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Boxoffice Pro n°447 – 28 juin 2023

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OUTRE-MER<br />

Le Groupe Ethève à<br />

la Réunion s’oppose<br />

à une loi qui aurait<br />

des « conséquences<br />

catastrophiques » sur<br />

l’exploitation<br />

Nous avons une problématique<br />

de faible rentabilité des cinémas<br />

en Outre-mer<br />

ALEXANDRA ELIZÉ, DIRECTRICE GÉNÉRALE DU CIRCUIT ELIZÉ ET<br />

PRÉSIDENTE DU SECOM*<br />

Les distributeurs de la FNEF, du Dire et du SDI, ne<br />

sont pas les seuls à contester la PPL sur le<br />

plafonnement du taux de location de films en<br />

Outre-mer [voir <strong>Boxoffice</strong> <strong>Pro</strong> n°446], qui doit<br />

désormais passer devant l’Assemblée nationale. Le<br />

groupe Ethève, opérateur majeur de La Réunion*<br />

<strong>–</strong> son Ciné Grand Sud à Pierrefonds était le 2 e<br />

cinéma français en termes d'entrées début mai<br />

<strong>–</strong> mais qui n’est pas membre du Secom, a exprimé<br />

« sa vive et ferme opposition à la proposition de loi »,<br />

qui pourrait entraîner le retrait des territoires<br />

ultramarins des plans de sortie des distributeurs.<br />

Selon le circuit Ethève, ce projet de loi « n’a pour but<br />

que de permettre aux membres du Secom de<br />

conserver ou rétablir leur monopole sur l'activité de<br />

distribution de films dans nos territoires ultramarins »<br />

et « de maintenir "de force" ces territoires dans un<br />

schéma de sous-distribution totalement opaque et<br />

inadapté ».<br />

Evelyne Ethève, responsable juridique du groupe,<br />

explique qu’il a « toujours été favorable à<br />

l’application des mêmes règles qu’en Métropole et en<br />

toute transparence ». Soulignant que les situations<br />

sont très disparates entre les territoires ultramarins,<br />

elle précise qu’à « La Réunion, même en sous-distribution,<br />

nous avions des taux à 45 % sans que cela ne<br />

nous fragilise économiquement et nous empêche<br />

d‘investir. Nous avons anticipé le passage en direct<br />

avec les distributeurs nationaux, en pratiquant des<br />

taux dégressifs, et avons avec eux des relations<br />

apaisées qui ont notamment permis de développer<br />

l’offre art et essai ». Or le groupe redoute qu’avec un<br />

taux fixé à 35 %, les salles et les spectateurs<br />

d’Outre-mer soient privées d'un accès aux films en<br />

sortie nationale. Et pour Evelyne Ethève,<br />

« l'intervention du législateur n’était pas nécessaire<br />

pour ce qui doit relever de la négociation entre<br />

exploitants et distributeurs ».<br />

C.V.<br />

* Le groupe Ethève exploite deux multiplexes (Ciné Cambaie de Saint-Paul et<br />

) et le Ciné Lacaze, première salle classée art et essai dans l’Océan Indien, tout<br />

en étant l’un des sous-distributeurs de la région via sa société Maurefilms.<br />

©Johan Damien<br />

Ciné Grand Sud de Pierrefonds Saint-Pierre<br />

Le 15 <strong>juin</strong>, alors que la proposition de loi visant<br />

à plafonner le taux de location des films à 35 %<br />

en Outre-mer était votée par le Sénat,<br />

Alexandra Elizé défendait les spécificités de<br />

l'exploitation ultramarine, notamment aux<br />

Antilles-Guyane, dans l’Émission <strong>Boxoffice</strong> <strong>Pro</strong>.<br />

Le coût de l'exploitation en Outre-mer commence par<br />

celui de la construction alourdi par le transport des<br />

matériaux : « Nos charpentes métalliques ne peuvent pas<br />

être acheminées en camion jusqu’à chez nous ! ». À cela<br />

s’ajoutent des normes anticycloniques et parasismiques,<br />

d’autant plus onéreuses à appliquer dans les grands<br />

volumes bâtimentaires comme un cinéma. Ainsi, selon<br />

la dirigeante, le coût de construction par fauteuil, « de<br />

4 000 € à 5000 € en Métropole, monte à 11 000 € à 12 000 €<br />

chez nous ».<br />

Outre les investissements de départ, le quotidien de<br />

l’exploitation « n’a rien à voir avec la Métropole », notamment<br />

sur des territoires « parfois un peu compliqués où un<br />

lieu de loisir comme un cinéma doit être sécurisé ». Elizé<br />

dévolue donc 10 % de son chiffre d’affaires au poste<br />

sécurité (« ce qui n'existe quasiment dans aucun autre<br />

cinéma de France »), et doit par ailleurs renforcer les<br />

compétences de ses collaborateurs, pour pouvoir gérer<br />

les problèmes techniques, en raison du décalage horaire<br />

qui les prive une partie de la journée des hotlines basées<br />

en Métropole.<br />

L'éloignement géographique a toujours été la base de la<br />

“différence” des territoires d’Outre-mer, où nombre<br />

d’exploitants endossent aussi des fonctions de sousdistribution.<br />

Et s’il n’y a plus de copies 35 mm à acheminer<br />

par bateau <strong>–</strong> puis après exploitation à détruire sur place<br />

en présence d’huissiers <strong>–</strong>, restent les missions promotionnelles,<br />

notamment à travers une fine prise en main<br />

de la structuration locale des médias [de fait, Elizé possède<br />

aussi le groupe Radio Caraïbes International ainsi que<br />

la Régie Caraïbes, ndlr.]. Reste que, même dans le cas<br />

où le distributeur national garde ses prérogatives et assure<br />

lui-même ses missions en Outre-mer, « avec nos investissements<br />

et nos structures de charge beaucoup plus élevés,<br />

nous n’arrivons pas à sortir du cadre des 35 % » dans le<br />

partage des recettes. « On pourrait rétorquer que c'est<br />

nous qui le disons et que c'est pour gagner plus, mais<br />

même l'Inspection des Finances, qui a fait une<br />

étude sur nos exploitations en 2018 et observé<br />

notre problématique de faible rentabilité,<br />

recommandait ce plafonnement du taux. »<br />

Après une crise sanitaire qui a été « plus longue et douloureuse<br />

», avec quasi deux années de fermeture pour les<br />

cinémas, la reprise Outre-mer suit un autre rythme. « En<br />

2021, quand salles de Métropole accusaient un retard de<br />

30 % par rapport à 2019, nous étions- 80 %. Nous avons<br />

donc eu une année 2021 pire que 2020. » Heureusement<br />

aujourd’hui, le décalage avec l’Hexagone s’estompe et la<br />

tendance de <strong>2023</strong> est « plutôt bonne ». De quoi envisager<br />

avec plus de sérénité l’avenir pour le circuit Elizé, dont<br />

les projets de développement, « dans un tout petit marché »,<br />

concernent plus la diversification d’activités. « Mais nous<br />

souhaitons construire un second cinéma en Martinique, de<br />

5 salles, à Rivière-Salée. Nous avons aussi un projet de 8<br />

salles à Baie-Mahault en Guadeloupe, ainsi qu’un projet<br />

de rénovation de notre petit cinéma D'Arbaud à Basse-Terre.<br />

Si l’expérience est concluante, nous ferons la même chose en<br />

Guyane à Kourou ».<br />

* Syndicat des exploitants de cinémas d’Outre-mer<br />

Ayşegül Algan<br />

Emission à voir ou<br />

revoir sur notre chaîne<br />

YouTube<br />

©Groupe Elizé<br />

36 N°447 / <strong>28</strong> <strong>juin</strong> <strong>2023</strong>

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