DES IDÉES POUR UN AVENIR MEILLEUR INNOVATOR BY THE RED BULLETIN 01/2021
01 21
ÉDITION SUISSE 3,80 CHF
LA R
É VOLUTION
Le futur est déjà
dans nos voitures
THE
iX
INNOVATOR
ÉDITORIAL
CONTRIBUTEURS
Robert Ormerod
Le photographe écossais a
travaillé pour The Guardian et
National Geographic, entre
autres. Sa fascination : les fusées.
En toute logique, il était le mieux
placé pour suivre et documenter
le travail passionné des Danois
de Suborbitals dans leur hangar.
PAGE 58
BONJOUR DEMAIN !
Pouvons-nous arrêter le changement climatique
? Vaincre le cancer ? Mettre fin à la faim
et à la pauvreté ? « Oui », affirment trente personnalités
et experts de renom dans notre sujet
de couverture, dont Bill Gates, Elon Musk ou
encore le fondateur de BioNTech, Uğur Şahin.
Ils démontrent par des faits, des statistiques et
des études surprenantes dans quelles mesures
le futur sera optimiste et réjouissant, page 44.
MERCEDES-BENZ AG (COVER)
Werner Jessner
Notre rédacteur a appris des
choses étonnantes lors de son
entretien avec Fredrika Klarén,
responsable du développement
durable de la marque de voitures
Polestar : « Seules l’honnêteté et
la transparence dans l’industrie
automobile ont un avenir », ditelle.
PAGE 30
Construire dans son jardin une fusée capable
d’atteindre l’espace semble être un exploit digne
d’un film hollywoodien. Mais c’est pourtant le
tour de force couronné de succès accompli par
une poignée d’ingénieurs autodidactes du
Danemark, page 58. Leur devise est simple :
« Ne cherchez pas d’excuses, trouvez des
solutions. »
Bonne lecture !
La Rédaction
INNOVATOR 3
CONTENUS
BULLEVARD
8
Plus vite sur l’eau
Un groupe de jeunes ingénieurs
veut battre le record de vitesse
à la voile.
16
Au volant de la VR
Une start-up allemande transforme
les trajets en voiture en
expérience virtuelle.
10
En toute autonomie
Cette start-up autrichienne
vous invite à cultiver votre
propre source de protéines…
17
Booster les neurones
Musclez son cerveau à être
heureux et à se détendre, c’est
simple comme bonjour.
12
Bécane futuriste
Une moto électrique aux lignes
épurées, conçue et voulue par
les étudiants.
18
Boîte fraîcheur
Grâce à ces ingénieuses livraisons,
cuisiner devient aussi
plaisant que la dégustation.
14
Les gondoles à Munich
Celles-ci se déplaceront suspendues
à des rails aériens.
C’est le tramway de demain !
GUIDE
90
92
94
SMART FASHION
Chaleur intérieure
Cette veste chauffante ne laissera
personne de marbre.
AGENDA
Le grand retour
Des conférences à voir sur
place, et en ligne.
CONCOURS
Place aux idées
Red Bull Basement promeut
les jeunes leaders d’opinion.
96
98
CHRONIQUE
Réjouissons-nous !
Les bonne surprises qui nous
attendent si nous parvenons
à sauver la planète.
COUP DE PROJECTEUR
Le labo du bout du
monde
Les chercheurs de cette
base au pôle Sud dévoilent
les secrets de l’univers.
58
SUBORBITALS
Rocket Science
Ces astronautes amateurs
de Copenhague
veulent s‘envoler dans
l‘espace avec une fusée
faite maison.
4 INNOVATOR
INNOVATOR
REPORTAGES
20
LES
AUTOMOBILES DU FUTUR
Permis de conduire
Charge rapide, conduite automatisée,
électriques, propres… Les atouts
des nouvelles arrivantes.
30
POLESTAR
Fredrika Klarén évoque les enjeux de
l’industrie automobile en matière de
développement durable.
La transparence est de mise
38
L’AVENIR
44
UN
58
LA
68
LE
76
START-UP
DE LA MOBILITÉ
Voir plus loin
Comment nous déplacerons-nous d’ici
quelques années ? Un essai sur l’évolution
de nos habitudes motorisées.
MONDE MEILLEUR
30 raisons d’être optimiste
Ces nombreux experts nous donnent
autant de mobiles valables pour aborder
l’avenir avec espoir et sourire.
TÊTE DANS LES ÉTOILES
Fusées artisanales
Comment ces amateurs passionnés
se sont appliqués à réaliser leurs
rêves et toucher les étoiles.
REPENTI DE LA F1
Nico Rosberg
Pourquoi et comment le champion
du monde de Formule 1 veut aider
l‘e-mobilité à monter sur le podium.
L’avenir, c’est eux
Robots-sauveteurs ou psychanalyse
en numérique : sept idées (suisses)
pour un monde meilleur.
ROBERT ORMEROD
82
ENTREPRENEURIAT
Psychologie inversée
Sophia Amoruso, qui a inspiré la série
Girlboss, sur les règles à ne surtout pas
respecter afin de lancer sa start-up.
INNOVATOR 5
INNOVATOR
BULLEVARD
IDÉES
POUR UN
MONDE
MEILLEUR
JOHANNES LANG
INNOVATOR 7
BULLEVARD
M O B I L I T É
UNE FUSÉE SUR
LE LAC LÉMAN
Une équipe de jeunes ingénieurs lausannois
veut battre le record de vitesse à la voile,
fixé encore aujourd’hui à 121 km/h. Avec une
vitesse de 150 km/h, leur bolide pourrait
ouvrir une brèche dans le monde du transport
maritime.
En novembre 2012,
l’Australien Paul Larsen
est entré dans l’Histoire en
inscrivant, à bord du voilier
Vestas Sailrocket 2, œuvre de
l’architecte naval Malcolm
Barnsley, le record du monde
de vitesse à la voile : 21 km/h,
soit 65 nœuds. Une performance
restée invaincue
depuis, en dépit des nombreuses
tentatives effectuées
au niveau international.
AUTRE RECORD,
AU T R E C O N C E P T
C’était sans compter sur l’audace
et l’ingéniosité de trois
jeunes étudiants de l’École
Polytechnique Fédérale de
Lausanne : Xavier Lepercq,
Mayeul van den Broek et
Benoît Gaudiot (25 ans en
moyenne) sont bien décidés
à faire de leur prototype le
voilier le plus rapide au
monde. Et à battre le record
de Larsen en 2022. L’objectif
du projet SP80 ? Atteindre
150 km/h par la seule force
du vent, soit 80 nœuds (un
chiffre encore inédit dans
le monde de la voile et qui
a inspiré le nom du projet).
Pour cela, nos trois jeunes
pionniers se sont inspirés
L’objectif du SP80
est de relever le
record de vitesse
à la voile à 150 km/h
en 2022.
8 INNOVATOR
INNOVATOR
L’équipe du projet
SP80 : Mayeul van
den Broek, Xavier
Lepercq et Benoît
Gaudiot (de g. à dr.).
GUILLAUME FISCHER SP80 AREK PIATEK JOHANNES LANG
« NOUS VOULONS
BRISER LES
CODES DE LA
NAVIGATION
À LA VOILE. »
du kitesurf : « Au lieu d’être
poussé par une voile, le
bateau sera propulsé par
une aile de kite », explique
Mayeul van den Broek,
manager du projet SP80.
Un surcroît considérable
de vitesse, auquel viennent
s’ajouter les autres atouts de
l’engin : une coque de trimaran
profilée pour la vitesse,
flanquée de deux ailerons
superventilants pour optimiser
la stabilité. Un point crucial,
selon van den Broek :
« En travaillant sur la stabilité,
le succès sera assuré. »
Une autre particularité du
SP80 est un système qui
empêche le phénomène de
« cavitation » : c’est-à-dire des
petites bulles d’air qui se forment
dans l’eau au passage
du bateau. Le prototype lausannois
peut ainsi glisser sur
l’eau sans (presque) aucune
résistance.
LABO SUR L’EAU
Après le lancement officiel
du projet en 2018, l’équipe du
SP80, composée d’étudiants
et d’ingénieurs, a planché
pendant de longs mois pour
créer un premier prototype,
testé actuellement sur le lac
Léman. De taille réduite (le
bateau final fera le double
de sa taille), il remplit pour
l’instant tous les espoirs de
ses créateurs, qui veulent
commencer la construction
du prototype en taille réelle
(9 × 5 mètres) au printemps
de cette année. Les premières
tentatives pour battre le
record de vitesse à la voile
sont prévues pour 2022.
TRANSPORT ÉOLIEN
Le projet ne va pas simplement
profiter au monde
du sport nautique : « Nous
voulons briser les codes
de la navigation à la voile,
explique van den Broek,
mais aussi repousser les
limites de la force du vent
comme seule source
d’énergie et explorer les
futures utilisations qu’on
pourra en faire. » Ces voiliers
ultra rapides constituent
un énorme potentiel pour
le transport maritime, un
secteur qui a grand besoin
de se « durabiliser », et qui
pourrait bientôt profiter des
nouvelles idées du SP80.
sp80.ch
INNOVATOR 9
BULLEVARD INNOVATOR
NUTRITION
FABRIQUE
À VERS
S’ouvrir à de nouveaux horizons
gustatifs protéinés ? Une start-up
autrichienne propose un kit maison
pour élever ses propres vers de farine.
C’est une vérité difficile
à regarder en face : la
manière dont nos aliments
sont produits est tout sauf
durable. Que ce soit l’usage
abusif d’engrais azotés, les
émissions de CO ²
générées par
l’élevage intensif ou les tonnes
de denrées consommables
jetées chaque année à la poubelle
(75 kilos par habitant),
notre alimentation est devenue
un véritable désastre écologique.
Pourtant, il existe des
solutions : c’est ce que nous
dit Katharina Unger, jeune
Autrichienne vivant à Hong-
Kong et pour qui la viande
de l’avenir sera fournie par…
les vers. Plus exactement les
larves du Ténébrion meunier,
ou vers de farine. Son argument
: il faut dix kilos de nourriture
pour produire un kilo de
viande de bœuf, et deux seulement
pour produire un kilo
d’insectes. D’autant plus que
produire des vers de farine
émet vingt-cinq fois moins de
CO ²
que produire de la viande
de bœuf. Des inconvénients ?
Aucun. La seule raison qui
éloigne (pour l’instant) de nos
assiettes ces petites créatures
bourrées de protéines, c’est
leur aspect peu appétissant.
ADOPTE UN VER
Une aversion irrationnelle
que Katharina Unger est bien
décidée à déconstruire en
proposant, par le biais de
sa start-up LivinFarms, une
station d’élevage pour usage
privé : le Hive Explorer. Dans
une petite caisse chauffée et
ventilée, de la taille d’une
boîte à chaussures, les futures
larves grandissent dans les
Katharina Unger, fondatrice
de LivingFarms :
« Les insectes sont les
aliments du futur. »
meilleures conditions et se
délectent des épluchures de
légumes fournies par leur
« fermier ». Au bout de trois
mois, les vers de farine sont
prêts à être consommés (après
au moins cinq heures au
congélo). LivinFarms propose
aussi de délicieuses recettes
de pancakes et « pain aux
vers ». Une idée qui tombe à
pic, alors que les pays européens
ont reconnu, il y a trois
ans, les insectes comestibles
comme aliment à part entière.
livinfarms.com
Autonomie en protéines : mini-ferme
à larves Hive Explorer, 127 CHF.
LIVIN FARMS FLORIAN OBKIRCHER JOHANNES LANG
10 INNOVATOR
BULLEVARD INNOVATOR
E-MOBILITÉ
TONNERRE
ÉLECTRIQUE
Ses pièces ne sortent
pas de l’usine mais de
l’imprimante 3D, elle peut
faire des pointes à 130 km/h
et possède une autonomie
de 315 kilomètres. Sa batterie
est refroidie par de l’huile
de silicone et elle est capable
de récupérer l’énergie perdue
dans les phases de freinage
pour la réutiliser.
Ce tonnerre électrique
est le résultat du projet de
recherche Ethec auquel ont
participé seize étudiants de
l’ETH de Zurich. Leur objectif
est limpide : concevoir la
moto du futur.
UN PLEIN TOUS LES
315 KILOMÈTRES
L’un des premiers problèmes
à résoudre, selon Tobias
Oesch, responsable technique
du projet, était de « remédier
au problème de l’autonomie
». L’équipe a donc
TOBIAS OESCH
RESPONSABLE
TECHNIQUE
E THEC
« Les e-bikes
sont prédestinées
à l’usage
urbain : on va
bientôt en voir
de plus en plus
dans nos villes. »
mis au point une solution
aussi inédite que maligne :
« Nous avons réussi à récupérer
l’énergie perdue dans
les phases de freinage et de
décélération, soit 75 % de
l’énergie totale, grâce à un
second moteur intégré à
la roue avant. » Le résultat,
c’est une autonomie de
315 kilomètres, ce qui fait
de l’Ethec l’une des motos
électriques les plus autonomes
du monde.
Autre innovation de la
maison : l’utilisation d’huile
de silicone pour refroidir la
batterie, une solution plus
efficace et plus durable. Forts
de ces succès, les étudiants
continuent de plancher sur
leur projet. Si la date de sortie
sur le marché est encore
incertaine, les clients intéressés,
eux, sont déjà très nombreux.
ethec.ethz.ch
Des étudiants de l’ETH
de Zurich nous montrent
à quoi pourrait ressembler
la moto du futur :
fabriquée à l’imprimante
3D, concentré d’énergie
et d’autonomie, voici la
moto Ethec.
Économe, durable
et visionnaire : le
projet universitaire
Ethec a de l’avenir.
ETHEC/SIMON LEUTWILER AREK PIATEK JOHANNES LANG
12 INNOVATOR
© Jean Nouvel, Gilbert Lézénès, Pierre Soria et Architecture-Studio / Adagp, Paris, 2021
ALPHATAURI.COM
BULLEVARD
MOBILITÉ
GONDOLES
POUR TOUS
Tramway haut de gamme : les ingénieurs
de la société Ottobahn de Munich
veulent donner un nouveau souffle au
trafic urbain grâce à leur système.
MARC
SCHINDLER,
40 ANS
PD G
OTTOBAHN
Depuis 2019,
l’ingénieur fait
avancer le projet
avec une équipe
de développeurs
informatiques
et d’ingénieurs
en mécanique.
Il y a de plus en plus de
monde dans nos villes,
et des moyens de transport de
plus en plus variés : voitures,
camions, vélos, trams, trottinettes,
e-scooters et peut-être
bientôt des véhicules autonomes
?
« Nous devons passer au
troisième niveau. Il y a là-haut
un espace inutilisé », déclare
Marc Schindler, PDG de la
start-up Ottobahn (il s’autoqualifie
d’agent facilitateur).
L’entreprise munichoise
a développé un concept de
transport entièrement nouveau
: des cabines en hauteur
emmènent les usagers
jusqu’à leur destination sans
aucun arrêt. Ce mix entre
transport individuel et réseau
ferroviaire public combine
les avantages de ces deux
formes de mobilité. Les gondoles
avancent sur des rails à
une hauteur de 5 à 10 mètres,
avec un bon rendement énergétique.
Une fois arrivées à
destination, elles descendent
au niveau de la rue.
« Les véhicules autonomes,
déclare Marc Schindler, ne
sont pas capables de résoudre
le problème des villes encombrées.
Après tout, le système
de circulation routière inclut
les cyclistes et les piétons
en plus des voitures. » Notre
concept est simple.
« IL FAUT PASSER
AU TROISIÈME NIVEAU.
IL Y A DE L’ESPACE
INUTILISÉ LÀ-HAUT. »
Selon les plans de Marc Schindler, les
nacelles seront suspendues aux rails,
à une hauteur de cinq à dix mètres.
OTTOBAHN GMBH MARC DECKERT JOHANNES LANG
14 INNOVATOR
INNOVATOR
Xerem fugia cus
am etur ariatem
quidicit ut volupta
nisit ex ent vit, aut
moluptas sequia
Ces variables sont éliminées
dans la conduite ottonome en
altitude. Cela signifie que les
calculs se focalisent essentiellement
sur la ponctualité
des cabines et le trajet jusqu’à
leur destination, rapidement
et en toute sécurité.
Feu vert : alimenté par des
énergies renouvelables,
Ottobahn doit être exempt
d’émissions.
PROBLÈMES SUR LE TERRAIN
Ottobahn a déjà réalisé un
prototype de télécabines en
mouvement dans les locaux
de 300 m² de l’entreprise.
Prochaine étape : concevoir
un tracé urbain viable. La
start-up se voit comme un
artisan concevant des softwares,
agrémenté d’une
expertise en ingénierie non
négligeable. Pour Marc
Schindler, cependant, le plus
grand défi ne réside ni dans
la technologie ni dans le logiciel,
mais dans la mise en
œuvre sur le terrain. « Il faudra
convaincre les citadins
qu’une voie de tram aérienne
sera accessible tout près de
chez eux. »
En s’invitant dans l’espace
urbain du troisième niveau,
la start-up allemande a déjà
su relever des défis bien plus
audacieux, et attiser la curiosité
des futurs usagers.
ottobahn.de
Quatre passagers peuvent
prendre place dans une gondole.
Certaines seront réservées au
transport de marchandises.
Les passagers commandent un
Ottobahn via l’application. La
navette à conduite autonome
vient les chercher à l’heure.
INNOVATOR 15
BULLEVARD INNOVATOR
Le trio gagnant
Holoride
(de gauche à
droite): Daniel
Profendiner,
Marcus Kühne
et Nils Wollny.
RÉALITÉ VIRTUELLE
AU VOLANT DE
VOS RÊVES
Conduire une voiture et voyager
dans l’espace ou au temps des dinosaures
: Holoride ouvre des horizons
insoupçonnés aux passagers.
Les créateurs d’Holoride
se sont bien partagés les
tâches : Daniel Profendiner
a défini les algorithmes des
voitures autonomes, Marcus
Kühne a développé plus d’une
centaine de solutions brevetées
pour Audi, et le PDG Nils
Wollny est considéré comme
un expert hors-pair du numérique.
L’idée développée par
le trio, qui s’est rencontré
chez Audi (laquelle détient
une part minoritaire de Holoride)
est simple : le voyage en
voiture doit aussi être un plaisir
pour les passagers. L’ordinateur
de bord et les lunettes
RV sont connectés via WiFi ou
Bluetooth. Le trajet en voiture
fait partie du jeu. Wollny :
« Notre technologie peut lire
les données de la voiture :
position, accélération, comportement
dans les virages. »
Autrement dit, l’environnement
du jeu évolue en
fonction de la voiture. C’està-dire
que quand elle effectue
un virage à gauche, les éléments
qui vous entourent virtuellement
vont se déplacer
avec vous. Ou si vous freinez
devant un passage piéton, il
est fort probable de voir un
À travers la galaxie grâce à la RV : Holoride
transforme le trajet en voiture en aventure.
poussin bleu électrique traverser
devant vous. S’il se met
à pleuvoir, les détecteurs de
la voiture traduiront les vraies
gouttes par une pluie de
météorites virtuelles sur votre
vaisseau spatial. Le software
a été développé par l’équipe
d’Holoride, et les contenus
graphiques sont l’œuvre des
studios d’Hollywood.
Wollny : « C’est d’abord
du divertissement. Mais j’y
vois, à terme, une finalité
éducative. » La faisabilité
technique a été confirmée
par les constructeurs Audi,
Porsche et Mercedes.
holoride.com
HOLORIDE WOLFGANG WIESER JOHANNES LANG
16 INNOVATOR
BULLEVARD INNOVATOR
BRAINBOOST WOLFGANG WIESER JOHANNES LANG
SANTÉ MENTALE
CERVEAU
HIGH TECH
La technologie de pointe au service de
notre matière grise : le concept innovant
de Brainboost, start-up basée à Munich,
est simple : booster nos capacités
mentales… pour nous rendre, à long
terme, plus heureux et plus sains.
TOBIAS (HAUT)
& PHILIPP
HEILER
FONDATEURS DE
BRAINBOOST
Pour les deux
frères, le fitness
mental est la clé
d’une société plus
heureuse.
« Tout le monde devrait
pouvoir être heureux grâce
à son cerveau » : c’est la devise
de Philipp Heiler. Ce médecin
de 31 ans a fondé avec son frère
Tobias, spécialiste des sciences
du sport, une start-up dont le
nom est tout un programme :
Brainboost.
Plus précisément, une meilleure
utilisation de notre cerveau,
soit l’optimisation de ses
capacités, est censée contribuer
à notre bien-être et même soulager
les troubles de l’attention et
la dépression : parvenir à mieux
se concentrer, à mieux dormir,
à traiter plus rapidement des
informations négatives… Autant
de conditions qui requièrent un
entraînement mental que Brainboost
a développé en utilisant
une technologie de pointe. Un
peu comme de la programmation
neuro-linguistique, mais assistée
par ordinateur : «L’entraînement
nous apprend à modifier
la façon dont le cerveau fonctionne
», résume Tobias Heiler.
Première étape : on analyse
l’activité cérébrale au moyen
d’un EEG, d’un questionnaire
et d’un examen médical afin
d’établir un programme
« Que la force soit avec toi » :
ces petites voitures se déplacent
par la force de la pensée.
d’entraînement sur mesure.
Ensuite, place aux exercices :
l’activité cérébrale est restituée
en direct, grâce aux électrodes
placées sur la tête, sous forme
de neuro- feedback : une petite
voiture avance lorsque certaines
zones sont activées (par
exemple, si l’on arrive à se détendre),
d’autres activités sont
restituées sous forme graphique
ou par le volume sonore d’une
chaîne hi-fi. Le cerveau, qui
fonctionne à la carotte, est donc
motivé pour intégrer certains
schémas de fonctionnement.
Le cœur du projet Brainboost,
c’est la dimension inconsciente
du processus. Évidemment,
cela demande de
l’engagement : 15 à 30 séances
d’une heure (au QG de l’entreprise,
à Munich) à 96 CHF sont
nécessaires pour « hacker » son
cerveau en douceur et commencer
une nouvelle vie, plus heureuse
et moins… prise de tête.
brainboost.de
Montre-moi
comment tu penses :
les électrodes analysent
en direct l’activité
du cerveau.
INNOVATOR 17
BULLEVARD INNOVATOR
Impossible à rater,
même pour les
débutants : salade
Tex Mex version
HelloFresh.
NUTRITION
TOUT EST
DANS LA
BOÎTE
La start-up berlinoise
HelloFresh redonne le goût
de cuisiner sain et varié.
Faire la cuisine, quand
on n’a pas forcément
deux heures de temps libre
par jour, ça peut vite devenir
une corvée : trouver une
idée, chercher la recette sur
Internet, acheter les ingrédients
au supermarché, pour
y retourner juste après parce
qu’on a oublié les œufs la
première fois… Résultats des
courses : on finit souvent le
soir devant le sempiternel
plat de pâtes préparé à la
va-vite. Pourtant, cuisiner
frais et varié, c’est bien plus
qu’une nécessité : ça devrait
aussi être un plaisir. C’est
de ce constat que sont partis
les Allemands Dominik
Richter, Jessica Nilsson et
Thomas Griesel lorsqu’ils
ont créé Hello Fresh en 2011.
Leur concept était ni plus
ni moins de « révolutionner
l’art de manger », avec une
idée très pragmatique : on
vous livre à la maison des
idées de repas, tous les ingrédients
dans les bonnes quantités,
les recettes détaillées,
et à vous de jouer !
Un concept simple qui rappelle
les meubles à monter
soi-même, et qui rencontre
un succès fou : il suffit de
commander en ligne ou sur
l’appli les recettes choisies
pour se faire livrer là où on
veut, quand on veut, des
ingrédients frais et locaux
dont les proportions nécessaires
ont été calculées pour
vous à l’avance. Il vous faut
vingt grammes de beurre
DOMINIK
RICHTER
& THOMAS
GRIESEL
FONDATEURS
DE HELLOFRESH
« Cuisiner sain
et varié, c’est
possible ! Sans
devoir courir au
supermarché
pour acheter
des produits
frais. »
pour une recette ? Votre
boîte contiendra exactement
20 grammes. Autre avantage,
selon Dominik Richter,
co- fondateur de Hello Fresh :
« On évite ainsi le gaspillage
alimentaire »… et les
improbables repas de fin de
week-end cuisinés à base
des restes de la semaine. Des
économies, donc, mais surtout
une économie durable,
puisque HelloFresh mise sur
la qualité et la régionalité
des produits, ainsi que sur
des emballages entièrement
recyclables.
UN SUCCÈS DURABLE
Dix ans après sa création,
HelloFresh compte cinq
millions d’utilisateurs dans
quatorze pays (dont la
Suisse, depuis 2016). Après
les particuliers, la start-up
vise à présent le marché des
entreprises, en proposant
des distributeurs automatiques
de repas, remplis de
petits plats sains et variés.
HelloFresh en Suisse avec
les recettes en français :
hellofresh.ch
HELLO FRESH FLORIAN OBKIRCHER JOHANNES LANG
18 INNOVATOR
La nouvelle
Leasing à 0.9% *
Passez dès maintenant au tout
électrique
La nouvelle
Cette offre est valable pour les contrats de vente conclus entre le 1.3 et le 30.4.2021. Valable uniquement sur les véhicules neufs et les véhicules
en stock importés par AMAG Import SA avec financement par AMAG Leasing SA. Valable uniquement sur les véhicules entièrement électriques
et les véhicules hybrides rechargeables. Uniquement pour les clients privés. Exemple de calcul avec prix d’achat: CHF 33’200.–. Taux d’intérêt
annuel effectif du leasing: 0.9%, durée: 48 mois (10’000 km/an), acompte spécial de 20%: CHF 6040.–, mensualité de leasing: CHF 229.–/mois,
hors assurance casco complète obligatoire. L’octroi d’un crédit est interdit s’il entraîne le surendettement du consommateur. Sous réserve de
modifications. Recommandation de prix sans engagement de l’importateur AMAG Import SA.
L’AVENIR N’EST PLUS
CE QU’IL ÉTAIT : LES
NOUVEAUX CONCEPTS
EN MATIÈRE DE CONDUITE
AUTOMOBILE NOUS
OBLIGENT À REPENSER
L’IDÉE MÊME DE VOITURE.
SÉDUISANTE
ALTERNATIVE
CONSTRUCTEUR
20 INNOVATOR
Hydrogène extrême : l’Hyperion
XP-1 alimenté par une pile à
combustible peut atteindre
355 km/h et possède une
autonomie de 1 600 km.
INNOVATOR 21
DEMAIN
MERCEDES
VISION AVTR
Le nom laisse penser que
ce modèle pourrait apparaître
dans le prochain épisode
d’Avatar. Au lieu d’un
volant et de pédales
conventionnelles, vous
contrôlez le véhicule via
une unité de commande
centrale. Les fonctions de
l’ancien tableau de bord
sont projetées sous forme
d’icônes sur la paume de
votre main.
TENDANCE
TEMPS DE CHARGEMENT
CONSIDÉ RABLEMENT RÉ DUIT
L’époque où l’on voyait les
conducteurs de voitures électriques
se morfondre aux stations
de recharge est révolue.
Grâce à la technologie 800
volts, l’attente se comptera
désormais en minutes plutôt
qu’en heures.
CONSTRUCTEUR
22 INNOVATOR
ACTUEL
FORD
MUSTANG
MACH-E
Traction arrière ou
intégrale, 198 à
258 ch, autonomie
de 400 à 610 km
selon le modèle :
le premier SUV tout
électrique de Ford.
Au-delà des données
techniques,
la voiture au logo
de cheval brille par
ses idées innovantes
comme un
second coffre à
l’avant, un écran
central tactile de
39 cm, un record,
et la reconnaissance,
via Bluetooth, du
smartphone de son
propriétaire comme
clé : la Mustang reconnaît
son conducteur
et déverrouille les
portes. Pour
démarrer, on n’a
qu’à appuyer sur
un bouton.
ACTUEL
BMW
IX3
L’utilisation quotidienne
d’une voiture
électrique tient à
son autonomie et à
son temps de chargement.
La batterie
du nouvel iX3 a une
densité énergétique
de 20 % supérieure
à celle des modèles
précédents, ce qui
signifie qu’elle est
plus petite et plus
légère. L’autonomie
est toujours de 460
km, ce qui convient
à un usage quotidien.
La batterie
haute tension peut
être rechargée à
80 % en 34 minutes
tandis que 10 minutes
de recharge
suffisent pour une
autonomie allant
jusqu’à 100 km.
Puissance : 286 ch,
vitesse de pointe
limitée à 180 km/h.
INNOVATOR 23
DEMAIN
HYPERION
XP-1
Une start-up californienne
habille la technologie de
l’hydrogène avec les atours
d’un hypercar. 1 031 kg, des
supercondensateurs
à charge et décharge
rapides au lieu d’une batterie
tampon, du carbone,
du titane. La production
doit débuter en 2022.
TENDANCE BATTERIE
À COMBUSTIBLE
À bord, l’hydrogène est converti
en énergie électrique, mais le
reste fonctionne comme dans
les voitures électriques d’aujourd’hui
– mais sans une batterie
lourde et volumineuse,
ce qui offre des performances
d’un autre niveau. Et de la
vapeur d’eau plutôt que du
CO ² s’échappe du véhicule.
CONSTRUCTEUR
24 INNOVATOR
HIER
MERCEDES
GLC F-CELL
Déjà terminé : après
avoir réalisé 3 000
exemplaires, la production
de la seule
voiture de série européenne
équipée
d’une pile à combustible
s’est récemment
arrêtée.
L’autonomie d’environ
300 km étaitelle
trop faible ? Le
réseau de stationsservice
à hydrogène
est-il trop
réduit pour remporter
un succès mondial
? Ou alors les
batteries ont-elles
fait un tel pas en
avant qu'elles ont
supplanté les piles
à combustible complexes
des voitures
électriques conventionnelles
? Probablement
une combinaison
de ces trois
facteurs.
ACTUEL
HYUNDAI
NEXO
Trois réservoirs aux
parois de 4,5 cm
d’épaisseur logés
sous le plancher du
coffre et sous la
banquette arrière
contiennent l’hydrogène
pressurisé à
700 bars (!). Les
réservoirs pleins,
cette Hyundai (163
ch) peut parcourir
jusqu’à 666 km, soit
beaucoup plus que
la plupart des
E-SUV conventionnels
de cette catégorie.
Comme la
pile à combustible
a besoin d’un air
extrêmement
propre, les microparticules
sont
retenues par un
filtre à haute performance.
L’air
extérieur est donc
plus propre après
qu’avant !
INNOVATOR 25
ACTUEL
CUPRA
EL-BORN
La deuxième
marque sportive de
Seat présente sa
première voiture
électrique, la El-
Born, qui met l’accent
sur le côté
amusant de l’emobilité.
Sièges
baquets et volant
sport, traction
arrière, couleurs
cuivre et noir pour
une touche dynamique
: fabriqué
à Zwickau, en Allemagne,
l’Espagnol
montre dès le départ
comment il
faut faire. Comme
ses frères, le
proche parent de
la VW ID.4 et de la
Skoda Enyaq est
basé sur le système
modulaire e-drive
du groupe Volkswagen
et permet une
autonomie de 500
km avec ses 204 ch.
ACTUEL
SKODA
ENYAQ IV
Les Tchèques ont
toujours été les
maîtres des détails
intelligents. Pensons
au compartiment
pour parapluie
intégré dans la portière
du conducteur.
Comment faire
l’équivalent dans
le numérique ? Deux
exemples : la température
intérieure
peut être contrôlée
à distance via un
smartphone. Chaud,
froid ? Bien tempé-
ré ! Ou encore :
un assistant de
manœuvre dans la
portière réagit si
vous voulez sortir
au moment où un
cycliste passe et
vous prévient. Le
premier SUV électrique
de Skoda ressemble
au VW ID.4,
avec une puissance
maximale de 204 ch
et une autonomie
allant jusqu’à
510 km.
26 INNOVATOR
DEMAIN
RENAULT
EZ-GO
Le modèle vient sans
l’habitacle traditionnel
et offre de la place pour
six personnes qui entrent
confortablement par une
ouverture frontale et sans
obstacle grâce à une
rampe. La commande
électrique est située dans
le panneau du plancher.
Champ d’application :
navette autoguidée dans
les pôles urbains.
TENDANCE
CONDUITE
AUTOMATISÉE
Ces dernières années, l’expérience
des systèmes de pilotage
et de contrôle a été progressivement
acquise. Dans
le projet en cinq étapes vers
une conduite totalement autonome,
les premiers modèles
de niveau 3 arriveront ces
jours-ci. Les voitures se
dirigent, accélèrent et freinent
maintenant de manière autonome
pendant une période
déterminée. Le conducteur
n’intervient que si le système
détecte un problème.
CONSTRUCTEUR
INNOVATOR 27
3 RAISONS DE CONDUIRE ÉLECTRIQUE
1. Les voitures électriques sont passées à l’âge adulte
Les problèmes de jeunesse tels qu’autonomie
insuffisante, temps de charge interminables
ou systèmes de chauffage sousdéveloppés
ont été en grande partie réglés.
La voiture électrique peut désormais
compter sur ses points forts : accélérations
rapides, émission sonore réduite et
conscience tranquille.
ACTUEL
VOLVO
XC40 RECHARGE
Le premier SUV entièrement
électrique de
Volvo affiche un couple de
660 Nm. Les connaisseurs
savent ce que cela signifie :
le XC40 passe de zéro
à 100 km/h en moins de
cinq secondes. La capacité
de remorquage autorisée
est de 1 500 kg. C’est suffisant
pour une remorque de
bateau ou de chevaux, ou
pour une caravane.
2. L’infrastructure va de l’avant
Fini le temps où il fallait péniblement
chercher les stations de recharge. Il
existe plus de 3 600 bornes de recharge
électrique en Suisse, soit autant que de
stations-service. Peur de rester en panne ?
Tellement 2020 !
3. Les voitures électriques permettent d’économiser de l’argent
Les voitures électriques sont moins chères
que les moteurs à combustion tant à
l’achat qu’à l’exploitation, surtout si vous
produisez votre propre électricité avec
un système photovoltaïque et que vous
chargez votre véhicule via une boîte murale.
Les coûts de réparation et d’entretien
sont aussi moins élevés. Sans oublier les
subventions !*
LA FACTURE
*Aide à l’achat d’une voiture électrique dans les cantons
de Thurgovie, du Tessin, et du Valais
pour l’achat d’une Volvo XC40 Recharge avec 300 kW (408 ch)
Prix catalogue
59 500 CHF
Rabais disponibles dans les cantons suivants :
Thurgovie
2 000 CHF
Valais
Tessin
3 500 CHF
4 000 CHF
Au moment de la mise sous presse, les entrepreneurs semblent pouvoir bénéficier de
conditions intéressantes : dans le canton de Bâle-Ville, par exemple, ils sont autorisés
à percevoir une prime d’investissement supplémentaire de l’État de 20 % sur l’achat,
ce qui signifie que la Vovlo XC 40 Recharge peut-être achetée pour 54 500 CHF
directement chez le concessionnaire. Il vaut vraiment la peine de se pencher sur
ces subventions, qui évoluent en fonction des courants politiques.
CONSTRUCTEUR
28 INNOVATOR
ÉTUDE DE CAS
Inventé au 19 ème
siècle. Optimisé
pour le 21 ème .
Au 19 ème siècle, deux scientifiques ont inventé séparément le
moteur à induction à courant alternatif. Aujourd’hui, il s’agit d’un
composant couramment utilisé en robotique. Comment sommesnous
arrivés à ce point et comment les ingénieurs modernes
peuvent-ils continuer à améliorer sa conception ?
en savoir plus
comsol.blog/induction-motor
Le logiciel COMSOL Multiphysics® est utilisé pour la conception et la simulation
des composants et des procédés dans tous les domaines de l’ingénierie, de la
fabrication et de la recherche.
Fredrika Klarén
à Göteborg devant
le siège suédois de
Volvo, la marque
mère de Polestar.
30 INNOVATOR
DANS QUELLE MESURE LES
VOITURES ÉLECTRIQUES
SONT-ELLES VRAIMENT ÉCO-
RESPONSABLES ? FREDRIK A
KLARÉN, RESPONSABLE DU
DÉVELOPPEMENT DURABLE
CHEZ POLESTAR, NOUS
EXPLIQUE POURQUOI L’INDUS-
TRIE AUTOMOBILE A GRAND
BESOIN DE TRANSPARENCE.
«NOUS
N’AVONS
PAS LE
CHOIX»
Entretien
WERNER JESSNER
BJÖRN LARSSON ROSVALL
INNOVATOR 31
Tthe red bulletin innovator: Responsable
du développement durable
chez un constructeur automobile :
cela veut dire quoi, exactement ?
fredrika klarén : Je canalise les
énergies et idées que nous avons chez
Polestar : on a envie de rompre avec
ce qui s’est fait jusqu’à présent, c’est-àdire
d’être plus respectueux de l’environnement.
Je me sers de cette envie
pour faire émerger une stratégie qui
capte au mieux toutes ces impulsions.
Comment fait-on ?
En ne faisant aucun compromis lorsqu’il
s’agit de combiner la durabilité,
les coûts et la production.
Cela veut-il dire que Polestar est
prêt à sortir un modèle plus cher s’il
remplit les critères de durabilité ?
Ou qu’on est prêt à travailler davantage
pour trouver de meilleures solutions.
Un exemple : nous avions le
choix, pour notre site de Shanghai,
entre un chauffage au biogaz et un
chauffage électrique. Le gaz aurait été
moins cher mais le bilan carbone de
notre usine n’aurait plus été neutre :
nous avons donc opté pour l’électricité
aux énergies renouvelables.
L’écoresponsabilité n’est parfois
qu’un masque : comment ne pas
être accusé de greenwashing ?
Lorsque Polestar a été fondée en 2017,
le mot d’ordre était no bullshitting :
cela résumait bien l’esprit de l’entreprise.
C’est la même chose pour la
communication : on présente la mobilité
électrique comme la voie royale
du développement durable, mais ça
ne l’est pas. Même si elle représente
actuellement la meilleure solution, la
mobilité électrique est très loin d’être
vraiment durable. Et cela, nous le
disons en toute honnêteté, parce qu’il
est impératif pour l’industrie automobile
de changer sa manière de communiquer.
Il faut aller vers une transparence
et une franchise absolues quand
on parle de véhicules électriques.
Jusqu’à récemment, les chiffres
officiels sur les gaz d’échappement
n’avaient pas grand chose à voir
avec la réalité, et personne ne s’en
souciait, y compris les clients.
Nous voulons que les clients puissent
recevoir toutes les informations qu’ils
pourraient demander, à raison, lorsqu’ils
achètent une voiture neuve. Or,
selon une étude, 36 % d’entre eux ne
font pas confiance à l’industrie automobile
: c’est pour cela que nous avons
besoin d’une transparence absolue.
Nous n’avons pas le choix.
Un petit constructeur comme Polestar
parvient-il à convaincre ses
concurrents d’avoir une approche
plus éthique et durable ?
Il y a déjà des réseaux dans l’industrie
automobile, et ils sont en train de se
développer. Autour d’une même idée :
concernant l’empreinte carbone d’une
voiture, nous devrions avoir les
mêmes normes de calcul partout, ne
serait-ce que par respect à l’égard de
nos clients qui veulent pouvoir comparer
objectivement, et c’est leur droit.
Il faut donc communiquer clairement
et avoir des normes. Nous sommes les
premiers à en parler ouvertement,
même si nos chiffres ne nous plaisent
pas encore, même si nous savons que
nous devons nous améliorer. À l’heure
actuelle, présenter une voiture comme
ayant un « bilan carbone neutre » de
A à Z, c’est faux. Aucune voiture n’est
produite de manière complètement
durable.
Et même si c’était le cas, il suffit que
l’électricité que j’utilise provienne
de sources non durables pour faire
basculer son bilan carbone.
Avec une voiture électrique, on finira
toujours par avoir un bilan plus
propre, quelle que soit la source
d’électricité utilisée. Sur la durée de
vie d’une voiture, si l’on utilise les
énergies renouvelables, on aura un
bilan carbone deux fois plus faible que
celui d’un moteur à combustion. Le
problème concerne surtout la produc-
BJÖRN LARSSON ROSVALL
32 INNOVATOR
Avant d’arriver chez
Polestar, Fredrika Klarén
est passée par IKEA et la
chaîne de mode KappAhl.
INNOVATOR 33
Concept car
aujourd’hui,
production en
série demain :
voici la Precept.
PRECEPT
Le patron de Polestar,
Thomas Ingenlath, qualifie la
Precept de « high-tech minimaliste
» : « Elle représente
notre avenir, un avenir qui
devient réalité. » Un design
épuré et une carrosserie
avant intégrale aérodynamique,
qui abrite les capteurs
des systèmes d’assistance.
Dans l’habitacle, différentes
matières recyclées sont
utilisées pour les surfaces :
un composite en lin comme
substitut de plastique, des
bouteilles en PET recyclées
(pour les sièges) ou des filets
de pêche (pour les revêtements
de sol). Le toit panoramique
court jusqu’à la plage
arrière pour une plus grande
sensation d’espace.
Portes s’ouvrant dans des directions
opposées, quatre sièges individuels :
Precept se voit comme un GranTurismo
de luxe… électrique.
34 INNOVATOR
LA PREUVE PAR LES MATHS
Quelle quantité de CO 2
les différentes voitures produisentelles
au cours de leur vie ?
Évaluées sur toute leur durée de vie (200 000 kilomètres), les voitures électriques sont plus
respectueuses de l’environnement que les moteurs à combustion, même si plus de CO 2 est produit
à l’origine lors de leur fabrication. Le calcul devient serré lorsqu’on opère avec le mix électrique
mondial, qui utilise du charbon, du pétrole et du gaz, véritables « bombes » de CO 2 . (source : Polestar)
60
50
40
58
50
42
À la casse
30
27
En état de
fonctionnement
En production
20
10
Fabrication
de la batterie
Production
de matières
premières
Total en tonnes VOLVO XC40
POLESTAR 2
de CO moteur à
mix électrique
2
combustion
mondial
POLESTAR 2
mix électrique
européen
POLESTAR 2
énergies
renouvelables
À partir de combien de km le moteur électrique est-il plus
respectueux de l’environnement que le moteur à combustion ?
112 000 78
Polestar 2
avec mix électrique mondial
000
Polestar 2
avec mix électrique EU28
50
000
Polestar 2
avec énergies renouvelables
BJÖRN LARSSON ROSVALL
Le pire des cas : Polestar n’est
du côté vert qu’au bout de deux
tours du monde, si elle n’utilise
que le mix électrique mondial.
Principaux facteurs de production
de CO 2 : les centrales électriques
qui brûlent du pétrole,
du charbon ou du gaz.
C’est déjà mieux : si (comme
dans l’UE en 2020) 40 % de
l’électricité est déjà produite
à partir de sources renouvelables,
la Polestar sera supérieure
à ses homologues équipés
de moteurs à combustion
après 78 000 kilomètres.
Le scénario idéal : si 100 %
de l’électricité nécessaire
à l’exploitation provient de
sources renouvelables telles
que l’énergie éolienne ou solaire,
le calcul bascule dans le positif
au bout de « seulement »
50 000 kilomètres.
INNOVATOR 35
« À L’HEURE ACTUELLE, PRÉSENTER UNE
VOITURE COMME AYANT UN “ BILAN CARBONE
NEUTRE” DE A À Z, C’EST FAUX. »
Depuis huit ans,
Fredrika Klarén
roule exclusivement
à l’électricité
verte.
tion : une Polestar 2 quitte l’usine avec
une empreinte carbone de 26 tonnes,
soit deux fois plus qu’une voiture classique.
Notre objectif est d’avoir un
bilan carbone neutre à la production.
Un objectif réaliste ?
Disons que ça me tient éveillée la nuit.
(rires) C’est une tâche colossale, mais
nous avons fait les premiers pas, en
utilisant les énergies renouvelables
dans nos usines. Le problème de l’efficacité
énergétique de transport, liée
notamment à la masse de la voiture,
reste un facteur important, et nous
utilisons déjà des matériaux durables
pour les habitacles. Un bon exemple,
c’est la start-up suisse Bcomp, avec
laquelle nous travaillons, et qui produit
un matériau composite haute performance
à base de fibres de lin. De
même, le bois du tableau de bord est
réalisé à partir d’emballages, et les
textiles sont en filets de pêche recyclés.
D’ailleurs, saviez-vous que tous
les maillots de bain fabriqués en Scandinavie
le sont à partir d’anciens filets
de pêche ? Voilà selon moi un exemple
parfait de solution durable : recycler
les déchets en créant des produits
intelligents et rentables. Nous aussi,
en tant que petit constructeur, nous
pouvons choisir des fournisseurs qui
proposent des solutions innovantes.
Où trouvez-vous ces start-ups ?
Partout dans le monde, en ouvrant les
yeux et en cherchant activement.
Puis on signe vite un contrat d’exclusivité
avec le fournisseur pour
rester le seul sur le marché à proposer
des habitacles en fibres de lin ?
Le développement durable ne peut
fonctionner que si les technologies
innovantes sont accessibles à tous.
Les constructeurs traditionnels avaient
l’habitude des contrats d’exclusivité,
mais pas nous. J’espère que nous
allons initier un changement de mentalité
dans le secteur. Pour reprendre
l’exemple de Bcomp : s’ils veulent
devenir rentables, ils doivent forcément
trouver plus de clients, ce principe
de l’économie d’échelle est très
important dans l’industrie automobile.
Et pour ce qui est du cobalt utilisé
dans les batteries, comment savoir
s’il est produit de manière éthique ?
Nous utilisons la technologie blockchain,
comme pour les cryptomonnaies.
De cette manière, on peut retracer
l’origine de chaque livraison sans
risque de falsification. Avant Polestar,
j’ai travaillé dans l’industrie de la
mode : il y a beaucoup plus de coton
bio sur les étiquettes qu’il n’en pousse
en réalité ! Les blockchains nous protègent
contre ce type de corruption
dans la chaîne d’approvisionnement.
Le cobalt est une première étape du
projet, mais nous allons l’étendre à
d’autres ressources.
Est-ce que je dois me débarrasser
de ma vieille voiture à essence et
la remplacer par une électrique ?
Cela ne résoudra pas le problème. Ce
qu’il faut, c’est repenser complètement
notre système de mobilité et le rendre
plus flexible : comment faire pour
transporter des marchandises et des
personnes de A à B de la manière la
plus durable possible ? C’est à cette
question que nous devons répondre,
au lieu d’essayer de fournir des voitures
électriques à tout le monde. Sans
oublier l’infrastructure, qu’il va falloir
développer. Notre rôle à nous consiste
à mettre au point des produits qui
durent longtemps et que l’on puisse
réparer – y compris les batteries.
À propos de recyclage : quelle est la
situation actuelle pour les voitures ?
Le taux de revalorisation actuellement
fixé par l’Europe est de 88 %, et
cette norme est valable pour tous les
constructeurs, mais nous voulons
aller plus loin. Comment se fait-il par
exemple que les pièces en plastique,
36 INNOVATOR
Polestar a attiré l’attention avec la
présentation du prototype Precept :
cette voiture-concept va-t-elle être
produite en série ?
Oui, la Precept est un projet très courageux,
mais l’industrie automobile
doit faire preuve de courage, au lieu
de continuer à investir dans les
moteurs à essence pour rafler les
marchés africains et sud-américains.
On ne peut plus gaspiller de l’énergie
dans des techniques dépassées et se
contenter de montrer des prototypes
écolos qui ne seront jamais destinés à
être vendus. La Precept n’est donc pas
notre concept-car, mais plutôt notre
commitment-car, notre engagement.
BJÖRN LARSSON ROSVALL
comme les tableaux de bord, ne soient
pas recyclées mais incinérées ? Idem
pour les fibres synthétiques des textiles
utilisés, dont le recyclage peut
poser problème. L’industrie automobile
doit investir dans des sites de
revalorisation plus ciblés. On devrait
être en mesure d’avoir des voitures
100 % recyclables.
Sur quelle durée de vie vous basezvous
pour calculer l’empreinte carbone
totale d’une Polestar 2 ?
200 000 kilomètres. Mais on constate
déjà que la voiture comme la batterie
durent beaucoup plus longtemps que
cela : l’empreinte totale sera moindre
que celle calculée à l’origine.
Roulez-vous en électrique ?
Depuis huit ans. Et quand il m’arrive
de devoir conduire une voiture à
essence, je remarque que ma manière
de conduire a changé. En hiver, j’allume
désormais toujours le chauffage
dans ma voiture avant de monter. Je
trouve que conduire une voiture à
essence est beaucoup plus ennuyeux,
il y a trop de bruit, trop de vibrations.
Comment jugez-vous le chemin
parcouru depuis huit ans par le
secteur électrique ?
C’était l’âge de pierre, comparé à ce
que nous avons aujourd’hui ! J’ai testé
une Nissan, une Renault, une Tesla et
même une Think norvégienne ! Je suis
heureuse de voir que la mobilité électrique
allie désormais qualité et style.
Mais je préfère rouler en Polestar, et
j’aurais fait le même choix si je n’avais
pas travaillé pour ce constructeur.
Où en sera le secteur dans huit ans ?
La voiture électrique sera la norme.
Nous aurons réussi à réduire considérablement
les émissions de CO ² en restructurant
les chaînes de production,
notamment la production de batteries,
d’aluminium et d’acier. On aura aussi
un réseau de stations de recharge
beaucoup plus étendu. Tous ces changements
vont arriver vite parce que le
progrès suit une courbe exponentielle,
alors que l’Homme a tendance à penser
de manière linéaire.
Quel volume représentera le marché
de l’automobile, au niveau
mondial ?
J’espère que nous pourrons gagner
plus en vendant moins de voitures,
parce que les constructeurs comme
nous ne proposeront plus seulement
des voitures, mais également toute
une chaîne de services de mobilité.
Revenons un instant sur ce besoin
de franchise que vous mentionnez :
être franc, cela veut parfois dire être
davantage livré aux critiques. Votre
étude sur le seuil de rentabilité des
voitures électriques a ainsi été critiquée
par un professeur néerlandais.
Pour parler d’un problème, il faut
d’abord mettre toutes les données
sur la table. Ce professeur a salué
notre sincérité, mais il a pris, pour ses
calculs, des paramètres légèrement
différents des nôtres. Cela dit, nous
poursuivons le dialogue avec lui, et
c’est le plus important.
C’est une qualité scandinave, cette
manière de dire ouvertement les
choses ?
La transparence est une valeur ancrée
dans la culture de nombreuses entreprises
scandinaves, mais j’observe
aussi une tendance générale vers plus
d’ouverture. C’est notamment le cas
pour les collègues en Chine : il y a,
depuis quelques années, une véritable
prise de conscience sur le fait de
devoir parler ouvertement des questions
écologiques, je dirais même que
c’est une révolution. Désormais, ce
sont souvent les employés de Geely (le
groupe chinois qui possède Volvo et sa
division électrique, Polestar, ndlr), qui
proposent des solutions plus écolos.
Comment cela se fait-il ?
Les métropoles chinoises connaissent
des problèmes environnementaux
d’une ampleur que nous, Européens,
ne pouvons même pas imaginer. Nos
collègues chinois constatent chaque
jour à quel point il est impossible de
continuer comme ça.
INNOVATOR 37
NOTRE MOBILITÉ VIT UNE
RÉVOLUTION DONT L’ISSUE
RESTE INCERTAINE QUANT À
NOS FUTURS MODES DE DÉPLA-
CEMENT. AU CŒUR DE CETTE
RÉVOLUTION, L’INDUSTRIE
AUTOMOBILE DÉTIENT AUSSI
UNE PARTIE DE LA SOLUTION.
UN ESSAI DE
WERNER JESSNER
SUR
LA
ROUTE
GETTY IMAGES
38 INNOVATOR
Nous serons toujours
en mouvement.
La question est de savoir
avec quoi.
INNOVATOR 39
Échanger son ancienne
voiture contre une
nouvelle provoque ce
que l’on appelle de
l’énergie grise.
GETTY IMAGES
40 INNOVATOR
Le sectarisme sur la question a
encore de beaux jours devant lui.
Pour s’en rendre compte, il suffit
de s’arrêter dans une station de
recharge Tesla à bord d’une vieille
voiture à essence et d’engager la
conversation sur le respect de l’environnement
avec le propriétaire
de la Tesla qui attend. Sans surprise,
cet automobiliste estimera
contribuer bien plus à la protection
de l’environnement que son homologue
qu’il qualifiera de pollueur
impénitent.
L
Le discours est identique
parmi de nombreux
hommes politiques du
pays, tous convaincus que
l’e-mobilité est la solution
idéale contre le réchauffement
climatique.
Et ils ont raison si l’on
considère uniquement l’absence de
pot d’échappement à l’arrière des voitures
électriques. Malheureusement,
le problème n’est pas aussi simple.
Lorsqu’elle roule, la voiture électrique
n’est pas reliée à une prise de
courant. Et même si tel était le cas et
en utilisant une électricité entièrement
issue d’énergies renouvelables,
le compte n’y est toujours pas. Le problème
de ce raisonnement est qu’il
fait fi de toute « l’énergie grise », à
savoir l’énergie nécessaire pour fabriquer,
vendre et ensuite éliminer un
produit donné. Le seul fait d’échanger
votre vieille voiture pour une
neuve génère une grande partie de
cette énergie grise. Pour un véhicule
de taille moyenne, cela représente
environ 20 000 kilowattheures. En
sachant qu’un kilowattheure permet
à une Tesla de parcourir 6,7 km,
134 000 kilomètres seront nécessaires
pour compenser la seule pollution
liée à la fabrication de la nouvelle
voiture et ce, à condition bien sûr, de
n’utiliser que de l’électricité issue du
solaire ou de l’éolien, sans quoi il faudra
parcourir davantage de kilomètres.
Mais en réalité, combien sommesnous
aujourd’hui à conserver notre
véhicule jusqu’à 100 000 kilomètres
ou plus ? En général, l’adepte du leasing
change de voiture au bout de
cinq ans, avec un kilométrage qui ne
compense pas l’énergie grise.
« Je le savais ! Hurleront les opposants
à la voiture électrique, une
blague tout ce battage médiatique
pro voiture électrique ! » Soit, mais
cela ne résout pas le problème pour
autant. La fabrication d’une nouvelle
voiture, qu’elle soit électrique ou
thermique, consomme de l’énergie
grise. Et contrairement à cette dernière,
la voiture électrique a la capacité
de la compenser. Le débat plaide
donc en faveur de l’e-auto, et non
contre elle. Bien sûr, l’idéal serait
d’éviter l’accumulation d’énergie
grise en arrêtant la production de
nouveaux véhicules et en remettant
les anciens en état. Hélas, cette
option est tout aussi irréaliste, sans
évoquer le désastre économique que
cela impliquerait.
En vérité, – et cela peut surprendre
– la durée de vie des voitures
en Europe progresse, comme l’indique
une enquête de Statista notamment
en Allemagne où la durabilité
moyenne passe de 3,7 ans en 1960
à 8,1 ans en 2012 et atteint 9,6 ans en
2020 – et ce malgré diverses campagnes
écologiquement discutables
telles que « les primes à la casse » qui,
ces dernières années, incitent financièrement
les gens à se débarrasser
de leurs voitures en parfait état afin
d’en acquérir une nouvelle censée
INNOVATOR 41
être plus performante et aussi plus
économique. Mais l’énergie grise, les
logiciels truqués, le « dieselgate » sont
autant de scandales qui mettent cette
affirmation à mal. Quoi qu’il en soit,
la durabilité améliorée de nos voitures
n’évite pas le moment où il faudra
bien la changer. Mais est-ce là
l’unique solution ? Dans bien des
endroits, des alternatives existent
pourtant. On observe en milieu
urbain par exemple, un certain désintérêt
pour le permis de conduire chez
les jeunes qui, grâce à un bon réseau
de transports en commun, se passent
fort bien de voiture.
Malheureusement, ces dernières
décennies ont vu le démantèlement
progressif de ces réseaux, notamment
en zone rurale. Les remettre en place
prendrait du temps, même avec la
volonté politique. Par conséquent, il
faudra compter avec la voiture pour
encore un certain temps, que cela
nous plaise ou non. Le covoiturage et
toute autre initiative d’économie de
partage atténueront au mieux le phénomène,
mais ne pourront pas l’éviter.
La pression (politique) exercée
sur l’industrie automobile afin que
celle-ci soit plus verte est énorme,
l’objectif étant de réduire drastiquement
le CO ² produit par les voitures
thermiques. En outre, la conversion
du parc automobile est une affaire
très lucrative ayant l’avantage de stimuler
l’économie par la consommation
des ménages et de préserver l’emploi.
Divisée, l’industrie automobile
est sommée d’innover massivement,
alors que l’industrie aéronautique, par
exemple, avec ses deux géants que
sont Airbus et Boeing, bénéficie d’une
quasi-impunité depuis des décennies,
et continue de rejeter ses gaz en altitude
alimentant l’effet de serre de
manière significative.
Le CO ² n’est pas le seul responsable
du dérèglement du climat,
l’ozone et la condensation le sont
tout autant. Au total, une quantité
trois fois supérieure au seul CO ² dont
la contribution n’est somme toute
pas si spectaculaire, mais que l’industrie
aéronautique se plaît à mettre en
avant. En 2015, l’aviation était
responsable en Suisse de 18 % du
réchauffement climatique lié à l’activité
humaine. Une étude du WWF
estime cette responsabilité à 27 %,
soit un chiffre supérieur à celui de
l’industrie et de l’agriculture réunies,
et aux autres moyens de transport.
Néanmoins, pour l’heure, le sauvetage
du climat se joue sur le plancher
des vaches, avec pour cible première
le transport individuel.
Cela signifie qu’à moyen terme
au moins, la solution passera forcément
par la voiture électrique. En
2021, tous les constructeurs ou
presque intégreront à leurs gammes
un modèle à « zéro émission » (si,
comme notre propriétaire de la
Tesla, nous faisons abstraction de sa
construction). Pour l’industrie automobile,
le coup est rude. Sa culture
vieille de plusieurs générations subit
en quelques années seulement un
La voiture électrique
fonctionne comme un
catalyseur pour un
rapport respectueux
à l’environnement.
42 INNOVATOR
GETTY IMAGES
bouleversement total. Le consommateur,
nous l’avons vu, y est confronté
en moyenne tous les 9,6 ans. À
l’usine, l’ouvrier en perçoit les
effets, il ne fabrique plus de voiture
à essence, et le mécanicien ne change
plus de courroie de distribution ou
d’embrayage. Une voiture électrique
est bien moins complexe que les merveilles
techniques que sont les
moteurs à combustion interne désormais
soumis aux limites d’émissions
toujours plus strictes.
La révolution de la mobilité que
nous vivons actuellement bouleverse
l’économie mondiale. Les pays dont
les revenus proviennent essentiellement
de pétrole changent de cap.
Certains pays dans le golfe persique
s’y attellent déjà. En accueillant le
rallye Dakar ou la Coupe du monde,
l’Arabie Saoudite et le Qatar prennent
acte de ce changement. L’ère du
pétrole touche à sa fin, et ils le
LA RÉVOLUTION DE LA
MOBILITÉ DANS LAQUELLE
NOUS NOUS TROUVONS
VA BOULEVERSER TOUTE
L’ÉCONOMIE MONDIALE.
savent. À l’autre bout du spectre,
les États assis sur le nouvel or noir
(lithium, cobalt) doivent gérer cette
richesse minière de manière responsable
et protéger l’environnement
contre les appétits voraces. Dans le
désert d’Atacama, une tonne de
lithium extraite à plusieurs centaines
de mètres de profondeur, provoque
l’évaporation de 2 000 litres d’eau
souterraine et contamine les sols avec
des solvants tels que le kérosène ou
l’acide chlorhydrique. La pollution
d’une plate-forme de forage ou le
naufrage d’un tanker dont la cargaison
défigure des plages paradisiaques
sont peu de chose en comparaison.
Mais, ne soyons pas dupes, la mobilité
n’est et ne sera jamais une activité
propre, et cela vaut aussi pour l’électrique.
Mais, et c’est peut-être là, la meilleure
évolution, il y a désormais une
réelle volonté, ou plutôt une obligation
de s’ouvrir au changement. La
voiture électrique cristallise le débat
écologique. Désormais, le choix
d’une nouvelle voiture est plus motivé
par sa durabilité que sa vitesse.
La communication des constructeurs
a aussi entamé un important
virage. Le scandale du « dieselgate »
a marqué un tournant. Le groupe
VW, leader du marché européen, a
investi massivement dans la mobilité
électrique, imité en ce sens par la
quasi-totalité des constructeurs. Ce
mouvement est en passe d’atteindre
une masse critique comparable à ce
que nous avons connu pour les systèmes
solaires : des produits meilleur
marché et plus performants succèdent
à ceux des pionniers, jusqu’à
ce que ceux d’entre nous qui en sont
dépourvus deviennent une minorité.
De plus, une fois converti à l’électrique,
un automobiliste fait rarement
marche arrière lorsqu’il change
de voiture. Il est encore moins probable
qu’il opte pour un SUV énergivore.
De fait, la génération actuelle
des voitures électriques est déjà très
performante et la prochaine le sera
davantage.
L’industrie automobile est connue
pour son obsession à perfectionner
ses modèles. Désormais, elle met
au service de la durabilité toute la
matière grise qu’elle avait jusque-là
consacrée aux châssis de qualité, aux
moteurs puissants et à la vitesse. Il est
à espérer que cela entraînera un effet
de rattrapage dans d’autres secteurs
tels que l’industrie, l’agriculture, le
bâtiment ou l’aviation, contraints
à suivre le mouvement. L’industrie
automobile ne manquera pas de nous
surprendre et de nous montrer de
quoi elle est capable lorsqu’elle roule
pour la bonne cause.
INNOVATOR 43
L’AVENIR
À BRAS
OUVERTS
Trente experts et autant de
raisons de croire en l’avenir
Optimistes ? Non, réalistes.
Ils sont chercheurs, ingénieurs, activistes…
et sont convaincus d’une chose : oui, ça ira
mieux demain. La preuve par trente.
Texte ALEX LISETZ
KATE PETERS CONTOUR
BY GETTY IMAGES
44 INNOVATOR
« NOUS
ALLONS SAUVER
DES MILLIONS
D’ENFANTS »
BILL GATES
Fondation Bill & Melinda Gates
Nos petits-enfants entendrontils
parler de la malaria uniquement
dans les livres d’histoire ?
D’après les statistiques : oui.
Les décès dus à ce fléau ont
baissé de moitié depuis l’an
2000, grâce aux programmes
de vaccination et d’hygiène –
et à un soutien financier de
2,4 milliards d’euros de la
Fondation Bill & Melinda Gates.
Mais il reste encore beaucoup
à faire : toutes les deux minutes,
selon l’OMS, un enfant africain
meurt de la malaria, et plus de
60 % des victimes ont moins de
5 ans. À l’avenir, l’utilisation
de Big Data pour localiser les
clusters et cibler plus rapidement
les interventions permettra
de faire reculer la maladie jusqu’à
l’éradiquer complètement, ce
qui est tout à fait possible :
d’autres régions du monde,
comme l’Europe dans les années
30 ou les États-Unis en 1951,
y sont déjà parvenus.
INNOVATOR 45
« PLUS JAMAIS
D’ACCIDENTS DE
VOITURE »
JAIME WAYDO
Apple
Experte en intelligence artificielle,
Jaime Waydo s’est
fixé une mission ambitieuse :
sauver non pas une, ni deux
ou même une poignée de vies
humaines, mais carrément
1,35 million de personnes.
C’est le nombre d’individus
qui meurent chaque année
dans des accidents de voiture,
causés le plus souvent par
des erreurs humaines. Selon
elle, « les voitures autonomes
peuvent éviter ces accidents,
mais aussi nous faciliter grandement
la vie ».
Après avoir travaillé pour
Google sur le projet Waymo,
elle a été débauchée par Tim
Cook, PDG d’Apple, pour diriger
les travaux de ce qui sera
« la mère de tous les projets en
IA », selon les mots de Cook.
En se concentrant sur les
logiciels destinés aux voitures
autonomes, Waydo travaille
sur des voitures qui pourraient
bientôt supplanter tous les
prototypes réalisés jusqu’ici.
Des progrès qui font d’ailleurs
trembler les constructeurs
automobiles traditionnels :
ces voitures pourraient non
seulement éviter les accidents,
mais aussi permettre à de nouveaux
groupes de population,
comme les personnes mineures,
âgées ou malvoyantes,
de conduire en toute sérénité.
Sans compter toutes les
heures qu’elles nous feraient
gagner : un Allemand passe
ainsi en moyenne 41 heures
par an à chercher une place
de parking.
« IMMUNISÉS
CONTRE LA SEP »
UĞUR ŞAHIN
BioNTech
Cette société de biotechnologie
basée à Mayence (Allemagne),
qui s’est fait remarquer pour la
création d’un vaccin contre la
Covid-19 basé sur l’acide ribonucléique
messager, risque de
faire parler d’elle dans les années
à venir : les thérapies à base
d’ARNm sont en effet utilisées
non seulement contre les maladies
infectieuses, mais aussi en
tant qu’immunothérapies contre
le cancer et les maladies autoimmunes,
notamment la sclérose
en plaques.
Pour lutter contre cette maladie
dégénérative encore incurable,
BioNtech travaille sur un vaccin
qui permettrait au corps de
produire des auto-antigènes
sans enclencher une rupture de
tolérance, comme c’est le cas
avec les maladies auto-immunes.
Testé sur des animaux, le vaccin
a même montré que l’évolution
des symptômes s’inversait. Le
vaccin doit maintenant être testé
sur des cellules humaines puis
en essais cliniques.
MARZENA SKUBATZ/LAIF/PICTUREDESK.COM, GETTY IMAGES
46 INNOVATOR
« NOUS
VAINCRONS LA
PAUVRETÉ »
HANS ROSLING
Gapminder
« Le nombre de personnes
qui parviendront
à s’extraire de la pauvreté
passera, d’ici 2040,
de 2 à 4 milliards » : voici
l’une des prévisions décrites
dans Factfulness,
le best-seller co-écrit
par Hans Rosling, son
fils Ola et sa belle-fille
Anna, paru en 2018 et
qui a bouleversé les
préjugés que nous nous
faisions sur l’état du
monde.
Car si l’on s’en tient aux
faits, aux statistiques,
le monde évolue dans
une direction plutôt
positive : l’Afrique et
l’Asie vont faire émerger
de toute nouvelles puissances
économiques
et les deux milliards de
pauvres que compte le
monde actuellement
pourraient devenir des
acteurs économiques
à part entière et former
une classe moyenne
désireuse de consommer
et de voyager. Le
conseil des Rosling :
se concentrer sur ces
futurs viviers de clients
potentiels au lieu de
regarder vers le marché
saturé des pays occidentaux.
« Si vous croyez
encore que le Sud
est trop pauvre pour
acheter quoi que ce soit
et que vous continuez
à essayer de vendre
des gadgets pour hipsters,
vous risquez de
perdre les plus grandes
opportunités commerciales
que l’Histoire ait
connues. »
« DES VILLES
0 ÉMISSION,
0 DÉCHET »
NORMAN FOSTER
Foster + Partners
Écolo, propre et connectée
: telle sera la ville de
demain, imaginée par
le cabinet d’architectes
anglais Foster & Partners.
À titre expérimental,
l’équipe de Norman Foster
a conçu, sur la demande
de l’émirat d’Abou Dhabi,
une ville entièrement nouvelle
comme vitrine des
énergies renouvelables
et du développement
durable. Située en plein
désert, l’éco-cité de Masdar
est la « première ville
au monde à ne produire ni
déchet, ni CO 2 ».
Particularités : autonomie
totale en énergie grâce
aux parcs éoliens et solaires,
voitures interdites,
transports en commun
électriques, utilisation de
l’hydrogène, désalinisation
de l’eau, constructions
conçues pour ventiler naturellement
l’air ambiant.
Si cet ambitieux projet,
commencé en 2008, s’essouffle,
nul doute que les
idées réalisées aujourd’hui
à Masdar City seront bientôt
reprises par d’autres
municipalités aux quatre
coins du monde.
« NOUS VOYA-
GERONS À LA
VITESSE DU SON »
ELON MUSK
Tesla & SpaceX
Genève-Bruxelles
en 45 minutes ? D’ici
quelques années, il sera
possible de voyager
en train à 1 000 km/h,
grâce à l’Hyperloop : un
train-capsule supersonique
qui se déplace à la
vitesse du son dans un
tube sous vide, conceptualisé
par Elon Musk
en 2013.
Si cette idée n’est pas
nouvelle (la London
and Edinburgh Vacuum
Tunnel Company l’avait
déjà eue en 1825), elle
annonce une révolution
des transports en commun,
sur les plans technologique
et écologique :
le projet se veut durable,
et l’énergie nécessaire
pourrait être fournie par
des panneaux voltaïques
montés sur les tubes.
Plusieurs entreprises
dans le monde travaillent
sur l’Hyperloop, dont
la start-up néerlandaise
Hardt Hyperloop : elle
prévoit de relier Amsterdam
et La Haye à
700 km/h, pour les marchandises
en 2025, et
les personnes dès 2028.
INNOVATOR 47
« IL Y AURA
TOUJOURS UN
MÉDECIN PRÈS
DE SOI »
DAVID E. ALBERT
AliveCor
Nous aurons bientôt tous,
dans la poche, un médecin
disponible et prêt à nous
examiner : du moins sa version
numérique, sous forme d’une
application smartphone. Et si
nous utilisons déjà des capteurs
fitness et autres montres
connectées qui calculent nos
données, les applications du
futur vont les faire passer pour
des gadgets d’un autre âge.
Dotées d’intelligence artificielle
et reliées à des miniappareils,
elles nous permettront
en effet de prédire et de
détecter l’apparition d’un AVC
ou d’un infarctus – premières
causes de mortalité dans nos
sociétés. AliveCor propose
déjà un mini-appareil capable
de faire des ECG et d’en communiquer
les résultats par
une appli. Son logiciel s’adapte
automatiquement aux données
de l’utilisateur et reconnaît
les anomalies cardiaques
en temps réel, en se basant sur
300 000 paramètres individuels.
« Cela permet non seulement
de surveiller la santé,
explique le Dr David E. Albert,
fondateur d’AliveCor, mais
aussi d’enregistrer toutes les
données au fil du temps. Ce
qui révolutionne des choses
comme le suivi du processus
de récupération. »
« NOUS
METTRONS FIN
AU CYBER-
HARCÈLEMENT »
GITANJALI RAO
Time’s Kid of
the Year 2020
« Tant que je serai capable de
penser, je veux faire en sorte
que les gens autour de moi
soient un peu plus heureux.
On peut rendre notre monde
meilleur grâce aux sciences et
à la technologie, c’est ce que
j’ai compris vers 6 ou 7 ans »,
raconte la jeune Américaine
d’origine indienne dans une
interview avec Angelina Jolie.
Gitanjali Rao, prodige des
sciences aujourd’hui âgée de
15 ans, a été, l’année dernière,
la première enfant à être élue
« enfant de l’année » par le
magazine Time. Après avoir
inventé, à 13 ans, un appareil
imprimable en 3D pour déceler
la contamination de l’eau
au plomb, Gitanjali a mis au
point le service Kindly, qui
lutte contre le cyber-harcèlement
en détectant sur Internet
les tentatives d’intimidation.
Alors qu’elle travaille sur
un moyen de diagnostiquer la
dépendance aux opioïdes, la
jeune fille donne des conférences
et anime des ateliers
auprès des jeunes pour les
motiver à faire comme elle.
« À la fin des ateliers, chacun
a trouvé une idée à creuser, et
après, ils me contactent pour
me raconter sa réalisation. »
Gitanjali coache actuellement
30 000 apprentis scientifiques
: « Ce que je peux faire,
vous aussi, vous le pouvez. »
SHARIF HAMZA
48 INNOVATOR
« ROULER
À L’HYDRO-
GÈNE »
TIM YOUNG
SunHydrogen
Dans le monde de demain,
il n’y aura plus que de la
vapeur d’eau qui s’échappera
de nos voitures. On
connaît depuis longtemps
les propriétés de l’hydrogène
comme capteur
d’énergie, mais il restait
encore trop de problèmes
à résoudre, notamment
en termes de production,
pour pouvoir l’utiliser
comme carburant.
L’entreprise californienne
SunHydrogen a trouvé
la solution : son Hyper-
Solar H 2 Generator est
capable de produire luimême
de l’hydrogène à
partir d’eau et de soleil,
grâce à son système de
particules solaires, en se
branchant sur n’importe
quelle source voltaïque,
par exemple à la stationservice
du coin. Encore
quelques années, et les
énergies fossiles pourraient
connaître, plus tôt
que prévu, le même sort
que les dinosaures.
Les déclarations de Tim
Young, PDG de Sun-
Hydrogen, sont prometteuses
: « Toutes les
phases d’essais en laboratoire
ont été menées
à bien. » La production
devrait démarrer fin 2021.
« LES
ROBOTS NOUS
IMITERONT »
DONGHEUI LEE
Centre allemand
pour la technologie
aérospatiale
La robotique est en
pleine ébullition et
trouve de plus en plus
de champs d’application :
on ne demandera plus
aux robots de classer
des boulons ou d’assembler
des voitures, mais
aussi de nous aider dans
les tâches du quotidien.
Pour cela, ils doivent
apprendre à nous imiter
et devenir plus humains :
c’est ce sur quoi travaille
Dongheui Lee, chercheuse
en robotique.
« Un robot n’a pas besoin
de ressembler à un
humain s’il aide à assembler
des pièces en usine,
mais dans nos foyers ou
nos maisons de retraite,
il est important que nous
nous sentions à l’aise
avec lui. »
Originaire de Corée du
Sud, Lee conçoit des
robots capables de comprendre
et d’imiter les
mouvements humains.
En la regardant éplucher
une pomme, le robot
est programmé pour
l’imiter, et aussi pour
comprendre l’objectif
de l’action, afin d’éplucher
lui-même la pomme
suivante. Ou d’imiter
une chorégraphie du
film Pulp Fiction après
avoir reçu quelques
instructions. Cette idée
lui est d’ailleurs venue
d’un autre film, Terminator
: on y voit le jeune
John Connor enseigner
à un Terminator un peu
ronchon comment faire
un high five.
INNOVATOR 49
« NOUS ALLONS
BOOSTER LA
CRÉATIVITÉ »
HARRY GATTERER
Zukunftsinstitut
« C’est dans un climat d’extrême
incertitude que sont
réunies les meilleures conditions
pour motiver celles et
ceux qui veulent faire bouger
les choses et se détacher du
passé » : selon le futurologue
(et directeur du Zukunftsinstitut
allemand) Harry Gatterer,
la crise actuelle et son caractère
anxiogène constituent
le terreau idéal pour générer
une explosion de créativité et
faire naître une foule d’idées
et d’initiatives qui vont donner
envie à chacun de nous d’aller
de l’avant.
« Tout le monde sera concerné,
même ceux qui se sentent
paralysés ou déprimés par la
situation actuelle, parce que
c’est justement eux qui sont
en train de remettre leurs
valeurs et leurs habitudes en
question. Et qui trouvent de
nouvelles réponses à ces questions
existentielles. » Cette
« montée de sève » créatrice
va faire émerger toutes sortes
d’entreprises, d’innovations et
de nouveaux styles de vie… et
apporter un vent de fraîcheur
dans le monde entier.
« IL N’Y
AURA PLUS DE
VIOLENCE »
STEVEN PINKER
Harvard University
Guerres, terrorisme, violences
urbaines… Si l’on en croit les
journaux et leurs messages de
crainte, nous serions en train
de vivre la plus violente des
époques. Et pourtant, nous dit
le psychologue, professeur et
auteur canadien Steven Pinker,
c’est exactement le contraire :
comme il l’explique dans son
best-seller La part d’ange en
nous – Histoire de la violence et
de son déclin, nous vivons dans
l’époque la plus pacifique de
l’Histoire humaine.
Le risque qu’avait un être humain
de mourir d’une mort violente
était de 1:1 000 au Moyen Âge ;
il est aujourd’hui de 1:50 000. Et
dans les sociétés claniques des
premiers temps, ce risque était
dix à cent fois plus élevé qu’à
l’époque des croisades. Cette
tendance s’est même fortement
accentuée dans les dernières
décennies. Depuis la seconde
guerre mondiale, si l’on observe
la tendance générale, le nombre
de meurtres a constamment
chuté, tout comme celui des
conflits armés et des victimes
de guerres, d’attaques terroristes
et de génocides. Les raisons
de ce déclin, selon Pinker :
davantage d’éducation, d’empathie
et une interconnexion commerciale
toujours plus étroite,
qui empêche les puissances de
se taper dessus à la moindre occasion.
« Les statistiques laissent
penser que cette tendance va se
poursuivre – et que la paix dans
le monde sera bientôt à portée
de nous. »
KAYANA SZYMCZAK, OBAYANJU BABAWALE
50 INNOVATOR
« NOUS NE
TUERONS PLUS
D’ANIMAUX »
PAT BROWN
Impossible Foods
L’invention de ce célèbre
biochimiste américain
va bouleverser nos modes
alimentaires… sans
que nous nous en rendions
compte. Imaginez :
une viande entièrement
« élevée » à base de
plantes, qui a la saveur,
le parfum et la texture
de la viande animale. Pat
Brown résume son invention
spectaculaire en
ces mots : « Nous avons
appris à comprendre,
au niveau moléculaire,
pourquoi nous adorons
manger de la viande. »
Fondateur et PDG d’Impossible
Foods, Brown
s’est entouré d’une
équipe de chercheurs
passionnés. « L’élément
magique qui donne
à la viande sa saveur
et son parfum, c’est
l’hémoglobine. Nous la
faisons pousser à partir
de levures, dans un
fermenteur auquel on a
inséré un gène de soja »,
explique-t-il. Après
l’ajout de graisses et de
protéines végétales, le
résultat est bluffant.
Pourrons-nous un jour
nous régaler de BBQ
sans avoir la mort de
milliards d’animaux sur
la conscience ? Pour
Brown, il s’agit d’une nécessité
: « La production
industrielle de viande
est responsable de 15 %
des émissions de gaz à
effet de serre, soit plus
que le secteur des transports.
» Une raison qui le
motive aussi à proposer
bientôt des substituts
de produits laitiers et
de poisson.
« SAUVER
LA NATURE »
NIMMO BASSEY
HOMEF
Si la lutte contre le réchauffement
climatique et
la recherche de solutions
plus durables doivent être
saluées et encouragées
au niveau mondial, force
est de constater que la
réalité est autrement
plus compliquée : les
multinationales et autres
puissances financières
continuent de dicter leur
loi et de détruire la nature
en toute impunité.
Pour de plus en plus de
militants, la solution ne
peut venir que du droit
pénal. Nimmo Bassey,
activiste nigérian, en est
convaincu : « Une loi sur
l’écocide permettrait de
répondre à ces crimes
environnementaux ».
Fondateur de la Health of
Mother Earth Foundation,
il se bat aux côtés de
personnalités toujours
plus nombreuses pour
que les responsables de
ces crimes soient traduits
en justice devant la cour
pénale internationale.
S’ils gagnent leur combat,
l’équilibre des pouvoirs
serait renversé : face à la
menace de lourdes peines
de prison, les politiques et
les gros pollueurs seraient
enfin renvoyés à leurs
responsabilités.
« NOUS IRONS
SUR MARS »
GERNOT GRÖMER
Forum autrichien
de l’Espace
« La première mission
habitée sur Mars aura lieu
d’ici vingt ou trente ans,
prédit l’astrophysicien
Gernot Grömer. En fait,
nous en sommes déjà
presque capables d’un
point de vie technique,
mais il faut encore nous
en donner les moyens
politiques et financiers. »
Gernot Grömer est ce
qu’on appelle un « astronaute
analogue » qui part
tous les deux ou trois
ans au cœur du désert
du Néguev en Israël
pour s’entraîner à la vie
sur Mars. C’est dans le
cratère Ramon, qui offre
des conditions analogues
à la vie sur Mars, qu’une
équipe de six personnes,
soutenues par plus de
200 scientifiques et ingénieurs
provenant de vingt
pays différents – dont
le Forum autrichien de
l’Espace – teste différents
robots et drones autonomes.
L’objectif : se préparer
le mieux possible
à l’exploration humaine
sur Mars.
INNOVATOR 51
« RECHARGER
UNE VOITURE
EN CINQ
MINUTES »
MARKUS KREISEL
Kreisel Electric
L’un des enjeux majeurs
de la mobilité électrique,
c’est le temps de recharge
des batteries.
Un temps qui pourrait
être réduit, pour les
voitures citadines, à
« cinq petites minutes »,
grâce à l’invention des
frères Kreisel. Ces
pionniers de l’électrique,
qui travaillent ensemble
dans un petit village de
Haute-Autriche, ont mis
au point une batterie
pour voiture électrique
de rallye, la RE-X1, qui
se recharge en quinze
minutes à peine.
Le secret (évidemment
breveté) de cette performance
: un savant
mélange de matériaux,
de géométrie, de mécanique
des fluides et d’un
système baptisé Hollowblock,
qui permet, par
une optimisation thermique,
de ne pas faire
chauffer les cellules
pendant la recharge.
Résultat : des batteries
plus puissantes et qui
durent plus longtemps.
« L’IA RÉ-
SOUDRA DE
NOMBREUX
PROBLÈMES »
ANASTASSIA
LAUTERBACH
XU Exponential
University
« En intelligence artificielle,
nous en sommes
là où nous en étions
avec Internet en 1995 »,
résume Anastassia
Lauterbach, multiexperte,
membre de
plusieurs conseils de
direction et professeur en
IA à Potsdam (Allemagne).
« Facebook, Apple et les
autres ne pourront plus
tenir leur quasi monopole
très longtemps : ils
seront remplacés par
des marchés de données
décentralisés qui vont
révolutionner l’économie.
» L’apprentissage automatique
va nous donner
des robots toujours plus
performants, qui excelleront
dans des domaines
comme la chirurgie. Et qui
pourront nous libérer de
tâches trop pénibles ou
trop compliquées.
« UNE
SOLUTION
À LA CRISE
CLIMATIQUE »
NILS RØKKE
EERA
Les politiques prises
contre le réchauffement
climatique sont-elles un
frein à la croissance ?
Nils Røkke, scientifique
norvégien et
président de l’Alliance
européenne sur la
recherche énergétique
(EERA) est convaincu du
contraire : il coordonne
les avancées de 50 000
chercheurs de trente
pays, qui planchent sur
17 programmes concrets
ayant un seul objectif :
la neutralité carbone
pour l’UE d’ici 2050.
Røkke n’a rien d’un doux
rêveur : « L’Europe doit
mener la transition
énergétique au niveau
mondial, au risque de
perdre sa compétitivité
», a-t-il déclaré sur
sa chaîne YouTube. Dans
les années à venir, les
mesures climatiques
seront autant d’opportunités
pour développer
des secteurs clés et
créer des emplois.
BETKE, OLGA RUBIO
52 INNOVATOR
« NOUS VIVRONS
PLUS HEUREUX »
CHRISTIANE VARGA
Sociologue
« Notre société se trouve à un moment
charnière de son histoire »,
analyse la sociologue viennoise
Christiane Varga. « La Covid-19,
qui a ralenti, dans un premier
temps, la marche de notre société,
va devenir un accélérateur de
changements positifs. »
En parlant de ce que sera la
période post-pandémie, elle
prédit qu’après une courte phase
hédoniste de surconsommation
où nous allons essayer de retrouver
nos repères perdus, c’est la
tendance inverse qui va s’imposer
lentement, parce que les gens
auront notamment compris les
effets désastreux que notre mode
de vie actuel entraîne. Cette
chercheuse et conférencière
autrichienne pense même que
« la consommation et le tourisme
de masse vont disparaître pour
laisser la place à plus de qualité.
Et le concept de pleine conscience
va quitter les hautes sphères
spirituelles pour faire partie de
notre quotidien ».
« NOUS
VAINCRONS
LE CANCER »
ANDREAS JORDAN
MagForce
La deuxième cause de mortalité
au monde se soignait jusque
là par des thérapies relativement
lourdes, que ce soit par
opération ou par chimiothérapie.
Une entreprise berlinoise,
fondée par le Docteur Andreas
Jordan, veut guérir le cancer
en utilisant la plus petite arme
du monde : la nanoparticule.
L’équipe de MagForce utilise
plus exactement un liquide
contenant des nanoparticules
magnétiques à l’oxyde de fer
(plus exactement 17 quadrillons
par millimètre), qu’elle
injecte directement dans la
tumeur.
Les nanoparticules sont ensuite
activées dans un champ
magnétique à variation rapide,
ce qui élève la température des
particules à 55 ou 60 °C et a
pour effet de rendre les cellules
tumorales plus réceptives à
d’autres thérapies complémentaires,
voire de les détruire
complètement sans endommager
les tissus autour de la
tumeur. MagForce a reçu la
certification européenne pour
soigner des patients atteints
de tumeur au cerveau, mais
cette thérapie peut s’appliquer
à d’autres types de cancer. C’est
juste une question de financement,
selon Jordan : « Donnez-moi
500 millions d’euros
pour la recherche, et dans
quelques années, ce seront
dix autres types de cancer qui
pourront être guéris grâce à la
nanotechnologie. »
INNOVATOR 53
« NOUS NOUS
DÉPLACERONS
EN DRONES »
ROBERT MACHTLINGER
FACC
Adieu les embouteillages, les
périphériques saturés et les
rendez-vous ratés à cause du
trafic : dans un futur proche,
c’est en taxi-drone que nous
nous rendrons au travail ou
à nos rendez-vous importants.
Si plusieurs constructeurs
aéronautiques planchent
depuis des années sur le marché
très prometteur des taxisvolants,
une petite entreprise
autrichienne figure parmi les
mieux placés : le constructeur
aéronautique FACC.
Son PDG, Robert Machtlinger,
croit en l’avenir de la UAM
(Urban Aerian Mobility) et
notamment des véhicules
aériens autonomes : « Ces
drones vont non seulement
révolutionner notre manière
de nous déplacer, mais apporter
également une vraie solution
dans des secteurs comme
le transport d’urgence ou de
marchandises. » Pratiques, les
drones-taxis, mais aussi plus
écolos : « Notre technologie
permet un gain de poids et
d’énergie », à quoi s’ajoutent
un faible impact sonore et une
réduction de la résistance de
l’air. Avec tout cela, pas étonnant
que des clients comme
Boeing, Rolls Royce et Airbus
viennent frapper à la porte.
« RENDEZ-
VOUS SUR
L’HOLODECK »
ROEL VERTEGAAL
Huawei
La série Star Trek a déjà inspiré
ou anticipé de nombreuses innovations
: l’holodeck est l’une des
plus connues et pourrait, dans un
futur plus ou moins proche, faire
également partie de nos vies
quotidiennes. À la différence que
nous ne serons pas obligés de
monter dans un vaisseau spatial
pour avoir accès à l’imagerie
holographique, mais que celle-ci
nous sera accessible directement
depuis notre salon.
Alors, à quand des « apéros holodeck
» ? Selon Roel Vertegaal, designer
spécialisé dans l’interaction,
l’hologramme répond à un
besoin de communication : « Nos
modes de vidéo-conférences actuels
ne peuvent pas rendre certaines
nuances comme le contact
des yeux ou la communication
non verbale. » Il pense aussi que
les lunettes de RV n’offrent pas
d’alternative satisfaisante, et que
la solution résiderait davantage
dans une projection tridimensionnelle
qui nous permettrait
de communiquer en temps réel,
comme si nos interlocuteurs se
trouvaient dans la pièce. « C’est
à la technologie de s’adapter
à nous, pas le contraire », affirme
ce Néerlandais d’origine.
Vertegaal a d’abord travaillé
avec le Human Media Lab de la
Queen’s University de Kingston
(Canada) sur « l’humanisation »
des portables, tablettes et autres
supports. Après avoir inventé les
produits PaperWindows (2004),
PaperPhone (2010) et PaperTab
(2012), des appareils pliables
que l’on peut feuilleter et qui ont
inspiré chez Huawei le smartphone
pliable Mate X, il collabore
aujourd’hui avec le fabricant
chinois : pourrons-nous un jour
envoyer une version hologramme
de nous-même à nos rendez-vous
galants ? « Il nous manque encore
quelques idées pour adapter
ce projet à l’usage quotidien »,
regrette-t-il, même si l’évolution
de cette technologie permet de
rêver un peu.
QUEEN'S UNIVERSITY, GETTY IMAGES
54 INNOVATOR
« DES
LIVRAISONS
PAR DRONE »
LIU QIANGDONG
JD.com
Alors que l’Europe en est
encore à la phase expérimentale,
la livraison par
drone est déjà utilisée en
Chine depuis 2019 par le
géant de la vente en ligne
JD.com (ci-dessous, son
PDG : Liu Qiagdong), notamment
dans les zones
rurales reculées.
Les modèles utilisés
peuvent transporter
260 kg et atteindre une
vitesse de 130 km/h. Si
son concurrent DHL ne
supporte une charge
maximale « que » de 5 kg,
c’est bien lui qui a mis en
place le premier service
urbain de livraison dans
la ville de Guangzhou
(13 millions d’habitants).
Sur une trajectoire de
8 kilomètres, un drone
est cinq fois plus rapide
qu’un camion, ne cause
ni embouteillage, ni pollution
et est entièrement
automatisé : depuis le
chargement jusqu’à
l’étape de livraison, qui
utilise la reconnaissance
faciale.
« AMÉLIORER
LA SITUATION
SANITAIRE »
AJET OAK
Tiger Toilet
Cette invention indienne
est aussi simple que géniale
et pourrait mettre fin
à la situation sanitaire catastrophique
de certaines
régions du globe, tout en
empêchant la propagation
de plusieurs maladies.
Ces toilettes fonctionnent
en utilisant un vermifiltre,
c’est-à-dire des vers (le
ver du fumier, ou eisenia
foetida) qui se chargent
de la tâche ingrate de
digérer les matières
fécales, dont ils raffolent,
et de les transformer en
fumier inodore. Ajet Oak,
fondateur de Tiger Toilet :
« Nos WC fonctionnent
sans eau ni système de
canalisation. La plupart
des gens qui ont reçu
une Tiger Toilet n’avaient
jamais utilisé de WC
classiques auparavant »,
raconte-t-il. Un succès qui
le motive à faire connaître
ses toilettes vermifiltrées
partout dans le monde.
« STIMULER
ET RÉPARER
LES NERFS »
GREGOIRE COURTINE
Wings for Life
Pourrons-nous bientôt
guérir les lésions de la
moelle épinière et voir
toutes celles et ceux qui
en souffrent pouvoir se
servir à nouveau de leurs
jambes ? La recherche
contre ce mal, qui touche
des millions de personnes
dans le monde
(et 250 000 personnes
de plus chaque année),
a fait l’objet d’avancées
spectaculaires ces
dernières années,
notamment grâce à la
fondation Wings for Life.
Le cas du gymnaste
paraplégique David
Mzee, qui peut à nouveau
marcher (à l’aide
d’un déambulateur)
après un nouveau type
de thérapie, a récemment
fait sensation.
« Nous avons constaté
qu’une grande partie
de la moelle épinière
reste intacte après une
blessure, et peut être
stimulée électriquement,
a déclaré Grégoire
Courtine, le scientifique
responsable de la
thérapie. Les patients
peuvent remarcher à
l’aide de la stimulation
électrique et même
reprendre le contrôle
de leurs fonctions
vésicales, intestinales
et sexuelles. » Le cas
de Mzee rend le scientifique
confiant que
d’ici 2024, « le contrôle
volontaire de leurs muscles
sera possible pour
les paraplégiques ».
INNOVATOR 55
« APPRI-
VOISER LES
DROGUES »
« LE BIO SERA
PLUS QU’UNE
OPTION »
« PLUS AUCUNE
MINE ANTI-
PERSONNEL »
JR RAHN
MindMed
RENÉ JANNICK
JØRGENSEN
BART
WEETJENS
Si les substances psycho
actives comme le LSD,
l’ecstasy et autres champis
ont longtemps passionné
les scientifiques
(et les militaires) pour
leurs vertus thérapeutiques,
leurs effets secondaires
incontrôlables
et parfois fatals ont fini
par décourager les plus
motivés d’entre eux.
On assiste à un regain
d’intérêt avec des
projets tels que celui de
l’entreprise neuropharmaceutique
suisse Mind-
Med : elle étudie les bienfaits
des psychotropes
microdosés pour traiter
certains troubles psychiques
comme l’anxiété,
le trouble de l’attention
ou pour accompagner
une cure de désintoxication.
JR Rahn, co-fondateur
de MindMed, se
veut optimiste : « Nous
sommes en train de faire
de nombreuses découvertes
importantes sur
le bien-fondé de l’usage
thérapeutique des substances
psychédéliques. »
L’équipe collabore en ce
moment avec le laboratoire
Liechti à Bâle et
étudie également les effets
de la MDMA et de la
psilocybine en microdosage.
Avec succès : après
le démarrage en janvier
dernier de la première
étude combinée sur le
LSD et la MDMA, l’action
de l’entreprise a explosé
en bourse.
Farmdroid
L’agriculture pouvait être
résumée jusqu’à présent
par le dilemme suivant :
faire du bio est épuisant,
faire du conventionnel détruit
l’environnement. Un
choix cornélien qui pourrait
bientôt être définitivement
réglé, en faveur du
bio, grâce à une invention
danoise. Les robots FD20
conçus par FarmDroid
effectuent les tâches
agricoles les plus ardues
comme l’ensemencement
ou le désherbage, tout en
étant écolos et durables,
puisqu’ils fonctionnent à
la même énergie que les
plantes qu’ils soignent :
celle du soleil. Légers, ils
passent dans les champs
sans les endommager et
reconnaissent la position
correcte de chaque graine
grâce à leur GP, ce qui leur
permet de commencer le
sarclage avant même que
la graine germe. « Nous
avons commencé à livrer
des clients en Autriche, en
Allemagne et en France »,
précise le PDG René
Jannick Jørgensen.
Apopo
C’est à l’âge de 9 ans
que Bart Weetjens,
Belge d’origine, a reçu
son premier hamster.
Dès lors, il s’est découvert
une passion
pour les rongeurs,
admirant leur intelligence
et leurs facilités
d’apprentissage.
Une fois adulte, le jeune
homme découvre en
Afrique le problème des
mines antipersonnel, qui
font chaque année des
milliers de victimes, et
cela, dans 59 pays du
monde. Weetjens décide
alors de dresser des rats
au déminage, mais pas
n’importe lesquels : les
rats géants de Gambie,
à l’odorat particulièrement
sensible au TNT.
L’ONG Apopo était
née : aujourd’hui active
dans de nombreux pays
d’Afrique et d’Asie,
Apopo a contribué à débarrasser
définitivement
le Mozambique de ses
mines, et poursuit, avec
l’aide de ses rats, sa
tâche titanesque.
CYLEONG.BE, DAVID PAYR
56 INNOVATOR
« NOS MÉTIERS
AURONT
DU SENS »
MARIE RINGLER
Ashoka
L’entrepreneuriat social est un
des secteurs-clés de la création
d’entreprise actuellement, et
va sans doute le rester dans les
années à venir, car les gens ont
de plus en plus besoin de trouver
un sens à leur travail.
« À eux seuls, les 4 000 fellows
de notre réseau mondial ont un
impact positif sur le quotidien
de 850 millions de personnes »,
résume Marie Ringler, la directrice
régionale Europe pour
Ashoka : cette ONG américaine
a pour mission de détecter,
soutenir financièrement et
mettre en réseau des initiatives
venues du monde entier et qui
peuvent contribuer à rendre le
monde meilleur, plus pacifique
et plus sain. Mais comment
les sélectionne-t-elle ? « Les
entrepreneurs sociaux que nous
soutenons ne se contentent pas
de soulager des symptômes :
ils s’attaquent directement aux
causes et incitent les gens à
prendre eux-mêmes leurs vies
en main. » Ashoka soutient par
exemple la Pelebox, un kit médical
permettant aux habitants des
bidonvilles souffrant de maladies
chroniques de faire leurs propres
tests sanguins, ou encore un programme
en Indonésie et en Ouganda
pour former les mères à la
déradicalisation (MotherSchool).
Ou cette initiative, Discovering
Hands, qui forme des femmes
mal- et non-voyantes à la palpation
mammaire pour détecter le
cancer du sein dans les hôpitaux.
« STOPPER
LE VIEILLIS-
SEMENT »
SHAI EFRATI
Shamir Medical Center
En novembre dernier, le scientifique
israélien Shai Efrati
a lancé sur Twitter un cri de
victoire : « Pour la première
fois, nous avons réussi non
seulement à stopper le processus
de vieillissement des
cellules humaines, mais même
carrément à l’inverser. »
Cette découverte, faite au
Shamir Medical Center, pourrait
bientôt bouleverser nos
vies, et pas seulement nous
débarrasser de nos problèmes
de rides, de hanches douloureuses
et de sénilité. L’oxygénothérapie
hyperbare testée
par l’équipe d’Efrati peut en
effet inverser deux processus
majeurs liés au vieillissement :
le raccourcissement des
télomères à l’extrémité des
chromosomes et l’accumulation
de cellules sénescentes
(c’est-à-dire anciennes et défaillantes)
dans l’organisme.
En trois mois, les progrès
réalisés laissent à penser que
la peur de vieillir deviendra
peut-être, comme la hantise
des loups autrefois, une peur
complètement infondée.
INNOVATOR 57
Ici la Terre, vous
me recevez ?
Peter Scott,
membre
de l’équipe, en
train de monter
l’antenne qui
assurera la communication
avec la fusée.
58 INNOVATOR
LES
ASTRO-
BRICOLEURS
TEXTE Reiner Kapeller
PHOTOS Robert Ormerod
Seul programme spatial amateur au
monde, Copenhagen Suborbitals veut
envoyer une fusée habitée dans l’espace,
d’ici 2030, sans subventions ni haute
technologie, mais avec une bonne dose de débrouillardise.
La devise de ces Mad Max danois :
cherche des solutions, pas des excuses.
INNOVATOR 59
COPENHAGUE,
CENTRALE
SUÈDE
MER
BALTIQUE
DANEMARK
É
BORNHOLM,
DANEMARK
SPACEPORT
NEXØ
BASE DE
LANCEMENT
ÉTÉ 2018, UN DIMANCHE MATIN SUR LE PORT DE
COPENHAGUE. VENANT D’UN GRAND BÂTIMENT
situé dans l’ancien chantier naval de Refshaleøen,
des bribes de ce qui ressemble à une dispute se font
entendre : à l’intérieur du hangar, des hommes en
bleu de travail, taillés comme des vikings, se tiennent
devant une immense fusée blanche de onze mètres
de haut. Le nom de cet engin longiligne à la coiffe
orange vif s’étire sur la coque en grosses lettres
noires : Copenhagen Suborbitals.
La tension est palpable parmi les membres de
l’équipe : la fusée doit démarrer les tests dans la
semaine qui suit, et un câble spécial vient de rendre
l’âme. Faire venir un nouveau câble prendrait une
semaine, ce qui ferait rater la date autorisée par la
municipalité et repousserait les tests
de plusieurs semaines. Les ingénieurs
et machinistes réunis dans le hangar
travaillent bénévolement pour le programme
Copenhagen Suborbitals. Ils
refusent de s’avouer vaincus : cela
fait des semaines qu’ils préparent la
fusée Nexø II pour la phase de tests,
et voilà qu’un simple câble risque de
faire tout capoter ! Passant la main
d’un air songeur sur sa barbe de trois
jours, l’un d’eux semble avoir l’idée
du siècle : « J’ai dû réparer un câble
qui ressemblait exactement à celui-là
dans ma bagnole. On peut essayer
d’en trouver un. » Une heure plus
tard, notre ingénieur-ferrailleur
revient de la casse avec un câble de
frein provenant d’un fourgon Fiat
Ducato. C’est la bonne pièce : les soupapes
fonctionnent de nouveau. Les
tests auront bien lieu comme prévu.
Pour Mads Wilson, cette anecdote
illustre l’esprit du projet Copenhagen
Suborbitals : « Nous n’acceptons
aucune excuse : nous essayons toujours
de trouver une solution pour
que ça marche. Cela fait partie de
notre ADN. » Mads est le porte-parole
et l’un des principaux membres de
l’association Copenhagen Suborbitals,
fondée en 2008, qui compte désormais
une cinquantaine de membres.
Avec six lancements de fusée (non
habitée) depuis sa création, l’association
affiche un beau bilan, malgré
quelques échecs. Si les fusées
3, 2, 1…
Décollage !
La fusée HEAT 1X
(9,38 mètres
de haut pour 1 630
kilos) a été lancée
le 3 juin 2011
depuis la plateforme
flottante
Sputnik, en mer
Baltique.
THOMAS PEDERSEN
60
1 PARACHUTE
Le parachute de
150 m 2 utilisé
pour la capsule
du lanceur Tycho
Deep Space est
exposé au musée
de l’association.
2 PROPULSION
L’équipe a commencé
à utiliser
le mélange éthanol-oxygène
liquide avec
les premiers
moteurs TM-65.
3 CAPSULE
Amoureusement
baptisée Beautiful
Betty, la petite
capsule du Tycho
Deep Space
peut abriter un
astronaute.
1
2
3
INNOVATOR 61
HEAT-1X (2011), Sapphire (2013) ou
Nexø II (2018) ont parfaitement fonctionné,
d’autres lancements ont
connu plus de problèmes : Nexø I
(2016), qui inaugurait un tout nouveau
type de fusée, n’a pas atteint la
vitesse espérée, et HEAT-2X (2014) est
partie en flammes lors du lancement.
Mads se souvient : « Nous avons vu
deux ans de travail intensif partir en
fumée. Mais cinq minutes après l’incendie,
on était de nouveau à fond. »
« L’ORDINATEUR DE
CONTRÔLE PROVIENT
DE LA CAISSE CENTRALE
D’UN BURGER KING. »
Forts de ces expériences, les Suborbitals
se sont lancés dans ce qui est
leur plus gros projet jusqu’ici : la
construction de la fusée Spica, qui
doit envoyer, d’ici 2030, un astronaute
amateur à plus de 100 kilomètres
au-dessus de la Terre. C’est là
que se trouve la ligne Kármán qui
marque le début de l’espace. Une fois
détachée du lanceur, la capsule habitée
doit redescendre sur Terre et être
freinée par un parachute. Si le projet
réussit, le Danemark deviendra le
quatrième pays, après la Russie, la
Chine et les États-Unis, à avoir
envoyé un astronaute dans l’espace.
Un projet colossal qui n’a d’égal que la
maigreur de leurs moyens : entièrement
bénévoles, les membres de CS
ne sont pas tous des spécialistes de
l’espace, loin de là. Si l’équipe compte
deux anciens employés de la NASA et
de l’ESA et quelques constructeurs de
composants satellites pour l’Université
technique, 90 % des membres n’ont
rien à voir avec ce domaine. Ils sont
techniciens, ingénieurs, informaticiens
ou travaillent dans les relations
publiques. On y trouve aussi un instituteur
et un physiothérapeute.
L’amateurisme, les Orbitals le compensent
par un enthousiasme sans
limite et une passion revendiquée
pour le bidouillage : trouver des
pièces, les décortiquer, les remonter,
les tester… Ces rois de la débrouille se
retrouvent souvent le soir après le travail
ou le week-end dans un des deux
hangars (1 000 m²) de l’association,
où s’entassent des montagnes de
pièces détachées et de ferraille en tous
genres. Dans ce décor digne d’un film
steampunk, « tout le monde bosse gratos,
on organise deux à trois fois par
semaine des ateliers ouverts au public,
en essayant de garder des effectifs
réduits pour être plus efficaces ».
Durant les ateliers, on apprend à
réparer, détourner ou adapter toutes
sortes de pièces ou d’appareils pour
l’usage spatial. Comme ce vieux
sèche-cheveux, dont la soufflerie a été
utilisée dans Nexø II pour éviter que la
valve ne gèle à l’intérieur de la fusée.
Ou l’ordinateur de contrôle au sol, qui
faisait partie, dans une autre vie, de
la caisse centrale d’un Burger King et
servait à calculer le coût du supplément
mayonnaise. Autre trouvaille
dénichée à la casse et détournée : cet
ancien radôme, un dôme abritant les
antennes, qui sert aujourd’hui à
amplifier le signal wifi du navire de
commandement. C’est depuis ce
bateau qu’on démarre le compte à
rebours : il faut dire que les tirs de
fusée ont lieu en haute mer, dans la
Baltique, pour des raisons de sécurité.
Les composants des fusées peuvent
aussi provenir de vieilles bagnoles,
comme les cartouches de gaz que l’on
Contrôle de
sécurité
Jop Nijenhuis
consolide un
système de secours
pour évacuer
l'astronaute
en cas d'urgence.
62 INNOVATOR
« LES SUBORBI-
TALS VEULENT
COMPRENDRE
COMMENT LES
CHOSES FONC-
TIONNENT. C’EST
POUR CELA QU’ON
DÉMONTE TOUT. »
trouve dans les airbags et qui serviront
à lancer le parachute d’atterrissage.
Deux raisons expliquent cette
obsession du recyclage : la première,
c’est que les Suborbitals sont des passionnés
du bricolage. Des geeks qui
adorent démonter un appareil pour
voir comment ça marche. La deuxième,
plus pragmatique, est évidemment
le manque de moyens.
Car si le budget annuel de la NASA
avoisine les 22,6 milliards de dollars,
celui de Copenhagen Suborbitals est
à peine de… 100 000 dollars. Un
budget microscopique qui sert à
payer le loyer des hangars, le matos
et les réparations. La trésorerie de
l’association est approvisionnée par
une communauté de crowdfunding
d’environ 600 personnes, qui
donnent en moyenne 10 à 20 dollars
chaque mois.
Cette contrainte financière les oblige
certes à rester créatifs, mais la
construction d’une fusée demeure un
objectif accessible : « Je suis épaté de la
façon dont SpaceX (l’entreprise d’Elon
Musk qui produit les fusées Falcon 9,
ndlr) a conçu des lanceurs capables
d’atterrir tout seuls et d’être réutilisés.
Heureusement que nous ne devons
pas faire ça. Nos fusées doivent savoir
faire deux choses : atteindre l’espace
et retomber dans la mer au moyen
d'un parachute. » Mads explique pourquoi
il est convaincu de la faisabilité
du projet : « On sera capable d’envoyer
un astronaute amateur dans l’espace
INNOVATOR 63
64 INNOVATOR
Loi de l’attraction
Jop Nijenhuis a
quitté les Pays-
Bas pour se
consacrer au projet
danois : il tient
ici un élément de
l’enveloppe du
lanceur Nexø I.
Ateliers
De nombreux
tests (machines
et matériel) sont
réalisés dans
les bâtiments
de l’association.
1
2
Test parachute
Une nouvelle idée
est d’abord testée
à petite échelle.
Si les tests sont
bons, on lance
la fabrication d’un
parachute à taille
réelle.
Rocketeer danois
Thomas Madsen
fait partie de
l’équipe de
construction.
Cet ingénieur a
conçu de nombreuses
pièces
grâce au logiciel
SolidWorks.
1
L’ENVELOPPE
Pour des questions
de poids,
l’extérieur de
HEAT-2X est
composé
presque intégralement
d’aluminium.
Le trou
permet aux ingénieurs
d’accéder
au moteur.
2
LES AILERONS
Ils sont numérotés
pour permettre
à l’équipe,
en filmant la
fusée, de savoir
à quelle vitesse
elle tourne.
INNOVATOR 65
« LES PROGRÈS
TECHNIQUES ONT
RENDU L’AVENTURE
SPATIALE PLUS
ACCESSIBLE. »
grâce à la fusée Spica d’ici 2030,
parce que cette science est à notre
portée aujourd’hui. » Loin d’être
farfelue, cette certitude, partagée
par tous les membres de l’association,
se base sur l’histoire de l’ingénierie
spatiale. Toutes les connaissances,
les concepts et les théories
utilisés actuellement dans les
hangars du port de Copenhague
trouvent leurs origines dans les
travaux réalisés par la NASA et
l’Union Soviétique durant les
années 50 et 60, et dont les résultats
ont été largement décrits et
diffusés.
Un savoir colossal auquel viennent
s’ajouter les progrès techniques
des dernières décennies. Un
exemple : si la construction des
parois toléraient auparavant une
marge d’à peine 0,1 mm – au
risque de voir la fusée dévier de sa
trajectoire après le lancement – la
tolérance est aujourd’hui d’un millimètre.
Cette marge de manœuvre
supplémentaire est due au nouvel
ordinateur de contrôle, capable
de corriger automatiquement les
écarts. Il a été fabriqué en utilisant
une carte électronique Arduino,
achetée 100 euros. Si de telles
prouesses sont aujourd’hui accessibles
théoriquement au commun
des mortels, elles restent pourtant
d’une incroyable complexité.
Les échecs, dans ce domaine,
tiennent à peu de choses : c’est cet
amer constat qu’ont dû faire, en
2016, les membres de CS lors du
tir de Nexø I, qui n’a jamais atteint
l’altitude escomptée. Un problème
66 INNOVATOR
INFOS
Soutenir le projet
de Copenhagen
Suborbitals
CROWDFUNDING
Pour faire décoller
Spica d’ici 2030,
l’association a besoin
du soutien de ses
adhérents. Au choix :
MACH 2
Une adhésion de
niveau « Mach 2 »
vous ouvre l’accès à
tous les tests publics
et coûte 10 dollars
par mois.
MACH 3
Les adhérents « Mach
3 » auront en plus la
chance de voir leur
nom figurer sur la
fusée Spica, pour
20 dollars par mois.
Infos : copenhagen
suborbitals.com
Rocket Man
Mads Wilson est
le porte-parole
de Copenhagen
Suborbitals,
conférencier
TED et membre
du conseil de
l’association.
lié au carburant du moteur, alimenté
par un mélange d’éthanol
et d’oxygène liquide : or, ce dernier
est d’une manipulation très
complexe, puisque l’oxygène
ne devient liquide qu’à une température
de – 183 °C et que tout
réchauffement entraîne une évaporation
– ce qui peut s’avérer
dangereux. Rendu à l’état
gazeux, l’oxygène prend alors
860 fois plus de place, et doit
s’échapper. Le remplissage du
réservoir est donc une étape délicate,
toujours réalisée au dernier
moment. Malgré cela, il a fallu
trois essais pour que les ingénieurs
parviennent à déterminer
la quantité d’oxygène liquide
dans le réservoir. Trois essais
qui illustrent la ténacité de ces
astro- bricoleurs. Le premier essai
a consisté à peser la fusée avant
et après remplissage. Une technique
qui fonctionnait sur la
terre ferme, mais pas sur la plateforme
flottante de lancement.
L’équipe a alors eu l’idée d’installer
une tige au milieu du réservoir,
sur laquelle étaient fixés des
capteurs de température tous les
cinq centimètres. Cette jauge permettait
certes de vérifier la quantité
d’oxygène, mais n’était pas
encore assez précise. La troisième
tentative, qui consista en un capteur
de niveau, fut la bonne : une
fois l’idée validée, le zèle et l’orgueil
des rois de la bidouille ont
fait le reste. Au lieu de s’en payer
un neuf à 8 000 dollars, les
membres de CS ont décidé de
se fabriquer un capteur à partir
d’un réservoir d’oxygène liquide
provenant d’un hôpital « On l’a
démonté et on en a construit un
plus petit pour le faire rentrer
dans notre réservoir. »
Cette créativité, les Suborbitals
veulent en faire profiter le plus
grand nombre. Une transparence
qui s’explique évidemment par
le caractère participatif de leur
financement, mais aussi parce
que le projet spatial est, depuis
son lancement, conçu dans l’esprit
open source. CS a ainsi
publié près de 300 vidéos You-
Tube sur ses avancées et les principes
de physique et d’ingénierie
« CE QUE NOUS
RÉALISONS EN-
SEMBLE EST PLUS
GRAND QUE CE QUE
NOUS SOMMES
INDIVIDUELLE-
MENT. »
qui les sous-tendent, donné des
cours de technologie spatiale à
l’université et aidé à la création
d’une start-up. L’un de ses
membres, Jacob Skov Larsen
figure également dans le jury du
concours EuRoc (European Rocketery
Challenge). « Nous voulons,
par notre travail, inspirer les gens
et les motiver à entreprendre l’impossible.
Le message que nous
voulons transmettre, c’est que
ce que nous réalisons ensemble
est plus grand que ce que nous
sommes individuellement. »
Plus de douze ans après la création
du projet, la passion et
l’acharnement qui animent ces
bricoleurs de l’espace – et toutes
celles et ceux qui les soutiennent
– demeurent intacts. Le rêve se
poursuit, malgré les défaites et
les déceptions… Mais déjà, le
chemin parcouru par Copenhagen
Suborbitals force le respect :
ils entrent maintenant dans la
dernière phase du projet, la plus
compliquée aussi. Tous y croient
dur comme fer : ils réussiront
à envoyer un astronaute dans
l’espace. Bientôt. C’est juste une
question de temps.
INNOVATOR 67
Un virage bien
négocié : Nico
Rosberg avait
déjà pensé à son
projet d’investissement
durable
quand il était encore
pilote de F1.
68 INNOVATOR
J’AI MANIFESTÉ
POUR
LE CLIMAT
Texte WERNER JESSNER
Photos TOM ZIORA
Nico Rosberg, 35ans, est le dernier pilote de F1 à avoir vaincu
Lewis Hamilton. Devenu champion du monde, il a pris sa
retraite sans tarder pour entamer une carrière réussie
d’investisseur en développement durable et en innovation.
Rencontre avec un ancien égoïste repenti.
INNOVATOR 69
Tthe red bulletin inno vator :
Tu te définis comme un entrepreneur
en développement
durable. Qu’est-ce que ça veut
dire ?
nico rosberg : C’est quelqu’un
qui s’appuie sur certaines valeurs,
ne réfléchit pas qu’en termes de
Toujours
profit mais essaie, par ses investissements,
d’avoir un impact positif
sur la société et l’environnement.
Comment en es-tu arrivé là ?
Je me suis fait cette promesse
lorsque j’étais pilote de F1. Après
cette phase « satisfaction de l’ego »,
je savais que je voulais commencer
à me rendre utile. Je sentais qu’il
me manquait quelque chose.
On se réveille un beau matin en
pensant au bien de l’humanité
au lieu de penser à soi ?
C’est un processus qui a commencé
pendant ma carrière de
pilote. Je travaillais avec un psychologue,
et c’est au cours de nos entretiens que j’ai
compris la force que cela nous procure
lorsqu’on fait le bien et qu’on pense aux
autres. Je le sais aujourd’hui : c’est un sentiment
incroyable de faire quelque chose
contre le réchauffement climatique, et
c’est ça qui motive aussi toute mon équipe.
Peut-on s’autoriser à être altruiste quand
on doit gagner contre Lewis Hamilton
pour être champion du monde ?
On doit faire preuve d’égoïsme pour avoir
du succès, mais même là, on peut essayer
de trouver un certain équilibre, parce
qu’on n’arrive à rien tout seul : on a besoin
du soutien de l’équipe, des fans.
N’est-ce pas aussi la mauvaise
conscience qui t’a fait passer de la F1
au développement durable ?
Absolument pas. Je suis fier de mes succès
dans ce sport, et puis il ne faut pas
oublier : de nombreuses innovations technologiques
sont nées grâce au sport automobile.
Le développement de moteurs
turbo plus compacts et plus économes,
de moteurs hybrides, l’usage des fibres
de carbone pour davantage de légèreté…
Tout cela, on le doit à la F1.
Parlons d’un autre projet de course tout
nouveau, dans lequel tu es impliqué : les
séries Extreme E, qui vont débuter cette
année. Quelle est l’idée derrière ce
championnat ?
Il s’agit de courses de SUV électriques dans
des régions du monde touchées par le
réchauffement climatique : par exemple
l’Amazonie, ravagée par les incendies, ou
le Sénégal, dont les côtes sont polluées par
le plastique. Ce championnat réunit mes
deux passions : le sport automobile et le
développement durable. Notre équipe est
réunie autour de certaines valeurs et j’espère
qu’on pourra en inspirer d’autres. Le
sport a une dimension émotionnelle très
forte, et il faut l’utiliser à bon escient : faire
le bien, influencer le grand public dans la
bonne direction. Être un exemple.
Quelles sont les valeurs défendues par
le championnat Extreme E ?
Un exemple : nous nous engageons,
quand nous quitterons les lieux où se
dérouleront les courses, à les laisser dans
un meilleur état qu’à notre arrivée. Attirer
l’attention sur le réchauffement climatique,
c’est une chose, mais avoir une
action concrète sur place pour aider les
gens, ça compte aussi. Lorsque nous
étions en Espagne fin 2020 pour les séries
de tests, notre équipe a ainsi contacté la
première société de reboisement du pays.
en lice :
après ses adieux
à la Formule 1,
Nico Rosberg est
devenu un « investisseur
vert ».
70 INNOVATOR
« Le potentiel
économique d’un
projet est aussi
important que
son potentiel
humaniste. »
INNOVATOR 71
Un deal a été conclu pour reboiser une
partie du parcours de la course, et nous
avons même planté les 100 premiers
arbres de nos mains. C’est un petit geste,
mais ça illustre notre façon de penser.
Tu investis surtout dans le domaine de
la mobilité : faut-il selon toi s’engager
dans des secteurs que l’on connaît bien ?
Évidemment, c’est un domaine où je me
sens très à l’aise, pour lequel j’ai une passion,
un réseau de contacts et une crédibilité.
Mais c’est aussi parce qu’on va beaucoup
en parler dans la prochaine décennie,
avec la transition énergétique, les véhicules
électriques, peut-être aussi l’hydrogène.
Sur les vingt investissements que j’ai
dans mon portefeuille, trois sont bien placés
pour devenir des licornes (terme qui
désigne des startups valorisées à plus d’un
milliard de dollars, ndlr) et ils concernent
tous le secteur du transport électrique :
Fornula E, Lilium (taxis aériens, ndlr) et
Tier (trottinettes électriques en location,
ndlr). Mais ça ne m’empêche pas de m’intéresser
à d’autres secteurs, comme celui
de l’alimentation, notamment pour des
convictions personnelles : je suis obsédé
par la santé.
Y a-t-il un projet cher à ton cœur dont
le succès a dépassé toutes tes attentes ?
Le projet Tier, avec les trottinettes électriques.
Il y a beaucoup de concurrence sur
ce marché, les gros groupes américains y
injectent des milliards, sans compter qu’au
début, il n’y avait aucune régulation de circulation
dans les villes : le risque était donc
énorme. Mais on a eu récemment la participation
du géant japonais Softbank, à
hauteur de 250 millions de dollars. Tier
est aujourd’hui le n° 2 du secteur au niveau
mondial et leader du marché en Europe.
C’est incroyable tout ce qui s’est passé ces
dernières années, et ça montre la compétence
des fondateurs de la boîte, pour arriver
à se hisser à cette place, dans un marché
aussi concurrentiel.
Quel concept, quelles qualités doit
avoir un nouveau projet pour te donner
envie d’y investir ?
Il faut deux choses : une idée de base qui
fonctionne et que le projet soit fondé sur
des valeurs. Le potentiel économique d’un
projet est aussi important que son potentiel
humaniste. Il faut aussi que les fondateurs
et moi soyons sur la même longueur
d’onde, et qu’ils ne soient ni bornés ni
imbus d’eux-mêmes : toute jeune pousse
va devoir changer son système de
management au moins une fois pour
s’adapter à sa croissance. Cela
demande d’être flexible, et c’est
pour ça que j’ai besoin de savoir
qui sont les autres investisseurs
sur le projet.
Te considères-tu « seulement »
comme un investisseur ?
Non, je suis un créateur de projet :
le Greentech Festival de Berlin,
qui réunit entrepreneurs, consommateurs
et investisseurs autour
d’innovations en développement
durable. Nous sommes devenus
l’un des premiers festivals d’Europe
en la matière. On a ainsi eu
la visite de personnages haut
placés, comme le PDG de Google,
Sundar Pichai, ou la présidente
de la commission européenne,
Ursula von der Leyen.
Mieux vaut donc investir dans
les panneaux solaires et les
moteurs alternatifs que dans les
armes et le tabac ?
Évidemment, c’est aujourd’hui
complètement dans la tendance.
Et c’est génial parce que ça va
accélérer la transition énergétique !
Dans les prochains cinq à dix ans,
c’est dans ces secteurs qu’on va
avoir les plus gros retours sur
investissement. Et des mouvements
comme Fridays for Future
ont une influence là-dedans.
Comment ça ?
C’est ce que j’ai observé dans mon
cercle d’amis : le PDG d’une grosse
boîte voit ses enfants rentrer le
vendredi soir de la manif et lui
demander : « Papa, et toi, qu’est-ce
que tu fais contre le réchauffement
? Tu peux faire tellement
de choses ! Ça peut pas continuer
comme ça ! » Et hop, dans la
semaine qui suit, le sujet devient
« Le sport a
une dimension
émotionnelle
très forte,
qu’il faut utiliser
à bon escient. »
QUELQUES
CHIFFRES
6
ans : l’âge où
Nico a conduit
un kart pour la
première fois
23
victoires obtenues
en dix ans
en tant que
pilote de F1
910 000
abonnés sur sa
chaîne YouTube
35 000
visiteurs pour
son premier
Greentech
Festival en 2019
20
startups et
projets : son
portefeuille d’investissements
72 INNOVATOR
investir dans la Formule E, il m’a dit que
j’étais un abruti. Et maintenant, c’est lui
qui programme son réveil pour ne rater
aucune course ! Des gens comme lui, ça
montre bien à quel point la mobilité électrique
est acceptée à présent. Il ne nous
reste plus qu’à convaincre le plus farouche
de tous les petrolheads : Walter Röhrl,
champion du monde de rallye. Mais même
ça, on y arrivera. (rires)
Que conseiller aux gens qui doutent
encore des véhicules électriques ?
Qu’ils se penchent un peu sur le sujet,
qu’ils s’informent de manière éclairée : tout
le monde n’a pas à acheter une voiture
électrique. Mais ce mode de transport est
aujourd’hui, dans de nombreux domaines,
plus avantageux que le mode conventionnel,
même si cela dépend des besoins de
chacun. Pour circuler en centre-ville, si l’on
compare sur cinq ans, cela coûte moins
cher de rouler en électrique.
GEPA PICTURES/RED BULL CONTENT POOL, TEAM NICO ROSBERG
L’étoffe des vainqueurs :
Nico Rosberg a fait partie
des grands champions de
F1, en photo ici lors de la
victoire sur le Red Bull Ring,
à Spielberg (Autriche),
en 2014.
une des priorités du conseil de
direction. Il ne faut pas sousestimer
le pouvoir des jeunes…
Ils en feraient une tête, ces
jeunes, s’ils voyaient Nico
Rosberg participer avec eux aux
Fridays for Future...
C’est précisément ce que j’ai fait !
À Berlin, pendant le Greentech
Festival. Je l’admets : au début,
j’étais pas vraiment dans ma zone
de confort. Quand je me suis
retrouvé sur la scène à côté d’un
gamin de neuf ans, j’ai été fasciné
par la passion qu’il mettait dans
ses propos. C’était le genre d’enthousiasme
que j’avais pour la F1 !
Et c’est cet enthousiasme que j’essaie,
grâce à mon statut et à mon
réseau, de transmettre au public.
Ta nouvelle passion pour le tout
électrique a dû susciter beaucoup
d’incompréhension chez
les anciens...
Mon père (Keke Rosberg, champion
de F1 en 1982, ndlr) est l’archétype
même de ces fans de bagnoles à
l’ancienne qu’on appelle les petrolheads.
Quand j’ai commencé à
Les vieilles Porsche et autres Ferrari
sont-elles condamnées à finir leurs vies
au fond d’un garage ?
J’espère qu’on aura toujours envie de voir
et de faire rouler les belles voitures. Elles
font partie de notre histoire, de notre
culture. Peut-être trouvera-t-on un jour un
carburant qui remplacera l’essence. Mais
je pense qu’il faut garder ce patrimoine,
et qu’il vaut mieux essayer de trouver des
solutions plutôt que d’interdire.
Possèdes-tu un de ces old timers ?
Oui, une Mercedes 300 SL Gullwing. Mais
chez moi, à Monaco, j’utilise surtout l’application
Mobee (car-sharing électrique,
ndlr) pour mes déplacements : on peut
louer une petite Renault Twizy, qui permet
de se garer partout, même sur les
places moto.
Quels enseignements le sport automobile
peut-il apporter au secteur de la
mobilité ?
La quête de perfection. Ne jamais faire les
choses à moitié.
Et au secteur de l’investissement ?
Savoir prendre des décisions rapidement.
C’est le même problème en politique, où
l’on parle beaucoup sans prendre de décision.
Alors que dans le sport : on discute,
on décide. On discute, on décide. C’est
une force que j’apporte dans le milieu
du business : je suis un décideur. Cette
INNOVATOR 73
Nouvelles perspectives
: Rosberg
veut booster l’engouement
pour
l’électrique avec
le championnat
Extreme E.
« Ce que le sport auto
peut apprendre au secteur
de l’investissement ?
Savoir prendre des
décisions rapidement. »
74 INNOVATOR
lenteur apathique qu’on a dans les
grandes entreprises, c’est quelque chose
que je ne supporte pas.
Cette phrase aurait pu sortir de la
bouche de ton ancien chef, Toto Wolff.
Toto est l’exemple parfait du manager qui
sait prendre des décisions. Un vrai leader,
mais pas un dictateur : il a confiance en
ses employés et fait tout pour les valoriser,
les responsabiliser. Ça leur donne de la
force et du courage et ça profite à toute
la boîte. Quand un chef montre de l’empathie
et de la reconnaissance, c’est une
sacrée motivation pour son équipe, et c’est
ce que j’essaie de faire dans la mienne.
Comment, concrètement ?
Un exemple : on a dû se mettre en télétravail,
et on va continuer comme ça après la
pandémie : ça permet notamment à mes
employés allemands de rester près de leurs
familles et de ne pas faire des allers-retours
en France ou à Monaco. Ils se sentent bien
et la productivité s’en ressent.
Comment vois-tu l’avenir, dans le
monde des transports ? Comment se
déplacera-t-on en 2040 ?
Les trajets seront pour la plupart – du
moins dans le monde occidental – complètement
propres, et j’entends par là
vraiment propres, pas juste sur le papier
après les mesures de compensation. Il y
aura aussi ce qu’on appelle des « chaînes
de mobilité », c’est-à-dire qu’on aura une
seule appli pour calculer et organiser tous
nos itinéraires, un peu comme Netflix :
une appli de Transports à la demande.
Par exemple, si je veux aller de Berlin à
Hambourg, elle me réservera la trottinette
électrique jusqu’au train, et à Hambourg,
j’aurai un drone autonome pour
m’amener à ma destination, si c’est en
dehors de la ville. Et le soir, je ferai du
car-sharing électrique pour me rendre
à une soirée entre amis.
Qu’est-ce que ça te fait quand tu t’imagines
ce monde-là ?
J’ai hâte d’y être : ça va nous apporter une
meilleure qualité de vie.
Cette chaîne de mobilité permettra –
contrairement à aujourd’hui – de se
faire transporter de porte à porte.
Et c’est là où l’Allemagne doit faire attention
pour bien négocier le tournant : c’est
le logiciel, l’application, qui va constituer
tout l’intérêt de la chose. Les constructeurs
de hardware vont perdre beaucoup
de terrain, comme dans l’industrie
du téléphone portable, à l’époque.
L’industrie automobile allemande
doit être très prudente pour ne
pas connaître le même sort que
Nokia. J’aimerais leur conseiller
de ne pas se faire damer le pion
par les Chinois ou les Américains
et de développer maintenant leurs
propres compétences.
Est-ce qu’on se déplacera autant
en 2040 qu’à l’époque d’avant
la pandémie ?
D’ici là, on aura eu une autre innovation,
que j’ai particulièrement
hâte de voir : les conférences virtuelles
avec des hologrammes.
Cela rendra nos conference calls
plus humains, plus vrais. Mais si
le fait de voyager devient un jour
une activité complètement propre,
qu’est-ce qui nous empêcherait
d’en profiter comme avant ?
Quel regard jettera-t-on alors
sur notre époque, à ton avis ?
Peut-être le même regard que
nous avons aujourd’hui sur la F1
des années 60. Ou sur une époque
où on se fichait des ceintures de
sécurité. On sera content d’avoir
opéré cette transition, et on se dira
que c’est bien mieux qu’avant.
Tes filles ont aujourd’hui trois
et cinq ans. Crois-tu qu’elles
devront passer un jour leur
permis de conduire ?
Je suppose que l’une le fera, et pas
l’autre. Mais là, c’est surtout à
cause de leurs caractères : l’une
est une fonceuse et téméraire
alors que sa sœur est plutôt prudente
et réservée.
Si tu devais définir, en tant
qu’entrepreneur, un équivalent
au titre de champion de monde
pour la F1, ce serait...
La taille de l’impact qu’auront
tous mes projets. Combien de personnes
j’ai touchées et inspirées
grâce à eux. Quelle a été ma
contribution à apporter un changement
positif. Difficile de viser
aussi haut que champion du
monde, mais la bonne nouvelle,
c’est que ma carrière d’entrepreneur
va durer beaucoup plus
longtemps que celle de pilote.
INNOVATOR 75
1
ANYBOTICS
LE MEILLEUR AMI
DE L’HOMME
Perdre la vie (ou la santé)
pour en sauver une autre :
c’est le sacrifice qu’ont fait
et font encore de nombreux
hommes et femmes dans
l’exercice de leur métier
(pompiers, sauveteurs,
liquidateurs de catastrophes
nucléaires...). Un dilemme
qui pourrait bientôt se poser
de moins en moins à l’avenir,
grâce à une entreprise
zurichoise, ANYbotics, et son
invention : ANYmal. Il s’agit
d’un robot quadrupède aussi
gros qu’un chien, équipé
de caméras (infrarouges ou
autres types) et de capteurs
(de température ou d’air, pour
repérer les fuites de gaz par
exemple), capable de se faufiler
dans des endroits difficiles
d’accès : le chien-robot peut
agir en totale autonomie ou
au contraire se faire diriger
à distance. « Il intervient là
où le risque est trop élevé
pour l’être humain », résume
Marco Hutter, co-développeur
du projet ANYmal et professeur-assistant
en robotique
à l’École polytechnique
fédérale de Zurich. La mise
en vente est prévue cette
année – notamment grâce à
une levée de fonds de vingt
millions de francs suisses l’année
dernière. Mais avant de
partir explorer le monde, ce
super-toutou doit être équipé
d’une carapace anti-poussière
et imperméable, pour le
rendre encore plus résistant.
anybiotics.com
START
ME
CHIENS-ROBOTS DE SAUVETAGE,
MODULES SOLAIRES VENUS DE L’ESPACE
ET GUÉRISON DES PARALYSIES : VOICI
7 START-UPS SUISSES QUI VONT NOUS
RENDRE LA VIE PLUS BELLE.
TEXTE : DANIEL SCHIEFERDECKER
UP
ANYBOTICS AG
76 INNOVATOR
ANYmal aide aux
opérations de sauvetage
et de recherche
de victimes après
une catastrophe.
INNOVATOR 77
3
ANNAIDA
UNE IDÉE
FERTILE
2
MYCAMPER
YES, WE CAMP!
L’idée est née d’un constat
simple : les propriétaires de
camping-car laissent souvent
leur véhicule dormir au fond
d’un garage durant l’année
tout en payant les frais d’achat
et d’entretien. D’un autre
côté, il y a tous ces gens qui
rêveraient de tester la van
life sans avoir à tout plaquer
ou à se mettre un crédit sur
le dos. Deux problèmes, une
solution : mettre en relation
les deux parties pour leur permettre
de rentrer dans leurs
frais (pour les uns) et d’en
économiser (pour les autres).
C’est la raison du succès de la
start-up bâloise MyCamper.
Le fondateur, Michele
Matt, est évidemment un
fan de camping : l’idée lui
est venue lors d’un trip avec
son bus VW en Sardaigne, en
2014. À son retour, il lance
une première version de la
plateforme et commence à
développer une flotte de véhicules,
aujourd’hui composée
de plus de 1 400 modèles.
De quoi satisfaire toutes les
bourses. Car ce partage entre
particuliers coûte environ
30 % moins cher que chez un
loueur traditionnel.
MyCamper est bien parti
pour durer, et ce malgré (voire
grâce à) la pandémie mondiale
: ce mode de vacances
libre, flexible et bon marché
est en effet amené à se développer
à l’avenir. De plus, la
tendance du sharing séduit
de plus en plus de gens, développement
durable oblige.
Stefan Lieberherr le rappelle :
« Un véhicule loué, c’est un
véhicule qui n’aura pas besoin
d’être acheté et donc produit. »
mycamper.ch
Simple et même durable :
des vacances dans un
camping-car de location.
« Nous mettons en
contact propriétaires
privés et
clients potentiels »,
résume Stefan
Lieberherr, le responsable
marketing
de MyCamper.
La procréation médicalement
assistée a encore un taux de
réussite désespérément bas :
35 % de chance que la grossesse
aboutisse. En cause :
la viabilité des embryons
inséminés est trop difficile
à évaluer. Faute d’informations
suffisantes, la sélection
est faite de manière plus ou
moins arbitraire, augmentant
le risque d’échec. La start-up
Annaida a donc développé
Embryonspin, un scanner par
résonance magnétique capable
d’observer les embryons dès
le premier stade d’évolution.
Gora Conley, co-fondateur
d’Annaida : « La procréation
assistée se fait en général in
vitro », c’est-à-dire qu’on crée
des embryons dans des éprouvettes,
pour inséminer celui
qu’on estime le plus viable
dans l’utérus de la mère. Pour
choisir, on se fie à des scanners
encore trop imprécis et dont
l’utilisation est compliquée.
« L’Embryospin est différent :
maniable, et 50 fois plus précis
que les scanners traditionnels,
résume Conley. Un avantage
qui augmente considérablement
les chances de succès
d’une grossesse. » Une levée
de fonds en 2020 a permis à la
start-up de récolter un million
de francs suisses. annaida.ch
L’Embryospin n’est
pas plus grand
qu’une boîte d’allumettes
et examine la
viabilité des
embryons.
ANDREA WULLIMANN, THOMAS EGLI/KLENICO
78 INNOVATOR
„WIR WOLLEN
UMWELT
SCHÄDLICHE
GASÖFEN
ABLÖSEN.“
4KLENICO
G É OGRAPHE
DE L’Â M E
Les troubles et maladies psychiques
concernent environ
un milliard de personnes sur
Terre, et sont la cause, dans le
monde du travail, d’un arrêt
maladie sur trois. Ces chiffres
augmentent constamment.
Face à ce phénomène, la
start -up suisse Klenico a mis
au point un instrument de
diagnostic en ligne, qui permet
de se faire rapidement
une idée des troubles psychiques
affectant un patient.
Une aide considérable pour le
corps médical, qui peut ainsi
intervenir plus vite et plus
efficacement. Le principe de
Klenico : établir, en interrogeant
le patient pour évaluer,
mesurer et synthétiser tous
les symptômes, une « cartographie
» précise de son état
psychique, permettant au
psychiatre de personnaliser
le traitement.
« Nous sommes des révélateurs
de troubles psychiques,
résume Richard Etter, PDG de
Klenico. Dans les cartes des
symptômes, le patient coche
les troubles ressentis subjectivement,
comme par exemple
“lassitude”, et aussi les autres
symptômes liés, qu’il n’aurait
pas forcément mentionnés
à son médecin traitant, tels
que “perte de concentration”
ou “auto-critique” : le
médecin se fait donc une idée
plus complète de la maladie
et peut traiter les véritables
causes au lieu de traiter
simplement les symptômes.
Le test Klenico coûte actuellement
60 CHF et est déjà
proposé dans soixante unités
médicales en Suisse, en Allemagne
et en Autriche.
klenico.com
L’équipe Klenico,
de gauche à
droite : Alejandro
Salcedo,
Richard Etter
(CEO), Pia Eggimann
et Hannes
Bitto. Ci-contre :
une carte des
symptômes.
INNOVATOR 79
Autrefois paralysé
des jambes,
David Mzee est
aujourd’hui
capable de se
lever et de marcher
en s’aidant
d’un rollator.
5
ONWARD
UN PAS DE
GÉANT
En quelques secondes, David
Mzee est devenu paraplégique
suite à un accident de sport.
Une seconde fois, en l’espace
de quelques secondes, sa vie
a à nouveau basculé lorsqu’il
rencontre Grégoire Courtine,
neuroscientifique, professeur
à l’EFPL de Lausanne, et directeur
scientifique du projet
Onward.
Au cours de ses recherche
sur les lésions graves de la
moelle épinière, Courtine a
découvert que la moelle reste
en grande partie intacte et
qu’elle peut être stimulée
électriquement pour activer
les mouvements des membres
paralysés. Il travaille alors
sur la possibilité de relier le
cerveau et la moelle épinière
par stimulations électriques.
Les résultats sont très prometteurs
: David Mzee est
aujourd’hui capable de marcher
sur de courtes distances.
Une évolution qui permet
d’améliorer le contrôle de la
vessie, de l’appareil digestif
et des organes sexuels.
Bientôt, grâce à la création
d’un pont digital entre le
cerveau et la moelle épinière,
le patient pourra diriger luimême
les stimulations. Courtine
est plein d’espoir. Il espère
concrétiser cet objectif d’ici
2024. Le miracle deviendra
alors réalité.
wingsforlife.com ; onwd.com
6
INSOLIGHT
AU BEAU FIXE
Les panneaux solaires utilisés
dans le monde ne peuvent
capter que 15 à 19 % de l’énergie
solaire. Seules les cellules
utilisées principalement pour
les satellites dans l’espace
sont plus efficaces, mais elles
restent très chères.
Une start-up basée à l’EPFL,
Insolight, pourrait révolutionner
le secteur. Laurent Coulot,
PDG de la jeune pousse vaudoise
: « Nos modules utilisent
un modèle optique de structure
alvéolée, qui concentre
la lumière comme une loupe
et la redirige en un tout petit
point vers la cellule solaire.
Cette concentration permet
d’utiliser les mêmes modules
que ceux des satellites. Notre
technologie assure un rendement
de 29 %, soit presque
le double des panneaux classiques.
» Une efficacité qui
permet de ne plus être obligé
de faire pivoter les panneaux
vers le soleil.
L’objectif d’Insolight est de
commercialiser leur produit
pour optimiser la production
d’énergie solaire en Suisse
et ailleurs. Une innovation
qui permettrait de réduire
les émissions des gaz à effet
de serre. Le lancement est
prévu pour 2022. insolight.ch
ZUZANNA ADAMCZEWSKA-BOLLE
80 INNOVATOR
Endurant et robuste,
ASIO grille tous ses
concurrents sur le
terrain.
7
La technologie
Insolight permet de
doubler l’efficacité
d’exposition.
EPFL HILLARY SANCTUARY, OLIVER GISIGER/SWISS IMAGES/INSOLIGHT, FLYBOTIX
FLYBOTIX
IL N’A PEUR DE
RIEN
Voici un petit drone léger et
malin, mais qui en a dans le
ventre. Conçu pour les inspections
en milieu industriel
ou hostile, il aime le risque
(incendies, sites radioactifs,
mines souterraines) et la
distance : jusqu’à seize kilomètres
en extérieur.
ASIO – c’est son nom –
a été conçu par la start-up
Flybotix en partenariat avec
l’EFPL de Lausanne. Son
PDG, Samir Bouabdalla est
un spécialiste de la technologie
de drones d’inspection
utilisés sur les sites industriels
et dans les opérations
de sauvetage.
La grande nouveauté de
ce drone, c’est son endurance :
24 minutes de vol en autonomie,
soit plus du double de
celle des concurrents. Une
avancée considérable quand
on sait que c’était jusqu’à
présent le principal défaut des
drones de ce type. Plusieurs
raisons expliquent cette
performance : ASIO possède
deux rotors au lieu de quatre
(ce qui le rend plus léger),
ainsi qu’un mécanisme spécial
de direction commandé
par un algorithme, qui lui
assure la puissance aérodynamique
d’un hélicoptère.
Autre atout : sa cage
de protection ultra solide.
Autant de qualités qui n’empêchent
pas ASIO d’être étonnamment
silencieux et de se
faire discret quand il le faut.
flybotix.com
INNOVATOR 81
I N N O V A T O R
S A V O I R
NEUF
CONSEILS À
NE SURTOUT
PAS SUIVRE…
… ET TROIS IDÉES JUDICIEUSES SUR LA CRÉATION
D’ENTREPRISE, TOUS PASSÉS AU CRIBLE PAR LA
STAR DE L’ENTREPRENEURIAT SOPHIA AMORUSO.
SOPHIA AMORUSO,
36 ANS
Créatrice de succès, coach et
consultante en entreprise
Propos recueillis par
AREK PIATEK
« Seules les idées nouvelles sont bonnes »,
« Tu dois être passionné par ton idée, et te
battre pour l’imposer » : des « foutaises », selon
Sophia Amoruso, auteure et entrepreneuse à
succès qui a inspiré Girlboss, la série de
Netflix. Elle nous raconte ici ce qu’elle pense
des idées reçues sur la création d’entreprise
et quels sont les conseils à suivre pour une
carrière réussie dans l’entrepreneuriat.
GETTY IMAGES
82 INNOVATOR
MYTHE N °
Il faut être passionné
et se battre
pour s’imposer
N’importe quoi ! La passion
peut être un terrible frein, car
on n’écoute plus les conseils avisés
– notamment de gens qui s’y
connaissent… et qui pourraient
te dire, par exemple, que ton idée
a besoin d’être adaptée pour
fonctionner dans le monde réel.
Pouvoir écouter et remettre en
question l’idée de départ, c’est
beaucoup plus malin que de foncer
dans le mur tête baissée. D’où
mon conseil : être passionné par
ce qu’on entreprend : oui. Être
passionné par une idée fixe :
jamais !
MYTHE N °
Seules les
idées nouvelles
sont bonnes
Là encore, c’est faux ! Et je suis le
meilleur exemple pour en parler.
Quand j’ai commencé à vendre
des fringues vintage sur eBay, non
seulement la concurrence était là
depuis longtemps, mais elle était
énorme. Le plus important, c’est
d’arriver à faire la différence, à
te démarquer des autres, ce qui
peut se faire de multiples façons :
le produit que tu proposes, comment
tu le vends, l’image de ta
marque. Le fait d’avoir appelé ma
marque, Nasty Gal (trad. vilaine
fille, en référence à un album de
Bette Davis) a sûrement été judicieux
parce que c’est provocateur,
ça attire l’attention. Ce qui, en
affaires, représente la moitié du
chemin à parcourir.
MYTHE N °
Fais la chasse
aux investisseurs
pour les séduire
Non. Un investisseur – même s’il
t’écoute – ne va pas se laisser
convaincre par une simple idée.
C’est comme ça, et tu ne ferais
sans doute pas autrement. Par
contre, ce sont tes succès qui vont
l’impressionner. Donc : chercher
un investisseur, cela n’a de sens
que si tu as déjà des résultats
concrets à montrer. C’est là qu’il
va t’écouter et vouloir en
apprendre plus sur ton projet…
« NE GARDE
PAS TON IDÉE
POUR TOI,
CONFRONTE-
LA AU VASTE
MONDE : LE
FEEDBACK DES
AUTRES EST
EXTRÊMEMENT
IMPORTANT. »
MYTHE N °
Ne parle à
personne de
ton idée !
Voilà une crainte sans aucun
fondement. Pour deux raisons :
premièrement, il se peut que
ton idée prétendument géniale
ne soit peut-être pas si géniale
que ça. Cela peut faire mal, mais
explique aussi pourquoi il est
absolument nécessaire d’en parler
aux autres. Pour pouvoir tâter
le terrain avant de prendre un
risque et pour adapter éventuellement
son idée. Deuxièmement :
même si ton idée est absolument
géniale, personne ne va se ruer
pour te la voler, la breveter et
devenir ensuite millionnaire. De
mon côté, j’ai toujours eu besoin
des conseils des autres, et c’est
encore le cas aujourd’hui. C’est
une aide énorme et cela va te
mener beaucoup plus loin qu’en
restant seul dans ton coin à bosser
sur ton projet. Parce qu’il y
a des choses que tu ne vois pas
et que les autres voient. Donc :
parle de ton idée, confronte-la
au vaste monde, et observe ce
qui se passe. Le feedback des
autres, même celui d’inconnus,
est précieux.
INNOVATOR 83
MYTHE N °
En affaires,
l’intuition prime
sur la logique
Non ! Les deux sont également
importants. Ce qui compte, c’est
de les écouter au bon moment :
ton intuition te sera beaucoup
plus utile au début de ta carrière,
voire avant même que tu ne te
lances. C’est elle qui va te dire
ce que tu veux vraiment et ce
qui est fait pour toi. Plus tard,
lorsqu’arrivent les dépenses,
les recettes, éventuellement les
pertes, mieux vaut s’en tenir
aux chiffres… Si le bon sens te
susurre par exemple : « Arrête de
suivre ce modèle de management
», fais-le. Même si ton intuition
te dit autre chose.
MYTHE N °
Quitter son boulot
pour se lancer dans
son entreprise
Non ! Ce ne serait pas très malin,
sauf si tu es déjà plein aux as ou
que tu es trop jeune pour avoir
quelque chose à perdre. À tous
les autres, je conseille de rester
sur les deux fronts. De ma propre
expérience, je sais que beaucoup
d’entrepreneurs à succès
ont commencé leur business en
parallèle de leur ancien boulot.
Cela a plein d’avantages et ça
réduit le risque de se casser
la figure. On peut y aller petit
à petit, sans pression. Mon
conseil : ne quitte pas ton job,
mais réserve-toi régulièrement
du temps pour bosser sur ton
projet. Sois prêt à y consacrer des
heures sup, mais ne te mets pas
la pression : cherche, essaie et
travaille… de manière détendue,
car tu risques sinon de faire des
erreurs. Et puis franchement :
on n’a pas besoin de conquérir le
monde du jour au lendemain !
MYTHE N °
L’impatience est
une qualité pour
entreprendre
Si c’est le genre d’impatience
qui va booster ton adrénaline,
alors oui ! J’ai toujours fait
preuve d’impatience et d’empressement,
ce qui est positif,
parce que ça te pousse à faire
les choses. Mais il faut être en
mesure de la gérer soi-même.
Si tu répercutes ton impatience
sur ton associé, ça peut vite
tourner au vinaigre, parce que
tout le monde ne bosse pas de
la même manière… et certaines
personnes pourraient se sentir
dépassées par cette attitude.
« UN VRAI
CHEF DOIT SA-
VOIR METTRE
EN AVANT LES
ATOUTS DE
SES EMPLOYÉS
ET S’EN SER-
VIR DÈS QUE
POSSIBLE. »
BUSINESS-GIRL-POWER
Sophia Amoruso est une entrepreneuse née à San Diego, Californie. Elle
raconte dans son livre #Girlboss l’histoire de sa fulgurante ascension professionnelle
: partie de rien, elle a transformé ce qui était au départ un site
de vente de fringues vintage sur eBay en un empire financier de plusieurs
millions de dollars. Devenue une icône de la mode et un symbole du rêve
américain, elle a aussi inspiré la série Netflix, Girlboss. sophiaamoruso.com
84 INNOVATOR
POUR ALLER PLUS LOIN
Quelques classiques pour jeunes entrepreneurs.
Ambition
Ce livre, écrit par Sandra Le Grand
et Évelyne Platnic-Cohen, défend
l’ambition comme une valeur-phare
en racontant les parcours d’entrepreneurs
à succès.
Start-up attitude
Une lecture incontournable du journaliste
Adrien Tsagliotis qui réunit
des anecdotes de grands CEO autour
de la création de leur start-up pour
réussir dans l’entrepreneuriat.
L’art de la niaque
La psychologue Angela Duckworth
explique, grâce à son expérience dans
l’enseignement et les affaires, pourquoi
la persévérance mène au succès,
et non l’intelligence ou le talent.
MYTHE N °
Une équipe unie est
la base d’une bonne
collaboration
Non. Quand l’harmonie et l’unité
règnent au sein d’une équipe,
c’est que quelque chose ne tourne
pas rond ! L’unité, c’est la stagnation.
La diversité des opinions, les
discussions animées, les disputes
dans le groupe, c’est ça qui fait
évoluer la boîte, qui te pousse à
améliorer ce que tu fais, en fin de
compte. Ce qui est crucial, c’est
que tout ça aboutisse finalement
à un compromis satisfaisant. Je
dis toujours que la vraie qualité
n’est pas possible sans conflit.
MYTHE N °
C’est au chef
d’avoir toujours
le dernier mot
Si tu veux opprimer ton équipe,
installer une mauvaise ambiance
de travail et étouffer les atouts
potentiels de tes employés, alors
oui, c’est ce qu’il faut faire. Plus
sérieusement : on ne peut plus,
de nos jours, diriger une entreprise
comme un dictateur. Ce
qui compte davantage, c’est de
mettre en avant les points forts
de tes collaborateurs, de t’en servir
dès que tu peux, voire aussi de
les laisser prendre des décisions
si tu estimes qu’ils s’y connaissent
mieux que toi. Ce qui est parfois
le cas. Pouvoir l’admettre, en tant
que chef, c’est une grande force,
pour toi et pour ton équipe.
« IL EST
IMPORTANT
D’ÉCHOUER
PARCE QUE
C’EST CE QUI
TE PERMET
D’APPRENDRE.
ON NE TIRE PAS
DE LEÇONS
D’UN SUCCÈS. »
INNOVATOR 85
EN FIN DE COMPTE
CES 3 RÈGLES
VALENT DE L’OR
3. Vérifie bien
le marché avant
de te lancer
1. L’échec est bon si
tu échoues chaque
fois un peu mieux
D’accord à 100 % ! On a tendance
à croire que l’échec est un frein.
Alors qu’il faut au contraire pouvoir
l’envisager et même s’y préparer.
Cela représente souvent
une nouvelle manière de voir les
choses, mais c’est la réalité. Et ce
n’est pas un cliché que de le dire :
ce sont tes défaites et les leçons
que tu pourras en tirer qui te
feront le plus avancer… On ne
tire pas de leçons d’un succès.
2. Les réseaux,
encore et toujours
les réseaux !
Mille fois oui ! Se constituer un
réseau, en toute occasion : en
allant au fitness, au marché, dans
la rue… Pas juste lors d’événements
networking. C’est dans
les endroits les plus improbables
que j’ai fait les rencontres les
plus importantes de ma carrière.
Quelques mots, un tuyau, une
poignée de main, un numéro de
téléphone… Tu ne sais jamais
où tu vas faire la rencontre
qui va te servir plus tard.
Tellement vrai ! C’est la règle
numéro 1 : il faut étudier à fond
le secteur que tu vises, c’est
primordial. Cela commence par
une recherche approfondie sur
le net. Est-ce que ton idée est
complètement nouvelle ou y a-til
déjà d’autres enseignes qui la
proposent ? Si oui, comment s’y
prennent-elles ? Rentre dans leur
univers, imagine que tu es un de
leurs clients : qu’est-ce qui te plaît
dans leur manière de faire, et
qu’est-ce qui te déplaît ? Qu’estce
qui manque, d’après toi ? Si
tu étais à la tête de leur boîte,
qu’est-ce que tu changerais ?
Quels sont leurs points forts ?
Et leurs points faibles ? Comment
y remédier ? Te poser ce genre
de questions est très important,
parce que c’est ce qui permet d’aiguiser
ton regard sur l’essentiel,
c’est-à-dire ton business à toi.
À VOIR SUR NETFLIX
Personnages inspirants, conseils en or…
Voici trois séries pour donner envie de se lancer
Inside Bill’s Brain –
Decoding Bill Gates
Incursion dans l’univers du fondateur
de Microsoft. Par David Guggenheim
(Une vérité qui dérange).
The Mind, Explained
Comment fonctionne le cerveau humain
? Comment l’utiliser pour mieux
vivre et le développer ? Ce documentaire
nous livre quelques réponses.
Girlboss
S’inspirant de l’histoire de Sophia
Amoruso, la série suit le parcours
d’une jeune Cendrillon devenue reine
de la mode. Drôle et décapant !
NETFLIX
86 INNOVATOR
COURIR POUR CEUX QUI NE LE PEUVENT PAS.
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MAINTENANT
9 MAI 2021 – 13 HEURES
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INNOVATOR
GUIDE
Infos et événements
Smart fashion :
Alpha Tauri tient chaud //
Save the Date : rendezvous
avec l’innovation //
Red Bull Basement :
les étudiants changent
le monde //
Point de vue :
le facteur humain à l’ère
du numérique //
Coup de projecteur :
le laboratoire du bout
du monde //
INNOVATOR 89
ESSAYER
Pure
performance
La Heatable
Capsule Collection
combine un design
sobre avec une
haute performance
technologique.
LA MODE FAIT
SON CHAUD
Oubliez le duvet ! Les meilleures
solutions anti-froid nous viennent
désormais de la smart fashion :
démonstration avec la nouvelle
Heatable Capsule Collection
d’AlphaTauri et ses vestes chauffantes
par batterie rechargeable.
Le monde est de plus en
plus « smart », et cette
hyperconnectivité nous
amène à redécouvrir les
objets de notre quotidien,
à les enrichir, à leur
donner de toutes nouvelles
fonctions. L’un des derniers
terrains d’expérimentation
sur ce que la technologie peut
nous apporter, c’est le secteur
de la mode, ou plutôt ce
qu’on appelle aujourd’hui la
« smart fashion », la mode
connectée. C’est ainsi qu’on
trouve désormais sur le
marché des vêtements qui
changent de couleur selon
notre humeur, des ceintures
de gaming qui vibrent en
fonction de l’action des
joueurs, et des bikinis qui
nous avertissent quand nous
restons trop longtemps au
soleil.
Cet esprit pionnier a réuni
la marque AlphaTauri, les
télécoms allemands et le
fabricant suisse Schöller
Textil autour d’un projet innovant
: créer une collection de
vêtements chauffants aussi
efficaces que pratiques en
combinant des textiles ultra
performants, la technologie
numérique et des fonctions
intelligentes.
Le résultat : la Heatable
Capsule Collection et ses
vestes et gilets chauffants que
l’on peut allumer par simple
pression ou depuis une appli
smartphone qui permet de
régler le niveau de chauffe
du vêtement. Un capteur
à l’intérieur de la veste permet
de contrôler et d’adapter
la chaleur générée au niveau
des poches et du bas du dos
(voir ci-contre). Petit plus : la
batterie utilisée pour chauffer
la veste peut aussi servir à
recharger votre smartphone.
Avec cette nouvelle collection,
AlphaTauri veut aller
plus loin dans l’aventure de
la « smart fashion ». Mais on
vous en dira plus le moment
venu. Petit indice : cette mode
sera résolument intelligente
et connectée.
Vestes et gilets pour hommes
et femmes, dans les couleurs
gris perle et bleu navy ;
alphatauri.com
90 INNOVATOR
MODE
HOT STUFF
Matières haute performance,
fonctionnalités pratiques
et innovantes : voici les
ingrédients de ces vêtements
chauffants nouvelle
génération.
La batterie
Se place dans une petite poche en
bas du dos pour alimenter les éléments
chauffants de la veste. Avec
son poids-plume (175 grammes),
elle sait se faire discrète… et polyvalente,
puisqu’on peut aussi l’utiliser
pour recharger son smartphone.
La commande
Fonctionne depuis une appli smartphone
spécialement créée pour la
collection, ou en pressant un simple
bouton à l’intérieur de la veste.
Au choix : deux niveaux de chauffe,
pour les poches comme pour le
bas du dos.
La matière
Baptisée « e-softshell », elle combine
les performances d’isolation et d’imperméabilité
du tissu softshell à
l’utilisation de fils conducteurs de
chaleur, utilisés pour la doublure.
D’autres matières spéciales comme
le corkshell offrent une isolation
optimale.
ALPHA TAURI
INNOVATOR 91
À FAIRE
ENVIE D’INNOVATION ?
Tu es au bon endroit ! Voici une sélection des meilleurs événements
qui se tiendront cette année, en ligne ou en vrai – selon l’évolution
de la situation.
Le phénomène TikTok s’invite
à la table : Onkel Banjou (dr.), star sur
TikTok et Adil Sbai, fondateur de we-
Create et expert TikTok. Discussion
animée par Jennifer Sarah Boone.
7et 8 septembre
dmexco
Comment se servir des réseaux sociaux pour gagner des
fans ? Une question centrale de cette conférence internationale
sur le marketing. Deux jours pendant lesquels
on parlera d’apprentissage automatique, de contenus
audio et d’influenceurs TikTok. Avec des intervenants de
premier choix : David Fischer, responsable du marketing
chez Facebook, Alicia Tillmann, son homologue pour
SAP et Alexander Birken, PDG de Otto Group, nous parleront
des stratégies et des technologies qu’ils utilisent
ainsi que des leçons que chacun peut en tirer pour faire
du marketing en ligne. La dmexco 2021 est prévue en
mode hybride : sur place au parc des expos de Cologne
et en ligne, pour les spectateurs du monde entier.
Parc des expositions de Cologne, dmexco.de
KÖLNMESSE GMBH/MAX HAMPEL, ROMINA AMATO/RED BULL CONTENT POOL, ALEX FETTICH
92 INNOVATOR
SAVE THE DATE
1 er
mars
Exposition
« Altitude »
Une exposition d’un genre
particulier, que l’on peut admirer
au Red Bull Media World : Altitude
– Höchstleistung am Berg (trad.
Altitude – Très haute performance
en montagne) offrira aux visiteurs
l’occasion de survoler en virtuel
l’Engadine avec l’appareil d’entraînement
Icaros, de se mesurer au
sextuple champion des Red Bull
X-Alps Christian Maurer avec un
simulateur de parapente ou de
gravir l’Everest. Red Bull Media World ;
Musée suisse des transports, Lucerne ;
redbull.com/altitude
Maniable et réactif,
le simulateur de
vol Icaros va vous
faire planer.
16
et 17 septembre
Impact Festival
Pour sauver la planète, il va falloir unir nos
forces. C’est de ce constat qu’est né Impact
Festival, dont la mission est de mettre en réseau
celles et ceux qui veulent changer le
monde, notamment les jeunes start-ups aux
concepts innovants en recherche d’investisseurs
ou de contacts pour se faire connaître ;
mais aussi les grands groupes en manque de
concepts pour entamer leur transition dans
le développement durable.
À Francfort et en ligne ; impact-festival.earth
19
avril
Virtual Pitching
Workshop
Comment convaincre un investisseur en quelques
lignes ou quelques minutes ? L’art subtil du pitch
est un tour de force et un passage obligé pour tous
les jeunes entrepreneurs à la recherche d’investisseurs
ou de clients. Invitant des experts à dispenser
leurs conseils, cet atelier-événement est animé
par Catherine Riesen, spécialiste du monde des
médias. Participation gratuite pour les start-ups
de la Start-up Academy, 120 CHF pour les autres.
Startup Academy Bâle et en ligne ; startup-academy.ch
au 28 mai
FitTech Summit
Le monde du fitness ne se résume
plus aujourd’hui aux salles de sport
classiques. Cette série de conférences
offre un tour d’horizon de
toutes les ramifications de ce secteur,
des montres connectées et autres
accessoires aux cours en ligne, en
passant par les nouvelles technologies.
Le FitTech Summit fera la part
belle aux nouveautés fitness et à la
façon dont les studios s’en servent
pour emballer leur public.
Munich et en ligne ;
25fittechsummit.com
INNOVATOR 93
PARTICIPER RED BULL BASEMENT
Les animateurs Daniel
Cronin et Caroline de
Moraes remettant
virtuellement le trophée
à l’équipe Lava-Aqua.
Lava Aqua X
LE LAVE-LINGE
MALIN
Red Bull Basement
L’ACCÉLÉRATEUR
D’IDÉES
Vous êtes étudiant et avez une
idée susceptible de contribuer
à un monde meilleur ? Alors
vous êtes au bon endroit.
Àla recherche d’idées innovantes
! Tel est l’appel que
lance, depuis 2015, la plateforme
Red Bull Basement
en invitant les étudiants
du monde entier à présenter
leurs solutions aux problèmes
contemporains. L’an dernier, ils
étaient 3 800 au total à relever
le défi. Un jury a invité les 38
meilleurs inventeurs à participer
aux quatre jours du Red Bull
Basement Global Workshop à
Toronto (Canada) en décembre,
une présence virtuelle cette année.
Joanna Power et Paramveer
Bhachu, deux jeunes apprentis
ingénieurs londoniens, ont remporté
le concours grâce à leur
lave-linge qui recycle l’eau de la
douche (voir encadré ci-contre).
Un succès au Red Bull Basement
Global Workshop est synonyme
pour le duo d’une commercialisation
accélérée de leur
invention.
Par ici, la boîte à idées
Un concours s’achève, un autre
commence : Red Bull Basement
lance son édition 2021. Vous
avez une idée et vous souhaitez
la concrétiser ? Il vous suffit pour
cela de réaliser une vidéo d’une
minute maximum, en présentant
votre invention en détail, et de la
télécharger sur le site Red Bull
Basement au plus tard d’ici cet
automne. Informations et délais
d’inscription sur :
redbullbasement.com
Lauréats du Red Bull Basement
Global Meeting, Joanna Power et
Paramveer Bhachu inventent un
lave-linge qui recycle l’eau de la
douche tout en réduisant la
consommation d’électricité.
Durable
L’eau est récupérée du siphon de la
douche, filtrée et réutilisée par le
Lava Aqua X dès le lavage suivant.
Pratique
Peu volumineux et d’une capacité
de lavage de 2,5 kg, le lave-linge
trouve aisément sa place dans
une chambre d’étudiant.
Efficace
Le temps de lavage et la consommation
d’électricité sont réduits
grâce à un tambour sphérique plus
efficace qu’un tambour cylindrique
classique.
PHILIPP CARL RIEDL/RED BULL CONTENT POOL, MARK ROE/RED BULL CONTENT POOL GÜNTHER KRALICEK
94 INNOVATOR
DES AIIILES
POUR L’ÉTÉ.
AU GOÛT DE FRUIT DU DRAGON.
NOUVEAU
STIMULE LE CORPS ET L’ESPRIT.
CHRONIQUE
DES SURPRISES
DURABLES
Auteur de best-sellers, l’Allemand Christoph
Koch nous révèle les liens passionnants et
étonnants que nous pouvons faire tout
en améliorant le monde.
Christoph
Koch
46 ans, collabore avec
des publications telles
que Die Zeit ou Geo.
Son ouvrage Ich bin
dann mal offline (trad.
Je me déconnecte)
sur le renoncement
au numérique est
devenu un best-seller
an Allemagne.
L
es plans sont inutiles, mais
la planification est irremplaçable.
» Cette phrase est généralement
attribuée à l’ancien
président américain Dwight
D. Eisenhower. Bien qu’elle
soit sûrement plus ancienne,
elle est toujours d’actualité. Quiconque
fait des plans, échafaude des scénarios,
bref pense en termes de possibilités, doit
se pencher sur l’avenir et ses avenues possibles.
Certains développements semblent
certains, d’autres plus improbables. Mais
même ceux-là peuvent nous apprendre
quelque chose, ne serait-ce que parce que
des liens auxquels on n’aurait peut-être
pas pensé auparavant peuvent apparaître.
Ainsi, tout changement provoque des
conséquences additionnelles et entraîne
d’autres chamboulements. J’ai rassemblé
ici quelques-unes des répercussions les
plus surprenantes qui pourraient survenir
suite à de grands changements en matière
de durabilité.
1. Plus de voitures électriques donc
moins de fumeurs
Parce que nous passons à la voiture électrique,
la demande mondiale en essence
diminue, ce qui est logique. Mais on peut
supposer que la consommation de cigarettes
diminuera également une fois que
tout le monde aura opté pour la voiture
électrique. Après tout, près de la moitié
des cigarettes aux États-Unis sont actuellement
vendues dans les stations-service
tandis qu’en Allemagne, ces dernières réalisent
62 % de leur chiffre d’affaire avec
les produits liés au tabac. Des études
montrent que l’offre pourrait bien déterminer
la demande et que les gens achètent
moins de cigarettes s’ils en ont moins souvent
l’occasion. Et comme la voiture électrique
permet également de se passer de
station- service, on n’a donc plus le rayon
des cigarettes devant les yeux : la voiture
fait le plein là où elle se gare, c’est-à-dire
principalement à la maison ou dans le
garage du bureau.
2. Moins d’argent liquide donc moins
d’émissions
Les Allemands y sont toujours fermement
opposés (84 % d’entre eux pour être
exact), mais si l’argent liquide devait un
jour être supprimé, cela aurait également
un impact positif sur l’environnement :
tout d’abord, parce que le métal de
l’argent liquide pourrait être réutilisé
(un broyeur de pièces de monnaie de type
Decoiner peut traiter jusqu’à cinq tonnes
par heure). Et deuxièmement, les émissions
des transporteurs de fonds seraient
éliminées : ils émettent des niveaux particulièrement
élevés de gaz d’échappement
parce que la petite monnaie est lourde.
3. Moins de viande donc l’équivalent
d’un continent de plus
Nous savons tous que si personne ne mangeait
de viande, le climat s’en porterait
mieux. Ainsi, une famille de quatre personnes
aux États-Unis produit plus de gaz
à effet de serre par sa consommation de
viande qu’avec deux voitures. De plus, la
planète gagnerait une surface utilisable de
la taille du continent africain. Cela correspond
à la superficie requise pour la culture
du fourrage des animaux d’élevage !
4. Moins vite sur l’autoroute mais
à peine moins de bruit
Si l’Allemagne (la seule nation occidentale
industrialisée sans limitation générale
de vitesse sur les autoroutes) réduisait la
vitesse autorisée à 120 km/h, la plupart
des études démontrent qu’il y aurait
moins de morts et de blessés. Il y aurait
aussi environ trois millions de tonnes
de CO ²
de moins. Mais, étonnamment,
le niveau sonore ne changerait guère :
l’Agence fédérale de l’environnement
a établi que, les jours de la semaine,
URBAN ZUNTEL
96 INNOVATOR
POINT DE VUE
OURS
« LES PLANS SONT
INUTILES, MAIS LA
PLANIFICATION EST
IRREMPLAÇABLE. »
une limitation de vitesse sur l’autoroute
réduirait le bruit de la circulation d’un
demi-décibel. À titre de comparaison,
l’asphalte antibruit réduit le bruit d’environ
trois décibels.
5. Moins de subventions donc
une meilleure protection de
l’environnement
Si on éliminait les subventions au transport
privé, la prime à la voiture électrique
disparaîtrait, mais l’environnement en
bénéficierait néanmoins : le Fonds monétaire
international (FMI) a calculé que les
dommages mondiaux causés par les subventions
aux carburants s’élèvent à près
de 4 400 milliards d’euros par an. Ce qui
représente six pour cent du produit intérieur
brut mondial et presque autant que
les dépenses mondiales en soins de santé.
Si les gouvernements cessaient de subventionner
le carburant, des moyens de transport
plus écologiques deviendraient
plus attrayants, comme le vélo au lieu
du cyclomoteur ou le métro au lieu de la
voiture. Le prix du carburant est souvent
subventionné au motif que les personnes
à faibles revenus en profitent. En réalité,
ce sont souvent les riches qui en bénéficient
: dans un marché émergent typique,
40 % de cette aide va au cinquième des
ménages les plus riches. Seuls 7 % vont
au cinquième le plus pauvre.
6. Moins de personnes donc plus
d’éléphants et moins de mouches
Si l’humanité disparaissait, la population
d’éléphants serait multipliée par vingt en
cent ans car, bien entendu, le braconnage
et le commerce de l’ivoire cesseraient.
Le nombre d’oiseaux augmenterait aussi
considérablement : rien qu’aux États-Unis,
on estime que 80 millions d’oiseaux
meurent chaque année à cause des voitures
et un autre milliard à cause des pesticides
et des lignes électriques. Cependant,
les rats, les mouches domestiques
ou les poux, organismes qui se sont fortement
adaptés à l’homme, auraient plus de
mal et, sans nous, disparaîtraient presque
complètement. christoph-koch.net
Direction générale The Red Bulletin
Alexander Macheck (Dir.), Sara Car-Varming
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Christian Bürgi (Suisse romande),
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Allemagne, ISSN 2079-4258
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Alfred Vrej Minassian, Franz Fellner,
Thomas Gubier, Daniela Güpner,
Wolfgang Kröll, Gabriele Matijevic-Beisteiner,
Nicole Okasek-Lang, Britta Pucher, Jennifer
Sabejew, Johannes Wahrmann-Schär,
Ellen Wittmann-Sochor, Ute Wolker,
Christian Wörndle, Sabine Zölß
Impression
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Pułtuska 120, 07-200 Wyszków, Polen
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Media Sales & Partnerships
Thomas Hutterer (dir.),
Alfred Vrej Minassian, Franz Fellner,
Thomas Gubier, Daniela Güpner,
Wolfgang Kröll, Gabriele Matijevic-Beisteiner,
Nicole Okasek-Lang, Britta Pucher, Jennifer
Sabejew, Johannes Wahrmann-Schär,
Ellen Wittmann-Sochor, Ute Wolker,
Christian Wörndle, Sabine Zölß;
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INNOVATOR 97
COUP DE PROJECTEUR
Mesurer le rayonnement
cosmique et retracer
son origine, telle est la
mission de l’observatoire
IceCube au pôle Sud.
Enquête au Sud
D’où viennent les neutrinos ? Voilà la
question à laquelle cette base de recherche
située en Antarctique depuis
2010 tente de répondre. En 2017, les
chercheurs ont localisé, à l’aide de télescopes
particulièrement puissants,
un trou noir à des milliards d’annéeslumière,
à l’origine du rayonnement des
particules élémentaires. « Cela nous a
permis d’acquérir des connaissances
fondamentales sur l’origine des rayons
cosmiques, déclare Francis Halzen,
chercheur à IceCube, et de disposer
d’une première base pour comprendre
l’origine de l’univers. » Actuellement,
l’observatoire IceCube est en cours de
modernisation. Il disposera de plus de
détecteurs afin d’explorer les mystères
de l’espace de manière encore plus
perçante à l’avenir. icecube.wisc.edu
CETTE BASE A POUR
BUT DE DÉVOILER
LES SECRETS
DE L’UNIVERS
SVEN LIDSTROM/ICECUBE/NATIONAL SCIENCE FOUNDATION
98 INNOVATOR
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