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l'entièreté du document (pdf) - Sophia

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Lichaam en repro<strong>du</strong>ctie / Les corps de la repro<strong>du</strong>ction<br />

nisme biologique et liberté. Cette liberté est précisément de plus en plus capable<br />

de modifier ou d’altérer les déterminismes qui nous constituent, mais<br />

elle doit être responsable de l’intérêt <strong>du</strong> tiers que sera l’enfant. L’essence de<br />

la nature humaine est perçue là encore dans une perspective fixiste qui tend<br />

à faire croire à la naturalité de la morale, autrement dit à la légitimité <strong>du</strong> droit dit<br />

naturel. Habermas, dans « L’avenir de la nature humaine », ne critique pas véritablement<br />

« (…) l’hypothèse selon laquelle la technicisation de la « nature interne » représenterait<br />

quelque chose comme une transgression des limites naturelles. »<br />

(Habermas 2002).<br />

Nous avons vu combien la question de la place de l’embryon iconisé permet<br />

d’en faire un membre d’une cité « méta » en voulant révéler quelque<br />

chose qui la précède. En ce sens, il devient une question de bioéthique, de<br />

biodroit, et de biopolitique féministe, en ce qu’il crée un pseudo conflit<br />

d’intérêts entre droits repro<strong>du</strong>ctifs des femmes et droit de la naissance des<br />

enfants de demain. Il semble dès lors que ni le concept d’embryon ni le<br />

concept de personne, auquel on tente de l’associer au nom de la cohérence<br />

des droits de l’homme, ne peuvent être décidés sans que soient éclaircis les<br />

conflits d’intérêts qui visent, jusqu’à l’absurde, à sacraliser l’embryon hors <strong>du</strong><br />

ventre des femmes. J’ai tenté de souligner le déficit démocratique <strong>du</strong> discours<br />

bioéthique, s’il n’est pensé que comme un lieu de confrontation de la complexité<br />

des enjeux sociaux suscités par les avancées biomédicales. L’argument<br />

récurrent de la pente glissante ne fait que signaler un malaise social face à<br />

l’écroulement des représentations des femmes comme définies par leur utérus<br />

ou leurs ovaires qui en période de post-repro<strong>du</strong>ction sont censées devoir<br />

se réinventer une féminitude. L’ectogenèse permettra-t-elle aux femmes de se<br />

penser autrement que dans leurs destins de repro<strong>du</strong>ctrices ? Leur permettraitelle<br />

aussi de voir cette détermination biologique de la grossesse non seulement<br />

comme un destin biologique mais comme un pouvoir qu’elles auraient<br />

la libre responsabilité de choisir ? Actuellement, l’enjeu de la définition <strong>du</strong><br />

statut de l’embryon, est clairement un enjeu de pouvoir pour les femmes. Sa<br />

définition ne peut être tranchée par le seul jeu de pouvoirs entre scientistes<br />

et essentialistes dans une cité pluraliste.<br />

Le catastrophisme, ven<strong>du</strong> comme l’ultime vertu morale, ne peut nous permettre<br />

de penser l’ampleur de l’enjeu <strong>du</strong> désir d’ectogenèse sans le remplacer<br />

dans l’histoire de la repro<strong>du</strong>ction humaine de manière anthropologique<br />

comme l’a fait récemment l’anthropologue Maurice Godelier dans les « Métamorphoses<br />

de la parenté » (Godelier 2004). L’argument présentant l’utérus<br />

artificiel comme une machine à libérer les femmes nous semble trop fort et<br />

trop faible à la fois... L’incertitude est certes inhérente à la démarche scientifique<br />

et les arguments ne sont pas encore assez clairement posés pour permettre<br />

aux femmes de se prononcer sur l’impact d’une telle machine sur leurs<br />

fonctions sociales encore souvent associées à leur fonction biologique. Mais<br />

comment passer de l’expérience de pensée à l’expérience sociale et pourquoi<br />

26 sophia [ colloquium 2005 | colloque 2005 ]

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