Qu’est-ce qu’il possède que vous
n’avez pas ?
myriam nicole : C’est un entrepreneur,
un avant-gardiste, que ce soit sur les
aspects technologiques de son sport,
son entraînement, ou sa capacité à bien
s’entourer, à créer son cercle de performance.
Il est dans l’action.
Loïc, à votre tour, que diriez-vous
à propos de Myriam ?
loïc bruni : Myriam Nicole ? C’est
l’icône féminine du VTT DH, avec tant
de victoires à son actif. Celle qui s’est
toujours battue pour revenir de blessures.
Pompon (le surnom de Myriam,
ndlr) est une personne adorable, ceux
qui la connaissent en ont tous l’image
de la championne magnifique… En vrai ?
C’est un cas soc’ ! (rire général)
44 THE RED BULLETIN
Pilotes iconiques :
à respectivement
26 et 31 ans, ils ont
fait vivre au VTT DH
certains de ses plus
beaux instants.
« La force de
Loïc, c’est
sa capacité
à monter en
puissance,
sereinement,
jusqu’au
dernier run. »
Myriam Nicole
28.12.2020 : sur ce
spot de VTT très prisé
proche d’Alès (Gard),
Loïc Bruni clôture une
année rocambolesque
en mode pur plaisir.
46 THE RED BULLETIN
Qui pourrait être sa plus rude adversaire
cette saison ?
loïc bruni : Même si je pense qu’elle
l’apprécie beaucoup, je dirais Marine
Cabirou, la Française qui a gagné la
Coupe du monde de VTT DH en 2020.
Petit à petit, Marine s’est beaucoup inspirée
de Myriam, et elle a beaucoup appris
sur les faiblesses des autres filles, pour
capitaliser dessus. C’est une adversaire
sérieuse et ça va être beau de voir
Myriam l’affronter.
Quel a été le plus dur moment de
la carrière de Myriam ?
loïc bruni : Je me souviens de ce
11 avril 2019… On faisait ensemble
une séance d’entraînement à La Grand-
Combe (près d’Alès, sur le site où ont été
réalisées les photos de cette parution,
ndlr) et Myriam est tombée à cause du
vent. Elle s’est déboîté le pied, elle s’est
défoncé plein d’os… On ne savait pas
trop quoi dire, on ne savait pas à quel
point c’était grave. Les nouvelles des
médecins ont été mauvaises. On était
à deux semaines du début de la saison
de Coupe du monde, et ça tournait mal.
Ça a dû être horrible à gérer mentalement.
Mais Myriam n’a pas lâché, elle
est allée se faire des sessions de rééducation
dans son coin, et elle a réussi à surmonter
cela. Au final, elle a remporté le
Championnat du monde cette même
année !
Myriam, Loïc vient d’évoquer le mental,
comment est le vôtre à l’approche
de cette nouvelle saison, que vous
n’abordez pas en tenante d’un des
deux titres mondiaux ? Est-ce que vous
commencez à passer dans un mode
particulier dans votre tête ?
myriam nicole : Je pense que le mental,
c’est en nous. C’est vraiment connecté à
tout ce qu’on fait tous les jours, ce qui
nous fait nous lever le matin : être meilleure
tous les jours. À l’entraînement,
tout le temps.
Revenons quatre, cinq ans en arrière.
Votre mental était-il déjà aussi fort ?
Est-ce qu’un mental, de sportif de haut
niveau ou pas, ça s’améliore ? Quels
sont les déclics ?
myriam nicole : C’est coach Phil !
(rires)
loïc bruni : Comme dirait notre coach,
Philippe (les deux riders sont accompagnés
par le même coach mental, Philippe
Angel, ndlr), un mental, ça s’optimise.
« Si tu as l’intelligence
émotionnelle
suffisante pour
te donner le déclic,
tu peux arriver à
optimiser ton mental
par toi-même. »
Myriam Nicole
Ça se travaille, bien sûr. On a tous du
mental, mais chacun avec des capacités
différentes pour le développer. Il y en a
qui sont capables de choses plus que
d’autres personnes, malheureusement.
Pourquoi, selon vous ?
loïc bruni : Certaines personnes n’ont
jamais vraiment eu conscience de leur
potentiel mental, ou n’ont pas trouvé les
clés pour le développer. Quand j’ai commencé,
j’étais très loin d’avoir un mental
d’acier. J’ai travaillé dessus, parce que je
En 2019, à l’endroit où a été prise cette photo, une blessure mettait à mal la
saison de Myriam… qu’elle clôtura avec un titre de championne du monde !
sentais que j’étais très irrégulier, je n’arrivais
pas à enchaîner les week-ends de
compétition, et je pense qu’au cours des
trois ou quatre dernières années, mon
mental a été ma force. Comme le disait
Pompon, des fois ça ne va pas forcément,
ou je ne roule pas comme je voudrais, et
puis, au final, personne ne m’a vu venir
et je gagne la course. Je pense que c’est
lié à tout ce travail, à cette expérience
avec Philippe. Il arrive à trouver les clés
pour t’amener à ce niveau-là.
Tout le monde a-t-il besoin d’un
Philippe Angel ?
loïc bruni : Pas forcément. Tu vas parler
à certaines personnes d’un coach
mental et elles vont te dire : « Non
merci ! », parce qu’elles sont capables de
faire un travail mental elles-mêmes. Et
d’autres vont te dire : « Pas question ! »,
parce qu’elles n’ont pas la capacité d’assumer
qu’elles ont besoin d’aller plus loin
mentalement. L’important, c’est d’être
bien entouré. Quand tu vas faire le choix
d’un entraîneur, d’un psy ou d’un coach
mental, il faut que tes tripes te donnent
confiance en cette personne. Car elle
peut te dire des choses qui vont un peu
chambouler tes croyances, et si tu n’as
pas confiance, tu vas détester le mec…
THE RED BULLETIN 47
parce que ça peut être dur à entendre.
Si tu as confiance, tu vas te jeter corps
et âme dans son accompagnement, et
les progrès seront flagrants. Même notre
entraîneur physique, Nicolas Arschoot,
que nous partageons avec Myriam, et
qui vient du BMX, se fait former mentalement
par Philippe.
Votre coach mental coache votre
coach physique ?!
loïc bruni : Pour être plus à l’écoute,
pour s’adapter plus rapidement, pour
progresser et être le meilleur coach,
un des meilleurs du circuit, alors que
d’autres ne feront pas cette démarche.
Myriam, pensez-vous qu’il faut être
accompagné(e) pour développer ou
optimiser son mental, ou est-ce que
chacun(e) d’entre nous a la capacité
à fortifier son mental seul(e) ?
myriam nicole : C’est plus facile si tu te
fais accompagner, mais si tu as l’intelligence
émotionnelle suffisante pour te
donner le déclic, tu peux arriver à optimiser
ton mental par toi-même. En te
plongeant dans des livres, ou toutes ces
choses super intéressantes sur la positive
attitude.
Dans votre vie quotidienne, votre
mental de championne vous aide-t-il ?
myriam nicole : C’est tous les jours,
tout le temps, dans toutes les actions.
Comme on dit, le sport, c’est l’école de la
vie. Par exemple, j’ai appris à moins
péter des câbles dès qu’il y a le moindre
petit changement ou le moindre petit
coup de stress. Éviter de partir un peu
dans tous les sens. (rires)
loïc bruni : Malgré tout, on restera
toujours les mêmes à l’intérieur, et je fais
toujours plein de conneries sur le vélo
ou en dehors, mais si je prends l’exemple
de mes relations humaines, je pense que
j’arrive à mieux m’adapter, à mieux
répondre aux attentes des autres personnes.
Ce que tu apprends sur le sport,
tu arrives à l’adapter dans plein d’autres
domaines. Que ce soit dans les relations
avec ma famille, ma copine ou mes sponsors,
j’ai réussi, je pense, à installer une
forme de « statut », j’arrive à mieux les
écouter. Ça surprend même quelques
personnes qui auraient pu me prendre
pour un jeune athlète qui s’éparpille.
« Le négatif, il y en
aura toujours, ça fait
partie de la vie. Le
seul truc qui va faire
la différence, c’est
comment tu l’intègres
à ta recette. »
Loïc Bruni
loïc bruni : Le mental, c’est le facteur
qui différencie Myriam et moi de la
plupart des autres athlètes en descente,
même s’il y en a plein qui commencent
à travailler dessus et à prendre ça au
sérieux. Sur une course, on est tous très
rapides, très performants, on s’entraîne
tous pour atteindre la perfection, plus
ou moins, et nos vélos marchent vraiment
bien, donc, ce qui va nous différencier,
pour 2, 3 dixièmes de secondes,
c’est le mental. Qui va avoir le plus
envie ? Qui va être le plus prêt dans
sa tête pour aller chercher la victoire ?
Ça peut paraître bête, mais des fois, c’est
là que ça se joue.
myriam nicole : C’est vrai, tout le
monde s’entraîne au même niveau, et
il n’y a plus grand chose à cacher aux
autres, que ce soit du côté physique ou
technique. On fait tous de plus en plus
des tests, on a tous des vélos au top, du
coup les derniers petits détails se jouent
vraiment sur le mental : comment tu es
dans ta tête au départ de la course.
Des départs de course, dans vos runs
finaux, en Coupe ou Championnats du
monde, il n’y en a finalement pas tant
que ça sur une saison complète. La
Coupe du monde UCI de VTT DH
compte six étapes, et le Championnat
du monde se déroule sur une date dans
l’année. Au final, hors qualifications,
vous roulez peut-être trente minutes
sur une saison entière pour accéder à
deux titres mondiaux potentiels… Cela
paraît incroyable ! La pression doit être
forte… Comment être méga focus,
100 % concentré(e) sur ces quelques
dizaines de secondes qui peuvent faire
de vous le meilleur descendeur ou la
meilleure descendeuse au monde ?
loïc bruni : Notre sport, c’est beaucoup
de travail en amont, invisible pour les
La sérénité qu’évoquait Myriam à
votre propos sera-t-il l’un de vos
atouts cette saison ?
Moment de détente et plein d’énergie entre deux prises de vue. Quand leur
saison sera lancée en avril, Loïc et Myriam se soutiendront mutuellement.
48 THE RED BULLETIN
Ayant atteint les
sommets mondiaux
de sa discipline,
Myriam associe un
mental optimisé à son
expérience du circuit.
« Myriam Nicole ?
C’est l’icône féminine
du VTT DH, avec tant
de victoires à son actif.
Celle qui s’est toujours
battue pour revenir de
blessures. »
Loïc Bruni
« Tout faire à la
perfection, ça n’arrive
que certaines fois
dans une vie. »
Loïc Bruni
100 % style : rares
sont les pilotes
capables d’associer
à leur science du
pilotage une telle
notion d’aisance.
50 THE RED BULLETIN
gens qui nous regardent sur les courses,
mais qui est pourtant très important.
Tout ce qu’on va faire en amont, physiquement,
mentalement, sur le vélo,
quand je suis au départ d’une Coupe
du monde, je vais m’appuyer sur ces
choses-là pour être prêt. Pour n’être perturbé
par aucune question au moment
où je dois mettre 100 % d’engagement
et prendre des risques.
Votre check-list mentale doit être
validée à 100 % ?
loïc bruni : Je le sais : le vélo est prêt,
je suis prêt, pour donner la meilleure
performance. Le travail en amont, se
poser des questions, et les réponses à
ces questions, de ton entourage, par
exemple, seront bénéfiques.
Si j’ai un rendez-vous galant ce soir,
est-ce que je dois le préparer au maximum,
et consulter mon entourage ?
loïc bruni : Si tes potes te disent à longueur
de temps que tu es trop laid et
que tu as les dents déboîtées, tu vas aller
à ton rendez-vous, mais tu ne vas pas être
le même que si tes potes te disent : « Mec !
T’es beau gosse aujourd’hui, vas-y ! » L’entourage,
toi-même, les questions que tu
peux te poser, tout ça, en amont, ça
compte pour donner ton meilleur sur ces
instants très courts, ces quelques minutes
ou secondes déterminantes.
Être super bien préparé(e), avoir tout
questionné, avoir discuté avec ses
amis, son équipe, ses collègues, ça
peut permettre de dégager tout aspect
négatif de son esprit quand arrive
l’instant fatal où tout se joue sur une
poignée de minutes, que ce soit en
compétition ou dans la vie ?
loïc bruni : Le négatif, il y en aura toujours,
ça fait partie de la vie. Le seul truc
qui va faire la différence, c’est comment
tu l’intègres à ta recette. Si tu arrives à
le transformer en quelque chose de neuf
ou de positif, c’est très bien. Si tu n’y
arrives pas, là ça va être plus compliqué.
Dans des situations comme un entretien
d’embauche, par exemple, difficile
de ne pas se prendre la tête avec ce qui
pourrait mal tourner, le truc à ne pas
dire, le geste à ne pas faire, et transformer
tout ça en positif ou force…
loïc bruni : Si tu sais que la personne
qui va te recevoir peut-être coriace, tu
peux choisir de débrancher, en te disant :
« Pas grave, j’y vais au talent, pour me
faire plaisir, totalement moi-même. »
Au meilleur des cas, elle t’adore. Au
pire, elle t’envoie chier… On est tous
confrontés à des choses négatives au
quotidien, et on a parfois très peu de
temps pour y faire face, c’est la façon
dont on va les gérer qui vont nous
remettre sur le bon pied.
Qu’est-ce qui peut vous poser souci
à quelques secondes de vous engager
sur un run pour remporter une finale
ou une manche de Coupe du monde ?
loïc bruni : Si un type te dit : « Oh
putain, j’ai vu Minnaar passer, trop classe
par rapport à toi, il a fait ça vachement
plus vite. » (Greg Minnaar est un pilote
sud-africain parmi les plus titrés au
monde, ndlr.) Là, non seulement on te dit
qu’un mec va plus vite que toi, donc c’est
négatif, et en plus c’est subjectif, c’est un
Six étapes (seulement)
pour vaincre
Agenda de la Coupe du monde UCI
de VTT DH 2021
24-25 avril : Maribor (Slovénie)
22-23 mai : Fort William (Royaume-Uni)
12-13 juin : Leogang (Autriche)
3-4 juillet : Les Gets (France)
4-5 septembre : Lenzerheide (Suisse)
18-19 septembre : Snowshoe (USA)
*25-29 août : championnats du monde
UCI de VTT 2021 à Val Di Sole (Italie)
autre mec qui te dit ça ! Il va falloir que,
rapidement, tu procèdes à une analyse
dans ta tête pour retourner ça d’une
manière à te pousser à être meilleur,
ou à ce que ça ne te perturbe pas du
tout. C’est assez chaud, mais j’arrive de
mieux en mieux à le faire. Pas question
de penser à Minnaar au moment où je
me lance.
Myriam, c’est la même dynamique
de votre côté ?
myriam nicole : Oui, il faut se servir
du travail qu’on a fait en amont, de tout
ce travail mental, physique, technique,
pour le mettre en œuvre au moment
donné.
Est-ce que tout ce travail préparatoire
se concrétise d’une certaine manière
à l’instant T ?
myriam nicole : Il vous permet de vous
créer une bulle, positive, au départ de la
course, qui fera que vous êtes prêt à laisser
s’exprimer votre meilleur potentiel.
Un titre de championne du monde de
VTT DH, hormis vos préparations et
runs de qualifications, ça se joue sur
une journée, avec un run final qui
peut ne pas dépasser trois minutes…
Qu’est-ce qu’on a dans la tête dans ces
conditions très particulières ?
myriam nicole : J’essaie de prendre
chaque course de la même manière, que
ce soit une course régionale ou un championnat
du monde. Inconsciemment,
forcément, il y a plein de choses qui ne
vont pas être pareil, mais dans ma tête
c’est la même. Je donne le meilleur, en
fonction de mes ressources du moment.
Et si on échoue, si on se loupe, si l’entretien
d’embauche, le rendez-vous
important pour développer son
business, se passe mal, si on n’est
pas le plus rapide sur la ligne d’arrivée
en championnat du monde ?
loïc bruni : Quand ça ne veut pas, ça
ne veut pas. Tu auras beau tout faire
nickel, tu vas taper une pierre… Mais si
tu oublies de l’avoir vue, c’est parce que
tu as mal préparé aussi. C’est très, très
compliqué de tout faire à la perfection.
Mais de toute façon, tout faire à la perfection,
ça n’arrive que certaines fois
dans une vie. Tu ne peux pas être parfait
tous les jours.
Instagram : @loicbruni29 ;
@myriam_nicole
THE RED BULLETIN 51
La vague
africaine
Le premier livre-anthologie sur la culture
du surf en Afrique va paraître : avec ses
30 500 km de littoral, il était grand temps
que l’Afrique déferle enfin sur la planète
surf. SELEMA MASEKELA, co-éditeur du
livre Afrosurf, nous explique pourquoi.
Texte FLORIAN OBKIRCHER
TATE DRUCKER, NICOLE SWEET
À suivre de près : Sung Min
Cho (page opposée), moniteur
pour l’ONG Surfers Not
Street Children, est sur le
point de devenir le premier
surfeur pro du Mozambique.
Ci-contre, le Sénégalais
Chérif Fall est le premier
surfeur noir à avoir remporté
à deux reprises le
West Africa Tour.
53
F
ilm-documentaire de légende produit
en 1966, The Endless Summer raconte
le périple de deux surfeurs parcourant
le monde pour la vague parfaite. Leur
voyage les mène notamment au Ghana,
sur la plage de Labadi. Le film les montre
surfant sous les regards interloqués d’une
foule de locaux. Comme si les Ghanéens
n’avaient jamais vu ça de leur vie. Alors
qu’on peut remarquer au loin, pendant
que les deux Américains arrivent sur la
plage, que de jeunes Ghanéens sont justement
en train de s’amuser dans les
vagues avec une planche ! Mais le film
ne s’y attarde pas.
Un symbole : la culture surf s’est
construite essentiellement autour de
l’image du surfeur blond aux yeux bleus.
C’est ce monopole que le projet Afrosurf –
anthologie de 300 pages, fruit d’une collaboration
entre le présentateur- activistemusicien-surfeur
Selema Masekela et
le label de surf africain Mami Wata –
essaie de rompre. En présentant toute
la richesse et la vivacité de la culture surf
en Afrique, du Maroc à la Somalie en
passant par le Mozambique, le Sénégal,
l’Afrique du Sud et d’autres pays. Au
total : 200 photos, 18 pays, 14 histoires
et 25 portraits de surfeurs et surfeuses
réunis dans un livre qui vient briser les
stéréotypes de la culture surf. Où l’on
apprend que la première description de
ce sport n’a pas été faite par le botaniste
du capitaine Cook, sur une plage de
Tahiti en 1767, mais par un aventurier
allemand en 1640, dans ce qui est
aujourd’hui le Ghana. Pour Masekela,
49 ans, « Ce livre va changer l’image que
se fait le monde sur la culture du surf. »
La beauté sauvage
des plages du Liberia
a attiré l’attention de
la communauté surf
grâce au documentaire
Sliding Liberia (2007),
qui présente notamment
le pionnier du surf
libérien Alfred Lomax.
54 THE RED BULLETIN
« Je vois des gens perplexes
devant des photos d’Africains
en train de surfer. »
ARTHUR BOURBON
THE RED BULLETIN 55
« Je suis arrivé
à la réception
de l’hôtel, surf
sous le bras :
tout s’est figé
autour de moi. »
the red bulletin : Comment vous est
venue l’idée de ce livre ?
selema masekela : Le vœu qu’a fait
mon père (Hugh Masekela, légende
sud-africaine du jazz, ndlr), juste avant
de mourir, était que je poursuive son
œuvre : renforcer auprès du public les
liens et la curiosité d’explorer le continent
africain. Après sa mort (en 2018,
ndlr), je me suis demandé comment réussir
à perpétuer son héritage. Et j’ai réalisé
que je devais le faire par le surf. Une discussion
est née autour du livre et de comment
se servir du surf pour montrer la
beauté de l’Afrique en général ; pour
montrer des images et raconter des histoires
que jamais personne n’avait entendues
jusqu’à présent.
Pourquoi avez-vous ressenti le besoin
de le faire ?
Depuis ma jeunesse, 99,9 % des représentations
que l’on nous a montrées sur le
surf n’ont jamais inclus des gens qui me
ressemblaient. Comme si tu devais être
blond aux yeux bleus pour être pris au
sérieux dans le monde du surf. C’est
l’image-type que tout le monde se fait
d’un vrai surfeur – alors même que ce
sport a été (officiellement, ndlr) inventé
par les Polynésiens.
Mais également, comme le livre nous
l’apprend, par les Ghanéens : comment
se fait-il que cette information ait été
si longtemps occultée, même dans le
milieu du surf ?
Il y a un phénomène de « whitewashing »
dans l’Histoire, avec cette manière un peu
bizarre de la représenter comme si une
certaine catégorie de personnes avait
toujours été la première à faire des trucs,
parce qu’elle était meilleure que les
autres, plus talentueuse, voire carrément
élue par Dieu… On a tous été convaincus
de ce genre de choses, non ? D’où la profusion
de clichés et de mythes : je vois
des gens réellement perplexes devant des
photos d’Africains en train de surfer et
de le faire à un très haut niveau. Quand
j’ai commencé à apprendre à surfer, on
me disait : « Comment ça se fait que tu
apprennes à surfer quand les gens comme
toi ne savent pas nager ? » La plupart des
films de surf sont bâtis sur ce scénario :
des surfeurs (blancs, ndlr) qui se rendent
dans des pays exotiques pour aller surfer
des vagues incroyables pendant que les
autochtones les regardent depuis la plage,
incrédules… puis les mecs repartent.
The Endless Summer est un exemple-type
de ce genre de films.
Vous vouliez aborder ce phénomène de
« whitewashing » dans l’histoire du surf ?
Chez les Bikoumou, le surf
est une affaire de famille :
Kelly (en haut) a appris aux
côtés de son père Patrick,
surfeur passionné, qui gère
un resto sur la plage de
Pointe-Noire, au Congo.
Nous ne cherchons pas à dire « Hey, tout
ce qu’on vous a raconté sur le surf est
un mensonge ! », mais plutôt à élargir
le prisme de la perception du surf et à
montrer aux gens la richesse du continent
africain. Ce livre ne fait qu’égratigner
la surface de la surface.
Selon Grant « Twiggy » Baker, surfeur
pro d’Afrique du Sud, la culture surf
africaine est sur le point d’exploser,
comme ce fut le cas pour les Brésiliens,
dix ans plus tôt. C’est aussi
votre avis ?
GREG EWING, ALAN VAN GYSEN
56 THE RED BULLETIN
2018 : le Sud- Africain
Mikey February (né
en 1993, un an avant
les premières élections
démocratiques
locales) est le premier
Africain non blanc
qualifié pour les
Championnats du
monde de surf.
Fondé en 2012, le Bureh Beach Surf Club est le 1 er club de surf de la Sierra Leone. « Quand
on a ouvert, très peu savaient ce qu’était le surf », dit son co-fondateur Jahbez Benga.
Absolument. Personne n’avait vu venir
le fameux « tsunami brésilien » : les Brésiliens,
ils dérangeaient un peu, parce
qu’ils étaient différents culturellement.
Leur passion du surf était différente, et
personne ne comprenait tout ce que ça
leur avait coûté d’atteindre le niveau
mondial. Quand la vague brésilienne a
déferlé en 2011, elle a tout chamboulé
sur son passage : la communauté surf a
eu du mal à encaisser et à accepter cette
nouvelle domination et le niveau de performance
des Brésiliens, à tel point qu’ils
ont même cherché à « excuser » ce style
[sud-américain]. Je n’ai jamais cru que
les Brésiliens pourraient intégrer les
équipes des plus grandes marques mondiales,
mais aujourd’hui, c’est eux qui
dominent les championnats du monde.
Et je pense que le tsunami africain est en
train de se former. L’Afrique est un vaste
continent avec une population jeune :
la question n’est donc pas de savoir si la
vague va déferler, mais plutôt quand.
Pourquoi maintenant et pas dix ans
plus tôt ?
Parce que maintenant, on a des exemples
à suivre : en 2018, le Sud-Africain Mikey
February est ainsi devenu le premier
Africain noir à participer aux Championnats
du monde. Un événement qui a
ouvert la voie à des tas de gosses, partout
sur le continent, ainsi qu’aux surfeurs
noirs à travers le monde. C’était grandiose.
Avant Mikey, ils ne savaient pas
qu’eux aussi pouvaient faire comme lui :
en Afrique, le surf était considéré, d’un
point de vue historique, comme un sport
de Blancs.
Pour quelle raison ?
En Afrique du Sud, par exemple, c’était
un sport qui faisait l’objet d’une stricte
séparation sous l’Apartheid : je me souviens
avoir été arrêté à North Beach près
de Durban en 1991. C’était peu après
l’abrogation du Separation Act (le Group
Areas Act, qui assignait les différentes communautés
raciales à des zones urbaines
spécifiques, ndlr), donc techniquement,
j’étais autorisé à aller sur cette plage.
Mais l’idée de me voir là en train de
m’adonner à « leur sport » en toute tranquillité,
c’était insupportable pour les
flics, et ils m’ont observé pendant trois
jours avant de trouver un prétexte quelconque
pour pouvoir m’arrêter. Voilà
comment c’était, à l’époque. Je me
souviens, dans un hôtel, être arrivé à la
« Historiquement,
en Afrique, le surf
était considéré
comme un sport
de Blancs. »
réception avec ma planche de surf sous
le bras : d’un coup, tout s’est figé, plus
personne ne bougeait, et tous les regards
étaient fixés sur moi. C’était quelque
chose que les gens n’avaient pas l’habitude
de voir.
Dans le livre, plusieurs surfeurs soulignent
le fait qu’une des grandes
caractéristiques de la culture surf africaine,
c’est justement qu’il n’y ait pas
de culture, et qu’ils l’inventent au fur
et à mesure.
C’est vrai. Sans cette imagerie et ces
clichés autour du surf propagés par les
magazines et par des traditions qui te
dictent ce qu’il faut faire ou penser, on
peut avoir une approche différente. C’est
dans cet espace de dilettantisme et de
nouveauté que la magie opère. Il en est
de même en art, en musique et dans la
vie en général : l’absence de structures
dogmatiques – réelles ou perçues – qui
te dictent ce qui est juste ou non, a toujours
été propice à l’émergence de bouleversements
culturels.
Il y a pourtant bien un point commun
à tous les surfeurs interviewés dans
Afrosurf : c’est cette connexion spirituelle
qui les lie à l’océan.
Dans la culture africaine, le surf n’est
pas considéré comme un simple passetemps
sexy, il y a un profond respect
pour l’océan. Dans sa jeunesse, quand
mon père a commencé à partir en tournée
dans les townships d’Afrique du Sud,
ma grand-mère lui demandait une seule
chose : de lui rapporter des bocaux
remplis d’eau de mer de différentes provinces,
qu’elle conservait chez elle, dans
son salon. Mon père a également composé
une ode à Mami Wata, l’énergie
spirituelle de l’océan.
Cet aspect spirituel se reflète-t-il dans
la façon dont les Africains abordent
le surf ?
Dans les cultures indigènes, le sentiment
de communauté et de proximité est
omniprésent. En Afrique du Sud, la philosophie
Ubuntu est fondée sur ce lien
de partage qui unit toute l’humanité.
En appliquant cette philosophie au surf,
on ne peut qu’obtenir quelque chose de
radicalement différent.
Un tel esprit de communauté fait-il
de vous un meilleur surfeur ?
Si vous regardez les meilleurs surfeurs du
monde, quelles que soient leurs origines
MAGNUS ENDAL, MARCO GUALAZZINI
58 THE RED BULLETIN
« La question n’est pas de savoir
si la vague africaine va déferler,
mais plutôt quand. »
En 2015, le photographe
Marco
Gualazzini s’est
rendu en Somalie,
à Mogadiscio
(en haut), ravagée
par la guerre.
Aujourd’hui, la
plage du Lido (à
gauche), fréquentée
par les femmes,
les surfeurs et les
jeunes Somaliens,
est devenue le symbole
de la renaissance
de la ville :
un signe d’espoir
pour le pays.
THE RED BULLETIN 59
Grant « Twiggy »
Baker, Sud-Africain :
« Dans vingt ans, il
y aura autant de surfeurs
noirs africains
dans les compétitions
mondiales qu’il y a de
surfeurs brésiliens
aujourd’hui. »
C’est grâce à ses performances
qu’Aita
Diop, 15 ans, a pu
obtenir une bourse
auprès de l’Association
internationale de
surf. La jeune fille
peut se consacrer à
sa passion : « Sur
l’océan, je me sens
libre et heureuse. »
MARTIN CAPRILE ,DJIBRIL DRAME
61
Le photographe Alan Van
Gysen révèle dans Afrosurf ses
spots de surf préférés sur le
littoral africain : comme cette
plage au sud de l’Angola et ses
« vagues longues de 3 km ».
« En Afrique, il y a
un profond respect
de l’océan. »
Pour l’animateur américain Selema
Masekela, le surf est plus qu’un
sport. Tous les bénéfices tirés du
livre iront aux ONG africaines Waves
for Change et Surfers Not Street
Children, références en surf-thérapie.
ALAN VAN GYSEN, YORIYAS YASSINE ALAOUI ISMAILI
Joshe Faulkner, champion sud-africain de l’Open tour : « Être un surfeur noir veut dire
beaucoup. C’est un sport dominé par les Blancs, mais Mikey February a ouvert la voie. »
« Le Maroc est une nation de surf : on a 3 000 km de littoral et des vagues de classe mondiale
», raconte Ramzi Boukhiam, qui représentera son pays pour l’arrivée du surf aux JO.
ethniques ou culturelles, il ressort que
beaucoup se sont bâtis dans l’adversité ;
qu’ils ont dû surmonter quelque chose
pour arriver au top niveau. Kelly Slater
a grandi dans un foyer chaotique, marqué
par l’alcoolisme, et le surf est devenu
son échappatoire. Mais prenons aussi les
histoires de ces surfeurs brésiliens : beaucoup
ont grandi dans des communautés
très soudées, au milieu des favelas,
n’est-ce pas ? Ils ont tous réussi à venir à
bout des difficultés économiques. Quand
on apprend à lier la culture avec le talent,
le travail acharné et les opportunités,
c’est à ce moment-là qu’on s’élève.
Dans son essai, Mikey February écrit :
« J’ai le sentiment que ce sont justement
les communautés surf africaines
qui vont avoir une énorme influence
sur le reste du monde. » C’est aussi
votre avis ?
Oui, et Mikey dit aussi que l’expression
africaine est brute et honnête : il n’y a
pas de chichi, aucune intention d’impressionner
qui que ce soit. C’est un aspect
important, parce que toutes les expériences
que tu fais sur la terre ferme vont
t’influencer en tant que surfeur. C’est
ce que tu exprimes : ce que tu manges,
ce que tu écoutes comme musique, comment
tu danses, ta culture, tes traditions.
Tous ces trucs que tu ne peux pas recréer
ailleurs et qui vont influencer ta manière
de surfer. C’est pour ça que les Brésiliens
ont cette touche bien à eux, que les
Tahitiens dansent d’une certaine
manière. En fait, c’est ce qui donne au
surf toute sa richesse, sa profondeur
et sa diversité. Et c’est ce qui rend le
surf génial.
mamiwatasurf.com/pages/afrosurf
THE RED BULLETIN 63
Nonstop
La carrière musicale de
Lucy Monkman, alias
MONKI, fait face à une
pause imposée. La DJ et
animatrice radio anglaise
a dû trouver une alternative
afin de canaliser
son énergie débordante
- et sa vie n’a jamais été
aussi agréable.
Texte EMMA FINAMORE
Photos GREG COLEMAN
64 THE RED BULLETIN
Grâce à son inébranlable
éthique du travail, Monki,
29 ans, est passée de
stagiaire dans une station
de radio pirate à DJ,
podcasteuse et footballeuse
accomplie.
« En quittant l’école,
j’ai eu le sentiment
que je n’avais pas le
droit à l’erreur. »
DJ, productrice, fondatrice d’un label et
animatrice radio, Lucy Monkman - plus
connue sous le nom de Monki - a apporté
certaines des sonorités électroniques les
plus fraîches et les plus innovantes qui
soient aux oreilles britanniques. À 29 ans,
Monki est peut-être une version actualisée
de qui elle était durant sa jeunesse
mais elle n’a rien perdu de l’énergie et de
l’ambition d’adolescente passionnée de
football et de musique. Elle s’est fait un
nom grâce à une émission sur les ondes
de Radio 1 de la BBC, au label qu’elle a
fondé et à d’innombrables tournées
internationales en tant que DJ. Elle s’est
aussi fait connaître sur le terrain de foot
– elle joue en cinquième division de football
féminin, pour le Dulwich Hamlet FC
66 THE RED BULLETIN
Ladies – et en tant que podcasteuse ; sa
série sur la Coupe du monde féminine
de 2019, Football Inside Out, a remporté
la catégorie « sport » aux British Podcast
Awards.
Monki a grandi à Kingston upon
Thames, dans la banlieue sud-ouest de
Londres. À la maison, elle baignait dans
la musique électro, avec les Chemical
Brothers, The Prodigy et 808 State sur
la chaîne stéréo de sa mère, les tubes
garage que son oncle jouait, ainsi que
dans le dubstep et la grime qu’elle écoutait
sur les radios pirate. « Je me suis vraiment
mise à la musique grâce à la radio »,
dit Monki, en soulignant l’importance
des pirates comme Rinse FM et Déjà Vu,
qui transmettaient les rythmes et les voix
de l’underground vers les jeunes oreilles
assoiffées. « Je me souviens de les avoir
écoutés tard dans la nuit et d’avoir
entendu des musiques de danse que je
n’avais jamais entendues auparavant. »
Ces stations ont été un espace dans
lequel les sonorités produites localement
ont pu se développer et se diversifier, à
l’écart des redevances, des annonceurs
et des organismes de réglementation.
Non contente d’être une fan, Monki
a décidé de faire partie de ce monde.
Après avoir entendu la DJ Annie Mac
jouer à la radio un soir le dubstep glacial
de Skream, Let’s Get Ravey et le remix de
In For The Kill de La Roux, elle a quitté
l’école le lendemain. La jeune fille de
16 ans a réussi à décrocher un stage chez
Rinse à une époque charnière où les
artistes avec lesquels la station travaillait
explosaient. Elle était notamment chargée
de l’approvisionnement en champagne
quand, en 2010, la station a
obtenu un permis d’émettre et est devenue
légale. « C’était vraiment passionnant
: j’étais entourée de DJs que j’admirais
et je me sentais vraiment inspirée
d’être là, sur cette station de radio de
l’East End. »
Tout comme le fondateur de Rinse,
Geeneus, qui a créé sa station à l’âge de
16 ans en connectant ses platines à un
émetteur fait maison dans un appartement
au 18 e étage dans le borough de
Tower Hamlets, Monki a réussi à se faire
une place dans le monde de la musique
grâce à son oreille exceptionnelle, mais
aussi à son talent de bricoleuse et à son
inébranlable éthique du travail. Elle a
utilisé son temps à la station pour affiner
ses compétences en ingénierie et en
mixage, et pour forger des liens essentiels
avec l’industrie. Un soir, après son
quart de travail, elle a enregistré un set
de vingt minutes qu’elle a envoyé à Annie
Mac, une héroïne de son enfance, avec
qui elle s’était connectée des années plus
tôt via MySpace.
C’est ainsi que Mac a offert à Monki
sa toute première date, au KOKO de
Camden Town, dans le nord de Londres.
En plus de ses passages dans les clubs
emblématiques comme le Ministry of
Sound ou Fabric, la jeune DJ a obtenu
une émission sur Radio 1Xtra à la BBC
puis, à 21 ans seulement, une place
convoitée à la chaîne Radio 1, toujours
à la BBC. « Quand j’ai quitté l’école, j’ai
eu le sentiment que je n’avais pas le droit
à l’erreur, dit-elle. Je n’avais pas d’autre
choix. C’était donc mon mantra à cet âge,
« J’ai fait le plein
pendant dix ans
et d’un coup, tout
s’est arrêté. »
c’était une sorte de mentalité du tout ou
rien. Et ça a marché. » Cette attitude a
permis à Monki d’atteindre le sommet
de son art en matière de musique.
Elle est aujourd’hui une force majeure
dans le domaine de la deep house et de
la techno, et une sélectionneuse habile
lorsqu’il s’agit de créer des ambiances
qui plaisent au public. En plus de jouer
de tout, du disco à la soul en passant par
l’electronica et le piano house, sur les
ondes et dans les clubs, Monki a produit
et publié sa propre musique, produisant
des EPs avec un riche mélange de producteurs,
de MCs et de chanteurs. Elle a sorti
un EP live avec Fabric alors qu’elle était
encore adolescente, mêlant house, garage
britannique et grime. Monki a également
son propre label, ZOO Music, et elle a mis
son énergie à profit sur la route chaque
année, jouant partout dans le monde ou,
en Angleterre, aux soirées Monki &
Friends dont elle est l’organisatrice.
Mais la pandémie a frappé. J’ai fait le
plein pendant dix ans et tout d’un coup,
tout s’est arrêté net », explique Monki.
Les clubs ont été fermés, les tournées ont
été suspendues et elle s’est retrouvée
chez elle sans grand-chose à faire. Pour
quelqu’un qui avait toujours eu une
vision très claire de l’avenir, même à
l’adolescence – « Quand j’ai quitté l’école,
je me suis dit : “Voici mon plan sur dix
ans, je veux être sur Radio 1 à 26 ans.” » –
cela a été un choc sérieux. « Je n’ai jamais
été autant à la maison depuis dix ans,
dit Monki. Ce que nous avons tous perdu,
c’est une connexion avec les gens. Ça a
été une perte énorme. Je pensais que je
pourrais mieux gérer cela, mais en fait
j’étais assez déprimée. »
Mais l’éthique de travail de Monki ne
lui a pas permis de ralentir longtemps.
Le foot lui a donné un autre objectif, un
endroit pour canaliser son énergie. Le
« beau jeu » faisait en fait partie de son
plan de carrière initial avant de tomber
amoureuse de la musique. Mais à 14 ans,
THE RED BULLETIN 67
Dans le mix : Monki est
aussi bien à l’aise en
studio que sur un terrain
de foot (page ci-contre),
en jouant pour les
Dulwich Hamlet FC Ladies.
LIAM ASMAN
elle a découvert que, à l’époque, les
femmes n’étaient pas payées pour jouer.
« Vous pouviez jouer pour Arsenal ou
Chelsea, mais ce n’était pas votre gagnepain,
dit-elle. À l’époque, les joueuses
anglaises devaient payer leur propre
équipement ! Cela m’a brisé le cœur.
Alors je m’en suis détachée. Si je ne peux
pas le faire comme je veux, alors je n’ai
pas envie de le faire. »
C’est au milieu de la vingtaine, alors
que sa carrière musicale battait son
plein, que le football est revenu dans la
vie de Monki. « Ça a pris du temps, ditelle,
mais j’ai réalisé que le sport me
manquait vraiment. » Après être revenue
au jeu par le biais de matches à cinq,
Monki a rejoint le Dulwich Hamlet FC
Ladies et a commencé à vivre une
« double vie », pour reprendre ses mots.
« J’ai gardé le football et le sport distincts
de la musique. Je ne traînais pas avec
mon équipe, je venais juste m’entraîner
et jouer. Je n’ai pas dit à tout le monde
ce que je faisais. Je voulais juste jouer au
football. Je voulais être traitée comme
tout le monde. Mais quand elles l’ont
découvert, elles m’ont traitée de la même
façon. Tout le monde est égal. C’est pour
ça que j’aime le sport, tout le monde se
fout de ce que vous faites. »
Aujourd’hui, Monki est un pilier du
club. « Je suis tellement impliquée avec
Dulwich Hamlet. Ma petite amie en est
la capitaine, et nous sommes comme des
ambassadrices pour le club, dit-elle à
propos de son revirement. Je travaille
avec elles en participant à des activités
communautaires et je gère leurs réseaux
sociaux en tant que bénévole. Je suis à
fond dedans. » Rebaptisées en 2019 après
neuf ans sous le nom d’AFC Phoenix –
une équipe qui, pendant une grande partie
de cette période, n’avait même pas de
tenues coordonnées – les Dulwich
Hamlet Ladies se sont retrouvées sur une
trajectoire ascendante, attirant des foules
plus nombreuses que de nombreux clubs
plus haut placés dans la hiérarchie du
football. L’année dernière, lors de leur
première saison en première division de
London & South East, elles étaient en
tête du classement lorsque, malheureusement,
le championnat a été annulé en
raison de la pandémie. Le club est aussi
une sorte de famille : les joueuses et les
supporteurs se sont mis ensemble pour
réunir plus de 10 000 livres lorsque leur
manager adoré, Farouk Menia, est
décédé en 2019 ; et il apporte un soutien
vital à la communauté LGBTQ.
C’est grâce à son amour du sport que
Monki a réussi à se libérer de son isolement.
Elle a profité de cette période
pour renouer avec l’entraînement et
aussi pour mettre à profit son nouvel
enthousiasme pour la diffusion des
sports. Cette envie s’est encore renforcée
lorsque Football Inside Out a remporté
le British Podcast Award. « Cela m’a
ouvert les yeux, dit-elle en parlant de la
prise de conscience qu’elle pouvait combiner
ses deux mondes. J’adore la radio
– le podcasting était quelque chose que
je voulais faire de toute façon – mais ça,
c’était autre chose, pas de la musique.
C’était vraiment intense, mais ça a été
une grande expérience. » N’ayant jamais
fait les choses à moitié, Monki a depuis
présenté The Kick Off – une soirée de la
Ligue des champions de l’UEFA en direct
présentée par Heineken et Defected –
et a travaillé avec la légende du sport
Peter Crouch sur BT Sport.
L’inconfortable changement de
rythme provoqué par l’apparition de la
pandémie est devenu pour Monki, l’occasion
de repenser à l’avenir. « J’en suis lentement
arrivée à la conclusion que j’aime
participer à des shows, mais que je ne
veux pas que cela constitue toute ma vie,
dit-elle. Cette année a été consacrée à ce
que je veux faire au-delà des tournées et
des soirées. Pendant le deuxième confinement,
j’ai fait équipe avec un groupe
d’autres personnes pour travailler sur
des idées en vue d’une plateforme sportive
féminine qui, je l’espère, sera lancée
cette année. »
La plateforme n’a pas encore de nom,
mais elle a une éthique forte : « Il y a
quelques grands créateurs de contenus
footballistiques et sportifs, mais ce que
nous voulons faire, c’est nous concentrer
moins sur le sport lui-même et davantage
sur l’encouragement aux femmes afin
qu’elles puissent évoluer dans n’importe
quelle fonction. » Monki cite une étude
récente de l’organisme public Sport
England, qui a révélé que 39 % des
femmes ne sont pas assez actives, les
raisons les plus courantes étant la peur
du jugement et le manque de confiance
en soi. « Tout le monde n’aime pas le
sport comme j’aime le football, mais il
est tellement important de faire de l’exercice,
même si c’est seulement se promener
avec ses potes. »
Il allait de soi que Monki allait mettre
son énergie débordante au service d’un
projet comme celui-ci, étant donné
qu’elle a contribué à la représentation
« Il est tellement
important de
faire de
l’exercice. »
féminine dans plusieurs domaines dominés
par les hommes. Elle a notamment
réussi dans le monde largement masculin
de la musique électronique, devenant
la toute première femme d’origine sudest
asiatique à animer une émission à
Radio 1 – « Je n’en ai pris conscience
qu’en 2020. Je ne me voyais pas comme
cette personne à l’époque. J’aurais aimé
le célébrer davantage ».
Mais malgré ses projets d’améliorer
la santé de nombreuses femmes et le
fait que des jeunes filles asiatiques ont
contacté Monki pour lui dire combien
elle les inspirait, elle ne se considère
pas comme une personne dédiée à la
cause de l’égalité. Ses efforts pour dépasser
les limites sont plus personnels et se
concentrent uniquement sur sa ténacité
à faire ce qu’elle aime, malgré les risques
et les obstacles. Maintenant, en trouvant
l’espace dans le diagramme de Venn
où ses passions se chevauchent, elle a
trouvé les outils nécessaires pour traverser
des moments étranges - et même en
ressortir plus forte. « J’ai l’impression
d’être plus ’moi’ en vivant de cette façon,
avec plus d’intégrité, dit-elle. Et c’est ça
le but, non ? C’est littéralement ça. »
monkidj.com
THE RED BULLETIN 69
La force
en elle(s)
Dès son enfance, JILOU RASUL,
a pris confiance en elle grâce
à la danse. Aujourd’hui, elle
est l’une des meilleures
breakdanceuses au monde, et
se sert de ses compétences
pour lutter pour la justice.
Texte ANNE WAAK
Photos EVA BERTEN
Renversant : Jilou,
27 ans, qui fait ici un
air freeze, est une
danseuse urbaine
aux pieds légers.
71
Jilou est née à Fribourg,
en Allemagne, et vit
maintenant à Berlin. Elle
a commencé à danser en
2006, à l’âge de 13 ans.
72 THE RED BULLETIN
« Ce qui me pousse
à danser encore
aujourd’hui ? Cela
me rend heureuse.
C’est tout. »
Ci-dessus : pour ce
backflip, il n’y a que
quelques centimètres
entre la tête de Jilou
et le sol dallé.
Ci-contre : le break
offre à Jilou une liberté
de mouvements
sans limite, comme
avec ce chair freeze.
THE RED BULLETIN 73
J
ilou ne reste pas en
place. Elle effectue
des mouvements
minimaux à partir
des hanches et fait
une vague avec
les bras tendus de
chaque côté de son
corps. C’est l’une des dernières journées
chaudes de la fin de l’été, le soleil brille
encore de tous ses feux dans un ciel sans
nuage. Sur la Spree qui serpente entre
les immeubles gouvernementaux dans
le centre de Berlin, les embarcations
de plaisance passent les unes après les
autres devant le lieu du shooting photo.
La jeune fille de 27 ans se tient devant
un mur de béton gris et bouge presque
instinctivement au son de la musique qui
joue sur le plateau. Même lorsqu’il s’agit
de faire son portrait, la danseuse a du
mal à rester en place.
C’est cette envie incontrôlable de
bouger qui a fait de Jilou ce qu’elle est
aujourd’hui : l’une des meilleures B-Girls
au monde. Lors du Red Bull BC One,
le championnat du monde officiel de
breakdance où les seize meilleurs B-Girls
et B-Boys s’affrontent selon un système
d’élimination directe et qui s’est tenu
à Mumbai en 2019, Jilou a atteint les
quarts de finale. Elle estime qu’elle ne
méritait pas sa défaite contre la Japonaise
MiMz. Ce qui n’est guère étonnant
quand on connaît ses ambitions : « J’ai
toujours voulu être la meilleure, dit
Jilou. D’abord dans mes cours de break,
puis dans ma ville, puis dans toute l’Allemagne,
et maintenant dans le
monde entier. » Elle est loin
d’avoir atteint son but, et la
danse seule ne lui suffit pas.
Elle trouve également dans
son art la motivation de faire
une différence dans le monde.
Née à Fribourg en 1992,
Jilou Rasul a commencé le
ballet très tôt. Mais les mouvements
stricts ne convenaient pas à cette enfant
turbulente. Elle est ensuite passée à
la gymnastique artistique à l’âge de
six ans. Quand, à 13 ans, Jilou s’en est
lassé et qu’elle a commencé à faire du
breakdance au club, elle était déjà superflexible
et capable de faire des handstand
et des flic-flac. Lorsqu’on lui demande ce
qui l’a amenée à danser à l’époque, et qui
la pousse encore aujourd’hui, elle répond
simplement : « Cela me rend heureuse.
C’est tout. » Avant d’ajouter dans la foulée
qu’elle est accro à l’adrénaline. L’excitation
provoquée par la pratique de phases
risquées, les défis lancés à son propre
corps et la rivalité avec les autres a rapidement
exercé un attrait irrésistible chez
Jilou. Huit mois seulement après avoir
commencé à faire du breakdance, elle a
participé à sa première B-Girl-Battle et est
arrivée deuxième. Et elle a encore beaucoup
de projets devant elle. Si l’on se fie
à Jilou, les quarts de finale du Red Bull
BC One de l’année dernière ne resteront
pas longtemps le point culminant de sa
carrière. Jilou ne veut pas seulement
devenir la meilleure danseuse au monde,
« mais la meilleure de tous ».
Elle ne se contente pas de danser
extrêmement bien dans son style
caractéristique, à la fois acrobatique et
léger comme une plume. Elle utilise la
confiance qu’elle tire du breakdance
pour quelque chose de plus grand. Jilou
se bat pour elle ainsi que pour les autres
B-Girls afin qu’elles obtiennent une véritable
opportunité de rivaliser avec leurs
homologues masculins.
Parce qu’il n’y a pas de différence entre
le break et presque tous les autres aspects
du sport et de la vie en général : les
femmes sont défavorisées, gagnent moins
pour des réalisations équivalentes et
doivent se défendre contre les agressions.
Jilou ne veut pas
seulement devenir la
meilleure danseuse
au monde, « mais la
meilleure de tous ».
74 THE RED BULLETIN
Militante positive :
Jilou se bouge pour
des causes comme
l’égalité ou encore
l’antiracisme.
THE RED BULLETIN 75
En novembre 2020,
Jilou participait au
Red Bull BC One World
Final, une coupe du
monde de break.
Elles doivent se battre pour être prises
au sérieux et être remarquées. « Le break
est un type de danse influencé par les
hommes et dont une part importante a été
développée par eux, explique Jilou. En ce
qui concerne les types de mouvements,
il favorise l’aspect masculin et est jugé en
conséquence dans les compétitions. Ce
n’est pas juste. » Jilou s’élève contre cette
inégalité de traitement. Haut et fort.
P
ourtant, les B-Girls ont toujours
fait partie de cette culture
urbaine : née en 1968, la New-
Yorkaise Daisy Castro a dansé
sous le pseudonyme de Baby
Love en tant que seule femme du Rock
Steady Crew, fondé à la fin des années
1970. Elle avait 15 ans lorsque, avec sa
voix et son visage, elle a fait entrer le
break du Bronx dans la culture populaire
avec la chanson Hey You, The Rock Steady
Crew, qui a également passé des semaines
dans le top 10 des charts en Autriche et
en Allemagne en 1983. Mais il faudra
attendre 2004 pour que les premières
compétitions de B-Girls aient lieu dans le
cadre du Battle of the Year, la plus grande
compétition de break au monde depuis
1990 et toujours la plus importante à
ce jour. Les femmes de cette scène ont
acquis une nouvelle visibilité mais elles
restent encore minoritaires à ce jour.
Jilou ne fait pas que danser contre
cette réalité. Parce qu’elle considère
également qu’il est de sa responsabilité
d’encourager une nouvelle génération
de B-Girls dans son sillage, elle donne à
quatre jeunes danseuses internationales
des cours à distance gratuits une fois par
semaine. Et elle s’exprime sur son blog
au sujet des formes de discrimination
qu’elle subit. Elle a désarmé les auteurs
de commentaires haineux qui l’insultaient
anonymement sur le web en
écrivant : « Merci d’avoir pris le temps
de m’écrire. Vous devez beaucoup penser
à moi. Je semble occuper toutes vos
pensées. » En mai 2020, elle décrit sur
les réseaux sociaux comment elle a été
harcelée sexuellement et agressée par
un B-Boy alors qu’elle était adolescente.
Un message
qui a fait le tour
de la planète
Cette photo de Jilou lors d’une
manifestation Black Lives Matter à
Berlin est devenue virale. Le B-Boy
US Boxwon est à l’origine de ce
message : le hip-hop est un cadeau
de la culture noire fait au monde.
MIRLEY ALLEF @AFRALLEF, STYLING: MEILYNN LINDLAR/BASICS
76 THE RED BULLETIN
En même temps, elle exhorte les gens à
écouter et à croire les témoignages des
femmes (et des hommes) qui révèlent
avoir vécu de telles expériences.
Jilou a le don magnifique de rester
visiblement de bonne humeur et
réglo face à tous les défis comme en
témoignent, par exemple, les vidéos de
la compétition de Mumbai. Lorsqu’elle
danse face à sa concurrente MiMz, elle
a un sourire presque euphorique, pas
agressif. Après le duel, elle va – malgré
la défaite – vers sa concurrente, qui est
en train d’emballer ses affaires au bord
de la piste, lui tape sur l’épaule et l’enlace,
comme pour dire : « Nous avons
toutes les deux le même objectif et nous
devons nous serrer les coudes. »
D’une manière générale, la solidarité
est l’un des thèmes qui la définissent au
« J’aime découvrir ce qui
est possible et jusqu’où
je peux aller ; ce que je
peux demander de plus
à mon corps. »
Tout-terrain : le break
permet à Jilou de s’exprimer
partout, comme ici
à côté de la Spree.
quotidien. Fille d’une Allemande et d’un
Kurde irakien, Jilou est constamment
confrontée au racisme dans sa vie de tous
les jours. Bien qu’elle soit mieux lotie que
beaucoup d’autres personnes issues de
minorité visible, il était important pour
elle de participer à l’importante manifestation
Black Lives Matter qui a eu lieu à
Berlin début juin en réponse à l’assassinat
de George Floyd par des policiers à Minneapolis.
Jilou portait un panneau dont
l’inscription – une citation du B-Boy américain
Boxwon – rappelait aussi indirectement
l’origine du break : « Le hip-hop est
un cadeau de la culture noire au monde. »
Q
uant à son parcours professionnel,
Jilou se voit encore
dans une période d’essai pour
devenir ce qu’elle veut être.
« J’aime découvrir ce qui est
possible et jusqu’où je peux aller ; ce que
je peux demander de plus à mon corps. »
Elle a recouvert le plancher de son
appartement compact de PVC, le transformant
en espace d’entraînement. Sa
devise : toujours prête.
Mais elle pense aussi déjà à ce qui
peut arriver après sa carrière active de
danseuse. Elle est inscrite à un cours
par télé-enseignement en gestion de la
culture et des médias à l’université de
Hambourg, mais en dehors de la formation,
de l’enseignement et des compétitions
qui reprendront lentement après
le confinement, elle n’a pas vraiment le
temps d’étudier en ce moment. Dans la
quête de son but, elle ne veut pas être distraite
par quoi que ce soit ou qui que ce
soit. Cet objectif est clair : tout en haut.
« J’aimerais être la danseuse la mieux
payée de toutes. » Pour elle, il ne s’agit pas
tant d’argent que de la valeur accordée à
une personne et donc aussi à un type de
sport. Il n’y a pas encore de B-Girl ou de
B-Boy qui ait un contrat d’un million de
dollars. Mais, dit-elle, il ne suffit que d’un
seul pour que la glace se brise. « Je veux
qu’une nouvelle ère commence. » Cela
implique de connaître sa propre valeur en
tant qu’athlète et de négocier les contrats
avec acharnement. La question de savoir
si la détermination seule suffit pour obtenir
une telle somme dans le domaine du
breakdance reste ouverte : les ambitions
de Jilou forcent le respect.
Elle montre ensuite le tatouage coloré
qui s’étend sur son épaule gauche et
qui montre, entre autres, une formule
compliquée. C’est une fonction mathématique
qui reste toujours positive et
qui tend vers l’infini. Comme Jilou.
Instagram : @bgirljilou
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PERSPECTIVES
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Parcourez les
fjords de Norvège
H+I ADVENTURES
79
PERSPECTIVES
voyage
« “Facile” n’est pas un
mot que j’associerais à ce
paysage ravagé par les
glaciers. Vous aurez du
boulot et vous vous
sentirez parfois tout petit,
mais cela rend la chose
d’autant plus gratifiante. »
Ross Bell, photographe VTT
L
es premiers sons que j’entends au
réveil sont le doux ronronnement
du moteur et le bruit des vagues qui
clapotent sur la coque en bois. Le navire
s’est arrêté. Je quitte ma couchette et me
dirige vers le pont, accueilli par une
brume froide qui me frappe le visage. Nos
vélos, rangés dans le coin, sont trempés.
Devant nous se dressent les montagnes
Trollstigen, nommées d’après la route qui
serpente sur 55 kilomètres en traversant
la chaîne. Le nom norvégien pourrait se
traduire par « échelle du troll », ce qui est
tout à fait approprié vu sa pente raide de
neuf pour cent et ses onzeépingles à cheveux.
Ce col est énorme et aujourd’hui
nous allons le gravir.
C’est le troisième jour d’une semaine
d’aventure en VTT à travers les fjords
norvégiens – ces anciens bras de mer
formés par les glaciers où les montagnes
rencontrent des rubans d’eau couleur
émeraude. Notre logis flottant est le HMS
Gåssten, un navire de guerre suédois à la
retraite, luxueusement réaménagé pour
accueillir dix passagers qui navigue dans
ce labyrinthe de voies navigables, de
montagne en montagne, à la recherche
d’un paradis de l’arrière-pays. En tant
que photographe de VTT, mon travail
m’a conduit de la Nouvelle- Zélande au
Canada, de la Namibie à l’Équateur, mais
la Norvège est une destination que je
convoitais depuis longtemps, impatient
de monter jusqu’à mille mètres par jour
et de parcourir certaines des pistes les
plus exigeantes au monde, du point de
vue technique, avec les fjords spectaculaires
en toile de fond.
Notre guide, Ole, prépare l’itinéraire
de la journée. Notre groupe de huit personnes
va parcourir 22 kilomètres dans
les montagnes couvertes de nuages.
Après que nous nous soyons embarqués
dans la yole avec les vélos, notre capitaine,
Sven, nous emmène à terre et nous
Les matelots du HMS
Gåssten, Sven et
Tash, aident à ranger
les vélos après une
longue journée en
montagne.
H+I ADVENTURES ROSS BELL
80 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
voyage
Portage : Bell et son
groupe utilisent la
technique du « hikea-bike
» à travers
les montagnes
escarpées des
Trollstigen.
Une fois sur la côte atlantique érodée, c’est le départ.
parcourons « l’échelle du troll » en
camionnette, avant d’abandonner la piste
et d’escalader le glacier à pied, nos vélos
sur le dos. “Earn your turns”, littéralement
« méritez- le », est une phrase qui
me vient à l’esprit alors que je mets péniblement
un pied devant l’autre, au grand
dam de mes mollets et de mes cuisses.
Les montagnes semblent flirter avec
nous lorsqu’elles se voilent et se
dévoilent, laissant entrevoir l’ampleur du
terrain que nous allons affronter.
Bien que nous soyons à la mi-août,
des vestiges de l’hiver précédent s’accrochent
encore aux cavités alors que
nous avançons sur des plaques de neige
boueuse, atteignant notre destination
par un lac d’eau de fonte cristalline.
Notre pause est juste assez longue pour
nous permettre de reprendre notre
souffle – l’attrait d’une descente
héroïque est trop fort. La roue
avant pointant vers la descente,
je desserre un peu mes leviers
de frein et commence à lutter
contre la gravité. Des sections
de rocs escarpés et lisses sont
reliées par d’étroits lacets en
singletrack exigeant, jonchés de
rocailles dangereuses pour les
pneus. Quelques tactiques s’offrent
à vous, allant de l’approche mesurée
à advienne que pourra. La décision doit
être prise rapidement, sinon le terrain
vous fera payer rapidement.
Il ne faut pas longtemps avant que
mes freins ne se mettent à
chauffer et que mes bras commencent
à me faire mal lorsque
je dévale le flanc de la montagne,
la terre volant dans toutes les
directions. Mais je ne m’arrête
pas et mon sourire s’élargit à
mesure que le parcours de montagnes
russes suit les contours
de la colline et que nous nous
frayons un chemin à travers les sousbois
luxuriants.
THE RED BULLETIN 81
PERSPECTIVES
voyage
Vers le bleu : le groupe descend vers les eaux turquoise du fjord depuis les pentes du Liahornet.
À améliorer
Parcourir les fjords exige un
top niveau de forme physique
et de compétences en VTT,
pour affronter montées techniques,
descentes en singletrack
et rocailles. Voici des
points à approfondir…
Technique du « hike-a-bike » :
couchez votre vélo sur le sol, la
transmission tournée vers le bas.
Placez votre main gauche sur la
fourche, la droite sur la manivelle
du pédalier. Accroupissez-vous
et soulevez le vélo au-dessus de
votre tête. Posez le tube diagonal
sur votre dos/sac à dos.
Sortez votre vélo 4 à 5 fois par
semaine, par tous les temps,
pour vous familiariser avec les
sentiers raides et glissants.
Entraînez-vous à rouler sur les
racines, les rochers et les
dénivellations.
Veillez à ce que votre vélo soit
bien entretenu : une purge de
frein, des plaquettes neuves et
des pneus adhérents peuvent
s’avérer payants.
Préparez-vous à travailler dur,
tant physiquement que mentalement.
Les montées et les
descentes constitueront des
défis, quelles que soient vos
capacités.
Quand nous nous approchons du fond
de la vallée, la pente - et mon niveau
d’adrénaline - diminue alors que nous
longeons une rivière qui traverse des
stries argentées de bouleaux. Ce changement
de rythme bienvenu me permet
d’apprécier ce magnifique paysage alors
que nous atteignons le bord du fjord,
prêts à repartir au large pour dîner à
bord du Gåssten. « J’ai gardé le meilleur
pour la fin », dit Ole, tout sourire, le dernier
jour, en désignant le Liahornet, la
Fjord escort
Utilisé comme dragueur de mines par la marine
suédoise de 1973 à 1999, le HMS Gåssten à coque
en chêne fut l’un des derniers navires en bois à
servir dans une force navale. Propriété du capitaine
Sven Stewart, ce navire de 24 mètres de long a été
réaménagé avec cinq cabines et un salon. Sa taille
lui permet de pénétrer des fjords difficiles d’accès.
porte d’entrée de 961 mètres de haut de
la chaîne de montagnes qui accueille le
fjord – Norddalsfjorden – dans lequel
nous avons jeté l’ancre. Nous allons
monter jusqu’à son sommet par un sentier
escarpé de quelque 7 kilomètres.
En traversant le village de Liabygda et
ses fermes environnantes, j’apprécie la
brève occasion de pédaler avant que les
choses ne redeviennent sérieuses et que
nous devions porter nos vélos. Les
pentes sont si raides que, quel que soit
votre niveau de forme, vous vous retrouverez
le plus souvent à monter à pied.
Le visage rouge et suant, nous atteignons
le sommet, notre bateau est à
peine un pixel au milieu d’une vaste bande
bleue en dessous de nous. Le plus dur est
passé. Tout est en descente à partir d’ici.
Après cela ? La promesse d’une croisière
dans le mondialement célèbre Geirangerfjord,
où Sven fera un arrêt à la base des
chutes des Sept Sœurs, hautes de 410
mètres, pour un plongeon d’après-randonnée
dans les eaux glacées pour apaiser
nos corps fatigués.
Ross Bell est un photographe de sports
d’action d’Écosse ; rossbellphoto.com.
Il a fait ce voyage avec H+I Adventures
qui organise des circuits de VTT dans le
monde entier et qui prévoit une autre
tournée des fjords norvégiens en août,
mountainbikeworldwide.com
H+I ADVENTURES
82 THE RED BULLETIN
RED BULL SANS SUCRE
MAIS RED BULL QUAND MÊME.
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PERSPECTIVES
fitness
ENTRAÎNEMENT
SPATIAL
Comme
au ciel
Préparateur physique des
astronautes, le professeur
Jörn Rittweger nous révèle
comment se déroule un
entraînement en apesanteur.
Bonus : exercices de l’espace
à l’usage des Terriens.
La vie à bord de l’ISS (Station
spatiale internationale) n’est
pas une partie de plaisir. Les
astronautes sont exposés à
une radioactivité 300 fois
supérieure à celle sur Terre.
Les premiers jours dans l’espace
sont désagréables, les
os et les muscles se détériorent
rapidement. Pour y
remédier, le professeur Jörn
Rittweger, chef du département
Métabolisme musculaire
et osseux du Centre
aérospatial allemand (DLR),
développe depuis 2009 des
machines de fitness entre
autres pour l’ISS. Il nous
explique ici, comment se
muscler et transpirer dans
l’espace.
Arrimée au tapis roulant : l’astronaute italienne Samantha
Cristoforetti à bord de la Station spatiale internationale en 2015.
the red bulletin : Avant de
rejoindre le Centre aérospatial
allemand, vous avez
mené des études sur l’alitement.
En quoi cela consistet-il
?
jörn rittweger : Il s’agit d’expériences
sur des sujets alités
pendant plus de soixante
jours durant lesquels nous
testons des protocoles
incluant l’entraînement, l’alimentation
et la stimulation
électrique afin d’éviter la détérioration
physique. Nous pouvons
ainsi simuler nombre de
situations auxquelles les
astronautes sont confrontés
dans l’espace.
Le corps humain et l’apesanteur
ne font pas bon
ménage…
C’est vrai. La gravité est sans
doute le seul facteur environnemental
stable depuis le
début de l’évolution. Tous les
autres éléments ont évolué,
la température de l’air, la composition
gazeuse de l’atmosphère,
le rayonnement UV.
Quels effets produit l’espace
sur le corps des astronautes
?
En quelques jours, les astronautes
éliminent un litre de
liquide sous forme d’urine
pour éliminer le sang qui n’est
plus stocké dans leurs
jambes. Au début, beaucoup
souffrent du « mal de l’espace
». L’apesanteur désactive
« Dans l’espace,
l’entraînement
est crucial
pour la santé
psychique »
Jörn Rittweger,
spécialiste en
physiologie spatiale
Quand la
pesanteur
est abolie
Comment les astronautes
gardent-ils la forme ?
LE MULTIFONCTION
Idéal pour développer les
muscles (squats, banc,
presses, soulevé de terre, etc.),
l’appareil d’exercice contre
résistance (ARED) est le
préféré des astronautes.
Une barre de poids sur deux
colonnes et une résistance
générée par la pression de l’air.
TAPIS ROULANT
Un harnais maintient les
astronautes sur le tapis roulant
pendant leur jogging.
Les vibrations générées par
les pieds sont parfaitement
amorties afin de ne pas endommager
la station spatiale.
MACHINE À SAUT
Les astronautes l’utiliseront
pour simuler les sauts sur
Terre. L’appareil stimule les
muscles extenseurs et fléchisseurs
du dos et des jambes.
La machine est actuellement
développée par le DLR et
entrera en service dans
deux ans.
ESA/NASA FLORIAN OBKIRCHER TOM MACKINGER
84 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
fitness
En attendant
la mise à feu
Trois exercices que l’experte en astrofitness Nora
Petersen, de l’Agence spatiale européenne, prescrit
aux astronautes en vue d’un séjour dans l’espace.
le système d’équilibre dans
l’oreille et tout se dérègle.
Résultat : ils se sentent très
malades.
L’apesanteur affecte-t-elle
également les muscles ?
Oui, l’atrophie musculaire
débute rapidement. Les muscles
n’agissent et ne se renforcent
qu’en présence d’une
force de résistance. Or, dans
l’espace, ils ne sont plus soumis
à la force de gravité,
comme sur Terre. La résistance
disparaît. Sans la force
de gravité, le système physiologique
du corps devient tout
simplement inopérant.
Envoyer des astronautes
bodybuildés dans l’espace
peut être une solution ?
La perte de muscles, d’os et de
volume sanguin n’occasionne
pas de gêne dans l’espace. Les
problèmes commencent au
retour des astronautes sur
Terre. Mais ceux-ci sont bien
pris en charge par les médecins.
En revanche, les choses
se compliquent pour une mission
sur Mars, qui peut durer
deux ans et demi. Et à ma
connaissance, le système de
santé sur Mars n’est pas
encore au point.
Le métier d’astronaute
semble peu recommandé
pour la santé.
Il le serait assurément si
scientifiques, médecins et
ingénieurs, n’en comprenaient
pas les dangers et ne savaient
pas comment les éviter. D’où
l’importance d’une préparation
physique complète pour
l’espace ayant pour objectifs
de maintenir les astronautes
en bonne santé, et de préparer
au mieux leur retour sur
Terre.
Quelles sont la fréquence, la
durée et l’intensité de cette
préparation ?
Environ deux heures par jour,
six jours sur sept. Cela inclut
la préparation et le suivi. La
préparation physique n’a pas
toujours été une priorité et en
cas de difficultés ou de planning
serré, elle était la première
à être sacrifiée. Mais
ces dernières années, la prise
de conscience quant à son
importance a accru l’attention
qu’on lui accorde.
Outre le matériel utilisé sur
l’ISS, qu’en est-il de la
dimension mentale de la
préparation ?
Dans l’espace, l’entraînement
est crucial pour la santé psychique.
L’exercice physique
sécrète des substances messagères
dans les muscles,
comme l’interleukine-6 ou le
BDNF. La première est nécessaire
à l’équilibre du bilan
énergétique avec le foie et le
tissu adipeux, la seconde l’est
pour le cerveau. Les
recherches montrent que les
structures cérébrales responsables
du comportement sont
altérées en cas d’isolement et
de manque d’exercice. Cela
peut conduire à l’apathie, au
stress et à l’irritabilité. Le
sport réduit le stress et la station
spatiale offre la possibilité
de s’isoler.
À quoi ressemble une séance
de sport en apesanteur ?
Ce n’est pas si différent que
sur Terre. L’entraînement
dans l’ISS nécessite le port
d’un harnais pour éviter de
flotter. Une fois habitués, les
astronautes ne ressentent
aucune différence.
dlr.de (site en anglais)
1. LE CONCOMBRE ROULANT
Objectif : gainage et maîtrise du corps
Mouvement : position allongée, les bras et les jambes tendus de sorte
que seul l’abdomen touche le sol. Rouler de manière contrôlée sur son
propre axe longitudinal sans toucher le sol des pieds ou des mains.
Bras et jambes étirés en permanence. Ajuster l’intensité et le nombre
de répétitions en fonction de l’état de forme.
2. SQUATS AVEC POIDS
Objectif : renforcement général, en particulier les jambes, le dos et
la ceinture abdominale.
Mouvement : effectuer les squats avec la barre sur l’épaule, en gardant
le dos droit, la colonne cervicale neutre et les genoux alignés sur les
orteils. Maintenir la tension du corps pendant le mouvement. Adapter
le poids et le nombre de répétitions selon l’état de forme.
3. LE TIRAGE BARRE
Objectif : renforcement du dos et des épaules
Mouvement : comme pour le soulevé de terre, attraper l’haltère ou
la barre de poids en gardant le dos droit, et la ramener sous la poitrine
dans une position stable, penchée en avant, les jambes fermes et les
coudes près du corps. Adapter le poids et le nombre de répétitions
selon l’état de forme.
THE RED BULLETIN 85
PERSPECTIVES
gaming
AMUSEMENT
C’est l’heure de jouer
Le Game & Watch de Nintendo porte bien son nom : il donne le jeu et l’heure.
Le jeu et l’horloge
unis sur l’affichage
principal. L’horloge
numérique apparaît
dans les graphiques
de Super Mario Bros.
Gunpei Yokoi est célèbre pour
avoir conçu la console Game
Boy originale de Nintendo en
1989 mais ce n’était pas la
première fois que l’inventeur
japonais façonnait la culture
populaire.
Dans les années 70, alors
qu’il était dans un train, Yokoi
a observé un homme d’affaires
tapoter distraitement
sur sa calculatrice pour passer
le temps. Cela lui a donné
l’idée de lancer un jeu intégré
à une montre. Entre 1980 et
1991, soixante consoles
Game & Watch ont été lancées
par Nintendo, chacune
d’elles dotée d’une horloge et
d’un jeu addictif. Des dizaines
de millions d’exemplaires ont
été vendus, amorçant l’ascension
de Nintendo jusqu’à
devenir le géant des jeux qu’il
est aujourd’hui.
Yokoi est mort en 1997
mais son influence se fait
sentir dans nombre de jeux
avec lesquels nous nous
amusons aujourd’hui – la
croix directionnelle sur les
manettes de jeux modernes
est apparue pour la première
fois sur le Donkey Kong
Game & Watch de 1982.
Cette nouvelle version
célèbre le 35 e anniversaire
de Super Mario Bros tout
en présentant une variante
Mario de Ball, le jeu original
de Game & Watch, lancé
il y a quarante ans. Et il
donne toujours l’heure.
nintendo.fr
TIM KENT
86 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
gaming
HITMAN 3
Avancez
en silence
Tel une ombre, l’ex-soldat d’élite
Billy Billingham vous conseille
sur les compétences majeures
en matière de jeux d’infiltration.
GAMESPRESS
Les jeux d’infiltration sont une
espèce rare. Ils sont contreintuitifs
par rapport à nos instincts
en situation de jeu. Ils
demandent au joueur d’éviter
l’action plutôt que de s’y engager,
en se faufilant à travers
des missions sans se faire
repérer. Ghost of Tsushima,
une aventure de samouraïs, et
Marvel’s Spider-Man (tous
deux sur PlayStation) appartiennent
à ce type de jeu. C’est
également le cas de la série
Metal Gear et de la franchise
Hitman. Dans Hitman 3, les
joueurs entreprennent une fois
de plus des missions en tant
que meilleur tueur à gages au
monde, l’agent 47, en choisissant
de se faufiler sans être
détecté ou de donner l’assaut,
les armes à la main.
La première approche permet
de gagner des bonus, et
c’est une attitude qui peut rapporter
gros dans des situations
réelles. Mark « Billy » Billingham
MBE est un ancien soldat
décoré des SAS (Special Air
Service) qui a participé à des
opérations secrètes en Afghanistan
et en Irak ; il a été garde
du corps de stars hollywoodiennes
comme Russell Crowe,
Tom Cruise et Angelina Jolie. Il
est aussi consultant et instructeur
dans l’émission de téléréalité
anglaise SAS: Who
Dares Wins. Il révèle les techniques
qui l’ont gardé en vie et
qui pourraient vous aider vers
la complétion de Hitman 3...
Procédez lentement
« La discrétion est toujours de
mise pour quelque opération
que ce soit - on ne peut rien
contre l’élément de surprise,
dit Billingham. En prenant le
temps d’approcher de quelque
chose à la dérobée, vous prenez
le contrôle. Si vous pouvez
entrer tranquillement, sortez
tranquillement, mais parfois la
vitesse et l’agressivité peuvent
vous aider à obtenir ce dont
vous avez besoin. Pesez le
pour et le contre en vous
basant sur votre intelligence. »
Avancez pratique
« Tout est bien ajusté ? Sans
attaches de velcro ou quoi que
ce soit qui peut faire du bruit
dans vos poches ? Collez
toutes les pièces de métal sur
votre arme avec du ruban
adhésif. Avec un viseur nocturne,
vous aurez une lueur
verte sur le visage. Il faut donc
le dissimuler. Assurez-vous de
savoir sur quel type de sol
vous allez marcher, portez des
chaussures à semelles
souples et ne trimballez pas
un équipement encombrant. »
Soyez silencieux
« Quand il fait nuit, l’ouïe est
votre sens principal. Approchez-vous
de la cible avec le
Au sommet de l’infiltration : l’Agent 47 reprend du service dans le jeu Hitman 3.
vent de face pour éviter que le
bruit ne se transmette. Déplacez-vous
lentement, de 8 à
10 cm à chaque pas, en cherchant
les branches, les filspièges
et tout ce qui pourrait
faire du bruit. Si une patrouille
passe à proximité, contrôlez
votre respiration ou retenez
votre souffle, mais n’oubliez
pas qu’elle sera distraite par
son propre bruit. »
Prêt pour l’action ?
« Nous utilisons ce que nous
appelons un système d’« escalade
». Le point le plus bas de
l’escalade est la discrétion,
mais une fois que vous
Le one-man show de
Billingham, An Audience
with Mark “Billy” Billingham
présente des histoires
inspirantes.
markbillybillingham.com
essayez de passer ce seuil,
par exemple, cela devient
bruyant. Vous devez alors préserver
l’élément de surprise.
L’étape suivante est l’attaque ;
cela pourrait être une entrée
explosive. L’onde de choc de
l’attaque demandera une
seconde à votre cible pour
réaliser ce qui se passe. À ce
moment-là, vous êtes déjà à
l’intérieur. »
Restez serein
« Passer beaucoup de temps
en mode furtif peut être
contre-productif - cela vous
met sur les nerfs. Votre cœur
s’emballera et votre corps réagira
là où il y a du danger et de
la peur. Mais vos sens seront
plus aiguisés. Beaucoup
d’opérations sont invisibles et
inaudibles, mais il est pratiquement
impossible de s’approcher
de quelqu’un et de
l’assommer. L’élément de surprise
vous amènera à une
étape, puis il faudra peut-être
qu’il y ait du bruit. »
Hitman 3 sur Stadia, Windows,
Nintendo Switch, PlayStation
et Xbox ; hitman.com
THE RED BULLETIN 87
PERSPECTIVES
à vous de jouer
EN MODE PRO
Dans l’élite
du babyfoot
Loin d’être un simple jeu de bistrot, le babyfoot
est une activité sérieuse et compte parmi ses
aficionados des athlètes de classe mondiale.
J-P Thompson s’entiche
du babyfoot à l’adolescence
à Nantes. Il n’est
alors qu’un joueur de
bar moyen abusant de la roulette,
une pratique contraire
aux règles. Il joue sur des
tables bancales mal éclairées,
dont l’instabilité décide souvent
de l’issue du match.
Un quart de siècle plus
tard, Thompson a fait de ce
sport son métier avec une
seule certitude : le foosball,
sa dénomination originale
dérivée, paraîtrait-il, de l’allemand
fußball, mérite d’être
reconnu comme étant plus
Le snake
shot
Comment maîtriser
ce coup gagnant.
5
La roulade à 340°
expédie le ballon avec
force dans le but.
qu’un jeu de bistrot. « Beaucoup
ignorent que ce sport
requiert de réelles compétences,
explique ce passionné
de 39 ans, aujourd’hui basé à
Londres. Lorsque vous
contrôlez la balle et interdisez
la roulette, cela devient un jeu
de stratégie en temps réel,
exigeant des aptitudes physiques
et mentales. » Une exigence
qu’atteste l’attelle au
poignet de Thompson, conséquence
d’une entorse lors
d’un tournoi qu’il a remporté.
Son projet est de populariser
ce sport grâce au Foosball
Club – un espace dédié au
nord de Londres et ses quatre
tables aux normes de la fédération
internationale de football
de table et fabriquées par
le leader italien Garlando.
« C’est la vitrine de ce sport,
poursuit-il. Dans certains
endroits, les conditions de jeu
sont déplorables, les poignées
des tables sont tordues, les
balles abîmées, les barres non
huilées et l’éclairage absent. »
Le babyfoot a sa propre
fédération et donc des joueurs
pros. Dans les années 80, un
championnat offrait un million
de dollars au champion, et en
tournoi les récompenses pouvaient
comprendre une Porsche
911. Dans le bar et le restaurant
du Foosball Club, les
écrans diffusent des vidéos
des stars du baby. Thompson
cite Robert Mares, un pro au
Colorado : « Si vous donnez
une guitare à quelqu’un, il n’en
4
Bloquez la
poignée pour
éviter la roulette
(interdite) à 360°.
Étape 1
Bloquez le ballon
avec les pieds posés
juste au-dessus
de la balle.
2
Placez le poignet sur
la poignée et déplacez
la balle latéralement
face au but.
3
Faites glisser le
poignet pour exécuter
la roulade arrière.
Prendre son pied : le Franco-
Britannique J-P Thompson,
fondateur du Foosball Club,
au nord de Londres.
verra le potentiel que s’il voit
quelqu’un en jouer. »
Le jeu vidéo Pac-Man met
fin à l’âge d’or du babyfoot,
mais le niveau pro résiste. Ses
règles clés incluent la victoire
au premier qui marque cinq
buts, la roulette est interdite,
un but encaissé donne droit
à engager, et la technique
demeure capitale comme l’illustre
le snake shot. Ce coup
qui augmente la puissance
d’un tir en faisant tourner la
poignée avec le poignet (voir
à gauche) a été popularisé par
le joueur américain Terry
Moorea et a contribué à raviver
l’intérêt pour le jeu.
En 2006, Thompson
conduit la toute première
équipe nationale britannique
aux championnats du monde
ITSF Bonzini en France :
« Nous découvrons un stade
avec 100 tables et plus de
500 participants. L’équipe ne
fait pas long feu, mais ce
stade a changé ma vie. »
Thompson quitte son emploi
d’analyste commercial et crée
un championnat de babyfoot
à Londres, fédérant une communauté
dynamique dans
toute la ville. En 2016, il
conseille Lionel Messi à l’occasion
d’une publicité de
chips Walkers Crisps, devenant
ainsi l’un des rares au
monde à avoir expliqué à l’Argentin
comment jouer au foot.
« Le babyfoot est une histoire
de passion et d’envie
de rendre justice au potentiel
du jeu, souligne Thompson.
Jouer comme un pro n’est
pas une fin en soi, mais la
maîtrise décuple le plaisir.
On en devient accro dès
qu’on y prend goût. »
foosballclub.co.uk
CHRISTINA LOCK STUART KENNY
88 THE RED BULLETIN
PERSPECTIVES
au programme
déjà disponible
GAMBLE
« Un film sur le vélo de
montagne »… Lâchez
les plus acharnés des
descendeurs en mode
no limit, et qu’est-ce
que vous obtenez ? De
la vitesse brute, une
bande-son percutante
et des spots vierges
qui ne le resteront pas
longtemps.
DUNCAN PHILPOTT, CHRISTIAN PONDELLA/RED BULL CONTENT POOL,
GASTON FRANCISCO/RED BULL CONTENT POOL, TETON GRAVITY RESEARCH
déjà disponible
THE LAST
ASCENT
Will Gadd de retour sur
le Kilimandjaro… Il y a
six ans, Will Gadd a
fait plusieurs premières
ascensions
des tours de glace
du Kilimandjaro.
Aujourd’hui, alors
que l’emblématique
calotte glaciaire de la
montagne disparaît
rapidement, il y retourne
pour faire une
dernière ascension.
déjà disponible
SKATE TALES
Pour certains, le skateboard est un mode de vie. Dans cette série, le skateur Madars Apse voyage
dans le monde entier pour faire du skate avec des gens qui poussent la culture du skateboard
à leur manière et pour apprendre d’eux.
déjà disponible
MAKE
BELIEVE
Le film Make Believe
célèbre les athlètes
qui allient imagination
et engagement, qui
ont choisi de vivre
leur vie d’une manière
particulière, de la
conception à la réalité,
et qui choisissent
de faire et de croire
en leurs rêves.
THE RED BULLETIN 89
MATOS
vélo
Pourvu que
ça roule !
Le vélo est l’une des pratiques les plus adaptées à
nos temps incertains. Voici une sélection de matos
que l’on vous souhaite d’utiliser en toute liberté.
Texte PATRICIA OUDIT
Pour les kings du single
BMC Fourstroke 01 LT TWO
Si les single tracks (monotraces), c’est votre truc,
que vous n’êtes accro ni au chrono ni à la perf,
mais que vous avez un gros niveau d’enthousiasme,
ce vélo vous permettra d’exceller lorsque le contrôle
et l’adhérence comptent autant que la puissance et
l’efficacité. 5 999 € ; fr-fr.bmc-switzerland.com
CÔTÉ VTT
Une montée…
MOUSTACHE Samedi 29 Trail 8
… ce n’est qu’une descente qui a mal tourné ! Grâce
à sa géométrie équilibrée et à sa cinématique de
suspension exclusive, ce Moustache est aussi à l’aise
en montée qu’en descente, aussi stable que maniable,
aussi fun qu’efficace. Et merci à son moteur Bosch
Performance Line CX. 5 999 € ; moustachebikes.com
Sac coule de source
CAMELBACK H.A.W.G. Pro 20
Plus de stress lors des sorties engagées.
Un nylon Ripstop protège ce sac-gourde
des potentiels dommages liés aux chutes
et autres égratignures de la nature. Une
durabilité maximale associée à une capacité
de stockage légèrement supérieure à
20 litres, suffisante pour vos essentiels.
169,99 € ; camelbak.com
Crâne au top
SMITH Mainline
C’est le tout premier casque intégral de la marque,
qui y a passé plus de deux ans de recherche et de
développement. Conçu en étroite collaboration avec
ses athlètes enduro, il est taillé pour les descentes
mouvementées, et offre une sécurité optimale et
un confort inégalé. 300 € ; smithoptics.com/fr
Sortez masqué
KENNY Ventury Phase 1
La phase 1 est la version la plus économique
du masque VENTURY. Elle comprend
le masque avec l’ensemble de ses
éléments techniques, et est livrée avec
une monture de couleur unie et un écran
iridium de série. Vous trouverez également
dans sa boîte une housse de protection.
89,95 € ; kenny-racing.com
90 THE RED BULLETIN
MATOS
vélo
Le choix ultime
CANNONDALE Scalpel Carbon LTD
Attaquer là où les autres ne peuvent pas. Accrocher
quand les autres glissent. Sa suspension est la plus
avancée jamais réalisée pour le cross-country. Suspension
révolutionnaire + géométrie agressive + poids plume
= vélo de XC ultime. 6 999 € ; cannondale.com/fr-fr
FABIO PIVA
THE RED BULLETIN 91
À FOND
DE GRAVEL
MATOS
vélo
Ride agressif
BMC URS 01 Two
Son cadre super-léger est conçu pour la compétition et sa géométrie Gravel optimisée pour
un pilotage moderne et agressif. Ce modèle présente un angle de chasse ouvert à 70 ° pour une
partie avant et un empattement longs, gages de stabilité. 6 499 € ; fr-fr.bmc-switzerland.com
Stabilité tous terrains
SPECIALIZED Diverge Sport Carbon
Ici, on a augmenté l’allonge du cadre, ouvert
l’angle de direction et accru le déport de fourche,
ce qui en fait un vélo extrêmement rassurant.
Une potence plus courte permet d’équilibrer la
longueur totale sur le vélo, rapprochant le poste
de pilotage pour conserver une direction agile
sur la route. 3 499 € ; specialized.com/fr/fr
La définition du confort
MOUSTACHE Dimanche 29.5
Grâce à un cadre aluminium haut de gamme,
et à un centre de gravité abaissé maximum, ce
modèle délivre une sensation de pur confort.
Sa fourche carbone et ses haubans absorbent
les vibrations. Quant au moteur, il peut délivrer
3 fois votre puissance et ce jusqu’à 600W.
4 499 € ; moustachebikes.com
Efforts optimisés
POLAR Vantage V2
Personnalisation des zones de fréquence cardiaque,
de vitesse et de puissance, test Leg
Recovery (récupération des jambes) pour comprendre
comment le corps réagit à l’entraînement :
un modèle multisport développé en collaboration
avec des athlètes de renom. 499 € ; polar.com
KingPin, kesako ?
CANNONDALE Topstone
Carbone Lefty 3
Il s’agit d’une technologie de suspension
révolutionnaire, pour une
conduite plus radicale sur les chemins
de terre et plus confortable sur
la route. Associée à des roues de
27,5’’ à haut volume, cela donne le
vélo le plus polyvalent et confortable
jamais conçu par la marque.
4 199 € ; cannondale.com/fr-fr
Pas de coup de la panne
SPECIALIZED S-Works Turbo Creo SL EVO
C’est l’un des vélos électriques les plus légers de
sa catégorie. Son cadre en carbone et son moteur
poids plume développant jusqu’à 240 watts d’une
assistance puissante et silencieuse. Et aucun
risque de tomber en panne avec ses quasi 130 km
d’autonomie maximale de sa batterie interne.
12 499 € ; specialized.com/fr/fr
92 THE RED BULLETIN
MATOS
vélo
No speed limit
JULBO Fury
Cette monture racée à l’écran cylindrique et
photochromique au large champ de vision taillé
pour la vitesse bénéficie d’un maintien total grâce
aux grips de nez et de branches. Ventilation optimale
du visage. S’adapte sous tous les casques.
95 € ; julbo.com
Haute énergie
SIDI Sixty
Pour fêter les soixante ans de la marque, un modèle
au design minimaliste favorisant l’aérodynamisme,
doté d’une semelle en carbone légère et résistante
qui fournit le maximum d’énergie à votre
coup de pédale. Le tout assorti d’un système de
fermeture renforcé par des velcros haute-sécurité.
339,95 € ; sidi.com
POUR LA
ROUTE
Aérodynamisme
Bluetooth
CUBE Litening C:68X SLT
carbon´n´prizmblack
Pas moins de 30 % de réduction de prise au vent :
c’est la promesse de ce cadre en carbone hightech
équipé d’un groupe sans fil mettant à portée
de doigts changement de vitesses précis et
freinage puissant. Son nouveau jeu de roues
complète l’aérodynamisme. 7 599 € ; cubebikes.fr
Armure antigel
ODLO Zeroweight Ceramiwarm
Thermorégulation et respirabilité supérieures
sont les maîtres-mots de cette veste qui protège
sans jamais compromettre la flexibilité.
Un vrai bonus que d’avoir la quantité de chaleur
nécessaire pour profiter du plein air et être
performant sans jamais se soucier du froid.
85 € ; odlo.com
Flex au top
CANNONDALE SuperSix EVO
Hi-MOD Disc Ultegra
Ses nouvelles bases arrière, son
collier intégré et sa tige de selle augmentent
la souplesse de 18 % par
rapport au cru précédent. Afin de
trouver l’équilibre entre légèreté et
aérodynamisme, ce modèle est doté
d’une nouvelle gamme de tubes au
profil tronqué réduisant la traînée.
5 299 € ; cannondale.com/fr-fr
Protection garantie !
GIRO Helios Spherical
Une conception sphérique à l’ergonomie parfaite,
façon « rotule », a été associée à un système optimisant
la redirection des forces en cas d’impact.
Au-delà de la protection avancée de la tête, quinze
aérations offrent une capacité de refroidissement
exceptionnelle. Rembourrage antimicrobien en
mousse. 249,95 € ; giro.com
THE RED BULLETIN 93
MATOS
vélo
Independance Day
CANNONDALE Adventure Neo 3 EQ
Une autonomie de 120 km pour une seule
charge : voici de quoi prendre le large sur un
vélo qui présente une belle alchimie entre fonctionnalité
et plaisir, confort et capacité. Avec
lui, même la vitesse devient stylée.
2 699 € ; cannondale.com/fr-fr
ÉLECTRIQUES
ET VILLE
Circuits courts
B’TWIN ELOPS 120 E
Il est tout équipé (porte-bagages,
garde-boue, éclairage intégré, etc.)
et conçu pour les déplacements
courts en ville (batterie à recharger
tous les jours). Moteur roue arrière
36 volts, 250 watts, avec un couple
de 35 Nm max. 799 € ; decathlon.fr
Aristo-vélo
RAYVOLT Ambassador
Vingt kilos et 250 watts d’une élégance sobre qui flirte avec le non conventionnel,
pour aboutir à un look hésitant entre rétro et le néo-classique :
on s’imagine parcourir fièrement la ville à son guidon, celui du plus
mythique modèle de la marque. 3 650 € ; rayvoltbike.com
Fixie à bon prix
B’TWIN Speed 500 ELOPS
Un look de single speed (une seule vitesse) mais avec les fonctions
utilitaires du vélo de ville. Des pneus larges avec une bonne accroche.
Un bon compromis urbain, agile, rapide et compatible pour une utilisation
fixie grâce à son moyeu flip/flop (en achetant pignon fixe + contre-écrou).
230 € ; decathlon.fr
94 THE RED BULLETIN
MATOS
vélo
L’urbain dopé
LE VÉLO MAD Le Sport
Il s’agit d’une conduite sportive, car portée
par une position vers l’avant pour le conducteur.
Quant au cadre fermé, la barre centrale et
le guidon droit, ils forment un ensemble racé.
Puissance : 250 watts, autonomie moyenne :
50 km. 1 790 € ; levelomad.com
VAE stylé
ELECTRA Navigator Go
Le tout dernier Beach Cruiser de
la marque. Son moteur central de
250 watts fournit une alimentation
fiable. Les pneus 26’’ x 2,8’’ contribuent
au confort, ainsi que ses freins
à disque hydrauliques avant et arrière
qui assurent des arrêts en douceur.
3 299 € ; electra.trekbikes.com
Le vélo du futur ?
CANYON Precede On
Designers et ingénieurs ont recherché la fonctionnalité maximale
pour un usage quotidien, et une circulation urbaine facilitée. Cela a fait
mouche puisque ce vélo a remporté le German Design Award 2021.
Le puissant moteur Bosch et la batterie intégrés au cadre rendent
le tout très esthétique. 4 299 € ; canyon.com
Vélotaf hybride
NAKAMURA E-Summit SUV
Le vélo de ville au cadre dynamique qui convient aux vététistes !
Son moteur central peut développer un couple de 80 Nm (Newton mètre)
permettant de s’attaquer aux côtes les plus raides sans effort. Petit plus :
sa déco réfléchissante et un allumage automatique des feux pour les
virées nocturnes. 1 799 € chez Intersport ; nakamura.fr
THE RED BULLETIN 95
MENTIONS LÉGALES
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Pour finir en beauté
Vous allez voir triple
Pour son dernier projet With or Without Snow, le speedrider français Valentin Delluc
réinvente avec humour sa spécialité (un mélange audacieux de vol et de ski).
En mal de neige, fin 2020, profitant des derniers beaux jours, il est parti voler entre
les massifs des Hautes-Alpes et la vallée des Écrins, jusqu’au lac de Serre-Ponçon.
Le voici qui arrive à destination, passant en mode ski nautique ! Vidéo sur redbull.com
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